ugo zanetti, matarieh, la sainte famille et les baumiers, dans analecta bollandiana, 111 (1993), p....

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A]\ALECTA BOLLAl\DIANA REVUE CRITIQUE D'TtrAGIOGRAPHIE PUBLIEE PAR LA SoCIÉTÉ ons BoLLAI\DISTES TOME I l1 (1e93) lasc. t-2 EXTRAIT SocrÉrÉ nBs Bor,r,eNDrsrEs 24, nour.nveno SlrNr-Mrcnnr, B 1O4O BRUXELLES Rrvur tnruæsTRIELLE sunvrrrroNwÉE pAR LA FoNoertoN 'NIVERSITATRE

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A]\ALECTABOLLAl\DIANA

REVUE CRITIQUE D'TtrAGIOGRAPHIE

PUBLIEE PAR LA

SoCIÉTÉ ons BoLLAI\DISTES

TOME I l1 (1e93)lasc. t-2

EXTRAIT

SocrÉrÉ nBs Bor,r,eNDrsrEs

24, nour.nveno SlrNr-Mrcnnr,

B 1O4O BRUXELLES

Rrvur tnruæsTRIELLE sunvrrrroNwÉE pAR LA FoNoertoN 'NIVERSITATRE

UgO ZANETTI

MATARIEII, LA SAINTE FAMILLE ET LES BAUMIERS-

L'évangile de saint Matthieu nous rapporte que, devant la menaceque le roi Hérodet faisait courir à I'enfant Jésus, Joseph, averti parI'ange, prit l'enfant et sa mère, de nuit, et monta en Égypte (Mt 2,14),où <<la Sainte Famille> - pour employer I'expression devenue cou-rante - passa ut certain temps, jusqu'à ce que la mort d'Hérodevienne mettre un terme au danger (Mt2,l9-2ï. Cet épisode, on s'endoute, a laissé des taces importantes dans la liturgie et les traditions del'Église Copte, dont la terre ancestrale se voit ainsi investie deI'honneur d'avoir accueilli le Seigneur de son vivant. Il n'entre pasdans notre propos de discuter ici des événements rapportés par lesÉvangiles de I'Enfancez, mais plutôt de donner un aperçu sur une desraditions qui y est liée.

Ces traditions, en effet, sont assez nombreuses, et on peut entrouver une énumération dans deux articles parus récemment dans laCoptic Encyclopedia (C4)sirappelons simplement que l'Église Coptefête chaque année, à la daæ du 24 Pachôn (en arabe: Ba5ans), jour

correspondant au 19 mai julien, l'Entrée du Seigneur en terred'Égypte. L'une de ces traditions rapporte que la Sainte Famille fithalæ près d'un puits où la Vierge put laver les vêtements de I'Enfant-Jésus et aux environs duquel se trouvait un sycomore qui voulut bien

*Cet article tire son origine dbne recherche du P. Raymond de Fenoyl, qui y acontribué sur plusieurs points. N'était sa modestie, son nom aurait pu figurer à côté dunôtre comme auteur de I'article. - Le Prof. Chr. Crxxuvsn (Univ, Cath. de Lille) a bienvoulu relire une panie de cet article et nous fournir dbtiles suggestions; de même, leJardin Botanique National de Belgique, en la personne de MM. P. Brups et R. Clrnvssr,nous est venu en aide pour identilier le baumier et ses particularités botaniques. Qu'ils ensoient vivement remerciés. lLes Abrévlatlor,r figurent aux p.66-681

lOn sait que cet Hérode ne pouvait être qullérode le Grand (mort en I'an 4 avantl'ère chrétienne), ce qui oblige les exégèæs à placer la naissance de Jésus{hrist avant ledébutdel'èrechrétienne. Cî.DictionnalredelaBible. Supplêment,IV,970-971.

2Discussion qui relève des études exégétiques, lesquelles ne sont pas I'objet denotre revue. Les lecteurs intéressés à cet aspect de la question peuvent se reporter parexemple à Raymond E, BRowN, S.S., frrc Blrth of the Messlah, New York, 1977,p.203-204 (commentaire à Mt 2,14) ou à René LrunrxrtN, rcr Évangilcs dc t'Enfance duC hrist, Parig, 1982, p. 437 440.

3Respectivement Gnrcorros, Fligftl, et VIruo, Pllgrlmagesl ce dernier article re-prend tous les lieux de pèlerinage, y compris donc ceux qui sont liés au souvenir de laSainte Famille: il y est question de Malarlyya avx col, 1972-1913,

Analecta Bollandiana, I I I (1993), p. 2l-68

a---

22 U. ZANETTI

les abriter; à cet endroit poussait aussi le baumier - cet arbre dont la

sève constitu e le baume,un parfum précieux' qui ne se trouve plus de

nos jours que dans la péninsule arabique' semble-t-il+ -' et cette

planiation fut, pendant àes siècles, le lieu d'où provenait le précieux

ia.tum que le rultan d'Égypte, après s'en être assuré le monopole' dis-

triUuait uu* p.r*onnalités-auxquelles il voulait marquer sa faveur' Ce

lieu, nommt Mapriyya selon la prononciation courante en Egypte

(mais généralemént éint tutatarieh en français), est attesté depuis pas

mal de siècles dans la littérature arabe, chrétienne ou nons' et il a été

visité par de nombreux pèlerins, occidentaux et autres' au cours du

*."ond^millénaire.Aujourd'hui,ledéveloppementurbainl'apratique-ment englobé dans Le (grand) Caire, mais on y trouve encore une

petite chapelle, consacrée au début de ce siècle' où les catholiques

âÉgvpt" organisentun pèlerinage le 8 décembre de chaque année6'

c,est d,ailleurs la cànstruction de cette chapelle qui nous a valu la

publication la plus complète à propos de.Mapriyya; en eflel l:1*

iullien, jésuiti français attaché à la mission d'Égypte et auteur de

nombreux livres et articlesT, rédigea une brochure intitulée L'Arbre de

aNous reparlerons de cet arbrisseau dans l'Appendica (p' 59 ss')'

5cf 'J.Mlspsro_G.Ngt,Matériauxpourserviràlagéographie'del 'Egypte. 'Pte-

mière série (= MIFAO ,36), Le iaire, 1g1g: p. 208-209, s.v. El-Matarieh, ainsi que AtrrÉ-

itiiii,c:eàerophie, p.2i6. un dossier sur ce lieu' qui peut rendre des-services' est

réuni dans Truu s.v. ,f^àt*tii <i, t6l3-1620). - Cl tieu est enregistré dans E/ 2, I,

iù;.;;", le vocable ae,Àyn'Snans (ou'Ayn Jarzs, nom arabe d'Héliopolis, dont fait

partie MaPriyYa).6Lrsors, Gonzales, p, 122, note 222, tappelle,l'état actuel des lieux' et cite notâm-

ment les décrets officiels quilrotègent, aepuii te6O' <l'arbre de la Vierge>' - Nous ne

citerons ici que pour *eriolriiN]p. prnïrs, Tô æcp<i tilv 'Hl.roôrol,w (Mcrrcrpicv)

ôévôpov tfiç llcrvcfcrç, Alexandrie' 1903, ?0 p' (en grec); O' F' A' METNARDUs'Th-e Holy

Family in Egypt,LeC"ir., iîào,cs p. lreprenant la pùblication du même In the steps of

the Holy Famil! from Bethlehem' o Ûpper-Egypt,Le caire, 1963) ainsi quero., ch.ristian';;;;;;*tu*;ia

uoa"rn',-io ed., Le'éaire, t977,'p.' 333'335 et 623'626;et' à la librairie

Al-Mairabba (Le Caire):'il, f. iottttt, The Flight into Egypt' 1968 (2e éd')' 123 p';

RrourH.rsIs, MatariaandtheVirginTree' l l979l '(8p'enanglais-et7.p'.enarabe'+iiil t ro., The irolv Fanitv in Egypt,i'd" (8 p' en anglais et 8 p' en arabe + ill')'

?Cf.CatherineMAYEUR-JAoUEx,UnjésuitefrançaisenÉgypte:lePère-J.ul l ien'

dans Christian DÉcoBERr (éd,), Itinéraires d'Ég,ypte' Mélanges off"!t,o'.père M,aurice

M^RrrN sj. (= Institut fr"n'"ir O;et"ftéologie ôiientale du Caire. Bibliothèque d'Etude'

l0?), Le Caire, [1992], p.àti-Zel, qui co-nsacre à M.alariyya' dont le P' MichelJullien

(1827-1911) fut le promoteur ,tes p' i+O'ZU'.Elle y signale nohmment qu€ la <Clapelle

à, f" vi".g", O" fr,iat"rivya n" ."ïorr". pas à I'emplacemenr exact de I'arbre et du puits

"tràe" dËpuis des ,iaôtâ.,

"n effet, ce terrain appartenait au vice'roi [khédive]' qui

refusadelavendre,et leP.Jul l iendutsecontenterd'acheterunterrainvois in.LeP.Jullien a d,ailleurs ecrit t.rlmême: <quoi qu'il en soir, notre vénération porte sur le lieu

plus que sur I'arbre> (art. cil., p. 243 et n' 131)'

23MATARIEH

Ia Vierge à Matarieh. Souvenirs du séiour de la Sainte Famille enÉgypte, dont la couverture porte la mention très explicite: <<Vendu auprofit de l'Égfise (sic) en construction>8. Bien que destinée à fédifi-cation, au sens propre comme au figuré, cette brochure n'en constituepas moins une mine de renseignements où I'on trouvera en long et enlarge beaucoup dtinformations, parfois étoffées par le recours auxtextes originauxe; à la littérature présentée par le P. Jullien et à celleque mentionne S. Timm, dont il y a lieu de tenir compte, il faut ajou-ter un texte arabe important, publié il y a peu, ainsi que le témoignaged\rn pèlerin russe qui n'avait jamais été taduit.

l. L'Évangile arabe de I'Enfance

Nous ne nous attarderons pas beaucoup sur ce texte dont lenoyau, d'après le P. Peeters, remonterait à un original syriaque du v"siècle, <<eine These, die nicht beweisbar isb)I0. En effet, s'il est vraique le chapine 24 du texte arabe édité par Sike au xv11o silslsll, à par-tir d'un manuscrit aujourd'hui inconnu, fait allusion à Magariyya, onne peut pas en tirer grand-chose, car le passage est interpolé, commeI'indique suffisamment le fait que les quatre témoins manuscritsorientaux connus du P. Peeters, deux syriaques et deux arabes, <<seréunissent contre la rédaction de Sike pour exclure les chapiFes xxw et

tl-a bibliothèque des Bollandistes possède un exemplaire de la <quatrième éditiou,surchargé de la mention c2c tirage>, et imprimé au Caire en l9(X; la première édition aété imprimée à Beyrouth en 18E6, semble-t-il; Timm en signale aussi une versionanglaise (Le Caire, 1892). Le Catalogue général des llvres lmprlmés dc la BibllothèqueNationale, t, 79 (Paris, 1924), col. l0l8 mentionne, sous la cote s4o H. 470), un exem-plaire de la 3€ édition (Beyrouth 1889), ainsi qu'une auue plaquette du même auteur sur lerrême sujet: <JuLusN (Le P. Michel-Marie), S.J., Une excurslon à l'arbre de Ia Vierge,près le Caire, par le R.P.IuIIien... - Lyon, impr. de Mougin.Rusand, 18E2. In-8o, 39 p.et pl.>. Le Prof. Chr. Cannuyer nous signale <qu'il y a aussi un important passagg, avecde belles gravures, sur le jardin de baume dans un autre ouwage du P. Iulunx, L'Egypte,s ouv e nir s biblique s e t chr é tle ns, Lille, 1 89 1, pp. 193-212>.

9Le P. Jullien sbst contenté de rapponer quelques récits hauts en couleur, mais adonné aux p,73-74 une listc modestement intitulée Quelques anclens péIerlns de Ma-tarieh, qti ne comprend pas moins de trente noms de visiteurs occidentaux venus à Mala-riyya entre le xn' et le xvrno siècles I La plupan de ces noms (maic pas tous) sont reprisdans Tnrnt (p. 1615 s.), qui en ajôute beaucoup d'autres. Voir ci-dessous la n. 132, p. 49.

rolV. ScglrssMgr.cagn, Neutestamentllche Apokryphen, l, Evangellen, 5c éd., 1987,p.363.

trCf. CANT 58,BHO 619, où I'on trouvera aussi le renvoi à la réimpression deThilo et à la traduction latine chez Tischendorf: il existe de nombreuses traductions de cetexte, dont les références sont données par Schneemelchet, Ioc. cit. (note précédente).

-

24 U. ZANETTT

xxv. Ceux-ci d'ailleurs se dénoncent eux-mêmes par la citation mala-

droite qui les termine: Et le Seigneur Jésus accomplit...>> (Pretens,

Évangile de l'Enfance, p. xxvtt); la citation du texte publié par Sike,que nous donnons ci-dessous dans la traduction du P. Peeters, nejouit donc d'aucune garantie, et elle ne peut être invoquée en aucune

façon pour dater la tradition relative à Matariyya aussi longtemps que

I'on n'aura pas retrouvé le manuscrit de Sike, ou tout autre manuscrit

contenant ces chaPitres.

<Chap. xxlv, De 1trt2, ils se rendirent au sycomore qui s'appelle au-jourd'hui Malarieh. Et à Malarieh, le Seigneur Jésus fit jaillir une source'où sainte Marie lui lava sa tunique. Et la sueur du Seigneur Jésus' qu'elleégoutta à cet endroit, y fit naltre le baume.

Chap. xxv. De là, ils descendirent à Miçrr3. Ils (y) virent Pharaonr4, etdemeurèrent dans le pays de Miçr durant trois ans' Et le Seigneur Jésusaccomplit dans le pays de Miçr nombre de miracles qui ne sont pas écritsdans l'évangile de I'enfance ni dans lévangile complebtls'

Disons tout de suite, car nous n'avons pas pour I'instant l'inten-

tion d'y revenir, que le sycomore dont il est question ici constitue une

donnée permanente du culte de Maçariyya: nous y trouverons diverses

allusions dans les textes suivantsl6.En fait, ce témoin n'a d'autre valeur, du point de vue historique,

que la date du manuscrit qui le contient - lequel n'a malheureuse-ment pas été retrouvé jusqu'à présent - puisque, comme I'a bien sou-ligné le P. Peeters, les dernières lignes du chapitre 25 dénoncent mani-

l2Il s'agit du <pays des idolesr'tsMiçr désigne Le caire, où deux endroits se disputent lhonneur d'avoir abrité la S.

Famille: lei églises de N.-D. à Haret Zoueila, et ss. serge et Bacchus au vieux caire..raCette simple allusion à "Pharaon" montre à suffisance que lÉvangile de I'En'

fance est plus soucieux de reproduir-e la typologie de l'Ancien Testament (Jésus est leNouvel IsraëI, qui a connu I'exil en Égypte, y a vu Pharaon comme Joseph et ses frères,et en a été rappelé) que de présenter des faits vraisemblables'

rsPnprrns, Évan gile de l'Enfance, p. 28,l6l-e Proi. C. Cannuyer nous écrit (31 mars 1993) qu'il est très probable que I'arbre

de Matarieh soit l'héritier de l'arbre Ished, un balanitès plutôt qu'un perséa ou un syco'more [cf' N' Bruu, Arbres e! arbustes de l'Égypte ancienne, (= orienl' Lov' Anal" 3l)'Leuven, 1988: cf. p. 263-275llvénéré dans I'antique Héliopolis pharaonique ('Ayn Shams)cet arbre était "fendu" (comme l'arbre de la i'Matarée" dans les traditions apocryPheschrétiennes) par, selon le chapitre xvtt,22 du Livre det Morts, le "grand Chat...' en cettenuit du Combat ct d€ la capture de I'Adversaire (= Seth)' en un moment où les ennemisdu Seigneur de lUnivers (= Osiris) ont été anéantis"' ... Cf' E. LrrÉaunr, Llarbre sacréd'Héliopolir, dans ,Spâinr, 5, Uppsala, 1902,pp. l'22 et 65'8E (et V. LoREr' ,'arbrc de IaViergc à Matarieh, dans iàid., 6, 1903, p' 99'103); I' Donrssn, Des hléroglyphes à IaCroix. Ce que Ie pasil pharaontqw a légué au christianisme,lstarnboul, 1960, p,27 .

MATARIEH

festèment une interpolation destinée à justifier la tradition, laquelle luiest donc antérieureu. Par le fait même, I'homélie deZachaie de Sabâ,à laquelle nous allons nous intéresser à présent, devient - à notreconnaissance - le plus ancien témoin daté de I'existence d'un sou-venir de la Sainæ Famille à Matariyya.

2. Lrhomélie de Zacharie de Sahâ

Zachaie de Sa!â (ville du Delta nommée en grec Edïç et en copt€CeKootls, à côté de la ville moderne de Kafr al-Sheikh), originaired'une famille de fonctionnaires, résigna son office pour entrer au cou-vent; ordonné évêque par Simon, le 42. paniarche d'Alexandrie (693-700), il occupa son siège pendant trente ans, qui correspondent sansdoute à son acmè littéraire; plusieurs de ses homélies nous sont con-servées, en copte ou en version arabele. L'une de celles-ci conceme laVenue de Notre-Seigneur f ésus-Christ en terre d'Égypte avec sa mère,la Vierge Marie, et foseph Ie charpentier, le fiancé de <celle-ci>, etSalomé;elle a été publiée par Murqus Ôirgisr.

Cette longue homélie, dont I'essentiel est résumé par Amba Gre-gorios (Flight), rapporte I'itinéraire que la Sainte Famille aurait suiviau cours de son périple égyptien, et sert ainsi de fil conducteur desdivers lieux de pèlerinage. Son tire même montre que la Sainte Fa-mille se compose de quatre personnes: lEnfant-Jésus, la Vierge Marie,S. Joseph et Salomé; cette dernière est la sage-femme qui intervientdans bien des évangiles apocryphes2l. Comme, à notre connaissance,

17 <Malheureusement, il faut renverser la déduction: le manuscrit de l'Évangile deI'Enfance qui mentionne Maprieh est, par le fait même de cette mention, convaincu dereprésenter une copie interpolée et postérieure au xlF siècle>, date (bien trop tardive) quele P. Peeters assigne à cette tradition (cf. Prnrrns, Évangite de l'Erfance,p. xxvnl).

ttCf, CE 8, 20E?-2088; A. Cllonrnu, Dizlonario dei nomi geogr4lici e topograficidell'Egitto grcco-romano, vol. III, Milan, 1978, p. 376, Cf. aussi AuÉr,rxsru,Géogra-phie,p.4lO et ÎMM, Chr.-k. Âg.,p,2231. I.es scalae écnvent Eéog (comme nominatlf l;,

re Ci. GC AL I, 472-473 et C E 7, 236E-2369. Zacharie de Sa!à esr mentionné ausynaxaire de lÉglise Copte le 2l Méchir (araàc; Amiîr), ou 15 février julien.

- 2gGCAL l, 228-229 (et p. 225,1. I 1); nous employons la première édition: Murqus

Girfis, Kitriâ mayiimlr wa-'a[â'ib al-Sayyido al-'A/rô', Le Caire, 1902, p. 39-55 (dans la2o édition, Le Caire, 1927:p.56-81). - Il va de soi que l'édition de Murqus ôirEis, pootutile qu'elle soit, ne peut pas êue considérée comme critique.

. 2rProtévangile de lacques (CANT 50,BHG 1046: g 19-20, Mon.llpl, p. E4);

Evangile de I'Enfance du Sauveur (CANT 53, BHL 5345m: ! 77-80, Monrror, p. 140-l4l); Évangile du Ps.-Matthieu (CANT 51, BHL 5334-5342b: g 3-5, Monemr, p.2tâ-2n).

25

t-

26 U, ZANETTI

il n'en existe pas de traduction dans une langue occidentale, nousallons rapporter ci-dessous la partie qui concerne Matariyya (p. 51, l.8 à 52,1. l51zz.

(Situation: La Sainte Famille,fatiguêe de la route, se repose sous unarbre que fésus afait pousser exprès pour l'abriter, non loin d'un villagequi n'est pas nommé; f oseph et Salomé s'endorment, pendant que la ViergeMarie, portant dans ses bras l'Enfant-Jésus qui a demandé à boire, s'estrendue à ce village pour y quérir de I'eau, mais on la lui a refusée).

Le Seigneur dit: "Retourne, et que leur village ne soit plus que ruinespour l'étemité". Notre-Dame (que la paix soit sur elle !) s'en retouma, et ondit que le Seigneur fit jaillir de I'eau sous I'arbre, ce qui n'était pas bien dif-ficile pour lui, puisqu'Il est appelé le Fils du Très-Haut23, et que tout Lui estpossible. Toutefois, les auteurs postérieurs divergent d'opinion à propos decet arbre que le Seigneur a fait paraître: certains disent qu'il se trouve dansle territoire de la Syrie dernière2a, d'autres affirment que c'est en terred'Égypte, dans le gouvemorat de h 5arqiyya25, mais en fait il est sûr, mêmeaux yeux des éuangers, que c'est I'arbre de Ma{ariyya dont nous parleronstout à I'heure.

Retoumons maintenant à Joseph et à Salomé: ils étaient endormis etrêvaient, quand la Vierge Marie les éveilla. Ils se réveillèrent, et virent lasource d'eau pure et fralche; ils s'en étonnèrent et demandèrent à la Viergecomment cette eau était apparue; elle indiqua I'Enfant, et ils apprircnt ainsiqu'Il leur avait procuré de I'eau, comme Il en avait déjà fait apparaltre aupa-ravant.

Ils se levèrent tous et ils continuèrent à marcher jusqu'à ce qu'ils entras-sent dans le territoire du Caire, dans une ville nommée 'Ain Sams26. Levieillard Joseph avait à la main un bâton sur lequel il s'appuyait, qui venaitd'un arbre des environs de Jéricho; le Seigneur (à Lui la gloire!) le prit et lecassa en morceaux, et Il le planta en ce lieu désert; Il mit sa main divine surla terre, et aussitôt une eau excellente jaillit; Il en prit de ses mains pures eten but, et Il arrosa ces bouts de bois sec qui, aussitôt, devinrent verts etpoussèrent des branches dont un parfum agréable émanait - et c'est ce quenous appelons le baumier. Ce lieu s'appelle à présent Magariyya et lasource s'appelle "le puits sacré".

22Notre traduction se veut lisible plus que littérale, d'autant que l'édition de ce texten'est pas critique, et repose sans doute sur un seul ms. - Disons une fois pour toutes quenous traduisons Mart Maryam (terme emprunté au syriaque) par "la Vierge Marie", Al-'A/râ' par'la Vierge", Al-Sayyida par "Nolre-Dame", et Al-Sayyida aUAdrô' par "laVierge Marie" (au lieu de'Notre-Dame la Vierge", trop lourd en français).

zrLc 1,32.u AI-Sâr al-a$ira,désignant la Syro-palestine.25Province orientale du Delta égyptien (chef-lieu Zagazig); le lieu visé ici est Al-

Malpmma, auquel nous reviendrons dans une prochaine livraison des AB.26Nom arabe dlléliopolis, à la sortie du Caire (cf. EI 2, l, 8l lb, 'âyn Shams).

MATARIEH

Ce baumier poussait à Jéricho, et il produisait une huile qu'on employaitpour le sacre des rois, des prêtres et des ustensiles du Temple; cela durajusqu'à ce que vlnt Celui à qui revient la puissance, la majesté et la souve_raineté, Lequel le supprima de cet endroit-là et lui ordonna de croître ici.On emploie son huile pour la (confection du) saint Myron que le néophyrereçoit après son baptême, juste après sa sortie de I'eau, et grâce auquelI'Esprit-Saint repose sur (le néophyte)2?; (cette huile s'emploie aussi pour)oindre les autels, les planches d'autel et les autres ustensiles du saint sanc-tuaire.

Le Seigneur bénit cette place en disant: <euiconque descendra dans cepuits sacré pour s'y baigner ou pour y boire recevra la guérison de toutes sesmaladies>. Et Il bénit I'arbre en disant: <Tu ne seras pas anéanti, et aucunefeuille ne tombera de toi, jusqu'à ce que Dieu hérite la terre et ceux qui s'ytrouvent2t>. Et il n'y a pas de doute, en effet, que cette llistoire de I'arbre nefigure parmi les histoires les plus extraordinafues, puisque tant d'années ontpassé et que I'arbre est toujours tel quel: pas une feuille n'en tombe, ni enété ni en hiver, ni au printemps ni en automne, mais il reste là, attendant lavisite de ceux qui veulent venir. Et quiconque y vient y grave2e son nom, aupoint qu'on ne peut énumérer les noms qui y sont gravés. En somme, il estdevenu célèbre comme le soleil en plein jour.

(La sainte Famille quitte alors Mapariyya pour se rendre au vieux caire,dans ce qui est devenu l'église des SS.'Seije àt Bacchus ou <Abil Sar[b).

Ce récit nous a ainsi familiarisés avec les divers éléments qui serencontrent à Maçariyya, et que nous retrouverons dans les textespostérieurs: I'arbre sous lequel s'est abritée la sainæ Famille (on préci-sera plus tard qu'il s'agit d'un, sycomore, comme nous I'a appris lechap.24 del'Évangile arabe de l'Enfance rencontré au parigraptreprécédent), la source d'eau et les plants de baumier - et aussi, neI'oublions pas, les visiteurs qui gravent leur nom dans I'arbre (pratiqueséculaire, ûès naturelle à l'être humain et pourtant si peu écologique !),ainsi que les pèlerins qui viennent y chercher la bénédiction duSeigneur ou la guérison de leurs maux.

On sait aussi que Malariyya n'était pas le seul endroit à revendi-quer le privilège d'une source miraculeuse due à I'Enfant-Jésus lui-même; en effet, un peu plus haut cefte meme homélie de Zacharie deSa!â fait allusion au lieu nommé Al-Malammd l=,,1e bain"po. ,

nLe Myron G saint-chrême des Latins) est administré au néophyte aussitôt aprèsle baptême dans ce que les occidentaux ont appelé le sacr€ment de confirmation-: enorient, celle-ci ne peut pas être dissociée du baptême (quel que soit l'âge du néophyte).

zECf.Zach9,4.

2e y qfbw, de faf, ar a, <entailler, graver> (Dozv, S up pléme nt, II, p. 243 a).30Voir la n. 25 ci-dessus.

27

28 U. ZANETTI

3. Les témoins liturgiques

S'il est vrai que les pièces liturgiques n'apportent que rarement du

neuf du point de vue des données historiques, puisqu'elles sont elles-

mêmes composées à partir des Vies de saints et des homélies3r, elles

attestent la présence d'un culte et, à ce titre, font partie de la glaria

postuma des saints, au culte desquels I'hagiographe assimile bon

nombre de fêtes liturgiques, comme celle de I'Entrée du Seigneur en

Égypte, déjà mentionnée au début de cet article. Il convenait donc

d'interroger les divers livres liturgiques à la date du 24 Pachôn,

correspondant au 19 mai julien.

a) Le Synaxaire

Le Synaxaire, æuvre écrite directement en arabe, probablement

au xrrrs s. par Michel de Malllrz, offre pour la fête de l'Entrée du

Seigneur en Égypte un texte bref qui pourrait ressembler à un résuméde I'homélie de Zacharie de Sat-râ s'il décrivait les lieux dans le même

ordre qu'elle, mais ce n'est pas le cas. Malgré l'absence d'une édition

critique de I'homélie, il nous semble donc que le synaxaire ne peut pas

dépendre d'elle.

En effet, le Synaxaire, comme tous les autres témoins concernés (parexemple leLivre du Chrême), raconte le périple de la Sainte Famille dansI'ordre suivant, représentant I'itinéraire du voyage: Al-Bas1a' source miracu-leuse, Samannîid, B4â Isiis, Wâdî al-Naçriin (de loin), Al-A5mtnein' Al-Mufanaq33, Abû Sar!â au Vieux Caire, Malariyya, Al-Mafamma.

À I'inverse, I'homélie de Zacharie procède du Nord au Sud et énumère lessites dans I'ordre suivant (les divergences sont en italiques): Bas1a, sourcemiraculeuse, Al-Maf;amma, Samannûd, Burlus et Salarat al-Tin, Al-Ma1la',Bitâd al-Sibà!., source miraculeuse, Bibâ Îsûs, Wedi al-Natrùn, arbre mira-culeux et source miraculeuse à Malariyya, baumier, Abu Sar!â au VieuxCaire, Aimùnein, Qosqam. À notre connaissance, Zacharte est ainsi le seul

3t Les pièces liturgiques ne servent vraiment que lorsque leur modèle a disparu.

32GCAL II, p.416-420 (à quoi il faut ajouter I'important article de R.'G' Coqtnx' Le

Enaxairc des Coptes. (Jn nouveau témoin de la recension de Haute Égypte, dans A8,96

t19781, p. 351-365). Le synaxaire éthiopien est Eaduit de celui des Coptes' mais il

n'apporte rien de nouveau pow le sujet qui nous occupe ici.33C'est-à-dire Dair al-Mularraq ou Qosqam, comme dans l'homélie' - Tous les

mss de la recension de Basse É,gypte du synaxaire écrivent ici Al-Muf,arraqa avec tàmarbû1a. Par contre, le ms. B de Blssrr, représentant la recension de Haute Egypte(voir CoeuIx, op. cit.à la note précédente), porte Al'Muharraq, ce qui est la forme

attendue (en fait, Brssrr atoté Al-l.Iarraq dans I'apparat critique, sans doute par erreur).

MATARIEH

auteur qui ne cherche pas à décrire I'itinéraire de la Sainte Famille' maisessaie plutôt de foumir un "guide de pèlerinage"'

En tout état de cause, le Synaxaire présente la source de Ma-

tariyya comme pré-existante au passage de la Sainte Famille et, s'il

fait, bien entendu, allusion à la présence du baumier, il ne précise pas

I'origine de cet arbre. Voici le texte34:

(Quittant te site d'Abù Sar!,à, au Vieux Caire) ils sortirent du Caire' pas-

sèrent par Maçariyya et s'y baignèrent: cette source en fut sanctifiée etbénie dès ce moment. Il en sort I'huile de baume qui sert à accomplfu lebaptême, la consécration des églises, des sanctuaires et des vases sacrés;on en fait un remède bienfaisant pour guérir bien des (maladies); on en faitprésent aux rois, qui s'en glorifient.

Tel quel, ce texte ne nous apprend donc pas grand-chose, sauf

que I'on peut légitimement se demander s'il ne représente pas une tra-

dition antérieure à celle de Zacharie de Sabâ, puisqu'on voit que la

source et le baumier sont encore considérés comme préexistants aupassage de la Sainæ Famille: d'ordinaire, les récits étiologiques partent

de données préexistantes, y raccrochent un fait secondaire, et finissent

par fafue de ce dernier la cause des premières. Le synaxaire suppose,

cela va de soi, la tadition relative au passage de la Sainte Famille en

Égypte, mais cette tradition-là existait déjà vers la fin du Ivc siècle, et

elle ne constitue donc pas une nouveauté.

En effet. I'Historia monachorum - Guvre due à un auteur anonyme qui,avec six compagnons, a visité l'Égypte vers la fin du tvo siècle - nous dit:(... nous avons vu là-bas [près d'Hermopolis magnct ou A5mûnein] le templeoù, à I'entrée du Sauveur dans la ville, toutes les idoles tombèrent face contrettot"t'

Cette tradition, on I'aura compris, repose sur fs 19,1 : <Voici que

le Seigneur est assis sur une nuée légère et qu'Il viendra en Égypte, et

que les (idoles) faites de main d'homme seront brisées devant sa face,

et que leur c@ur sera vaincu à I'intérieur d'eux-mêmes>. Elle est sou-

vent évoquée, maints récits rapportant comment les idoles tombent

d'elles-mêmes à I'entrée du Seigneur dans la ville; c'est ainsi que, dans

34Nous nous inspirons de la traduction de Brssnr (PO, xvl' fasc.2' p.409 (=

t10511), mais après avoir vérilié le texte arab€ de Forcrr (CSCO ,6?' p. 136)'

15 Hist, mon., E,l (Apollô) = A.-J. EsrucÈne, Historia monachorum in Aegypto (=

slr, 53), Bruxelles, 1971,p.46.- Nous ne tenons pas compte ici des auteurs anciens qui

ont signalé la venue du Seigneur en Égypte en commentant Is l9,l'4 et Mt 2,14-19' enparticulier Eusèbe de césarée, In Isaiam, el Demonstatio,9,4,2. On en trouvera les

références gràceàBiblia Patristica (Paris' éd. du CNRS).

29

30 U.ZANETTT

I'homéliedeZachariedeSa!râ,onracontecomment'laSainteFamillese trouvant aux environs de Basça, la Vierge pritJésus avec elleau

moment d'aller puiser de I'eau et, à I'entrée de Notre-Seigneur' les

idolestombèrentparterre36;ellerevientaussidanslesapocryphes'etnous allons la retrouver immédiatement dans les hymnes liturgiquesrz'

b) Les hymnes liturgiques

Il convenait d'interroger encore la poésie liturgique' pour le cas

où quelque pièce nous aurait préservé un détail ou une attestation

,oppternàotuire. Un examen plus attentif nous a toutefois permis de

"ôrtur", qu'aucune des hymnes liturgiques que nous connaissons ne

fait allusiôn à Matariyya, de sorte qu'il ne valait pas la peine d'en

donner ici la traduction; t"t thèmes récurrents que I'on y trouve sont la

venue du Seigneur en É,gypte sur un nuée lêgère' c'est'à-dire les bras

d.e Marie (comme le glose la liturgie), la destruction des idoles

d'Égypte par la seule venue du Christ dans le pays (liée au verset

d,IMï; quivient d'être cité) et I'autre citation scripturaire: sur le peuple

qui étai dans les ténèbres a brillé une grande lumièrese'

Les hymnes liturgiques coptes portent trois noms: psali' doxo-

togieset lar|(p|ur.1uru|ar); l ' indicat iondutonsurlequelel lessech_antent, Ad o^ oo Butos, fait partie de leur identitégs. Le plus com-

modepours'yretrouverestencoredeconsulter lesart ic les. indexdeyassâ ,Abd al-MasTlr et de Burmester, et d'y ajouter les pièces parues

par après, tout en étànt conscient qu'il s'agit d'un rnare tntgnul'rz bien

difficile à circonscrire:

- Doxologie Adam (Yass 1940' p' 57):

Ua.per2oc enfc nrarulorptoc : Qtt €Tùq^eun€rtglfll LlrolY

iÀ neel^Àoc : (éd. K' Tamdgîd, p' 7 4-7 5)'

<<Louons le Christ créateur, qui nous a visité' nous son peuple>'

- Doxologie Batos (Yessn 1940, p' 41):

Ot Qfi erorïôor rÀq i€r ntco6rt ire rse-e, : QH €Tâeucl

ZtÀeN filgeporÂlu : (éd. K. Ibgalmudiyya, p' 566-567)'

36 psprgns, Éya ngile de ygnfancc, p. 12 (X,2); homélie arabe de Zachatie de Sabâ'

éd. Murqus ôitëis (citée à la n. 20 ci-dessus), p' 47'48'

37Par contre, elle ne figure pas dans Pallade, malgré I'affirmæion -de

la cE"lllS'

qui ne donne aucune référené pté.it., il doit s'agir d'un lapsus ("Pallade" pour "Historia

monachorum")'38Cf. Mt 4'16' citant Is 9'1'3eCf. CE 6,p. t727-1729 (art. Music).

MATARIEH

<Dieu qui est glorifïé dans I'assemblée des saints, qui siège sur leschérubins>.

- Doxologie Batos (Yrssi 1945,p.123):Lceporom éua.go ize Xrut lT€u recoorg rrpor eoÊe

nÀrri ùneffcorttp : êiorr èpoc reu rltturt locrç : (inédite).

<L'Égypte avec son territoire a reçu une grande lumière à cause de lavenue chez elle de notre Sauveur avec le juste Joseph>.

- Doxologie Batos (YrssÀ 1947,p. t23):Hca,ilc nmpoQrTttc lclepnpo9lftettr den OÀt : Àe rIæ llÀt

fioprr nXrur éaer or6rnt èclctoor (était inédite; publiée dansH andoxolo gia, p. 40-42).

<Le prophète Isaïe a prophétisé ceci: le Seigneur vient en Égypte surune nuée légère>.

- Tartr Batos (Bunr',rssrEn 1939, p.147, ms. A):ù (sic) ner& lrc nfc râoK enoa nnrip€Tn ntpequÀt

ùneqnnacuÀ ÀqrÀ (sic) èdprr êxrur : (inédite).<Notre-seigneur Jésus-Christ, la perfection des vertus, Celui qui aime

sa création, est venu en Égypte,n.

- Tarb Batos (Bunr',rnsrsn 1939, p. L47, ms. B):Ilercorrp Leli ÀclcoT ùuor : êBon der Tnna.rs nre

Tuer<gauge etÀo^ott) (inédite).(Notrc Sauveur est venu nous sauver de I'erreur de l'<idolâtpie>.

- Psali, ton Adam (Difnôr, P. 461;+o'à,rrÀoror ùprrrr : lror ntra^€nopoc : oroe ùtatôrrc :

nrÀoû ùpeqepnoÂr.<Je vais ouvrir la bouche, moi pauvre et ignorant, un faible pécheuo.

- Psali, ton.Batos (Difndr, p. 461):ù n1-c lrc nenæ i êlpm èr1opÀ ixruf neu uaprl TequLT

ùna,peeroc reu [té€^^ot lerct{cl nriuge.<Le Christ Jésus Notre-seigneur est venu dans le pays d'Égypte avec

Marie sa mère vierge et le vieillard Joseph le charpentier>.

- Psali acéphale (O'Lelnv, Fragmentary Hymns, p. 6b-7a):...ôna,q iorna,oc eqîorÂrorr oroe fipeclXoz i2ar2Êrotr.(...<se prépare> un peuple saint et zélé pour les æuvres>.

40On notera que le Difnâr donae normalement les deux premiers versets en copte,suivis de la traduction arabe de la piècc entière: par contre, Oï-mnv, Difnar, ne donneque le texte copte; celui.ci est généralement incomplet, mais il anive que ce texte coptesoit néanmoins plus long que celui du Dfdir.

3l

ift

{f1rl

itili

32 U. ZANETTI

- Psali, ton Adam (O'Lrlnv, Fragmentary Hymns, p.7a-8a):ùuorrr uùpeffeorc o'ro2 irrenfoor rlgrpt ùQT êtonc â.qi

à,clctrrT riuor.<Venez, louons et glorifions le Fils du Dieu vivant: Il est venu et nous

a sauvés>.

Si ces hymnes ne nous apportent pas d'élément précis pour notreenquête sur Matariyya, ils éclairent divers aspects des traditions rela-tives à la venue de la Sainte Famille en Égypte; en particulier, le versetd'Isaïe souvent cité est susceptible de se trouver à la base de bien deséléments narratifs que nous retrouvons ailleurs.

4. Le témoignage dfAbù l-Makârim

Le texte d'Abû l-Makârim, que la GCAL ne connaissait que parouT-direal, a été publié en Égypte il y a quelques années; nous con-sacrons ailleurs tout un article à I'identité de cet auteur42. Pour I'in-stant, nous nous contenterons de traduire le long passage où il évoqueMalariyya et nous informe de l'état des lieux vers la fin du xp siècle; ilfigure dans A. M ak., t. I, p. 27 -32 = fol. 20' -23v du rranusçdi43.

Les titres des paragraphes sont.de l'éditeur (nous les mettons enitaliques), tout comme les parenthèses, qui dénotent un passage noté àI'encre rouge. Nous omettons le ûerme fa;l (paragraphe), ajouté parl'éditeur, notre typographie rendant suffisamment cette réalité. Lespoints de suspension indiquent vraisemblablement une lacune dequelques lettres. Chaque fois que cela nous paralt utile, nous trans-crivons le mot arabe, ou même le rapportons tel quel; nos propresexplicitations sont notées enfe soufflets <...>,

Al-Mayariyya

(Matariyya est connue) par ses deux ports, Malar et Al-Asba'{. (Et.. . ily a là une église) à la place de l'église qui se trouvait en ce lieu, <et qui

4tGCAL II, p. 340 (où le nom de I'auteur est vocalisé Aôr 'l-Mukdram Sa'dalldh ibnéir{is ibn Mas'ùd1.

a2U. Zrxrrn, Abù l-Makârim et Abû $àIilp: quel auteur? (article à paraltre dansBulletin de Ia Société d'Archéotogie Copte).

a3Notre articl€ était déjà rédigé quand nous avons reçu la version anglaise, que nousdésignons en abrégé par Tr. A, Mak., et que nous citerons parfois.

gL'éd. écrit ici <Al-A{1a'> (C-u-r ri, ærme absent de I'index et peu vraisemblable;par contre, I'index (t. IV, p. 191) explique: Al-Maçariyya: minyatay Malar: minyat Al-

MATARIEH

étai> jadis connue (comme l'église de I'or); celle-ci se trouvait sur un tell àI'extérieur du hameau et elle était depuis longtemps tombée dans I'oubli. Ily eut une restauration sous le califat d'Al-Çâfir, quand'Abbâs était vizir45,parce qu'elle se trouvaitre dans le fief de Naçr, son fils, en I'année 548;l'église fut consacrée - et on ! célébraqt - au nom de Notre-Dame la pureVierge Marie, lors de sa venue de Palestiners en terre d'Égypte avec Notre-Seigneur Jésus-Christ et le vieillard Joseph le charpentier, <et> lors de leurretour en Palestine à la mort du roi Hérode le contradicteur <des desseinsde Dieu>ae. Et quand I'imâm Al-Z,âfir et ses frères furent tués, les musul-mans des environs s'en emparèrent de force et y firent des lieux de prière,rien de plusso; cela se passa au mois de Rabr' Premier de I'année 549sr.

Cette année-là un armistice fut conclu avec les Francs dans le paysd'Égypte; il <consistait en un payement> annuel de 30.000 denierssz. Le

A;bai Q-Yt) (Malariyya: les deux ports de Malar: le port de AI-A;ba!). - Tr. A.Mak., p,41, traduit: <Al-Mataria is known as two Miniets; Matar, and al-Asba'a>. avecune note explicitant que ce demier mot désigne <A suburb of cairo>. Il faut donc lire z{/-Ag ba' (e-.'!t), semble-t-il.

a5 Al-?âflr., l2o calife fatimide, régna de 544 à 549 hég. = 1 149-1 154 A.D. ;,Abbâsb.Abil-Fut; l futsonviziren543-549hég.=1153-1154A.D.(cf.E/t t}b;EIz,9ab). Cedernier et son fils Nasr voulurent fuir tÉgypte après I'assassinat du calife, auquel ilsn'étaient pas étrangers, mais ils furent capturés par les Francs et trouvèrent rapidement lamort.

a6Ce texte nous fait difficulté: kawnu-hd !ôriya dewait signifier <<elle se trouvâitpassanb, ce qui se rapporterait mieux à la source et au ruisseâu qui en découle qu,àl'église. L'emploi de kawnupour introduire une proposition correspondant plus ou moins àun ablatif absolu latin est courant chez notre auteur. rr. A. Mak. traduit: (because it wasa f ief. , .>.

a7L'auteur de ce texte insiste régulièrement, quand il parle des consécrationsd'églises, sur le fait que I'on célébra effectivement I'eucharistie dans l'église en question,ce qu'il exprime par wa-quddisa bi-h,â (- et on y célëbra la messe),

atLitt.: Iorsqu'elle {est levée de SAn. Le terme <Al-Sem> désigne la Syrie, la-quelle peut également englober ta Palestine.

4eHîrûdus al-nulddid, En vocabulaire occidental moderne, cette longue phrasesignifie simplement que l'église fut consacrée sous te vocable de <la Sainte Famille>.

soLitt.: construisirent des niches de prière, rien d'autre. La ..niche de prière',(nilydb) indique la direction de La Mecque. Du fait que I'on n'y avait pas consruit demosquée (rien d'autre), on pouvait encore vaguement espérer récupérer ce terrain. Nousapprendrons plus loin quel fut le prétexte de la confiscation (n. 59).

slLa consécration en question (placée toutefois sous le vocable de S. Georges etnon de Nore-Dame), ainsi que la confiscation ultérieure par les musulmans, sonrsignalées pN l'Histoire det Pariarches: nous citerons ce passage au $ 5, p. 40.

52Wa-11 hddihi al-sana taqarrarat al-hudna li-l-Faran! ,alô iqtim Misr wa-huwa fikulli sanatn wa-la6!în alf dînàr (Sic: le pronom huwa est masculin, alorsque hudna,"armistice", est féminin en arabe), La difficulté historique est autre: le seul événementmilitaire qui se soit produit en lhnnée 549 hêg. = l l54 A.D. semble être la prise d,Asca-lon par les croisés, et nous ne voyons pas qu'il y eut d'armistice ni sunout de tribut; maisles croisés, qui avaient fait prisonnier Naçr (cf. n. 45 ci-dessus), le remirent aux mains

33

34 U. ZANETTI

sheiltrNalIbal.DawlaibnAl-MuhannâBulrusibnM4âTl53s'occupa,àses*fol.21-, frais, de la construction de l'église <de Malariyya>; * c'était au bord de

Qalyiibsa, et il acheta une maison55 au milieu du village, parmi des habi-

tations, et il fut décidé que I'on y purifierait le Myronsc, du fait qu'elle était

proche du baume. Et ce fut le pauiarche Amba Jean5? qui construisit de ses

propr.r mains le sanctuaire de cette <église>, voulant hâter sa consécration

des Égyptiens, sans doute contre payement' D'autre p9n' rr1" p"i*. t:1" conclue en 116?

,C,.O. énire le roi latin de Jérusalern Amaury I* et les Égyptiens (s'alliant contre I'atabeg

de Syrie Sirkûh ) en contrepartie d'un tribut de 100.000 besants: y a-t-il confusion? - Ir.

A.Mak'traduit ici :<Inthatyear,thelrucehadbeendecidedfortheFranksinthatregionofEgyptonconditionthattheyhadtopaythirtylhousanddinarseveryyeao(p.42).

s3ce mécène est encore cité (A. Mak., t.l,1ol.27a, p. 37) à propos de la restaura-

tion de l,église saint-Georges de Qaçr al-Mufannr, dans la Qalyûbiyya' sous le calife Al-

Â.ii tef -";-ir bi-Abkâm-Aileh, le 10c calife fatimide, régna de 495 à 524 hég. = 1 101-

1 130 A.D.; cf . EI z, i6b); à r"t endroit, le texte n'offre aucun autre repère chronologique

qui permette de vérifier la date. - Le clan des Muhannô est cité dans EIï,46l-462,

slQalyûb est le village proche de MaFliyya, qui a donné son nom à la province de

Qalyùbiyya. Cf. Tu'arrr, C hr'-k. Âg', 2099 -2100'55En corrigeant;l'édition donne: +Jl L r $ .rrrl ar-,|, où,lemot'dtne semble

pas avoir de seni; nous lisons <ddr> (rt ) (maisoni en rétablissant I'ordre des lettres d'r.

ilIor,, "ton,

tu "ill.u6

dans l'édition la forme ,:l (mais omis d'en noter la référence):

toutefois, nous avons aussi remarqué quelques interversions de lettres. -Tr' A' Mak.

traduit: (He bought houses among the structures of the city> (p' 4T), ce qui semblerait

faire de ( rsl ) un pluriel dont nous n'avons pu tlouver Ûace dans les dictionnaires.

56En corrigeantyukarraz (:r!) en yukarrar (.r 4), correction.qui s'impose si,

comme nous I'entendons, karraza-iignifie "consacrer" et karrara "purifier, raffiner". En

effet, le baume intervient dans la composition du Myron (= saint-chrême); il est con'

sacré par le Pauiarche assisté de ses évêgues (non par un évêque tout s€ul, comme en

occident), et cette consécration n'â lieu que lorsque la provision est près de s'épuiser.

oans lÉiiise copte, du vttc âu xûc s. elle eut lieu exclusivement au monastère de Saint-

Macaireile pauiarche Cyrille III ibn Laqlaq (1235-1240), profitant de circonstances

favorables, imposa sa dccision de consacrer le Myron altemativement au caire et à

Saint-Macaire (IVnne, Monasteries,II, p.38?-389). En 1167, le patriarche Marc ibn

Zur.ah consacra le Myron à saint-Macaire (cf. vtllecounr,Livre,p.63, = fol' l6v du

ms.); des six consécraiions rapportées par le Livre du chrême, deux eurent lieu au Caire

(en 1299 à l'église saint-Mercure, et en 1320, à la Mu'allaqa), les quatre autres se

passant à Saint-Macaire (cf. Vrnncounr, M anuscrit II, p. 6). Il est donc totalement im'

pensable que I'on ait pu songer à consacrer (karraza) le Myron dans une église de village

iimplement parc" quLllu était proche du baumier; par contre, il était tout à fait normal de

sonier à b jurifiei (karrara) - pour parler avec plus de précision, à distiller le baume

destiné à la fabrication du Myron - dans la propriété de Na!îb al-Dawla. - Tr. A.

Mat.. ûâduit: (It had been decided to cook the chrism in that church...> (p.42).

5TAinsi que le note l'éditeur, il doit s'agir du futur Jean VI, le.J4" patriarche

d'Alexandrie (1189-1215), et non du patriarche en fonction sous le calife Al'Çâfir' qui

portait le même nom (Jean V, 72G patriarche, ll47'1167)'

MATARIEH

en présence d'une assemblée d'archontesst; et elle fut consacrée au nom deNotre-Dame, comme expliqué ci-dessus.

Et le prétexte pour la transformer en mosquée fut le fait que le gardien,monté à l'étage, avait sonné les cloches en présence de musulmanssr; ce futcorcomitant avec la fuite de 'Abbâs et de son fils Naçr du Caire vers laSyrie à cause de la pan qu'ils avaient prise dans I'assassinat du calife et deqes frères, et de la convoitise que ce <domaine excitait> chez les musul-mans@.

Le puits du baumier

En ce qui conceme le puits du baumier, on a monté6r deux instrumentspour irriguer le baumier car, pour I'eau du puits, ce puits a une véritableparticularité, et on y hume I'odeur de I'encens qui monte du sandarus et del'olibanum; il y a aussi un autre puits, <touD rond, qui n'a pas la particula-rité de I'eau du <premier> puits. Le baumier est semé dans la terre desenvirons - Maçariyya -, et c'est de lui que sort l'huile du Myron, qui estcomme du beurre fondue2, le onze Tout et Bâbah et Hatôr53 - et c'est Par-moute, qui a trente joursa; à partir de Kyahk, il ne sert plus à rien de * pra- *fol. 21"tiquer des incisions6s. On le fait alors cuire, après purification du dépôt departicules et de poussière qui s'y est déposé, et c'est avec cette <huile> queI'on accomptt le sacrement, le sacrement du baptême et de la naissancesPirituellecc.

58Les "archontes" sont des notables de la communauté copte.5eC'est du moins le sens que nous semble avoir cette phrase: gftZ' at-qayyim ilà

'uluwwi-hd wa-(araba al-nàqùs 'ald abmuslimin (litt,: la montée du gardien sur sahauteureti lafrappélesclochescontrelesmusulmans), -Tr.A.Mak.îaduit:<<be-cause the church's keeper went up to its roof and rang the bell for the Muslims" (p.42).

6oWa-!ama' al-muslimînfî-hà. Pour 'Abbâs et Na$r, voir ci-dessus (note 45),6rLitt.: Dans I'affaire du puits du baumier, sur lequel on a montë... - Il s'agit,

comme I'indique la suite du texte, du puits "de la Sainte Famille" dont est tirée I'eau quiirrigue le baumier, eau dont les venus extraordinaires vont être contées.

62Modèle de référence d'une graisse pure et claire, et allusion à la couleur dubaume de première qualité.

63sic. Il faut sans doute comprendre que la récolte du baume pouvait se faire àpartir du l1 Tout (= 8 septembre julien), et jusqu'à la fin du mois de Hatôr (= 26novembre julien). Voir notre App e ndic e, g 4, p. 64.

eÀ notre avis, accepter la leçon cotngée Barmùda (voit la note suivante), contraintà considérer cette incise comme une glose déplacée, à moins que tout le passage ne soitcorrompu. (Letextearabeest: L* OJS tçs rsrp i /4.r).

65lcietplusloin, 1r. A.Mak.l i t lesmotsinexistants iarmûda(ici)et laryûda(cf.n.82) qu'on peut lire dans A. Mak. comme s'il s'agissait de Barmûda, "Parmoute" (= avril).C'est ainsi qu'il traduit tout ce passage: <From it (belsan) oil of Chrism was extracted,and it was like the fat on Tut, and Babah and Hatur, the eleventh, and the thirtieth ofParamoudah, but nothing could be extracted from the balsan in Keiak> (p,43). Voir ladiscussion àl'Appendice, g 3, p. 63.

66Le Myron est utilisé lors du baptême (cf , n, 27 ci-dessus).

35

36 U. ZANETTI

Dans ce puits se trouve la pierre sur laquelle s'est assis Notre-Seigneur

Jésus-Christ (à Lui la gloire !i lorsqu'il vint de Palestine en te''e d'Égypte

avec Notre-Dame la vierge Marie et le vieillard élu, Joseph le charpentier'

Et les envoyés des Grecs, des Francs, des Éthiopiens et des Nubiens ont

coutume, lorsqu'ils viennent à la Porte6?, de se rendre à Matariyya' d'y dres-

ser des autels pour y célébrer et y communier après s'y être baignés dans

<cette> eau6t.

Le iardin du camPhre

Pendant la guerre civile, le baumier ne fut plus irrigué et on le négligea;

on en transplùta alon dans des vases6e, et on en planta dans le jardin dit

<du camphre>, au CaireTo; on lirrigua d'eau et on en prit grand soin, mais on

ne lui trouva aucune qualité particulière, car sa particularité résidait dans

l 'eaudecepui ts<deMapriyya>etdansnul leautre.ongardadoncsespousses près du puits, (car) elles ont la particularité de guérir ceux qui,

fiévreux et maladis, s'y baignent ave_c foi?r: ils guérissent. Et Al-Ma'mùn

Mulrammad ibn Fâtik, le vizir d'Al-Âmif2, en transplanta une partie, qu'il

*fol.2T plaça dans le grand jardin, en I'année 51873, et il promit à Abû l-$asan * ibn

baqiyya, qui était chargé de la coction de son huile' de lui donner la somme

de mille deniers s'il en tirait de I'huile; celui-ci se mit donc à son service et

s,efforça de cultiver <l'arbre>, mais il n'en sortit guère de lhuile en quantité

suffisante.Et près de ce puits il y a une grande vasque toujours pleine de son eau' et

les chrétiens jacobites?a viennent à ce puits, hommes - les prêtres aussi

bien que b péuple _ er femmes, le 24 pachôn de chaque année. c'est le

jour où Notre-sLigneur Jésus-christ, Notre-Dame Marie et Joseph le char-

pentier sont arrivés en Égypte, sur la parole de I'ange à Joseph: <Lève-toi'

prends I'enfant et sa mère et va en terre d'Égypte, et restes-y jusqu'à ce que

je te le dise> (Mt 2'13).

6? C'est-à-dire à la cour du calife; on sait que <lhsage de nommet "porte" ou "seuil"

1e palais,,. d,un souverain était anciennemenitrès_répandu (Iran sâsânide, Égypte des

Pharaons, IsraëI, Arabes, Japon> (EI 2,859b, s'v ' Bàb'i 'Alî)'

6rpuisque l'église avait été confisquée et détruite par les musulmans, il ne restait

plus qu'à cétèbrer si' des autels de campagne, que l'on devait donc dresser à chaque fois'

6s Qasriyya signifie ici "vase, cuve" (Dozx, Supplément' ll' p' 353a)'

?o Selon l'éd., ce nom vient de Kafùr aËIâJi?Ci; ce lieu se trouvait dans le gartg (litt.:..canal,golfe'')duCaire,làoùsetrouveaujourd'huilequartierduMouski.

?lLesvoyageursattestentaussiquel.onsebaignaitdanslepuitsdubaumier'

72Al-Àmir, loc calife fâlimide, régna de l10l-1130 A.D, (n. 53 ci-dessus); Al-

Ma'miin (Abû ,Àbd Allâh Mu{rammad b. Fâtik al-Ma'mûn al-Ba1â'ilrI) fut son vizir de

rl2r à lr25 (cf. EI 2 l, ll2A, s'v. Al'Batâ'itti)'73518 hé9. = tt24 A.D.?4C'est-à-dire les Coptes. Dans les manuscrits médiévaux, les Coptes s'appellent

souvett eux-mêmes <jacobites>.

MATARIEH

Et les gens viennent prendre la bénédiction de ce puits et se baigner danscette vasque après <qu'on ait récité> la prière sur I'eau et <qu'on I'ait>bénite en traçant sur elle le signe de la sainte croix; ils s'arrêtent aussi àl'église de Notre-Dame à Miniet $uradrs, ils y prient et y lisent I'homélie dece jouf6, ils y célèbrent, communient et rentrent chacun chez soi, en paix.

Il en va de même le tl Tôbe77: ils se plongent <dans I'eau> * et com- *fo1.22"

munient le l l du mois dans l'église de Miniet Surad, chaque année.Cette histofue commença sous le régime des Uzes et des Kurdes, sous le

califat d'Al-Musta{î' bi-Amr AUeh?8 et le règne d'Al-Nâsir Yûsuf ibnAyyùb le KurdeTe, et non sous le régime f?ifmide. En effet, ils empêchaientI'accès à ce <domaine> pour protéger I'huile et les branches du baumier. Laplantation <recouvre> 12 feddâns8o, et on rapporte que ses terrains couvrent17 feddâns8l; dans ces terrains, on a quatre instruments d'irrigation (saqiah),<un> de chaque côté, et de chaque puits <sortenF 3 ruisselets - en plus dupuits ancien, dans I'eau duquel furent lavés les vêtements du Christ. Dansle circuit de ces canaux toute I'eau se rassemble en un seul courant, qui serépand dans tout le jardin.

Et voici, d'après ce qu'on rapporte, comment se déroule I'incision du bau-mier aux jours de Parmoute82. Trois hommes en sont chargés, I'un prati-quant trois incisions sur chaque branche, à I'aide d'une pierre coupante etnon par le fer83; un autre recueille I'huile sur un bout de coton, qu'il exprimeensuite dans un récipient destiné à tout recueillir, et le <troisième> panse

T5Aujourd'hui Mostorod (près du Caire) [note de l'éd.]. Cf. Truu, Chr.-k. Âg.,1663-1666.

76Il s'agit évidemment du texte prévu par le sermonnaire pour le 24 Pachôn,racontant la venue en Égypte de Notre-Seigneur: il est résumé dans le synaxaire.

??Conespondant au 6 janvier julien: fête de l'Épiphanie.78Al-Mustadi' bi-Amr Allâh, Abù Mu(rammad al-Hasan, 33o calife 'abbâside

(l 142-1 180) qui régna à Bagdad de I 170 à I I 80 A.D. : cf. EI 2, VIl, 7 07.TeIl s'agit bien sûr de Saladin, $alâ{r al-Dîn Yùsuf I (fils de l'émir Nalm al-Din

Ayyùb le kurde), né à TakrÏt en I138, que Al-'À4id li-Din Allâh nomma vizir le 26 marsl16gaveclet i t ted'At-Matikal-Nôyir(cf.EIr, IV,87ss). RappelonsqueAl- 'ÀÇidl i-DînAUâh était le onzième et demier calife fâlimide d'Egypte, et qu'il régna de I 160 à 1l7l(c1. EI 2, l, 202-203). Le texte arabe de notre chroniqueur donne bien ici: fi mamlakot Al-NàgirYûst{...

t0Aujourdhui, I feddân vaut 4.200,833 m2; l2 feddâns = 50.410 m2, donc un peuplus de 5 hectares. Au départ, le feddân se définissait par la quantité de terre qu'un bæufpouvait labourer en un jour et correspond donc à acre: I'acre anglais couvre d'ailleurs unesurface à peu près équivalente à celle du feddân, semble-t-il (4.046,86 m2),

8lSoit 71.414 m2, ou un peu plus de 7 hectares.82Le texte porte ici le terme laryûd ou laryûda, mot inconnu. Comme ci-dessus (n.

65), Tr. A. Mak, suppose la leçon corigée Barm,ùda (= Parmoute, avril) et traduit cepassage: <It was indicated that il was accustomed in the days of Baramouda for 3 men toripopenthetreesofBalsan>(p.46). Voir ladiscussionàl 'Appendice,$3,p,63.

83Détail répété par presque tous les voyageurs.

37

U. ZANETTI

I'incision avec des feuilles qu'on apporte d'A5mûn Tanâlr de la DaqahliyyaEa

- et de nul autre endroit-, et il s'agit de <feuilles de> papyrus et autres.*fol. 23' On rapporte aussi la récolte de I'année 509t5, * à savoir 150 livres égyp-

tietnes de sève, et chaque livre produisit une seule once d'huile pure86.L'époque où on le produit se situe après le lever de l'Étoile du Chienrz, et<ce> lever après la descente de Al-baldatï. Et on a installé un portier <pourveiller> sur le baumier, et celui qui fut son rival lui a reproché <les pots-de-vin> qu'il cherchait à obtenir des gensee.

Lafête de la Montée <en Égypte> à la pierre du puits du baumier

Amba MrbâTl, évêque de Basçaeo, a célébré <la messe> sur la pierre qui<est> sur le puits du baumierrt, à la vigile du dimanche 24 Pachôn 901 dessaints martyrs, qui est le jour de la Montée en Égypte de Nore-seigneurJésus-Christ, de Notre-Dame Marie et du juste Joseph; cela correspond au16 Safar 58<1> <de I'hégire>ez; un grand nombre de personnes, hommes,

8aCf. AMÉLINslu,Géographie, p. 170 (<Eschmoun-Erman>, autre nom d'ASmùn-

Tanâh).t5De I'hégire, donc I I 15-l l 16 A.D.86Le texte parle ici de 150 ra1l, chzqre rall (pl. ar1ôl) produisant we awqiyya (sic;

on trouve plus souvent wiqiyya). Ces mesures de capacité, que nous avons rendues parleur équivalent français, ont en Égypte les valeurs suivantes: I rall égyptien = 449,28 gt(livre); I wiqiyya vaut lll2 de ra1l, donc 37 gr (once). Une récolte de 150 rall égyptiens adonc produit 67 kg 392 de sève, dont on a tiré 5 kg 550 dhuile pure.

8?C'est-à-dire Sirius. Le <Lever du Chien> est conventionnellement fixé au 26juillet.

ttll s'agit ici - selon le Prof. P. Kunitzsch, de l'Université de Munich, que nousremercions chaleureusement de son aide - de la 21c mansion hnafte (<al-balda, rêgionvide d'étoiles entre les mansions no' 20 et22>: EI2, vI, 359b, s'v. Manôzi[).

8ePhrase peu claire, que 1r. A. Mak. uadrrjt" <A guard was charged to keep thebelsan, but he was dishonest in that he gave much of it to the people for monep (p. 46).Voici la phrase arabe telle qu'elle figure dans l'édition (A. Mak.' I' p. 31); notre inter-prétation suppose la tranformation de certains,td marbû'1a en hé:

.,"rUl .C,. 1r.r:-r t{ i:L,r. i-} .r-11 vl; O4Jl ,-1" J.+re0Sur cette ville, I'ancienne Boubaste, située à côté deZagazig (Qalyùbiyya), voir

ArrrÉLtxuu, Gëographie, p.89, L'évêque Michel de Basla est cité à plusieurs reprisesdans notre texte, pour des événements situés dans le demier quart du xtrc s.

91 Cette pierre sera qncore signalée par Antonius Gonzales au xvne siècle: <Ensuiteils ont construit une église où on avait jadis lhabitude de célébrer la messe sur la petitepierre sur laquelle les langes du Petit Jésus furent lavés et séchés. Cette pierre est main-tenant mise dans le mur du lieu où, selon la tradition, la Mère de Dieu fit reposer lbnfant.Malheureusement, les Turcs ont transformé ce lieu saint en mosquée...> (LnoIs, Goz-zales, p. 129-130). Du tenrps d'Abû l-Makârim, la piene était encore fixée dans le puits.

gzl-'éd. signale que le ms. portait <580), et que le <2> aété ajouté entre les lignes(tous ces chiffres sont écrits en toutes lettres). Toutefois, la correspondance est: 24Pachôn 901 A.M. = 19 mai 1185 A.D. = 16 $afar 581 hég., jour qui était bien un di-manche; lebonchi f f reestdonc5Sl,etnonpas580ni5S2! Ontrouveraplusloinladatede I'an 902 A.M'(= 582 de I'hégire), qui a dû entraîner la correction fautive.

38

tIa

i 39MATARIEH

femmes, enfants, servantes et serfs, communièrent de sa main; ils passèrentla nuit à Malariyya et à Miniet $urad. La messe du jour fut célébrée parAmba ÔubriyâI, évêque de Miçr, dans l'église de Notre-Dame à MinietSurad, et un très grand nombre de personnes - plus que la veille - com-munièrent de sa main. Ce fut là I'origine des messes que les Coptes célè-brent sur la pierre <du puits du baumiep, <usage> qui s'est maintenu lesdimanches et jours de fête de manière ouverte et publique, le célébrantétant,le prêtre Abù l-Badr, (du village) de Basliyya, qui est chargé de I'inci-sion du baumier, de son entretien et de la production de son huile. * Une *fol.23Yautre messe <eut lieu> le jeudi 12 Paône de cette année-là, pour la fête deS. Michel archangee3. On y célébra également le 24 Pachôn 902, qui était,encore une fois, la fête de la Montée <en Égypte>, comme expliqué ci-dessus.

Ce long texte, qui nous fournit tant de détails sur l'état de Ma-tariyya au xrrc siècle, sera recoupé par des récits de voyageurs. Eneffet, les croisades, puis le commerce, amenèrent au Proche-Orientbon nombre d'Européens, et plusieurs d'entre eux eurent à cæur de serendre en cet endroit, qui était considéré comme un célèbre pèlerinage.Toutefois, avant de leur céder la parole, il convient de jeter encore uncoup d'æil aux témoins arabes, chrétiens et musulmans.

5. Autres textes copto-arabes

Outre l' Év an g il e de I' E nfanc e du S auv e ur, I'homélie de Zachartede Satâ, le synaxaire et Abii l-Makârim, on trouve mention deMatariyya dans (au moins !) trois ouvrages importants de la littératurecopto-arabe, dont le statut dans l'Église copûe s'apparente à une recon-naissance officielle : l' H istoire des P atiar che s d'Alexandrie, le Livredu chrêrne etla Larnpe des ténèbres.

,1. LTlistoire des Patriarches d'Alexandne et la constuction de l'église

Tous ceux qui étudient, de près ou de loin, I'histoire de l'Égfisecopte ont eu l'occasion d'affronter au moins une traduction deI'Histoire des Patriarches d'Alexandrie qui était, jusqu'il y a peu, in-dtment attribuée à Sévère ibn al-Muqaffa', évêque d'A5mûnein au x"sièclee+. Une de ses continuations, la biographie du 72" patriarche

e3Note de l'éd.: <Connue comme'id al-ntqtar,eaC'est lohannes Dnt Hnmn qui a définitivement restitué à Mawhùb ibn Mançiir ibn

Mufani! le rôle qui lui revient; nous lui avons fait écho dans les 48, 108 (1990), p. 292.

40 U. ZANETTI

Jean V (1131-1166 A.D.), due à la plume de son successeur Marc III

ibn Zur'a (qui futpatriarche de 1166 à 1189 A.D.;es, mentionne la

construction - ou plus exactement la re-construction - d'une église

à Matariyya, placée sous le vocable de S. Georges, et sa confiscation

ultérieure par les musulmans. La date de cette reconstruction n'est

nlalheureusement pas indiquée, mais celle de la confiscation recoupe à

peu de choses près les données que nous avait fournies Abù l-

Makârim: ce fut à l'époque de I'assassinat du calife Al-7âfir, en I'an

548 de I'hégire (1153-1154), comme le montre le contextee6.

Les chrétiens avaient construit, sur les restes de l'église ancienne, uneéglise à Malariyya, là où se trouve le puits du baumier qui produit I'huile duchrême; ils I'avaient consacrée au nom de saint Georges (Mârî Giréis) etycélébrèrent avant d'en avoir achevé la <décoration> pictutale. Les musul-mans la détruisirent et construisilent à sa place une mosquée.

Deux particularités distinguent ce récit de celui d'Abù l-Makârim:

la consécration est faite au nom de S. Georges, et les musulmans y

construisirent une mosquée; sur ces deux points, nous aurions plutôt

tendance à croire Abù l-Makârim, car une consécration à Notre-Dame

de ce lieu rappelant le passage de la Sainte Famille paraît cent fois plus

naturelle que le patronage de S. Georges, et aucune mosquée ne

semble avoir été remarquée à cet endroit par les voyageurs des xItI" et

xrv" siècles. En revanche, il n'est pas sans intérêt de noter que

l'Histoire des Patriarcles souligne qu'une église existait déjà aupa-

ravant à cet endroit:la tradition est donc bien antérieure au xre siècle.

2 . Le Livre du chrême, ouvrage anonytne du milieu du xrve siècle

Puisqu'on sait que le baume intervient dans la composition du

Myron ou <<Saint-Chrême>>, on ne s'étonnera pas de voir que le cé-

lèbre Livre du chrême, contenu dans le manuscrit Paris arabe 100 et

malheureusement toujours inédit, consacre un paragraphe à cette

plante... et à Maçariyyaez.

es Cf . CE,IY , 7238'1242: voir 1240b.e6 HPc, ilI/l, fol, 199': texte p. 44, ttad' angl. p' 73. Le passage que nous allons

citer suit le récit de la prise de pouvoir de'Abbâs (qui fut ministre en 1153-11154) et

celui de la prise d'Ascalon par les qoisés (1153), et précède immédiatement I'assassinat

du calife (1 154).9?Dom Villecourt avait eu I'intention de le publier mais n'a pas pu mettre son projet

à exécution (cf. Vlt-lrcourr , Livre, p, 49),

,I

I MATARIEH 41

Cet ouvrage comprend sept écrits distincts, à savoir d'une partune lettre, en 9 paragraphes, qu'un prélat copte inconnu a adressée,entre 1189 et 1199, à un évêque syrien, le "maphrien Jacques" (dontle nom épiscopal était en fait Grégoire)e8, lequel était le neveu dupatriarche syrien orthodoxe Michel le Grand; c'est cette lettre, dontVillecourt a publié une traduction française, qui nous intéressera pourI'instantee. Après cette lettre, le manuscrit paris arabe 100 comprendsix relations de cérémonies de consécration du Myron accompliesente 1299 et "1.346, et cette dernière date semble être aussi celle de lacomposition du Livre du chrême, composition qui est due à AmbaGabriel, évêque de Bibâ al-Kubrà s1fihnf,stoo.

La Lettre au maphrien Jacques expose les raisons pour lesquellesle Myron est utilisé lors de I'administration du baptême, et explique lamanière de le préparer; elle inclut notamment un paragraphe sur lebaumier de Magariyya, rapportant à la fois comment le baumier estarrivé en ce lieu et pourquoi il a absolument besoin de I'eau qu,on ytrouve. Nous citons ici d'après la traduction de dom villecourt, par-fois légèrement modifiéer 01.

..1<<En l'an 6 {u^(qryg de,Théodose le Grand:r,Théophite,le 33e patriarched'Alexandrie (385-412); dut pre.ndre une décision qie Dieu lui iuggéra aumoyen d'un miracle: I'eau du baptistère avait refusé de recevoiiiour lebaptême un enfant que so mère avait baptisé en ,oute por", quj,il étoitmalade et de crainte qu'il ne mourût sans- baptême. comprenait donc lavolonté divine, Théophile décida que désormais le baptême pourrait êtreconféré en tout temps (saufpendant le carême, à moins qu,il n,y ait urgence)et par tout prêtre; jusque là, d'après cette histoire, on ne bapisait àAlexandrie que le 6c vendredi de la 6c semaine cle carêmeto2.,l

eELe "maphrien" était le métropolite délégué par le patriarche syrien orthodoxed'Antioche avec juridiction sur les pays orientaux (primitivement inclus dans I'emoireperse sassanide). Il est étrange que la lettre soit adressée au <maphrien Jacqueso,d'après le nom de baptême du prélat, alors qu'il avait pris le nom de Grégoire lors de sonordination épiscopale (cf. Vrucounr, Livre,p,50 et n. 2).

99Traduction publiée dans vrl,t-EcouRr, Livre. Les raisons justifiant la date pro-posée ont été exposées dans Vurcornr, Manuscrit 1,p.502.

rmCes relations ont été présentées par Vrr-I-Ecounr, Manuscrit I etll.l0lNous avons pu vérifier sur place le passage qui va être cité. - VrLLrcounr,

Livre 'p.58et59(=Parisarabel00,f .6*) . I lestànoterquelesecondpassage(al inéas2 et 3 ci-dessous) manque dans le vatican arabe 44: cf, A. vlN Lrxrsoroàr,ie *s.vatican copte 44 et Ie livre du chrême (ms. paris arabe 100), dans Le Muséon,45 (1932),p. l8l-234 (voir p. 185).

r02le problème de la date du baptême dans r'Église copre a été traité par L. vrllr-couRr, z4 lettre de Macaire, évêqw de Memphis, sur la liturgie antique du-chrême et dubaptêmeàAlexandrie,dansZe Muséon,36(1923),p.33-46(déjàannoncé dansm.,Ma_nuscrit l l ,p. l3-19).

42 U. ZANETTI

En complément de son espérance et dénouement de sa belle action' ce

père (Théophile) reçut d'on a"ge saint I'ordre de se rendre à Jéricho' de'o.rrrpoa"ri.s arbres du baume et de les planter à I'endroit où le Seigneur

se lava, lors de son retour dans la terre d'Iiraël' en compagnie de Marie' de

il;il; a. iaro-e et d; Yûsivâ llosias]' fils de Joseph; de fendre.ce- bois

.u".'rrrr. pierre de silex, et d'in extraire une huile dans du verre' de la re-

cueillir "i

A" U cuire avec des aromates comme Moïse I'ordonna pour

thuile de I'onciion...

Secrton où est mentionné ce qui ativa à proPos du puits du baumier' ce

quifut soignerrr^rr, "i'iii'Zâi

i'ito et dans t'ép'euvte de sa cuhure' et de

fhuileros qui en découle.

On dit qu'il y avait un homme qui s'appelait Abû Naçr ibn Quraytah le

juif. Il écàviti Bahâ al-d-rn QaraÀuÉror' qu'il se proposait de faire dispa-

raître les traces du miracle tfputuitttnt dans I'huile que I'on extrait du

baumier de Matarieh. n Oit I Qarâqùs: Cette affaire, les chrétiens I'ont

renduecélèbredanslesannéesprécédentes:i lsortunehuiledecebaumier'q"uta if est arrosé de n'importé quelle eau' autre que I'eau de ce pujts' et

incisé. On l'autorisa à creuser un puits dans les jours d'Al-'AzIz fils de

çffi ar_o-rn. Il y dépensa une somme considérable et arosa le baumier; on

iin"iru à l'époque de son incision, et il ne s'y trouva pas d'huile du tout' r a

deuxièmeannéei lmélangeal 'eaudesdeuxpui tsetanosa; i lsot t i t (duùuu.i.rl moins d'huile qu-'lt n'tn sort à I'ordinaire' Après cela il se mit à

aroseraveclepremierpuitsseul,etl 'huilesortitdenouveaucommeç'avaitété la coutume touiours auparavant' Le forage du susdit puits eut lieu I'an

590 de lhégire, qui correspônd à I'an 911 des martyrs [= 1195 A' D']'

Le premier pâssage nous rappelle la manière dont Zachatie de

Satrâ ($ -2

ci-dessus) exptiquait la venue du baumier à Malariyya; chez

Zacharie,toutefois, on uoit l'Enfant-Jésus prendre le bâton de Joseph'

qui provenait d'un baumier de Jéricho, le casser' le planter' I'arroser et

f. fuita pousser. D'après la tradition rapportée ici' ce n'est qu'au lvc

siècle que le baumier aurait fait son entrée en Égypte' ce qui est

strement inexact, comme nous le dirons dans l'Appendice ' Ë | '

Le deuxième passage nous rappelle la morale que nous avait déjà

enseignée Abû l-Makâii* a ptopos de l'essai de transplantation du

baumier dans le'<Jardin du camphre>>lo5: la production de baume-est

directement liée à la présence de I'eau du puits dans lequel les vête-

ments de Jésus ont été lavés'

lo3Danscepassage'domVll,rrcounrtraduit lemotdahnpar.uc,alorsqu' i l lerend

ailleurs par huile, comme nous I'avons fait ici'

ro4}f. EI r, t. II, p. 786-787 [note de dom Villecourt]' C'était un eunuque qui fut

fonctionnaire de Saladin, lequel avait toute confiance en lui'

10s Cf. ci-dessus, P. 36.

MATARIEH 43

lI

La Lettre au maphrien Jacques parle aussi, au $ g, et en détail,des divers types de baume et de la manière de reconnaitre cerui qui estauthentique et de bonne qualité. Mais, puisqu'il n'y est plus quàstionde Matariyya' nous ne réimprimerons pas ici ces précisions qui relè-vent plus de la botanique que de l'hagiographie, et sont commodé-ment accessibles en version française.

3. LaLampe des ténèbres d,Abû l-Barakdt

Les textes que nous venons de ciær étaient sans doute connus ducélèbre encyclopédiste Abù l-Barakâr ibn Kabar (t 1324),auteur de laLampe des ténèbres pour éclairer (t'intertigence) du service hitur-gique) 106. Celui-ci, qui consacre au Myron son chapitre IX, y parledu rituel qui y est lié, de la manière de le consacrer et de le préparer.Il était donc normal qu'il parrât du baume, lequer entre dans la.o*po-sition du Myron.

Il n'est pas sans intérêt, du point de vue de l'histoire littéraire, defaire remarquer que re premier passage d'Abù l-Barakât rapporte lamême histoire que la Lefire au maphrien Jacques,dans un texte fortsemblable: les deux ouvrages ont puisé à une même ssulsçr''. psulla suite, en revanche, Abii l-Barakât résume de manière autonome desdonnées présentes aussi dans le Livre du chrême. c'est ainsi que I'ontrouve une remarque (l.taiiya) où il est question de MaFriyyaroe;

Remarque: on dit que lorsqu'on transporta le baumier des bords duJourdain et qu'on le planta près du puits (qui se trouve) à l'endroit nommé"Matariyya", I'huile (du baumier) y apparut À I'exclusion de tout autre endroitoù il y avait un baumier par suite d'un miracle du Seigneur.

Abù l-Barakât, on le voit, ne tranche pas sur le point de savoir sile baumier a été importé en Égypte par ra sainte Famille ou s,il s'agitd'une grâce reçue par le patriarche Théophile; en revanche, il con_firme, comme bien d'autes sources, que le baumier de Mapri yya était,dans le premier quart du xlvc siècle, le seul exemplaire Oe son espèceconnu en Égypte et utilisé pour re baume. Il est donc assez nonnal

.,.. .tofE1-arabe MiglAl aLTutnafî î(a[ al-ftidna (GCAL II,439). Nous utilisons icil'éd. de la lo partie, publiée par le p. Sirai (Le-Caire, t97l, sans t aductiorù ;:î;;:lola citation va de Abû l-Barakât IX (éd. Slun, p, 351, l. li:Wa-kàn al-,imàddifa wdfida..) = Lettre au maphrien, g | (Vnl,rcourr,liire,p,'57 = f. S, aorn, j.i*qo,aib.id. (éd. S.run, p. 352, t. t4: wa-iuil!âlihi dahn masla tiinddihin) = trttri âiho-phrien, fin du g l (p. 59: et son emproi'comme huile d'onctron pour teur-aaptene,l.

- '

I 08 Abù l-Barakât, M ig bdl al-7ulnc, D( (éd. Srrr,rn, p. 352, l. lg_2n).

44 U. ZANETTI

que la tradition liée au puits qui se trouvait en ce lieu ait servi de lé-

lenae étiologique destinée à expliquer pourquoi ce[ arbre n'était

cultivé nulle part ailleurs: I'eau de Maçariyya est indispensable pour

faire produire au baumier le suc tant convoité'

6. Les récits de voyage en arabe

Le baumier de Matariyya a éveillé la curiosité de plusieurs écri-

vains arabes musulmans, auteurs de récits de voyage ou intéressés par

les sciences naturelles - et non pas, on s'en doute, par I'hagiographie

chrétienne. C'est ainsi que 'Abd al-Latîf, un savant encyclopédiste

musulman né à Bagdad en 1162/63 et mort dans la même ville en

lz3llgzros, s'y est longuement attardé . Le texte de cet auteur plein

d'intérêt, publié au xvlre siècle, a été uaduit en français, avec un riche

commentaire, par le célèbre orientaliste sylvestre de sacy; il présente

d'ailleurs avec la description d'Abù l-Makârim un air de famille qui

mériterait de plus amples recherchesll0. vu que ce long texte, étxanger

au thème premier de notre article - le culte de la sainte Famille à

Malariyya - offre sur le domaine du baumier et la récolte du baume

maints détails susceptibles de compléter nos auteurs chrétiens, il nous

a paru opportun de le citer dansl'Appendice, ï 2'

L'éôrivain égyptien Al-Maqrîzïttl consacre également une page à

Matariyya et au baumier; on la trouvera citée dans Sacv, p' 88-89'

-ui, ,urtout dans l'édition de l'Institut Français du Caire, qui est

munie d'une traduc1is1ll2, et que nous ne reprendrOns pas ici. En

rosMuwaffaq al-Din Abù Muhammad b. Yùsuf 'Abd al-Lat-rf al-f lÉAa!!' également

connusouslenomd'Ibnal-Labbâcl. cf,EI2,76b:GALI,p.48l(1lo);GALSI,p.880.l10si I'un de ces deux auteurs a utilisé I'autre, iI faudra conclure que c'est'Abd al-

Lat-rf qui a utilisé Abii l-Makârim, lequel a écrit le premier. Mais il faudrait d'abord voir

dansquellemesurei lsnedépendentpastousdeuxd'unesor[cecommune-recherchequi aurait débordé largement le cadre de notre arlicle'

rrlAbû l-'iAbbes Atrmad b. 'Ali b. 'Abd al-QadÎr (b. Mulrammad) alttygn]laqi

al-DIn al-Maqrizî, né et mort au caire (1364-1422) : cf. EI 1, IU, 186-187 ; GAL II' 38-41 ;

GALS 11.36-i8. Cf. aussi KrnrY,rNxoPoulos - WsIss, n" 563 (II' 529)'

rt2yoOrlri, Description topographique et historique de l'Égypte,traduite en français

paru.Bouru,ul(=MIfAO,rzj,paris, lg00;Maqrfzl.El-mawâ,izwa'l-i'tibâr11 dhikrel-

khitat wa'l-âthâr, êdiré par G. Sy'Irr, t. IV' 2c partie: ch' L-XCIV (= MIFAO ' 49)' Le

Caire, t9?A. Il est question de Màpriyya dansle chapitre sur 'Ayn Sams (chap._66, $$

ig,-3i), t"*r MIFiO 49, p. 100-102 (voir aussi les notes infrapaginales)' traduction

MIFÀ7 17, p.6g0_6g2. _ Maqrizifair encore allusion au baumier, sans parler de

Matariyya,dansunautrepassagecitéparsrcv,p'SS,quinhpporteriend'original '

MATARIEH

effet, ce que cet auteur apporte de nouveau par rapport à 'Abd al-LatIf, c'est (à part les histoires du synaxaire, omises par S. de Sacy) lamention de la sévérité avec laquelle est gardée la récolte de baume,propriété du sultan - donnée qui recoupe celle que nous fournissentles voyageurs occidentaux contempolnlls -, ainsi que I'informationque le baume servirait au faitement de certains malades.

Un troisième auteur arabe, cité par SAcy, p. 90, est l'<<auteur duGaraib alajaïb.:-{t+-Jt .*t-/> - pour garder I'orthographe et latranslittération de S. de Sacy -, dont le nom est <<Ibn al-Wardï>> etdont I'ouvrage s'appelle, pour être exact, flartdat al-'a{d'ib wa-farîdat al-gard'ib; tout le monde s'accorde aujourd'hui pour déclarerson ceuvre sans intérêttl3, ce qui n'était pas le cas il y a deux siècles.On remarquera seulement que - sans nommer Matariyya, mais seu-lement 'Ayn Sams - il rapporte la tradition que le puits qu'on ytrouve est en relation au Christ (<... car le Christ - sur lui la paix ! -s'! lav4>>)ttl.

En passant, S. de Sacy cite un quatrième auteur musulman:<<Kazwini>> (p. 90), géographe arabe du ;n1c si|çlslls. Celui-ci, on Iesait aujourd'hui, a pillé ses prédécesseurs, et en particulier Yâqùt, quimourut en 1229 âgé d'une cinquantaine d'années après avoir écrit(entre autres ) tm D i c t i o n na ir e g é o g r a p hiq u e p articulièrement riche I I 6'il est donc normal que nous ayons consulté ce dernier, d'autant plusqu'il est presque contemporain d'Abù l-Makârim. Dans son Mu'lamal-bulddn (litt.: <dictionnaire des pays>), Yâqùt traite de Matariyya aulivre IVl17.

r13 SirâÈ al-Drn Abù $afç 'Umar, mon en 1457: c[, EI r,ll,454a;GAL II, l3l-132;GALS fi,162-163.

rraAegyptw auctore Ibn al-Vardi... Ed. Christianus Martinus Fh,rsnN Rostochiensis,Halle, 1804 (texte p. 34, trad. p.50).

trsZakariyyâ b. Muhammad b. Ma{rmud Abù Yalryâ al-QazwinI, né à Qazwin vers1203 et mort en 1283 A.D. (cf . EI 2,IV, 898-900, avec référence à l'art. de M. Kowalska,où sont analysées et identifiées de manière presque exhaustive les sources utilisées par laGéographie = Âlar al-Bihd wa-albàr al-'ibàd d'Al-Qazwini; en paniculier, pluJ d'unquart des articles de cet ouvrage ne sont que de simples exuaits de Yâqtt).

ll6sihâb al-Din Abû'Abd Allâh ya'qùb b. 'AM Allâh al-Tamawi, plus exactemenrappelé Yâqût al-Rùmi (car il était né dans I'empire byzantin et avait été emmené enesclavage dans son enfance; plus tard, il se donnera une généalogie fictive), naquit vers1 179 et mourut en 1229 à Alep: cf. EI t,lY , l2l6b-l2l7a; GAL l, 479481; GALS I, 880.Cf. aussi Kln.r,yrNxopouros - lvErss, nô 493 (II, 488).

rrTJacu{s geographischesWôrterbuch..., hrg. F. Vy'ûsrENrrr-o, Leipzig, 1866-1873:t. IV/2 (1869), p. 564, l.9 - 565, l. l. - ou bien YÂetn AL-RtIMI, Mu'djam al-buldàn,t.5,Beyrouth, 1957, p. l49ab.

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46 U. ZANETTI

Al-Malariyya est un village d'É'gypte; c'est là qu'on trouve le baumier

(ialara' al-balsôn) dont on tire I'huile, et la particularité de son puits, c'estqu'on dit que le Christ (al-Masîb) s'y est lavé; au Nord, il y a la vieille (ville

de) ,Ayn s.In, .u milieu de laquelle se trouvent les jardins (de Matariyya).

Je l'ai vue, et j'ai vu le baumier; il ressemble à I'arbre à henné et au grena-

dier, lorsqu'ils commencent à pousser. Il y a des gens qui le fendent et qui

distillentirr le suc de ses tiges dans une fine bouteille de verre, et ils le

rassemblent avec diligence et c'est au prix d'un grand effort qu'on en produit

deux cents livres (ra.tl) égyptiennes dats l'améelle.Il y a là un chrétien qui le cuit d'une manière connue de lui, sans que

persome ne le regarde, et il en raffine I'huile. Les rois ont essayé de lui

faire livrer le secret, mais il a refusé en disant: <Dussé-je être tué, je ne le

livrerai à personne tant que j'aurai une descendance; mais si ma descen-

dance tend à disparaltre, alors je le livrerai à qui vous voudrez>'

La terre où pousse cette (plante) est, à ce qu'on peut en voir, semblable à

celle qui I'entoure, et la particularité réside dans le puits dont on tire I'eau;j'ai bu de son eau, et elle est douce;j'ai (aussi) trouvé un gott agréable à la

matière grasse (qu'il Produit).Al-Malik al-Kâmil demanda à son père Al-'Àdil la permission de culti-

ver quelques plants de baumierl2o; il la reçut, et, avec une ferme résolution,

sema (du baumier) dans une terre confinant à celle du baumier bien connu.

Il ne réussit point, et n'eur pas une goutte d'huile à purifier. Il demanda

alors à son père de faire venir un canal d'irrigation depuis le puits dont il est

question, il exécuta (ce projet)' réussit et prospéra.Hors d'Égypte, il n'y a pas au monde d'endroit où pousse le baumier et où

son huile est de bonne qualité. Cependant, quelqu'un qui a vu le baumier

d'Égypte m'a raconté qu'il se trouvait aussi dans le tliËâz; il ajouta que c'est

exactement I'arbre du baiàm, mais nous n'avons pas entendu dire qu'on en

tire de I'huile.

Il y a bon nombre d'autres textes de la littérature arabe qui font

allusion au baumier de 'Ayn Sams, mais qui ne citent pas Malariyya

ni les traditions chrétiennes qui y sont liées, et c'est pourquoi ils

demeurent étrangers à la recherche que nous menons.

llsÉd. de Beyrouth: t+rJriL., t+r:+r - alors que l'éd, de Vr'ûstenfeld donne ici

t+j$:*j-r r+r+.nt (qui l'expriment et qui recwillent).ttegls quantité de 200 rall vaut un peu moins de 90 kg'

l2oAl-Malik al-Kâmil (Naçir al-Din abù l-Ma'âli Mu[rammad b. al-Malik al-'Âdil)

vécut de ll77 ou ll80 à 1238. Son père Al-Malik al-'Àdil (Abii Bakr Mu[rammad b.

Ayyûb, sumommé ..saif al-Din") était le frère de saladin ($alâl.r al-Dr-n), qu'il remplaça à

^âint". reprises; à la mort de ce demier (1 193), il entreprit de reprendre la royaume de

son frère, ei y réussit à partir de ll98; il mourut en 1218. - Cf. EI2, ry,543 et I' 203'

h

MATARIEH

7. Les pèlerins russes

Maçariyya ne fut pas seulement visitée par des voyageurs arabesou des pèlerins occidentaux; les chrétiens d'Europe orientale ont, euxaussi, éprouvé le désir de visiter la Terre Sainte et de voir les lieuxdont leur parlaient les Évangiles, canoniques ou non. Grâce à laSociété Palestinienne Russe, bon nombre de ces récits de voyage ontété publiés - bien entendu en version originalst2t -, et uneexcellente étude sur ce thème a paru il y a une quinzaine d'années,celle de Seruexx (cf . A8,95 U9771, p. 210-212) grâce à laquelle routle monde peut s'orienter facilement dans ce dédale de textes. Le plusancien récit, qui remonte au xvc siècle, n'a guère été utilisé jusqu'àprésent, faute d'avoir été traduit; nous nous y attarderons donc un peu,négligeant ses successeurs qui n'apportent rien d'original.

Le pèlerin Varsonophij ("Barsanuphe": cf. StEuaNN, p.261,265et 435) - un hiéromoine originaire de la Russie du Nord, qui futpeut-être abbé de Novgorod et candidat au siège épiscopal de cetteville en L47l - se rendit deux fois en Orient: la Terre Sainte enL456,Le Caire et le Sinaï en l46l-L4G2. Le récit de son deuxièmevoyage nous fournit une description assez haute en couleurs, quimérite d'Q6s siftisl22;

À une distance de la ville <du Caire>, après deux milles et demi, setrouve la sainte eau, que I'on appelle BaumetB. C'est là que Notre-seigneurJésus-Christ vint, depuis la ville de Jérusalem, avec la très-sainte ViergeMarie, sa mère, et Joseph, son $teur. Du côté du Nord, il y a un lieu saintoù Noue-Seigneur a habité, se cachant du roi Hérode. On y trouve un

l2l une liste de traductions en langues occidentales figure dans: H. Doxrvnn, pdlger-fahrt ins Heilige Land, Die âltesren Berichte christlicher palâstinapilger 1+,-2, ràm-hundert), Stuugart, [979] (recension dans Â8, 98 tt980l, p.423426):voir D. 31, n. 55.versions françaises dans Knrrrowo et dans o. voLKoFF, voyagcurs russcs in Égypte (=Rech. d'archéol, de phtlol. et d'histotrc,32), Le Caire, 1972 (lequel donne des-iitraitsdes récits de Basile, de Gagara, de ViSenskij et dbutres: voir Matartch, index p. 364).

lzD'après l'édition de Doutov: Xoxontre cBnenrron*oxt Brp<rl*ofuIn Ko cBnro-My rpaqy lepycannwt Bb 14561462 rî., tror peA. C. O. Âoarorr (= pravoslavnij pa-lestinskij Sbornik, XV/3 [= 45], Moscou" 1896. - Lc passage qui nous intéresse ici fi-gure au début du second'voyage, p. 16, de la l,5 au bas de la page.

l23lci et plus loin, Varsonophij a interverti les lettres et emploie lôcaov (commenominatif) au lieu de B^^c^M. - varsonophij confond, du moins dans son vocabulaire,la sève du baumier avec le baume distillé, ce demier avec le chrême (dont le baume nbstqu'un ingrédient, d'ailleurs essentiel), et même lc simple chrême avec le Myron con-sacré: il parlera en effet du <saint chrême que I'on donne au roi dÉgyprcr, alors que lbnn'apportait évidemment à ce chef dÉtat musulman que du baume non consacré.

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48 U. ZANETTI

vignoble, la sainte vigne de laquelle le chrêmelu coule sur la cucullelx. Et,

.o -o-"nt

de la Nativité de Jean-Baptiste, on coupe un rameau de chaque

vigne, on incline vers le sol toutes les vignes, et on place sous elles des

réiipients; le chrême ne coule qu'une fois par an, à cette fête. On recueille

ce saint chrême et on 1e donne au roi d'Égypte. C'est là aussi que I'on trouve

la dalle de pierre sur laquelle s'est assis Notre-Seigneur Jésus-Christ; cette

fierre de jaspe est murée dans le lieu saint et entourée d'un écrin qui est

iermé du côté Est126, et un extraordinaire parfum en émane. Et là, devant le

saint écrin, fait en pierre de marbre, il y a un bassin et une vasque d'une

profondeur correspondant à la hauteur de la poitrine d'un homme, et c'est là

qu'on se baigne dans l'eau sainte. c'est là aussi qu'est I'arbre du sycomore,

dans lequel Notre-seigneur Jésus-Christ s'est caché (pour échapper aux)

soldats du roi Hérode.Je me suis donc rendu à cette eau sainte du baume, j'ai embrassé la sainte

pierre sur laquelle le Seigneur a reposé, et, après avoir bu I'eau sainte, je me

suis baigné dans le bassin étayé de pierres. Cette eau est bien tiède et

douce. Etj'ai marché dans le vignoble dans lequel se trouve la sainte vigne'

et les Sarrasins m'ont donné un sarment, (eux) les gardiens de ce vignoble'

J'ai embrassé le figuier où le seigneur a été, et j'en ai brisé une branchel27.

Les autres voyageurs russes passés par Malariyya sont moins

loquaces. Le marchandVasilij (= "Basile": rocrb Bacnaufi), qui se

rendit en Égypte et en Terre Sainte en 146511466 (cf. SmmrNN' p'

267 et 435), signale qu'on trouve à <<Mataria> un figuier stérile, sous

lequel la Sainte-Famille s'est réfugiée, et près duquel I'Enfant-Jésus fit

surgir une source pour désaltérer sa mère; l'eau sale qui avait servi à la

toilette de Jésus fit pousser en ce lieu de petits arbustes qui produisent

une huile susceptible de donner la guérison non seulement aux

chrétiens, mais aussi aux paiens qui ont foi en cette guérison. cette

pierre et ces arbres sont encore là, dit-il, et ce lieu se trouve à une

demi-journée du Cairer28.

ra Mouro (utgo ici, non vvpo), que nous rendons par "chrême"'12sgr 6611"0*, la ponctuation et négligeant un "et", car le texte édité (abréviations

résolues) "rt,0

n.rom rererz u8go xa rSro,uHnqrc h NÀ Pol(À€cllo lu,axHr npeÀrern. r

0r,t i loru oV tcerTa aogu rspuere... (p. 16, 1. l0-11), et devrait se traduire: <le chrême

toule sur lâ cuculle et sur lâ Nativité de Jean-Baptiste. Et I'on coupe'.'))'

126ll faut comprendre que l'on a devant soi une niche recouverte de plaques de

marbre, comme nous le verrons plus loin dans la description de Félix Fabri'

t27y"r6"i1continue alors (p. 16, demière ligne) avec la description des lieux saints

du vieux-caire I E iI y a là un autre endroit saint, dans la même ville d'Egypte, près de

Mi.sr elle-même, où Notre-Seignçur Jésus-Christ a habité...

r2sÉd. de Leonid: Xoxe*le rocrt Eac*Jrbt, noab peaaKqle' apxxMâHApI{Ta

/teo6asr(= Pravoslavnij Patestinskij Sbornik, IIl3 [= 6])' Moscou' 1884 (p.7). Version

française dans Ksnnowo, no X, p. 243-256.

MATARIEH

Plus d'un siècle et demi s'écoulera encore avant que ne passe parMatariyya (Vasilij Jakovlev) Gagara, un commerçant de Kazan quivoyagea en Orient de 1634 à1637 (cf. Serr'a,rNN, p.318 et43T. Ason tour, Gagara rapporte que l'on trouve à sept milles du Caire unvillage nommé <<Mataria, et en grec Maria> (!), où la Vierge Marie,I'Enfant-Jésus et Joseph vinrent, portés par un nuagel2e. Le récitcontinue comme chez Vasilij: soif de la Vierge, refus des villageoispar crainte d'Hérode, source miraculeuse, baumier qui pousse là oùI'eau sale a été jetée, production de I'huile de cet arbre, qui guérit tousles chrétiens; au xvrro siècle, toutefois, le baumier est desséché depuisqu'une femme musulmane s'en était oint les yeuxl30.

Le nom de Maçariyya, déjà déformé par Gagara, deviendra carré-ment <Maria>> chez lpolit Viïens&y, un hiéromoine du monastère desSaints-Boris-et-Gleb de ëernigov qui - au cours d'un long pèleri-nage qui, de 1707 à 1709, le mena au Sinaï, en Terre Sainte et àI'Athos - visita l 'Égypte en 1708 (Sreurnr.r, p. 383, 386 et 440):passé par <<Mariya>>, dit-il, il y a visité l'église de la Mère de Dieu, quiétait en ruines et dans laquelle se trouvait une source; dans le sanc-tuaire de l'église se trouve I'endroit où la Sainte Vierge, I'Enfant-Jésuset Joseph ont résidé, se cachant par crainte d'flf,1ed9131.

8. Les voyâgeurs occidentaux

Le P. Jullien a cité une trentaine de voyageurs européens qui, àun moment ou I'autre, sont passés par Matariyya et en ont laissé lesouvenir par écrit, et sa liste n'est pas encore exhaustivel32! On

l2eDétail dont I'origine remonte évidemment à Is 19,1.t30Éd. de Dolgov: XHT\e n xoxaente Bb lepycannMb n Ernnerb Kasalrra Ba-

cnrrilr txoBtreBt fAfAPH (1634-1637), noAb pegrrqlep C. O. Ioaroar (= pravoslavnijPalestinskij Sbornik,XU3 [= 33]), Moscou, 1891 (p. 14-15).

I 3r Éd. de Rozanov : nyreuecrB le lepoMonaxa HnnoJrura Bnuencxaro Bb lepyca-trnMb, t, CnHan u Aeoflt (1707-1709 r,r) ns4ano noAb peAaxqlep C. II. pourorr (=Pray. Palest. Sbornik,6l), Moscou, 1914 (p. 3940). - SEEM^NN note (p. 386, n. l7) que,si le pèlerin Andrej/Aaron lgnatbv (cf. ibid.,9.380) n'a pas mentionné Malariyya, c'estparce qu'il n'y est pas passé (contre Rozanov, p. 132, note à39,27).

1321MM, Chr.-K. Àg., p. 1615-1616, en ajoute beaucoup d'autres. - Le prof. Chr.Cannuyer nous signale en particulier que l'on trouvera une abondante évocation des voya-geurs occidentaux qui ont visité le jardin du baume dans Ch. os Ll Roxcûnr, La décou-verte de l'Afrique au Moyen Âge, t.ll: Le périple du continent, Le Caire, 1925, p. 105 ss.(= Mémoires de la Société Royale de Géographie de t'Égypte,5). De même, Hsvp, II,575-580 traite du commerce du baume, et cite quelques voyageurs.

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50 U. ZANETTI

remarquera, notamment, I'intérêt porté par ces pieux pèlerins aubaume et à sa merveilleuse odeur, tout comme la sévérité avec laquellece jardin était gardé.

Il était hors de question de reprendre ici le texte de tous ces voya-geurs occidentaux, dont les écrits sont assez facilement accessibles auxlecteurs des Analecta Bollandiana - d'autant plus que, depuisquelques années,'d'autres chercheurs se font une spécialité de démêlerl'écheveau de ces mille relations, qui se recoupent, se recopient I'uneI'autre, dont les éditions sont souvent anciennes et insuffisantes... enun mot, qui réclament du chercheur un investissement que nous nepouvons pas nous-même leur 3çs61ds1133.

Nous nous contenterons donc d'épingler quelques textes et d'enciter d'autres avec quelques commentaires et réflexions au passage.En effet, I'intérêt premier de ces voyageurs occidentaux, du point devue précis qui est le nôtre, est de mieux nous aider à saisir les obser-vations des textes orientaux cités dans les paragraphes précédents.

I. Burchard et Jacques de Vitry

<<Burchard, vidame de Strasbourg et notaire de I'empereur Fré-déric Barberousse, (fut) chargé par son souverain d'une missionauprès du Sultan d'Égypte Saladin, en 1175; il nous a laissé de sonvoyage un récit assez circonstancié dont nous possédons... uneversion... insérée dans les Chronica Slavorum rédigées entre 1204 et1209 par Arnold de Liibeck, décédé en l2lll12l4>134. Il valait lapeine d'y jeter un coup d'@i1135.

Toutefois, la comparaison avec le passage correspondant del'Historia Orientalis de Jacques de Viuy nous a amené à constater queces deux récits sont identiques à quelques vétilles près136. Nous lesavons donc réunis dans un même paragraphe.

133Cf. Ctrr, ClNxurrn, Viilons d'Égypte: continuitës et ruptures du Moyen Âge auxdébutt de I'égyptologie, ôàns Chronique d'Égypte,66113l-132 (1991), p. 136-147 (avecune abondante bibliographie dans les notes).

r34Chr. CANNUyxn, Les pyramides d'É,gypte dant la littérature médio-Iatine, dansRevuebelgedephilologieetd'histoire,6214(1984),p.673-681. Lepassagecitéci-dessusest emprunté aux p.675-676,

r3s Arnoldi Abbatis Lubecensis Chronica, éd. J.-M. LlppmmBnc (= Monumenta Ger-maniae Historica. Scriptores,2l), p.235-239 (Hanovre, 1869). Le passage que nousallons citer va delap,237,l .41 à la p. 238,1.9.

136 Cè passage se retrouve, éclaté en deux parties, dans le récit de Maître Thietmar:cf. J, os Srnr-Grxors, Voyages faits en Terre Sainte par Thietmar en' 1217 et parBurchard de Strasbourg en 1175, 1189 ou 1225, Bruxelles, 1851, p. 39-40 et p. 5l (=

MATARIEH

Jacques de Vitry, évêque latin de Saint-Jean d'Acre, est célèbreponr son Historia Hierosolymitana. Le premier livre de celle-ci,souvent appelé Historia Orientalis, contient une riche description dela Terre Sainte et des pays avoisinants; il fut rédigé sî l//erst. estexte est conservé en un grand nombre de manuscrits, et il n'en existepas encore d'édition critique: on est toujours obligé de se référer autexte publié par Bongars en 161'1, dans son Gesta Dei per Francos.Vu la très médiocre qualité de l'édition et les problèmes de critiquetextuelle qui se posent, nous n'insisterons pas sur I'identité presqueabsolue entre le texte de Jacques de Vitry et celui de Burchard; lesspécialisæs de ces matières verront s'il y a lieu d'en tirer parti. Il va desoi que, jusqu'à plus ample informé, I'antériorité doit revenir àBurchard, non seulement du fait qu'il écrivit presqu'un demi-siècleavant Jacques de Vitrylre, mais aussi pour des raisons de critiquetextuelle, et notamment un saut du même au même (variants i;tre.

Ab. hac civitate ad miliare unumb est" hortus Balsami, habens in quanti-tate fere dimidium mansum, et est lignum balsami ut lignum vitis triennisd,folium vero tamquam trifolium parvum.. Tempore autem! maturitats circafinem Maiig finditurr cortex lignii, secundum quod notum est operariis.Vinee illius guttatim distillanu, quod in vasis vitreis colligitur, et pet sexmenses in stercore columbel reconditur et decoquitur et defecahrr, postealiquor a fece separatur.

Hic- hortus habet fontem unde irrigatur, quia ab alia aqua! non potestfurigari. Notao, quod nusquam terranrrn nisi in hoc loco balsamum crescit.Adr hunç fontem beata virgoe cum salvatore nostro Herodis persecutionem

Mémoires de I'Acadénie Royale dcs sclences; des Lenres et dcs Beaux-Arts dc Belgique,26). La recension éditée par J. c. M. L^nRENr, Mag, Thictmarl peregrizario, Hambourg,1857: $ 12, 5-ll, p. 34 est moins procho de Burchard, er ne contient pas le secondpassage (p, 5 I de Saint-Genois), qui aurait dt apparaitre à la p. 48, après g 34, l. I l. Unerecherche plus approfondie dans les récits de voyage occidentaur du xrr s. en ferait sansaucun doute apparaitre d'autres qui se sont inspirés de cette même eource.

137Chr. CANNUynn,Coptes et <lacobite$ dazs l1listoriaHierosolymitana (1220) dcJacques de Vitry, évêquc d'Acre, dans M. Rrssrnr-Dsgrnog et J. Rrss (éd,,), Actes du IV.Congrès coptc.Lowain-la-Neuve,5-10 sept. l98E (= PubI. de l,lnstitut Oricnnltste dcLouv aln, 4l), t. II, Louvain-la-Neuve, 1992, p. I 96-208. Voir les p. I 96- I 98.

l3ton nbubliera paç que le texte de Burchard quc nous utilisons nous a éé transmispar une citation d'Arnold de Ltbeck, lequel rédigea son ouvrage entre 1204 et 1209, ermourut avant l2l4 - c'est-à-dire plusieurs années avant que Jacques de vitry ne semette à l'æuvre.

t 3e Le rcxte est celui de Burchard (voir n. I 35); les variantes de celui de lacques devirry tel qubn le rrouve dans Gesta D el (p. I l2g, l, 25-37> sont indiquées par deJlettresmises en exposant. Le signe '+" doit se lhe addidit, et*< ", omislt.

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F

52 U. ZANETTI

fugiens confugerat', et ibi per aliquot tempus latitabat", lavans ad fontemillumt pannos pueri, ut natura hominis requirebatu.

Quapropter" usque in hodiemum diem fons ille* a Sarracenis in'vene-ratione habetur, deferentes illuc cereos et incensum, quando se ibi lavant.In epyphania vero maxima multitudo" illuc confluit de omni confinio et lavarse cum aqua praedicta...

Variantes de lTliswtla Orientalis de lacques de Vitry: . Est etiam ab - b ad unummiliarium - o < - d triennium - c (vero-parvum) parvum sicuti trifolium - r < - gMadii - h scinditur- i + Balsami - j (quod-distillant) < franr du même au même]- t columbino - I dessicatur - n Qui - À aqua alia - o Et nota - p Usque ad - s+ MARrA - t (Her.-confug.) Herode persequente fugit - . lâtuit - t (ad-illum) inhunc fontem - o (ut req.) < - " (QuapJ et - w iste - r + maxima - y (vero)Domini -'+ Sarracenorum -'r (illuc-praedicta) de omni confinio illic confluit et selavat in praedicta aqua fontis.

En plus des détails sur le baumier, auquel nous reviendrons dansI'appendice, on remarquera la permanence de la dévotion à ce lieu:Burchard est, ne I'oublions pas, un contemporain d'Abù l-Maka.iml40.Qui étaient les <<Sarrasins>>? On sait que les chrétiens occidentauxavaient beaucoup de peine à distinguer les chrétiens orientaux desmusulmansl4l, mais il n'est pas exclu que les musulmans y vinssentaussi dès cette époquel42. En revanche, notre voyageur strasbourgeoisconfirme divers détails que nous savions déjà: le domaine, le baumier,la source et I'habitude de s'y plonger pour la fête de l'Épiphanie; s'il nesouffle mot de la coutume de célébrer I'eucharistie sur la pierre dupuits du baumier, c'est tout simplement parce qu'il est passé en 1175,alors qu'Abû l-Makârim nous apprend que la première célébration surcette piene n'eut lieu que dix ans plus tard.

140Nous écrivons ailleurs à propos de cet ouvrage qu'il <conserve ta documentationqu'a pu réunir un témoin oculaire (et auriculaire) de l17l A.D. au plus tard à 1209 ou1210 A.D, au plus tôt, soit une tranche d'un demi-siècle> (art. cité à li note 42 ci-dessus).

l4lComme nous le dit explicitement Félix Fabri: (...on ne peut guère distinguerentre un chrétien oriental et un Sarrasin> (MessoN, Faàri, I, p. 391).

la2Rappelons aussi qu'Abù l-Makàrim signale que le prétexte de la confiscation del'église de Malariyya fut que <l'on avait sonné les cloches en présence de musulmans>>(cf. n. 59 ci-dessus). Que faisaient là ces musulmans? D'ailleurs, le continuateur ano-nyme de Guillaume de Tyr (dit de Rothelin), rexre vieux-français daté de 126l par sonéditeur (parce que la continuation en question va jusqu'en 1261), nous parle aussi àe cettefontaine (située au caire, la "Nouvelle Babilloinne") et ajoute que les sarrasins luiportent un grand respect et viennent volontiers s'y laver: <<A cele fontainne portoient lisarrazin mout grant honour. Et mout volantierz se venoient laver de cele foniainne> (cf.H. Mrcnruvr - G, Rlvxluo, Itinérairet à Jérusalem et descriptions de la Terre sainterédigés enfrançais aux xf,xil. & iln. siècles f= publications de la Société de I'Orientlatin. séfie Géographique. lrl. Itinéraires français xr.-ilil. sièclesl, Genève, lgg2: texteIx,p. r74-r75).

MATARIEH

2. Marin Sanut

Marino Sanuto (ou Sanudo) n'est pas, lui non plus, un inconnuen matière de voyages: membre de la célèbre famille vénitienne desTorsello, il voyagea en Méditénanée orienrale (1306-1321), écrivitdes lettres et des traités, et fut mêlé aux négociations pour une unionentre les Égfises Latine et Byzantinera:. I yisig aussi Matariyya et, sinous le citons, c'est à cause de certains détails relatifs à la cueillette dubaume que I'on trouve dans son texte144.

Ad unum quoque miliarium [a Kayro] est ortus balsami ad quantitatemdimidii mansi. Arbuscula illa, est sicut lignum vitis trium annorum; foliumvero, quasi parvi trifolii, vel sicut rutae, albiora tamen. Tempore maturi-tatis, quae est circa mensem Madii, scinditur cortex ligni: et liquor colli-gitur in vasis vitreis; reponiturque in stercore columbino, et dessicatur; etsic fit balsamus probatus.

Alium etiam tradunt colligendi modum: quia a parte quae respicit Solemevellunt folium, stipiti enim adhaeret, et unum tantum stipitem habet, licetplures simul in uno stent cespite: erepto autem folio, statim egreditur guttalucidissima, odorifera valde.

Hic autem ortus uno solo fonte foecundari potest, in quo beata Virgopanniculos pueri Iesu lavisse dicitur. Ad hunc fontem in Epiphania,christiani et saraceni conveniunt; et in eo ex devotione corpora sua lavant.Est et aliud ibi stupendum: quod boves aquam praedictam trahentes, a me-ridie Sabbathi, usque ad congruam horam diei Dominicae, etiam si excoriarideberent, aquam non traherent.

Le lecteur attentif aura remarqué que le premier alinéa et le débutdu troisième reprennent presque littéralement ce que nous avaient déjàdit Burchard et Jacques de Vitry; par contre, Marin Sanut est, à norreconnaissance, le premier occidental à évoquer la légende des bæufssoucieux de respecter le repos dominical. Il mentionne aussi le faitque les musulmans (explicitement distingués des chrétiens) viennentse baigner à Maçariyya à I'occasion de l'Épiphanie.

3. Symon Semeonis

C'est intentionnellement que nous laissons au nom de cet auteur,franciscain d'Irlande en la première moitié du xrve s., I'orthographe deI'unique manuscrit qui nous ait rapporté son voyage en Terre Sainte,

143 Klnlyrrxopoulos - lvErss, no 450 (II, 466).r44cesta Dei:p.260 ad calcem, 1.36-49. Il s'agit d'un extrait de son Liber se-

crelorum,, ,

53

54 U. ZANETTI

accompli efire 1323 et 1325. Il passa par l'Égypte et se recueillit à

Malariyya, en fournissant maints détails sur le jardin et le baumierlas.

Ad partem vero quasi borialem ipsius civitatis [= Kayr] est quidam locusqui [dicitur] Materia, ubi [est] famosissima vinea, que olim dicitur fuisse inEngaddy, de qua stillat balsamus. Que a triginta viris diligenter custoditur,quia ipsa thesaurus Soldani pro magna parte consistit. '.. Cui immediateconjunctus est fons ille indeficiens, quem fecit Dominus Jesus cum pede admatris sue dulcissime instantiam. Que ibi aliquamdiu cum filio suo propterHerodis persecutionem moram trahens, nimia sitis aviditate affligebatur.Ipse enim fons est muro undique circumdatus infra quem sunt oratoria ho-nesta, in quibus communiter omni sabato Christiani peregrini occidentales,Jacobite et alii... et quandoque Saraceni, vigilias devote facientes laudibusgloriose Virginis continue insistunt, et se et eorum infirmos juxta ipsumfontem lavant et balneant in loco convenienti et ad hoc deputato'

Donc: un jardin gardé par trente hommes; une fontaine inépui-

sable, creusée par le pied du Christ (confusion avec le lieu connu sous

le nom de Bi-ba /isus, qui aurait consenré I'empreinæ de Son pied?) à

la demande de Sa Mère (c'est I'inverse de I'Evangile de lEnfance cité

au $ 1 ci-dessus); des oratoires (au pluriel!) où les chrétiens de toute

confession se retrouvent chaque samedi pour célébrer les vigiles ( ! ). . .

Symon précise alors que, de I'aveu même des gardiens (musulmans),

la Vierge Marie apparalt souvent et se promène autour de cette source,

dont I'eau est indispensable au baumier; d'ailleurs, ces mêmes musul-

mans racontent que le baumier donne davantage de sève quand il est

entaillé par des chrétiens, en forme de croix, et c'est pourquoi I'on

confie aux chrétiens la récolte du baume. Avant de dédier au baumier

et à sa récolte tout le $ 58, Syméon ajoute encore, comme I'avait fait

Marin Sanut, que les bæufs refusent de travailler le dimanche.

4. Félix Fabri

Ce dominicain suisse allemand (il s'appelait Schmidt de nais-

sance) qui se rendit deux fois en Terre Sainte a aussi' au cours de son

second uoyug., saisi I'occasion pour passer par le Sinaï et l'Égypte; sa

visite aux baumiers de Matariyya est datée - avec une précision toute

suisse! - du 7 octobre 1483. Nous ne citerons ici que de courts

extraits relatifs au baumier, car son gott du voyage et de la précision

lui fait consacrer plusieurs pages à Malariyya. Ce récit de voyage,

Aslfinerarium symonis semeonls Ab Hybernia AdTerram sanctam, ed. M. Espo.

sno (= scriptores Latini Hibernice,4), Dublin, 1960: cf. $ 57, p. 80-82 (+ uad. anSlaise).

Nous respectons I'orthographe de cette édition, dont nous citons des exlrails'

MATARIEH 55

dont le nom latin est Evagatorium, est connu en deux versions, I'unelatine et I'autre allemande (ce qui concerne l'Égypte existe en traduc-tion française). Nous citerons des passages de la version latine, celleque I'auteur avait destinée à la publication et qui semble avoir étérédigée la premièreta6; cêux qui voudraient tirer le meilleur parti pos-sible de ce témoignage devront en lire un bon nombre de pagesuz.

Près de la fontaine il y a un mur en pierre dans lequel il y a une fenêtrenon percée, mais qui se présente comme une niche recouverte de plaques demarbre poli. Des lampes ardentes y sont suspendues en l'honneui de tabienheureuse vierge. on dit en effet qu'elle a prié là. cette fausse fenêtredégage également un parfum délicieux comme si elle était remplie debaume (I, p. 385-386).

Le jardin des baumiers est très grand et entouré d'un mur. L'aire ou raplace, dans le jardin, sur laquelle croissent les baumiers n'est pas grande, etelle ne possède pas plus de cinquante arbrisseaux ou baumiers. Lebaumier... ne peut être transplanté. on en a bien transplanté, mais il nepousse pas (I, p. 387).

La pousse de baumier ne se sème pas, mais on la transplante chaqueannée,.. En mai, on prend de petits rameaux nouveaux, surplace, et on lesrepique... On les irrigue souvent, presque chaque iour, ei on veille sureux.. .

Quant au mode de la récolte et de son époque... on tire plusieurs baumesdu même et unique baumier ou cypre, et cela de plusieurs façons en mêmetemps. Il y a en effet trois sortes de baumes: le premier est bon, le secondest meilleur, le uoisième est le meilleur. Le meilleur est constitué par lasève tombant goutte à goutte du tronc et des rameaux.. . [euand sa réiolte alieul au mois de Décembre, res cultivateurs incisent, à l'aide de pienesaiguisées ou d'os tranchants, le tronc uniquement en son écorce ,upériruraou extérieure qui est très fine... il ne distille rien si I'incision est faite avecun instnrment ferreux ou métallique...

une fois I'incision faite, ils suspendent de petits vases aux rameaux inci-sés, sous les blessures, d'où s'écoulent de belles larmes odorantes dans lesvases eux-mêmes qui les reçoivent petit à petit, goutte à goutte. ...Ils fonrcela chaque jour, tout le mois de Décembre, durant lequel les cypres sontincisés trois fois. c'est le premier baume, le plus pur; il est ôirrrt tou,entier au Sultan..,

une fois le baume ainsi extrait goutte à goutte, les cultivateurs, dans remois qui suit, prennent les arbrisseaux incisés, arrachent les racines etextraient encore du baume à grand effort et de multiples façons... c'estpourquoi le baume est rrès inégal. .. (I, p. 392-393).

16 Mrssox, F abri: I ntroùrc tio n, p. vrtr,

-rd_M.lssoN, Fabri,r,p.368-39s (traduit du latin) et III, gg7-g04(trad. de lallemandpar G. Hunsr.lux).

56 U. ZANETTI

Si nous avons cité assez longuement Fabri, c'est parce que lespassages épinglés ci-dessus explicitent des détails qui interviennentailleurs: niche dans laquelle on a maçonné la pierre sur laquelle on acommencé, du temps d'Abii l-Makârim, à célébrer I'eucharistie; unecinquantaine de plants de baumiers (au xv" siècle), qui ne pouvaientpas pousser ailleurs; le baumier ne se sème pas, il se repique; récoltepar incision, et au mois de décembre; possibilité de recueillir dubaume de qualité inférieure en torturant la plante.

5. Arnold von Harff (1497)

Ce chevalier passa par Maçariyya quelques années après FélixFabri; il ne nous apprend rien d'intéressant pour I'histoire du cultechrétien, mais fournit par contre un précieux témoignage sur l'état dubaumier: tous les plants avaient été anachés lors de la guerre civile qui

suivit la mort de QaIt Bey, et il faudrait, estimait-il, au moins dix ansavant qu'ils ne puissent reprendrelas.

(Le seigneur révolté, Kanzuweh [Qânçawh], s'est retiré du Caire, aprèsen avoir massacré les partisans du sultan Al-Nâçir Muhammad b. Qâ'itBây) dans un village appelé Materya où I'on cultivait le baume dans un beaujardin appartenant au jeune Sultan. Ils y arrachèrent les arbrisseaux surlesquels poussait le baume, cassèrent les roues à eau qui servaient à irri-guer le jardin, et enlevèrent les bæufs qui avaient fait toumer les roues. Onme raconta, et je I'ai vu de mes yeux, que dans les dix prochains ans lebaume ne pousserait plus [ici].

Un peu plus loin (p. 105-106), le chevalier de Harff raconte unevisite à Malariyya, complètement dévastée, où il a pu toutefois voirdes arbrisseaux arrachés et recevoir des explications sur la manièredont on récolte le baume. Il y répète que <<l'on pense que dans les dixprochaines années le baume n'y croltra pas. Ce baume ne pousse àaucun autre endroit de la terre, pour autant que j'ai pu I'apprendre>. Iln'y a donc pas lieu de s'étonner que Prosper Alpin ait rapporté que lebaume avait dt être ransplanté à Matariyya, après en avoir disparu.

r48 Cf. la traduction française de P, Blssrn, Le pèIerinage du chevalier Arnold vonHarff, darns E. Honnuxc (êd.), Zun Bild Âgyptens im Mittelalter und in der Renaissance(= Orbis biblicus et orientalis,95), Fribourg-Gôttingen, 1990, p. 59 ss. Le passage citéci-après figure aux p. 82-83, et il est encore question du baumier aux p. 105-106. La n.72,p,105, de cette publication reprend plusieurs informations relatives au baumier, etrappelle notamment que la destruction du jardin du baumier est confirmée par une lettreécrite d'Alexandrie le 14 juillet 1497. La photocopie de ces passages nous a été aimable-ment foumie par le Prof. Chr, Cannuyer.

MATARIEH 57

6. Prosper Alpin

Dans ses livres écrits après un séjour de trois ans et trois mois aucaire (1581-1584), le médecin vénitien prospero Alpino signale, àplusieurs reprises, la vénération dont ce jardin était l,ôjetr*;-commemédecin, il s'intéressa de manière particulière au baume, qui itÀ uti-lisé comme médicament: il en cultiva même chez lui, à padoue, erécrivit un Diarogue sur re baume: la description du baumier quitteainsi le domaine des simples souvenirs de voyage et entre _ pour lesvoyageurs occidentaux du moins - dans l'ère de la science. Èn" aonen même temps du champ de nore article et c,est pourquoi, au lieu dereprendre à Prosper Alpin ses savantes informations sur le baume,lgus

en extrairons quelques passages montrant ce qu'était devenu le"jardin de la Vierge".

Quelques plantes à baume se ûouvent aussi sur la route du caire à Mé-dine, à trois jours de Médine. De cet endroit et de la Ivt.rqu", 1,.nrg.ll575l depuis I'enfantemenr de la Vierge, I,eunuque nir"_.ôii,Èiypr.nommé llfsssirrso ordonna que le chef der pettinr alùnt à ra r're.quJcett"année-là rapporre vingt plants de baumier qui furent repiqués à*, unendroit du caire où du baume avait été semé autrefois, c'est-à-dire dans lejardin de Mattarez (Matarieh). Mais, dans la suite, ces plantes pgri*",, ncause du climat, du sol ou de la négligence des jardiniergr5r.. "'du témoignage de tous bs Égyptiens'resson que cette plante a tou-jours été entretenue avec grand roin, u-ua., dans un jardin proche de l,en-droit appelé Mattharia.... _Tous les cairotes affument aussi qu"..,," pru*.a péri plus d'une fois en Égypte et y a été apportée de nouveau et pt-"itee.Lan 1575 depuis l'enfantement àe ta sienheureuse vierg., t'fier.td'Egypte nommé Eunuque Messinor visitait quelques parties ie i,Èrrià

"en particulier Mattharia. Il avait l'habitudà, en effet, d'aller visiter cetendroit et d'y prier, chaque semaine, en honneur de la bienheureuse viergeet pour sanctifier le vendredi (qui est pour les gens de là_bas ce qubst fournous le dimanche). A ry*. arrivé dàns te jaùin, il s,aperçut q,i" i""i r",baumiers s'étaient desséchés et avaient peri. n en fit vènir qu.r"nt" o, tuMecque et on les planta dans le même jardin; mais ils moururent eux aussi,quelques années plus tard, par suite de ia négligence des jardiniersls2.

raeSur la vie et l'æuvre de prospero Alpino (1553_1616), cf. G. Luswt, Alpino (AI_pini),Prospero,dansDizionariobiograficod)g,ioiioii,r.2,Rome,1960,p. S2g-531.

_ lsoIl doit s,agir de Mesîl,r Metrmed pa5a (1495_15g9), qui fut pendant quelquesannées vice-roi dÉsvpre sous ivr,tââ qr trsi+-isl-si,

"i-rïr, vl,lôii.' J"rr'1"-i",,cité ci-dessous, Alpin l'appellera "Messinoi',, "r

a-, i, Juivant ,.Meisir,,.r5rR' DB FENoyL.Histoire,Naturere de r'Égypte par proryer Atpin, I56I-rsg4 (=v O É, 2Oy, te Caire, 1979, p. I 14- I 15.I s2Fexovt, p lante s, p, 7 3_7 4.

58 U. ZANETfi

Dans un autre passage consacré à La grande ville du Caire et ce

que l'on y a observé de particulièrement rare,P. Alpino rapporte les

conditions de vie de la Sainte Famille I lldnlxdshtsr;

A I'extérieur de la ville, du côté ouest, il y a encore' au lieu appelé Ma-

tarée, une petite maison, une petite construction carrée et, à côté, une

source d,où sort et coule continuellement, en abondance, de I'eau douce qui

irrigue les jardins situés à proximité, surtout ceux où poussent ordinaire-

ment les plantes de Baume, dont nous avons parlé surabondamment dans

notte Dialogue sur la plante de baume et dans notre livre sur Les plantes

d'Égypte. ll est établi que, dans une pièce de cette petite maison, la Bien-

heureuse vierge Marie habita sept ans avec le christ Noue Seigneur en-

fant, au temps où, fuyant la colère d'Hérode, elle s'était retirée en Égypte'

Tous les Égyptiens tiennent pour certain qu'elle resta cachée là pendant sept

années. Durant tout ce temps, elle utilisa elle-même l'eau de cette sourcepour la consommer et pour laver les langes.

A I'intérieur de la pièce, dans le mur de chaux et de briques, il y a aussi

une cavité longue d'une Coudée et large d'une demi-coudée, creusée dans du

porphyre et dans laquelle, dit-on, la Bienheureuse Vierge cacha Jésus

enfant. De cette cavité se dégage une odeur très suave, de nature inconnue;

et nous affirmons avoir respiré là cette odeur, non pas une fois mais plu-

sieurs, et I'avoir observée en même temps que beaucoup d'autres personnes.

Tous les chrétiens et aussi les mahométans proclament la vérité de ce

miracle (car il ne peut être le fait d'aucun artifice).Ce lieu est I'objet d'une grande vénération autant pour les Turcs, les

Maures et les É,gyptiens sectateurs de Mahomet que pour les chrétiens. Le

Bassa Meisir, vice-roi d'Égypte, Turc de très bonnes mcurs, vénéra telle-

ment ce lieu pendant tout le temps de son mandat en Égypte, qu'il alla

toujours y prier deux fois par semaine et ne voulut jamais, pendant tout ce

temps, boire d'autre eau que celle qui coulait de cette source (qu'utilisa

autrefois la Vierge Marie). Telles furent la vénération et la grande consi-

dération qu'il eut toujours pour cette pièce habitée autrefois par la Bien-

heureuse Vierge.Que dire encore? Ne sont-ils pas innombrables ceux qui, même parmi

les Maures Mahométans, viennent de provinces éloignées' après de nom-

breuSes journées de route, pour adorer ce lieu qu'ils honorent avec respect et

vénèrent, et d'où ils emportent autant d'eau de cette source qu'ils le peuvent;

car cette eau est grandement estimée de beaucoup de nations et de peuples

pour la guérison des maladies, et ces peuples I'honorent pieusement en sou-

venir de la Très Sainte Vierge.

Alpin nous apprend donc que ces précieux baumiers, même

replantés, ne parvenaient plus à résister en Égypte -que ce soit "par

suite de la négligence des jardiniers" ou pour toute autre raison. Mais

r53R. DB IùNoyL, Histoire Naturelle (cf 'n' 151)' p. 49-51.

MATARIEH 59

il est également témoin de la permanence d'une vénération particulièrepour ce lieu: même les musulmans y viennent, attirés par la qualité deI'eau, mais aussi par le souvenir de la sainte Famille. sans doute avecla disparition des baumiers l'endroit fut-il moins gardé, et donc plusaccessible ! on remarquera aussi la permanence de la niche, i'oùémane toujours un parfum tès suave.

T.Voyageurs négligés

D'une manière ou d'une autre, tous les voyageurs nous rappellentles éléments de la légende: le sycomore, le puits et te baumier qu,ilirrigue, la pierre qui a servi langer I'Enfant_jésus, la dévotion pôu_laire, la grande qualité de cette eau - prus tard, ra confiscation ou tieude culte par les musulmans, la sévérité avec laquelle il est gardé, àcause des baumiers, et finalement la disparition de cet arbre précieux.

Qui s'intéresse à ce genre de récits pourra facilement ioursuivreI'enquête: ce ne sont certes pas les matériaux qui manquint! Nousvoudrions seulement rappeler que notre choix fut motivê, avant tour,par le désir d'éclairer un aspect du culæ de la sainte Famille et, acces-soirement, de mettre en valeur le long passage d'Abù l-Makârim, quin'avait pas encore fait l'objet d'un commentaire. c'est pourquoicertains détails pourtant présents dans bien des récits - commel'arbre de la Vierge, ce sycomore de Malariyya rencontré à plusieursreprises - ont été à peine effleurés: comme les guides touiistiques,nous avons soigneusement délimité le parcours des visiteurs, ..pér*tles revoir une autre fois pour une promenade qui suivrait un autrecircuit...

U. ZeNerrr

Appendice: Le baumier

Sans vouloir nous livrer à une enquête botanique qui excède notæ com-pétencer54, il nous parait normal de regrouper ici les éltments quc chacun denos textes a mentionnés, et de citer quelques auteurs musulmans qui avaientété omis parce qu'ils n'apportaient rien à I'histoire du culte. Nous àiviserons

__ - __15aon rappellera |articre Balsambawt depAULy - wrssowl, Rcar- Encyclopndie...,II,2 (Stuttgart, 1896), 2836-2839, toujours utile à consuller, en particulier pour les nom-breuses références aux auteurs classiques qui ont parlé du baume.

60 U. ZANETTI

cet appendice en quatre parties: l'arrivée du baume, la description de 'Abd al-

I-a1ff, h discussion d'un problème textuel d'Abù l-Makdrim, et enfin la

synthèse des positions de nos divers auteurs.

1. Apparition du baumier en ÉgYPte

, Disons d'abord que les botanistes désignent cette plante du nom de

Commiphora opobalsarnum, de la famille des bwséracées; elle est très rare en

Égypte, où on ne la trouve actuellement qu'à la frontière soudanaise, mais elle

est plus commune en Afrique tropicale et en Arabierss. La plupart des auteurs

anairnr - en accord sur ce point avec leS botanistes nos contemporains-

considèrent que l'Égypte n'est pas la pafie du baume: il a donc dt y être

importé. Si - à part le récit detÉvangile de I'Enfance du Sauveur rappelé au

g i ci-dessus - nous n'avons pas trouvé de trace de l'arrivée du baumier en

Égypter56, nous avons au moins un point de repère fixe au rvo siècle avec

lJgtitotre lausiaque de Pallade: Amoun de Nitrie, qui vécut dans la continence

avec son épouse avant de se retirer à Nitrie, était fabricant de baume' et

cultivait les baumiers; or, son métier ne semble pas présenter un caractère

exceptionnel (ch. 8, $ 3).Quelle qu'ait été la situation du baumier dans- I'Antiquité, il semble bien

qu., uo xo siècle, cet arbuste était déjà devenu en Égypte une véritable rareté,

du moins à voir ce qu'en disent les géographes arabes.Il apparalt en effet, situé près du Caire ou à 'Ayn Sams (Héliopolis),

mais sans le nom de Malariyya, chez quelques musulmans auteurs de descrip-

tions géographiques; nous citerons le plus ancien que nous ayons repéré' Al'

Istalrîrs?, dont le texte fut repris par son disciple Ibn Tawqallst; un texte très

pto.h. r. retrouve ailleurs, par exemple dans le Liyre de Roger d'Al-IdrisItsl.

r5sQf. fBNsvl, Plantes,p. ?1 et note 46. - M. P. Blurs, du Jardin Botanique de

Belgique, nous précise Uès aimablement (lettre du 7 avril 1993): <Le nom actuellement

aattiis pour le bàumier est Commiphora gileadensis (L.) C. Chr. (syn.: C. opobalsamum)

[cf. I. Hronrnc & S. Eowlnos (ed), Flora of Ethiopia, vol.3i Pittosporaceae to

Araliaceae,Addis Abeba, Asmara et uppsala, 1989: no 49, p. 4?51. L'espèce existe dans

l,extrême sud-est de l,É,gypte, au Soudan (le long de la Mer rouge), dans le nord'est de

l'Éthiopie et le nord de 1à Somalie, au voisinage de la Mer rouge et du Golfe d'Aden, ainsi

qo'uu YéIIl.o et en Arabie saoudite. Manifestement, cet arbre crolt sur les régions

montagneuses (djebels) qui bordent la Mer rouge et le Golfe d'Aden>'

156TIMM, Chr.-k. Àg',1613, signale que: <Nach Aussagen des Josephus (Anti'

quitates, XIv,4l; xV,96; Bellum, 1,4, 6; vgl. schon Strabo, 17) soll Kleopatra den

ialsambaum bei Helioupolis filr ihren Palast aùgepflanzt haben. Sie hatte dafùr ein

schôBling aus Jericho geholt (vgl. R. Pieper, Art. "Hélioupolis", RE, Bd. 8 (l)' [stuttgart'19121, St 49-50).D Dans les Antiquirés Judaiqrcs (YII,J, $ 6' 6; XIV' $ 4' 1; XV' $ 4' 2)'

Flavius Josèphe parle du baume comme d'un arbre précieux offert à salomon par la reine

de Saba et pôussant près de Jéricho; dans la Gwrre des Juifs , il signale qu'Antoine offrit

à Ctéopâtre <ta palmeraie de Jéricho, qui produit le baume> (I' 5 361)'

1574bû Ishâq lbrâhÎm b. Mul.rammad al-FârisÏ al-Kar!î, nommé AI-lsta[ri pat

Yâqùt et par les orientalistes; la seule date sûre de sa biographie est sa rencontre avec

Ibn i{awqal, ce qui le situe auxc siècle. Cf, 812,1v,232'233,

MATARIEH

Le Kitàb al-masôlik wa-l-mamdlik ("Livre des routes et des royaumes")d'Al-Istalrrf parle sommairement du baumier, quelques lignes après avoirévoqué les antiquités de 'Ayn Sams, qu'il n'identifie donc pas .o.-. le lieu oùcroît cet atbre160.

Aux environs de Fos!âl [= Vieux-Caire] pousse une plante semblable à I'osierr6rque I'on nomme baumiet (al-balsân fvar.: al-balsaml), dont on tire I'huile du baumier.On ne le connaît en aucun autre endroit au monde,

Il n'y a pas lieu de citer le passage d'Ibn $awqal sur le même sujet, car ilest identique au_précédent à un détail près: Ibn Tawqal commence sa phrasepar <Et à 'Ayn Sams> au lieu de <Aux environs de Fostât>r62. Ces données seretrouvent dans l'æuvre d'Al-Jdrîsir63, ainsi que chez bien d'autres géographesarabes.

2. La descriprton du baumier selon'Abd al-Latif

Nous avons fait allusion ci-dessus à la longue description de I'encyclo-pédiste 'Abd al-Latifts, soulignant que son récit présente assez de similitudesavec celui d'Abii l-Makârim pour mériter comparaison. pour la commodité dulecteur, il ne sera sans doute pas inutile de reprendre ici in extenso la tra-duction proposée par s. de sacy (p. 20-22), dont nous conservons I'orthographe(mais en supprimant la plupart des notes;tes;

- ttttbù l-Qâsim Mulrammad b. .Ali al-Naçibî, Ibn Hawqal, géographe qui voyagea

dans tout le monde musulman de son temps entre 943 et 973 A.D., et publia trois éditionsde son KJtrià al-masàlik wa-l-mamôlik ou Kitôb gùrat al-ar( ("Livre des routes et desroyaumes" ou "Livre de la description de la terre"), la première avant 962, et la dernièresans doute vers 988 A.D, Cf. EI 2, IJl,8l0-Bl l.

rseAbù rAbd Allâh Mutrammad b. Mu{rammad b. ,Abd Allâh b. Idris al-.Àli bi_AmrAllâh, appelé aussi A/-.farr/al-Idrîsi, acheva en I154 A.D. son ouvrage Nuzhat a!-muitàqli-ibtirdq al'dfâq ("Exc,trsion de qui est désireux de rraverser les pÀys lointains"), éga-lement appelé le Livre de Roger parce qu'il fut rédigé sur I'ordre de Roger II, roi normandde sicile' à la cour duquel il vivait; il serait peur-être mort vers I 165 icf. EI 2, ilI, l05g-1061). Voir aussi KlnlyrNxopowos - lVuss, no 436 (II,456).

._ l60Texte dans DB Goan, BibI. geogr., l(1870),p.54. - Après avoirmis.AynSams-enrapport avec les pharaons, l;autèur change ae suiet et signale qu,il existe desendroits du Nil où les crocodiles n'attaquent pas; puis il change encot" ,rne-fois de sujet eten vient au passage que nous citons.

t6t Mill al-qidbàn: cf . Dozr,, Supplément,Il, p. 361a.r62son ouvlage (cf. n. 158) est plblié par Dr Gorrr, Bibl. geogr., II, Leiden, lg73

(voir à la p. 106 le passage désiré). À l'exception de quelques mots de vocabulaire, letexte et le contexte d'Ibn Hawqal sont rigoureusement identiques à ceux d'Al-IstalrÏ, quenous venons de citer.

r63Cf. R. Dozy et M. J. Dr Goan,Description de l,Afrique et de I'Espagne parEdrirf (Paris, 1866): texæ arabe p, 145, traducrion p. 174-175.

rsCf. la n. 109 ci-dessus. Rappelons que cet auteur est moft en 1231/32.165[ s6r.i. Aïh Schems = .Ayn Sams; rotl = ratl (=..livre");recueilloit = re-

cueillait; foible = faible; schobat = 5ubât; étoit = était;bascham = baïdm.

6'l

62 U. ZANETÏ

Le baumier est encore au nombre des végétaux remarquables de lEgypte; car on ne

le trouve aujourdhui que dans cette contrée à Ain-Schems, où on le cultive dans unlieu enclos et soigneusement gardé, de l'étendue de sept feddans. cet arbuste aenviron une coudée de hauteur. Il a deux écOrCes: l'une extérieure, qui est rouge etmince ; I'autre intérieure, verte et épaisse: quand on mâche celle-ci, elle laisse dans labouche une saveur onctueuse et une odeur aromatique; ses feuilles ressemblent àcelles de la rue. on recueille le baume vers le lever de la canicule, de la manière sui-vante. Après avoir arraché de l'arbre toutes ses feuilles, on fait au trotrc des incisions

avec une pierre aiguë: cette opération exige de I'adresse, car il faut couper l'écorcesupérieure et fendre celle du dessous, mais de manière que la fente n'atteigne pas le

bois; si I'on attaque le bois, I'incision ne donnera aucun produit. La fente faite commenous venons de le dire, On attend que le suc de I'arbre coule sur le bois: on le ramasseavec le doigt, que I'on essuie sur le bord dbne corne. Quand la corne est pleine, on lavide dans des bouteilles de vene; ce que I'on continue sans intemrption jusqu'à ce que

la récolte soit finie et qu'il ne coule plus rien de I'arbre. Plus I'air est humide, plus

I'arbre fournit une récolte abondante: au contraire, elle est médiocre dans les annéesde sécheresse, où il y a peu dhumidité. En I'année 5961tr, année où il a régné unegrande sécheresse, on en a recueilli vingt rotls et un peu plus. on prend ensuite les

bouteilles et on les enfouit dans la terre, jusqu'à ce que l'été soit dans toute sa force età l'époque des plus grandes chaleurs; alors on les retire de terre et on les expose ausoleil. Chaque jour on les visite, et I'on Fouve l'huile qui surnage sur une substanceaqueuse mêlée de parties terreuses: on prend I'huile, et I'on remet les bouteilles ausoleil; ce qui se répète alternativement jusqu'à ce qu'il n'y ait plus dhuile. Quand onen est à ce point, on prend toutc I'huile, et lhomme chargé de ce soin la fait cuiresecrètement, sans souffrir que personne assiste à cette opération; ensuite il la trans'porte dans le magasin du souverain. La quantité d'huile pure que I'on retire du suc'monte, quand elle est passée, à un dixième du total. Un homme bien instruit m'aassuré qu'on recueilloit annuellement environ vingt rotls dhuile'

Je vois dans Galien que le meilleur baume, selon lui, est celui.que produit la Pa'lestine, et que le plus foible, au contraire, est celui qu'on tire de lÉgypte et des lieuxvoisins; mais aujourd'hui nous ne trouvons plus du tout de baume dans la Palestine.

Nicolas, dans son Traité des plantes, dit: <Il y a des plantes doat certaines parties

ont une odeur aromatique, et d'autres dont I'odeur aromatique est commune à toutesleurs parties, comme.le baumier qui se trouve en Syrie près de la mer Asphaltite. Lepuits qui foumit I'eau pour I'irrigation de ces plantes se nomme le puits du baumei seseaux sont douces),

<Le baumier, dit Ebn-Samadjount6T, ne se trouve aujourdhui qu'en Ég1pte. On re'cueille I'huile de cet arbre au lever du grand chien, qui est sirius, c'est-à-dire au moisde schobatld. Chaque année cette récolte foumit de cinquante à soixante rotls, et I'onvend le baume sur le lieu même pour le double de son poids d'argen1t6e>. Tel étoitdonc l'état des choses au temps d'Ebn'Samadjoun, qui ajoute, sur I'autorité de Razi'qu'on peut remplacer le baume avec I'huile de raifort; ce qui a peu de probabilité.

t66De l'hégire, conespondant à I199'1200 A.D.1674bû Bakr $àmid ibn Sama!ûn, médecin et pharmacologue de Cordoue, auteur

d'un livre sur les médicaments (E/2, ilI, 952b).ter $u661 (nom de mois syro-libanais) conespond à février. Il s'agit ici d'une glose

malencontreuse - car Sirius se lève vers la fin de juillet (cf. ci-dessus' n' 87) - dontI'origine se trouve quelques lignes plus loin: Subâ1 est en fait le mois du repiquage.

r6e50 ou 60 ra$ valent e $e 22 kg et demi et n k8, S. de Sacy ajoute ici uneréférence aux prix du baume.

MATARIEH

L'ârbuste qui fournit le baume ne porte pas de fruit: on prend des boutures deI'arbre, que I'on plante au mois de schobat, et qui prennent racine et croissent. Lebaumier mâle sauvage a une fructificationr?o, mais il ne donne point de baume. Il setrouve dans le Nedjd, le Téhama, les déserts de l'Arabie, les contrées maritimes duYémen et la Perse: il est connu sous le nom de baschamrTr,

on confit l'écorce du baumier sans en extraire le baume; et c'est un antidote conÛetous les poisons: mais ce n'est pas ici le lieu de parler de ses propriétés et des usagesauxquels on l'emploie avec succès.

3. Une double dfficulté dans le texte d'Abû l-Makôrim

Aux notes 65 et 82 ci-dessus, nous avons signalé que l'éditeur de A. Mak.avait de lui-même corrigé deux leçons dans Trad. A. Mak. en substituant (sansavertissement, d'ailleurs) le nom du mois copte conespondant à avril,Parmoute-Pharmouti (arabe Barmûdah), aux mots inexistants iarmûda (ouiarmûdu-hu) et iaryùda (ot iaryûdu-hx). cette correction est très facile dupoint de vue paléographique: rr-r-l €t rs.;.;-! doivent simplement être lusiêr.rr. Toutefois, si I'on obtient ainsi, pour le second passage, un sens accep_table (sous réserve de la discussion ci-après), le résultat est incohérent pour lepremier au point que, si la correction était valable, elle nous contraindrait àsoupçonner la présence d'une comrption, peut-eEe une glose malencontreuse_ment insérée dans le texte. Voici ces passages.

(a) Le premier se situe au fol. 21, à la limite entre le tecto et le versodu feuillet. Nous rappelons notre traduction:

[Le baumier est semé dans la tene des environs - Malariyya -,] et c'est de luique sort I'huile du Myron, qui est comme du beurre fondu, le onze Tout et Bâbah erHatôr - er c'est Parmoute, qui a trente jours; à panir de Kyahk, il ne sert plus à riende pratiquer des incisions.

. . . et voici le texte arabe tel que le donne A.Mak.,I, p. ZB:

:-Êlrr gqr sU Cr- ,* çrt-Jl ;t .;-Jl ,-y- Cr&t O#l ûr j eJ5L.: er ...

.c t+ t+ C-=. t {té û.r L-r: O.j$ Ç.u r:yr-l grÇ,

Tous les mois coptes, sauf un, ayant une durée de trente jours, on ne voitvraiment pas à quoi rime la glose "qui a uente jours", d'autant plus que cemois d'avril y est pris entre ceux d'automne et le début de I'hiver. Si, enrevanche, I'on voulait voir dans le mot inintelligible ïarmùda un terme (naturelou déformé) signifiant "incision", "récolte" ou équivalent, on obtiendrait unephrase nettement plus sensée:

...et c'est de lui que sort I'huile du Myron, qui est comme du beurre fondu, le onzeTout et Bâbah et Hatôr; I'incision (?) a lieu pendant trente jours <consécutifs>; à partirde Kyahk, il ne sert plus à rien de pratiquer des incisions.

170La note de S. de Sacy, qui vise à justifier sa traduction, fait aussi allusion à untexte de Prosper Alpin tiré dttDialogue sur Ie baume (Slcv, note SZ,p,92-93),

171 S. de Sacy justifie par une longue citation qu'il s'agit là <de t'ancien nom> decette plante; aujourdhui, nous pouvons trouver le mot baiâm dans les dictionnaires (Llm.I, 209c:Doz.t, Supplénent, I, 90b),

63

64 U. ZANETTI

Comme pour divers auEes passages, il serait vivement souhaitable depouvoir se livrer à un examen du manuscrit d'abord, de la langue et des

habitudes de I'auteur ensuite.(b) Le second passage se trouve au fol.22", et nous décrit la récolte de

la manière suivante:

Et voici, d'après ce qu'on rapporte, comment se déroule I'incision du baumier auxjours de Parmoute, Trois hommes en sont chargés'..

.. .ce qui corespond à I'arabe (A. Mak., p. 30):

-.JÇ.r rllS .I.:di 'rrqr's 1Çl ai .!p ai :rLJl + e1ç çrJl ol "153r

En refusant la correction, qui offre par ailleurs un sens acceptable, etprenant ce mot comme synonime de "incision" (?), on devrait comprendre:

Et voici, d'après ce qu'on rapporte, comment se déroule l'incision du baumier auxjours de son incision (?). Trois hommes en sont chargés...

Cette demière version n'est pas nécessafuement moins satisfaisante que

la précédente; c'est pourquoi, une fois de plus, tout en ayant admis dans notretexte la correction de l'éditeur, nous voudrions suspendre notre jugementjusqu'à plus ample infonnér72.

En outre, à supposer que cette correction soit bien à sa place, elleengendre une nouvelle difficulté: la récolte du baume aurait-elle lieu enBarmûdah, c'est-à-dire au mois d'avril? Cela paraît peu probable.

4. La récolte se fait-elle au lever de la canicule?

En effet, la plupart des auteurs que nous avons cités s'accordent pour

situer le moment de la récolte au <Lever de l'Étoile du Chien> (Sirius), lequelse produit vers la fin de juillet et correspond aux plus grandes chaleurs. C'estce que nous a rappofté Abû l-Makârim (fol. 23', ci-dessus p. 38)' ce que répète

'Abd al-Laflf que nous venons de lire, et c'est enfin ce que confirme ProsperAlpin: En été, quand on scarifie l'écorce de son tronc, l'arbre distille du

baurne, qui est d'abord blanc, puis vert, puis doré et prendfinalement la cou'Ieur du mielr1\, Toutefois, notre pèlerin nrsse Varsonophij avance - si notre

légère correction se justifie (cf. n' 125 ci-dessus) - la Nativité de Saint Jean-Baptiste, le 24 juin, comme période propice à la récolte; il tient ainsi le milieuentre ceux qui proposent la fin juillet et les tenants du mois de mai' à savoirles voyageurs occidentaux: Burchard, Iacques de Vitry et autres (p.50-53 ci-dessus).

rT2Nous devons d'ailleurs signaler avoir remarqué dans 1r. A. Mak. non moins dequatre passages où l'éditeur traduit indûment 8a rmùda alors qu'il s'agit, dans le texte qu'ila publié, du mois voisin de Baramhôt (= mars). En voici les références: Tr' A' Mak''p'179 = fol.68b du ms., A. Mak,, l ,p. l2fr;Tr. A. Mak., P' 176 = fol. Tla du ms.' A. Mak. '1,p. l?.4;Tr.A.Mak.,p. 180=fol .73adums.,A.Mak' ,1,p.127:Tr.A.Mak' ,p.221 =fol-

9lb du ms., A. Mak.,I , P. 157.r73FE{oYL, Plantes, p, 80.

MATARIEH

Mais d'autres témoignages nous orientent de manière très décidée versI'automne: notre Abù l-Makârim a explicitement situé la scarification desplants de baumier à panir du 11 Tout et jusqu'en Hatôr, en spécifiant bien que,<<à partir de Kyahk, il ne sert plus à rien de pratiquer des incisions>;FélixFabri, lui, préænd que cette opération a lieu en décembre, qui correspond pré-cisément à Kyahk (ci-dessus, p. 55;tz.

Le repiquage des plants de baumier, lui, devrait se faire en mai, selonFélix Fabri (ci-dessus, p. 55), et en février (Subât) d'après .Abd al-LatTf (ci-dessus, p. 62). Le problème de savoir pourquoi le repiquage se ferait enfévrier pourrait se résoudre à partir du terme même employ é: Subàt est un nomde mois syrien, non égyptien, et pourrait dénoncer ici chez .Abd al-Latîf unesource étrangère au climat de l'Égypte.

Enfin, la décantation du baume a, elle aussi, une grande importance, carle suc du baumier doit reposer assez longtemps et être exposé à la chaleur dusoleil pour se purifier: seul le liquide gras qui sumage est destiné à la coction.C'est aussi ce que veut dire 'Abd al-Laçif, bien qu'il semble se contredirepuisqu'il situe la récolte <au lever de la canicule> et la décantation <au mo-ment des plus grandes chaleurs>, quand l'été est (dans toute sa force>... c'est-à-dire seulement quelques jours apês le lever de la canicule; or, rien ne ditque cette décantation se fait en quelques jours - du moins Burchard erJacques de vitry parlent-ils d'une décantation de six mois dans des bouteillesde verre (p. 5l). Les autres auteurs ne fixent pas de durée à cette décantation,mais s'accordent tous sur le fait que le suc du baumier doit être recueilli dansdes bouteilles de verre; plusieurs d'entre eux expliquent d'ailleurs qu'on doitles enfouir dans de la fiente de pigeon: si on comprend facilement pourquoicette fiente est celle de pigeon (les campagnes d'Égypte sont couvertes depigeonniers), il faut encore se demander pourquoi de la fiente - peut-êtreparce qu'elle produit une combustion, et donc de la chaleur, qui pourrait rem-placer d'une certaine manière, par sa durée, I'exposition au soleil? Dans cecas' on pourrait comprendre qu'une décantation au soleil du plein été, telle quela préconise 'Abd al-Laçîf, puisse ne demander que quelques jours.

Il faut d'ailleurs aussi se souvenir de ce qui a été dit plus haut des diffé-rentes qualités de baume: il y a un premier choix, obtenu en fendant l'écorceau soleil, un baume moins bon, tiré des feuilles et des petites branches, et unequalité inférieure, produite à partir des racines et du tronc. cette dernièreopération est certainement la dernière, puisqu'elle tue définitivement laplante, et il serait donc logique qu'elle ait lieu en fin de saisonr?5.

l74Ici encore, M. P. Blrrlps (cf. n. 155 ci-dessus) nous a aimablement écrit: <Con-cemant le moment de la récolte, il est plus difficile de se prononcer car, comme pow lesautres arbres à saigner, il doit exister une saison de repos, peu propice à la saignée, quidoil correspondre à la saison sèche. .., Toutefois, il faut tenir compte que pour Ès arbresen culture, et il semble que cela se soit réatisé, les pratiques horticoles (inigation, arro-sage) peuvent interférer sur les données climatiques, ce qui pourrair ogalement expliquercertaines discordances observées>.

rTsLes uois qualités de baume sont désignées par termes appropriés: <Au Moyen-Age, il est vrai, les Arabes ne pratiquaient pas autant qu'ils le fîrent plus tard la culture du

65

66 U. ZANETTI

Liste des abréviations

A. Mak. =Ta,rîb al-kanâ'is wa-l-adyurafi l-qarn al-1ônî'aÏar al-mîlôdî liJAbi

al-Makârim, alla/î nusiba bala'an iM'Abî $Alib al'Armanî, i'dâd wa-ta'llrq

al-râhib $amùTl al-Suryâni. 4 vol., Le Caire' 1984. - Dans les références

à cet ouvrage comme à l'édition d'Evetts, nous désignons toujours les folios

par "a" et "b" (pour "recto" et "verso"), en conformité avec la désignation

adoptée par les'éditeurs. [Pour la traduction, voir 1r. A- Mak.l

l,r',rtlIureu, Géographie = É. AuÉuxzl'u,La géographie de l'Égypte à

l' é po que copte, P ais, 1893.

BuRMESïER 1939 = O. H. E. Bunuesrzx,The lurufiàt of the Sainrs, tr. (Ktahk'

An-Nasi), dans BSâC, 5 (1939)' p. 85-157.

CANT = M. Grnnlno,Clavis Apocryphorum Novi Testamenti (= Corpus

chriitianorum), Tumhout, 1992.

CE = Azu S. Artvn (éd.),The Coptic Encyclopedia, S vol', New York'

Toronto, etc., 1991.

Dr Gorrn, Bib l. geogr. = Bibliotheca geographorum Arabicorum, ed. M. J. Dr

Gorre, Leiden, 1870-1894 (8 vol').

Difnar = Al-Diînâr qubtî:arabî yafidimu kulla ayyâm al-sana. ' ', éd. par Amba

GnsooRlos, Le Caire, 119851.Dozv, S upplément = R. DozY, Supplé ment aux dictionnaires arab e s, 2 v ol.,

Leiden,1881.

baumier dans le but d'obtenir la meilleure qualité de baume, celle que I'on obtenait pal

incision et qui portait le nom d'opobalsamum (dt gtec ôÎôç = 5|vs1"' cependant' commel,opobalsamum était d'une excessive rareté... le gros public se contentait, à ce qu'il

semble, du Carpobalsamum (extrait du fruit) et du rrlo balsamum (extrait de la branche).Ce sont les seuls noms que I'on rencontre dans les livres de commercel celui de l'opo'

balsamum en est complètement absent> (HBYD, p. 579-580). læs mêmes précisions sontdéveloppées par F. S. Duplsssv, Des vêgétaux résineux tant indigènes qu'exotiques..',1.

II, Paris, 1802, p. 296-300 (Bawnier de la Mecque) et317'319 (Baumier de GilêaQ, qui

détaille les caractéristiques botaniques de ces plantes. Par contre, Em. Pennor' Matièrespremlères usuelles du ùgne végétal, t. II, Paris, 1943'1944, p. ll87-1188 (Baume de la

Mecque), qui décrit les procédures traditionnelles de récolte des Bdelliums (<Cette

appeilation générique désigne divers produits résineux aromatiques provenant aussi des

Cànmiphora qu'on récolte en Afrique tropicale ou en Inde>: ibid,)'ne parle que de la

récblte par incision, suivie d'une exposition au soleil. Les deux techniques sont évoquéesdans lidescription synthétique que donne H. Ds Wrr, Les plantes du monde. ll. Lesplantes àfleurs. Texte lrançais de Majoie HÂJARY, Paris' 1965, p. 34: <Comme dernier

èxemple, le Ccommiphora> opobalsamum (L.) Engl.' qui donne le baume de La Mecque'

lequel apparalt en gouttes jaunes, épaisses et odorantes, aux extrémités des branches.Cette substance est en outre obtenue par cuisson des branches. Ces plantes arbustives neportent de feuilles que pendant la saison des pluies; elles croissent à l'état sauvage auSud-Ouest de I'Arabie et de la Somalie, mais sont cultivées depuis longtemps en Égypteet dans tes vallées de la Jordanie. Ce baume est encore actuellement employé par

l'Église catholiqve [nous aiouterions: <et toutet tes Églises Orthodoxes>!] da11,slaconfection du saint chrême, Le mot baume vient du mot arabe balessan, Dans tout le

Moyen-orient on s'en sert dans les préparations médicinalesr. Nous devons les

références à ces trois demières publications à I'amabilité de M. P' Blups.

MATARIEH

EIr = Encyclopédie de I'Istâm, Leiden et Paris, 1913-1934.EI2 = Encyclopédie de I'Islam. Nouvelle édition, Leiden et Paris, 1960-...EVETTS = B. T. A, EvETTs, The Churches and Monasteries of Egypt attributed

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O'Ls.Any, Fragmentary Hymns - De Lacy O'LEany, Fragmentary CopticHymns from the lVadi n-Natrun, Londrcs, l9Z.

67

68 U. ZANETTI

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(Anba Ruwais),lgg2. [= trad' angl' de A' Mak',I' avec cartes et index)'

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dans /,e Muséon,41,1928, P.49-80.vu-lncounr. Manuscrit I et II = L. VtllecounT,IJn m^nuscrit arabe sur le

s aint chr ême dans rÉ gtise copte, dans la R eyue d'histoir e ecclé siastique,

l7 (rg}r),p. 501-514 [= I], et 18 (1922), P. 5,-19 [= a1'

VOÉ = Colleciion Voyageurs occidentaux en Egypte, Le Caire, Institut Fran-

çais d'Archéologie Orientale'wnirr, Monasteries = H. G. EVELYN WHItr, The Monasteries of the Wadi ' n

Natrûn, 3 vol., New-York' 1926-1 933.yess 1940 = YAss 'ABD AL-MASIH, Doxologies in the coptic church. Edited

Bohairic Doxolagies,dans BSAC 6 (1940)' 19-76'ynss 1945 = Yrss ,Aso lL-MaSiu, Doxologies in the coptic church. un'

edited Bohairic Doxologies,n. (!ûbah-An-Nasr), dans BSAC ll (1945)' 95-

158.

Summary'AccordingtoEgypt iantradi t ion, theHolyFamilyrestedatMalariyya, . ita.t near Cairo, on their Flight to Egypt' Thousands of pilgrims

went there to see the tree which split to shelter the Holy Family, the well

where the Virgin dipped her Son, the balsam-tree which grew there watered by

this holy weti; the pilgrims, Copts and others, prayed and celebrated the

eucharist on the stone which was believed to have been used by Mary to care

for her Child. An examination of the Christian Arabic texts related to this

place - and especially Abû l-Makârim's chronicle, yet unused - together

*ith ro*. others (Muslim Aràbic, Russian or Latin travel narratives) sheds

some fresh light on the history of this pilgrimage place. The accounts of the

balsa.m-tree as found in the various sources are given tn an Appendix'