empire khmer

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Empire khmer Empire khmer Royaume de Kambuja អអអអអអអអអអអអអ (km) 802 – 1177 1181 – 1431/1863 L'empire à la fin du xiie siècle Informations generals Capita le Hariharalaya, Angkor, puisLovek Religi on Hindouisme, bouddhisme mahāyāna et theravāda Histoire et événements 802 Fondation 950 Victoire contre

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Chenla (802)

Champā (1181)

Entités suivantes :

Champā (1177)

Sukhothaï (1238)

Ayutthaya (1431)

L'Empire khmer était une des puissances dominantes dela péninsule indochinoise du ixe au  xiiie  siècles.

L'Empire, qui succéda au royaume de Chenla, contrôlait selon lespériodes des régions faisant aujourd’hui partiedes Étatsdu Cambodge, du Laos, de la Thaïlande, du Viêt Nam etmême de la Birmanie et de la Malaisie 1 .

Son principal héritage est situé à Angkor, le site où se trouvaitla capitale à l’apogée du pays. Cet endroit témoigne de lapuissance et de la richesse de l'Empire, ainsi que de ladiversité des croyances auxquelles il a été soumis au cours dutemps. Les religions officielles furent successivementl'hindouisme, le bouddhisme mahāyāna et enfin le bouddhismetheravāda 2 .

L’histoire d’Angkor en tant que centre du royaume historique deKambujadesa du ixe au xiiie siècles, est indissociable de celledes Khmers 3 .

La civilisation khmère avait une forte influenceculturelle indienne. Le bouddhisme s’est progressivement imposé àcôté de l’adoration de Shiva et d’autres divinitéshindouistes tout en cohabitant avec le culte du Dieu roi. Durantcette période, beaucoup d’Indiens, lettrés, artisteset brahmanes furent invités à la cour d’Angkor et la

littérature sanscrite, soutenue par la royauté, y étaitflorissante4.

De la période angkorienne, aucun enregistrement écrit n’estparvenu jusqu’à nous, si ce n’est les inscriptions lapidaires. Dece fait, la connaissance sur la civilisation khmère historique selimite à l’épigraphie sur les supports suivants :

Les fouilles et recherches archéologiques

Les épitaphes sur les monuments qui décrivent de manièredithyrambique les exploits politiques et religieux des rois

Les bas-reliefs sur les murs de certains temples qui dépeignentdes campagnes militaires, la vie au palais, sur les marchés etdes scènes de la vie quotidienne de la population

Les récits et chroniques de diplomates chinois, de missionnaires,de marchands et de voyageurs étrangers5.

Sommaire1 Histoire

1.1 La fondation

1.2 Yasodharapura – la première Cité d’Angkor

1.3 Suryavarman II et Angkor Vat

1.4 Jayavarman VII et Angkor Thom

1.5 Les derniers éclats

1.6 Déclin et chute d’Angkor

2 Découverte en Occident et recherches archéologiques

3 Architecture

4 Articles connexes

5 Sources et références

Histoire

Article connexe : Chronologie de l'Empire khmer.

La fondation

À ce jour, les plus anciennes traces des origines de l’empire ontété découvertes sur le site du temple de Sdok Kok Thom, dansla province thaïlandaise de Sa Kaeo. Une stèle, datée de 1053,énonce la chronologie des anciens souverains khmers, depuisl'accession au trône de Jayavarman II en 802 de notre ère,jusqu'à Udayādityavarman II (1050 – 1066)6.

C'est Jayavarman II qui au ixe siècle, introduisit le culte dudieu-roi (Devaraja) dans le brahmanisme. Désormais, le roi est lareprésentation de Shiva, un des dieux de la trinité brahmaniste(Brahma, Vishnu, Shiva). Le souverain doit être adoré comme unedivinité, avec des rites formels. Shiva et le dieu roi partagentd’ailleurs le même symbole religieux, le lingam phallique7.

Le Bakong, temple d'état d'Indravarman Ier érigé sur le sitedeHariharalaya.

D’après une ancienne interprétation, Jayavarman II aurait été unancien prince qui vécut à la cour de Sailendra à Java (dansl'actuelle Indonésie) et en aurait rapporté l’art et la culturelors de son retour au Cambodge8. Des recherches plus récentesconduites notamment par Claude Jacques9 et MichaelVickery10 remettent toutefois en cause cette théorie. Alors que

l’influence javanaise se faisait déjà sentir sur la majeurepartie de la péninsule, la carrière politique de Jayavarmanaurait débuté à Vyadhapura, probablement Banteay Prey Nokor, prèsde l’actuelle ville cambodgienne de Kampong Cham ce qui luiaurait assuré des contacts de longues dates (même si lesinscriptions ont montré que ces relations étaient houleuses) avecles voisins Chams plutôt qu’un long séjour dans la lointaineJava11. Finalement beaucoup de vieux temples du Phnom Kulen sontde style cham (tel Prasat Damrei Krap) ou javanais (comme PrasatThmar Dap), même si leur disposition asymétrique est typiquementkhmère12.

Après son éventuel retour au Chenla, il gagna rapidement del’influence par la conquête de plusieurs états voisins et,en 790, prit la tête d’un royaume que les Khmers appelaient« Kambuja ». Dans les années qui suivirent, il étendit encore sonterritoire et établit une nouvelle capitale à Hariharalaya, prèsde l’actuelle commune cambodgienne de Roluos. En 802 ils’autoproclama chakravartin (« roi des rois ») dans un ritueld’inspiration hindouiste 13 . Il ne devint ainsi pas seulement unsouverain incontesté de droit divin, mais il marquait aussil’indépendance de son royaume. Jayavarman II s’éteint en 834 etson fils Jayavarman III lui succède qui, à sa mort en 877 est àson tour remplacé par Indravarman I 6 .

Yasodharapura – la première cité d’Angkor

Phnom Bakheng, le premier temple bâti sur le site d'Angkor.

Les successeurs de Jayavarman II poursuivirent le développementdu royaume de Kambuja. Indravarman Ier (qui régna de 877 à 889)arriva à étendre le pays sans guerre et débuta une politique deconstruction massive pour remercier les dieux d’avoir apporté àl’empire la prospérité du commerce et de l’agriculture. On luidoit notamment d’importants travaux d’irrigation et laconstruction du temple de Preah Kô. Son fils Yasovarman I luisuccéda de 889 à 915 et fonda une nouvelle capitale àYaśodharapura, la première cité d’Angkor, à une quinzaine dekilomètres au nord-ouest d’Hariharalaya 14 .

Au sommet du Phnom Bakheng, une colline qui surplombe d’unesoixantaine de mètres la plaine d’Angkor, il fit ériger untemple-montagne. Pyramide à cinq degrés et cent neuf tours, ils’agit d’une représentation du mont Meru, centre de l’univers etséjour des dieux dans la cosmologie indienne15.

On doit aussi à Yasovarman I le Baray oriental, un immenseréservoir d’eau de 7,5 kilomètres sur 1,816.A

Au début du xe siècle, le royaume part en décrépitude et alorsque Harshavarman Ier puis son frère Isanavarman II règnent àAngkor, un de leur oncles, Jayavarman IV, se proclame roi à KohKer avant, à la mort de ses neveux, de diriger l’ensemble du paysdepuis sa nouvelle capitale17.

Cette période est marquée par l’avènement d’un stylearchitectural aux formes gigantesques auquel Koh Ker donnera sonnom et dont le Prasat Thom, un temple montagne de30 mètres dehauteur, est l’élément le plus représentatif18.

Yaśodharapura retrouvera toutefois son statut de capitalesous Rajendravarman II, neveu de Yasovarman I et roide 944 à 968. Celui-ci perpétua sur le site la tradition desgrands travaux de ses ancêtres et on lui doit notamment le Mébonoriental, situé sur une île au milieu du baray oriental, le Prè

Rup et de nombreux autres temples et monastères. C’est dans cecontexte qu’éclate à l’est, en 950, la première guerre avecle royaume de Champā, qui se conclura par une victoire khmère19.

La richesse des décorations du temple de Banteay Srei, construitauxe siècle en grès rose et en latérite, fait aujourd’hui encoreréférence.

C’est aussi sous ce règne que certains dignitaires accroissentleur influence ; cet ascendant ce caractérise par unemultiplication de constructions de monuments grandioses dont lejoyau sera Banteay Srei, fondé en 967 parle brahmane Yajnavaraha, guru du futurJayavarman V 20 .

En 968, Jayavarman V succède à son père, Rajendravarman II. Aprèsavoir établi sa suzeraineté sur d’autres princes, son règne seraune longue période de paix, marquée par la prospérité et un essorculturel21. Il établit une nouvelle capitale, Jayendranagari,près deYaśodharapura et s’entoura de philosophes, de lettrés etd’artistes22.

La mort de Jayavarman V, vers 1001, ouvre une nouvelle phase detroubles, où plusieurs souverains feront de courts règnes avantd’être supplantés par leurs successeurs. Cette période semble seclore avec l’arrivée au pouvoir, vers 1010, de Suryavarman I 23 .

Même s'il eut à essuyer plusieurs tentatives de coups d’État, ilput mener une politique de conquêtes militaires qui lui permirentd’étendre son royaume jusqu’à l’actuelle ville thaïlandaisede Lopburi à l’ouest et l’isthme de Kra au sud. Durant son règne,

qui s’acheva en 1050, débuta la construction du Baray occidental,le second réservoir d’eau encore plus grand que le premier (8kilomètres par 2,1)24.

Suryavarman II et Angkor Vat

Gravure du temple d’Angkor Vat, tirée du livre de LouisDelaporte, Voyage au Cambodge: l'architecture khmère (1880).

La fin du xie siècle fut une nouvelle période de conflits et deluttes de pouvoir sanglantes qui ne s’achevèrent quesous Suryavarman II, au pouvoir de 1113 à 1150 et qui parvint àunifier son royaume en interne. La construction du templed’Angkor Vat, dédié au dieu Vishnouprit 37 années. Dans le mêmetemps, l’empire s’agrandit, à l’ouest en intégrantl’état Môn d'Hariphunchai (dans le nord de l'actuelleThaïlande)et certaines zones frontalières du royaume de Pagan (de nos joursla Birmanie), à l’est en annexant plusieurs provinces duChampā,au sud en investissant la péninsule malaise jusqu’au royaume deGrahi (correspondant à peu près à l’actuelle provincethaïlandaise de Nakhon Si Thammarat) et enfin au nord en poussantjusqu’au sud du Laos contemporain25.

La fin de Suryavarman II n’a pas été clairement définie à cejour. La dernière inscription se référant à lui traite d’un pland’invasion du Đại Việt auquel il aurait participé en 1145. Onsuppose qu’il est décédé lors d’une de ces expéditionsmilitaires, entre 1145 et 1150 26 .

Une nouvelle période de troubles suit la mort de Suryavarman II,où les règnes sont brefs et les souverains déposés par leurs

Représentation de Jayavarman VIIau musée de cire de Siem Reap.

Fils de l’ancien roi Dharanindra Varman II, le futur JayavarmanVII qui régna de 1181 à 1219 était un prince à la tête d’un fiefproche de Kampong Svay (dans l’actuelle province de KampongThom) ; Yaçovarman II l’envoya au Champā en tant que chargémilitaire et il y était lorsque le souverain khmer se fit déposerpar Tribhuvanâditya-Varman et il ne retourna que bien plus tarddans sa principauté27.

En 1177, après la prise d’Angkor par les Chams, il réussit àréunir une armée et à reconquérir la capitale28.

Il accéda au trône et continua la guerre contre ses voisins del’Est jusqu’en 1203 et la défaite duroyaume du Champâ qui dutcéder une partie importante de son territoire29.

Mais si Jayavarman VII est connu comme le dernier grand roid’Angkor, c’est surtout pour les grands travaux réalisés durantson règne, notamment la nouvelle capitale, baptisée AngkorThomqu’il a créée30.

Des recherches récentes par satellite ont révélé qu’Angkor Thom –dont la population était estimée à un million d’habitants - était

étendu sur plus de 1 000 kilomètres carré ce qui en fait lecentre urbain connu le plus vaste du monde préindustriel31.

Au centre, le roi, adepte du bouddhisme mahāyāna, construitle Bayon, avec ses tours de pierre symbolisant des visagesmonumentaux du Bodhisattva Avalokiteśvara. D’autres templesimportants datent de la même époque, tels Ta Prohm, BanteayKdei ou Neak Pean, ainsi que le réservoir de Srah Srang 32 .

Le réseau routier fut développé afin de connecter toutes lesvilles de l’empire entre elles. Sur ces routes, 121 gites d'étapefurent créés, pour les marchands, les fonctionnaires et lesvoyageurs. Enfin, 102 hôpitaux furent disséminés sur l’ensembledu territoire33.

Les derniers éclats

À la mort de Jayavarman VII en 1219, son fils IndravarmanII monte sur le trône et règne jusqu’en 1243. Bouddhiste commeson père, il achèvera la construction de plusieurs temples. Entant que chef de guerre, il sera moins heureux et, en 1220, sousla pression conjuguée du Đại Việt et des ses alliés chams,l’empire doit restituer la plupart des territoires précédemmentconquis au détriment du Champā. À l’ouest, les sujets thaïs serebellent, fondent le premier Royaume de Sukhothaï et chassentles Khmers. Dans les 200 ans qui suivent, les Thaïs devinrent lesprincipaux rivaux du Kambuja34.

Jayavarman VIII succède en 1243 à Indravarman II. Contrairement àses prédécesseurs, il est adepte de Shiva et impose un retour àl’ancienne religion de l’empire. Il converti de nombreux templesbouddhistes en sanctuaires hindouistes. Sur le plan extérieur, lepays est menacé en 1283 par les armées mongoles de KubilaiKhan qui dirigeait alors la Chine. Le roi évita la guerre avecson puissant voisin en acceptant de s’acquitter d’un tributannuel. Le règne de Jayavarman VIII prend fin en 1295, quand il

est déposé par son gendre Indravarman III qui conservera le trônejusqu’en 1309. Le nouveau roi est un fidèle du bouddhismetheravāda, introduit depuis Sri Lanka et qui s’imposerarapidement dans toute la région35.

En août 1296, le diplomate chinois Zhou Daguan arrive à Angkor etrestera à la cour d’Indravarman III jusqu’en juillet 1297. Il nefut ni le premier ni le dernier représentant chinois à y résider,mais son séjour est resté célèbre car il rédigea plus tard unrapport détaillé sur la vie à Angkor. Son portrait estaujourd’hui encore la principale source permettant de comprendreAngkor du temps de sa splendeur. À côté de la description deplusieurs grands temples (le Bayon, pour lequel on lui doit desavoir que les tours étaient recouvertes d’or, le Baphûon, AngkorVat) le texte est une mine d’informations de qualité sur la viequotidienne, les us et les coutumes des habitants d’Angkor36.

Déclin et chute d’Angkor

Peu de données sont disponibles de nos jours sur la période quisuivit le règne d’Indravarman III. La dernière inscription connuese trouve sur un pilier et date de 1327. Plus aucune constructionmonumentale ne fut entreprise. Certains historiens pensent quececi est lié au fait que les rois avaient adopté le Bouddhismetheravāda et n’étant plus considérés comme Devaraja, il n’étaitplus nécessaire d’ériger des temples monumentaux à leur gloire ouà celle des dieux qui étaient censés les protéger. Le recul duconcept de dieu-roi a aussi dû conduire à un affaiblissement del’autorité du souverain et à un manque de travailleurs prêts à sedévouer pour sa cause. L’entretien du système hydraulique a luiaussi dû s’étioler et les récoltes semblent avoir été contrariéespar les inondations et les sècheresses. Ces problèmes sont trèscertainement une des principales cause du déclin de l’empire,alors que du temps de sa splendeur, les trois récoltes annuellesont largement contribué à sa prospérité et à sa puissance37.

À l’ouest, le Royaume d'Ayutthaya conquiert en 1350 celui deSukhothaï qui venait de s’affranchir de la tutelle khmère, puislance plusieurs attaques contre l’empire khmer. Angkor aurait étésoumis avant que l’armée siamoise ne mette au pouvoir des nobleslocaux acquis à sa cause et ne se retire. À partir de ce moment,peu d’éléments sur l’histoire d’Angkor sont parvenus jusqu’ànous4.

Il est d’autre part probable que la peste noire eut un impact nonnégligeable sur les évènements décrits ci-dessus. L’épidémieapparut en Chine dans les années 1330 et atteint l’Europevers 1345 après avoir touché l’ensemble des voies decommunications dont les ports du Sud-Est asiatique avec lesquelsl’empire commerçait38. Il parait donc peu vraisemblable que leroyaume angkorien ait pu être préservé de l’épidémie.

On peut également penser que les projets pharaoniques deconstructions et les luttes de pouvoir au sein de la familleroyale ont joué un rôle néfaste dans le devenir de l’empirekhmer. Des indications tendent toutefois à montrer qu’Angkor nefut pas abandonnée brutalement et que pendant un temps une lignéede rois khmers y régnait alors qu’une autre s’était installéeplus au sud-ouest, d’abord à Lovek, puis à Oudong (nommé ainsi enmémoire du prince U Thong, premier roi d’Ayutthaya sous le nomde Ramathibodi Ier) à une quarantaine de kilomètres au nord del’actuelle Phnom Penh 39 .

Enfin, une raison qui a dû avoir son importance est liée à laconquête par les Siamois de l’isthme de Kra, au nord dela péninsule Malaise, qui était alors une importante zone detransbordement de marchandises en transit entre l’Inde et laChine et de vente de produits en provenance de l'arrière-pays. Laperte de cette source de revenus conséquents a sûrement influédans la décision des souverains de se rapprocher des bassinsdu Mékong et du Bassac qui, outre leur éloignement relatif desenvahisseurs siamois, tiraient bénéfice du passage des navires de

commerce venant faire une halte et s’approvisionner en riz et enproduit de la forêt cambodgienne, tels les cardamones. Mais cedéplacement vers le sud n’était pas sans risque pour l’empire.Alors que près du Tonlé Sap, l’élément hydraulique étaitparfaitement maîtrisé, avec des plaines en pente douce irriguéespar de nombreuses rivières au débit constant, l’est du royaumeétait tributaire des caprices du Mékong qui suivant les annéesfaisait subir aux récoltes inondations ou sécheresses40.

Plan d'Angkor Wat établi par des pèlerins japonaisentre 1623 et 1636.

Une thèse plus récente attribue la chute de l’empire angkorien àun désastre écologique et à une faillite des infrastructures. Laprospérité du pays reposait sur un système hydraulique élaboré deréservoirs (Baray) et de canaux utilisés pour le commerce, lesdéplacements et l’irrigation. Dans le même temps, de nouvelleszones de forêt furent défrichées sur le Phnom Kulen au profit derizières nécessaires pour nourrir des habitants de plus en plusnombreux. Cela favorisa l’érosion des sols et les eaux de pluiene tardèrent pas à transporter des sédiments qui encombrèrent leréseau de canaux, qui avaient de plus en plus de difficultés àrépondre aux besoins croissants de la population. Ces canaux, nepouvant plus remplir efficacement leurs rôles, le manque d’eau sefit bientôt sentir, entrecoupé d’inondations massives que lesdigues en mauvais état ne pouvaient plus trop contenir41.

Dans tous les cas, le roi Barom Reachea Ier (1566 – 1576),profitera des difficultés siamoises (Ayutthaya sera mise à sacpar les birmans en 1569) pour retourner installer la capitale àAngkor, mais l'embellie sera de courte durée42.

Le danger birman écarté, le roi Naresuan investit l’ouest del’empire khmer, prit Lovek, en déporta la population et fittransférer les trésors de la ville. Privé de ces attributs,censés avoir été offerts par les dieux afin de protéger leroyaume, l’empire khmer entrera définitivement dans une périodede récession43.

Même si des inscriptions attestent l’installation à partirdu xviie siècle de Japonais à Angkor, dont le plus connu estUkondafu Kazufusa, qui célébra le nouvel an khmer là-basen1632 44 , le recul était engagé.

L’époque sera marquée par des troubles incessants mettant auxprises les différents monarques et des prétendants. Ces crisesseront aggravées par les interventions régulières des voisinssiamois et annamites, souvent à la demande d’un des deux camps.Parfois même, quand le titulaire du trône montrait des velléitésd’indépendance, une armée était envoyée pour déposer lerécalcitrant et le remplacer par un rival plus conciliant sansque ce denier n’ait pour sa part demandé quoi que ce soit45.

Découverte en Occident et recherches archéologiques

L'expédition Doudart de Lagrée sur les marches d’AngkorVat en 1866. De gauche à droite : Francis Garnier, LouisDelaporte, Clovis Thorel, Ernest Doudart de Lagrée, LucienJoubert,Louis de Carné - photo Emile Gsell.

Les premiers récits sur l'empire khmer apparus en Europedateraient de 1570 et seraient le fait de voyageurs espagnols etportugais46.

Il fallut attendre la publication en 1819 par Jean-Pierre Abel-Rémusat de Description du royaume de Cambodge, traduction d'unrécit de voyage d'un officier chinois du xiiie siècle, pourréapparaître du néant47.

C'est en 1861, début de la conquête de la Cochinchine par laFrance, que le naturaliste Henri Mouhot explorant la région avecl'abbé Sylvestre pour le compte de la British Royal GeographicalSociety permet la re-découverte d'Angkor Vat puis d'Angkor Thompar les occidentaux – en réalité, le temple n’a jamais étécomplètement abandonné31. Son récit sera publié dans la revue LeTour du Monde en1863, avant de faire l’objet d’un livre48.

Une seconde exploration, de 1863 à 1866, menée par Ernest Doudartde Lagrée sera beaucoup plus exhaustive et fera l'objet d'uncompte-rendu dans Voyage d'Exploration en Indo-Chine, publiéen 1873 49 .

De nombreuses missions d'exploration se succèdent alors jusqu'àla longue présence d'Étienne Aymonier, nommé représentant auCambodge en 1879. Celui-ci organisa la traduction des nombreusesinscriptions et reconstitua l'histoire du royaume khmer. Rentréen France à l'issue de sa mission (vers 1886) il publia denombreuses études, un dictionnaire et de multiples articles qu'ilrassemble à partir de 1900 dans son grand ouvrage Le Cambodge50.

Depuis le début du xxe siècle, le site d'Angkor est patiemmentréhabilité par des archéologues, qui tentérent dans un premier

temps de conserver et restaurer les monuments puis de définir uncadre chronologique des différents sites découverts. Grâce àleurs travaux, ils purent prouver la continuité avec le Cambodgemoderne, alors que jusque là la période angkorienne étaitentourée de mythes chez la plupart des Cambodgiens51.

Reproduction du temple d'Angkor Vat à l'exposition colonialeinternationale (1931) à Paris.

Toutefois, ces travaux servirent aussi de prétexte pour justifierla « mission civilisatrice » du colonialisme et le rôle despuissances « protectrices » dans la remise en œuvre de brillantescultures sur le déclin52. Ces théories atteindront leur paroxysmeen 1931, lors de l’Exposition coloniale internationale de Paris,où une reproduction du temple d’Angkor sera une des grandesvedettes de la manifestation53.

Ce n’est que vers le début des années 1950, avecnotamment Bernard-Philippe Groslier de l'École françaised'Extrême-Orient, que l’attention se porte avec plus d’acuité surl’utilisation de l’imposant réseau hydraulique découvert bienavant et surtout sur le besoin de procéder à une cartographiedétaillée du site de l’ancienne capitale54.

Toutefois, le budget limité de la conservation d’Angkor dansles années 1960 puis la guerre civile cambodgienne empêchèrentd’explorer cette voie.

Cependant, à partir du milieu des années 2000 les études parsatellite montrent que la cité de Jayavarman VII était très

étendue : plus de1 000 kilomètres carrés31. En contrepartie,la densité de population était faible, comme ce qu'avait pu êtrecelle de la cité maya Tikal 31 .

Architecture

Les plus anciens monuments khmers connus sont des tours debriques du viie siècle. Ensuite, apparurent des petits templesétagés en pyramide. Le développement de galeries couvertes amenaprogressivement à des plans plus élaborés. Petit à petit, labrique est évincée par la pierre. L’architecture khmère a atteintson apogée avec la construction d’Angkor Vat par SuryavarmanII (1113 – 1150) et celle d’Angkor Thom par JayavarmanVII (1181 – 1218). La sculpture a elle aussi prospéré, montrantune évolution d’un naturalisme relatif à une technique plusconventionnelle. Les bas-reliefs, absents des premiers monumentsont ensuite supplanté en importance les statues et ont même, plustard occupé des murs entiers où ils dépeignaient avec uneincroyable richesse des tranches de vies de l’époque4.