jacques faget les ateliers silencieux de la démocratie
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DUPRAZ
Louise
M1 Médiation
Décembre 2014 – Note de Synthèse
Jacques Faget
Médiations : les ateliers silencieux de
la démocratie
DUPRAZ Louise FAGET, Jacques, Médiations. Les ateliers silencieux de la démocratie, Toulouse, Erès coll : « Trajets », 2010
1. Présentation de l'ouvrage
Doctorant en droit et directeur de recherche au CNRS, Jacques Faget est également
conférencier, formateur et praticien de la médiation dans le monde entier. Publié en 2010, son
ouvrage Médiations : les ateliers silencieux de la démocratie, fournit une présentation large des
processus de médiations actuellement mis en œuvres aux quatre coins du globe. Son étude
s'articule en plusieurs parties, allant des origines et fondements théoriques du procédé à son
application concrète dans différents champs. Son intérêt majeur est de fournir une vision large de
la médiation, étayée par de nombreux exemples et schémas qui permettent une compréhension
globale de cette discipline.
Unique en son genre, cette étude n'en est pas pour autant universelle. En effet, dès la préface,
l'auteur établit qu'elle est issue de sa propre subjectivité, en tant que chercheur français marqué
par le contexte de son époque et par son histoire personnelle. Cette affirmation est le point de
départ de l'ouvrage, et semble correspondre tout à fait à l'esprit de la médiation, un art aussi
formel que subjectif. De plus, la dimension collective de la construction de cette discipline est une
composante essentielle du texte, puisque Jacques Faget cite un grand nombres d'ouvrages, et
d'auteur, faisant intervenir par ce biais une multiplicité de voix, qui permettent de nourrir et
d'élargir son propos.
Médiations : les ateliers silencieux de la démocratie s'articule en trois parties. D'abord, l'auteur
revient sur la construction de la médiation, ses origines et son développements à travers l'histoire,
avant de s’intéresser au déroulement du processus en lui même, constitué d'un cadre normatif,
mais traversé par toute une série de modèle dont il propose l'étude. En dernier lieu, Jacques Faget
s’intéresse aux champs d'applications de la médiation, présentant en huit chapitres la variété des
domaines dans lesquelles sont mis en œuvre cette discipline. Cette large étude traite d'une
multitude de sujets, néanmoins on y retrouve des thèmes récurrent, notamment la tension, à la
fois fondatrice et problématique, entre l'instrumentalisation institutionnel, qui tend à recréer un
ordre à travers la médiation, et l'essor des initiatives privés qui cherchent à modeler de nouveaux
rapports sociaux, basés sue des accords individuelles consentis librement. L'étude de cette
confrontation, qui s'ajoutent à celle des tensions observables dans les groupes et les sociétés,
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fournit un regard éclairant sur la complexité de l'émergence de la médiation.
Afin de mieux appréhender l'ouvrage, nous étudierons dans une première partie sa construction et
les thèses qu'il avance, avant de nous intéresser à l'apport qu'il fournit à celui qui se forme à la
médiation.
Suite à la préface précédemment évoquée, Jacques Faget définit, en
introduction, l'objet de son ouvrage, stipulant qu'il « consiste à analyser les raisons, les modalités,
les conséquences et les enjeux du développement d'un ensemble de pratiques institutionnelles et
sociales qualifiées précisément de médiations qui apparaissent dans les pays occidentaux à partir
des années 1970 et 1980, et dont le champ d'application ne cesse, depuis, de s'étendre. »1 L'auteur
attribue l'absence de véritable étude, globale, sur le sujet au caractère pluridisciplinaire de la
médiation, et révèle l'ampleur de son développement, notamment en énumérant tous les types de
médiateurs existant.
Cherchant à définir les termes du sujet, l'auteur commence par s'intéresser à la notion de conflit,
en tant que partie de l'interaction humaine, présente sous d'innombrables formes. Le conflit est
collectif, on ne peut le déclencher seul, il est aussi une construction, c'est à dire le fruit d'un
processus, que l'auteur décline en plusieurs parties, allant du contexte à la séquence conflictuelle,
en passant par la transgression et la construction des certitudes. Selon les points de vues, ou selon
ce qu'il en résulte, un conflit peut être considéré comme fécond ou dévastateur, c'est en cela que
se pose la question de sa fonction et de son traitement. Par ailleurs, Jacques Faget s'intéresse à la
notion de paix qui, selon lui, « peut se concevoir dans un contexte conflictuel à la condition que la
nature et l'intensité des conflits soient contenues dans des limites acceptables, ou que leur
expression soit ritualisée, institutionnalisée. »2 Il ne s'agit pas là d'une paix négative, c'est à dire
d'une absence de conflit, mais un état d'équité, de justice et de contention par rapport aux
clivages qui peuvent survenir dans les sociétés. Ainsi, la pacification est un processus, qui passe par
le rituel, et qui peut être divisé en catégories : la violence, le droit ou la recherche de solution par
les belligérants eux même, aboutissant à une réconciliation. Cette dernière approche, dans
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laquelle il faut situer les MARC (modes alternatifs de règlement des conflits), tend à se développer
dans les démocraties occidentales, notamment par le développement des médiations. Du point de
vue de l'auteur, l'émergence de cette discipline hybride, qui cherche de nouvelles modalités de
régulations entre un ordre imposé et un ordre négocié, constitue «l'indicateur d'une société qui
cherche une nouvelle façon de gouverner la cité et de fabriquer de la cohésion à travers de
nouveaux référentiels d'action »3 A travers la métaphore du fluide, Jacques Faget émet l'idée que la
médiation ai pour objectif de rétablir des liens, des mouvements de circulations dans des
situations figées.
Avant de procéder à l'analyse des origines de la médiation, l'auteur revient sur les obstacles à son
analyse, qu'il définit en trois types. En premier lieu, des entraves analytiques qui tiennent à la
difficulté existante de distinguer clairement ce mode de résolution des conflits des autres, de
l'isoler pour en faire un objet d'étude. Par ailleurs, l'émergence et la pratique de la médiation est
fortement marquée par le militantisme et la religion, ce qui pose la question de son objectivité.
D'autres part, la multiplicité des usages et le manque d'autonomie des pratiques de médiations
rendent compliqué l'étude du procédé. En dernier lieux, l'existence de visions sectorielles et
national achèvent de brouiller les pistes. C'est en cela que la démarche globale, de Jacques Faget
prend toute sa pertinence.
Partie I : La construction sociopolitique de la médiation
1. Les origines de la médiation
Dans ce premier moment, l'auteur revient sur la genèse de la médiation, qu'il situe en 1681, avec
le travail de Abraham de Wicquefort, diplomate hollandais qui écrivit « L'ambassadeur et ses
fonctions » Dans un des chapitres de l'ouvrage, Wicquefort évoque la posture de médiateur et en
émet une première définition. Néanmoins, c'est au 20ème siècle, en particulier à partir de 1970,
que le processus se développe véritablement. Les premiers programmes de médiation s'articulent
autour d'un socle de valeur, religieux et politique. Ainsi, les expériences menées à partir de 1974
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aux États-Unis sont le fait de minorités protestantes attachées au pacifisme et à la non-violence.
L'engagement dans la médiation correspond ici à la défense de valeurs chrétienne fondatrices pour
ses groupes.
Par ailleurs, l'activisme social pour la défense des droits civiques qui se développe durant les
années 1960 aux États-Unis, joue un rôle prépondérant dans la mise en place de la médiation. En
effet, la création des boutiques de droit ou encore des « community board » a pour objectif de
fournir un accès libre et gratuit aux ressources juridiques, notamment pour les plus défavorisés.
Ces nouvelles pratiques sociales s'attachent à rendre aux citoyens la propriété de leurs conflits, et
les incitent à les régler par d'autres biais, tels que la conciliation ou la médiation. Le dernier
terreau favorable à l'émergence de la médiation évoqué par Jacques Faget, est celui de la
communauté des sciences humaines et sociales, qui produit d'important travaux qui étayent et
accompagnent la formation de la discipline. Parmi ces mouvements, l'auteur évoque en premier
lieu les « critical legal studies », un courant d'analyse du droit né en 1977, qui plaide pour une
« empowerment democracy » en s'appuyant sur toute une série de critique à l'égard des
institutions juridiques. Par exemple, les CLS défendent le postulat que « la norme juridique est
abstraite. Elle ne tient pas compte des besoins particulier et fait entrer les litiges dans des
catégories juridiques préalablement établies et stéréotypées »4 et dénoncent les travers d'un
système impersonnel, qui privilégie la réponse individuel à la revendication collective et qui ne
répond pas à la réalité. Cette approche a servis de base théorique à un grand nombre d'initiative
individuel.
Par ailleurs, Jacques Faget évoque deux figures majeurs dont les travaux ont influencés
l'émergence de la médiation : Palo Alto et Carl Rogers. Le premier a développé dans les années
1950, l'interactionnisme, qui propose une approche systémique des relations humaines. Selon
Alto, le travail des médiations permet de traiter les pathologies du modèle de communication,
c'est lui qui a développé l'idée fondatrice de la mise en présence physique des acteurs du conflit.
Carl Rogers, éminemment connu pour son travail sur la psychologie humaniste, a étudié
l'importance de l'aide du tiers pour aider une personne a libérer son potentiel et trouver elle
même la solution à son conflit. De plus, l'apport qu'il fournit concernant l'attitude empathique,
sans recours à l'interprétation constitue un des fondements de la médiation. Enfin, l'auteur évoque
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le courant intellectuel dit de la « french theory », mené notamment par Michel Foucault, qui
dénonce les logiques des rapports de domination, et dont les idéaux semblent présents dans la
médiation. Après avoir étudié les fondements intellectuels et de valeurs du processus, l'auteur
s'attache à montrer le contexte et les conditions de son développement.
2. Le développement de la médiation
L'émergence de cette discipline est dû à différents facteurs, notamment la transformation des
institutions publiques, l’avènement du néolibéralisme ou encore l'essor des phénomènes
migratoires et des nouvelles technologies. Les nombreuses mutations auxquels se confronte le
monde actuel entraînent une nécessité de développer de nouvelles pratiques de régulations,
permettant d'articuler des espaces multiples et complexes, c'est en cela qu'il existe un lien entre la
médiation et la post-modernité.
Afin de définir les conditions contextuelles du développement de la médiation, l'auteur s'attache à
en démontrer les origines linguistiques, anglophones puis française du fait de la propagation par le
Canada, politique, en relation avec une volonté de pacification des liens et de la volonté des
citoyens de se réapproprier un rôle traditionnellement dévolu à l’État, et religieuse, empreinte
d'une forte culture chrétienne et protestante. De plus, l'émergence de la médiation semble lié au
contexte juridique et à la culture qui la produise. En effet, Jacques Faget montre que le processus
émerge d'abord dans les pays de common law, et qu'il intervient au moment où les institutions
judiciaires souffrent, du fait de leurs engorgements, d'un déclin de légitimité, ce qui entraîne la
nécessité de chercher des modes alternatifs de résolutions des conflits. Culturellement, le
développement de ces derniers semblé lié aux valeurs individualistes propres à la société
américaine, prônant « le principe optimiste, et par certains aspects naïf, d'un acteur autonome,
rationnel, responsable, capable d'engagement. »5 La médiation ne peut, à priori, fonctionner dans
des sociétés traditionnelles, où l'identité est collective et où la tradition religieuse joue un rôle
proéminent.
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Après avoir étudié le contexte du développement de la médiation, l'auteur s'intéresse aux raisons
sociopolitiques d'un tel mouvement. En premier lieu, il souligne la nécessité de nouvelles instances
régulatrices au sein de nos sociétés. Le terme de régulation renvoi à l'existence de dynamique
sociales, mouvantes, dont le règlement ne serait plus dévolu à un seul acteur, sinon à une série de
processus interconnectés à différents niveaux, et en perpétuel évolution. Afin de spécifier
davantage cette affirmation, Jacques Faget commence par s'intéresser à «la métamorphose des
régulations politiques »6 Partant du constat qu'il existe actuellement une mutation entre une
puissance étatique fortement ancrée et l'émergence de modalités de production des dynamiques
de sociétés infiniment plus complexes, l'auteur affirme que c'est désormais par des modèles
hybrides que s'affirme le fonctionnement d'un monde globalisé, hétérogène et beaucoup moins
soumis à la hiérarchisation qu'auparavant. En parallèle, il observe un déclin des institutions,
traditionnellement chargées de réguler les relations sociale.
En effet, les réponses judiciaires civiles et pénales ne suffisent plus à assurer la régulation d'une
société, parce que la demande est en pleine explosion, et parce qu'il existe une nécessité de
réponses individuelles satisfaisantes aux conflits que vivent les citoyens. En conséquence, le
modèle de la médiation propose de sortir d'une conception pyramidale des relations sociales,
hiérarchisés et normalisés, pour aller vers un système dit de Rhizome, selon la théorie élaborée par
Gilles Deleuze et Félix Guattari. Cette dernière est une construction dans laquelle les éléments sont
organisés de façon horizontales, et où chacun peut en influencer un autre. L'ordre y est négocié, et
non imposé, selon un principe d'hétérogénéité, le principe d'action y est particulariste. Dans les
faits, la médiation n'est pas un moyen de transformation radicale du modèle en place, sinon un
contournement, le vecteur d'une hybridation des modèles. L'état lui-même peut décider de
recourir à un tel procédé, comme lors de la médiation ordonné par Michel Rocard pour sortir de la
crise néo-calédonienne, qui aboutit aux accords de Matignon de 1988.
Selon Jacques Faget, « la médiation peut être analysée à la fois comme un symptôme et un
remède, symptôme de l'emprise croissante prise par la bureaucratie sur la vie publique et sociale,
et remède par la mise en œuvre de contres-pouvoirs démocratique et de modalités efficientes de
traitement des problèmes »7 L'auteur illustre cette affirmation en citant l'institution du Médiateur
de la République, qui montre à la fois les difficultés du système et la recherche de moyens de
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régulation efficaces, face à l'effondrement d'un ensemble de processus traditionnel. Cette
dynamique va de pair avec une transformation de nos sociétés.
En effet, les individus qui les constituent sont de plus en plus autonomes, avec une réflexion
individuelle plus importante et une demande forte de transparence et de proximité. Face à la crise
que connaissent les régulations juridiques et judiciaires, de nouvelles approches de résolution des
conflits sont privilégiées, comme en atteste le livre vert de la commission des communautés
européennes qui assure la promotion des MARC.
Dans un ultime mouvement concernant les origines de la médiation, l'auteur s'intéresse aux
caractéristiques de son développement. En effet, il tend à montrer le caractère fragmentaire et
pluriel de la médiation, avec un grand nombre de spécialisations fortement marquées. La
polyvalence professionnel et l'importance du bénévolat contribuent également à offrir un
panorama brouillé du processus. Concernant l'institutionnalisation des pratiques, celle-ci se fait de
manière expérimentale, parfois autonome, parfois dépendante. Enfin, on assiste à une certaine
marchandisation de la médiation, par le biais d'entreprises ou d'associations privées qui
fonctionnent dans une logique concurrentielle, tant au plan de la formation que des prestations.
Malgré une forte diversité constatée par l'auteur, qui reprend dans la troisième partie de l'ouvrage
les différents champs de la médiation, il existe des aspects commun à toutes les applications du
processus, des normes qui définissent la manière dont il se déroule.
Partie II : La construction normative de la médiation
3. Le cadre éthique et déontologique de la médiation
Selon Jacques Faget, c'est le cadre de la médiation qui la distingue des autres pratiques. Son
éthique est l'aboutissement d'une construction conjoncturelle, d'une doctrine élaborée par un
groupe que l'auteur définis comme blanc, protestant et nord-américain. Les balises déontologiques
de la discipline contribuent à former un sentiment d'appartenance, renforcé par l'existence
d'écoles, de diplôme ou encore par la publication d'ouvrages. Néanmoins, il est important de
souligner l'orthodoxie de la médiation est davantage le fait de la pratique que celle d'une théorie
universelle.
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A propos de l'éthique, l'auteur souligne qu'elle se base sur une vision culturelle de l'humain et un
projet de transformation social porté par des valeurs politiques. Trois principes fonde cette
approche : l'égalité, la liberté et la fraternité. Ainsi, l'autonomie, sous l'expression empowerment
constitue un des piliers du principe de la médiation. D'autre part, les relations entre les acteurs
sont horizontales, en opposition avec le fonctionnement stratifié qu'on trouve habituellement
dans nos sociétés. Enfin, le processus tend à mettre en place une certaine harmonie sociale, de
restaurer un mieux être collectif, selon une conception irénique du monde.
Du point de vue idéologique, l'auteur émet le postule que « La médiation s'inscrit dans le projet
politique d'une société post moderne dans laquelle « l'individu sujet » est placé au cœur de la
régulation sociale »8 Cette conception s'articule selon plusieurs modalités. En effet, la médiation
prône la démocratie participative, un modèle qui encourage la contribution direct et la
responsabilisation des citoyens, dans un monde où la confiance sociale connaît un affaissement et
où l'univers politique semble enfermé dans la compétition. Le paradigme est celui de la mise en
place d'une rationalité communicationnelle qui donne à chacun à s'exprimer, une forme d'éthique
de la discussion. Ensuite, l'auteur évoque l'importance de l'essor des politiques de
reconnaissances, partant du principe que la réalisation de soi dépend d'un processus de
reconnaissance mutuel. Cette nécessite va de pair avec l'avènement de l'individualisme, inscrit
dans une rationalité du vivre ensemble.
Cette volonté éthique s'incarne, selon Jacques Faget, par un certain nombre de caractéristiques qui
définissent le cadre du processus de médiation. C'est d'abord l'impartialité du tiers qui est mise en
avant, ce qui oblige le praticien à faire le deuil de la recherche de la vérité, à ne pas mener
d'investigation. Cependant, le praticien n'est pas confiné à la passivité. En effet, la posture de
neutralité est décrite comme une valeur forte et active.
D'autres part, l'indépendance et l'absence de pouvoir sont également des principes
fondamentaux. Le médiateur ne peut contraindre les acteurs à entrer en médiation, ni définir de
quel côté se trouve la vérité. C'est seulement par la relation de confiance qu'il peut prendre un
certain ascendant sur les médiés. Ces principes s'incarnent dans le fait que les rencontres ont lieu
en face en face, ce qui permet un dialogue direct et un accès immédiat à la coopération et au
passage à une logique gagnant/gagnant. La participation direct augmente grandement le degré de
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responsabilisation des acteurs et renforce l'implication personnel.
En tant que fondement, l'auteur évoque également le cadre juridique, qui permet de minimiser les
dangers potentiels de la médiation. Les notions de consentement éclairés, de bon sens et de
confidentialité garantissent la bonne mise en place du processus. En aval, l'accord peut être soumis
à l'accord d'un juge qui en apprécie la validité. Homogène par certains aspects, les principes de
médiations sont cependant divisés en différents modèle, que l'auteur s'attache à analyser
4. Les modèles de médiations
Il existe une grande variété de manière d'aborder la résolutions des conflits. Le premier paradigme
analysé par Jacques Faget est celui du « problem solving ». Ce processus se caractérise par une
recherche rapide de solution, le conflit y étant considéré comme problématique. Il est
particulièrement indiqué dans les cas d'urgence, pour éviter un procès coûteux et si les
protagonistes ne se connaissent pas. La méthode de médiation y est directive, proche de
l'arbitrage, et l'accord est souvent basé sur des concessions mutuels. Dans un second temps,
l'auteur s'intéresse au modèle de la négociation raisonnée, développé notamment par Harvard.
Contrairement au « problem solving », cette approche cherche le bénéfice mutuel, en traitant
séparément la question, la personne impliqué et le différent. La volonté de se recentrer sur les
besoins communs afin de faire émerger des intérêts convergent se rapproche du processus de la
communication non-violente développé par Marshall Rosenberg. Jacques Faget évoque d'autres
personnalité majeurs dans la définition des modèles de médiation, tel Fiutak, avec le paradigme de
l’Arène, Johan Galtung qui travaille sur le concept de paix positive et John Paul Lederach à propos
de la transformation personnel à travers le conflit.
Par ailleurs, l'auteur évoque le modèle narratif, qui postule que les différents émergent du
contexte social et culturel. Le travail sur l'histoire du conflit permet de le mettre à distance et de
l'aborder en tant que sujet extérieur. Même si différents modèles peuvent être identifiés, la réalité
correspond généralement à une hybridation des pratiques, réunis autours des principes fondateurs
précédemment évoqués. Après avoir dégagé les fondements et caractéristiques théoriques de la
médiation, Jacques Faget s'intéresse aux différents champs de son application.
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Partie III : Les champs de la médiation
5. Les médiations politiques
Les médiations politiques s'articulent, selon l'auteur, en deux pôles, la médiation par le haut, et
celle par le bas. Il est difficile de rendre compte de la première, car les études qui s'y intéressent
ont une approche qualifiée par Jacques Faget de finaliste et ethnocentriques. Le conflit y est vu
comme un problème à résoudre le plus rapidement possible. Cinq caractéristiques permettent de
définir cette approche. D'abord, l'auteur souligne l'importance des cycles du conflit pour définir les
moments d'interventions, plutôt au début ou quand il arrive à maturité, ainsi que la notion de
choix dans la médiation, avec le constat que des relations anciennes et de proximités culturelles
sont plus propices à une mise en œuvre satisfaisante. Autre point important, le contexte
international, notamment économique, ainsi que la présence de force de paix sur le territoire
influent sur l'efficacité des médiations. Enfin, la posture du médiateur est variable, facilitateur,
formulateur ou manipulateur selon le contexte. Les médiations par le haut ne respectent pas
forcément le principe de l'impartialité, et l'effet qu'elles produisent est plus remarquable sur le
court terme que sur la durée.
Concernant les médiations par les bas, celles-ci s'articulent selon une autre dynamique. En vertu
du secret professionnel, elles sont invisibles, et difficile à évaluer. Généralement situés dans les
démocraties occidentales, elles s'appuient sur un modèle d'action dépolitisée et un socle
théorique philosophie et religieux, aboutissant à la mise en place d'une ingénierie de la paix,
composée d'experts de formations diverses. La médiation par le bas est un processus qui vise à la
régulation des différents, dans l'optique de fabriquer une paix positive.
Ces deux approches sont qualifiées par l'auteur de complémentaires. En effet, les médiations
prennent place à plusieurs niveaux, et il apparaît nécessaire de travailler sur tous les plans pour
assurer une juste résolution des conflits. Selon Jacques Faget, ces niveaux sont aux nombres de
quatre : la diplomatie étatique, les individus ou institutions qui coopèrent avec les gouvernements
de façon non-officiel, le dialogue public et les actions visant à promouvoir la paix dans la société
civile. Cette approche semble pertinente, notamment pour les « deep rooted conflict », par
exemple en Irlande du Nord, mais suscite néanmoins des interrogations. Ainsi, on peut se
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demander si le développement des médiations politiques ne correspondrait pas à une privatisation
de la diplomatie, et à la diffusion d'un certain type d'ordre, issu des démocraties occidentales.
6. Les médiations environnementales
La médiation environnementales débute aux États-Unis en 1973, et connaît un véritable
développement à partir des années 1980. Elle concerne différent type de conflits, et constitue une
véritable spécialisation dans le champs des pratiques de médiations. En effet, un certain nombre
de spécificités la distingue. Ainsi, les médiations environnementales mobilisent un grand nombre
de participants, combinant des forums ouverts et des rencontres plus confidentielles. Il existe, de
plus, une complexités technique, relationnel et institutionnels qui rend nécessaire une formation
spécifique à cette pratique. Par ailleurs, ces médiations prennent du temps et constituent de
véritables enjeux publiques. En France, elles peinent à se développer et restent le fruit d'initiatives
civiles. En revanche, dans les pays anglo-saxons, les mobilisations sont nombreuses et se
caractérisent par des luttes sociales entre différents groupes de pressions, avec par exemple les
mouvements NIMBY et PIMBY (« not in my backyard » / « please in my back yard ») qui sont des
mobilisations de voisinages.
L'objectif des médiations environnementales est la recherche d'une solution équitable pour les
deux parties, selon Jacques Faget : « une décision est équitable quand le degré de maîtrise qu'ils
exercent sur le processus d'élaboration des mesures est élevé, plus fort que le niveau de confiance
entre les protagonistes »9 Ces mouvements marquent une remise en cause de la répartition des
pouvoirs, et tend à réduire la fracture existant entre les experts et le reste de la population.
Le processus se déroule en plusieurs étapes : une phase préparatoire qui vise à rassembler les
acteurs concernés, la mise en place d'un cadre, établis par l'ensemble des participants, l'échange
et le partage des savoirs, qui aboutit à la mise à l'épreuve des propositions émises pendant les
rencontres. Les médiations environnementales, malgré leurs développement, se heurtent à une
certains nombres de difficultés, tel que l'incapacité des institutions à suivre son développement,
ou la complexité techniques des problématiques.
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7. Les médiations judiciaires
Il existe une grande différence entre le paradigme de la médiation et celui de la justice, c'est
néanmoins dans ce domaine que la médiation est apparu, et que son utilisation y est le plus
répandu.
Concernant le champs de la médiation pénal, trois constats poussent à son développements : la
baisse de la récidive chez les délinquants qui passent en médiation, la souffrance de communautés
fracturés, et la nécessité de rendre justice aux victimes de façon individuelle, dans une logique de
réparation. Le courant de la « restaurative justice » est dérivée du système judiciaire, qui en pose
le cadre, elle s'y intègre car elle a une application pénale et englobe toutes les sanctions visant à
une réparation par l'offenseur. Enfin, elle est extérieur au système en tant que mouvement social
et transformateur, marquant l'évolution des modes de vie vers un individualisme plus prononcé. A
la différence des modèles punitifs, ou axés sur la réhabilitation, ce type de justice repose sur des
principes de réappropriation par les protagonistes de la résolution du conflit, ainsi que sur
l'établissement d'une sentence positive, et sur un modèle décisionnel alternatif.
Deux principaux modes de « restaurative justice » peuvent être identifiés. D'un côté, un
fonctionnement dérivé du système judiciaire, où la médiation constitue une parenthèse dans le
système de justice, parenthèse qui peut intervenir à tout moment, et mener à l'interruption de
l'action publique. Cette méthode est principalement utilisé à l'encontre des mineurs. Par ailleurs,
un système intégré peut être mis en place, il se caractérise par une introduction de la médiation
visant à enrichir l'éventail des modalités d'applications des sentences, c'est pourquoi il intervient
généralement à la fin de l'action judiciaire, en tant que complément. L'auteur remarque que
l'institutionnalisation de ces procédés reste inachevé, malgré une diffusion large dans de
nombreux pays. De plus, les tentatives d'encadrement de ces processus comportent le risque
d'induire une certaine dépendance vis à vis des institutions judiciaires.
En parallèle des médiations pénales, on trouve les médiations judiciaires civiles qui connaissent
également un essor important, principalement dans les pays de « common law ». Lors d'un procès,
la médiation peut être proposée par un juge qui délègue alors une partie de son pouvoir, sous
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réserve de l'accord des partis. Cette façon de traiter les différents tend davantage à la résolution
du conflit que du litige, et fait intervenir une dimension psychologique dans la logique juridique.
8. Les médiations familiales
La médiation familiale est le dispositif le plus connus, et celui qui connaît l'expansion la plus large,
et ceci pour diverses raisons. D'abord, la métamorphoses des liens familiaux, reposant sur un
rapport d'égalité, plus individualistes, et plus institutionnalisé, aboutissent à des ensembles flous
et instable, l'auteur évoque l'image de rhizomes familiaux. Par ailleurs, le discrédit des pratiques
judiciaires, ainsi que l'essor des politiques publiques qui soutiennent le développement de la
médiation familiale jouent également un rôle dans la hausse des investissements. Paradoxalement,
ces derniers ne provoquent pas d'augmentation de la demande sociale, au contraire. En effet, les
médiations familiales sont soumises à un certain nombres de tensions qui justifient une telle
situation. Il existe une résistance institutionnelle de la part des magistrats et des avocats de la
famille qui détiennent en partie le monopole du traitement des affaires familiales. De plus, la
médiation est critiquée car elle semble tendre à imposer un certain discours normatif, avec des
injonctions morale à l'encontre des médiés. L'identité professionnel des médiateurs est
difficilement définissable, du fait des appartenances et des milieux multiples, l'activité présente
notamment la spécificité de se définir par une posture, et non par un objet. Économiquement, une
tension double est observée par l'auteur, endogène par le phénomène de la concurrence des
formations et des organismes, exogènes relativement aux professions juridiques. L'absence de
cadres théoriques précis contribue à brouiller les pistes.
En effet, il n'existe pas, en médiation familiale, de code de déontologie explicite, et l'ampleur du
champ d'application est mal définis, ce qui pose la question de l'application de la médiation en cas
de violence physique, par exemple. L'ensemble de ces tensions expliquent les difficultés que
connaissent les médiations familiales, malgré un soutien politique fort.
9. Les médiations communautaires et sociales
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DUPRAZ Louise FAGET, Jacques, Médiations. Les ateliers silencieux de la démocratie, Toulouse, Erès coll : « Trajets », 2010
Ces médiations existent sous différents noms, elles visent aux développement du lien social et à la
régulation des conflits par la médiation des différents. On trouve une grande diversité dans ces
modes d'organisations, qui reposent sur des supports aussi bien privés que publiques, se
composent de petits centres et de grandes organisations, et s'appuient tout autant sur le
volontariat que sur des professionnels, ou la formation de praticiens dans les quartiers. Ces
procédés poursuivent également des objectifs différents.
Ainsi, les médiations qualifiées d'agnostiques par l'auteur, concernent les conflits signalés par les
habitants d'un quartier. Elles répondent à une demande sociales, et met en place des programmes
spécifiques relativement à la situations des lieux où elles interviennent. C'est dans ce type de
modèle qu'on trouve des médiateurs formés dans les quartiers, la priorité est donnée au
rétablissement de la communication, afin de mener les acteurs à trouver eux même leurs accords.
Ce dispositifs dépend généralement des autorités de la ville.
Par ailleurs, les médiations adaptatrices ont pour objectifs de faciliter l'accès à l'information
juridique et administrative, elles peuvent être aussi interculturelles, pour participer aux dialogues
entre les groupes. Les médiateurs ont pour objectifs de répondre aux besoins de la population et
de participer à l'amélioration des relations sociales.
Enfin, il existe également des médiations régulatrices, correspondant à une mobilisation sur les
enjeux de la délinquance urbaine. Depuis les années 1990, il existe différents types de médiateurs
sociaux, dont le rôle n'est pas définis spécifiquement, et qui contribuent à assurer la tranquillité
des quartiers difficiles. De telles actions sont parfois, selon Jacques Faget, qualifié comme une
justice de seconde classe, une sous-traitance de la justice. Cependant, ces alternatives présentent
de bons résultats et de haut taux de satisfaction, notamment aux États-Unis. En France, ces
programmes restent mal connus, et il existe peu de coopération avec les travailleurs sociaux.
10. Les médiations scolaires
L'école a, selon l'auteur, une mission de normalisation, qui connaît de grandes difficultés
notamment du fait de la faillite des mécanismes de socialisations familiaux. Face à la montée de la
violence, la médiation se présente comme une contre-culture, qui tend à construire des
régulations qui diffèrent des logiques punitives et à envisager l'avenir différemment. Les premiers
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programmes ont eu lieu à partir de 1972 à New York. Aujourd'hui, la médiation scolaire est
présente dans de nombreux pays, selon différents modèles.
En premier lieu, la médiation par les pairs promeut la coopération au sein d'un établissement, elle
peut être localisée ou le concerner tout entier. Le procédé consiste en une opération de
sensibilisation au sein de la communauté éducative, puis à la mise en place de formation des
élèves à la posture de médiateurs qui sont amenés à mener des co-médiations. Ces expériences
suscitent généralement un haut niveau de participations et une bonne intégration au sein des
établissements.
Dans d'autres cas, on trouve des modèles de médiations par les adultes, qui interviennent dans
différents types de conflits, toujours dans une logique d'impartialité. Il existe également des
médiations entre les familles et l'école, qui visent à renforcer les liens afin de prévenir l'échec
scolaire ou la sortie du système.
Par ailleurs, il existe des politiques de médiations restauratrice, en particulier aux États-Unis, qui
s'appuient sur trois niveaux d'actions : la prévention des conflits, qui passe par différentes
initiatives basées sur l'intelligence émotionnelle et sociale, des actions ciblés, ponctuelles qui
passent par la médiations par les pairs et contribuent à développer une capacité collective à
prendre un charge un conflit, et enfin un dispositif d'action intensif concernant les problèmes
chronique. Ce dernier point est mis en œuvre par l'organisation de conférences, une approche
systémique des relations entre enseignants, familles et élèves qui mobilise l'ensemble de la
communauté. Généralement, l'impact de ces programmes est positif, même si son bénéfice peut
être diminué si l'établissement conserve par ailleurs un système de sanction punitif.
11. Les médiations commerciales et d'entreprises
Bien que les médiations commerciales bénéficient d'une reconnaissance juridiques, elles
connaissent un développement moins important que prévu. Il existe une confusion entre les
différents modèles de pratiques, et une hybridation de ces derniers, qui peuvent se mélanger avec
l'arbitrage ou la négociation. Ces approches sont davantage de l'ordre du « problem solving », et
ont lieux principalement dans deux cas : pour garantir la pérennité des relations d'affaires au delà
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d'un conflit, ou pour régler un problème en toute discrétion. Par ailleurs, ces solutions plus rapide
présentent une intérêt économique, étant à moindre coût.
Concernant les entreprises, les médiations concernent généralement les conflits internes,
interpersonnels ou collectifs, et à tous niveau de la hiérarchie. Elles se développent en raison de la
baisse de l'influence des syndicats, des transformations du management, du déclin de la culture de
l'entreprise et du contexte de compétition. Certains aspects, comme le harcèlement moral ou
sexuel, posent la question du champ d'action de la médiation, qui rencontre parfois des résistance.
En effet, on peut s'interroger sur la pertinence d'une telle approche, notamment lorsque les
relations sont verticales.
12. Les médiations sanitaires
Ces médiations sont récentes, et concernent le système hospitalier. Elles marquent le
développement d'une démocratie sanitaire, appuyé notamment par la charte européenne des
droits des patients. Véritable contre-culture qui rompt avec les pratiques autoritaire, la médiation
marque la mutation du système de la santé, et suscite une certaine mobilisation politique. En
France, ce processus ce développe à partir de 1996, et connaît une véritable essor en 2002, elle
répond généralement aux plaintes de patients concernant les conditions de traitement et
d'information. Il existe dans le domaine de la santé, un véritable besoin de reconnaissance, de
dignité face au mépris d'une institution qui apparaît parfois comme déshumanisé. L'ouverture du
dialogue entre les acteurs comportent généralement une forte charge émotionnelle, ce qui, selon
Jacques Faget « apporte la preuve de la pertinence d'un espace de parole et de rencontre entre
personnels soignants et patients. »10 Cette approche permet ainsi d'instaurer une confiance et une
empathie plus grande dans les relations thérapeutiques.
10 P.272
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Conclusion
Les transformations de nos sociétés, où l'individualisme revêt une importance croissante
entraînent l'émergence de nouveaux conflits. La dilatation des liens familiaux et communautaires,
ainsi que le déclin des mythologies qui constituent l'imaginaire collectif des groupes fragilisent le
tissu social et entraînent la nécessité de mettre en place de nouveaux modes de régulations. Hors
des logiques de spectacle, hors des sociétés événementielles, émergent un ensemble d'initiatives
subtiles et discrète, qui tendent à mettre en place de nouveaux modes de gestions, de règlements
des conflits. A ce propos, Jacques Faget précise que « les médiations ne sauraient apporter des
remèdes à tous les malentendus, à toutes les chicanes et les fâcheries. Leur première et principale
limite est qu'elles ne s'imposent pas et ne concernent que les groupes ou les individus qui veulent
bien renoncer au combat »11 Par ailleurs, l'émergence de ces nouvelles méthodes présentent un
risque, car elles sont le fruit d'une libéralisation croissante, qui pourraient échapper au contrôle
des structures collectives. Cependant, les logiques institutionnelles de réponses aux conflits sont,
en pratique, tellement engorgés et en crise, que le recours à des modes alternatifs de résolution
est appelé à devenir une nécessité croissante.
Différents défis découlent de cette émergences. En premier lieu, la nécessité pour les médiations
de garder leurs autonomie face à une institutionnalisation croissante, qui leurs apportent
cependant cadres et justification, d'autres part, la tension entre une émancipation des individus,
induite par le processus non-directif de la médiation, et l'adoption d'une communication moins
ouverte, par exemple dans les médiations commerciales, qui peut mener à une normalisation des
comportements.
Malgré ces tensions, l'auteur déclare : « tous les ateliers de médiation que j'ai évoqués diffusent
dans la société les ferments d'une nouvelle forme démocratie d'interaction »12 La lenteur, et la
subtilité de la mise en place des processus de médiations constituent des caractéristiques majeurs
de ces nouveaux modes de régulation, qui permettent de redéfinir les dynamiques démocratiques.
11 P.27412 P.279
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2. De la pertinence de l'ouvrage
Le projet de Jacques Faget est ambitieux, l'analyse de la construction
sociopolitique de la médiation depuis les années 1970-1980 dans les pays occidentaux, tant sur le
plan normatif que dans la diversité de ses applications n'avait pas, jusqu'alors été menée
véritablement. Cette clarification intervient dans un moment clé du développement du processus.
En effet, une institutionnalisation des pratiques se développe, des codes communs de déontologie
sont élaborés en France et en Europe notamment, et la médiation tend à s'ancrer de plus en plus
dans la société civil.
Dans la première partie de l'ouvrage, l'auteur montre en quoi le terreau intellectuel observable à
partir des années 1960 favorise le développement d'une pensée, d'un cadre qui prépare
l'émergence de la médiation. Puis il montre comment le contexte politique et institutionnelle des
années 1970 crée les conditions propices aux développements de modes alternatifs de règlement
des conflits et analyse trois dynamiques de construction de la médiation : la fragmentation des
initiatives, l'institutionnalisation progressive des pratiques, et la marchandisation des processus,
qui rentrent dans une logique de marché.
Par la suite, Jacques Faget explore la construction du cadre formel et les différents modèle de
résolution des conflits. La posture de l'auteur, qui évoque des contours changeants et une
tendance à l'hybridation paraît tout à fait pertinente, au sens où il ne fige pas les pratiques,
montrant au contraire le caractère vivant et dynamique des médiations. A travers cette grille
d'interprétation, la troisième partie propose, en une succession de chapitres, un état des lieux des
champs d'applications de la médiation. Dans chaque cas, l'auteur regroupe et analyse les
informations disponibles dans chaque domaines. Les différents aspects évoquées, bien que
disparates, se regroupent et se font écho d'un chapitre à l’autre, retraçant les effets et les
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conditions de mise en œuvre de chaque discipline.
Bien que les caractéristiques divergent selon chaque procédé, la grande part des éléments
communs font que ce troisième mouvement ressemble parfois à un catalogue, et que le lecteur a
du mal à distinguer la spécificité des différentes médiations, ainsi que l’intérêt de les traiter
séparément. De plus, on regrette d'avoir peu de réponse à des questions fondamentales telles
que : qui sont les médiateurs ? Où se forment-ils ? Qui fait appel à des médiations ? Cet aspect
aurait sans doute été utile afin d’appréhender au mieux ce qui sépare chaque champs de la
médiation. Souvent, Jacques Faget évoque les études qui visent à dégager l'impact des pratiques
sur les groupes et les conflits qu'elles tentent de transformer, tout en reconnaissant la difficulté
méthodologique d'établir de véritables bilans. Ce n'est pas du fait de l'auteur, néanmoins il est
regrettable de constater que peu de travaux tendent véritablement à rendre compte des effets de
la médiation, de ses succès et de ses limites.
Cependant, cet ouvrage est tout à fait éclairant. Il fournit une vision synthétique et organisé des
pratiques de médiations, tant au niveau théorique que dans ses applications, tant au niveau
contextuel qu'intellectuel. J'ai choisi cet ouvrage car j'avais à cœur d'explorer le champs de la
médiation de façon globale, afin d'appréhender au mieux la profession à laquelle je me forme. En
effet, il me semblait nécessaire d'effectuer un premier travail sur la médiation traitée de façon
générale, afin d'avoir une vision d'ensemble des pratiques, et tout particulièrement de lier ses
origines à son modèle théorique, et à la façon dont elles sont pratiquées actuellement. J'ai
particulièrement aimé cette phrase de Jacques Faget, qui déclare « j'ai tendance à penser qu'une
formation généraliste, associée à une connaissance minimale des contextes institutionnels ou
sociaux particuliers, permet d'exercer la médiation dans tous les domaines. »13
En effet, il m'apparaît que la pratique de la médiation découle avant tout d'une posture, et d'une
série de principes, telles que l'impartialité, l'écoute active et la responsabilisation des acteurs, et
qu'elle saurait profiter à tous type d'organisations et de conflits, à condition d'être menée de
13 P.98
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manière juste, et avec le consentement mutuels des partis. A ce stade de mon parcours, je suis
davantage attirée par la médiation sociale et en entreprise, le travail avec les groupes. Néanmoins,
il me semble que d'autres types de médiations pourraient me convenir, la médiation pénales ou
environnementales par exemple. Je crois fermement que la souplesse et la pluridisciplinarité,
associées à la rigueur, sont les garants d'une actions juste et bien menées. L’intérêt majeur de la
médiation, et un des élément qui m'amène à l'étudier aujourd'hui, réside pour moi dans son
aspect plurielle, dans le fait qu'elle mobilise autant la psychologie, que la connaissance du droit, de
la société et des particularités de chacun. C'est pourquoi j'aimerais, à terme, mettre en place un
centre de médiation généraliste où travailleraient de concert différents types de professions : des
juristes, des psychologues, des médiateurs.. Afin de travailler sur la régulation des conflits et du
tissu social, avec différents types de publics.
Par ailleurs, le travail sur le langage et le développement personnel des individus m'apparaît
également comme un facteur de pacification des relations, d'établissement de liens nourrissants et
productifs pour les individus. La découverte de la communication non-violente, à laquelle je me
forme, m'a fait entrevoir à quelle point l'exercice juste de la parole peut mener à un apaisement
des conflits, et libérer la créativité et le dynamisme dans les liens sociaux. Les récit de Marshall
Rosenberg, sur les médiations qu'il a mené entre des tribus africaines, dans des prisons ou encore
avec des couples, m'ont enthousiasmé car elle montre l'efficacité et la simplicité du procédé qu'est
la communication non-violente. Le médiateur doit, à mon sens, développer un langage
empathique et clair, et se connaître suffisamment pour pouvoir gérer ses émotions et projections
afin qu'elles ne parasitent pas le processus. Le travail de communication doit autant se faire, sinon
plus, avec soi-même qu'avec autrui.
Il est nécessaire, à mon sens, de traiter chaque conflit dans sa globalité, et pas seulement le litige,
afin qu'il ne réapparaisse pas sous une autre forme. J'ai apprécié l'ouvrage de Jacques Faget, parce
qu'il fournit une étude large et extrêmement complète de la médiation, reconnaissant son
caractère confidentiel, à contre-courant d'une société du spectacle et de la rapidité. Ce retour à un
travail de fond sur les dysfonctionnement que rencontrent les démocraties et les relations
humaines m'apparaît tout à fait pertinent dans un contexte de crise politique, économique et
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DUPRAZ Louise FAGET, Jacques, Médiations. Les ateliers silencieux de la démocratie, Toulouse, Erès coll : « Trajets », 2010
environnementales, où les figures traditionnelles de maintiens de l'ordre connaissent un déclin
important. Face à la passivité, à la dépolitisation et au pessimisme d'une société en perte de
vitesse, la médiation offre une alternative, qui offre à tout un chacun la possibilité d'accéder à
l'« empowerment », de récupérer son pouvoir personnel et de reprendre en main son destin.
Jacques Faget est enseignants et conférenciers dans différents pays, il évoque énormément dans
son ouvrage la diversité des pratiques selon les états. Je trouve cette approche internationales
particulièrement intéressante, car elle permet de constater la diversité des pratiques, et en même
temps leurs points de convergence. Ayant vécu une année au Mexique, j'ai pu observer à quelle
point la gestion des liens familiaux et professionnels était différente de ce qu'on observe en
Europe. De nombreux voyages aux Canada, aux États-Unis et au Maghreb m'ont également aidé à
appréhender les différences culturels, la diversité des sociétés. A mon sens, il est aujourd'hui
impossible de se former à une profession telle que la médiation sans reconnaître et explorer cette
pluralité, et c'est pourquoi j'ai trouvé tout à fait pertinent que l'auteur ne se limite pas à une
description des pratiques française, bien au contraire. L'approche des modèles anglo-saxons,
permet tout particulièrement de comprendre l'émergence de la médiation, et d'expliquer les
limites inhérentes à son développement dans notre pays. En effet, le paradigme judiciaire et social
n'y est pas le même.
La médiation est composé d'une pluralité de pratiques, dont Jacques Faget rend compte dans la
seconde partie de l'ouvrage. Ce mouvement est, à mon sens, le plus intéressant, car il fournit une
description claire et détaillée d'une multiplicité d'approche, qui permet d'entrevoir la diversité des
modes de résolution des conflits par la médiation. Cette partie recoupe tout à fait les différentes
techniques abordée au cours du premier semestre du master Médiation, et m'a permis d'enrichir
mes connaissances et de découvrir d'autres méthodes, d'autres points de vues. Le premier
mouvement, celui des fondements théoriques de la Médiation, m'a donné la possibilité de mettre
en lien ma formation avec des auteurs étudiés au cours de ma licence, Michel Foucault
notamment.
Pour conclure, je dirais que l'ouvrage de Jacques Faget a été une découverte intéressantes et riche,
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DUPRAZ Louise FAGET, Jacques, Médiations. Les ateliers silencieux de la démocratie, Toulouse, Erès coll : « Trajets », 2010
qui m'a aidé à m'interroger sur la médiation et à l'explorer plus profondément. Bien que certaine
partie m'aient parus quelques peu répétitive, j'ai eu plaisir à lire ce texte qui regroupe, en toute
simplicité, une somme importante d'informations sur les pratiques de résolution des conflits.
Malgré le caractère ambitieux de son projet, l'auteur fait preuve, dès la préface, d'une grande
humilité, qui ouvre la porte au dialogue, à la remise en question et à l'enrichissement des idées par
d'autres sources. Cette synthèse ouvre la voie, dans mon cas, à une exploration plus poussée
d'aspects spécifiques de la médiation, et à un stage de découverte afin d'observer et de participer
sur le terrain aux processus de médiations.
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