des amphores et des hommes 1989

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Fanette Laubenheimer Des amphores et des hommes 1989 In: Dialogues d'histoire ancienne, vol. 15, n°2, 1989. pp. 534-550. Citer ce document / Cite this document : Laubenheimer Fanette. Des amphores et des hommes 1989. In: Dialogues d'histoire ancienne, vol. 15, n°2, 1989. pp. 534-550. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/dha_0755-7256_1989_num_15_2_1893

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Fanette Laubenheimer

Des amphores et des hommes 1989In: Dialogues d'histoire ancienne, vol. 15, n°2, 1989. pp. 534-550.

Citer ce document / Cite this document :

Laubenheimer Fanette. Des amphores et des hommes 1989. In: Dialogues d'histoire ancienne, vol. 15, n°2, 1989. pp. 534-550.

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/dha_0755-7256_1989_num_15_2_1893

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retraite. L'historien ne doit pas s'y laisser prendre. Dans les turbulences du Ve siècle, Lérins fut un formidable camp de formation pour une croisade théologico-politique d'un type nouveau.

René NOUAILHAT mars 1989

О DES AMPHORES ET DES HOMMES 1989 *

*Abrégé DADH

L'afflux des publications ne cesse de croître. C'est peu à peu tout le monde méditerranéen qui se voit concerné durant toute l'Antiquité. La recherche accuse un développement nouveau pour les amphores de l'Antiquité tardive et de la période byzantine, tandis que les amphores impériales tiennent la place dominante. Au reste, les problématiques s'affirment et les moyens s'orientent à la rigueur ; la reconnaissance des formes s'affine et les évaluations quantitatives se multiplient. L'aperçu des récentes publications que je donne ici, sans viser à l'exhaustivité, trace déjà une image éloquente.

Amphores archaïques

Venant compléter l'étude récente de G. Poenaru Bordea sur les timbres amphoriques de Thasos à Callatis (BCH supp. XIII, 1966, p. 335-351), la publication des nouveaux timbres amphoriques tha- siens de Callatis par 1 A. Auram et G. Poenaru Bordea, dans Dada, XXXII, n° 1-2, 1988 p. 27-35, se consacre à deux lots des fouilles de 1931 et de 1948-49, soit 82 timbres inédits. Les amphores thasiennes timbrées d'Histria donnent lieu à un article (2 A. Auram, Zu den Handelsbeziehungen zwischen Histria und der Insel Thasos im Lichte der Amphorenstempel, dans Klio, 70, 1988, p. 404-411) qui annonce la parution, par le même auteur, d'un ouvrage important (3 Thasien Amphora Stamps from Histria, Romania, BAR, Oxford, 1988) avec un catalogue de 928 timbres.

Du nouveau sur les amphores de Cnide (4 J.Y. Empereur, Producteurs d'amphores dans les ateliers de Resadiye (Péninsule de Datça), dans Arastrima Sonuçîari Toplantisi, VI, 1988, p. 159-163) avec la

Dialogues d'Histoire Ancienne 535

découverte d'ateliers et de groupes d'amphores cnidiennes, timbrées ou non, dans la péninsule de Datça. Ainsi, ce n'est plus en 240 avant notre ère, mais dès la fin du 4ème s. que débute la production qui va se prolonger jusqu'au 7ème s. de notre ère. Toujours dans la même région, à la naissance de la péninsule de Cnide, l'atelier d'Hisaronii est un site de la Pérée rhodienne intégrée : 5 J.-Y. Empereur, N. Tuma, Hiérotélès, potier rhodien de la Pérée, dans BCH, XCIII, 1989, I, p. 277-299. A ce titre, on y applique les habitudes rhodiennes, et ce sont des amphores d'imitation rhodienne qui y sont fabriquées, portant des timbres de type rhodien. On mesure ici, par l'exemple du potier Hiérotélès, dont on connaît des centaines de timbres en Egée, en Mer Noire ou à Alexandrie, combien la production de la Pérée est importante dans l'ensemble rhodien.

En Méditerrannée occidentale, la publication des actes du colloque Grecs et Ibères au IVème s. av. J.-C. (6 Revue des Etudes Anciennes, LXXXIX, 1987, 3-4, 428 p.) pose le problème des rapports marchands Orient-Occident en développant la première approche scientifique globale de la fameuse épave d'El Sec (DADH, 1988, n° 6). Sa cargaison composite avec, en particulier, plusieurs lots d'amphores vinaires, originaires surtout de la Méditerranée orientale, laisse ouverte la question du pavillon du navire : punique ou grec ?

Amphores républicaines et impériales

Très attendue était la publication du colloque tenu à Sienne en 1986 : Anfore romane e storia economica : un decenmio di ricerche, qui paraît cette année sous le titre 7 Amphores romaines et histoire économique : dix ans de recherche, n° 114 de la Collection de l'École Française de Rome, Rome, Paris, 1989. L'ouvrage monumental de 668 pages marque par son volume même, supérieur de deux à trois fois à celui des deux colloques antérieurs organisés en 1971 et 1974 par l'École Française de Rome et publiés dans la même collection, l'incroyable développement des recherches dans ce domaine. Nous renvoyons pour l'ensemble des contributions au compte-rendu déjà présenté lors de la tenue du colloque (DADH, 1986, p. 518-520).

Le livre est divisé en trois parties : Communications, Discussion finale et Posters. L'articulation des communications qui avait ordonné le colloque lui-même en quatre grands chapitres : Production

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et Typologie, Analyses, Diffusion, Economie et Société n'a pas été reprise sous forme de titres et de parties, ce qui donne un sentiment de confusion, car on décrypte mal le classement des articles.

La richesse de leurs informations (18 articles sont publiés sur les 21 annoncés au colloque, un autre a été ajouté) est très largement démultipliée par la publication des 39 posters, qui, de façon percutante, rassemblent en quelques pages bien illustrées une sorte de revue de données nouvelles sur les amphores dans de multiples domaines. Publier des posters, un pari difficile, constitue la part la plus originale du livre, bien adaptée au développement foisonnant et à la dynamique des recherches. Le problème de la maîtrise des données rejaillit sans cesse dans une réflexion où les modèles se complexisent chaque jour.

La question de la distribution des denrées et des modèles de marchés tant en Italie que sur le limes est posée par ailleurs, par C.R. Whittaker dans deux articles récents : 8 Trade and the Aristocracy in the Roman Empire, dans Opus, IV, 1985, p. 49-75 et 9 Supplying the System : Frontiers and beyond dans Barbarians and Romans in North-West Europe, BAR International Series 471, 1989, p. 64-79.

- En Italie

A propos d'une synthèse sur l'esclavage en Italie, A. Carandini 10 (Schiavi en Italia, Rome 1988, p. 267-285) peint une vaste fresque sur les tribulations du commerce du vin italien et la place des concurrents en utilisant notamment la lecture que donnent les amphores.

Dans le Sud de la péninsule, G. Volpe, dans la perspective d'un corpus des amphores des Pouilles, fait un tour d'horizon des amphores républicaines : trouvailles sporadiques, souvent fortuites, terrestres et sous-marines (11, G. Volpe, Primi dati sulla circolazione délie anfore repubblicane nella Puglia settentrionale, dans La Puglia in eta' Repubblicana, Atti del / Convegno ai suai sulla Puglia romana, Galatina, Congedo Editore, 1986, p. 77-90). Le même auteur présente deux amphores vinaires timbrées, l'une rhodienne et l'autre de Brindes, déposées en offrande dans une tombe d'Ascoli Satriano (12, G. Volpe, Le anfore délia tombe 6 di Ascoli Satriano, dans

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Ricerche e Studi, XIII, 1980-87, Quaderni del Museo Archeologico Provinciale « Francesco Ribezzo » di Brindisi, p. 105-120). La typologie des amphores produites dans la région de Brindisi se met en place (13 P. Palazzo, Aspetti délia produzione di anfore brindisine, dans / Convegno di studi sulla Puglia romana, (Mesagne, 1986), Galatina, 1988, p. 109-117 et 14 P. Palazzo, Le anfore di Apani (Brindisi), dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 548-553) et s'inserre plus largement dans les productions de la côte adriatique (15 Maria Teresa Cipriano et Marie-Brigitte Carre, Production et typologie des amphores sur la côte adriatique de l'Italie, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 67-104) tandis que, parallèlement, la réflexion sur l'organisation sociale et économique de la production progresse (16 D. Mana- corda, Per un studio dei centri produttori délie anfore brindisine, dans / Convergno di studi sulla Puglia romana (Mesagne, 1986), Galatina, 1988, p. 91-108 et 17 D. Manacorda, La anfore dell'Italia repubblicana : aspetti economici e sociali, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 443-467). Du nouveau aussi sur la fréquentation maritime de la côte des Pouilles et du Port de Bari : amphores gréco-italiques, de Brindes, Lambolia 2 et 6... (18, G. Volpe, Rinvenimenti subacquei a Barletta, dans Taras, Rivista di Archeologia, V, 2, 1985, Tarante, 1987, p. 283-306; 19 G. Volpe, II porto e il litorale dans Archeologia di una città, Bari dalle origine al X secolo, Bari, s.d. ; 20 G. Volpe, Primi dati sulla circolazione délie anfore repubblicane nella Puglia settentrionale, dans / Convegno di Studi sulla Puglia romana, Mesagne, 1986, Galatina, 1988, p. 77-90, 21 P.A. Gianfrotta, Archeologia sottoma- rina in Puglia, dans / Convegno di Studi sulla Puglia romana, Mesagne 1986; Mesagne 1988 p. 119-125).

En Campanie, P. Arthur propose une vue d'ensemble sur les productions céramiques de VAger Paler nus dont il tire un schéma d'évolution chronologique (22 P. Arthur, Produzione ceramica e agro falerno, dans Storia economia ed architettura nell'Ager Falernus, 1986, p. 59-68). Par ailleurs, reprenant le problème de Г origine des amphores Richborough 527, à la suite du colloque de Sienne, le même auteur suggère une origine campanienne (la région de Pouzzoles) sans disposer toutefois d'arguments définitifs (23 P. Arthur, On the origins of Richborough form 527, dans Amphores romaines et Histoire économique, Rome, 1989, p. 249-259). La diffusion de ce même type d'amphores, en effet, bien connu en Angleterre et dans l'Ouest de

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la France au 1er s. (24 P. André, Les amphores cannelées du 1er s. dans la France de l'Ouest, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 588-589), comme certains caractères minéralo- giques de la pâte avaient conduit certains chercheurs à placer dans le Massif Central une origine possible. En fait, on voit aujourd'hui les Richborough 527 s'étendre largement dans le Sud de la France, d'après de récents comptages que j'ai effectués sur des sites très variés. Il apparaît qu'on met le doigt sur un courant commercial plus important qu'on ne l'imaginait, dont on perçoit mal d'où il vient (une seule ou plusieurs origines et lesquelles ?) et les denrées qu'il met en jeu (un ou plusieurs types de contenu ?). Pour débrouiller ce problème intéressant, une étude de typologie statistique s'impose, comme une série d'analyses de pâte et de contenu sur un large échantillonnage.

A Rome, dans des niveaux flaviens de la fouille de la Curie et de la Basilique Emilia, un groupe de fragments d'amphores s'apparente aux récipients tardo antiques (LR 4 et 5/6) d'origine siropales- tinienne. Surgissent de nouveaux problèmes de typologie et d'identification (25 F. de Caprariis, C. Fiorini, D. Palombi, Conte- nitori da trasporto dell'area siro-palestinese, dans Mélanges de l'Ecole Française de Rome, 100, 1988, 1, p. 305-320).

L'importante synthèse sur le port de Cosa, déjà mentionnée très rapidement (DADH, 1988, 13), mérite qu'on s'y arrête (26 A.M. Me Cann, J. Bourgeois, E.K. Gazda J.P. Oleson, E. Lyding Will, The Roman Port and Fishery of Cosa, a Center of Ancient Trade, Princeton, 1987). E. Lyding Will (chap. IX, The Roman Amphoras, p. 169-220), y fait l'étude de 789 amphores trouvées dans le port. Pour chacun des 13 types répartis suivant la classification encore inédite de l'auteur, (à partir des amphores de l'agora d'Athènes), un historique est présenté, appuyé sur une bibliographie déjà ancienne (interrompue en 1983) tant sont rapides les derniers développements dans l'étude des amphores. Le matériel de Cosa trace la grande activité du port liée aux exportations de vins étrusques entre la fin du 2ème s. et le milieu du 1er s. av. J.-C. Cosa est alors « le port des Sestii » (multiples timbres et pâte caractéristique), ce qui invite à trouver ailleurs en Etrurie d'autres points d'exportation tout aussi importants, par exemple à Albinia, autre centre de production dont les amphores ont une pâte et des timbres différents. Un des grands résultats de ces travaux est de montrer que Cosa est aussi un grand centre de pêche et de traitement du poisson.

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Les Sestii ont-ils produit et exporté du garum ? E. Will le pense et développe à leur propos un modèle intéressant où leur activité se diversifie entre production et exportation de vin et de poisson. Le garum serait transporté dans des amphores Dl С au timbre de Sestius, des D28 et des D2/4 auraient fait le même office (on en connaît d'autres exemples en Provence). Si passionnante que soit l'hypothèse, on reste surpris que devant l'absence d'estampilles et de marques peintes, des analyses de pâte ne viennent pas confirmer l'origine locale des deux derniers types, et des analyses de contenu la présence du poisson. L'activité du port se ralentit sous la Haut- Empire, l'arrivée en quantité remarquable du vin gaulois dans des amphores Gauloise 4 confirme les données de la proche villa de Settefinestre où, au 2ème siècle, elles sont majoritaires (voir n° 32).

Une étude très structurée sur les amphores italiques républicaines combine prospections, analyse des formes et surtout des timbres avec les analyses de pâte ; elle montre bien la complexité du problème (27 A. Hesnard, M. Ricq, P. Arthur, M. Picon, A. Tchernia, Aires de production des gréco-italiques et des Dr. 1, dans Amphores et histoire économique, Rome, 1989, p. 21-65 ; voir également 28 M. Ricq de Botiard, E. Meille, M. Vichy, M. Picon, Les argiles utilisés pour la fabrication des amphores en Italie, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 257-268).

En Italie du Nord, à l'occasion du centenaire de la mort de Luigi Bruzza, L. Brecciaroli Taborelli fait un réexamen du matériel que le grand savant avait étudié, au moment même où son ami Dressel travaillait sur les amphores de Rome (29 L. Brecciarolli, Per una ricerca sul commercio nella Transpadana occidentale in età ro- mana : ricognizione sulle anfore di « Vercellae », dans Atti del Convegno di studi nei centenario délia morte di Luigi Bruzza - 1883 - 1983", Vercelli, 1987, p. 129-208). Avec 90 amphores entières ou fragmentaires du 1er s. avant notre ère et du 1er s. de notre ère, se dessine au 1er s. av. notre ère la prééminence des importations apu- liennes, huile (amphores de Brindes) et vin (Lamboglia 2) ; les vins de la côte tyrrhénienne (Dressel 1) sont plus rares et l'on trouve peu de vins grecs. Sous Auguste, l'impulsion de l'économie agricole de l'Italie septentrionale se lit au travers des Dressel 6A pour le vin et des Dressel 6B pour l'huile. Sur la côte adriatique a été localisé au Sud de Torre di Palme un atelier d'amphores déjà repéré en 1815, on y produit des formes semblables à la Lamboglia 2 et d'autres à la

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Dressel 6, timbrées BARBVL // C. IVL. POLY (30 L. Brecciaroli Taborelli, Una produzione di anfore picene ed il vino palmense, dans Ficus, Studi e Ricerche sulle Marche nell' Antidata, ГУ, 1984 [1988], p. 55-93).

C'est vraisemblablement en Istrie, entre Auguste et les premières années du 2ème s., qu'il faut situer l'origine de petites amphores à panse tronconique et fond plat. Plusieurs marques peintes indiquent qu'elles transportaient des olives vertes ou noires. Leur diffusion, parallèle à celle des amphores à huile D6B, s'oriente vers la Véné- tie occidentale et la Transpadane pour le type A, vers la Vénétie orientale, la Norique et la Pannonie pour le type В (31 G. Muffanti Musselli, Diffusione dell'anfora tronco-conica da olive nel I sec. D.C., dans Rivista Archeologica dell'Antica, Provincia e Diocesi di Como, n° 168, 1986, p. 187-215). On notera aussi une étude prosopo- graphique de timbres de l'Italie nord-orientale (32 C. Zaccaria, Per una prosopografia dei personaggi menzionati sui bolli délie anfore romane dell'Italia nordorientale, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1984, p. 469-488).

Une synthèse très nouvelle sur les productions d'amphores en Italie au 2ème s. met en valeur la transformation profonde de la géographie commerciale et agricole du pays. Trois zones de production, l'Italie centro-méridionale tyrrhénienne, l'Italie centrale interne et l'Italie centro-septentrionale adriatique ; on fait encore quelques Dressel 2/4, mais surtout des amphores à fond plat (Forlimpopoli, Empoli...) pour un transport de vins ordinaires à diffusion limitée, locale ou régionale : autoconsommation et alimentation de Rome (33 C. Panella, Le anfore italiche del II secolo D.C., dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 139-178).

- Dans la Péninsule ibérique

Utile synthèse des travaux sur les amphores de Catalogne de la fin de la République et du Haut-Empire, menés par divers chercheurs depuis 25 ans, le livre de J. Miró (34 La producción de ânforas romanas en Catalunya, BAR International Series 473, Oxford, 1988, 366 p.) aborde successivement les fours, les amphores, les exportations, les marques, les structures économiques et sociales et le marché. Trois annexes concernent les dimensions des amphores, les sources écrites sur le vin de Tarraconaise et le catalogue des marques.

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Ce sont 49 sites de production qui sont répertoriés, dont une trentaine seulement sont attestés avec certitude, mais leur localisation reste vague et l'unique carte globale n'est d'aucun secours. L'auteur parle de fours et non d'ateliers, donnant une vision restrictive des unités de travail qui interdit de voir les modèles mis en jeu. La notion de capacité de produccion, que l'on peut traduire à partir de prospections délimitant la surface occupée et le nombre des fours, reste dans l'ombre ; on ignore enfin de quelles autres fabrications que celle des amphores vivent ces ateliers. La typologie fait le bilan des trouvailles, on regrette de ne pas trouver ici une classification plus rigoureuse, un outil performant si nécessaire pour distinguer les amphores de Tarraconaise d'autres de mêmes formes produites ailleurs. Saluons, cependant, le tableau des dimensions données dans l'annexe 1, premier pas vers une analyse plus détaillée qui pourrait nous conduire, avec un échantillonnage élargi, vers une vision plus spécifique de l'évolution (ou de la standardisation) des formes par centre de production et dans le temps.

Les cartes de diffusion des amphores de Catalogne, type par type, entreprise difficile et jamais exhaustive, donnent une image qui recoupe bien celle de la diffusion des épaves vers la Gaule. Enfin un catalogue d'estampilles regroupe une sélection de 179 timbres, 27 graffites et 7 marques peintes. J. Miró met au compte de l'immigration italienne le développement du vignoble de Tarraconaise et l'émergence d'une véritable industrie du vin. Il voit les causes de son déclin dans la concurrence des vins gaulois et l'occupation croissante des terres par la culture des grains.

On trouvera des nouveautés sur les ateliers et le commerce des amphores de l'embouchure du Llobregat dans les pré-actes des J Jornades Arqueológiques del Baix Llobregat, Castelldefels, 28, 29, 30 abril 1989 35, et une étude des importations des amphores romaines en Catalogne dans 36 J.M. Nolla et FJ. Nieto, La importación de ánforas romanas en Cataluna durante el periodo tardo-republicano, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 367- 391. Le premier rapport détaillé sur l'épave de Cala Culip IV, échouée au large de Cadaqués, apporte une moisson de renseignements sur le commerce vers 70 de notre ère, avec sa cargaison de sigillées de La Graufesenque et d'amphores Dressel 20 (37 J. Nieto Prieto et al., Excavaciones arqueológiques subacuatiques a Cala Culip, I, 1989, p. 344 p.). Des amphores du 1er au 4ème s. sont recensées dans la

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fouille de Portus Illicitanus (38 MJ. Sanchez Fernandez, A. Guardiola Martinez, E. Blasco Martinez, Portus Illicitanus, Santa Pola (Alicante), Valence, 1989).

Les amphores à huile de Bétique ont suscité plusieurs travaux. 39 P.P. Abreu Funari (Contribution to the Chro-nological Knowledge of Baetican Olive OU Dressel 20 Amphora Stamps : The Reading of the Unpublished British Evidence, Sao Paulo, 1989) publie 44 timbres trouvés dans les fouilles récentes de Grande-Bretagne ; G. Chic Garcia (40 Epigrafta anfórica de la Beticá II, monografias del Departamento de Historia Antiqua de la Universidad de Sevilla, n° 4, 1988, 224 p.) donne une suite à son premier ouvrage Epigrafta anfórica de la Béticá I, en étudiant les Tituli picti et en donnant des considérations sur l'Annone, tandis que J. Remesal Rodriguez pose quelques uns des problèmes liés à l'épigraphie des Dressel 20 (41 La epigrafia de la Beticá, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 489-503).

En Lusitanie, on trouvera un bref aperçu sur la production des amphores et l'industrie du garum dans la récente synthèse de J. de Alarçao, 42 O. Dominio Romano en Portugal, Sintra, 1988. Les données sur les ateliers d'amphores se multiplient : 43 A.M. Dias Diogo et al, О material dos fornos romanos da En-chrorrasquiera no Museo do Mar, Cascais, 16 p., Museo do Mar, Cascais, 1984 , 43 A.M. Dias Diogo et al., О material das fornos romanas do Abûl no Museo do Mar, Cascais, 12 p. Muses do Mar, Cascais, 1985, les deux ateliers produisent des Dressel 14 ; 45 G. Cardoso, Fornos de ânforas romanas na bacia do rio Sado : Pinheiro, Abúl e Bugio, dans Conimbriga, XXV, 1986, p. 155-179. Les prémices d'une typologie des amphores lusitaniennes sont présentés dans le catalogue d'une exposition réalisée sur les productions de la vallée du Sado (46 M. Dias Diogo, J.C. Faria, Trabalho e produçào no Sado durante a époqua romana, Camara municipal de Alcácer do Sal, 1989, 19).

L'organisation de l'industrie du garum est analysée par J.C. Edmondson 47, Two Industries in Roman Lusitania, Mining and Garum Production, BAR International Series 362, Oxford, 1987, 355 p. ; les ateliers d'amphores des estuaires du Tage et du Sado ainsi que ceux de la côte d'Algarve sont inventoriés dans l'annexe V : 23 sites en tout ; l'annexe VI est consacrée à un inventaire très rapide de la dis-

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tribution des amphores lusitaniennes Dressel 14, Almagro 50, 51 A-B et 51 С

- En Gaule

Dans le cadre de l'année de l'archéologie, les amphores sont à l'honneur dans le catalogue de l'exposition 48 Archéologie en France, 30 ans de découvertes, Paris, 1989 qui présente quelques fouilles d'épaves chargées d'amphores (P. Pomey, L'archéologie sous- marine, p. 388 et sq ) et l'atelier d'amphores gauloises de Sallèles d'Aude (F. Laubenheimer, p. 315) ; on trouve dans le beau livre : 49 De Lascaux au Grand Louvre, Paris 1989, de courtes synthèses bien illustrées sur une large gamme de recherches récentes, signalons notamment, P. Pomey, Cargaisons perdues, p. 340-343 ; F. Laubenheimer, Le vin : les amphores témoignent, p. 344-347.

Dans le domaine des productions, les découvertes ne cessent de se multiplier. Un bilan des recherches de 1982 à 1986, fait état de 18 ateliers nouveaux, dont cinq répartis vers le Nord, hors de la Nar- bonnaise révèlent une progression précoce du vignoble vers la Chevelue ; parallèlement, la diversité des amphores et leur répartition dans le temps se rationalise tandis que la recherche de standardisation et ce qu'elle signifie se pose en termes clairs (50 F. Laubenheimer, Les amphores gauloises sous l'Empire : recherches nouvelles sur leur production et leur chronologie, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 105-138). Des productions complémentaires, amphores à fond plat, encore mal définies par des objets rares et fragmentaires, apparaissent dans le Var (51 M. Pascalini, Les céramiques dans le bassin de l'Argens et la région de Fréjus (Var) dans Société Française d'Etude de la Céramique Antique en Gaule, Actes du Congrès d'Orange, Marseille, 1988, p. 155-168 ; 52 D. Brentchaloff, L'amphore à saumure de type Fréjus- Lenzbourg, id., p. 179-186). Dans la vallée de l'Ardèche, l'atelier de St-Julien-de-Peyrolas produit, avec des matériaux de construction et de la vaisselle, des amphores G.l dont on sait la forte concentration dans la basse vallée du Rhône toute proche (53 J. Goury, L'officine de potiers de St-Julien-de-Peyrolas (Gard, id, p. 61-65). Toujours dans le territoire des Helviens, l'officine de St-Just est exceptionnelle en Narbonnaise : elle imite les Dr. 1 italiques, et fait des plaques Campana ; à l'époque augustéenne, elle se pose comme un modèle nouveau, fortement italianisant (54 F. Laubenheimer, T. Odiot,

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H. Leclère, Sous Auguste, un atelier de potiers italianisant à St-Just (Ardèche), dans Mélanges P. Lévêque, Paris, 1989, 2, p. 295-329). Dans la région lyonnaise, on a également fabriqué des amphores D.l (55 Ch. Becker, Production régionale d'amphores de type D.2/4 et de type D.l, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 578-579), et d'autres modèles qui se limitent, comme le prouve la publication des analyses de pâte, aux D.2/4 et aux D.9 d'imitation (56 A. Schmitt, Les productions d'amphores dans la moyenne vallée du Rhône : mise au point de quelques types, dans Société Française d'Etude de la Céramique Antique en Gaule, Actes du Congrès d'Orange, Marseille, 1988, p. 25-33, modifie A. Desbat, Note sur la production d'amphores à Lyon au début de l'Empire, dans Société Française d'Etude de la Céramique Antique en Gaule, Actes du Congrès de Caen, 1987, p. 159-165). Premier exemple dans l'Isère, l'atelier d'Aoste, fabrique essentiellement de la vaisselle et quelques amphores à lèvre à double inflexion externe au 1er s. (57 С Laroche, Aoste (Isère), un centre de production de céramiques, dans Revue Archéologique de Narbonnaise, 20, 1987, p. 281-348). La découverte de Dressel 2/4 locales à Augst, pendant le 2ème quart du 1er s., s'intègre bien dans l'image d'un vignoble tôt développé vers le Nord en direction de la Bourgogne et de la vallée de la Loire, tel que le tracent les ateliers récemment étudiés dans ces régions (58 S. Martin-Kilcher, M. Maggetti, G. Galetti, Fabrikation von Weinamphoren der Form Dressel 2-4 in Augusta Rauricorum, Augst BL, dans Jahrbuch der Schweizerischen Gesellschaft fur ur- und Fruhgeschichte, 70, 1987, p. 113-132). Une nouveauté dans le Sud- Ouest avec la découverte d'une amphore à fond plat bordelaise au 1er s. (59 F. Berthault, Amphore à fond plat et vignoble à Bordeaux du 1er s., dans Aquitania, VI, 1988, p. 157-166. On trouve là encore un argument pour le développement précoce du vignoble, dans cette région mais les évaluations quantitatives désormais nécessaires sur la production et la diffusion de ces amphores tempéreront peut-être l'ampleur du phénomène.

L'acculturation des artisans gaulois à l'amphore, un produit colonial dont il n'y avait aucune référence dans leur tradition, et qu'ils se sont pourtant habitués à fabriquer pour transporter leur vin, éclate avec la découverte de la belle statue de Silvain-Sucellus à Javols (Lozère). Le dieu aux tonneaux (il en a deux ici) est accompagné d'une treille et d'une amphore, bel exemple de la force symbolique de la viticulture et surtout du vin que l'on transporte, comme on

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le sait, dans des tonneaux et dans des amphores à la fois (60 J.C. Béai, P. Peyre, Une statue antique de Silvain Sucellus à Javols (Lozère), dans Revue Archéologique de Narbonnaise, 20, 1987, p. 349-368).

Une foison de documents nouveaux sur la circulation des amphores : encore deux épaves chargées de vins d'Italie d'époque républicaine, dans des Dressel 1 ; l'une au large du cap de St-Tropez, à près de 90 m de fond a été expertisée à l'aide d'un sous-marin (61 L. Long, L'épave antique des Basses de Can (Var). Nouvelle expertise archéologique à l'aide d'un sous-marin, dans Cahiers d'Archéologie Subaquatique, VII, 1988, p. 5-19) ; l'autre, à Marseille (RIOU 3), à la suite de pillages, a fait l'objet d'une fouille : son chargement se compose de céramiques campanienne A et d'amphores Dressel 1 A et Dressel 1 С timbrées en grec. Le nauffrage a eu lieu autour des années 110-80 avant notre ère (62 L. Long et S. Ximénès, L'épave Riou 3 à Marseille, dans Cahiers d'Archéologie Subaquatique, VII, 1988, p. 159-183). Autre témoignage de l'arrivée en masse du vin d'Etrurie, les 272 Dressel 1 jetées dans un fossé du Verbe Incarné à Lyon. Sur les cols des amphores portant divers timbres de Sestius, les bouchons de pouzzolane conservés sont marqués d'un même symbole, sans doute celui du négociant (63 Catherine Godard, Les fossés du plateau de la Sarra, Les amphores, dans Documents d'Archéologie en Rhône- Alpes n° 2, Aux origines de Lyon, Lyon, 1989, p. 50-67). L'importance des vins italiens est encore soulignée à Toulouse dans le catalogue de la belle exposition Paladia Tolosa, Toulouse romaine, Toulouse, 1988 (64 F. Laubenheimer, Toulouse et le vin, p. 48-50, Michel Vidal, Les amphores vinaires, p. 53-56). Le vin-marchandise souffre d'un handicap redoutable qui est son poids. La publication de l'épave du Grand-Ribaud D, échouée au large d'Hyères, illustre la tentative des gens de Minturnes, autour du changement d'ère, de transporter le vin italien en vrac : des dolia sont amarrés à poste fixe au centre du bateau. Le chargement est complété, à l'avant et à l'arrière, par des amphores Dressel 2/4, de la région de Pompéi, au reste plus légères que les anciennes Dressel 1 (65 A. Hesnard, M.-B. Carre, M. Rival, B. Dangréaux, L'épave romaine Grand Ribaud D (Hyères, Var), Archaeonautica, 8, Paris, 1988, 180 p.). Dans un livre bien structuré, avec une illustration de qualité, les auteurs nous conduisent au travers d'une analyse méthodique de la cargaison, du matériel de bord et du navire, à des conclusions novatrices pour le commerce du vin. Ces bateaux à dolia

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représentent un avantage économique prodigieux. On supprime la manipulation des amphores, mais surtout, le volume du vin transporté est bien supérieur : de 1,7 fois à celui des amphores pour le Grand Ribaud D. Les épaves à dolia sont, pourtant, peu nombreuses, on en connaît seulement 6, et leur système si astucieux disparaît après Néron. Pourquoi ?

L'avantage en capacité est réel pour les petits bateaux sur lesquels 1 niveau de dolia remplace 2 niveaux d'amphores. Il perd de son intérêt sur les grands navires qui acceptent 3 niveaux d'amphores. C'est la raison pour laquelle les épaves à dolia que nous connaissons sont de petits bateaux. Plus contraignant encore est le type de cargaison qui ne se morcelle pas : elle est obligatoirement embarquée et débarquée dans un seul endroit prévu d'avance et équipé de structures spéciales : pompes et dolia, ce qui impose une organisation commerciale lourde et sans souplesse. L'efficacité du mode de transport paraît être assorti de trop de contraintes (risques de naufrages accrus d'un navire fragile, complexité de l'infrastructure) pour avoir connu un large développement. Les installations portuaires destinées à recevoir ces bateaux sont, en effet, rares. On trouvera un argument complémentaire aux limites de ce commerce dans la distribution des ateliers d'amphores en Gaule du Sud. De gros apports de vins en vrac auraient nécessité, s'ils n'étaient pas consommés sur place, à l'arrivée, de vastes complexes de production d'amphores, à proximité de ports, pour assurer la redistribution. Or les officines sont surtout implantées à l'intérieur des terres, dans les vignobles qui les ont suscitées. Cependant, quelques potiers intallés dans les ports, c'est le cas à Marseille (Butte des Carmes), répondaient pour totalité ou partie de leur production à la demande d'emballages créée par la livraison de vin en vrac. Les marques peintes sur les Gauloises 4 et 5 de la rade de Fos annoncent justement du vin du Massique. Des amphores gauloises de Narbonnaise, diffusées dans la Gaule, ont contenu parfois des vins importés. Nous n'avons aucun moyen de les détecter, lorsque les indications peintes ont disparu. Mais les arguments sont nombreux pour montrer la fragilité du vin en vrac, un essai commercial éphémère qui ne s'est pas développé.

De nouvelles évaluations dans le Sud-Ouest accusent l'importance du courant d'importation des vins de Tarraconaise au début de l'Empire, à Dax, Libourne et Saintes (66 B. Watier, Deux amphores de M. Porcius trouvées à Dax, dans Bulletin de la Société de Borda,

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n° 410, 1988, p. 37-55) ; 67 F. Berthault, B. Watier, Les amphores du musée archéologique de Libourne, dans Revue Historique et Archéologique du Libournais, n° 206, p. 97-135 dont les conclusions sont reprises dans 68 F. Berthault, B. Watier, Les amphores romaines du musée de Libourne, dans Aquitania, VI, 1988, p. 191-196; 69 N. Lauranceau, Les amphores des zones 10 et 11 dans Les fouilles de "ma maison". Etudes sur Saintes Antique, Aquitania, supp. 3, 1988, p. 263-278). Plus au Nord, ces vins arrivent en abondance à Angers (70 J. Siraudeau Amphores romaines des sites angevins et leur contexte archéologique, Angers, 1988, 240 p. 34 fig., 59 pi). Ce deuxième volume du corpus des amphores découvertes dans l'Ouest de la France présente un bilan du matériel trouvé à Angers depuis 150 ans. On y compte, d'une part, les amphores des collections anciennes déposées au Musée Archéologique, depuis sa fondation, en 1841, et, d'autre part, les amphores découvertes dans les fouilles de sauvetage récentes, entre 1964 et 1982. Travail souvent ingrat de collecte et de description, une telle synthèse donne une vue totalement nouvelle des échanges et de la consommation des denrées transportées dans des amphores dans une zone dont on ne savait rien jusqu'alors. L'entreprise, parfaitement justifiée, se heurte cependant à deux difficultés majeures et bien connues : l'exhaustivité du matériel et la qualité des fouilles.

Les 1279 numéros du catalogue représentent en fait un échantillonnage des découvertes (celles qui ont été conservées) pour les fouilles anciennes et pour une partie des fouilles récentes (sauvetages rapides, dans de mauvaises conditions) ; au reste, le catalogue prend en compte les amphores entières, ou presque, les lèvres, les fonds, les anses et les morceaux inscrits ; les fragments de panses sont exclus. Les fouilles stratigraphiques offrant des données chronologiques sont rares. On appréciera la concision du catalogue, un outil de travail d'une grande précision et très largement illustré (photos et dessins dont une échelle réduite au 1/5 eût été plus économique).

L'ensemble des amphores caractérise un matériel du Haut- Empire. La faiblesse des importations vinaires d'Italie dans des Dressel 1 (1,3 %) correspond bien à une fondation augustéenne de la ville, telle que les données archéologiques le suggèrent, comme l'arrivée en masse du vin de Tarraconaise dans des P.l (15,8 %). Les fouilles d'Angers confirment l'importance de ce courant déjà bien

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repéré dans le Sud-Ouest et notamment à Bordeaux (Laubenheimer, Watier, à paraître), mais plus rare dans la vallée du Rhône : 0,7 % seulement à Lyon (Bas de Loyasse) en 60-70 de notre ère (Dangréaux, Desbat, Gallia, 1987, p. 148).

La présence du vin gaulois, dans des G4, dès le milieu du 1er s. apparaît dans plusieurs contextes datés et s'accorde bien avec les premières fabrications en Narbonnaise. Des amphores venues des ateliers de la vallée de la Vienne et du Cher témoignent des premières exportations connues de ces officines. Apparaissent également diverses productions à pâte brune, jusque là inconnues. Vraisemblablement gauloises, elles suggèrent de nouveaux ateliers peut-être caractéristiques de l'Ouest. On ne s'étonnera pas de trouver ici aussi quelques vins grecs, de l'huile et un peu de vin de Bétique, ainsi que des sauces de poisson de la Péninsule ibérique.

Malgré les difficultés liées à l'état du matériel, on ne peut que souhaiter voir se multiplier de telles études. Et nous n'avons pas le choix ! Par leur multiplication, elles seules permettent, à travers les collections anciennes et les fouilles récentes, de mener une approche globale des problèmes fondamentaux de distribution, de consommation et de commercialisation des denrées que permettent de décrypter les amphores.

Dans l'Est, un aperçu de la circulation des amphores à Mandeure, souligne par sa diversité l'importance de la voie du Doubs, passage normal du commerce entre l'axe Saône-Rhône et les rives du Rhin (71 J. Jeannin, F. Laubenheimer, Les amphores de Mandeure (Epomanduo-durum) dans le Doubs, dans Revues Archéologique de /'Est, 40, 1989, p. 75-91).

L'épave des Roches d'Aurelle, au large de St-Raphaël, est le premier exemple d'un transport par mer d'un lot d'une cinquantaine d'amphores G.5 et lèvre à double inflexion externe de l'atelier de Pauvadou à Fréjus (72 J. Berato, M. Boreani, J.-P. Brun, M. Pasqualini, A. Pollino, L'épave des Roches d'Aurelle, dans l'Exploitation de la mer, Vlèmes Rencontres Internationales d'Archéologie et d'Histoire, Antibes, Octobre 1985, Juan-les-Pins 1986, p. 191-216). Les fouilles de Toulon (Besagne-Dutasta) ont fourni un lot très important d'amphores gauloises du Haut-Empire (73 M. Borreani, P. Lecacheur, Les fouilles de Toulon, dans Annales de la Soc. des Se. Nat. et

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d'Archéologie de Toulon et du Var, 38, 1986, p. 89-114). Neuf timbres de Murviel-les-Montpellier viennent d'être publiés (74 D. Rouquette, J.-C. Richard, P. Soyris, Marques d'amphores de Murviel-les-Montpellier (Hérault) dans Archéologie en Languedoc, 1989, 1, p. 3-4). Des difficultés sur l'identification du contenu des amphores sont enfin signalés par B. Liou 75 : Le contenu des amphores, typologie et épigraphie : quelques cas aberrants ou embarrassants, dans Société Française pour l'Etude de la Céramique en Gaule, Actes du Colloque d'Orange, Marseille, 1988, p. 171-176.

- Vers le limes germanique

Les amphores romaines du Bade- Wurtemberg apportent une documentation épigraphique riche pour les amphores à huile de Bétique, une nouvelle indication de transport de thon dans une Pélichet 46, et un timbre inédit sur Gauloise 4 (76 J. Remesal- Rodríguez, E. Schallmayer, Rômische amphoren aus Baden- Wtirttemberg, dans Fundberichte aus Baden-Wurttemberg, 13, 1988, p. 395-432). La masse prédominante des amphores à huile sur le limes transparaît à travers la confrontation de divers comptages que l'on souhaite voir se multiplier et s'affiner encore pour mener plus loin l'analyse des afflux de denrées vers cette zone stratégique (77 J. Rodriguez, Die Organisation des Nahrungsmittelimportes am Limes, dans Studien den militàrgrenzen Roms II, 13. International Limeskongress, Aalen, 1983, Forschungen und Berichte zur vor-und Fruhgeschichte in Baden-Wurttemberg 20, 1986, p. 760-767). A partir d'un matériel de la région du limes, J.H. van der Werff (78, Secundaire merken op Romeinse amforen, dans Rijksdienst voor het Oudheidkundig Bodemonderzoek, 37, 1988, p. 222-233) propose une interprétation de graffites de chiffres sur les Dressel 20 et Gauloise 4. Un tableau rapide, encore très ponctuel amorce l'étude de la circulation sur l'axe Rhône-Rhin (79 A. Desbat, S. Martin- Kilcher, Les amphores sur l'axe Rhône-Rhin à l'époque d'Auguste, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 339- 365).

- Autour de la Méditerranée

Prospection d'ateliers d'amphores en Tunisie, 80 D.P.S. Peacock, F. Bejaoui, N. Belazreg, Roman Amphora Production in the Sahel Region of Tunisia, dans Amphores romaines et histoire économique,

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Rome, 1989, p. 179-222 ; un point sur les amphores romaines de Dalmatie : 81 N. Cambi, Anfore romane in Dalmazia, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 311-337; un autre sur celles de Pannonie 82 J. Bezeczky, A borostyánkóút amphoraleletei, dans Kulonlenyomat az Archaeologiai Értesitô, 112-113, Budapest, 1987-1988, p. 156-182. Une étude sur les échanges : en Méditerranée orientale, 83 E. Lyding Will, Relazioni mutue tra le anfore romane. I ritrovamenti in Oriente alla luce dei dati ottenuti nell'Occidente, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, p. 297-309 ; un bilan impressionnant sur les régions de productions d'amphores impériales : 84 J.-Y. Empereur, M. Picon, Les régions de production d'amphores impériales en Méditerranée orientale, dans Amphores romaines et histoire économique, Rome, 1989, 223-248.

Amphores tardives

Saluons avec intérêt l'éclosion de publications sur les amphores de l'Antiquité tardive et de la période byzantine provoquées par la tenue du colloque 85 Recherches sur la Céramique byzantine, Athènes, 8-10 avril 1987, qui vient d'être publié dans le XVIIIe supplément au Bulletin de Correspondance Hellénique, 1989, 330 p. D'une présentation soignée, le livre comprend 28 contributions ; il s'achève comme à l'accoutumée dans cette collection, par les fiches- résumés des articles en deux langues, toujours fort utiles. Par céramique byzantine, on entend les céramiques à glaçure plombifère, mais aussi les céramiques grossières et les amphores « lorsqu'elles ne paraissent plus pouvoir être assimilées à celles de l'Antiquité tardive » : nuance souvent délicate, et parfois invisible lorsqu'il y a continuité. Aussi n'a-t-on pas hésité à rassembler des recherches sur les amphores dites ici simplement « orientales » du Ve au VIIeme s., ou ailleurs « probobyzantine ». La nouveauté du sujet apporte une grande richesse d'informations. On est surpris de l'importance que prennent les amphores : 13 contributions sur 28 sont concernées. On peut dire que le boom des amphores gagne l'Antiquité tardive et la période byzantine, ce qui étend encore le champ de la réflexion.

Fanette LAUBENHEIMER