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Etude sur la sensitivité aux conflits du Programme PEAR Plus Octobre, 2009 Search for Common Ground Valeria Izzi Christof Kurz

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Etude sur la sensitivité aux conflits du

Programme PEAR Plus

Octobre, 2009

Search for Common Ground

Valeria Izzi Christof Kurz

Photos des mains travaillant, femmes avec casseroles, et enfants déplacés utilisé sur un Creative Commons

License © Julien Harneis 2009. Tout autre photo © Search for Common Ground 2009.

Izzi, V and Kurz C. ŖEtude sur la sensitivité aux conflits du Programme PEAR Plus.ŗ

Search for Common Ground. Octobre 2009. Kinshasa, République Démocratique du Congo. Pour des informations ou des copies supplémentaires, veuillez contacter SFCG (www.sfcg.org)

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 3

Résumé Exécutif

e Programme Elargi dřAssistance au Retour (PEAR) Plus représente la contribution de lřUNICEF à la

Stratégie des Nations Unies pour le Soutien à la Sécurité et à la Stabilisation (UNSSSS) dans lřEst de la

République Démocratique du Congo. Démarré au début 2009, le PEAR Plus vise à soutenir des solutions

durables pour le retour des déplacés internes et leur réintégration dans leurs communautés dřorigine, dans

les Provinces du Nord et du Sud Kivu, en Province Orientale (Ituri) et au Nord Katanga. Le programme

adopte une approche multisectorielle, intervenant dans les secteurs de lřéducation, de lřeau et de

lřassainissement, de la santé, et de la protection des enfants.

Afin de renforcer la dimension de construction de la paix du PEAR Plus, lřUNICEF a proposé un

partenariat à Search for Common Ground (SFCG). La présente étude a été commissionnée comme première

étape de cette collaboration en vue dřévaluer la sensibilité aux conflits du PEAR Plus et dřorienter une

deuxième phase du programme. Lřétude a été conduite sur une période de deux mois au total, commençant

par une revue des documents programmatiques et de la littérature sur les conflits dans lřEst de la RDC. Une

mission de terrain a eu lieu du 2 au 19 juillet 2009, avec des visites de Goma (Nord Kivu), Bukavu et Uvira

(Sud Kivu), et Bunia (Ituri). Ce rapport est le résultat dřune analyse basée sur la revue documentaire et des

interviews semi structurées avec 77 représentants de lřUNICEF, de SFCG, des partenaires exécutifs du PEAR

Plus et des partenaires PEAR, des autorités de lřEtat, des agences internationales, et dřautres personnes

ressources ainsi que des observations lors de deux visites sur le terrain dans les zones opérationnelles du

PEAR Plus.

Les conflits dans lřEst de la RDC sont complexes, caractérisés par une imbrication de plusieurs niveaux Ŕ

local, provincial, national, et régional, avec une prolifération des acteurs et une complexité croissante au fil

des années. Les actions des groupes armés sont les manifestations les plus visibles des conflits dans la région.

Dřautres formes de violence existent au niveau local, même si elles ne sont pas aussi sanglantes et à moindre

échelle comparées aux actions des groupes armés. Les problèmes dřaccès à la terre sont au cœur des conflits

dans lřEst de la RDC à tous les niveaux, imbriqués dans une forte méfiance entre groupes ethniques, en

particulier entre groupes qui se considèrent « autochtones » et ceux quřils considèrent non-autochtones. Les

immenses richesses minières de lřEst de la RDC représentent un des facteurs clés qui favorisent la

continuation des conflits. Lřabsence dřune bonne éducation et dřopportunités de travail rémunéré ou dřautres

activités productives pour les jeunes a créé un Řréservoirř de main dřœuvre potentiel pour la violence. En

même temps, lřEtat congolais est incapable de jouer son rôle de gestionnaire des affaires sociales et

dřarbitre ou de médiateur efficace dans les conflits sociaux.

A la base de la notion de « sensibilité aux conflits », il y a lřidée quřaucune intervention dans une

situation conflictuelle ne peut être « neutre » : il y a forcément des effets, soit positifs, soit négatifs, sur les

dynamiques conflictuelles. La définition de « sensibilité aux conflits » sřarticule donc autour de deux piliers :

(i) lřimpératif de « ne pas nuire » et (ii) les efforts de saisir les opportunités pour contribuer à la construction

de la paix et à la réconciliation. En utilisant ce cadre conceptuel, lřétude a analysé tous les aspects du PEAR

Plus et en tire cinq conclusions principales :

L

4 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

1. LA SENSIBILITE AUX CONFLITS NřA PAS ETE PRISE EN COMPTE DANS LA CONCEPTION DU PEAR PLUS.

Le PEAR Plus est un programme de transition dřune situation dřurgence à des solutions plus durables pour

faciliter la réintégration des rapatriés récents dans leurs communautés dřorigine. Par sa nature, il aborde

donc les conséquences des conflits et non leurs causes. En particulier, il nřy a pas eu dřanalyse sur les risques

des interventions à Řnuireř, ni de stratégie systématique pour gérer les conflits qui pourraient surgir lors de la

mise en œuvre du programme. La contribution à la construction de la paix du PEAR Plus est indirecte, dans le

cadre de lřUNSSSS. Alors que « réconciliation » et « construction de la paix » ont été identifiées comme

thèmes transversaux dans le document originel du PEAR Plus, en dehors de quelques activités dřéducation à

la paix les projets exécutés ne prévoient pas des activités concrètes de réconciliation ou de mitigation des

conflits.

2. LE PEAR PLUS MANQUE DE DONNEES, DřINFORMATIONS ET DřOUTILS POUR UNE ANALYSE SYSTEMATIQUE DES CONFLITS

DANS LES LOCALITES DřINTERVENTION.

Les analyses du contexte sur lesquelles le PEAR Plus se fonde, notamment le « monitoring protection » et les

évaluations multisectorielles du Programme PEAR, ne fournissent pas suffisamment dřinformations pour une

compréhension approfondie des risques et opportunités par rapport aux conflits et à la construction de la

paix. Bien que les partenaires du programme aient généralement travaillé dans ces localités depuis quelque

temps et aient donc une bonne compréhension de la situation, cette connaissance reste anecdotique et nřest

pas capturée et analysée de manière systématique. Par conséquent, il nřy a pas non plus une base solide de

référence pour mesurer lřimpact (positif ou négatif) des programmes sur les conflits.

3. LE PEAR PLUS CONTOURNE LES ZONES A PLUS HAUT RISQUE DE CONFLITS POUR TRAVAILLER DANS LES ZONES LES PLUS

TRANQUILLES, OU LE RISQUE DE CONFLITS EST MOINS ACCENTUE.

La décision dans quelles zones le PEAR Plus devrait intervenir a été prise en considérant de multiples critères

et en plusieurs étapes. Dans ce processus de prise de décision, on donne priorité aux critères de sécurité et

de durabilité dans la sélection des localités. Ainsi, pendant la phase pilote, le programme contourne les

zones aux conflits aigus et nřintervient que dans des zones qui sont ethniquement largement homogènes et

qui ne connaissent pas de tensions majeures.

4. LES PARTENAIRES DE MISE EN ŒUVRE TRAITENT DES CONFLITS LOCAUX AU FUR ET A MESURE ET SANS APPROCHE

SYSTEMATIQUE.

Dans la mise en œuvre du projet, les partenaires ont reconnu que certaines activités ont créé quelques

tensions dans les communautés ou risquent dřavoir des effets négatifs sur les conflits existants. Face à ces

situations conflictuelles, les agents du terrain ont su trouver des solutions pragmatiques pour répondre à ces

problèmes, grâce à leur expérience et une approche improvisée mais pragmatique de médiation. Toutefois,

ces efforts, pour lřinstant, ont été seulement réactifs et les partenaires manquent dřune stratégie cohérente de

« ne pas nuire » et de gestion des conflits quand ils surgissent.

5. LA MEFIANCE MARQUEE AUTOUR DE LřACTION HUMANITAIRE DANS LřEST DE LA RDC REND PLUS DIFFICILE LřINTEGRATION

DřUNE PERSPECTIVE DE SENSIBILITE AUX CONFLITS.

A priori, lřaction humanitaire est la bienvenue parmi les populations congolaises ravagées par les guerres et

par les autorités de lřEtat. Pourtant, il y a un sentiment généralisé que lřassistance humanitaire est trop limitée

et partiale, et souvent est au seul bénéfice des intervenants plutôt que des populations locales. Des rumeurs

sur des desseins sinistres et secrets présumés de la communauté internationale circulent librement partout

dans lřEst de la RDC et, au fil des années, surtout la MONUC mais aussi dřautres agences ou ONG

internationales ont de temps à autre été ciblées par des manifestations violentes. Ceci rend lřintégration

dřune dimension de sensibilité aux conflits plus difficile, mais, en même temps, encore plus nécessaire.

Sur la base de cette analyse, trois scénarios et stratégies potentielles pour intégrer une dimension de

sensibilité aux conflits de façon plus ou moins compréhensive dans le PEAR Plus sont esquissées :

1. SCENARIO ŘSTATU QUOř

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 5

Bien quřil nřy ait pas eu dřeffort systématique dřintégrer une dimension « ne pas nuire » dans les activités

programmatiques, les risques pour le PEAR Plus dřexacerber les tensions existantes ou dřen créer de

nouvelles sont plutôt limitées. Les critères de choix des localités excluent les zones les plus conflictuelles, et les

activités sectorielles du PEAR Plus ne touchent, pour la plupart, pas directement aux Řnerfsř des conflits. Dans

les cas où des risques de conflits ont été rencontrés dans les zones dřintervention, les partenaires de mise en

œuvre ont pu gérer les tensions dřune manière improvisée et pragmatique. Autrement dit, dans sa forme

actuelle, le risque des activités de « nuire » est suffisamment faible pour considérer le Řstatu quoř comme une

option possible. Cependant, en ce moment, le PEAR Plus nřest pas en train de saisir les opportunités pour

contribuer à la construction de la paix. Avec lřoption Řstatu quoř le PEAR Plus resterait un programme aux

objectifs largement humanitaires et continuerait à contourner les conflits plutôt quřà travailler sur les conflits.

2. SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS AUGMENTEEř.

Le deuxième scénario envisagerait dřaugmenter la sensibilité aux conflits dans le cadre programmatique

existant, sans des changements stratégiques profonds. Le scénario reposerait sur des modifications dans cinq

domaines clés : (i) une capacité et des outils dřanalyse des conflits améliorée; (ii) une formation sur la

sensibilité aux conflits pour les partenaires exécutifs et leur personnel; (iii) des interventions supplémentaires

pour aborder les conflits et tensions locales; (iv) une stratégie de communication pour assurer la transparence

dans la programmation et dans les relations entre les bailleurs, ONG internationales et les partenaires

locaux; et (v) une stratégie de suivi et évaluation qui se concentre explicitement sur la sensibilité aux conflits.

3. SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS APPROFONDIEř

Ce scénario opterait pour la transformation du PEAR Plus en véritable programme de construction de la

paix, ce qui exigerait une remise à plat fondamentale de la logique et de la stratégie du programme, y

compris le choix des localités dřintervention. Ce scénario inclut une analyse des conflits en profondeur;

lřadoption de la réconciliation et de la construction de la paix comme objectifs clés et une flexibilité dans la

mise en œuvre du programme qui permettrait de répondre de manière systématique et stratégique aux

conflits dans les zones dřintervention ; et la mise en place dřun système de suivi et d'évaluation qui utilise les

résultats des analyses des conflits approfondies comme base de référence. Par conséquent, ce scénario aura

un impact profond au niveau de la capacité du programme de ne pas nuire et de contribuer à la

construction de la paix à deux niveaux, le micro et le macro. Ces changements nécessiteraient une volonté

«politique de la part de lřUNICEF de manière profonde et systématique dans leur façon de gérer et de

mettre en œuvre des programmes.

Le deuxième et le troisième scénario offrent des opportunités intéressantes de collaboration entre

lřUNICEF et SFCG. La philosophie de SFCG se base sur la notion de transformation des conflits, dont lřidée

est de ne pas éliminer les différences entre les individus ou les groupes, mais de les aider à voir ce qu'ils ont

en commun et de trouver des solutions aux problèmes communs. Lřexpérience de SFCG pourra donner un

apport significatif et profond au travail au PEAR Plus, en particulier par rapport à lřanalyse des conflits ; à

la promotion de la transparence et la gestion des rumeurs ; et à la mise en œuvre des activités spécifiques

visant la promotion du dialogue et de la réconciliation.

6 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Table de matières

RÉSUMÉ EXÉCUTIF 3

1. INTRODUCTION 8 1.1 Objectifs de lřEtude 8 1.2 Raisonnement pour lřEtude 8 1.3 Processus et Méthodologie 9 1.4 Structure du Rapport 10 1.5 Remerciements 10

2. PEAR PLUS, UNICEF ET SEARCH FOR COMMON GROUND 11

2.1 Aperçu du PEAR Plus 11 2.2 Aperçu des Programmes de Search for Common Ground en RDC 12 2.3 Quelques Réflexions sur des Synergies Potentielles entre SFCG et le PEAR Plus 14

3. CADRE CONCEPTUEL DE LřETUDE 15

4. ANALYSE DES DYNAMIQUES DES CONFLITS DANS LřEST DE LA RDC 19 4.1 Manifestations des Conflits 19 4.2 Causes des Conflits 20 4.3 Stratégies de construction de la paix dans lřEst de la RDC 22 4.4 Implications pour le PEAR Plus 23

5. RÉSULTATS DE LřETUDE 25 5.1 Synthèse des Principaux Résultats 25 5.2 La sensibilité aux conflits des activités sectorielles du PEAR Plus 36 5.3 Considérations opérationnelles 39

6. RECOMMANDATIONS 41

6.1 Scénario ŘStatu Quoř 42 6.2 Scénario ŘSensibilité aux Conflits Augmentéeř 43 6.3 Scénario ŘSensibilité aux Conflits Approfondieř 50 6.4 Risques et défis 52

ANNEXE 1 : CAUSES ET MANIFESTATIONS DES CONFLITS 53

ANNEXE 2 : SYNTHESE DES RECOMMENDATIONS 57

ANNEXE 3 : PERSONNES CONSULTEES 59

ANNEXE 4 : BIBLIOGRAPHIE 62

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 7

Acronymes

AVSI Associazione Volontari per il Servizio Internazionale

CNDP Congres National pour la Défense du Peuple

COOPI Cooperazione Internazionale

CRS Catholic Relief Services

FAO Food and Agriculture Organisation

FDLR Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda

HCR Haut Commissariat pour les Réfugiés

IRC International Rescue Committee

MONUC Mission de lřOrganisation des Nations Unies an Congo

MSA Multi-Sectoral Assessment

NRC Norwegian Refugee Council

OCHA Office for the Coordination of Humanitarian Affairs

ONG Organisation Non Gouvernementale

PEAR Programme Elargi dřAssistance aux Retours

PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

RDC République Démocratique du Congo

RRM Rapid Reaction Mechanism

SFCG Search for Common Ground

UNSSSS United Nations Security and Stabilization Support Strategy

WASH Water, Sanitation and Hygiene

8 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

1. Introduction

e Programme Elargi dřAssistance aux Retours (PEAR) Plus représente la contribution de lřUNICEF à la

Stratégie des Nations Unies pour le Soutien à la Sécurité et à la Stabilisation (UNSSSS) dans lřEst de la

République Démocratique du Congo. Le PEAR Plus a démarré au début 2009, dans lřintention de

soutenir des solutions durables pour le retour des déplacés internes et leur réintégration dans leurs

communautés dřorigine, dans les Provinces du Nord et du Sud Kivu, en Province Orientale (Ituri) et au Nord

Katanga. Le programme adopte une approche multisectorielle, intervenant dans les secteurs de lřéducation,

de la santé, de lřeau et assainissement et de la protection des enfants.

Afin de renforcer la dimension de construction de la paix du PEAR Plus, lřUNICEF a établi un partenariat

avec Search for Common Ground (SFCG). Il est prévu que SFCG travaille avec les partenaires de mise en

œuvre du PEAR Plus pour intégrer une composante de construction de la paix (Řpeacebuildingř en anglais)

dans les activités du programme. La présente étude a été commissionnée comme première étape de cette

collaboration, dans le but de mieux analyser la sensibilité aux conflits du PEAR Plus actuel et dřorienter une

deuxième phase du programme avec des activités concrètes.

1.1 OBJECTIFS DE LřETUDE

Les trois objectifs suivants, élaborés dans les Termes de Référence, ont guidé lřétude :

« Analyser le contexte des conflits dans les localités dřexécution du programme PEAR Plus (causes,

acteurs, dynamiques, et catalyseurs) ;

Evaluer la sensibilité aux conflits du programme PEAR Plus, en termes de son impact (positif ou

négatif) sur les dynamiques des conflits ;

Faire des recommandations pour accroître la sensibilité aux conflits des interventions du programme

PEAR Plus. »

1.2 RAISONNEMENT POUR LřETUDE

Le PEAR Plus est un programme formulé pour sřattaquer aux conséquences des conflits, notamment au

déplacement des populations et à leur retour dans leur milieu dřorigine. Dans la formulation du programme

et sa mise en œuvre jusquř à présent, il nřy a pas eu un effort pour sřattaquer aux causes des conflits. De la

même façon, le risque que lřassistance humanitaire puisse Řnuireř, cřest-à-dire avoir un impact négatif sur les

conflits, nřétait pas systématiquement pris en considération dans la formulation du programme, ni la

possibilité de saisir des opportunités pour contribuer activement à la construction de la paix au delà des

objectifs spécifiques du projet.

Par conséquent, plusieurs questions sřimposent:

Serait-il souhaitable dřintégrer cette perspective additionnelle dans le PEAR Plus?

L

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 9

Si oui, dans quel degré est-ce que lřon pourrait intégrer des éléments de sensibilité aux conflits

dans le programme tel quřil est en ce moment?

Quřest-ce que cette Ŗintégrationŗ signifierait en pratique? Quels changements conceptuels,

programmatiques, et opérationnels pourrait-on envisager pour réaliser la sensibilité aux conflits du

PEAR Plus?

Lřétude vise à soutenir lřUNICEF, SFCG et ses partenaires PEAR Plus dans cette réflexion, en donnant un

aperçu des opportunités et des avantages de lřintégration systématique dřune perspective de prévention des

conflits et construction de la paix, ainsi que des risques potentiels.

1.3 PROCESSUS ET METHODOLOGIE

Lřétude a été conduite entre fin juin et août 2009 sur une période de deux mois, avec une mission dans

lřEst de la RDC qui a eu lieu du 2 au 20 juillet 2009. Le processus sřest déroulé en plusieurs étapes :

Au début, une revue bibliographique (en anglais) a été élaborée, qui a pris en considération la

documentation du PEAR Plus et des autres programmes pertinents, la documentation des

activités de SFCG en RDC, ainsi que la littérature académique sur les conflits dans lřEst de la

RDC (voir Annexe 4 Ŕ Bibliographie) ;

Ensuite une série de consultations avec 77 acteurs humanitaires, dont les responsables et agents

de terrains impliqués dans la formulation et la mise en œuvre du PEAR Plus, ainsi que les

représentants dřautres agences et ONG internationales, des autorités locales, ainsi que des

personnes ressources (voir Annexe 3 Ŕ Liste de personnes rencontrées). Les consultations ont eu

lieu au Nord Kivu (Goma), au Sud Kivu (Bukavu, Uvira) et en Ituri (Bunia) et ont pris la forme

dřentretiens semi-structurés1 ;

Elles étaient complétées par des descentes sur le terrain pour observer directement la mise en

œuvre des projets, en particulier :

o Deux jours de visites des zones dřintervention du projet PEAR Plus en Ituri (territoire de

Djugu), avec lřONG de mise en œuvre COOPI ;

o Observation du projet PEAR au Sud Kivu (territoire de Walungu) avec lřONG de mise

en œuvre AVSI ;

o Observations des sites dřintervention futurs du PEAR Plus au Sud Kivu (territoire de

Walungu), avec lřIRC, lřONG de mise en œuvre.

Finalement, une demi-journée de discussion (« brainstorming ») avec le personnel clé de Search

for Common Ground à Bukavu.

Le processus a rencontré certaines contraintes et connu quelques limitations. En particulier, le temps passé

par lřéquipe dřévaluation dans les sites dřintervention du programme a été très limité par rapport au temps

passé dans les villes principales. Ceci a réduit la possibilité dřun vrai échange avec les bénéficiaires et des

autres couches de la population locale et a rendu la vérification des informations données par les

responsables des programmes et les partenaires et observateurs difficile. Le temps limité passé sur le terrain

nřa également pas permis dřorganiser des groupes de discussion (Řfocus groupsř) comme initialement prévu.

Dřaprès les Termes de Référence, lřétude sřest concentrée sur les provinces du Nord et du Sud Kivu, et

sur le district dřIturi en Province Orientale, sans prendre en considération la situation au Nord Katanga, qui

est également une zone de mise en œuvre du PEAR Plus.

1 Les observations présentées dans ce rapport sont basées largement sur les opinions et les conclusions des

acteurs consultés. Les individus consultés ont été assurés lřanonymat lors des entretiens. Leurs points de vue seront présentés comme des conclusions générales sans faire références aux individus consultés.

10 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

1.4 STRUCTURE DU RAPPORT

Dans ce qui suit, le présent rapport donnera un aperçu des activités de lřUNICEF (en particulier le PEAR

Plus) et de Search for Common Ground (SFCG). La troisième section introduit le cadre conceptuel de lřétude,

en offrant une définition de travail de la notion de « sensibilité aux conflits » et une explication des enjeux

et défis de son application dans le contexte de la RDC.

La quatrième section vise à situer le PEAR Plus dans le contexte des dynamiques des conflits dans lřEst

de la RDC, alors que la quatrième synthétise les résultats de lřétude. La dernière section avance des

recommandations pour renforcer la sensibilité aux conflits dans les prochaines phases du programme et

discute trois scénarios différents à considérer dans la formulation des étapes successives du PEAR Plus.

1.5 REMERCIEMENTS

L'équipe tient à remercier tous les collègues de SFCG et de lřUNICEF qui ont offert assistance, conseils

ou soutien logistique au cours de cette étude. Un remerciement particulier sera adressé aux responsables de

cette étude, Lena Slachmuijlder et Annelies Claessens de SFCG, et Damian Lilly et Christian Michaud de

l'UNICEF, pour les discussions stimulantes et pour leur assistance infaillible ainsi quřà Jean Pierre Ruhimbasa

pour sa compagnie et sa participation dans la collecte de données.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 11

2. PEAR Plus, UNICEF et Search for

Common Ground

ette section donne un aperçu des origines du PEAR Plus, de ses objectifs et activités prévues. Elle

présente aussi lřopérât de Search for Common Ground (SFCG) en RDC, afin dřidentifier les synergies

potentielles, et la contribution que SFCG peut offrir dans la mise en œuvre des prochaines phases du

PEAR Plus.

2.1 APERÇU DU PEAR PLUS

LřUNICEF en RDC2 joue un rôle clé dans lřassistance aux déplacés et aux rapatriés, à travers des

programmes de grande envergure Ŕ notamment le Mécanisme de Réponse Rapide en faveur des déplacés

internes et le Programme Elargi dřAssistance aux Retours (PEAR) et le PEAR Plus en faveur des rapatriés.

Alors que ces domaines tombent, en principe, sous la responsabilité mandatée du Haut Commissariat pour les

Réfugiés (HCR), dans le contexte particulier de la RDC ces responsabilités sont partagées avec lřUNICEF au

sein du système des « clusters » pour coordonner lřaction humanitaire.

Le Mécanisme de Réponse Rapide (Rapid Reaction Mechanism, RRM) est un programme multisectoriel géré

conjointement par lřUNICEF et OCHA depuis 2004. Le RRM assiste les populations affectées par les conflits,

les désastres naturels et les épidémies, avec une attention particulière aux déplacés internes. Le programme

est mis en œuvre à travers la collaboration avec deux ONG internationales Ŕ Solidarités et International

Rescue Committee (IRC).

Alors que le MRR s'est avéré un instrument pragmatique et utile pour répondre rapidement à des crises

humanitaires, il sřest révélé progressivement quřil y avait une lacune par rapport à lřassistance systématique

aux personnes rapatriées dans leurs zones d'origine. Surtout après les élections de 2006, un nombre

important de déplacés ont commencé à rentrer, rencontrant souvent des conditions de vie précaires dans

leurs villages dřorigine.

Pour soutenir la réintégration des rapatriés dans les zones de retour lřUNICEF et ses partenaires ont

lancé, en novembre 2006, le Programme Elargi d’Assistance aux Retours (PEAR). Originairement conçu comme

une sorte de « RRM pour les rapatriés », le PEAR vise à apporter une assistance aux rapatriés qui présentent

une vulnérabilité particulière. En particulier, le PEAR soutient les rapatriés comme première étape vers une

solution durable en fournissant : (i) des informations approfondies sur la situation humanitaire dans les zones

de retour, à travers les Evaluations Multisectorielles (Multi-Sectoral Assessments, MSA) ; (ii) une assistance

matérielle comprenant des articles domestiques (non-vivres) aux familles rapatriées les plus vulnérables ; et

(iii) un accès amélioré à l'école primaire dans les zones de retour.

2 Les activités de lřUNICEF en RDC sont guidées par le Programme Pays 2008-2012, qui se focalise sur

quatre secteurs : (i) éducation ; (ii) Eau, hygiène et assainissement (connu avec lřacronyme anglais WASH: Water, Sanitation et Hygiène) ; (iii) Survie et (iv) Protection des enfants.

C

12 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Dans le cadre de la Stratégie des Nations Unies pour le Soutien à la Sécurité et à la Stabilisation dans

lřEst de la RDC (UNSSSS), lřUNICEF a été identifié comme lřagence chef de file pour la composante ŘRetour

de IDPsř. Pour assumer ce rôle, lřUNICEF a formulé le PEAR Plus comme une extension du PEAR, avec

lřobjectif de soutenir des solutions durables pour le retour des déplacés internes et leur réintégration dans les

communautés dřorigine avec une assistance multisectorielle et à plus long terme que le PEAR , dans les

provinces du Nord et Sud Kivu, en Province Orientale (Ituri) et au Nord Katanga.

Tandis que le programme PEAR est Řhumanitaireř, le PEAR Plus est un programme de Řtransitionř entre

lřassistance humanitaire dřurgence et le développement à long terme, et adopte une approche

multisectorielle qui sřarticule autour de quatre composantes : (i) eau et assainissement, en suivant lřapproche

« Villages Assainis » déjà utilisée dans le programme régulier de lřUNICEF; (ii) éducation de qualité ; (iii)

santé primaire ; et (iv) protection des enfants.

Comme dans le cas du PEAR, le PEAR Plus est mis en œuvre à travers des ONGs internationales (voir

Tableau 1), qui ont un haut degré dřautonomie dans leur zone de responsabilité. Au moment de cette étude,

lřimplémentation du PEAR Plus avait démarré seulement en Ituri, avec lřONG COOPI. Au Sud Kivu, lřIRC

venait dřêtre sélectionné comme partenaire de mise en œuvre mais les activités nřont pas encore commencé.

La planification de démarrage de PEAR Plus au Nord Kivu et au Katanga était également en cours

Tableau 1: Aperçu comparatif des programmes RRM, PEAR et PEAR Plus

RRM PEAR PEAR Plus

Population ciblée

Déplacés internes (et indirectement les communautés dřaccueil)

Rapatriés (et indirectement leurs communautés)

Rapatriés et leurs communautés

Secteurs d’activité

Non vivres

Education

Eau/assainissement

Non vivres

Education

Evaluations multisectorielles

Santé et nutrition

Education

Eau/assainissement

Protection

Partenaires de mise en œuvre

Ituri Solidarités Solidarités COOPI

Nord Kivu IRC et Solidarités NRC Oxfam

Sud Kivu IRC AVSI IRC

Période 2004 Ŕ présent 2006 - présent 2008 Ŕ présent

2.2 APERÇU DES PROGRAMMES DE SEARCH FOR COMMON GROUND EN RDC

Search for Common Ground (SFCG) est une ONG internationale dont le siège se trouve à Washington

aux Etats-Unis et à Bruxelles en Belgique. Ses programmes interviennent à Kinshasa ainsi que dans les

provinces de Sud Kivu, Nord Kivu, et Katanga, à partir de ses bureaux opérationnels à Kinshasa, Bukavu,

Uvira, Moba, Baraka et Goma. Pourtant, SFCG soutient des activités médiatiques et des partenariats avec

des acteurs locaux dans le domaine de réconciliation et des médias dans toutes les 26 actuelles et futures

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 13

provinces. Des émissions radiophoniques produites par SFCG sont diffusées sur 100 radios à travers le pays,

y inclus dans les zones dřintervention du programme Pear Plus.

Consacrées à lřorigine pour améliorer la communication autour du Dialogue Inter Congolais en 2001, les

activités de SFCG ont ensuite été élargies pour inclure de nombreuses questions liées à la construction de la

paix en RDC à de multiples niveaux. A travers la communication et le dialogue, les activités de SFCG visent

à renouveler les relations sociales qui ont été brisées par des décennies de guerre. SFCG utilise un large

éventail dřoutils, qui ont été formulés pour permettre la flexibilité dans le repositionnement stratégique selon

les circonstances.

SFCG estime que lřacceptation de lřautre commence par lřaccès aux bonnes informations. Dans lřEst de

la RDC, pourtant, lřinformation est souvent partiale et manipulée à des fins politiques et propagandistes, ce

qui empêche davantage une vraie connaissance mutuelle. Les zones les plus éloignées nřont souvent que peu

dřaccès aux informations, une situation qui aide à créer un environnement où les rumeurs, mythes et les

fausses croyances peuvent proliférer. Pour cette raison, le travail avec les médias est un élément fondamental

de la Řboîte à outilsř de SFCG.

Chaque semaine, SFCG produit 10 émissions radio en plusieurs langues congolaises, en collaborant avec

plus de 90 radios partenaires à travers le pays, en synergie avec des autres acteurs. Dans ce contexte,

SFCG donne une formation continue aux radios partenaires, en particulier pour promouvoir un journalisme

responsable en vue dřaméliorer les reportages sur les questions conflictuelles et pour éviter que les radios

contribuent à enflammer davantage les tensions (voir Encadré 1 pour un exemple). De même, SFCG travaille

avec des émissions de télévision, utilisant une variété de formats. Les bandes dessinées sont un autre outil qui

sert dřoutil efficace dans la sensibilisation sur des différents thèmes.

Le théâtre participatif est particulièrement important pour les zones qui ne sont pas desservies par les médias.

SFCG a développé une méthodologie qui utilise les techniques du ŖForum Théâtreŗ avec une vision de

transformation des conflits. Les acteurs, qui ont été formés dans lřanalyse des conflits, se mettent à lřécoute

des communautés pour identifier les conflits les plus pertinents, et ensuite créent un scénario qui reflète cette

situation. Pendant le spectacle, les spectateurs sont invités à remplacer les acteurs sur la scène. L'absence de

toute forme de loisirs dans les villages rend ces séances de théâtre extrêmement populaires, et il y a même

des indicateurs qui montrent que les gens prennent au sérieux les recommandations qui ressortent du théâtre

participatif. SFCG a mis en place un système de suivi et d'évaluation pour analyser l'impact sur le

changement dřattitudes dans le long terme. Depuis 2005, les comédiens de SFCG ont joué plus de 1,000

spectacles devant plus de 1,2 million de spectateurs dans le Sud Kivu et Nord Katanga.

SFCG est aussi actif sur le thème des violences sexuelles. En collaboration avec Amnesty International,

SFCG travaille pour une sensibilisation de masse sur la tragédie des violences sexuelles, à travers le cinéma

mobile qui utilise des projections publiques du film ŖBriser le Silenceŗ. La version intégrale du film de 60

minutes est présentée à un large public alors que les trois versions courtes visent surtout les jeunes, les

militaires et les couples. Après chaque projection, les animateurs facilitent des discussions pour renforcer les

messages du film.

Enfin, SFCG travaille sur le renforcement du dialogue et lřamélioration des relations entre les civils et les

militaires, à travers une pluralité dřactivités, y compris des sensibilisations faites par des militaires pour des

militaires de leurs unités, des activités sportives et de loisirs (ex: matchs de football) et des projets communs.

Encadré 1 : Exemple de programme Radio de SFCG

Lřémission Sisi Watoto (« Nous les Enfants ») est un programme produit par les enfants du moins de 18

ans, pour les enfants, et sur les enfants, qui accentue les droits et les défis des enfants dans la société

congolaise. Cette émission hebdomadaire du 15 minutes en swahili fait une attention particulière aux

expériences des enfants liés aux groupes armés qui réintègrent dans la vie civile, ainsi que les autres

enfants vulnérables (chefs de ménage, orphelins, enfants sans abris).

14 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Ces activités de Řrapprochementř accompagnent des efforts de lutte contre lřimpunité, notamment à travers

une base de données sur les infractions commises par les militaires et une action de plaidoyer.

2.3 QUELQUES REFLEXIONS SUR DES SYNERGIES POTENTIELLES ENTRE SFCG ET LE PEAR PLUS

Alors que le PEAR Plus a été conçu dans une situation de conflit, surtout en vu dřaborder les

conséquences des conflits, il nřa pas été conçu dans un esprit de prévention explicite des conflits ou de

construction de la paix. Dans la formulation du programme, le facteur « conflit » a été considéré comme une

variable externe, sur laquelle aucune influence nřest possible. Cette approche suppose, implicitement, que le

PEAR Plus cible les facteurs contextuels comme le déplacement et la destruction des communautés, mais

intervient une fois le conflit terminé. Lřhypothèse est que, en agissant sur le contexte, le programme

diminuera éventuellement la possibilité dřune reprise du conflit.

Au contraire, la philosophie de SFCG est basée sur la notion de transformation des conflits. Lřidée n'est

pas d'éliminer les différences entre les individus ou les groupes, mais de les aider à voir ce qu'ils ont en

commun, au-delà de ces différences. L'objectif de la programmation de SFCG est ainsi de fonder un

dialogue sur ce qui est partagé et de définir des intérêts communs, sans ignorer ce qui les sépare et ce qui

peut être conflictuel. Autrement dit, SFCG ne considère pas les conflits comme des variables externes, mais

plutôt comme un ensemble de facteurs sur lesquels on peut avoir une influence directe.

On peut déjà voir quřil y a des complémentarités intéressantes entre le PEAR Plus et SFCG, qui valident

l'idée d'un partenariat. Sur la base de la revue de la documentation, lřéquipe avait formulé des hypothèses

de travail qui ont été testées pendant la mission. Ces hypothèses concernaient le rôle de SFCG dans les

domaines suivants :

Analyse des dynamiques conflictuelles et des capacités de paix au niveau local. Il semble que le PEAR

Plus ne soit pas fondé sur une analyse approfondie de la dynamique des conflits dans les zones de

la mise en œuvre. L'équipe a voulu évaluer dans quelle mesure SFCG pourrait aider l'UNICEF et ses

partenaires à avoir une meilleure compréhension de ces dynamiques, et des relations entre ces

dynamiques et les activités du programme.

Communication et gestion des rumeurs. Dans un environnement aussi chargé que celui de lřEst de la

RDC, les perceptions sont aussi importantes que les faits. Un programme, même bien intentionné,

peut avoir des effets négatifs sřil est perçu comme bénéficiant à un groupe plutôt qu'à un autre.

Souvent, les programmes de développement font l'objet de discours démagogiques et de

propagande. Il devient donc particulièrement important dřavoir une stratégie de communication

claire et transparente, qui puisse contrebalancer ces rumeurs.

Dialogue et promotion de la connaissance mutuelle. Finalement, lřéquipe a voulu explorer dans quelle

mesure PEAR Plus pourrait être utilisé comme un «point d'entrée» pour des activités spécifiques de

la promotion du dialogue et de la compréhension mutuelle, en utilisant la Řboîte à outilsř de SFCG.

En dépit des synergies évidentes, deux points sont à aborder avec précaution.

Le premier est dřordre conceptuel. Lřintégration dřune dimension de sensibilité aux conflits ne signifie pas

simplement lřajout dřactivités de réconciliation. Typiquement, il faut des changements structurels à un

programme pour le rendre sensible aux conflits. Ces changements pourraient concerner le choix des zones

d'intervention, des groupes cibles, des partenaires, etc. Dans le cas de PEAR Plus, ces types de changements

iraient au-delà de ce à quoi SFCG peut contribuer. Il faut néanmoins avoir une vision globale de la

sensibilité aux conflits, afin d'éviter la tentation de définir un problème en fonction des solutions disponibles.

Le deuxième avertissement est dřordre pratique. Considérant que la mise en œuvre du PEAR Plus est

déjà faite par des ONGs, lřajout dřun nouveau partenaire pour une composante Ŗtransversaleŗ dans le

domaine de la transformation des conflits soulève le risque de compliquer la situation organisationnelle du

programme. Afin dřéviter ce risque, il est important de définir précisément les modalités de mise en œuvre

(structure décisionnelle, budget, etc).

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 15

3. Cadre Conceptuel de lřEtude

řobjectif de cette étude est dřévaluer le PEAR Plus par rapport à sa « sensibilité aux conflits ». Dans ce

qui suit, nous offrirons une définition de travail de cette notion, et identifierons plusieurs questions clés

ainsi que les défis qui émergent dans les efforts de mise en place de la sensibilité aux conflits, en

particulier dans le contexte de la RDC.

3.1. « SENSIBILITE AUX CONFLITS » : UNE DEFINITION DE TRAVAIL

Au sens général, le terme Řconflitř signifie une divergence dřopinions perçues comme irréconciliables. En

soi, les conflits ne sont pas forcément négatifs Ŕ au contraire, on peut affirmer que chaque société a besoin

d'un certain niveau de conflit afin d'exister et d'évoluer. Il est naturel que les individus et les groupes aient

des intérêts différents et quřils soient en compétition pour réaliser leurs intérêts.

Quand on parle de sensibilité aux conflits dans le cadre de cette étude, on adopte une définition plus

restrictive du conflit, correspondant aux conflits violents. En particulier dans le contexte de la RDC, on se

réfère à tous les conflits qui ont conduit à des violences dans le passé, y compris la violence entre groupes

armés et la violence au niveau communautaire (par exemple, les conflits violents autour de lřaccès la terre).

Depuis la deuxième moitié des années 1990, la majorité des agences de développement se sont

rendues compte de la nécessité dřintégrer la sensibilité aux conflits dans leurs interventions dans des zones

de conflit ou de post-conflit. Par conséquent, beaucoup dřentre elles ont adopté des lignes directrices pour

guider leurs agents de terrain et recruté des conseillers spécialisés dans lřanalyse et la résolution des conflits.

Aujourdřhui, de nombreux organismes de développement ont leur propre méthodologie pour lřanalyse des

conflits, tel que, par exemple, le CDA (Conflict-related Development Analysis) du PNUD3 et le CAF (Conflict

Analysis Framework) de la Banque Mondiale4. Il y a eu une augmentation significative de lřutilisation de ces

3 PNUD, 2003. 4 World Bank, 2005. Voir aussi DFID, 2002 ; GTZ, 2001 ; SIDA, 2006.

L

16 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

outils pour influencer la programmation5 , ainsi quřun effort de développement des indicateurs qui sont

« sensibles aux conflits » pour permettre un suivi et une évaluation plus rigoureux des programmes de

construction de la paix. À ce jour, l'UNICEF n'a pas encore suivi cette tendance de manière systématique, et il

ne dispose pas encore des lignes directrices pour intégrer la sensibilité aux conflits à travers ses

programmes.

A la base de la notion de sensibilité aux conflits (ou conflict sensitivity en anglais), il y a lřidée quřaucune

intervention dans une situation conflictuelle ne peut être Řneutreř : il y a nécessairement des effets, soit positifs

soit négatifs, sur les dynamiques conflictuelles. Dès que lřon injecte des fonds ou de lřassistance matérielle

dans une situation conflictuelle, on affecte lřéquilibre entre les groupes en compétition. La définition de

sensibilité aux conflits sřarticule donc autour de deux piliers : (i) lřimpératif de Řne pas nuireř et (ii) les efforts

de saisir les opportunités pour contribuer à la construction de la paix et à la réconciliation.6

3.1.1 Ne pas nuire

Il est aujourdřhui bien documenté quřen dépit des meilleures intentions, les interventions humanitaires ou

de développement peuvent alimenter des tensions parmi des groupes opposés, ou renforcer les causes sous-

jacentes des conflits7. Les interventions ont le potentiel de « nuire » à deux niveaux : (i) au niveau micro, par

rapport aux relations intra- et intercommunautaires, dans le site de mise en œuvre du projet, et (ii) au niveau

macro, sur une échelle géographique et temporelle plus large.

Le niveau micro est le plus évident, par exemple à travers le processus de ciblage des bénéficiaires.

Comme il nřest pas possible pour un programme dřatteindre toutes les couches de la population, il est

normalement nécessaire dřidentifier des groupes cibles, typiquement selon des critères de vulnérabilité. Ce

processus pose un risque inhérent de créer des tensions entre ceux qui reçoivent lřassistance et ceux qui nřen

reçoivent pas. Ce risque est beaucoup plus élevé dans des situations caractérisées par une histoire de conflits

intracommunautaires, où le choix des bénéficiaires peut renforcer des perceptions de favoritisme au profit

de certains groupes et de discrimination contre dřautres groupes. Dans de tels contextes, même les

interventions qui paraissent apporter des bénéficies à la communauté entière pourraient involontairement

créer des tensions entre des groupes opposés.

Pour éviter de nuire au niveau micro, les intervenants doivent maîtriser les dynamiques au niveau local, à

savoir lřhistoire des tensions et des violences entre communautés et groupes ethniques, et connaître les

structures des autorités et leur rapport de forces ainsi que les mécanismes existants de gestion des conflits.

Une fois que cette analyse a permis dřidentifier les risques, il est souvent possible de les minimiser à travers

un processus de ciblage plus transparent et par une stratégie de communication plus efficace avec les

groupes adverses. Le projet peut aussi envisager de soutenir et de renforcer des institutions existantes de

gestion non-violente des conflits.

Lřimpact de lřassistance sur les conflits au niveau macro est plus difficile à discerner et à atteindre. Cela

nécessiterait une compréhension des conflits qui va au-delà des dynamiques locales, ainsi quřune

compréhension des liens entre lřintervention et les efforts mis en place par dřautres acteurs. La dimension

macro échappe souvent à ce quřon peut atteindre dans le cadre de la mise en œuvre dřun projet qui

intervient au niveau local Ŕ communautés, groupements, province. Elle nécessiterait des interventions au

niveau politico-stratégique qui sont hors de la portée des programmes à la base.

5 Pour une analyse des progrès dans ce domaine, voir Barbolet et al, 2005; Paffenholz, T et Reychler, L, 2007; World Bank, 2006. 6 Pour une introduction à la notion de sensibilité aux conflits, voir FEWER, International Alert and Saferworld,

2003. 7 Sur la notion de Řne pas nuireř, voir en particulier Anderson, 1999.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 17

Les deux niveaux (micro et macro) sont liés, mais ils ne sont pas toujours complémentaires. Dans certaines

situations, les efforts de ne pas nuire au niveau micro peuvent même augmenter le risque de nuire au niveau

macro Ŕ et vice versa. Par exemple, un projet peut décider de travailler avec des communautés

ethniquement homogènes, pour éviter quřil y ait des perceptions de favoritisme dřun groupe ethnique parmi

les bénéficiaires. Cette stratégie sřattaque au niveau Ŗmicroŗ, mais risque de marginaliser des minorités

ethniques, renforçant en effet des tendances discriminatoires et potentiellement conflictuelles sur une échelle

plus large. De même, dans une situation où la faiblesse de lřEtat représente une cause structurelle de conflit,

la création de structures parallèles de prise de décision Ŕ justifiée par les motifs de rendre la gestion et la

résolution des conflits au niveau local plus efficace Ŕ pourrait affaiblir dřavantage la légitimité des structures

étatiques, et donc indirectement contribuer à la perpétuation des causes du conflit.

Enfin, il faut souligner que même les interventions qui visent spécifiquement la construction de la paix

pourraient être nuisibles Ŕ par exemple, en sous-estimant lřampleur et la profondeur des divisions entre les

groupes, en suscitant des attentes irréalistes, ou en créant un Ŗmarchéŗ dřactivités de construction de la paix

Ŗà la modeŗ, qui ne sřattaquent pas vraiment aux causes des conflits8 (voir Encadré 2).

3.1.2 Contribution à la construction de la paix

Le deuxième pilier est lřintégration dřune composante de construction de la paix dans toutes les

interventions, quel que soit leur domaine dřintervention spécifique. Dans ce cas, on peut également distinguer

entre le niveau micro et le niveau macro.

Au niveau micro, un projet peut viser à renforcer la cohabitation pacifique parmi les différents groupes

dans la localité Ŕ par exemple, en donnant la priorité aux activités qui apportent des bénéfices concrets aux

communautés. Les projets peuvent aussi incorporer des activités additionnelles qui ciblent la construction de la

paix dřune manière plus directe, par exemple en contribuant à dissiper les préjugés et les mythes en vue de

contribuer à une meilleure compréhension parmi les groupes.

Par rapport au niveau macro, les conflits dans les milieux locaux sont liés aux enjeux politiques et

économiques plus larges ou aux causes structurelles qui ne sont pas facilement affectées par les interventions

locales. Il serait important de choisir des interventions de développement qui contribuent à aborder les

causes des conflits (et pas seulement leurs conséquences). Parmi les multiples besoins humanitaires et de

développement, il conviendrait donc de donner la priorité à ceux qui ont une influence majeure sur les

conflits, non seulement au niveau local, mais aussi par rapport aux intérêts plus larges. Comme déjà pour le

8 Pour des exemples de la façon dont les activités de construction de la paix peuvent nuire, voir Anderson et

Olson, 2003. 9 FEWER, International Alert and Saferworld, 2003:9, traduction par les auteurs.

Encadré 2 : Sensibilité aux conflits des activités de construction de la paix

ŖLes organisations de consolidation de la paix pourraient trouver particulièrement difficile de

reconnaître la nécessité d'être sensible aux conflits. Cela peut être dû à plusieurs raisons, mais surtout au fait

que leur mandat les amène à supposer que leurs activités contribuent automatiquement à la création dřun

environnement pacifique. Cette hypothèse pourrait conduire à une analyse non systématique du contexte

dans lequel lřorganisation opère; un manque de planification lors de l'exécution des projets de consolidation

de la paix; un manque de coordination; ainsi que de réclamer le Ŗsuccèsŗ des interventions fondé sur des

relations contestables de cause-effetŗ.9

18 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

pilier Ŗne pas nuireŗ, la sensibilité aux conflits au niveau macro nécessite souvent un changement complet de

stratégie de la part des intervenants pour impliquer des acteurs et sřattaquer aux intérêts à des niveaux

différents.

Tableau 2 : Les dimensions de la “sensibilité aux conflits”.

Ne pas nuire Construction de la paix

Niveau “micro”

Eviter de créer/renforcer des

conflits dans le(s) localité(s) de

mise en oeuvre du projet (ex:

entre bénéficiaires et non

bénéficiaires ; prise de décision

inclusive)

Contribuer à faire avancer la cohabitation

pacifique dans les localités de mise en

œuvre du projet (par ex. dialogue local

entre communautés ; activités de

solidarité ; bonne communication autour

des actions menées)

Niveau “macro”

Eviter de renforcer les causes

sous-jacentes du conflit (par ex.

éviter de cibler une zone et un

groupe ethnique au détriment des

autres)

Contribuer à aborder la résolution des

causes sous-jacentes du conflit (par ex.

faciliter des dialogues

intercommunautaires ; donner une

information exacte et impartiale qui

pourrait encourager du plaidoyer et des

prises de décisions favorisant la

transformation de ces conflits)

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 19

4. Analyse des dynamiques des

conflits dans lřEst de la RDC

e PEAR Plus, pour lřinstant, manque dřoutils et de capacités analytiques pour recueillir

systématiquement des données sur les causes des conflits et les analyser. La présente section offre une

analyse de base des causes des conflits dans lřEst de la RDC, qui pourrait servir de toile de fond au

développement dřoutils analytiques pouvant capturer la complexité des dynamiques conflictuelles, sans trop

compliquer la tâche des intervenants PEAR Plus.

Les conflits dans lřEst de la RDC sont caractérisés par une imbrication de plusieurs niveaux Ŕ local,

provincial, national, et régional, avec une prolifération des acteurs et une complexité croissante au fil des

années. Dans les reportages médiatiques, mais également dans quelques analyses académiques, on constate

souvent une confusion entre les causes, cřest-à-dire les conditions structurelles et les motivations profondes des

acteurs qui ont contribué aux conflits, et les manifestations, cřest-à-dire les symptômes ou signes visibles des

conflits. Les analyses mélangent également souvent les différents niveaux de conflits. En réalité, malgré de

nombreux liens, les conflits locaux connaissent souvent des dynamiques et des causes différentes de celles

des conflits à lřéchelle provinciale ou nationale. Il faut bien démêler les conflits et séparer analytiquement

les différents niveaux pour éclaircir leurs causes. Car, sans analyse propre des causes des conflits, on

nřarrivera pas facilement à trouver des stratégies dřapaisement ou de résolution.

Cette section ne prétend pas donner un traitement exhaustif de lřhistoire des conflits en RDC. Elle essaie

plutôt dřavancer un certain nombre de facteurs clés Ŕ en termes de causes et de manifestations des conflits Ŕ

qui sont particulièrement pertinents pour analyser lřimpact du PEAR Plus sur les dynamiques conflictuelles.10

4.1 MANIFESTATIONS DES CONFLITS

Les actions des groupes armés (combats, accrochages, barrages, tracasseries de la population, violences

sexuelles, travaux forcés) sont les manifestations les plus visibles des conflits dans la région. Leurs origines et

10 Pour une vue dřensemble de lřhistoire des conflits en RDC, voir Prunier, 2009 ; Turner, 2007.

L

20 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

résident dans des griefs basés sur des intérêts et des revendications concrets, pour la plupart liés au contrôle

des ressources économiques et politiques. Bien que chaque groupe armé ait sa propre raison dřêtre, tous

poursuivent aussi des activités lucratives dřexploitation des ressources et dřautofinancement, ainsi que

lřimposition rampante de Řtaxesř informelles aux populations, ou des pillages et intimidations, viols

systématiques et tracasseries si les civils résistent.11

Le recrutement des enfants soldats est pratiqué par tous les groupes armés, ciblant souvent des enfants

de moins de dix ans, les plus jeunes nřayant que six ans. Souvent drogués pour les soumettre aux autorités

des groupes armés, ils ne sont pas seulement utilisés pour le combat, mais également comme porteurs et

cuisiniers ou comme esclaves sexuels. La présence des groupes armés a aussi provoqué des déplacements

massifs de population : on estime que le chiffre global de déplacés en RDC était de 2,1 millions en juin

2009, dont 1 130 000 au Nord Kivu, environ 500 000 au Sud Kivu, et presque 170 000 en Ituri.12

Aujourdřhui, officiellement, tous les groupes armés qui ont participé à la Conférence de Goma, début

2008, et au processus Amani (cřest-à-dire, le CNDP et la majorité des groupes Mai-Mai) nřexistent plus, car

leurs membres sont censés avoir été intégrés dans les FARDC ou démobilisés et réinsérés dans la vie civile.

Deux cérémonies de Řdésengagementř ont marqué la fin officielle de leur existence: en avril 2009 à Goma,

pour le Nord Kivu, et en juillet 2009 à Bukavu, pour le Sud Kivu. Sur le terrain, pourtant, les groupes armés

sont toujours présents dans de nombreuses localités. Et même pour les groupes intégrés dans les FARDC, le

manque dřencadrement propre crée souvent des situations où les ex-miliciens nřont changé que dřuniforme et

continuent de suivre les ordres de leurs commandants rebelles.

Alors que les conflits impliquant des groupes armés sont les manifestations les plus évidentes et les plus

sanglantes des conflits, ce serait une erreur de les considérer comme la seule forme de violence dans lřEst de

la RDC. Plusieurs autres formes de violence existent au niveau local. Par exemple, les conflits localisés autour

de l'accès à la terre ou du pouvoir traditionnel provoquent de temps en temps des violences, surtout dues à

lřabsence de mécanismes efficaces de gestion non-violente des conflits.

4.2 CAUSES DES CONFLITS

Les causes des violences récentes et de lřexistence de groupes armés et donc les causes des conflits dans

lřEst du Congo, sont en revanche complexes et pas toujours faciles à discerner. Les facteurs principaux sont

cités ci-dessous, mais de manière relativement schématique. En réalité, les facteurs interagissent les uns avec

les autres de manière extrêmement complexe.

Problématique foncière. Les problèmes dřaccès à la terre sont au cœur des conflits dans lřEst de la

RDC à tous les niveaux - à commencer par les disputes au sein dřune même famille autour de

lřhéritage foncier, et qui ont de temps à autre provoqué des violences. Les conflits entre agriculteurs

et éleveurs sur lřutilisation des terres fertiles limitées sont très répandus. Le problème foncier est,

principalement, un problème de gouvernance : de grandes quantités de terres sont dans les mains

des grands propriétaires fonciers, alors que la majorité des agriculteurs nřont aucun titre sur la terre

quřils cultivent.13

Crise de légitimité de l’autorité coutumière. Comme lřaccès au pouvoir coutumier est devenu un des

rares moyens pour sřassurer le contrôle des terres, la question de la terre joue aussi dans les conflits

11 Les conséquences de la présence de groupes armés au Nord Kivu sont bien connues et documentées. Voir

Human Rights Watch, 2002 ; 2004 ; IRC, 2008. 12 OCHA, 2009. 13 Sur la problématique foncière dans lřEst de la RDC, voir Pottier, 2003 ; Van Acker 2000, 2005 ;

Vlassenroot et Huggins, 2004.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 21

internes à lřautorité coutumière. Il y a typiquement une pluralité de prétendants, chacun ayant ses

propres arguments pour revendiquer sa légitimité, et souvent ils utilisent la violence. Une perception

répandue parmi la population est quřil y a aujourdřhui une dégradation prononcée des pratiques

coutumières, un affaiblissement du pouvoir coutumier et une incapacité des autorités coutumières à

jouer leur rôle dřarbitre dans la résolution des conflits communautaires.

Méfiance interethnique. Pratiquement tous les groupes armés dans l'Est de la RDC sont constitués

autour dřune identité ethnique, sřopposant à une menace, réelle ou perçue, venant des Ŗautresŗ

groupes. La méfiance entre groupes ethniques, même quand elle ne devient pas violente, constitue

un facteur omniprésent dans toutes les relations sociales et politiques dans lřEst de la RDC. Cette

méfiance se manifeste surtout vis-à-vis de groupes considérés comme « étrangers », tels que les

Banyarwanda au Nord Kivu et les Banyamulenge au Sud Kivu, mais également au sein du groupe

des rwandophones, en particulier entre Hutu et Tutsi au Nord Kivu14.

Malgré leurs causes de départ, notamment lřautodéfense de leurs communautés et de leurs intérêts, dans

les années passées les groupes armés ont souvent relégué cette mission initiale au second plan et sont

devenus des organisations armées autosuffisantes et génératrices de revenu : souvent, ils attaquent et pillent

les mêmes communautés quřils sont censés protéger, et établissent des alliances opportunistes avec dřautres

groupes armés de différentes origines ethniques, si cela sert leurs intérêts. Trois éléments sont fondamentaux

à cet égard.

Richesses minières. Tous les groupes armés, à des degrés divers, sont impliqués dans l'exploitation

des immenses ressources minières de l'Est de la RDC, formant souvent des alliances volatiles avec un

autre groupe, et souvent avec lřappui des pays voisins qui ont aussi leurs propres intérêts dans

lřexploitation minière. Bien que lřexploitation minière ne soit pas une motivation originale pour le

déclenchement de ces guerres, elle est devenue aujourdřhui plus importante, pour certains acteurs,

que les motivations originelles des conflits, comme lřa reconnu le Groupe dřExperts des Nations

Unies.15

Main d’œuvre pour la violence. Dans lřEst de la RDC, il nřy a pratiquement aucune possibilité

d'emploi salarié, sauf pour les organisations internationales et les ONGs. Les seules options qui

s'offrent aux jeunes sont, pour la plupart, l'agriculture de subsistance, elle-même rendue très

difficile par la rareté des terres et par les méthodes archaïques de production, ainsi que le travail

dans les mines, travail souvent laborieux et peu lucratif pour les petits ouvriers ou journaliers. Dans

ce contexte, le coût dřopportunité de rejoindre les groupes armés est minime. Pour les jeunes

désœuvrés, rejoindre un groupe armé peut être une stratégie de survie parfaitement logique,

surtout quand elle est liée à un certain prestige et à la légitimité du combat pour la Řbonneř cause

de la défense de sa communauté ethnique. Dans un climat où les enfants sont déjà inculqués de

stéréotypes et de préjugés ethniques, il est dřautant plus facile de mobiliser les jeunes autour de

revendications ethniques.

Faiblesse de l’Etat. Lřincapacité de lřEtat congolais à jouer son rôle de gestionnaire des affaires

sociales et dřarbitre impartial dans les conflits sociaux représente un leitmotiv dans la littérature et

dans les analyses politiques. Souvent surnommé « Etat fantôme » ou « prédateur», lřEtat congolais

nřa, depuis lřindépendance, jamais été capable dřétablir des institutions solides qui pourraient

aujourdřhui agir comme un contrepoids aux groupes armés. L'armée et la police ne sont pas

suffisamment formées, équipées ou payées, et sont souvent les responsables de tracasseries plutôt

que les protecteurs de la population. On observe une « privatisation » généralisée des fonctions de

lřEtat, et les services sociaux sont fournis presque exclusivement par des agences onusiennes ou des

14 Sur la question identitaire, voir en particulier Jackson, 2006 ; Vlassenroot, 2002 ; Willame, 1997. 15 Sur le rôle des richesses minières dans le financement des conflits au Congo, voir Kippin, 2008 ; Global

Witness, 2005, 2006, 2009 ; Human Rights Watch, 2005 ; Pourtier, 2004 ; United Nations, 2001, 2002, 2008.

22 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

ONG internationales. Dřune certaine manière, les groupes armés jouent une fonction quasi-étatique

dans leurs zones de contrôle et comblent ainsi le vide créé par lřabsence de lřEtat.16

Soutien des pays voisins. Le « facteur régional » est une des dimensions les plus analysées des

conflits dans lřEst du Congo Ŕ en particulier le rôle joué par le Rwanda et lřUganda, et, dans une

moindre mesure, le Burundi. Des individus influents au sein du gouvernement rwandais sont

soupçonnés dřavoir de forts intérêts politiques et économiques et miniers au Nord et au Sud Kivu,

tandis quřils justifient leur assistance par leur devoir de défendre la population Tutsi des attaques

des autres communautés et de prévenir un nouveau génocide.17

Alors que lřhistoire des conflits diffère quelque peu dans les trois provinces qui ont fait lřobjet de cette

étude, les principaux facteurs sont très similaires: une compétition constante et croissante pour lřaccès à la

terre, imbriquée avec une manipulation des identités ethniques à lřépoque coloniale et postcoloniale. Dans

tous les cas, la situation a été déstabilisée encore davantage par les intérêts politiques et économiques des

pays voisins.18

4.3 STRATEGIES DE CONSTRUCTION DE LA PAIX DANS LřEST DE LA RDC

Lřaccord de paix conclu en 2002 à Sun City, Afrique du Sud, a mis fin à la guerre de 1998, dite

« deuxième guerre du Congo », et a ouvert la voie à une transition démocratique, sans cependant arrêter la

violence dans les provinces de lřEst du pays. A partir de la fin 2007, une série de stratégies de construction

de la paix ont été adoptées et mises en œuvre (voir Encadré 3 pour une synthèse).

16 Pour une analyse récente du rôle de lřEtat congolais, voir Trefan, 2009. 17 Sur le poids de la dimension régionale dans les conflits au Congo, voir Eriksen, 2005 ; Mathieu-Willame,

1999 ; Prunier, 2009. 18 Voir lřannexe 1 pour un aperçu des causes des conflits dans lřEst de la RDC. Voir aussi PNUD/CPAP,

2008a ; 2009.

Encadré 3 : Initiatives politico-diplomatiques pour la paix dans l’Est de la RDC

Communiqué conjoint de Nairobi (Novembre 2007). Adopté par le Gouvernements de la RDC et du

Rwanda, le Communiqué engage les deux pays à collaborer contre les « groupes armés dřorigine

étrangère » et notamment les FDLR.

Conférence pour la Paix, la Sécurité et le Développement (Janvier 2008). La Conférence, tenue à Goma

avec la participation des principaux groupes rebelles actifs dans le Nord et le Sud Kivu (à l'exception des

FDLR), a abouti à lřadoption dřun Acte dřEngagement, qui engage les parties à une cessation immédiate des

hostilités sur toute l'étendue des deux provinces, le Nord et le Sud Kivu, et à s'abstenir de commettre des

actes nuisibles à la paix et à la sécurité.

Programme Amani (lancé en Janvier 2008). Le Programme Amani (ou Ŗpaixŗ en Swahili) est une initiative

du gouvernement congolais ayant comme objectif dřaccompagner le processus politique et de jeter les bases

pour la sécurisation, la pacification et la reconstruction des provinces du Nord et du Sud Kivu.

United Nations Security and Stabilization Support Strategy (UNSSSS, initié en Juillet 2008). LřUNSSSS,

dont lřidée originelle était conçue même avant la Conférence de Goma comme « stratégie de sortie » de la

MONUC, constitue un programme intégré des Nations Unies pour renforcer la sécurité, promouvoir la

restauration de lřEtat et créer les conditions dřun développement durable dans des endroits clés de lřEst de

la RDC affectés par les conflits, notamment dans le district de lřIturi, dans les provinces du Nord et du Sud

Kivu, dans la province du Maniema et dans le Nord de la province du Katanga. LřUNSSSS sřarticule autour

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 23

Ces initiatives politico-diplomatiques nřont pas pour autant arrêté les conflits dans lřEst de la RDC. Au

Nord Kivu, la violence a de nouveau éclaté en août 2008, et encore en novembre de la même année,

lorsque le CNDP a saisi de larges terrains dans les territoires de Masisi et Rutshuru et a avancé jusquřaux

portes de la ville de Goma. Le lancement d'une opération militaire conjointe de la RDC et du Rwanda contre

les FDLR (opération Umoja Wetu, ou « notre unité » en swahili) au début de lřannée 2009, et l'arrestation

par les forces rwandaises du leader du CNDP, Laurent Nkunda, ont une fois de plus suscité l'espoir d'un

avenir plus pacifique. Toutefois, dřaprès de nombreux observateurs, lřopération Umoja n'a pas résolu le

problème des FDLR, mais lřa simplement déplacé ailleurs. La majorité des forces des FDLR se sont éparpillées

dans les forêts de Walikale et du Lubero et surtout au Sud Kivu, provoquant une augmentation de l'insécurité

dans la partie nord de la province (surtout dans les territoires de Shabunda et Kalehe, et dans une moindre

mesure au Mwenga et Walungu).

Lřimpact de ces initiatives a été limité pour lřinstant en raison de deux contraintes majeures. En premier

lieu, les stratégies de construction de la paix à ce jour se sont penchées presque exclusivement sur la question

des groupes armés. Elles prônent une solution militaire et comptent sur les alliances avec les puissances

régionales (Rwanda et Uganda), adoptant de facto leurs intérêts dans la poursuite des FDLR. Pourtant, les

conflits dans lřEst de la RDC sont beaucoup plus complexes et profondément enracinés dans des enjeux

locaux liés à la compétition pour le contrôle des terres et dřautres ressources ainsi que le pouvoir politique.

Deuxièmement, l’attention portée à ces conflits au niveau local a été insuffisante, et les efforts dans ce

domaine ont été sur une moindre échelle et de façon peu systématiques. En ce qui concerne les programmes de

réconciliation et de construction de la paix, le niveau local ou « micro » des conflits est resté largement le

domaine des organisations de base locales, parfois soutenues par des acteurs internationaux. Toutefois, ces

interventions sont typiquement menées à petite échelle, avec peu de perspectives de durabilité, et sans

structure organisationnelle stable ou stratégie de long terme. Par exemple, alors quřil y a une pluralité

dřefforts de « médiation » et de « résolution informelle des conflits » autour des questions foncières, on ne

retrouve pas de stratégie cohérente à travers les provinces pour aborder ces conflits. Il est donc révélateur

que lřon vienne juste de commencer, en 2009, à travers quelques programmes du PNUD et de lřUNHCR en

collaboration avec lřUN Habitat, à aborder les questions épineuses des conflits autour de lřaccès à la terre,

ou pour la succession au pouvoir coutumier.

4.4 IMPLICATIONS POUR LE PEAR PLUS

Sur la base de cette analyse des causes des conflits en RDC, nous pouvons entamer une réflexion sur le

rôle que le PEAR Plus pourrait jouer et comment il pourrait se situer par rapport aux deux niveaux, le micro

et le macro, et aux deux dimensions du Řne pas nuireř et de la construction de la paix. Le tableau suivant

offre une telle réflexion sur la contribution potentielle du PEAR Plus dans les tentatives de mitigation ou de

résolution des conflits :

de 4 composantes Ŕ la sécurité, la restauration de lřautorité de lřEtat et le retour des réfugiés et déplacés et

la relance communautaire.

Plan de Stabilisation et Reconstruction de l’Est de la RDC (STAREC, lancé en juin 2009). Le STAREC vise à

la consolidation des acquis des opérations militaires, le rétablissement de lřautorité de lřEtat, la sécurisation

des populations civiles, lřintégration des déplacés et réfugiés et la relance économique à lřEst . Le plan, avec

une durée initiale de six mois, comprend 3 composantes (sécuritaire, humanitaire et sociale, et de

stabilisation et relance économique). Il couvre le Haut Uele, lřIturi, le Nord et Sud Kivu, le Maniema et le

Nord Katanga. Le STAREC prend comme point de départ lřUNSSSS, dans une perspective dřappropriation

nationale. Les priorités de lřUNSSSS sont étendues pour couvrir dřautres zones géographiques au delà des

« axes prioritaires » et dřautres secteurs dřintervention au delà des composants de lřUNSSSS. LřUNSSSS va

être ajusté pour devenir un cadre dřappui au STAREC.

24 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Tableau 3 : Causes des conflits et impact potentiel des interventions PEAR Plus

Causes

Contribution potentielle du PEAR Plus

Niveau ŘMicroř Niveau ŘMacroř

Ne pas nuire Construction de la

paix Ne pas nuire

Construction de

la paix

Problématique

foncière Impact direct Impact indirect Impact direct Impact indirect

Crise de l’autorité

coutumière Impact direct Non Non Non

Méfiance

interethnique Impact direct Impact direct Impact direct Impact indirect

Richesses minières

Non Non Non Non

Main d’œuvre pour la

violence Impact direct Impact direct Impact indirect Impact indirect

Faiblesse de l’Etat

Impact direct Impact indirect Impact direct Impact indirect

Soutien des pays

voisins Non Non Non Non

Comme indiqué dans le tableau, le PEAR Plus (en vertu de son mandat et de ses domaines d'activités)

n'a pas d'impact lřesprit direct sur plusieurs dimensions clés concernant les conflits en RDC. Il faut garder à

cette considération, pour être conscients de ce qui est réaliste dans le cadre du PEAR Plus.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 25

5. Résultats de lřEtude

ette section donnera un aperçu des principaux résultats de cette étude dřévaluation du programme

PEAR Plus et discutera leurs implications pour la sensibilité aux conflits du programme dans lřavenir.

5.1 SYNTHESE DES PRINCIPAUX RESULTATS

Cinq observations majeures sont ressorties de cette étude: la non-prise en compte de la sensibilité aux

conflits dans la conception du PEAR Plus ; le manque de données et dřanalyse systématique des conflits ; le

contournement des zones conflictuelles; la manière improvisée du PEAR Plus de traiter les conflits locaux ; et

les défis liées à une méfiance généralisée de lřaction humanitaire de la part de la population et des

autorités.

Résultat 1: La sensibilité aux conflits n’a pas été prise en compte dans la conception du PEAR Plus

Le PEAR Plus est un programme de transition dřune situation dřurgence à des solutions plus durables pour

faciliter la réintégration des rapatriés récents dans leurs communautés dřorigine. Par sa nature, il aborde

donc les conséquences des conflits et non leurs causes. Dřaprès les acteurs impliqués dans la conception du

programme, la question de comment le programme pourrait aborder les conflits ou si le programme serait

sensible aux conflits nřa pas explicitement fait lřobjet des discussions programmatiques initiales.

Par conséquent, au niveau du principe de Řne pas nuireř, la formulation du projet nřa pas prise en

considération la possibilité que le PEAR Plus puisse avoir des conséquences négatives sur les dynamiques des

conflits, ni au niveau micro ni au niveau macro. Même si quelques interlocuteurs lors des interviews ont

mentionné le concept de Řne pas nuireř, ils ont admis que le concept nřavait pas été pris en compte dans la

conception du programme.

La réconciliation et la construction de la paix ont été identifiées comme objectifs transversaux dans le

document programmatique originel du PEAR Plus.19 Le document indique également que lřUNICEF utiliserait

les analyses des conflits déjà menées par dřautres acteurs (par ex. le PNUD) pour identifier des activités qui

pourraient contribuer de manière significative aux objectifs de construction de la paix et de la réconciliation

communautaire. Au cours des consultations, il nřy avait pas dřindication quřune analyse approfondie des

19 Voir UNICEF, 2008b: 20.

C

26 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

conflits ait été systématiquement utilisée dans lřélaboration du PEAR Plus. Le document programmatique

précise également que l'UNICEF utilisera des groupes de bénéficiaires (ex : femmes, jeunes) comme « agents

de paix », avec des interventions programmatiques ciblées. Ainsi, lřéducation à la paix reste la seule activité

dans le PEAR Plus qui vise spécifiquement la construction de la paix, attaché au volet éducation.

La contribution à la mitigation voire résolution des conflits du PEAR Plus est indirecte, à travers son

apport à la construction de la paix globale dans le cadre de lřUNSSSS. Selon la logique de lřUNSSSS, le

pilier Řrelèvement précoceř (Řearly recoveryř) est un des quatre éléments clés pour arriver à la stabilisation

de la RDC, notamment les volets politique, sécuritaire, et la restauration de lřautorité de lřEtat. La logique

derrière ce raisonnement est simple : sans retour dans leurs zones dřorigine et sans quřils y trouvent des

moyens de survie et une infrastructure de base incluant lřaccès à lřeau potable, une éducation pour leurs

enfants et une couverture médicale minime, les rapatriés ne vont pas rester dans leurs milieux dřorigine, mais

plutôt migrer vers dřautres zones ou ces services de base existent, ce qui accroîtrait les tensions dans ces

zones, souvent déjà fortement peuplées et permettrait aux groupes armés de contrôler les zones rurales plus

facilement.

Tableau 4 : Le PEAR Plus et la Sensibilité aux Conflits

Ne pas Nuire Construction de la Paix

Niveau

« micro »

Pas systématique dans la conception du

programme

Improvisée dans lřaction du terrain

Pas systématique

Seule intervention de construction de la

paix : Education à la paix

Niveau

« Macro »

Pas dřattention explicite au principe « ne

pas nuire »

Supposition dřune relation

« automatique » entre réintégration et

construction de la paix

Résultat 2 : Le PEAR Plus manque de données et d’analyse systématique des conflits

Les informations pertinentes sur les dynamiques conflictuelles dans les communautés dřintervention

recueillies par le monitoring protection ainsi que par les MSA ont été suffisantes pour informer les

responsables et agents du terrain du programme PEAR Plus pour une exécution efficace de leurs activités.

Pourtant, même si le PEAR Plus opérait dans les zones de tensions intercommunautaires, les informations

récoltées actuellement sur les conflits dans le cadre du monitoring protection et des MSA ne seraient pas

suffisantes pour un engagement actif dans la construction de la paix. Pour cela, il faudrait des informations

plus détaillées à tous les niveaux : sur les acteurs Ŕ individus et groupes Ŕ leurs intérêts, les localités, la

nature exacte des conflits, une brève histoire des tensions existantes ainsi que des tentatives précédentes de

résolution des conflits. Le monitoring protection, qui sřest concentré sur les manifestations des conflits,

notamment la situation sécuritaire, la présence de groupes armés, et les incidents de violations des droits

humains, et les MSA sur la situation humanitaire, ne sont pas en position de fournir des renseignements

détaillés sur les causes des conflits.

La façon dont les informations sont recueillies et la qualité des données qui sont disponibles pour les

responsables des programmes et qui influencent la stratégie programmatique et la mise en œuvre des

programmes PEAR et PEAR Plus, ont un impact sur la sensibilité aux conflits desdits programmes sur plusieurs

niveaux. Dřabord, si les informations sur les dynamiques conflictuelles sur place ne sont pas correctes, soit

parce quřelles sont incomplètes, soit parce quřelles ne sont plus dřactualité, lřassistance peut facilement mettre

les bénéficiaires en danger, en faisant des cibles pour les groupes armés. Cette situation mettrait également

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 27

en danger les agents de terrain des ONG partenaires. De plus, le ciblage de certaines zones et populations

à lřexclusion des autres est souvent interprété comme une prise de position en faveur dřune communauté au

détriment des autres groupes et pourrait entraîner des hostilités contre les ONGs ou leurs employés. En tout

état de cause, il nřest jamais avantageux pour une ONG humanitaire ou de développement dřêtre perçue

comme partiale, car cela rend son aide moins efficace, et rend également la tâche des organisations à

contribuer à la construction de la paix plus difficile, voire impossible.

Cette information sur les conflits existe, cependant, souvent auprès des agents de terrain des

organisations partenaires du PEAR et PEAR Plus, certains dřentre eux, surtout ceux dont la base

opérationnelle est proche ou dans les communautés dřintervention, étant familiers des dynamiques

conflictuelles locales. Il faudrait donc créer un forum ou un mécanisme pour mieux capturer cette information

de manière systématique et analytique pour instruire la conception et la mise en exécution des programmes

de réconciliation ou de mitigation des conflits locaux. Dans ce contexte, certains aspects du programme

CDR/Tuungane de lřIRC au Sud Kivu pourraient servir de modèle pour une collecte de données rigoureuse

avec la collaboration des communautés dřintervention et sous supervision de chercheurs internationaux.

Pourtant, même le programme CDR se concentre principalement sur lřimpact des interventions sur les

Encadré 4 : Instruments clés de collecte des données sur les conflits

Les évaluations multisectorielles Ŕ mieux connues sous leur acronyme anglais MSAs (Multi-Sectoral

Assessments) Ŕ sont une des composantes-clé du programme PEAR. Elles offrent une description détaillée des

besoins humanitaires dans les zones concernées. Les résultats des MSA sont partagés avec les organisations

membres du Cluster retours et relance communautaire au niveau provincial et national pour mieux cibler les

interventions des acteurs humanitaires et pour fournir une base pour le suivi de lřassistance donnée. La

plupart des MSA sont disponibles en ligne sur la page web du PEAR et ainsi sont accessibles à tous les

autres acteurs humanitaires (www.pear.cd) . En dehors des MSA « standards », les partenaires du PEAR

mènent aussi des évaluations rapides, dans la foulée dřune crise, dès que la situation sécuritaire permet

lřaccès à la zone. Les partenaires du PEAR ont mené 862 évaluations rapides et 198 évaluations

multisectorielles dans 940 localités de lřEst de la RDC depuis novembre 2006.

Le monitoring protection est un outil de renseignement et de collecte des données sur la situation sécuritaire

et le respect des droits des déplacés sous lřégide du Haut Commissariat pour les Réfugiés pour le compte du

Cluster protection du système des Nations Unies. Le HCR a contracté plusieurs ONG internationales et

congolaises pour la mise en œuvre de la collecte systématique et continue de données sur la protection des

civils, surtout des enfants et des femmes (voir tableau ci-dessous).

Les zones évaluées sont choisies par le Cluster en fonction des besoins dřinformation sur la situation

sécuritaire et des droits humanitaires dans des secteurs spécifiques, y compris les zones de déplacement et

de retour. Chaque analyse est composée dřun « scoring » quantitatif, mais aussi dřune analyse narrative. Les

données sont collectées sur la base dřun questionnaire qui, en quelques questions, essaie de donner un

aperçu global de la situation sécuritaire actuelle et de lřéventualité que la contrée reste calme à lřavenir. Le

score de Řdurabilitéř (entre 0 et 16) comprend des informations sur la présence des autorités de lřEtat, des

groupes armés, sur les relations entre les groupes armés et sur la possibilité dř opérations militaires.

Organisations chargées de collecte des données :

PEAR – MSA Monitoring Protection

Ituri Solidarités Oxfam Quebec

Nord Kivu NRC NRC

Sud Kivu AVSI Arche dřAlliance

Pain pour les Déshérités.

28 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

indicateurs humanitaires et de développement socio-économique et non sur les dynamiques conflictuelles

locales.

Résultat 3 : Le PEAR Plus contourne les zones des conflits pour travailler dans les zones sans

conflits majeurs

Le processus de prise de décision pour sélectionner les zones dřintervention du programme est tel quřune

combinaison des priorités de sécurité et de durabilité triomphe sur les critères humanitaires et sur dřautres

critères, comme la gravité des tensions intercommunautaires. Par conséquent, un des résultats cruciaux de

cette étude est la conclusion que le PEAR Plus « contourne » (voir encadré 5 ci-dessous pour une explication

du concept) les zones aux conflits aigus et travaille dans des zones largement pacifiées, sans tensions

interethniques majeures.

Une exception à cette stratégie actuelle qui évite les zones conflictuelles pourrait être lřaxe Fizi-

Minembwe dans le Sud Kivu. Lors des consultations menées par lřéquipe au Sud Kivu en juillet 2009,

lřUNICEF entretenait des réflexions sur la possibilité de choisir cet axe prioritaire de lřUNSSSS comme zone

dřintervention du PEAR Plus. Depuis, selon les responsables de lřUNICEF, des discussions ont eu lieu avec lřIRC

au Sud Kivu pour explorer comment intervenir dans ces zones. Ceci serait un développement significatif, car

la zone comprend une population importante de Banyamulegwe qui, jusqu'à présent, a été largement exclue

de l'assistance humanitaire.

Critères de sélection des zones dřintervention du PEAR Plus

Les zones dřintervention du PEAR Plus ont été choisies en fonction de plusieurs critères et en plusieurs

étapes. Au cours de cette étude, il est apparu que les opinions sur la hiérarchisation des critères de sélection

des zones divergent parmi les différents acteurs du PEAR Plus.

Encadré 5 : Conflits et Interventions

Le chercheur britannique Jonathan Goodhand propose un schéma de trois façons dont les interventions

extérieures pourraient agir sur les dynamiques conflictuelles :

Contourner les conflits («working around conflict») : Les bailleurs évitent de traiter des conflits ou les

traitent comme une externalité négative quřils ne peuvent pas influencer… Dans les lieux où il y a conflit

ouvert, les bailleurs retirent leur soutien et arrêtent les programmes dřassistance au développement.

Travailler dans les conflits («working in conflict») : Les bailleurs acceptent quřil est nécessaire dřêtre plus

sensible aux dynamiques conflictuelles et adoptent des stratégies et programmes appropriés…Ces

programmes ne sřattaquent pas aux conflits à court terme, mais pourraient réduire la prédisposition aux

conflits du pays dřintervention.

Travailler sur les conflits («working on conflict») : Cela nécessiterait une concentration explicite sur la

gestion et la résolution des conflits. Cela entraînerait également des programmes qui sřattaquent en même

temps à la cupidité des individus et aux injustices qui motivent les rébellions, par le biais de programmes

qui limitent les opportunités de sřenrichir comme les lois et régulations internationales, des conditions

attachées à lřassistance extérieure ou la création dřopportunités de générer des revenus alternatifs pour

ceux qui ont profité des conflits.

Goodhand, Jonathan. 2001. Violent Conflict, Poverty and Chronic Poverty. Manchester,UK: Chronic Poverty

Research Center Working Paper 6, May 2001. Disponible au http://www.chronicpoverty.org/uploads/

publication_files/WP06_Goodhand.pdf

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 29

Parmi les critères de sélection des zones dřintervention mentionnées lors des entretiens avec les acteurs

du PEAR Plus, on trouve les suivants :

Situation sécuritaire

Localisation sur les axes prioritaires de lřUNSSSS ;

Fort degré de Ŗdurabilitéŗ des retours

Retours nombreux, vulnérabilité de la population et besoins humanitaires urgents

Précédentes activités du PEAR y compris MSA et distribution NFI

Même sřil est vrai que tous ces critères jouent un rôle dans la prise de décisions sur les milieux

dřintervention du PEAR Plus, il nřy a pas de hiérarchisation claire entre les critères, ce qui a contribué à la

priorisation de critères divergents entre les provinces et les zones PEAR Plus.

Situation sécuritaire

Evidemment, les zones potentielles dřintervention doivent être accessibles physiquement et, surtout, au

niveau de la sécurité. Etant donné lřinstabilité latente ou ouverte dans plusieurs régions de lřEst de la RDC, les

interventions PEAR Plus (et même les interventions PEAR) ne sont envisageables que dans les zones largement

sécurisées, cřest-à-dire sans combats ou groupes armés actifs et sans hostilités récentes ouvertes.

Il faut noter que lřUNICEF a été très consciente du risque que lřétablissement du PEAR Plus dans un

endroit en particulier pourrait donner à la population déplacée une fausse assurance de sécurité, et donc

encourager les retours dans des zones encore très dangereuses pour la population. Ce risque a été

particulièrement présent au Nord Kivu, par rapport au Sud Kivu et à lřIturi. Pendant les entretiens conduits à

Goma, plusieurs représentants des agences humanitaires ont déploré la tendance du gouvernement et de la

MONUC à déclarer « sécurisées » des zones qui sont encore à haut risque de violence. Selon plusieurs

interlocuteurs, cette tendance serait aussi le résultat de la volonté des bailleurs de passer à une phase

« post-conflit », en dépit de la persistance de tensions et de la présence de groupes armés dans de

nombreuses contrées du Nord Kivu.

Localisation sur les axes prioritaires de l’UNSSSS

Dřaprès le document programmatique du PEAR Plus, le programme sřinscrit explicitement dans le cadre

du plan de stabilisation des Nations Unies, et il y a une perception parmi les différents acteurs du PEAR Plus

que le choix des zones dřintervention du programme serait prédéterminé dans le sens où elles devraient être

localisées sur les axes prioritaires définies par lřUNSSSS.20 Dans le même temps, il y a un souci de la part

de lřUNICEF de maintenir un Ŗespace humanitaireŗ pour le programme, sans dépendre dřune manière trop

directe des priorités politiques et diplomatiques et de sřassurer que lřassistance est donnée aux rapatriés

seulement quand la situation est durable. Cette tension crée une certaine confusion en ce qui concerne la

sélection des sites d'intervention.

En réalité, la quatrième composante de lřUNSSSS (Retour et Réintégration) nřest pas forcément liée aux

axes prioritaires. Parmi les critères de sélection des lieux dřintervention énumérés dans le document UNSSSS,

on trouve les suivants21 :

Zones pacifiées sans combats ;

20 Les axes prioritaires définies par lřUNSSSS sont les suivants : Ituri : axe Bunia-Gety-Boga ; Nord Kivu :

axes Masisi-Sake et Rutshuru-Ishasa ; Sud Kivu Ŕ axes Bukavu-Hombo, Bukavu-Walungu-Shabunda, et Fizi-Minembwe. 21 Voir UNSSSS Integrated Strategic and Programmatic Framework - Component 4: Return, Reintegration

and Recovery, Draft of 14 June, 2008, p. 5.

30 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Zones déclarées Řdurablesř par le «monitoring protection » ;

Zones dans lesquelles les conflits risquent de rebondir à cause de la circulation continue des armes,

dřun fort taux de criminalité et des tensions entre groupes ethniques ;

Zones à proximité des conflits en cours (à moins de 100km) ;

Zones qui font parties des localités prioritaires identifiées par le Cluster Retour et Relance

Communautaire.

LřUNSSSS permet donc aux agences de lřONU de choisir des zones qui correspondent à une multitude

de critères. Ce sont des critères assez similaires aux principes établis par le PEAR Plus, avec un accent plus

prononcé sur lřimportance de choisir des zones « à risque » dans lesquelles les conflits pourraient rejaillir

dans lřavenir sans intervention de réconciliation et de construction de la paix.

Si on regarde les zones dřintervention de la phase pilote du PEAR Plus, cřest seulement dans le Sud Kivu

quřelles se trouvent autour des axes prioritaires de lřUNSSSS. En Ituri et au Nord Kivu, les zones

dřintervention du PEAR Plus sont très éloignées des axes prioritaires.

Fort degré de “durabilité” des retours

Lřévaluation rapide de monitoring protection est, la plupart du temps, la première étape dans le

processus de détermination des zones où intervenir dans le cadre des programmes PEAR et PEAR Plus.

Les zones évaluées par les agences de monitoring protection sont choisies par le cluster en fonction des

besoins dřinformation sur la situation sécuritaire, des droits humains et humanitaires dans des secteurs

spécifiques, y compris dans les zones de déplacement et les zones de retour. Chaque évaluation est

composée en partie du « scoring » quantitatif, mais aussi dřune analyse narrative pour donner plus de

détails sur la situation sécuritaire et de protection non capturée par les indicateurs numériques.

Au Nord Kivu, le monitoring protection est utilisé de manière systématique pour la détermination des

zones dřintervention du PEAR et par conséquent du PEAR Plus 22 . Au Sud Kivu, à cause du système de

monitoring protection sur la base de rapports continus des agents de terrain, les décisions sur la priorisation

des zones dřintervention sont basées moins sur des critères numériques que sur des jugements subjectifs des

agents de terrain et des partenaires de protection.

Par rapport à la sensibilité du PEAR Plus aux conflits, les zones priorisées par le PEAR sont les zones les

plus Řdurablesř. Par exemple, au Nord Kivu, les interventions PEAR de la NRC se sont concentrées tout

dřabord sur le territoire de Beni, qui a été pacifié depuis 2003 et nřa pas été touché par la campagne du

CNDP depuis 2007 et nřest pas non plus un refuge important pour les FDLR. Le territoire est majoritairement

Nande et ne connaît pas de conflits autour de lřoccupation des terres ou du contrôle des ressources minérales

comme les territoires du ŘPetit Nordř (Masisi, Rutshuru, Walikale). Par conséquent, le territoire de Beni a

également été choisi comme première zone cible du PEAR Plus.

Evidemment, dans un programme de transition qui est bâti sur un engagement des communautés comme

le PEAR Plus, il faut un degré de stabilité dans les communautés ciblées qui permette la réalisation dřune

vision à moyen ou plus long terme. La mise en œuvre dřun programme de relance communautaire comme le

PEAR Plus serait difficile ou même impossible dans des zones aux tensions aiguës. Pourtant, en évitant non

seulement les zones Řchaudesř, cřest-à-dire les zones de tensions accrues ou de présence des groupes armés,

mais aussi dans des zones où on trouverait des tensions intercommunautaires ou des conflits fonciers, le PEAR

Plus sřest privé dřune opportunité dřavoir un impact positif sur la mitigation des conflits et la réconciliation

intercommunautaire.

22 Plus précisément, le programme PEAR interviendra dans les zones qui auront au moins un score de

durabilité de 9. Les zones aux scores entre 9 et 12 recevront une intervention PEAR light et les zones aux scores entre 13 et 15 auront une intervention PEAR. Seulement les zones les plus durables, cřest-à-dire qui atteignent un score de 16, seront considérées pour une assistance dans le cadre du Programme PEAR Plus.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 31

Retours nombreux, vulnérabilité de la population et besoins humanitaires urgents

Pour les cadres de lřUNICEF impliqués dans la conception du PEAR Plus, la priorité dans le choix des

zones dřintervention avait été donnée aux zones à forts retours récents et aux zones ayant des indicateurs

humanitaires préoccupants, sur la base dřinformations fournies par les MSA existants. Pourtant, malgré les

efforts pour donner priorité aux critères de retour et de besoins humanitaires urgents, il reste un certain

nombre de questions sur la mise en application de ces critères à définition souple.

Premièrement, le concept de Řretourř est un concept bien flou dans un contexte dřinstabilité récurrente,

où les déplacements sont fréquents et où les civils sont des déplacés internes un jour et deviennent des

rapatriés le lendemain quand la situation sřest calmée. Les concepts de Řdéplacésř et de Řrapatriésř sont

particulièrement difficiles à appliquer dans les cas où les déplacés restent dans les alentours de leurs

communautés dřorigine ou dans des familles dřaccueil dans les milieux urbains. De la même manière, il nřest

pas toujours évident de savoir si on peut classer comme Řrapatriésř les personnes qui ont migré dřun endroit

de déplacement dans une localité près de leur communauté dřorigine, mais quřon empêche de rentrer dans

leur village dřorigine à cause de lřoccupation de leurs maisons ou de leurs terres ou même à cause de la

présence persistante de groupes armés. Dans de telles situations, le ciblage des ménages de « retours

récents » par rapport à dřautres ménages peut être controversé et peut provoquer de nouvelles tensions

entre les rapatriés récents et ceux qui sont restés sur place ou qui sřétaient réinstallés il y a plus longtemps.

Ainsi la situation que lřéquipe dřévaluation a rencontré sur le terrain dans les zones PEAR Plus actuelles

(en Ituri) ou prospectives (au Sud Kivu) reflètent cette ambiguïté du concept de retour. Tandis que les

responsables de lřUNICEF nous ont assuré que les zones ont été choisies en grande partie à cause de la

présence importante de rapatriés récents, les interlocuteurs dans les communautés déclaraient que la

majorité de la population était rentrée il y a deux ou trois ans déjà. Cette information était également en

contradiction avec les renseignements trouvés dans les MSA.

Deuxièmement, la question de lřacuité des besoins humanitaires est marquée par la même ambiguïté.

Malgré les affirmations des responsables du PEAR Plus que les zones ciblées étaient choisies en fonction des

besoins humanitaires accrues, la réalité sur le terrain ne semble pas toujours valider ces propos. Même une

analyse superficielle de la totalité des MSA menés dans lřEst de la RDC démontre clairement quřil y a des

besoins humanitaires plus urgents dans dřautres groupements et territoires que ceux choisis par le PEAR

Plus.23

Cela indique quřil y a bien dřautres critères, notamment les questions de sécurité et de durabilité, qui ont

guidé la prise de décision sur les lieux dřintervention. On peut donc conclure que parmi toutes les zones

dřintervention du PEAR, celles où coïncident un environnement politique et militaire stable, un fort taux de

retour et des besoins humanitaires urgents ont été sélectionnées pour les interventions du PEAR Plus.

Lřargument ici nřest pas de trancher sur la question si une région mérite des interventions plus quřune autre,

mais juste de démontrer que lřautomatisme invoqué par les acteurs du PEAR Plus dans la sélection des zones

dřintervention sur la base de critères apparemment objectifs cache un choix plus ou moins précis dřintervenir

dans certaines zones et non dans dřautres.

Activités PEAR précédentes

Le PEAR Plus nřintervient que dans les zones dans lesquelles le PEAR a déjà été actif. Par conséquent, le

premier triage des zones dřintervention possibles a déjà eu lieu lors du programme PEAR initial, cřest-à-dire

des évaluations multisectorielles ainsi quřune distribution des non-vivres ont déjà eu lieu au moment où le

PEAR Plus commence ses activités dans une communauté.

23 Par exemple, il faudrait juste comparer les indicateurs humanitaires des MSA menés dans les territoires de

Shabunda ou de Fizi et le territoire de Walungu.

32 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Activités existantes des partenaires exécutifs

Dans certaines régions, il y a dřautres critères qui ont été invoqués pour, entre autres, justifier le choix

des zones dřintervention. Notamment, au Sud Kivu, les zones dřintervention proposées par lřIRC figurent

parmi les zones dřactivités du programme Community-Driven Reconstruction/Tuungane déjà en cours. Selon

les responsables de lřIRC, les communautés les plus performantes pendant les étapes précédentes du

programme ont été choisies pour les interventions du PEAR Plus. Cela veut dire que, malgré le fait que les

zones choisies semblent plus ou moins conformes aux critères multiples de sélection des zones dřintervention

du PEAR Plus, le choix des zones dřintervention suit une logique propre aux programmes de lřIRC plutôt

quřune logique imposée par lřUNICEF ou le PEAR Plus.

Conclusion

On en conclut donc que la sélection des zones dřintervention du PEAR Plus est issue de multiples logiques

suivant une chaîne de prise de décision illustrée ci-dessous :

A la fin de cette chaîne de prise de décision, le choix des zones a été réduit aux zones les plus sécurisés

et les plus durables, cřest-à-dire au final des zones dans lesquelles on ne trouve pas de conflits

intercommunautaires ni dřautres conflits ouverts.

La perception exprimée par plusieurs acteurs clés du PEAR Plus lors de cette étude que le choix des

zones est plus ou moins prédéterminé par les contraintes extérieures et par le cadre de concertation de

lřUNSSSS et la concertation humanitaire nřest donc guère correcte.

Comme illustré par le tableau 5, la logique et les critères de sélection des zones ont varié dřune

province à lřautre, au moins dans la phase pilote du PEAR Plus :

Tableau 5 - Les aires d’intervention du PEAR Plus

Axe UNSSSS

Score de

durabilité de

16

Retour

récent Site PEAR

Gravité des

besoins

humanitaires

Zones

d’activités

existantes

des ONG

Ituri Non Oui 1 - 2 ans Oui Elevée Non

Nord Kivu Non Oui > 2 ans Oui Moyen (inconnu)

Sud Kivu Oui Oui > 2 ans Oui Moyen Oui

Ce qui est commun à toutes les zones choisies pour la phase actuelle du PEAR Plus, est que les zones sont

toutes affectées par les conséquences des guerres et violences, sans être les lieux où lřon trouverait les

dynamiques conflictuelles les plus profondes au cœur des guerres récentes dans lřEst de la RDC.

1ère étape: sécurité

• Zone déclaré sécurisé par MONUC/ FARDC

2ème étape: durabilité

• Protection monitoring:

• score de durabilité

• si durable recommandation pour MSA

3ème étape: besoins humanitaires

• PEAR

• MSA (évaluation multi-sectorielle)

• gravité des besoins humanitaires

4ème étape: préférence de l'ONG exécutive

• PEAR Plus

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 33

Pourtant, cette sélection des zones dřintervention nřest guère figée. Elle est, au moins en partie, un choix

de la part du bailleur et des organisations de mise en œuvre. Il semblerait quřils disposent dřune marge de

manœuvre plus significative quřils ne le croient dans la sélection des lieux ciblés par le programme.

Résultat 4 : Les organisations de mise en œuvre du programme traitent des conflits locaux au fur

et à mesure et sans approche systématique

Etant donnée lřabsence dřune approche systématique pour traiter les conflits, les quelques conflits qui ont

surgis dans les zones dřintervention PEAR Plus actuelles ont été abordés par les partenaires de mise en

exécution dřune manière réactive et improvisée. Utilisant leur compréhension des milieux locaux et leur

expérience dřagents de terrain pragmatiques, ils étaient bien capables de gérer la grande majorité des cas

et de résoudre les différends dřune manière acceptable pour tous (voir lřencadré 6 pour un exemple tiré de

lřexpérience du PEAR en Sud Kivu, et lřencadré 7 pour un exemple du PEAR Plus en Ituri). Il nřy avait que

quelques cas dans lesquels il paraissait difficile, voire impossible, dřenvisager une solution, parce que les

problèmes allaient au delà de ce qui pouvait être contrôlé par le projet.

Encadré 6 : Distribution des NFI au Sud Kivu

Au Sud-Kivu, une distribution de NFI ciblait deux communautés, dont une qui habite à proximité d'une route

principale, et l'autre, qui habite loin de la route. A cause du manque d'accessibilité des villages en voiture,

la distribution devait se faire sur la route principale. La communauté située plus loin devait passer par le

village de la communauté proche de la route principale.

Le personnel du PEAR craignait que cela puisse mettre la population en danger, alors qu'ils retournaient à

leur village avec les NFI. C'est pourquoi ils ont décidé de mener les deux distributions en même temps plutôt

que l'une après l'autre. Ainsi, tout le monde était occupé par la collecte de leurs articles et le risque

d'attaques était réduit.

Encadré 7: Création des points d’eau en Ituri

Les partenaires du PEAR Plus en Ituri ont signalé plusieurs cas de tensions au cours des activités de

lřaménagement des points dřeau. En particulier, ils ont fait état de plaintes par les familles qui vivaient trop

loin des points dřeau, et ne pouvaient donc pas en bénéficier. Dřaprès le personnel du PEAR Plus, ces

tensions ont toujours été calmées sans beaucoup de difficultés, avec un recours aux autorités coutumières, qui

ont convaincues les familles à accepter la localisation des points dřeau. Il nřy a, cependant, aucun moyen de

savoir si ces tensions ont été effectivement résolues ou simplement temporairement étouffées.

34 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Résultat 5 : Il y a une méfiance généralisée entre la population, les autorités et les associations

humanitaires

Lors des discussions avec les autorités, bénéficiaires, et les associations humanitaires on constate une

profonde crise de confiance entre les différents acteurs de lřaction humanitaire dans lřEst de la RDC.24

A priori, lřaction humanitaire est bienvenue parmi les populations congolaises ravagées par la guerre et

les violences successives. Pourtant, il y a un sentiment généralisé que lřassistance humanitaire est trop limitée,

partiale, et souvent ne sert que les intérêts des organisations humanitaires et de leurs employés eux-mêmes.

Parmi les bénéficiaires et la population générale, on se plaint constamment que, comparée au nombre

significatif des ONG qui opèrent dans les zones de déplacement et dřinsécurité dans les deux Kivus et en

Ituri, lřassistance qui arrive auprès des populations sur place est très limitée.

Parmi les victimes des guerres il y a une perception que cřest les organisations humanitaires eux-mêmes

qui créent ou contribuent à la création des déplacés. Lřadage Řno Nkunda, no jobř que lřon entend souvent au

Nord Kivu suggère quřil y aurait même une symbiose essentielle entre les actions du CNDP et les intérêts

présumés des organisations humanitaires à maintenir un climat dřinsécurité pour créer de nouvelles vagues de

déplacements, qui, à leur tour, aident à mobiliser davantage de fonds pour une expansion dřune véritable

industrie de lřhumanitaire.

Partout dans les zones à forte action humanitaire les bénéficiaires font état des cas de corruption ou de

népotisme dans la gestion des fonds ou des biens et matériaux destinés aux populations vulnérables par les

24 De nombreuses manifestations populaires contre la MONUC, surtout lřexplosion de colère violente occasionnelle, comme par exemple en novembre 2007 à Goma, ne sont que lřexpression la plus ouverte de cette méfiance. IRIN. DRC: Peacekeepers wounded during North Kivu protest, 5 novembre 2007; en ligne au

http://www.irinnews.org/PrintReport.aspx?ReportId=75158, accédé le 15 août 2009. 25 PNUD, 2009: 55.

Encadré 8 : Rumeurs autour de l’assistance humanitaire en Ituri

Au début de la crise en Ituri, en 1999, il y avait des rumeurs, mises en circulation par certains membres de la

communauté Hema, que lřorganisation Médecins sans Frontières (MSF) avait introduit le cholera dans le but

de tuer les enfants Hema. La situation a dégénéré rapidement, et des véhicules de MSF ont été pris en

embuscade et attaqués à coups de pierres. En conséquence, lřorganisation avait décidé de se retirer du

district en Janvier 2000.

Encadré 9 : Conclusions de l’exercice participatif d’analyse des conflits et capacités de paix dans la

province du Nord Kivu, conduit par le PNUD et la Cellule Provinciale d’Appui à la Pacification en 2008

Les consultations menées au cours de cet exercice ont porté à la surface un manque de confiance de la

population vis-à-vis de la communauté internationale (par exemple : les allégations de complicité entre la

MONUC et les groupes armés ; les accusations contre les ONG de gérer le problème des déplacés comme «

fonds de commerce » ; la méfiance vis-à-vis de la communauté internationale par rapport à lřemploi du

personnel local, etc.). Indépendamment de la fiabilité ou non de ces allégations, cette méfiance est un

obstacle qui empêche une véritable collaboration entre les acteurs internationaux et les communautés à la

base. 25

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 35

agents du terrain des grandes ONG internationales ou nationales. Selon ces témoignages, les abus prennent

des formes diverses. Parfois les vivres, non-vivres, ou matériaux de construction seraient divertis et vendus sur

les marchés locaux par les employés des ONG eux-mêmes ; parfois il y aurait connivence entre les agents

des ONG et les autorités coutumières pour une distribution aux groupes loyaux aux chefs locaux plutôt

quřaux plus démunis. Dans dřautres cas, il y aurait même un Řrecrutementř des bénéficiaires pour un partage

de lřassistance entre les humanitaires et ces bénéficiaires non-légitimes. Dans un tel climat de méfiance, les

rumeurs sur les desseins malveillants présumés de la communauté internationale circulent librement (voir

lřEncadré 8).26

A cela sřajoute un train de vie de quelques travailleurs expatriés des organisations internationales perçu

comme outrageux par les populations locales. Il y a une perception que les expatriés se promènent dans leur

Land-cruisers 4x4 pour leur propre plaisir et font la fête le soir dans les restaurants, bars, et boîtes de nuit

de Goma ou Bukavu.

Dans ce climat de méfiance généralisée, il est difficile, voire impossible pour tout programme

dřassistance humanitaire dřopérer sans contribuer aux perceptions que lřassistance humanitaire soutient

souvent les inégalités existantes et crée de nouvelles tensions plutôt que de contribuer à leur diminution ou

leur résolution. Bien que l'élimination complète de cette méfiance soit impossible, il y a cependant une

certaine marge de manœuvre pour améliorer progressivement les perceptions de la population vis-à-vis de

la communauté internationale, notamment en améliorant la transparence et la communication dans la

fourniture de l'assistance.

Il y a également un clivage profond entre les autorités de lřEtat et les acteurs humanitaires partout dans

lřEst de la RDC. Les autorités se plaignent régulièrement du manque de transparence de la part des agences

humanitaires dans la gestion de leurs budgets et souvent même dans les activités concrètes. Plusieurs

représentants de lřEtat rencontrés dans le cadre de cette enquête ont vivement critiqué les organisations

humanitaires de vouloir tout contrôler, leur propres budgets, leur programmes, les lieux dřintervention et

quřils ne sřassocient aux autorités quřau moment de lřinauguration dřune école ou dřautres infrastructures

finies mais pas dans la planification ni dans lřexécution des programmes.

Même si les autorités ont fait état des bonnes relations avec les agences internationales, ils déploraient

le déséquilibre dans la distribution de fonds entre les ONG internationales et les autorités officielles, mais

également le manque de progrès visible même dans les zones où de multiples agences internationales sont

actives. Les autorités, en général, partagent lřopinion de la population quřil y a beaucoup de gaspillage de

fonds dans les agences internationales et quřil y a un problème de détournement de fonds et enrichissement

de leur personnel. On note aussi des cas dans lesquels les agences humanitaires deviennent les Řboucs

émissairesř faciles lors des rivalités entre les différentes autorités étatiques.

Ces sentiments sont certainement partagés du côté des acteurs humanitaires, qui nřont souvent que peu

de regard pour les autorités, quřils jugent corrompues et peu compétentes et desquelles ils ont peur quřelles

souhaitent sřimmiscer dans leurs affaires pour exercer un contrôle sur leurs programmes. Cet état des choses

est préoccupant surtout par rapport au rôle clé que la reconstruction de lřEtat joue dans la stratégie de

construction de la paix de la communauté internationale. Il est difficile dřassister au renforcement de

lřautorité de lřEtat quand ses représentants sont écartés et quand ce sont les agences internationales qui

tiennent apparemment les rênes de toutes les activités de reconstruction des infrastructures et des services de

base.

26 Voir aussi IRIN, 2007.

36 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

5.2 LA SENSIBILITE AUX CONFLITS DES ACTIVITES SECTORIELLES DU PEAR PLUS

5.2.1 Education

Dřaprès le document originel du PEAR Plus, lřobjectif du secteur éducation est « [dř]améliorer la qualité

de lřéducation et lřaccès à lřéducation dans les zones de retour ». Lřaccès à lřéducation est essentiel dans une

perspective de reconstruction et relèvement précoce, considérant que les déplacés fondent souvent leur

décision de rentrer sur les opportunités disponibles pour leurs enfants de fréquenter lřécole. En même temps,

lřéducation joue un rôle important dans la prévention des conflits et dans la construction de la paix dans lřEst

de la RDC à deux niveaux :

En premier lieu, lřéducation peut contribuer à réduire le « réservoir de main-dřœuvre» des jeunes non-

qualifiés et désenchantés, sans espoir dřun meilleur avenir et prêts à se rendre aux mains des seigneurs de

guerre. Pour ce faire, cependant, il est nécessaire que les programmes dřéducation réussissent à toucher les

enfants « à risque », comme les enfants démobilisés et les enfants non accompagnés. Il est aussi nécessaire

que lřéducation reçue soit de bonne qualité et débouche sur des opportunités de travail.

En deuxième lieu, lřéducation peut, à long terme, aider à atténuer la méfiance au sein des communautés,

à inculquer aux enfants un sentiment nationaliste et à contrecarrer les mythes et stéréotypes qui, jusquřà

présent, ont nourri les tensions intercommunautaires. De même, lřéducation peut combattre les croyances qui

alimentent les violences sexuelles - par exemple, la croyance diffuse que les rapports sexuels avec une fille

vierge pourraient guérir le SIDA - ainsi que les préjugés contre les victimes de violences sexuelles.

Cependant, ces résultats positifs ne sont pas automatiques : des expériences dans des autres pays montrent

que les écoles peuvent également être au premier plan dans la promotion des discours ethniques exclusifs et

discriminatoires.

Ces éléments « préventifs » se retrouvent, dřune certaine manière, dans le document originel du PEAR

Plus. En sřappuyant sur lřexpérience de lřUNICEF en éducation à la paix, le PEAR Plus prévoit des

interventions pour accroître la sensibilisation des jeunes et adolescents sur les thèmes liés à la paix (à travers

des activités de formation, de soutien aux médias, etc.), et pour la promotion des « leaders de la paix »

parmi la jeunesse. Cependant, ces éléments nřont été repris que de manière très limitée dans le document du

programme de COOPI en Ituri, et n'apparaissent pas du tout dans la proposition de projet de l'IRC dans le

Sud Kivu.27 On constate ainsi un écart important entre lřintention originale du programme PEAR Plus et sa

mise en œuvre sur le terrain.

Alors que les documents évoquent dans des termes généraux, les enfants « vulnérables », il nřy a pas de

stratégies spécifiques pour cibler certains types de vulnérabilités et risques que lřon retrouve dans les

différentes zones de mise en œuvre, comme, par exemple, les enfants dans les carrières minières du

territoire de Djugu, en Ituri (voir encadré 9). Cette lacune risque de compromettre ou même effacer

complètement la seule composante du projet qui vise explicitement la « construction de la paix ». Surtout, en

ne sřattaquant pas aux tensions et conflits dřune manière délibérée et systématique, le projet risque de créer

un écart plus profond entre les enfants qui ont accès aux écoles et ceux qui ne sont pas en mesure dřaccéder

à lřéducation (encadré 10).

Encadré 9: Ecoles et centres de rattrapage dans le Sud Kivu

La visite dřun site du programme PEAR dans le Sud Kivu (aire de santé de Chierano) a bien démontré que

même une activité qui est apparemment simple comme la reconstruction des écoles peut renforcer lřexclusion

27 Le terme « éducation à la paix » nřest pas mentionné du tout dans le document de lřIRC. Voir International

Rescue Committee, 2009.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 37

de certains groupes, comme dans ce cas les enfants démobilisés et dř autres enfants qui nřont pas accès à

lřéducation formelle, si le programme ne fait pas un effort délibéré pour inclure tous les groupes parmi les

bénéficiaires du programme et sřil nřy a pas une attention parallèle sur les centres de rattrapage ou sur dř

autres activités pour les enfants hors de lřécole.

Pendant la visite dans lřaire de santé de Chierano, on nous a montré lřécole PEAR, qui vient dřêtre construite

près dřun centre de rattrapage. Les deux institutions ont le même directeur, mais les financements du PEAR ne

couvrent que lřécole régulière, qui est en ciment, alors que le centre de rattrapage est en paille. Le directeur

a exprimé sa crainte que cette différence puisse créer du mécontentement parmi les enfants démobilisés qui

fréquentent les cours professionnels dans la structure en paille comme ils ont déjà, dans le passé, été déçus

par des promesses dřassistance non-tenues : une ONG internationale avait commencé un programme de

formation professionnelle pour les enfants démobilisés, qui aurait dû être suivi par la distribution de Ŗkitsŗ

pour le démarrage des activités professionnelles. Le projet a été interrompu pour des raisons inconnues

après la fin de la phase de formation sans fournir les kits, ce qui a provoqué la colère des bénéficiaires, qui

ont exprimés leur colère vis-à-vis du personnel du centre.

Encadré 10 : Les enfants des carrières minières en Ituri

Dans les zones dřopération du PEAR Plus en Ituri, le travail des enfants dans les mines dřor est non seulement

un obstacle au développement de lřenfant et aux efforts de promouvoir une éducation de qualité, mais

également un risque pour la sécurité. Alors que plusieurs de ces enfants viennent des territoires avoisinants,

attirés par la chimère de la richesse facile, il y en a beaucoup qui sont originaires des localités de mise en

œuvre du PEAR Plus et qui ont quittés lřécole car leur famille nřétait pas en position de payer leurs frais de

scolarité.

En dehors des conséquences graves du travail dans les mines, les enfants sont également exposés aux

crimes, aux violences, aux drogues, à lřexploitation sexuelle et à la prostitution. Plus grave, pourtant, est le

potentiel de mobilisation pour des causes néfastes que présente ce véritable réservoir de main dřœuvre des

jeunes déshérités. Dřaprès des témoignages, nombreux dřentre eux seraient des anciens enfants-soldats ou

jeunes combattants.

À l'heure actuelle, le PEAR Plus nřa pas abordé ce problème spécifique des enfants des mines, ni dans ses

interventions dans le domaine de lřéducation ni dans les activités de protection. L'équipe dřévaluation a

appris qu'il existe un autre programme qui est en train dřêtre lancé par l'UNICEF pour aider ces enfants et

sensibiliser les communautés contre le travail des enfants. Bien quřil soit bienvenu, il est important qu'une

attention sur la question des enfants des mines d'or soit également incorporée dans le PEAR Plus. Il sřagit dř

un des défis clés pour la protection des enfants et pour la sécurisation du pays, surtout dans les communautés

où se trouvent les mines ou les groupements avoisinants.

5.2.2 Eau, Hygiène, Assainissement (WASH) et Santé28

Dřaprès le document du PEAR Plus, lřobjectif de la composante « WASH » est « dřaméliorer la santé

publique à travers la promotion de bonnes pratiques hygiéniques, et un meilleur accès à lřeau potable et

aux infrastructures sanitaires », en utilisant une version plus rapide et simplifiée du modèle « Villages

Assainis » de lřUNICEF. Lřobjectif de la composante Santé est de réduire la mortalité maternelle et

28 Il sřagit de deux composantes distinctes du PEAR Plus, mais elles sont traitées ensemble ici parce quřelles

soulèvent des questions similaires par rapport à la sensibilité aux conflits.

38 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

infantile29, principalement à travers la réhabilitation des centres de santé, des campagnes de vaccination et

de nutrition, et la distribution de moustiquaires.

Bien quřil nřy ait pas de lien direct entre ces composantes et les causes des conflits, il y a un risque de

Ŗnuireŗ au niveau micro. La présence dřinfrastructures dans certains villages peut facilement créer des

attentes (et donc des frustrations) dans dřautres villages. Ces problèmes peuvent être atténués si la

couverture des infrastructures (ex : centres de santé) est élargie pour servir les villages voisins. De telles

solutions ont été adoptées « de facto » sur le terrain à Ituri, mais il nřy a pas des directives explicites et

systématiques à ce propos.

En dehors des tensions qui peuvent surgir entre les villages, il y a aussi un risque de créer des tensions au

sein des communautés dřinterventions. Ces tensions se manifestent en particulier lors de la localisation des

points dřeau. Par exemple, dans la zone de mise en œuvre du PEAR Plus à Ituri, il y a une prolifération de

conflits autour du bornage entre localités, et même des revendications de sécessions de certaines communes

qui aspirent à devenir indépendantes. La présence dřun point dřeau est très important à cet égard parce

que il pourrait légitimer lřexistence indépendante dřune localité.

Même dans les cas où il nřy a pas de conflits de frontières ou des revendications sécessionnistes, la mise

en place de points dřeau a le potentiel dřêtre à la base de nombreuses tensions. Dans certaines localités, les

habitations sont dispersées et certains ménages nřont pas accès aux points dřeau aménagés, même sřils

figurent, en principe, parmi les bénéficiaires. Actuellement, les partenaires exécutifs du PEAR Plus nřont pas

dřapproche systématique pour aborder ce genre de conflit. Pour lřinstant, la localisation des points dřeau se

fait sur la base de critères techniques, cřest-à-dire on choisit dřaménager des points dřeau qui puissent servir

le plus de personnes possible, ainsi que sur lřopinion des autorités coutumières. Cette approche improvisée a

été utile pour résoudre un certain nombre de tensions, mais il y a aussi un risque dřabus et

dřinstrumentalisations par les chefs, autorités, ou dřautres élites locales en leur faveur.

Pour rendre les activités WASH plus sensibles aux conflits, on pourrait réviser les critères de ciblage

pour assurer que tous les ménages au sein dřune localité aient accès aux points dřeau aménagés. Ceci peut

signifier avoir plus dřun point dřeau aménagé dans certaines localités pour que tous les groupes au sein de

la communauté en bénéficient. Il sera donc important dřavoir des critères objectifs et fixes pour déterminer le

nombre et la localisation des points dřeau, et de les communiquer clairement aux bénéficiaires. Il faudrait

également avoir une politique cohérente par rapport aux tensions liées aux divisions profondes entre des

groupes au sein dřune même communauté pour ne pas attiser les revendications de sécession pour éviter que

ces revendications soient utilisées pour obtenir des points dřeau supplémentaires.

5.2.3 Protection

Dřaprès le document du PEAR Plus, lřobjectif de cette composante est de « renforcer les mécanismes de

protection pour créer un environnement propice pour la prévention de toutes formes de violence, exploitation

et abus contre les femmes et les enfants ». Comme déjà noté dans le volet éducation, on constate quřil y a

des différences entre la formulation initiale dans le document conceptuel et la réalisation par les

partenaires. Par exemple, tandis que le document PEAR Plus originel préconise une attention spécifique aux

enfants démobilisés on ne la trouve pas dans les documents programmatiques des partenaires de mise en

œuvre.

Il y a une perception généralisée dans les milieux humanitaires en RDC, dont les agences impliquées

dans le PEAR et dans le PEAR Plus, que la protection et la prévention ou la résolution des conflits sont des

concepts similaires. Lřindice le plus visible de ce point de vue est que la composante Protection traite des

questions liées aux origines et à la résolution des conflits. Ainsi, lors de lřévaluation, les interlocuteurs ont

29 « To reduce facility based maternal mortality ratio to less than 1% and under 5 mortality rates

to less than 2/10,000/day in IDP returnee areasŗ.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 39

souvent mis sur le même pied les activités de protection et de résolution des conflits, supposant quřassurer la

protection des bénéficiaires contribue automatiquement à la mitigation ou bonne gestion des conflits. Il faut

ainsi garder à lřesprit que les deux termes ne sont pas synonymes, en particulier :

La protection comme concept est concernée par un état final Ŕ la réalisation des droits individuels Ŕ

tandis que la résolution des conflits doit être concernée par un processus de négociation pour

satisfaire les intérêts de toutes les parties ;

La composante protection touche surtout aux conséquences des conflits plutôt quřaux causes ;

La composante protection vise les individus vulnérables, alors quřune composante de prévention des

conflits et construction de la paix devrait cibler toutes les catégories, dont les auteurs des violences ;

La composante protection cible exclusivement les femmes et les enfants Ŕ considérées comme les

plus vulnérables Ŕ pourtant, la composante de construction de la paix devra aussi adresser le rôle

des hommes ;

La composante « protection » nřaborde pas spécifiquement les identités communautaires ou les

conflits fonciers ou de distribution des ressources.

5.3 CONSIDERATIONS OPERATIONNELLES

La sensibilité aux conflits ne concerne pas seulement les activités mises en place, mais aussi les pratiques

opérationnelles utilisées. Un programme peut apparaître pertinent aux dynamiques des conflits au niveau de

ses objectifs et des activités prévues, et pourtant il peut avoir un impact négatif sur les conflits parce que les

modalités de recrutement et dřachat de biens des agences exécutives sont perçues comme discriminatoires

contre certains groupes ou injustes en général.

Le sujet du recrutement est particulièrement sensible dans lřEst de la RDC, où il nřy a pratiquement pas

dřopportunités de travail salarié sauf pour les agences et ONGs internationales. Il y a eu plusieurs incidents

dans lesquels les ONGs ont suscité la colère populaire, des fois même des protestations violentes, contre les

acteurs internationaux, coupables, aux yeux de la population, dřutiliser des pratiques non transparentes pour

le recrutement de leur personnel (voir lřEncadré 11)

Dans le contexte de cette étude, lřéquipe nřa pas pu examiner en détail la question des procédures de

recrutement des partenaires, actuels et futurs, du PEAR Plus. Toutes les organisations PEAR et PEAR Plus

interviewées nous ont assuré que leurs procédures sont transparentes et justes. Pour la plupart dřentre elles,

les qualifications étaient beaucoup plus importantes dans le choix du personnel du programme que dans les

critères ethniques. Pour autant, en général, leur stratégie paraît être de ne pas embaucher des personnes

issues du milieu dřintervention pour les positions de gestion et de supervision, tandis que les agents de

terrains, dont les mobilisateurs communautaires, les ingénieurs, les infirmières sont pour la plupart originaires

de ces zones dřintervention.

Il est clair, toutefois, quřil nřy a pas de stratégie formalisée pour assurer la sensibilité aux conflits dans

le recrutement ou lřachat des biens. La décision des modalités de recrutement est laissée aux partenaires de

mise en œuvre. Même si lřéquipe dřévaluation nřa pas observé de problèmes évidents dans les pratiques

actuelles, il est conseillé d'adopter une démarche cohérente pour aborder ces questions d'ordre opérationnel

dans la mise en œuvre de PEAR Plus.

Encadré 11: Recrutement du personnel des ONGs en Ituri

Lorsque la crise en Ituri a éclaté en 1999, peu dřagences humanitaires étaient présentes dans la zone. A la

suite de la crise, il y a eu une arrivée importante dřONGs (tel que lřOxfam ou COOPI) qui ont amenées du

personnel congolais originaire dřautres provinces. L'arrivée des Congolais Ŗnon originairesŗ de la zone nřa

pas bien été perçue par les locaux. Leur appartenance ethnique est devenue une question d'agitation

politique. Surtout, des leaders dřopinion Hema accusaient ouvertement la communauté humanitaire

40 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

dřimpartialité. Par exemple, un intellectuel Hema a déclaré en 2004 que la communauté internationale était

en train de mener un "génocide" contre les Hema en recrutant du personnel d'ailleurs:

L'ONU et les ONGs internationales sont impliquées dans le génocide des Hema, et dans la déstabilisation

d'Ituri. Les ONGs se comportent comme si elles vivaient dans un pays conquis, comme si Ituri était le terrain

de crypto-colonialisme. Les ONGs continuent à amener des travailleurs congolais du Kinshasa ou des Kivus,

prétendant qu'ils ne peuvent pas recruter des gens locaux parce qu'ils ont besoin dřun personnel neutre.

Dites-moi, comment quelqu'un de Kinshasa peut- être neutre lorsque le gouvernement Kabila est entièrement

responsable du conflit en Ituri?30

Bien que ces déclarations soient clairement motivées par un agenda politique identitaire, elles peuvent avoir

une influence considérable, en particulier sur les jeunes désœuvrés.

30 Entretien avec Professor Karimagi Pilo, citée par Pottier, 2006 : 162.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 41

6. Recommandations

ur la base de lřanalyse précédente et des résultats de lřévaluation, cette dernière section donnera un

aperçu des stratégies possibles pour intégrer une perspective de prévention des conflits dans le

programme PEAR Plus. Dřabord, revenons rapidement à lřanalyse des conflits et à la description de

lřexpertise de SFCG citée au-dessus pour une exploration du potentiel dřun mariage entre les activités PEAR

Plus avec les interventions de SFCG dans le contexte de lřEst de la RDC. Le tableau 6 donne un aperçu des

recommandations qui suivront.

Tableau 6 : Changements et interventions potentiels pour rendre le PEAR Plus plus sensible aux

conflits31

Causes Contribution potentielle du PEAR Plus

Niveau Řmicroř Niveau Řmacroř

Ne pas nuire Construction de la

paix

Ne pas nuire Construction de la

paix

Problématique

foncière

Analyse des conflits

Théâtre participatif

Facilitation du

dialogue

Programmes de

radio locaux

Facilitation du

travail des autres

agences/institutions

Analyse de lřimpact

des conflits locaux

sur les conflits

macros et les intérêts

politiques

Sensibilisation à une

échelle régionale/

nationale sur le droit

foncier

Programmes de

radio

Crise de l’autorité

coutumière

Analyse des conflits

Théâtre participatif

Non Non Non

Méfiance

interethnique

Analyse des conflits

Théâtre participatif

Ciblage des groupes

Communication des

choix des

bénéficiaires

Education à la paix

Théâtre participatif

Activités de

solidarité

Programmes de

radio

Choix des zones

ciblées

Bonne communication

du choix des

bénéficiaires

Bonnes relations

avec tous les

groupes

Programmes de

radio sur lřentente

interethnique à une

échelle régionale/

nationale

31 Rappel : couleur verte indique des activités qui pourraient avoir un impact direct ; couleur jaune indique un

impact indirect.

S

42 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Richesses

minières

Non Non

Non Non

Main d’œuvre

pour la violence

Analyse des conflits

Théâtre participatif

Ciblages des

groupes dřenfants

Sensibilisation

Programmes de

radio locale Ŕ Sisi

Watoto

Education

appropriée pour

tous les enfants

Cours de

rattrapage

Analyse des conflits

macros

Coordination avec

dřautres agences qui

assistent les jeunes

Programmes de

radio régionaux/

nationaux

Faiblesse de l’Etat Inclusion des

autorités dans les

décisions

Analyse des conflits

Théâtre participatif

Assistance aux

autorités pour

mieux communiquer

avec la population

Impliquer les

autorités à tous

niveaux et

transparence

Non

Soutien des pays

voisins

Non Non

Non Non

Les bases ainsi jetées pour une réflexion profonde sur les options dont lřUNICEF et les partenaires PEAR

disposent, dans ce qui suit, trois scénarios et stratégies potentielles sont esquissés avec une discussion des

avantages et risques que chaque option présente :

Scénario ‘statu quo’, qui examine les conséquences et les risques de continuer avec le PEAR Plus

exactement comme il est maintenant.

Scénario ‘sensibilité aux conflits augmentée’, avec une intégration systématique des éléments Řne pas

nuireř et lřajout de quelques activités de réconciliation et construction de la paix, mais sans

changements radicaux dans la stratégie globale ou lřampleur des interventions;

Scénario ‘sensibilité aux conflits approfondie’, qui repense et restructure radicalement le choix des

zones dřintervention et lřapproche programmatique de l'intervention afin de transformer le PEAR

Plus en un véritable programme de construction de la paix.

6.1 SCENARIO ŘSTATU QUOř

Le PEAR Plus, tel quřil a été conçu et dans la façon dont il est mis en œuvre en ce moment contourne les

conflits et évite de travailler dans des zones aux conflits Řchaudsř. Ainsi, lřévaluation nřa pas repéré un impact

néfaste du programme existant sur les dynamiques conflictuelles, et, bien quřil nřy ait pas eu dřeffort

systématique dřintégrer une dimension « ne pas nuire » dans les activités programmatiques, les risques pour

le PEAR Plus dřexacerber les tensions existantes ou dřen créer de nouvelles sont plutôt limités pour plusieurs

raisons, à savoir :

Les critères de choix des localités excluent les zones les plus conflictuelles, et par conséquent limitent la

possibilité dřavoir un impact négatif au niveau « micro ». Les zones dřintervention du PEAR Plus en Ituri sont

ethniquement homogènes (peuplées presque exclusivement par les communautés Alur) et les zones

sélectionnées au Sud Kivu, qui sont presque exclusivement peuplées par les membres de lřethnie Bashi,

nřaffichent pas de fortes tensions intercommunautaires non plus. Certes, l'homogénéité ethnique n'est pas une

garantie de paix sociale. Toutefois, étant donné que dans l'Est de la RDC les tensions sont souvent liées aux

identités ethniques, les communautés ethniquement homogènes sont généralement moins à risque de violence.

Les activités sectorielles du PEAR Plus ne touchent, pour la plupart, pas directement aux Řnerfsř des

conflits dans lřEst de la RDC. Par exemple, le PEAR Plus ne traite pas de manière directe la question des

terres (sauf dans le choix des sites des écoles ou des centres de santé à reconstruire dans les cas oú le site

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 43

nřa pas été prédéterminé). Par conséquent, dans la grande majorité des sites, il est peu probable que le

PEAR Plus ait un impact négatif sur les causes des conflits.

Dans les cas où des risques de conflits ont été rencontrés dans les zones dřintervention, les partenaires de

mise en œuvre ont pu gérer les tensions dřune manière pragmatique et improvisée et ils ont ainsi su éviter une

escalade des conflits ou lřéruption des violences32.

Le risque de nuire, au moins au niveau micro, est donc suffisamment faible pour considérer le Řstatu quoř

comme une option possible. Cependant, en ce moment, le PEAR Plus nřest pas en train de saisir les

opportunités pour contribuer à la construction de la paix. Autrement dit, avec lřoption Řstatu quoř le PEAR Plus

continuerait à travailler Řautourř des conflits plutôt que Řsurř les conflits.

6.2 SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS AUGMENTEEř

Le deuxième scénario vise à augmenter la sensibilité aux conflits, dans le cadre programmatique

existant. Pourtant, dans ce scénario, tout le programme, à commencer par la collecte de données et lřanalyse

contextuelle jusquřaux interventions devra tenir compte des deux éléments de la sensibilité aux conflits, de la

dimension « ne pas nuire » et de la dimension « construction de la paix ». Par conséquent, ce scénario

renforcerait la capacité analytique des partenaires PEAR Plus et introduirait des outils spécifiques pour que

les interventions soient en mesure de répondre aux conflits localisés et pourraient saisir les opportunités de

contribuer à la construction de la paix, ce qui assurerait une sensibilité aux conflits accrue de toutes les

interventions sans, pour autant, nécessiter des changements profonds de choix des zones ou communautés

ciblés ou de la stratégie dřintervention générale.

Le scénario prévoit donc une sensibilité aux conflits augmentée dans la mesure où il reposerait sur cinq

volets de modifications clés :

1. Une capacité dřanalyse des conflits améliorée

2. Une connaissance approfondie de la sensibilité aux conflits parmi les partenaires exécutifs et leur

personnel

3. Des interventions supplémentaires pour aborder les conflits et tensions locales

4. Une stratégie de communication pour assurer la transparence dans la programmation et dans les

relations entre les bailleurs et ONG internationales et les partenaires locaux

5. Une stratégie de suivi et dřévaluation qui se concentre explicitement sur la sensibilité aux conflits

En détail, les changements proposés seraient les suivants :

6.2.1 Sélection des Zones dřIntervention

Ce scénario ne prévoit pas de changement par rapport à la sélection des zones dřintervention. Le

programme continuera donc à opérer dans des zones dans lesquelles il nřy a pas des tensions

intercommunautaires particulièrement prononcées.

6.2.2 Analyse des conflits et du contexte améliorée

Incorporer une composante d’analyse des conflits dans les outils existants (protection monitoring, MSA)

Comme décrit ci-dessus, bien que les acteurs humanitaires dans lřEst de la RDC collectent déjà de riches

informations sur la situation dans les communautés dřintervention lors du « protection monitoring » et des

32 Cette réflexion se base sur lřobservation de la mise en œuvre du PEAR Plus en Ituri, ainsi que sur

lřobservation du PEAR.

44 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

MSA, ces documents ne contiennent souvent que peu ou pas dřinformations sur les dynamiques conflictuelles

locales. Il nřest guère possible de rendre un programme humanitaire ou de développement plus conscient des

conflits qui existent dans leurs milieux dřopération sans disposer de renseignements spécifiques et qui sont mis

à jour fréquemment sur les causes, acteurs, et dynamiques conflictuelles, ainsi que sur les mécanismes

existants dřarbitrage ou de gestion des conflits.

Les éléments suivants seront surtout importants à tenir en compte, par rapport à lřhistoire et à la nature

des conflits locaux :

Est-ce que quřil y a une histoire de violences entre groupes ethniques ou autres communautés? Est-ce

que ces tensions influencent le processus de retour ?

Quels sont les enjeux des conflits :

o Est-ce quřil y a des conflits fonciers ? Est-ce que les conflits fonciers sont entre individus ou

entre communautés ou groupes ?

o Est-ce quřil y a des conflits pour le contrôle des ressources naturelles/minérales ?

o Est-ce quřil y a des conflits autour de la succession au pouvoir coutumier ? Est-ce que la

légitimité du pouvoir coutumier est contestée ?

Dans le passé, quels ont été les déclencheurs de la violence communautaire ?

Est-ce quřil y a des mécanismes locaux de résolution des conflits ? Est-ce que ces mécanismes

fonctionnent comme prévu ? Si non, pourquoi pas ?

Parfois ces questions font déjà partie des enquêtes des MSA ou du « protection monitoring », mais il

nřexiste pas de cadre dřanalyse systématique des conflits locaux commun à tous les partenaires du PEAR

Plus. Ce scénario propose ainsi dřintégrer une section dédiée spécifiquement aux conflits dans les MSA

suivant grosso modo les questions esquissées ci-dessus.

Les informations sur les tensions existantes dans les communautés dřintervention serviront de base pour la

planification dřune stratégie qui cible spécifiquement les tensions repérées dans les MSA.

Collecte d’informations continue

A lřheure actuelle, une des limites sérieuses du PEAR Plus est lřabsence dřune analyse constante de

lřévolution de la situation sur le terrain. A lřEst de la RDC, la situation est très fluide et change souvent

rapidement : une localité peut paraître pacifique un jour, puis rapidement devenir instable. Il est donc

problématique que les évaluations de sécurité et stabilité utilisées par le PEAR Plus soient effectuées

sporadiquement ou soient rarement mises à jour. Cela rend aussi difficile, voire impossible, de suivre et

d'évaluer efficacement l'impact du programme sur les dynamiques de conflits.

Il serait ainsi essentiel de mettre à jour régulièrement lřanalyse des conflits dans chaque lieu

dřintervention et de continuer à recueillir autant dřinformations que possible sur les causes et dynamiques

conflictuelles pour assurer que les interventions nřexacerbent pas les tensions et pour ajuster lřapproche de

mitigation des conflits. Cette collecte de données sur les conflits régulière et continue pourrait se faire sur

base de deux modèles opérationnels différents :

A. Modèle « Arche d’Alliance » : LřONG congolaise Arche dřAlliance (AA) est partenaire de lřUNHCR

au sud du Sud Kivu pour le « protection monitoring ». Contrairement aux autres partenaires du

« protection monitoring » dans lřEst de la RDC qui collectent des données sur la protection et les

conflits de manière occasionnelle, AA a adopté un modèle de collecte de données permanente à

lřaide des informateurs issus de et basés dans les communautés dřintervention à plein temps qui

envoient des mises à jour sur la situation conflictuelle ou politique constamment par téléphone. Ainsi,

AA dispose toujours dřune vision exacte et actuelle des faits et dynamique dans les communautés.

Ainsi, le modèle AA permettrait aux partenaires PEAR Plus dřajuster leurs stratégies dřintervention

pratiquement au jour le jour et de réagir rapidement au cas où les informateurs rapporteraient un

accroissement des tensions ou lřexacerbation des conflits existants.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 45

B. Modèle « savoir existant non exploité » : Le deuxième modèle potentiel pour la collecte de données

continue dans les lieux dřintervention ne nécessiterait pas de recrutement des informateurs sur place,

mais profiterait au maximum des connaissances des dynamiques de conflits qui existent déjà parmi

le personnel des partenaires de mise en œuvre. Les agents du terrain lors de leur travail quotidien

et de leurs visites dans les milieux dřintervention ont souvent une connaissance des dynamiques de

conflits assez détaillée et nuancée prise directement à la source, notamment lors de leurs

interactions directes et fréquentes avec les autorités locales et les bénéficiaires. Pour le moment, ce

savoir nřest pas systématiquement recueilli ou analysé par les partenaires exécutifs. Ce deuxième

modèle de collecte de données continue proposerait donc dřorganiser des séances régulières

(mensuelles ou bimensuelles) de discussions facilitées avec le personnel du terrain pour réfléchir à

une manière méthodique sur les évolutions de la situation conflictuelle et sur lřinteraction de ces

dynamiques avec la mise en œuvre du projet.

Théâtre participatif comme moyen de collecte de données

La méthodologie du théâtre participatif, qui est déjà utilisée avec succès par Search for Common

Ground (voir description détaillée ci-dessus) au Sud Kivu, pourrait, en dehors de son rôle dans la construction

de la paix locale, servir de complément indispensable à une analyse continue des dynamiques conflictuelles.

Les équipes théâtrales ont été formées en méthodologie dřanalyse des conflits et, au moins en partie, les

spectacles théâtraux ont pour but dřavoir une meilleure connaissance des conflits existants, des enjeux et des

acteurs. Le théâtre participatif est un outil créatif et non-menaçant pour aborder des sujets délicats qui ne

ressortiraient pas naturellement dans des réunions formelles dans les communautés. Les acteurs tiennent

également des réunions régulières avec les autorités et autres acteurs pour s'informer sur les principaux

problèmes dans chaque communauté, et, sur cette base, ils interprètent des pièces théâtrales pertinentes. Il

est donc recommandé dřintégrer le théâtre participatif systématiquement dans tous les sites de mise en

œuvre du PEAR Plus non seulement comme outil de mitigation des tensions existantes, mais également en tant

quřoutil de collecte de données.

6.2.3 Formation en vue dřune connaissance approfondie de la sensibilité aux conflits parmi les partenaires exécutifs et leur personnel

Former les partenaires de mise en œuvre sur les notions de « ne pas nuire » et de la construction de la paix et de leur mise en application dans l’action humanitaire

Il sera nécessaire dřinvestir dans la formation du personnel pour leur donner le savoir et les outils

nécessaires pour identifier les risques dans le PEAR Plus dřexacerber les tensions existantes ou dřen créer de

nouvelles pour ensuite être en mesure de concevoir des stratégies adéquates pour minimiser ce risque.

Actuellement, même quand les agents du terrain se rendent compte que les activités ont un impact négatif sur

les tensions locales, ils ne disposent pas de moyens pour soulever ces questions et pour y répondre

systématiquement. La formation proposée devra adopter une approche participative qui valorise et profite

de lřexpérience concrète des agents du terrain.

Nous recommandons en particulier les actions suivantes :

Organiser des séances de formation approfondie des employés de lřUNICEF et des partenaires de

mise en œuvre sur les notions de « ne pas nuire » et de la construction de la paix et de leur

application dans la programmation humanitaire ;

Mener des séances de planning avec les responsables des programmes de PEAR Plus (UNICEF et

partenaires) sur la réalisation du principe de « ne pas nuire » dans la gestion et dans les activités

du PEAR Plus et de la paix ;

Organiser des ateliers trimestriels avec tous les employés des agences de mise en œuvre du PEAR

Plus, surtout avec les agents du terrain, pour évaluer lřimpact sur les conflits des activités et des

pratiques. Ces ateliers pourraient être suivis dřune réflexion au niveau des responsables des

programmes de tous les partenaires exécutifs pour encourager une réflexion dans les provinces et

les organisations sur les défis rencontrés et sur des modifications programmatiques potentielles;

46 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Sur la base des résultats des ateliers, il sřagirait de codifier les leçons apprises et les bonnes

pratiques dans la gestion des risques de « nuire ».

6.2.4 Interventions qui abordent les tensions locales contribuant à la construction de la paix

Théâtre participatif autour des dynamiques conflictuelles existantes au niveau local

Le théâtre participatif est un outil polyvalent pour aborder les questions jugées trop sensibles par les

communautés et qui sont ainsi rarement discutées dans un forum formel et en public. Il est donc un instrument

idéal pour encourager des discussions sur les questions liées aux tensions et aux conflits locaux, notamment

les conflits fonciers, les animosités intercommunautaires ou entre des groupes divers ou même les différends

entre les autorités et la population. Il est également un instrument efficace pour les messages de

sensibilisation.

SFCG a une expérience de longue date avec le théâtre participatif dans lřEst de la RDC, notamment au

Sud Kivu. Les acteurs sont formés en analyse et stratégies de résolution des conflits ainsi que dans dřautres

sujets importants à leur travail comme les lois foncières ou les droits de lřhomme. Avant leurs séances dans les

communautés, ils font souvent des recherches dans les communautés pour mieux connaître et anticiper les

problématiques sur place. Les spectacles théâtraux sont extrêmement populaires dans les communautés,

surtout dans les communautés rurales où les opportunités de divertissement sont rares. Dans la méthodologie

employée par les théâtres communautaires soutenus par SFCG, les acteurs essaient de discuter les points de

vue différents sur les questions conflictuelles lors des spectacles et démontrent les conséquences néfastes de

lřescalade des conflits et de la violence et prônent les moyens de résolution des conflits pacifiques à travers

des instruments ou des cadres de concertation différents.

Nous recommandons lřutilisation du théâtre participatif surtout dans les communautés dans lesquelles les

MSA ou les autres interactions des agents du terrain avec les acteurs locaux indiquent des tensions ouvertes

ou latentes. Le théâtre participatif pourrait également être utilisé pour la sensibilisation sur les thèmes de

protection des enfants ou des femmes.

Le théâtre participatif pourrait être soit mis en œuvre sous la supervision de SFCG sur demande et en

étroite collaboration avec les partenaires exécutifs, soit avec une implication plutôt indirecte de SFCG au

niveau de la formation et de lřassistance technique aux organisations de mise en œuvre du PEAR Plus qui

recruteraient eux-mêmes des acteurs et géreraient les activités des troupes théâtrales.

Fonds flexibles pour des activités de construction de la paix au niveau communautaire

Les interventions du PEAR Plus sont bien prédéterminées déjà au moins au niveau de la nature des

projets. Cela veut dire que les communautés nřont pas dřopportunité dřimposer leurs propres priorités. Le

programme a déjà pris la décision pour eux. Comme dans un contexte de conflit, il faut souvent réagir avec

flexibilité et parfois rapidement pour sřattaquer aux tensions existantes ou montantes. Il serait donc

souhaitable que le PEAR Plus considère un outil de financement de projets communautaires additionnel qui

rendrait le programme plus souple et mieux placé pour répondre aux dynamiques conflictuelles. Ces fonds

additionnels devraient être utilisés soit pour augmenter des projets communautaires dans les domaines

établis par le programme : Eau et assainissement ; éducation ; et santé, soit pour financer des autres

initiatives de construction de la paix dans les communautés dřintervention.

Feuilletons de radio et discussions radiophoniques sur les conflits fonciers, le droit foncier, et les moyens de résolution pacifique des conflits fonciers

Développer des émissions de radio organisées autour dřun ou de plusieurs feuilletons radiophoniques sur

les problèmes fonciers, les stipulations du droit foncier, et les moyens de résolution pacifique des différends

autour de la terre. Les feuilletons seront produits par SFCG ou un de ses partenaires et distribués aux

stations de radio locales. Les journalistes locaux seront formés dans la matière pour ensuite organiser des

séries dřémissions sur la radio locale avec des experts en droit foncier ou en résolution des conflits qui

répondront aux questions des auditeurs. Ces émissions devraient être développées en étroite collaboration

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 47

avec les partenaires PEAR Plus ainsi que les organisations travaillant sur les conflits fonciers, comme UN

Habitat et UNHCR dans le Nord et le Sud Kivu et la Commission foncière et RCN en Ituri pour ne pas doubler

ou contrecarrer les efforts existants dans ce domaine.

Les agents de terrain des partenaires PEAR Plus faciliteraient la remise des questions aux experts dans

les communautés ciblées par le programme. Ils feront le suivi après chaque émission pour faciliter la

médiation des problèmes fonciers par les structures appropriées et pour assurer leur suivi par ces structures

ou par les autorités. Ces efforts devront être appuyés également par les séances de théâtre participatif. Au

cas où un cas concret serait résolu pendant la durée du programme, les émissions de radio devraient

discuter les éléments qui ont contribués à sa résolution pacifique.

Activités de solidarité intercommunautaire

Des activités supplémentaires pourraient être organisées pour soutenir les efforts de résolution de

conflits locaux pourraient être organisées pour améliorer la compréhension entre les communautés et pour les

encourager à identifier leurs intérêts communs et à les poursuivre et les traduire en actions communes au

bénéfice de toutes les communautés. Ces activités pourraient cibler les relations entre les communautés

ethniques autant que les relations entre autorités et certains groupes sociaux ou les militaires et la

population. Une meilleure compréhension entre les communautés dans des domaines dřintérêt communs

pourrait préparer le terrain pour aborder des sujets plus sensibles, mais elle aide aussi à contrer les rumeurs

et les informations erronées qui surgissent facilement dans les situations de tensions et les rendent plus

résistantes à la résolution.

Renforcement de la composante d’éducation à la paix du PEAR Plus

Dans la formulation actuelle du PEAR Plus, la composante dřéducation à la paix représente la seule

activité de « construction de la paix » proprement dite. Pourtant, ce volet du PEAR Plus nřa pas été priorisé

pour lřinstant dřaprès les observations en Ituri, et ne joue pas un rôle majeur dans la proposition de projet

pour la mise en œuvre du programme au Sud Kivu. Ainsi, dans le cadre du programme existant, cette

composante pourrait être renforcée par les actions suivantes :

Former les enseignants de manière approfondie sur lřéducation à la paix, et mettre à leur

disposition des matériels variés 33 pour promouvoir des messages de paix et de non-violence

pertinents et adéquats au contexte.

Former des jeunes animateurs et leur donner une assistance supplémentaire pour organiser des

séances extrascolaires dřéducation à la paix animés par les jeunes pour les jeunes autour des

questions de lřidentité et de lřaccès aux ressources.

Organiser des échanges culturels et sportifs entre les enfants des zones ciblées et les enfants des

zones environnantes, afin d'accroître la connaissance mutuelle et combattre les préjugés.

Organiser des activités de dialogue et de rencontre entre les enfants des écoles régulières et les

enfants des centres de rattrapage (ex : activités sportives, projections vidéo, théâtre, musique et

danse).

Programmes de radio pour la jeunesse

Les programmes de radio pour la jeunesse soutenus par SFCG, surtout le programme Sisi Watoto, des

émissions produites par les jeunes pour les jeunes sur des sujets qui concernent les enfants et les jeunes

congolais, ont connu une popularité énorme dans toute la RDC. Ces programmes pour la jeunesse seront un

complément utile pour les activités dřéducation à la paix dans les écoles et les communautés. Le programme

devrait aborder les questions liées au rôle que les jeunes pourraient jouer dans la réconciliation

33 En dehors du guide pour les enseignants du Ministère de lřéducation distribué actuellement par les

partenaires PEAR Plus. Le guide officiel ne semble pas couvrir toute la gamme des sujets liés à lřéducation à la paix.

48 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

intercommunautaire et dans la construction de la paix, ainsi que les questions du travail des enfants dans les

carrés miniers et la protection et les droits des enfants en général. Ces programmes pourraient être

complétés par des échanges intercommunautaires ou des dialogues entre jeunes des divers groupes

ethniques pour renforcer les liens entre les communautés autour des intérêts communs entre les jeunes ou des

activités sportives ou sociales des jeunes.

6.2.5 Communication et transparence dans lřaction humanitaire

Renforcement de la communication pour augmenter la transparence dans la gestion du programme

Dans une large mesure, le risque de nuire est lié à une méfiance généralisée, parmi les populations de

lřEst de la RDC, vis-à-vis des acteurs humanitaires, qui sont soupçonnés dřêtre corrompus et de tirer profit de

la souffrance de la population. Pour contrebalancer cette méfiance et pour prévenir et gérer les perceptions

et les rumeurs qui sèment le doute et le mécontentement contre lřassistance internationale, il est recommandé

dřadopter une stratégie de communication qui cible les acteurs clés dans les groupements et communautés

dřintervention utilisant des radios locales. Cette stratégie de communication renforcée incluerait les activités

suivantes :

Soutenir les stations de radio locales avec des formations en gestion et techniques pour organiser

des émissions sur lřassistance humanitaire, sa logique, ses défis, ses modalités dřaction ;

Former les journalistes locaux sur le système dřaide internationale, critères de bonne conduite,

transparence et comptabilité dans lřaction humanitaire ;

Organiser des émissions en direct avec les responsables des ONG partenaires du PEAR Plus pour

mieux expliquer aux communautés locales leur logique dans le choix des localités et des

bénéficiaires et le volume et la nature exacte de lřaide apportée.34

Utiliser les radios pour mettre à jour la population sur la mise en œuvre du PEAR Plus, y inclure des

informations sur lřutilisation des fonds du programme.

Renforcement de la transparence des actions des autorités de l’Etat

Pour améliorer les relations entre les autorités et les populations, il faudrait promouvoir des débats et

discussions publiques qui impliquent les responsables politiques et administratifs dans les groupements

communautaires. Il faudrait, progressivement, établir un partage dřinformation régulier et habituel et une

collaboration plus étroite pour réaliser les intérêts communs entre les communautés et leurs gestionnaires. En

plus, les autorités sont des acteurs centraux dans la gestion à long terme des conflits locaux, mais ils ne

seraient en position de servir de médiateurs dans les conflits localisés que si la population leur fait confiance.

Des forums réguliers, pour discuter des sujets ayant traits aux tensions dans les zones dřinterventions suivant

le modèle des Tribunes dřExpression Populaires (TEP) que SFCG a déjà utilisés dans dřautres régions de la

RDC, pourraient au cours des interventions, contribuer à une plus grande transparence dans la gestion des

affaires locales. Des programmes de radio devraient ensuite faire le suivi et reprendre les sujets discutés lors

des TEP pour assurer que le dialogue entre les responsables de lřEtat et les communautés perdure.35

6.2.6 Suivi et évaluation

Afin de suivre et évaluer l'impact du PEAR Plus dans son ensemble sur les dynamiques de conflit, il est

indispensable dřavoir, au départ, une véritable analyse des conflits, qui permettrait de construire une base

de référence et des indicateurs de progrès. En l'absence dřune telle analyse (qui nřest pas prévue dans ce

scénario), il faudrait créer une stratégie de suivi et évaluation sur la base des informations et analyses

34 Il faudrait noter que ces émissions risquent de devenir des outils de propagande pour les agences du

PEAR Plus ou pour leur bailleur. Il faudrait donc que lřengagement en faveur de la transparence soit sérieux et compréhensif de la part du bailleur et de la part des organisations responsables pour sa mise en œuvre. 35 Il est évident que la participation des autorités dans de tels forums ou des émissions de radio nřest guère

garantie. Les partenaires qui exécutent les programmes devront prendre faire des efforts pour créer des bonnes relations de travail avec les autorités dès le début.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 49

existantes. Toutes les activités de collecte et dřanalyse de données décrites ci-dessus (voir 7.2.2) ont

également une dimension de suivi et dřévaluation quřil faut capturer et développer systématiquement. Ainsi,

SFCG pourrait travailler avec les partenaires exécutifs du PEAR Plus dans le développement des indicateurs

pour évaluer régulièrement la sensibilité aux conflits des activités humanitaires et en même temps lřimpact

des activités de construction de la paix. Lřimpact repéré, positif ou négatif, des interventions doivent être

discutées lors des réunions trimestrielles avec tous les partenaires du PEAR Plus (voir 7.2.3) et formeront la

base des décisions programmatiques ou des ajustements de stratégie subséquents.

6.2.7 Coordination

Il est essentiel que les activités décrites ci-dessus soient bien intégrées dans une stratégie globale de

sensibilité aux conflits du PEAR Plus et non pas que quelques activités additionnelles qui opéreraient à côté

des activités originelles de nature humanitaire du PEAR Plus. Cela veut dire que le scénario 2 envisage une

intégration autant que possible des activités proposées de Search for Common Ground et les partenaires

exécutifs des volets « traditionnels » du PEAR Plus. Etant donné les cultures différentes des organisations

humanitaires et des organisations qui travaillent sur la réconciliation et la résolution des conflits, cela

nécessitera que les partenaires exécutifs du PEAR Plus deviennent plus sensibles aux conflits et incorporent

une perspective de « ne pas nuire » dans toutes les activités programmatiques et même dans les procédures

opérationnelles, tandis que, en même temps, le partenaire de résolution de conflits (SFCG) devient plus

capable de travailler dans lřhumanitaire et dřintégrer leurs méthodes dans la programmation humanitaire. Il

paraît évident quřune bonne et étroite coordination sous la direction de lřUNICEF doit être de rigueur pour

réaliser cette vision.

Plan illustratif des interventions :

Mois Activités

Préalables Formation du personnel des MSA en méthodologie dřanalyse de conflits et collecte de

données sur les conflits

Mois 1 MSA avec analyse des conflits abrégée

Formation de tous les employés des partenaires en analyse de conflits et en principes

de base de mitigation et gestion des conflits

Revue des pratiques opérationnelles, surtout par rapport au recrutement et à la

fourniture et à lřachat des matériels

Planification de la stratégie de mitigation des conflits spécifique à chaque zone

dřintervention avec tous les partenaires exécutifs de la zone

Mois 2 Formation de toutes les équipes du terrain dans la méthodologie du théâtre

participatif

Premières séances de théâtre participatif dans les communautés dřintervention sous la

supervision des formateurs/experts de SFCG

Emissions de radio des partenaires de PEAR Plus sur le choix des communautés et des

bénéficiaires, la logique du programme et sa mise en œuvre

Mois 3-12 Théâtre participatif mensuel dans les communautés oú les tensions sont plus sérieuses

pour aborder les conflits les plus aigus et bimensuel dans les autres communautés

Consultations exhaustives avec les communautés et tous les acteurs influents sur les

priorités humanitaires et la contribution de lřassistance de PEAR Plus à la résolution

50 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

des conflits

Mise en œuvre des projets de PEAR Plus

Feuilletons et programmes de radio sur les conflits fonciers, la loi foncière et la

gestion des conflits

Education à la paix et des programmes pour les jeunes

Tribunes dřExpression Populaires

Suivi régulier pour évaluer lřimpact des projets sur les conflits : réunions trimestrielles

de tout le personnel des partenaires exécutifs pour évaluer la sensibilité aux conflits

en groupe

6.3 SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS APPROFONDIEř

Ce scénario opte pour la transformation du PEAR Plus en véritable programme de construction de la

paix, ce qui exige non seulement des changements au niveau des activités, mais aussi une remise à plat

fondamentale de la logique et de la stratégie du programme. Ces changements sont tout à fait réalisables,

mais ils nécessiteraient une volonté politique de la part de lřUNICEF de modifier plus profondément leur

façon de gérer et de mettre en œuvre des programmes.

Ce scénario inclut une analyse des conflits en profondeur; une flexibilité accrue pour adapter la mise en

œuvre du programme aux résultats de l'analyse des conflits; et un système de suivi et d'évaluation qui utilise

ces résultats comme une base de référence. Par conséquent, ce scénario aura un impact profond au niveau

de la capacité du programme de « ne pas nuire » et de contribuer à la construction de la paix aux deux

niveaux, micro et macro.

6.3.1 Sélection des zones dřintervention

Si le PEAR Plus envisage de devenir un véritable programme de construction de la paix, cela devra se

refléter dans le choix des localités dřintervention dans lesquelles le programme est actif. À ce jour, le

programme a travaillé dans des collectivités qui sont le plus souvent ethniquement homogènes, qui nřont pas

une histoire de conflits locaux importants, et ont des mécanismes locaux de gestion des conflits qui

fonctionnent relativement bien. Cela ne signifie pas, bien entendu, qu'il n'y ait aucun risque de conflit.

Toutefois, par rapport à la plupart des autres endroits de la région, ce risque est relativement limité.

Il existe une perception répandue parmi les observateurs que les partenaires et la sélection des zones

d'intervention est déjà «fixée» par lřUNSSSS et ne peut pas être modifiée. Comme on lřa montré dans la

section précédente, cependant, ce n'est pas le cas: le lien avec lřUNSSSS est interprété différemment dans

les différentes provinces, et en Ituri et au Nord Kivu les sites dřintervention du PEAR Plus sont hors des axes

prioritaires de lřUNSSSS.

Dans ce scénario, la sélection des aires dřintervention devra:

Adopter une approche de Ŗne pas nuireŗ au niveau macro, avec lřinclusion de groupes quřont été,

jusquřici, laisse de cote, y compris pour des raisons logistiques et dřinaccessibilité (comme les

Banyamulenge au Sud Kivu);

Favoriser les sites où le projet peut avoir une valeur ajoutée particulière pour promouvoir la

réconciliation entre les communautés.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 51

Il convient de noter que le fait de travailler "sur" les conflits ne signifie pas, nécessairement, intervenir

dans des localités instables et non sécurisées. Il signifie plutôt sélectionner des zones où la coexistence

intercommunautaire peut être problématique, et viser à mitiger ces tensions par le programme.

6.3.2 Analyse des conflits

Conduire régulièrement des analyses participatives des conflits dans les localités de mise en œuvre du PEAR Plus.

Afin de devenir un véritable programme de construction de la paix, le PEAR Plus devrait être fondé sur

une analyse approfondie des dynamiques conflictuelles dans les localités de mise en œuvre. Contrairement

au scénario précédent, il ne se sřagirait pas simplement de collecter les informations sur les types de conflits

existants et leur histoire, mais aussi dřanalyser leurs causes structurelles, le rôle joué par les différents

acteurs, et les relations entre les dynamiques locales et les conflits au niveau Ŗmacroŗ. Les modalités de

collecte dřinformation vont au-delà des simples questionnaires et adoptent des approches plus participatives.

6.3.3 Formation

Mise en œuvre d’un programme de formation systématique et approfondi sur les thèmes pertinents pour la sensibilité aux conflits

En plus des recommandations déjà avancées pour le scénario précédent, cette formation se focalisera

sur lřanalyse des conflits, et sur le développement de compétences spécifiques (médiation, négociation,

écoute active, gestion des traumatismes) pour la gestion du programme dans des situations potentiellement

conflictuelles.

6.3.4 Communication

Renforcer la communication pour augmenter la transparence dans la gestion du programme et en vue de gérer les perceptions et les rumeurs qui sèment le doute et le mécontentement contre l’assistance internationale

La recommandation est la même que dans le scénario précédent, mais l'accent sur la transparence et

l'échange d'informations peut être encore plus fort. Il sera important, en particulier, dřavoir un mécanisme de

gestion des plaintes, auquel les bénéficiaires et les autres membres de la communauté peuvent se référer

pour dénoncer des cas de corruption ou mauvaise gestion du projet. Cela donnera un signal sans précédent

de transparence et d'appropriation locale.

6.3.5 Activités de construction de la paix

Identifier et mettre en œuvre des activités de construction de la paix particulièrement nécessaires sur la base de l’analyse des conflits.

Contrairement au scénario précédent, les activités de construction de la paix ne sont pas identifiées « à priori », mais elles dépendent directement des types de conflits qui ressortent de lřanalyse. Sur cette base, Search for Common Ground pourra identifier les outils qui sont plus adéquats. En général, le théâtre participatif est proposé comme outil dřanalyse et en même temps comme base pour lřidentification participative dřactivités de construction de la paix pertinentes.

6.3.6 Suivi et évaluation

Incorporer la sensibilité aux conflits dans le cadre du Suivi et Evaluation du projet, sur la base de l’analyse des conflits.

Autrement dit, le S&E du projet devra mesurer non seulement le succès du projet vis-à-vis de ses

objectifs en matière dřéducation, WASH, santé et protection, mais aussi son incidence sur les dynamiques des

conflits. Est-ce que le programme était en mesure de sřattaquer et de mitiger les causes des conflits? Est-ce

52 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

que le programme a été capable de renforcer les systèmes et les mécanismes pour la résolution non-violente

des conflits? À cet effet, des indicateurs devront être élaborés sur la base de l'analyse des conflits, ainsi que

des méthodologies de vérification.

6.4 RISQUES ET DEFIS

L'adoption des scénarios de sensibilité aux conflits Ŗaugmentéeŗ ou Ŗapprofondieŗ nřest pas sans risques

et défis.

En premier lieu, il pourrait être difficile dřassocier les partenaires concernés, en particulier par rapport

à lřexpansion des outils dřanalyse et lřévaluation pour inclure les dynamiques conflictuelles. Cette

recommandation va, en effet, dans la direction contraire par rapport à lřorientation courante : le HCR,

OCHA et lřUNICEF sont en train de discuter comment modifier le Ŗprotection monitoringŗ et les MSA pour les

rendre plus Ŗlégersŗ, et les fonder dřavantage sur des données quantitatives, ce qui rendrait plus facile la

comparaison et le classement des différentes situations, ainsi que la surveillance des tendances au fil du

temps. Au contraire, ce scénario demande plus dřinformations qualitatives, qui ne peuvent pas toujours être

capturées par des indicateurs quantitatifs. Il est important pour l'UNICEF de prendre note de ce dilemme. Un

plaidoyer sera nécessaire vis-à-vis des partenaires pour promouvoir lřidée dřune analyse qualitative, pour

compléter la collecte des données quantitatives. Si les partenaires sont opposés à approfondir et

systématiser leur analyse sur les conflits, lřUNICEF pourrait décider de créer une capacité dřanalyse des

conflits au sein de ses programmes.

Similairement, lřutilité dřune formation sur les thèmes de la sensibilité aux conflits pourrait ne pas être

initialement évidente pour les partenaires, surtout si cela vient sřajouter à un programme de travail déjà

surchargé. Il est donc important de commencer par une sensibilisation sur ces questions, en se fondant, autant

que possible, sur les expériences réelles du staff du terrain.

Enfin, les activités de communication risquent de devenir (ou dřêtre perçues comme) des outils de

propagande par les agences de PEAR Plus ou par leur bailleur. Il faut donc que lřengagement soit aussi

transparent que possible, et quřil soit complet et sérieux de la part du bailleur et des agents de mise en

œuvre.

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 53

Annexe 1

Causes et manifestations des conflits dans les Provinces du Nord et du Sud Kivu et dans le district de l’Ituri

Nord Kivu Sud Kivu Ituri

Enjeux de fond

Contrôle des terres Terres fertiles dans les montagnes du

Masisi et Rutshuru

Terres fertiles dans les montagnes du Sud

Kivu, surtout dans les hauts plateaux

dřItombwe

Terres fertiles dans les montagnes et hauts

plateaux de lřIturi, surtout dans les

territoires de Djugu et Irumu

Immigration des Banyarwanda

organisée par le pouvoir colonial

Belge depuis les années 30

Existence et expansion des communautés

Rwandophones connues sous le nom de

Banyamulenge à partir des années 1950

suite aux crises successives au Rwanda et au

Burundi

Priorité donnée aux Hemas dans

lřadministration coloniale et lřaccès aux

ressources au détriment des Lendus

Pouvoir politique et

instrumentalisation des

identités ethniques

Favoritisme de Mobutu pour les

Banyarwandas, surtout des Tutsis dans

les années 70 Ŕ de larges concessions

foncières sont données aux

Banyarwandas

Favoritisme de Mobutu pour les

Banyamulenges dans les années 1970 Ŕ

contrôle des pâturages et terres fertiles

Favoritisme de Mobutu pour les Hemas ;

les Hemas acquièrent encore plus de

terres lors de la zaïrianisation des années

1970

Remise en question de la nationalité

congolaise des Banyarwandas par les

autres groupes ethniques (Nande,

Hunde, Nyanga, Tembo…) et par le

gouvernement (loi sur les nationalités

de 1981)

Remise en question de la nationalité

congolaise des Banyamulenges par les

autres groupes (Bashi, Bembe, Warega…)

et par le gouvernement (loi sur les

nationalités de 1981)

Tensions accrues épisodiques entre les

grands propriétaires fonciers Hemas et les

communautés Lendus en 1966, 1973,

1990, 19997

54 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Déclencheurs

Exclusion des Banyarwandas de la

conférence nationale de 1990

Exclusion des Banyamulenges de la

conférence nationale de 1990

Rébellion du RCD en 1998, soutenu par

lřOuganda, qui entraîna un afflux dřarmes

et légitima la violence comme mode de

gestion des conflits

Guerre civile au Rwanda depuis

1990 Ŕ implication des Hutus et Tutsis

congolais dans la crise Rwandaise

Création des groupes armés dřauto-défense

Banyamulenge dans les années 1980

Disponibilité des armes à feu à cause des

guerres des rébellions de 1996 et 1998

Eruption des violences locales entre

les groupes ethniques se considérant

autochtones (au début surtout Hundes

et Nyangas) au Walikale et Masisi en

mars 1993

Guerre civile au Rwanda depuis octobre

1990 et implication de quelques

Banyamulenges du côté du Front Patriotique

Rwandais (FPR)

Effacement de lřautorité de lřEtat avec la

guerre de 1998

Génocide au Rwanda et déferlement

dřun million de réfugiés Rwandais du

Nord et du Sud Kivu y compris des

responsables du génocide et des

milices interahamwes en avril 1994

Génocide au Rwanda et déferlement dřun

million de réfugiés Rwandais du Nord et du

Sud Kivu y compris des responsables du

génocide et des milices interahamwes en

avril 1994

Déclenchement des violences lors dřun

conflit local autour de lřextension dřune

concession par un propriétaire Hema

contre la résistance de la communauté

Lendu dans le territoire de Djugu en juin

1999

Attaques contre le territoire Rwandais

et contre les communautés Tutsis au

Nord Kivu par les milices Hutus

formées et entraînées dans les camps

de réfugiés

Attaques contre le territoire Rwandais et

contre les communautés Tutsis au Nord Kivu

par les milices Hutus formées et entraînées

dans les camps de réfugiés

Conflagration des violences et émergence

des groupes armés ethniques soutenus par

lřOuganda, le Kinshasa, ou le Rwanda

Manifestations

Combats continus Guerre de lřAFDL et campagne

Rwandaise pour la rentrée des

réfugiés et traque des interahamwes

en 1996

Guerre de lřAFDL et campagne Rwandaise

pour la rentrée des réfugiés et traque des

interahamwes en 1996 avec une forte

participation Banyamulenge

Lutte féroce militaire entre de multiples

groupes armés pour le contrôle de Bunia

et les riches terres et mines dřor du district

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 55

Guerre du RCD soutenu par le

Rwanda et lřOuganda depuis août

1998 Ŕ multiplication des groupes

rebelles et des groupes armés Mai-

Mai

Guerre du RCD soutenu par le Rwanda et

lřOuganda depuis août 1998 Ŕ multiplication

des groupes rebelles et des groupes armés

Mai-Mai

Six groupes armés majeurs et de

nombreux groupes locaux sřaffrontent

entre 1999 ; les violences se concentrent

sur Djugu et Irumu mais se répandent sur

toute lřétendue du district

Présence continue de ex-

interahamwes (nommés FDLR depuis

2000) surtout dans les territoires de

Lubéro, Walikale et Rutshuru

Fuite massive de la population en Tanzanie,

y compris des Banyamulenges

Les principaux groupes armés : lřUnion des

Patriotes Congolais (UPC) (Hema, dřabord

soutenus par lřOuganda, depuis 2002 par

le Rwanda) ; Le Parti de lřUnité et de la

Sauvegarde de lřIntégrité du Congo

(PUSIC) (Hema du Sud) ; le Front

Révolutionnaire Patriotique en Ituri (FRPI)

(Lendu, GOC) ; et le Front National

dřIntégration (Lendu, Ouganda)

Emergence du CNDP et de Laurent

Nkunda en 2004

Présence continue des FDLRs au nord et ouest

de la province du Sud Kivu

Contrôle de larges parties du Masisi

et du Rutshuru par le CNDP entre

2005 et 2008

La collaboration des gouvernements

congolais et rwandais pour la traque des

FDLRs depuis 2008 a entraîné un

dispersement des FDLRs vers le centre et le

sud du Sud Kivu

Arrêt de Laurent Nkunda en janvier

2009

Collaboration des gouvernements

congolais et rwandais pour la traque

des FDLR depuis 2008

Présence continue des groupes armés Mai-

Mai et Banyamulenge non-démobilisés et

entraînement militaire continu

Exactions contre les

civils

Recrutement des enfants dans les

groupes armés

Recrutement des enfants dans les groupes

armés

Les combats en Ituri entre 1999 et 2004

ont causé plus de 50,000 morts

Viols de filles et femmes sur une

grande échelle

Viols de filles et femmes sur une grande

échelle

De graves massacres ethniques entre

Hemas et Lendus

56 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Pillages, tracasseries, « taxes »

illégales et travaux forcés contre les

civils

Pillages, tracasseries, « taxes » illégales et

travaux forcés contre les civils

Destruction et incendies des villages

entiers comme rétribution ethnique

Enfants travaillants dans les carrés

miniers

Enfants travaillants dans les carrés miniers Viols massifs, pillages, tracasseries,

travaux forcés, recrutement forcé des

enfants

Dynamiques conflictuelles actuelles locales

Occupation des terres par les

groupes armés et leurs affiliés, surtout

au Masisi et au Rutshuru

Occupation des terres par les groupes armés

et leurs affiliés

Occupation des terres par les affiliés des

anciens groupes armés, dans quelques

contrées dans les territoires de Djugu et

Irumu

Contrôle des ressources minières

contesté entre les groupes armés,

militaires, et les autorités coutumières

et autorités de lřEtat surtout au

Walikale, mais aussi au Masisi et

Rutshuru

Contrôle des ressources minières contesté

entre les groupes armés, militaires, et les

autorités coutumières et autorités de lřEtat,

surtout dans les territoires de Shabunda et

Kalehe, mais aussi Walungu et Uvira

Présence de quelques groupes armés non-

démobilisés au sud du territoire dřIrumu

Contrôle politique et économique

contesté entre les groupes armés, le

pouvoir traditionnel, et le pouvoir de

lřEtat surtout au Řpetit nordř

Contrôle politique et économique contesté

entre les groupes armés, le pouvoir

traditionnel, et le pouvoir de lřEtat

Contrôle des ressources minières contesté

entre les groupes armés, militaires, et les

autorités coutumières et autorités de lřEtat

surtout dans le territoire de Djugu

Contestation du pouvoir coutumier

entre les familles prétendantes ou

entre les représentants de clans ou

ethnies différentes surtout au Řpetit

nordř

Contestation du pouvoir coutumier entre les

familles prétendants ou entre les

représentants de clans ou ethnies différentes

Contestation du pouvoir coutumier entre

les familles prétendantes ou entre les

représentants de clans ou ethnies

différentes

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 57

Annexe 2

Synthèse des recommandations et scénarios proposés

Scénario 1

Statu quo

Scénario 2

Sensibilité aux conflits augmentée

Scénario 3

Sensibilité aux conflits approfondie

Logique

Part de l’hypothèse que l’approche

existante est suffisamment sensible aux

conflits sans devoir s’insérer aux efforts

de peacebuilding

Priorité à l’action humanitaire, c-a-d que

les critères humanitaires sont clés pour

déterminer les zones d’interventions

Augmentation des éléments clés pour

renforcer la dimension ‘ne pas nuire/do

no harm’ à travers tous les aspects du

programme

Identifier des domaines dans lesquels le

PEAR Plus peut contribuer à la

construction de la paix

Révision fondamentale du Programme

en vue de s’attaquer d’une manière

directe et délibérée aux conflits sur tous

les niveaux conflictuels

Choix des zones

d’intervention

Zones ‘durables’ sans tensions ou conflits

interethniques graves

Zones ‘durables’ sans tensions ou conflits

interethniques graves

Choix délibéré des zones aux conflits

fonciers et interethniques pour apporter

un soutien à leur résolution

58 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Collecte de données

et analyse

Continuation de l’approche actuelle

Augmenter la fréquence des évaluations

de protection avec un élément d’analyse

des conflits élargi

Ajustement des instruments de collecte

de données avec un module d’analyse

de conflits intégré aux MSA

Formation approfondie des enquêteurs

des MSA dans l’analyse des conflits

Collecte de données régulière soit par

des agents de terrain, soit par des

informateurs communautaires ;

contribution du théâtre participatif à une

meilleure compréhension des conflits

Ateliers trimestriels d’analyse des

données sur les conflits pour informer la

planification et la mise en œuvre du

PEAR Plus

Collecte de données continue

Adopter le modèle d’Arche d’Alliance des

informateurs indépendants de terrain

pour assurer une analyse constante des

dynamiques conflictuelles

Analyse constante des données sur les

conflits pour informer la stratégie

programmatique et les activités de

mitigation des conflits

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 59

Annexe 3

Liste des personnes consultées

Province du Nord Kivu

Agences des Nations Unis

Félix Ackebo Chargé de protection, UNICEF Goma 3 juillet 2009

Célestin Mirindi Chargé dřéducation, UNICEF Goma 3 juillet 2009

Robert Lussier Chargé de communication, UNICEF Goma 3 juillet 2009

Alphonse Siteke Chargé de communication, UNICEF Goma 3 juillet 2009

Félicien Molima Program Specialist et Chef de Bureau, Nord Kivu, UNICEF Goma 4 juillet 2009

Guillaume Sauval Emergency Specialist, UNICEF Goma 4 juillet 2009

Marie Dimond Chef de Bureau Nord Kivu, PNUD Goma 4 juillet 2009

Angela Murru Administratrice Chargée de Protection, UNHCR Goma 17 juillet 2009

Holly Berman Administratrice Principale Chargée de la Protection, UNHCR Goma 17 juillet 2009

Christine Goyer Administratrice Chargée de la Protection (Kinshasa), UNHCR Goma 17 juillet 2009

Spyros Demetriou Stabilization Team Leader (Eastern Coordination), MONUC Goma 4 juillet 2009

Médias

Magloire Paluku Directeur, Radio Kivu One Goma 5 juillet 2009

Organisations Non-Gouvernementales

Passy Amani Réseau dřéducation civique au Congo (RECIC)/Save the

Children

Goma 4 juillet 2009

Bavon Mwabila Emergency Food Security and Coordinator Specialist, NRC Goma 11 juillet 2009

Jean Emmanuel Mihigo

Mupfuni

Coordinateur de Projet Informations, Conseil et Assistance

Légale (ICLA), NRC

Goma 13 juillet 2009

Jules Mbokani Officier ICLA, NRC Goma 13 juillet 2009

Province du Sud Kivu

Agences des Nations Unis

Michel Dubois Chef de Bureau (Sud Kivu), PNUD Bukavu 6 juillet 2009 Harouna Dan-Malam Coordinateur Provincial dřappui à la lutte contre la Pauvreté,

PNUD Bukavu 6 juillet 2009

Cyprien Maheshe Responsable de suivi et évaluation (Programme Pauvreté) , PNUD

Bukavu 6 juillet 2009

Jean-Claude Chigwrhe Chargé de Programme, PNUD Bukavu 6 juillet 2009 Jean Bisimwa Emergency Officer, UNICEF Bukavu 6 juillet 2009 Danielle Keulen Chef de Bureau, Sud Kivu, UNICEF Bukavu 6 juillet 2009 Alex Bertrand Chargé dřinformation , UNICEF Bukavu 6 juillet 2009 Ilaria Carpen Conseillère de stabilisation, MONUC Bukavu 8 juillet 2009 Bernard Leloup Chef de Sous-Office, MONUC Uvira 10 juillet 2009 Tahirou Diao Chargé dřinformation, MONUC Uvira 10 juillet 2009 Jackie Keegan Chargée de protection, UNHCR Uvira 10 juillet 2009 Organisations Non-Gouvernementales Filippo Mazzarelli Chef de Base et Coordinateur Programme PEAR, AVSI Bukavu 6 juillet 2009 Richard Bwiru Musharamina

Responsable local du Programme PEAR PLUS, AVSI Bukavu 6 juillet 2009

Jean Paul Munganga Coordonnateur a.i., ADI-Kivu Bukavu 7 juillet 2009

60 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Severin Mirindi Ingénieur, AVSI Bukavu Cierano Ruhoko

8 juillet 2009

Christian Stangel Chef de Bureau, IRC Bukavu 6 juillet 2009 Muriel Tschopp Coordinatrice du Programme Community-Driven

Recovery/Tuungane, IRC Bukavu 6 juillet 2009

Dieudonné Kalala Tshiswabantu

Chef de bureau, IRC Walungu 8 juillet 2009

Jean-Baptiste Mukungiwa-Kabizi

Technicien génie civile, IRC Walungu 8 juillet 2009

Eric Mufungizi Technicien en développement rural, IRC Walungu 8 juillet 2009 Léon Masirka Ingénieur, IRC Walungu 8 juillet 2009 Chancelle Furabanu Animatrice de terrain, IRC Walungu 8 juillet 2009 Baudouin Kipaka Coordonnateur, Arche dřAlliance Uvira 10 juillet 2009 Léon Baruani Directeur du Bureau de Bukavu, SFCG Bukavu 7 juillet 2009 Pacifique Ngombwa Coordonnateur DME, SFCG Bukavu 7 juillet 2009 Dupont Ntererwa Assistant Producteur Médias, SFCG Bukavu 7 juillet 2009 Alfred Bulakali Coordonnateur Théâtre, SFCG Bukavu 7 juillet 2009 Nestor Nkuruziza Coordonnateur Médias, SFCG Bukavu 7 juillet 2009 Aldegonde Kyakimwa Coordonnatrice Cinéma Mobile, SFCG Bukavu 7 juillet 2009 Autorités Locales Demilie Andre Kibala Conseiller Chargé des Questions des Grands Lacs,

Gouvernement Provincial Bukavu 7 juillet 2009

Mariette Chirume Conseillère Chargée des questions sociales et Humanitaires, Gouvernement Provinciale

Bukavu 7 juillet 2009

Severin Mugangu Administrateur de Territoire dřUvira Uvira 10 juillet 2009 Ecoles Simon Bulonzu Kazungu Directeur, Ecole Primaire de Chierano Walungu 8 Juillet 2009 Marie-Claire Ntanabwijira Nshokano

Enseignante et animatrice, Ecole primaire de Chierano Walungu 8 juillet 2009

Nestor Bukeduce Vice Président du Comité des Parents, Ecole Primaire de Chierano

Walungu 8 Juillet 2009

Albertine Shabulionzenze Directrice Adjointe, Ecole Primaire de Ruhoko Walungu 8 Juillet 2009 Rwabashosi Boyimkembe Président du Comité des Parents, Ecole Primaire de Ruhoko Walungu 8 Juillet 2009

District d’Ituri

Agences des Nations Unis

Roots Bondowe Virihi Charge de planification, suivi, évalution, UNICEF Bunia 14 juillet 2009

Leandre Nyangezi Chargé hygiène et assainissement, UNICEF Bunia 14 juillet 2009

Félix Monga Chargé de la protection, UNICEF Bunia 14 juillet 2009

Antoine Maleka Chargé dřéducation, UNICEF Bunia 14 juillet 2009

Willy Lukemba Chargé des Affaires Humanitaires, OCHA Bunia 16 juillet 2009

Magalie Salazar Chargée des Affaires Humanitaires Adjointe, OCHA

Bunia 16 juillet 2009

Organisations Non-Gouvernementales

Andrea Burelli Coordinateur, COOPI Bunia 13- 16 jl 2009

Benjamin Kane Responsable Volet « Protection » du PEAR Plus, COOPI Bunia et

Djougou

13-16 jl 2009

Nelson Mandundu Psychologue/formateur, COOPI Djougou 15 juillet 2009

Eric Mpolesha Chargé évaluation rapide et multisectorielle et de plaidoyer,

Oxfam Québec

Bunia 15 juillet 2009

Cedric Mokuku-Mambola Assistant a la coordination, monitoring et protection, Oxfam

Québec

Bunia 15 juillet 2009

Société Civile

Jean-Bosco Lalo Président, Société de lřIturi Bunia 14 juillet 2009

Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus P a g e | 61

Commission foncière de lřIturi

Roger Mgule Commissaire permanent Bunia 15,16 jl 2009

Théobald NřGulo Président adjoint Bunia 15,16 jl 2009

Louise Tajeki Membre Bunia 16 juillet 2009

Zheobald Nkulo Membre Bunia 16 juillet 2009

Guillaume Manganga Membre Bunia 16 juillet 2009

Gilberte Manzima Membre Bunia 16 juillet 2009

Ngule Roger Membre Bunia 16 juillet 2009

Autorités et services publiques

Hon. Pierre Claver

Bedidjo

Député Provincial (Province Orientale) Djougou 14 juillet 2009

Chef de Groupement de Zengo Djougou 14 juillet 2009

Unega Waga Chef de Groupement de Londroma Djougou 14 juillet 2009

Aliker Unega Lodda Chef de Groupement de Lodda Djougou 14 juillet 2009

Pitua Administrateur, PPSSP Djougou 14 juillet 2009

Dr. Justin Mukonkole Medicin chef de zone, Aire de Santé de Zengo Djougou 14 juillet 2009

62 | P a g e UNICEF et Search for Common Ground

Annexe 4

Bibliographie

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