des traces et des hommes

7
Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009 9 Actualités scientifiques Présentation et problématique M is en œuvre en 2007, le Programme collectif de recherche «Des traces et des Hommes » regroupe une quinzaine de chercheurs d’horizons variés (CNRS, université, ministère de la Culture, INRAP, secteur privé) aux spécialités diverses (tech- nologie lithique, archéozoologie, tracéologie) et rattachés à différents laboratoires. L’objectif principal de ce PCR est d’identifier les différents facteurs à l’origine de la diversité des industries du Paléolithique moyen. Il s’inscrit dans une dynamique géné- rale perceptible au sein de la communauté scientifique qui tend vers une meilleure compréhension de la signification des différents faciès moustériens. Le Paléolithique moyen en Europe occidentale est composé d’une mosaïque d’in- dustries lithiques, aux caractéristiques techno-économiques parfois fort différentes. Cette diversité perçue dès 1872 (de Mortillet 1872) a été catégorisée en différents faciès par F. Bordes et ses contemporains en fonction du type d’outil retouché dominant et de la présence ou non d’un débitage Levallois (Blanc 1937 ; Bordes 1948, 1953, 1981 ; Bordes & Bourgon 1951; Taschini 1979). Depuis une vingtaine d’années, cette classifi- cation est apparue réductrice car elle ne permet pas d’appréhender les comportements techno-économiques et les choix techniques des Néandertaliens. Différentes hypo- thèses ont néanmoins été proposées pour expliquer l’existence d’une telle variabilité. Elle a été interprétée comme le reflet de groupes culturels (Bordes 1961) ou comme celui de manifestations socio-économiques des groupes néandertaliens ; les différents types d’outils correspondraient ainsi à une activité spécifique (Binford 1973). Pour P. Mellars, les ensembles typologiques représentent les différentes phases d’une évolu- tion chronologique (Mellars 1969) et, selon N. Rolland, ils seraient en relation directe avec l’environnement, le climat et le type d’occupation (Rolland 1990, 2001). Ces différentes hypothèses ont été discutées, parfois remises en question, sans qu’aucune d’entre elles ait été retenue. L’un des obstacles majeurs à une meilleure compréhension des ensembles technologiques tient au fait qu’aucune étude récente, qui engloberait les aspects technologiques, le contexte économique et les données fonctionnelles des industries rattachées aux différents faciès, n’a été réalisée. Dans le cadre de ce PCR, nous proposons de documenter les modalités d’acquisition et de traitement des matières végétales et des carcasses animales par les Néandertaliens à travers l’étude des traces présentes sur l’outillage lithique et les restes fauniques. En effet, si l’on considère que la production d’un groupe humain est en partie liée à des objectifs fonctionnels, il semble alors cohérent de s’interroger sur les modes Des traces et des hommes Projet interdisciplinaire pour interpréter les comportements techno-économiques des Néandertaliens Céline Thiébaut, Émilie Claud, Sandrine Costamagno, Aude Coudenneau, Marie-Pierre Coumont, Marianne Deschamps, Magali Gerbe, Jean-Baptiste Mallye, Vincent Mourre, Guillaume Asselin, Cédric Beauval, Michel Brenet, Maria Gema Chacón, Serge Maury, Benoît Paravel, Noëlle Provenzano, Marie-Cécile Soulier* * Sur les auteurs, voir p. 4.

Upload: univ-tlse2

Post on 18-Nov-2023

1 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009 �9

Actual i tésscientifiques

Présentation et problématique

Misenœuvre en2007, leProgrammecollectif de recherche «Des traces etdesHommes» regroupe une quinzaine de chercheurs d’horizons variés (cnrS,

université,ministèredelaCulture,inraP,secteurprivé)auxspécialitésdiverses(tech-nologielithique,archéozoologie,tracéologie)etrattachésàdifférentslaboratoires.

L’objectifprincipaldecePcrestd’identifierlesdifférentsfacteursàl’originedeladiversitédesindustriesduPaléolithiquemoyen.Ils’inscritdansunedynamiquegéné-raleperceptibleauseindelacommunautéscientifiquequitendversunemeilleurecompréhensiondelasignificationdesdifférentsfacièsmoustériens.

LePaléolithiquemoyenenEuropeoccidentaleestcomposéd’unemosaïqued’in-dustries lithiques, auxcaractéristiques techno-économiquesparfois fortdifférentes.Cettediversitéperçuedès1872(deMortillet1872)aétécatégoriséeendifférentsfacièsparF.Bordesetsescontemporainsenfonctiondutyped’outilretouchédominantetdelaprésenceounond’undébitageLevallois(Blanc1937;Bordes1948,1953,1981;Bordes&Bourgon1951;Taschini1979).Depuisunevingtained’années,cetteclassifi-cationestapparueréductricecarellenepermetpasd’appréhenderlescomportementstechno-économiques et les choix techniques desNéandertaliens. Différentes hypo-thèsesontnéanmoinsétéproposéespourexpliquerl’existenced’unetellevariabilité.Elleaétéinterprétéecommelerefletdegroupesculturels(Bordes1961)oucommeceluidemanifestationssocio-économiquesdesgroupesnéandertaliens;lesdifférentstypesd’outils correspondraientainsi àuneactivité spécifique (Binford1973).PourP.Mellars,lesensemblestypologiquesreprésententlesdifférentesphasesd’uneévolu-tionchronologique(Mellars1969)et,selonN.Rolland,ilsseraientenrelationdirecteavecl’environnement,leclimatetletyped’occupation(Rolland1990,2001).

Ces différentes hypothèses ont été discutées, parfois remises en question, sansqu’aucuned’entre elles ait été retenue.L’undesobstaclesmajeursàunemeilleurecompréhensiondesensemblestechnologiquestientaufaitqu’aucuneétuderécente,qui engloberait les aspects technologiques, le contexte économique et les donnéesfonctionnellesdesindustriesrattachéesauxdifférentsfaciès,n’aétéréalisée.

DanslecadredecePcr,nousproposonsdedocumenterlesmodalitésd’acquisitionetdetraitementdesmatièresvégétalesetdescarcassesanimalesparlesNéandertaliensà travers l’étudedes tracesprésentessur l’outillage lithiqueet les restes fauniques.Eneffet,si l’onconsidèreque laproductiond’ungroupehumainestenpartie liéeàdesobjectifs fonctionnels, il semble alors cohérentde s’interroger sur lesmodes

Des traces et des hommesProjet interdisciplinaire pour interpréter les comportements

techno-économiques des Néandertaliens

Céline Thiébaut, Émilie Claud, Sandrine Costamagno, Aude Coudenneau, Marie-Pierre Coumont, Marianne Deschamps, Magali Gerbe, Jean-Baptiste Mallye,

Vincent Mourre, Guillaume Asselin, Cédric Beauval, Michel Brenet, Maria Gema Chacón, Serge Maury, Benoît Paravel, Noëlle Provenzano, Marie-Cécile Soulier*

* Sur les auteurs, voir p. 4.

nathalie vaillant
tampon 3

Actual i tés s c i e n t i f i q u e s

�0 Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009

d’utilisation des différents types d’outils afin d’identifier lescontraintesfonctionnellespesantsurleurproduction.

Nousavonsainsiorientéunepartiedenosrecherchesversl’identificationdelafonctionetdumodedefonctionnementprécis de différents types d’outils caractérisant parfois unfacièsetdontlestatutfonctionnelrestaitvague.

Lesbifacessontainsisouventprésentéscommedesoutilsmultifonctionnels.Toutefois, lesétudestracéologiques,relati-vementrares,ontengénéralétéréaliséessurdefaibleséchan-tillons. Ilétaitdoncnécessairede testercettehypothèseà lalumièredenouvellesdonnéestechno-fonctionnelles(thème1,responsableÉ.Claud).De lamêmemanière, les pièces enco-chéesduPaléolithiquemoyen,souventassociéesautravaildubois, n’ont pas fait l’objet d’expérimentations systématiquesetlesétudesfonctionnellesconcernentaussideséchantillonsnumériquementfaibles.MieuxcomprendrelasignificationdesdenticulésmoustériensviseàmieuxappréhenderlaplaceduMoustérienàdenticulésdanslePaléolithiquemoyen(thème2,responsableC.Thiébaut).Àderaresexceptionsprès,leshache-reauxmoustériens,caractérisantleVasconien,nesontconnusque dans la région franco-cantabrique. Si l’on peuta priori mettreenrelationl’importanterésistancedutranchantactifdeshachereauxavec lapratiqued’activitésenpercussionlancée,aucune expérimentation n’a jusqu’à présent été menée pourconfirmer cette hypothèse fonctionnelle et très peu d’étudestracéologiquesontétéeffectuées.Noussouhaitonsdonccontri-bueràdocumenterlesmodalitésd’utilisationdecesoutils,pourin finemieuxévaluer lapartculturellequiaéventuellementinfluencé la réalisationde ce typed’objet (thème10, respon-sable M.Deschamps). Enfin, un autre objectif est de mieuxcerner la fonction des pointes du Paléolithique moyen, leurdiversitémorphologiqueettechnologiquepouvantrefléterunediversité fonctionnelle. Se pose en effet la question de leurusagecommearmedechasse,etplusgénéralementcelledesstratégiesd’acquisitiondesmatièresanimalesauPaléolithiquemoyen(thème3,responsableA.Coudenneau).

Un autre volet, plus transversal, concerne la recherched’éventuels liens entre la fonction des outils et la naturede lamatièrepremièredans laquelle ils ont été réalisés.AuPaléolithique moyen, l’utilisation de matériaux «réputésmédiocres», tels lesquartzet lesquartzites, est relativementfréquente. Si les quartz et quartzitesont longtemps été délaissés par leslithiciens lors de l’analyse des sériesarchéologiques,lesétudestechnologi-quesintègrentdésormaisassezsysté-matiquementcesmatériaux.Certainesontmontréquelesméthodesdedébi-tagemisesenœuvreétaientadaptéesaux matériaux utilisés et condui-saient à la production de supportsaux caractéristiques morphologiquesdiversifiées (Jaubert&Mourre1996;Thiébaut,Mourre&Turq2009).Selonune idée largement répandue, quartzet quartzite seraient des matériauxde substitution utilisés en l’absence

de silex. Mais, jusqu’à présent, les analyses tracéologiquessontleplussouventrestéescantonnéesauxsupportsensilex.Afindetesterlavaliditédecettehypothèseetd’évaluerdansquellemesureletypedesupportréaliséestliéàunefonctionparticulière, l’élaborationderéférentielsexpérimentauxet ledéveloppement d’analyses tracéologiques sur ces matériauxsontentrepris(thème4,responsableV.Mourre).

Toujours en rapport avec les comportements desNéandertaliensetlagestiondeleursoutils,nousnoussommesaussiintéressésàlafonctiondesnucléusetdesbifacesportantdes traces d’impacts. L’existence de telles pièces a depuislongtemps été signalée par la communauté scientifique. Siplusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer l’ori-gine de ces stigmates, aucune expérimentation permettantdelesdiscutern’avait jusqu’àprésentétéeffectuée(thème8,responsablesC.Thiébaut,É.Claud).

Concernant plus spécifiquement les ressources animales,nous souhaitons contribuer à une meilleure caractérisationdesactivitésdeboucherie.Àproposdesanalysesdesstriesdedécoupeprésentessurlesossements,nousnoussommesfixésdeuxobjectifscomplémentaires:

– augmenter le corpus de données sur la localisation,l’organisation, l’orientation et la taille des stries en fonc-tiondesdifférentes activités deboucherie et confronternosrésultats à ceux déjà présentés dans la littérature (Binford1981; Bez 1995;Abe 2005);

– réaliser l’interface entre lithique et os en cherchant àcorréler la morphologie de la strie aux caractéristiques del’outilutilisé(matièrepremière,typedetranchant),pourchaqueétapedelaboucherie(thème5,responsableM.-P.Coumont).

Les expériences antérieures, relatives à l’extractionde lamoellecontenuedanslesossements,ontprincipalementviséàunemeilleurecaractérisationdestracesd’impact(voirnotam-ment Sadek-Kooros 1972; Capaldo & Blumenschine 1994).Danslecadredeceprogramme,noussouhaitonsdistinguer,àtraversl’analysedesstigmatesprésentssurlesos,lesgestesadaptésauxcontraintesphysiquesdesossementsdeceuxquise réfèrent à des traditions techniques (thème6, responsableM.Gerbe). Parallèlement, la rareté des portions spongieusesd’oslongsmiseenévidencedanscertainsassemblagesosseuxbienconservéssoulève laquestiond’unepossibleextraction

de la graisse contenue dans le tissuspongieux des os dès le Moustérien.L’immersion de fragments osseuxdans de l’eau portée à ébullition,qui permet de mobiliser la graissedes tissus osseux, est un procédélargement utilisé chez les chasseurs-cueilleurs sub-actuels (Vehik 1977;Saint-Germain 2005). Les expéri-mentations, qui débuteront dans lecourantdel’année2010,ontpourbutdemieuxcomprendrelesfacteursquipeuvent sous-tendre cette pratique,d’identifierdescritèresdiagnostiquessignant l’emploi de ce procédé surunsitearchéologiqueet,à terme,de

Fig. 1 – Gisements archéologiques dont l’étude est intégrée au pcr.

Les Rochers de Villeneuve

Saint-CésaireJonzac

Les PradellesFonseigner

La Chapelle-aux-SaintsLes FieuxLa Borde Payre

Coudoulous IMauran

Grotte du Noisetier

Abri Romani

Combe Brune 2Cantalouette 1

nathalie vaillant
tampon 3

 Céline Thiébaut et al. | Des traces et des hommes

Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009 �1

déterminer si les Néandertaliens utilisaient cette technique(thème7,responsableS.Costamagno).

Enfin, le dernier thème de recherche, faisant l’interfaceentre l’outillage lithique et les restes fauniques, concernela caractérisation et l’identification du fonctionnement desretouchoirsenos.DenombreuxsitesduPaléolithiquemoyenétudiésdanslecadredeceprogrammeontlivrédesfragmentsosseuxprésentantdesstigmatesdepercussionqu’ilesttentantd’identifier comme des retouchoirs. Plusieurs expérimenta-tionsontétéeffectuéesparlepassépourledémontreretdessimilitudes avec le registre archéologique avaient ainsi étémisesenavant.Nousavonsentreprisderechercherlescritèrespermettant de discuter du type de matière première percutéavec les retouchoirs etde l’étatde fraîcheurdecesderniers(thème9,responsablesJ.-B.Mallye,V.Mourre).

Pouratteindrel’ensembledesobjectifsfixés,laréalisationd’un référentiel expérimental aussi exhaustif que possible aété entreprise et a déjà en partie servi de base à l’étude dumatérielarchéologiquededifférentsgisements(fig.1).

Protocole expérimental et expérimentations

L’élaboration des protocoles expérimentaux et la pratiquedesactivitésontétémenéesdemanièrecollectiveselonuneapproche interdisciplinaire, en favorisant la restitution dedeuxchaînesopératoiresinterconnectées(fig.2):

– letraitementdescarcassesanimales(del’acquisitiondel’animalàl’extractiondelamoelleetl’utilisationd’oscommesupportd’outil);

– le travail du bois (depuis le tronçonnage jusqu’à lafabricationd’objets).

Parmilestroisthèmes(5,6et7)quireprennentlesétapesdel’exploitationdescarcassesanimales,lepremierconcernel’ensembledesactivitésdeboucherienécessairesauprélève-ment de la peau, de la viande et des tendons. Le deuxièmetraitedelafracturationdesoslongscommeméthoded’extrac-tiondelamoelleosseuse.Letroisièmereprendlesdifférentesmodalitésd’extractiondelagraisseanimalecontenuedanslespartiesspongieusesdesos.Toutescesétapessonteffectuées

scier un arbre abattre un arbre

utilisation sans préparationracler

structure en bois pour le travail de la peau

emmanchement utilisation en arme de jet ou d'hast

Exploitation de carcasses animales

prélèvement de la peau

séchage, raclage, peau

fabrication de ligatures

prélèvement des tendons et de la viande

récupération de la moelle, broyage des os

Exploitation de matières ligneuses

chasse

appointer

récupération de fragment de diaphyse pour retoucher

récupération de la graisse

Fig. 2 – Chaînes opératoires de traitement et d’acquisition des matières végétales et animales

nathalie vaillant
tampon 3

Actual i tés s c i e n t i f i q u e s

�2 Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009

àl’aided’outilslithiquesexpérimentauxquicorrespondentàceux rencontrés sur les gisements archéologiques que nousétudions(thèmes1à4,8et10).Pourl’utilisationdesmatièresdures animales, des fragments d’os ont servi comme retou-choirssurdessupportsensilexetenquartzite(thème9).

Lesmatièresvégétalesne se conservantquedansde trèsrares gisements, les modalités d’acquisition et de traitementde végétaux au Paléolithique moyen ne peuvent être abor-dées,pourlaquasi-totalitédesgisements,queparlebiaisdesanalysestracéologiquessurlesoutils.L’abriRomani(Catalogne,Espagne) avec ses négatifs et positifs de matières ligneuses(Carbonell & Castro-Curel 1992), le gisement de Lehringen(Allemagne) qui a livré un épieu en if (Movius 1950), celuide Schöningen (Allemagne) daté du Paléolithique inférieur(Thieme1997),fonteneffetfigured’exceptions.DanslecadredecePcr,l’acquisitionetletraitementdesmatièresvégétales

sont donc appréhendés par une approcheexpérimentaleetuneanalysetracéologiquedespiècesexpérimentalesetarchéologiquesenpierre(thèmes1à4,8et10).

Touteslesexpériencesontétéphotogra-phiées,chronométréesetcertainesfilmées.

La description soigneuse des actionseffectuées à l’aide de fiches élaborées encommunpermetderestituerlesgesteseffec-tuéslorsdesdifférentesactivitésetd’envi-sager la reproductibilité des résultats parl’ensembledelacommunautéscientifique.

Les tranchants des outils en pierreretouchésontétémoulésavantleurutili-sation afin de mieux identifier les tracesqu’ils produisent. Les pièces expérimen-tales lithiques et osseusesont été exami-néesàlaloupebinoculaire(grossissement×20). Ces observations ont permis dedécrire et de caractériser les stigmatesprésents sur chacun des outils utilisés etsurchaquecarcassetraitée(fig.3).

Les différentes expériences menéesdepuis2007 se sont concentrées sur l’ac-quisition et le traitement de différentesessencesdeboisetdedifférentesespècesanimalesainsiquesurl’utilisationdefrag-mentsosseuxcommeretouchoirs.

Le travail du boisDeux activités principales ont été pratiquées (tabl.1):l’acquisition de hampes en bois et la fabrication d’épieux.L’objectifétait,d’unepartdefabriquerdesstructuresenboispourtendrelapeaudesanimauxtraitéset,d’autrepart,d’obtenirdesépieuxoudeshampespouvantservircommearmes.Lestroncsetlesbranchesétaientdoncdefaiblesdiamètres(de2à8cmpourlestroncssciés,etde5à14cmpourlestroncsabattus). De la poudre de galles de chêne a également étéproduitepuisutiliséepourletannagedespeaux.

L’acquisition et le traitement de carcasses animalesLors des expérimentations, différentes espèces ont été traitées(tabl.2). Les peaux ont été travaillées pour servir de récipientsaubouillongrasoudelanièrespourdefuturesligatures.Afinde

Fig. 3 – Exemples de stigmates observés sur le matériel expérimental 1) stries observées à la loupe (× 10, en noir) et à la loupe binoculaire (× 20, en gris) sur la patte arrière gauche d’un cerf ; 2) stigmates observés à la loupe binoculaire (× 20) sur un retouchoir ; 3) traces observées sur un denticulé à la loupe binoculaire (× 20).

28 stries

Zone altérée

Enfoncementstriangulaireovalaires

plaquettes arrachées

Entaillesrectilignesconvexesinueuse

zone hachurée

1cm

1 2

3macrotraces

enlèvement antérieur à l’utilisationpour améliorer la préhension

Altérations

esq. quadrangulaireesq. semi-circulaireesq. demi-luneesq. trapézoïdalesq. triangulaire

émousséfracture

zone altérée par des esq.

2 cm

nathalie vaillant
tampon 3

 Céline Thiébaut et al. | Des traces et des hommes

Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009 ��

comparerlesstigmatesrésultantdelafracturationdesosdeceuxprovenantd’unepercussionsurduminéral,nousavonsaussidébitéetretouchédeséclatsavecdesnucléusetdesbifacesensilex.

L’exploitation de matières dures animalesCertainsfragmentsdiaphysairesobtenuslorsdelafracturationd’osont servi fraisoudégraisséspour la réalisationd’outilsretouchésensilexetenquartzite.

Principaux résultats

Enpremierlieu,nouspouvonssoulignerl’ampleurduréférentielcrééetdisponible.Àcejour,cesont74bifaces,65piècesenco-chées,70pointesmoustériennes,32pointesbrutes,36racloirs,28éclatsbrutsenquartzite,9éclatsbrutsensilex,12hachereauxenquartziteset74zonesdenucléus,de«choppers»oudebifacesqui ont été utilisés sur divers matériaux présentant des étatsde fraîcheur et des duretés différents. En ce qui concerne lesmatières animales, 7carcasses ont été traitées et conservées,90os ont été fracturés sans être utilisés après fracturation et73retouchoirsontétéobtenus.Enoutre,uneimportantedocu-mentationphotographiqueetvidéoestaussidisponible.

Lestravauxexpérimentauxontaussipermisdetesternoshypothèsesfonctionnellesennousconfrontantauxlimitesetcontraintesrelativesauxdifférentescatégoriesd’outilsdanslecadredeleurutilisationpourdiversesactions.

Lesprincipauxrésultatsobtenusàcejoursontlessuivants:

thème 1 — Le référentiel expérimental de traces d’utilisa-tionapermisdemettreenévidencelecaractèrediagnostiquedesmacrotraces et de proposer des clés de lecture adaptéesauxbifaces.Cesrésultatssontdéveloppésauseind’unarticledanscevolume(Claudet al.p.55-60).L’applicationdecesclésdelectureàplusieurssériesarchéologiquesduSud-OuestdelaFranceattribuéesauMoustériende traditionacheuléenne(mta)remetenquestionl’idéeselonlaquellelesbifacessontmultifonctionnels (Claud 2008). En effet, la majorité desbifaces mta «classiques», c’est-à-dire à bords convergents,ontétéutiliséspourcouperdesmatièrescarnées.Deplus,lesmodesdefonctionnementidentifiéssontconditionnésparlaforme des bifaces (à bords convergents versus à tranchantdistaltransversal)etparleurétatderéduction.

thème 2 — Nous avons mis en évidence que les piècesencochées ne réagissaient pas de la même manière que leséclats bruts ou les racloirs à des activités identiques et desmatières travaillées similaires. Les stigmates présents sur lematérielexpérimentalcomportentdescaractèresdistinctsenfonctiondeladuretédelamatièretravaillée,deladuréedutravailetdel’actioneffectuée.Enfin,lespremièrescomparai-sonsaveclematérielarchéologiquedeMauran(Farizy,David& Jaubert 1994)mettent en évidence l’utilisationdesdenti-culésensilex,principalementlorsd’activitésenrelationavecle traitement de matières animales. Ces premières analysestendentdoncàinfirmerlarelationgénéralementétablieentrepiècesencochéesettravaildubois.

tabl. 1 – actions eFFectuÉes sur des matières vÉgÉtales

Actions État de fraîcheur Espèces Outils

Abattre frais sur pied peuplier, merisier, érable champêtre, frêne bifaces en silex, hachereaux en quartzite

Scier frais et sec peuplier et chêne denticulés, encoches, éclats bruts, bifaces en silex

Racler frais et sec peuplier et chêne bifaces, pointes retouchées, denticulés et encoches en silex, éclats bruts en quartzite

Percer frais peuplier pointes retouchées, bifaces en silex

Écraser sec galles de chêne nucléus et choppers en silex

tabl. 2 – actions eFFectuÉes sur des carcasses animales

Actions État de fraîcheur Espèces Outils

Tir frais brebis pointes Levallois et moustériennes, bifaces en silex

Hast frais cerf pointes Levallois et moustériennes en silex

Dépouiller frais brebis, cerf, sanglier bifaces, pointes moustériennes, pointes pseudo, en silex

denticulés en silex et quartzite, hachereaux en quartzite

Désarticuler frais brebis, cerf, sanglier bifaces, pointes moustériennes, pointes pseudo, en silex

denticulés en silex et quartzite, hachereaux en quartzite

Prélever frais brebis, cerf, sanglier (viande) bifaces, pointes moustériennes, pointes pseudo, en silex, denticulés en silex et quartzite, hachereaux en quartzite

brebis, cerf (tendons) denticulés en silex et quartzite,

Découper frais cerf (viande) denticulés en silex

Fracturer frais/congelés bœuf (os longs) galets en grès, chopper, nucléus en silex

frais cheval (os longs et mandibule) galets en grès

Écraser frais bœuf, cheval (fgt. diaphyses) chopper, nucléus en silex

Écharner fraîches brebis, cerf (peau) bifaces, pointes moustériennes en silex

Racler fraîches/cendrées/sèches brebis, cerf (peau) bifaces, pointes moustériennes en silex

Découper des lanières sèches/tannées brebis, cerf (peau) bifaces, denticulés, pointes en silex

Assouplir des lanières sèches bœuf, cerf (peau) encoches en silex

nathalie vaillant
tampon 3

Actual i tés s c i e n t i f i q u e s

�� Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009

thème 3 — L’analyse des pointes expérimentales a permis dedéfinirlesfracturesassociéesauxactivitésdechassemaiségale-mentlestraces(macro-etmicroscopiques)résultantdesautresacti-vitéseffectuées.LeurcomparaisonaveclematérielarchéologiquedugisementdePayreamontréqu’iln’yapasd’élémentspermettantdeconclureàl’emploidespointescommearmatures.Leurutilisa-tions’inscritenfaitdansunlargeéventaild’activitésconditionnéenpartieparlescaractèresmorpho-techniquesdespièces.

thème 4 — L’utilisation systématique de matériaux variés(silex,quartz,quartzite) lorsdes expériences conduitesdanslesdifférentsthèmesapermislacréationd’unimportantréfé-rentielquicontribuera,àterme,àunemeilleurecompréhen-siondustatutfonctionneldesmatériauxréputésmédiocres.

Thème 5 — Lerelevédesstriesdedécharnement,comparéàceluid’autresréférentielstrèsusités(Binford1981),permetd’oresetdéjàdemontrerquel’attributiond’unestrieàuneactionspéci-fique(décharnementoudésarticulation)àpartirdesonorienta-tionetdesalocalisationestdifficilementréalisable.Ainsi,unepartiedesstriesliéesaudécharnementpossèdentdescaractéris-tiques (localisationetorientation)prochesdecelles identifiéesparL.Binfordcommerésultantdel’étapededésarticulation.Ils’agitd’unrésultatimportantcarilremetencausenotrecapacitéàpouvoircernercertainesdesactivitésdeboucherie.

thème 6 — L’étude du matériel expérimental montre unefragmentation plus importante des os congelés par rapportaux frais. La fracturation de mandibules de chevaux adémontré que la percussion entraîne un morcellementtransversal des jugales. Seules les dents semblent être unmarqueurfiabledecettefracturationcarlamandibuleportepeu de traces de percussions, et les rares points d’impactprésentsseraientvouésàdisparaîtreaucoursdelafossilisa-tion.Enfin,lalocalisationdespointsd’impactssurlesosse-mentsfracturésexpérimentalementetlesossementsissusdescollectionsarchéologiquesaétéentreprise.Ilapparaîtquelaméthode employée expérimentalement (percussion directe)entraînelasélectiondezonespréférentiellespourlapercus-sion, liéesauxcontraintesanatomiquesdesossements.

thème 8 — Grâceàlaconduitedenombreusesexpériences(fracturationd’os,concassagedematièrevégétaleetanimale,débitage et retouche), nous avons caractérisé les différentsstigmatesrésultantdel’utilisationdebifaces,de«choppers»et de nucléus en percussion sur différentesmatières etmisenévidencel’existencedecritèresdiagnostiquesenfonctiondelamatièrepercutéeetdel’intensitédel’utilisation.Nousavons aussi démontré que les nucléus et bifaces provenantdes sites archéologiques étudiés et présentant des tracesd’impactsavaientétéutilisésenpercussionsurunmatériauminéral. Ces traces sont compatibles, par leur morphologieet leur distribution, avec une utilisation comme percuteursdetaille (débitageetretouche).

thème 9 — L’analyse des retouchoirs expérimentaux apermis de décrire des enfoncements et des entailles dont lamorphologiecaractériselamatièrepremièreretouchéeetdansunemoindremesure,l’étatdefraîcheurdesosutilisés.

Thème 10 — Lesexpériencesontdébutéen2009etleurpour-suitepermettralacréationd’unréférentielsanséquivalentetpour-tantindispensableàl’analysedeshachereauxarchéologiques.

Si la plupart des expériences réalisées dans le cadre de ceProgramme collectif de recherche ne sont pas fondamenta-lementnouvelles,ellesacquièrentuncaractèrenovateurparlecadredanslequelelless’inscrivent:d’unepart,untravaild’équipe pluridisciplinaire qui mutualise les compétences etles moyens, d’autre part un enregistrement systématique etrigoureuxdesexpériencesdontlesrésultatsserontrapidementaccessiblesàl’ensembledelacommunautéscientifique,grâceàdiversespublicationsetunsiteWebdontlamiseenligneest prévue pour l’hiver2010. De plus, les premiers résultatsobtenuslaissentdéjàpoindredenouvellesinterrogations:parexemple,l’utilisationdebifacesoudedenticulésenboucherierelève-t-elledechoixtechniquesappropriésàcertainesphasesdu traitement d’une carcasse ou de réelles traditions tech-niquespropresàdesentitésculturelles?

Remerciements

Ce PCr bénéficie ou a bénéficié de financements provenant du ministère de la Culture et de la Communication (service régional de l’archéologie de Midi-Pyrénées), du conseil général de Dordogne (service de l’archéologie de Dordogne), de la Maison méditer-ranéenne des sciences de l’homme d’Aix-en-Provence ainsi que des laboratoires traCes et PaCea. Nous les remercions donc pour leur aide financière indispensable au bon déroulement des séances expérimentales. Messieurs Hugues Plisson et Loïc Daulny y ont collaboré lors des expérimentations et de l’analyse d’une partie du matériel, nous les remercions pour leur participation. Enfin, les documents vidéo ont été réalisés par Nicolas Thiébaut et Aurélien Royer que nous tenons à remercier très sincèrement.

BibliographieABe, Y. 2005. Hunting and Butchery Patterns of the Evenki in Northern

Transbaikalia, Russia. PHD, Stony Brook University, New-York.Bez, J. F. 1995. « Une expérience de découpe bouchère pratiquée au

silex », Préhistoire Anthropologie méditerranéennes, 4 : 41-50.BinFord, L. R. 1973. « Interassemblage variability - the Mousterian and

the “functional” argument », in : C. renFrew (éd.), The Explanation of Culture Change. Models in Prehistory. Londres, Duckworth : 227-254.

BinFord, L. R. 1981. Bones. Ancient Men and Modern Myths. New York, Academic Press.

BlAnc, A.-C. 1937. « Nuovi giacomenti paleolitici del Lazio e della Toscana », Studi Etruchi, 11 : 273-304.

Bordes, F. 1948. « Les couches moustériennes du gisement du Moustier (Dordogne). Typologie et technique de taille », Bulletin de la Société préhistorique française, 45 : 113-126.

Bordes, F. 1953. « Essai de classification des industries “moustériennes” », Bulletin de la Société préhistorique française, 50, 7-8 : 457-466.

Bordes, F. 1961. « Mousterian cultures in France. Artifacts from recent excavations dispel some popular misconceptions about Neanderthal man », Science, 134, 3482 : 803-810.

Bordes, F. 1981. « Vingt-cinq ans après : le complexe moustérien revi-sité », Bulletin de la Société préhistorique française, t. 78, 3 : 77-87.

Bordes, F. & M. Bourgon. 1951. « Le complexe moustérien : Moustérien, Levalloisien et Tayacien », Anthropologie, 55 : 1-2.

CApAldo, S. D. & R. J. Blumenschine. 1994. « A quantitative diagnosis of notches made by hammerstone percussion and carnivore gnawing on bovid long bones », American Antiquity, 59 : 724-747.

CArBonell, E. & Z. cAstro-curel. 1992. « Palaeolithic wooden artefacts from the abric Romani (Capellades, Barcelona, Spain) », Journal of Archaeological Science, 19 : 707-719.

nathalie vaillant
tampon 3

Les Nouvelles de l’archéologie n° 118 – Décembre 2009 ��

ClAud, E. 2008. Le statut fonctionnel des bifaces au Paléolithique moyen récent dans le Sud-Ouest de la France. Étude tracéologique intégrée des outillages des sites de La Graulet, La Conne de Bergerac, Combe Brune 2, Fonseigner et Chez-Pinaud / Jonzac. Thèse de doctorat, université de Bordeaux-1.

FArizy, c., F. dAvid & J. JAuBert (dir.). 1994. Hommes et bisons du Paléolithique moyen à Mauran (Haute-garonne). Paris, CNRS Éditions (XXXe supplément à Gallia Préhistoire).

JAuBert, J. & V. mourre. 1996. « Coudoulous, Le Rescoundudou, Mauran : diversité des matières premières et variabilité des schémas de production d’éclats », in : A. Bietti & S. grimAldi (éd.), Proceedings of the International Round Table. Reduction processes (“chaînes opératoires”) for the European Mousterian. Rome, Istituto Italiano di Paleontologia Umana (Quaternaria Nova ; 6) : 313-341.

MellArs, P. 1969. « The chronology of Mousterian industries in the Perigord region of South-West France », Proceeding of the Prehistoric Society, 35 : 134- 171.

Mortillet, G. de. 1872. « Classification de l’âge de la pierre », in : Matériaux pour l’histoire primitive et naturelle de l’Homme, 2e série, t. III : 464-465.

Movius, H. L. 1950. « A wooden spear of Third Interglacial Age from Lower Saxony », Southwestern Journal of Anthropology, 6, 2 : 139-142.

RollAnd, N. 1990. « Variabilité du Paléolithique moyen : nouveaux aspects », Mémoires du Musée de préhistoire d’Île-de-France, 3 : 69-76.

RollAnd, N. 2001. « Determinants of middle paleolithic settlement organi-sation : a review of evidence, based on the record from Western Europe », in : N. J. conArd (éd.), Settlement dynamics of the Middle Paleolithic and the Middle Stone Age. Tübingen, Kerns : 545-571.

sAdek-kooros, H. 1972. « Primitive bone fracturing : a method of research », American Antiquity, 37 : 369-382.

sAint-germAin, C. 2005. « Animal fat in the cultural world of the Native Peoples of Northeastern America », in : J. mulville & A. K. outrAm (éd.), The Zooarchaeology of Fats, Oils, Milk and Dairying. Proceedings of the International Council of Archaeozoology (icaz), Durham, August 2002. Oxford, Oxbow Books : 107-113.

tAschini, M. 1979. « L’industrie lithique de Grotta Guattari au mont Circé (Latium) », Quaternaria, XXI : 179-247.

thiéBAut, c., v. mourre & A. turq. 2009. « Diversité des matériaux et diver-sité des schémas de production au sein de l’industrie moustérienne de la couche K des Fieux (Miers, Lot) », Bulletin de la Société préhis-torique française, 106, 2 : 239-256.

thieme, H. 1997. « Lower Palaeolithic hunting spears from Schöningen, Germany », Nature, 358 : 807-810.

Vehik, S. C. 1977. « Bone fragments and bone grease manufacture : a review of their archaeological use and potential », Plains Anthropologist, 22 : 169-182.

Problématique et objectifs

L’expérimentationconstituel’unedesbasesméthodologiquesdesétudesfonction-nellesoutracéologiques,puisqu’ellepermetd’établirdesréférentielsdetracesdont

l’origineestréputéesusceptibledepouvoirêtrecomparéeaveclesstigmatesprésentssurlematérielarchéologique(Semenov1964;Plisson1991).Nousprésentonsiciuncatalogueexpérimentaldetracesmacroscopiquesd’utilisationsurdesbifacesensilex.

Plusieurs raisons nous conduisent à concentrer notre attention sur l’échellemacroscopique,accessibleparunexamenàlaloupebinoculaire.Premièrement,ilestacquisque lesmacrotraces (Lemorini2000), tels les esquillements et les émoussés,peuventrenseignersurlesmodesdefonctionnementdesoutils,notammentlithiques(Tringham et al.1974;Odell&Odell-Vereecken1980),etêtreutiliséesseulesouencomplémentdesmicro-traces (polis, stries,micro-émoussés).Cesdernièrespeuventeneffetindiquerladuretérelativedelamatièretravailléeetlemouvementeffectué(moded’action).Deuxièmement, lesmacrotraces sontengénéralmieuxconservéesque les microtraces: leur interprétation est donc fondamentale, notamment pourl’étude des industries anciennes, qui sont souvent intensément touchées par desaltérationsd’originenaturelle(Beyries1990).Enfin,s’ilaétémisenévidencequelescaractéristiquesdesesquillementsvarient fortementen fonctionde lamorphologiedutranchant(Tringham et al.1974),lesvariationsliéesàceparamètreontpeuétédocumentées et illustrées. L’effet de la présence de retouches sur la formation desesquillements n’a, par exemple, pas fait l’objet de recherches systématiques et lesréférentielspubliésconcernentsurtoutlestranchantsbruts.

Étude expérimentale des macrotraces d’utilisation sur les tranchants des bifaces

Caractérisation et potentiel diagnostique

Émilie Claud, Michel Brenet, Serge Maury & Vincent Mourre*

* Sur les auteurs, voir p. 4.

nathalie vaillant
tampon 3