la coalition contre la faim en belgique: les éléments d'un plaidoyer politituqe

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Master en Sciences de la Population & du Développement Quelles sont les stratégies pour la lutte contre la faim dans le cadre de la coopération belges au développement en 2015 ? Le cas de la Coalition Contre la Faim. Présenté par : Line NGUYEN Promoteur : Marc PONCELET Année Académique 2014-2015. 1

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Master en Sciences de la Population &

du Développement

Quelles sont les stratégies pour la lutte contre la faim dans le cadre de la coopération belges au développement en 2015 ? Le cas

de la Coalition Contre la Faim.

Présenté par : Line NGUYEN

Promoteur   : Marc PONCELET

Année Académique 2014-2015.

1

Table des matièresListe des acronymes ............................................................................................................................... 3

Introduction ............................................................................................................................................ 4

La faim dans le monde ........................................................................................................................... 4

La lutte contre la faim en Belgique   : le cas de la CCF ............................................................................ 6

Un aperçu du système belge de la coopération au développement ..................................................... 6

La Direction Générale de Coopération au Développement   et la sécurité alimentaire   : ........... 6

La loi du 19 mars 2013   : ......................................................................................................... 9

La Coalition Contre la Faim – De Coalitie Tegen de honger. ............................................................. 9

Le Fond Belge pour la Sécurité Alimentaire   : ......................................................................... 9

Missions et objectifs de la CCF   : .......................................................................................... 10

Construire une vision commune   : ......................................................................................... 10

Revendications après des politiciens Belges   : ....................................................................... 12

Les autres interlocuteurs de la Coalition contre la faim   : ...................................................... 14

L’Agroécologie pour garantir la souveraineté alimentaire   ? ............................................................. 15

L’importance des petits agriculteurs   : ................................................................................... 15

Le contexte peu favorable à leur prospérité   : ........................................................................ 16

Les réponses agroécologiques face aux défis de l’agriculture   : ............................................. 17

Analyse anthropologique du discours. .................................................................................................. 19

Conclusion ........................................................................................................................................... 23

Bibliographie ........................................................................................................................................ 24

2

Liste des acronymesAE : Agro-Ecologie

APD : Aide Publique au Développement

BIO : Belgian Invest Organisation

BM : Banque Mondiale

CCF : Coalition Contre la Faim

CNCD : Centre National de Coopération au Développement

CPD : Cohérence des Politiques pour le Développement

CSA : Comité pour la Sécurité Alimentaire

CTB : Coopération Technique Belge

DG(C)D : Direction Générale de la Coopération au Développement

ED : Education au Developpement

FAO : Food and Agriculture Organisation

FBSA : Fond Belge pour la Sécurité Alimentaire

GT : Groupe de Travail

OCDE : Organisation de Coopération de Développement Economique

OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unies

OP : Organisation Paysanne

PIB : Produit Intérieur Brut

PNB : Produit National Brut

SA : Souveraineté Alimentaire

SPF : Service Public Fédéral

UE : Union Européenne

3

IntroductionLa lutte contre la faim dans le monde est un combat bien plus vieux que la coopération au

développement Nord-Sud que nous étudions aujourd’hui. Cependant, les progrès sont minces et les

enjeux pour résoudre ce fléaux planétaire se font de plus en plus pressants : raréfaction des ressources

naturelles saines, destruction de l’environnement, réchauffement climatique, croissance

démographique, essoufflement de nos systèmes de production,… Après de rapides constats sur

l’ampleur de la faim dans le monde, je présente dans ce document les solutions stratégiques que la

Coopération Belge au Développement a choisi de mettre en place de façon générale, puis les stratégies

plus spécifiques appliquées par la Coalition Contre la Faim (ensemble d’une vingtaine d’ONG belges)

pour promouvoir des systèmes alimentaires durables. Enfin je développe une analyse anthropologique

succincte des dynamiques et des discours de la Coalition.

Notez que ce travail discute l’Agroecologie. Cette dernière se conçoit comme une solution alternative

au mode de production dominant actuellement. Ce mouvement social et scientifique prend position en

réaction à un modèle de société. Certaines de ses positions peuvent donc se retrouver dans ce travail, il

en va de même pour les positions et les revendications de la Coalition contre la faim qui sont

présentées ci-après.

Etant donné l’ampleur du sujet, les multiples acteurs qu’il met en jeu à différents niveaux et les autres

aspects de notre société avec lesquels il interagit; étant donné les consignes de ce travail et le temps

qu’il m’a été impartit pour le réaliser; étant donné qu’il sera approfondi par un stage et un mémoire à

finaliser l’an prochain, ce document ne fait qu’aborder partiellement, avec un point de vue qui se veut

le plus objectif possible mais qui reste un point de vue parmi d’autres, certaines des dimensions de la

faim et les solutions que la Coalition propose. C’est dans ces limites que je tente d’apporter un

éclairage théorique sur ces stratégies en guise d’introduction à mon mémoire.

La faim dans le mondeOn ne peut plus parler de développement aujourd’hui et encore moins de lutte contre la faim sans

évoquer les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) proposés et adoptés par la

communauté internationale il y a 15 ans. La lutte contre l’extrême pauvreté et la faim est le premier

d’entre eux. Et pour cause la FAO dénombrait début des années 90 que 18.6% de la population en

sous-alimentation chronique soit 1 milliard et 10 millions d’individus. Toujours selon cette

organisation, nous serions passés à 820 millions en 2010-20121. Décembre 2015 sera l’heure des

comptes et la FAO annonce déjà l’atteinte des objectifs pour un grand nombre de pays. L’objectif

premier de réduction de la faim est atteint à ce jour par 72 pays et 9 supplémentaires l’auront atteint

d’ici la fin de l’année, affirme l’organisation. De son côté, la Belgique n’est pas si optimiste. Selon le

Fond Belge pour la Sécurité Alimentaire (FBSA) « il est pour, ainsi dire, certain que nous ne

1Le FBSA avance lui les chiffres de 870 millions pour la même année, s’alignant sur les chiffres de l’union européenne. Le rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation (ONU) avance le nombre de 925 en 2011.

4

parviendrons pas à réduire de moitié la faim d’ici à 2015, tel que prévu par le premier Objectif du

millénaire pour le développement. »

Quoiqu’il en soit, la sous-alimentation ainsi reste très préoccupante. Les émeutes de la faim dues à la

crise alimentaire de 2008 ont rappelé à l’opinion publique que des millions de gens n’ont pas les

moyens de se payer à manger. En effet, cette crise n’est pas due à un manque de nourriture mais à la

hausse des prix des denrées alimentaires. Aussi, selon les experts de l’ONU « Les dernières

estimations disponibles indiquent que quelque 795 millions de personnes (10.9%) ont souffert de sous-

alimentation chronique pendant la période 2014-2016.» (FAO 2015). C’est certes 26 millions de

moins que l’an dernier mais c’est beaucoup plus que ce qu’avaient prévu les OMD et le sommet

mondial de l’alimentation en 19962. D’autre part, Jean Ziegler, ancien rapporteur spéciale aux Nations

Unies pour l’alimentation, met en exergue les causes de la faim et ses conséquences catastrophiques.

Comme nous l’avons évoqué, ce n’est par manque de nourriture mais par manque de moyens

financiers que les gens meurt de faim, conséquence direct de l’obligation des pays pauvres de

rembourser leur dette extérieure, ce qui les prive de fonds à investir dans le développement rural et

l’agriculture. La faim n’entraime pas seulement la mort par inanition, elle provoque des dommages

irréversibles sur le système nerveux, moteur, et entraine bien d’autres souffrances physiques mais

aussi psychologiques comme l’angoisse et la honte3.

Qu’on se félicite de certaines avancées ou qu’on mette en avant le fait que des millions de personnes

meurent encore de la faim chaque année, des agences internationales aux ONG en passant par les

militants, tous les acteurs du développement dénoncent l’absurdité et le scandale qu’est cette sous-

alimentation chronique dans un monde d’abondance. Un tiers de la production alimentaire finit dans

les poubelles chaque année soit 1.3 milliards de tonnes ce qui représente 990 milliards $/an soit 7 fois

le montant de l’aide au développement en 2011-2012. Nos systèmes de production sont capables de

nourrirent 12 milliards d’êtres humains, nous ne sommes pas encore 7 milliards. L’OMS estime que

2.3 milliards d’adultes sont obèses4-5.

2Oxfam International (2015)3ZIEGLER.J., L’empire de la honte, Fayar 2005 (édition mise à jour 2099), pp 129-161.4Source : planetoscope5http://www.cncd.be/Le-grand-gaspillage-alimentaire

5

La lutte contre la faim en Belgique   : le cas de la CCF

Un aperçu du système belge de la coopération au développement6

La DGD est l’organe administratif de la coopération belge. Il se charge de définir les politiques de la

coopération et de la bonne mise en œuvre des programmes et projets de développement. Elle fait

partie du service public fédéral des affaires étrangères, commerces et développement et dépend

directement du ministre de la coopération, Alexander De Croo. C’est aussi cet organe qui subsidie les

ONG agrées selon divers critères dont, notamment, celui d’avoir pour objet principal l’aide au

développement.

La coopération au développement Belge est active à plusieurs niveaux : l’aide bilatérale d’état à état,

l’aide multilatérale d’état à agences internationales (ONU, BM, UE,…), et l’aide bilatérale indirecte

(ONG, syndicats, fédérations,…)

D’autres instances fédérales dépendent de la DGD et donc du SPF, c’est le cas de la CTB (organe

exécutif de l’aide public belge), BIO (société d’investissement dans le secteur privé des pays en voie

de développement), Finexpo (soutient à l’exportation), B-fast (aide d’urgence), le FBSA (fond dédié à

sécurité alimentaire financé par la DGD et la lotterie nationale).

La Direction Générale de Coopération au Développement et la sécurité alimentaire :

La lutte contre la faim passe par ce que l’on appelle la sécurité alimentaire, c’est à dire « assurer que

aliments de qualité soient disponibles en quantité suffisante et soient accessibles, en vue d’assurer de

bons résultats nutritionnels. » (FAO, 2015) et le droit à l’alimentation7. Ces principes sont soutenus et

6Source : Pirotte. G., séminaire de l’aide au développement, ULG 2013-2014.7"Le droit à l’alimentation est le droit d’avoir un accès régulier, permanent et libre, soit directement, soit au moyen d’achats monétaires, à une nourriture quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions

6

utilisés dans la lutte contre la faim par les grandes organisations internationales, les états et autres

acteurs du développement. A cet égard, la DGD a adopté (comme bien d’autres acteurs, de la FAO aux

organisations paysannes du Sud en passant par l’Union Européenne et les pays de l’OCDE) un cadre

stratégique concernant la lutte contre la faim.

« La Coopération belge au développement soutient l’agriculture familiale durable et vise à

améliorer la sécurité alimentaire des populations de nos pays partenaires et à contribuer à une

croissance économique durable créatrice d’emplois décents. Pour ce faire, elle s’engage à

accompagner, dans le respect des principes du droit à l’alimentation et de l’égalité des droits entre

les sexes, le processus de transition d’une agriculture d’autosubsistance vers une agriculture

familiale humaine, professionnelle et économiquement rentable afin de réaliser l’OMD1 »8 .

Voici l’objectif de la Belgique en la matière. Pour y parvenir, outre son soutient à l’agriculture

familiale, elle a défini quatre priorités avec une attention particulière pour la gestion durable et le

respect de l’environnement ainsi que l’empowerment des femmes. En effet, ce sont les femmes qui

assurent nombreux des travaux agraires et qui assurent un rôle fondamental dans la sécurité

alimentaire de leur famille par les activités de cultures vivrières qu’elles effectuent. Selon la Banque

Mondiale, elles produiraient 60 à 80% des denrées alimentaires mondiales. Pourtant, les femmes n’ont

pas le même accès aux ressources que les hommes, ce qui pose un problème pour leur indépendance et

pour la sécurité alimentaire locale et mondiale. (PHI, WFP, UNSCN et ACF 2012 CFF 2014, FBSA,

DGD 2010). L’urgence climatique est un fait attesté par la communauté scientifique et le monde de la

coopération a décidé d’en faire une priorité en les inscrivant dans les OMD. Le développement durable

est dans tous les discours et est pris en compte dans l’élaboration des stratégies et des projets du

développement de la coopération belge9. Les priorités spécifiques à la lutte contre la faim sont

l’augmentation de la production locale, l’accès aux marchés et la valorisation des produits, le

renforcement des rôles de régulation et de coordination de l’état pour une meilleure gouvernance du

secteur agricole, et le renforcement du rôle et de la position de la femme dans l’agriculture.

L’Organisme d’investissement BIO est aussi inclus dans cette stratégie afin de renforcer les PME et les

exploitations rurales au Sud ; le groupe Colruyt, chaine de grande distribution belge met en vente des

produits fairetrade directement issus de la production paysanne des organisations d’agriculteur

soutenues par Les Iles de Paix. (DGD 2012, 2014).

Notons aussi que pour favoriser la sécurité alimentaire, la Belgique est un des principaux donateurs

des agences multilatérales et soutient l’agriculture familiale et défend le droit à l’alimentation via les

programmes des ONG qu’elles subsidient. « Au cours des dernières années, le pourcentage d’aide

publique au développement que la DGD a consacré à l’agriculture (sylviculture et pêche incluses) a

culturelles du peuple dont est issu le consommateur, et qui assure une vie psychique et physique, individuelle et collective, libre d’angoisse, satisfaisante et digne". Jean Ziegler Cité par FIAN Belgique (http://www.fian.be/le-droit-a-l-alimentation/definition/article/definition-droit-a-l-alimentation)8DGD (2010) note stratégique pour l’agriculture et la sécurité alimentaire9STASSART. P., Introduction au Développement Durable, ULG 2014-2015.

7

considérablement augmenté, passant de 6,10% en 2007 à 9,22% en 2011 - de 10,5% à 15,3%, si l’on

prend l’agriculture, le développement rural et l’aide alimentaire comme un tout. La DGD se conforme

ainsi à la promesse faite par le Ministre, lors de la crise alimentaire de 2009, de consacrer 10% du

budget à l’agriculture en 2010 et 15% en 201510»

Cependant, suite aux restrictions budgétaire et à la réforme de la DGD, les subventions aux ONG ont

été diminués. Les critères d’agrémentation ont été revus, eux, à la hausse. Depuis 2011, l’aide publique

au développement (ADP) a ‘’perdu’’ 200 millions et le Ministre De Croo prévoit un coupe de 150

millions € pour cette année. N’oublions pas l’engagement de 0.7% du PIB versé à l’APD depuis le

rapport Pearson en 1969, objectif que la Belgique n’a jamais atteint ! En 2014, 8.4% de l’APD soit

106,6 millions € ont été dédié à l'agriculture, sylviculture et pêche contre 11.1% soit 114.5 millions €

en 2012 alors que la DGD avait réintroduit son engagement en faveur du soutien à l’agriculture

familiale en 2012, 2013 et 201411. Avec ces millions en moins, des dizaines de projets à travers le

monde se voient coupés de leur financement et donc sans moyen de continuer leur travail sur le

terrain. Des millions de personnes vulnérables, bénéficiaires de ces projets seront les victimes directes

de ces coupes budgétaires, résultats de choix politiques.

« La nouvelle majorité fait donc le choix d’un monde où la faim continue ses ravages, où les

inégalités internationales perdurent. Mais aussi d’un monde plus instable, ce qui est étonnant pour un

gouvernement qui semble faire de la sécurité une telle priorité. » (CNCD, 2014).

Prenons un exemple : pour soutenir leurs agriculteurs et mettre en place des politiques publiques

favorables, les gouvernements des pays concernés ont besoins de moyens financiers afin de

développer les voies de communications, soutenir les politiques agricoles publiques,… L’aide

bilatérale pourtant essentielle est entravée par les budgets limités.

Si officiellement, à travers divers rapports et notes stratégiques, la Belgique s’engage dans la lutte

contre la faim à travers son soutien à l’agriculture familiale et la mise cohérence différents acteurs

touchant des près au de loi à l’agriculture, selon certaines ONG, les faits montrent que le pays se

désengagent financièrement et politiquement. Les acteurs du développement dont la couple CNCD

11.11.11. et la Coalition Contre la Faim en appellent à un réengagement fort de la part du

gouvernement afin de sortir de la crise alimentaire chronique qui frappe de nombreux pays.

La loi du 19 mars 2013 :

Ce cadre législatif entend définir les visions et les principes de la coopération belge au développement,

elle est donc valable et applicable pour et par tous les acteurs du secteur. Premièrement, cette loi remet

l’accent sur les objectifs de Paris (alignement sur les politiques des pays bénéficiaires, appropriation

par les bénéficiaires, harmonisation des donateurs, la gestion axée sur les résultats et les

responsabilités mutuelles des partenaires). Ensuite la loi insiste sur cohérence et l’efficacité de l’aide

10 DGD (2014) rapport annuel.11 DGD (2010) note stratégique pour l’agriculture et la sécurité alimentaire

8

en tant que priorités. La cohérence de politiques (CPD) est un mécanisme, dès lors légiféré,

concernant tous les acteurs du développement, qui consiste à ce que les politiques de l’aide aux

développements ne soient pas mises à mal par d’autres politiques. D’autre part, la loi intègre une

approche du développement fondée sur les droits humains, économiques, culturels et sociaux (dont le

droit à l’alimentation) tel que repris, entre autre, dans la Déclaration des droits de l’Homme de 1948.

Enfin et surtout, elle servira de cadre législatif pour les prochaines réformes (BIO, CTB, subsides

ONG et des universités, et cadre les prochaines réformes en matière de CPD). Elle encadre également

l'aide humanitaire dont l’ancienne loi ne faisait pas mention.

La CPD est un mécanisme essentiel dans lutte contre la faim car le secteur de la coopération mais

aussi celui de l’agriculture sont en lien étroit avec un grand nombre de décisions politiques prises par

d’autres ministères. « Il faut non seulement que les autres politiques ne les entravent pas mais aussi

qu'elles les soutiennent 12» si la Belgique veut promouvoir efficacement le droit à l’alimentation.

La Coalition Contre la Faim – De Coalitie Tegen de honger.Cette coalition crée en 2002 est financée par le FBSA, ce fond est lui-même soutenu par la DGD et par

la loterie nationale. Le caractère fédéral de ces instances est donc fortement présent. La coalition

compte une vingtaine ONG membres néerlandophones et francophones pour une majorité. Malgré

cette majorité, tous les membres ou presque s’expriment dans les deux langues sans difficulté et

chacun s’exprime librement dans celle de son choix. Avant de présenter plus en détails cette coalition

ainsi que ces objectifs et activités, attardons-nous un instant sur ce fond belge qui la finance.

Le Fond Belge pour la Sécurité Alimentaire :

Ancien Fond de Survie pour le Tiers-Monde (1983-1998) puis Fond Belge de Survie (1999-2009)

l’actuel Fond Belge pour la sécurité alimentaire émane d’une évaluation de plus de 25 ans d’activité

pour la sécurité alimentaire. Il a été officiellement institué par la loi du 19 janvier 2010 et s’aligne sur

les principes de la coopération belge inscrits dans la loi du 19 mars 2013. Le fond est alimenté par la

loterie nationale à hauteur de 250 millions d’euros pour une période de 10 ans et par la DGD pour 10.4

millions € de 2003 à 2014. Les activités du Fond se concentrent dans les pays subsahariens à haut

risque d’insécurité alimentaire. Cet instrument de financement – résultant d’une décision

parlementaire- met en place des programmes intégrés et multidimensionnels axés sur l’objectif de

renforcement de la sécurité alimentaire de la coopération Belge. Pour ce faire, il agit en synergie et en

partenariat avec de nombreux partenaires aux expertises variées afin d’apporter une plus-value

significative dans le secteur de la lutte contre la faim. Cette approche programme est aussi basée sur

les quatre piliers de la sécurité alimentaire définis par la FAO (disponibilité, accessibilité, adéquation,

stabilité/durabilité) dans un souci de cohérence et d’efficacité. Cependant, selon le FBSA, il ne suffit

12http://www.lalibre.be/actu/movewithafrica/la-coalition-contre-la-faim-appelle-les-dirigeants-a-la-coherence-525e4bad3570225c19f03e56

9

pas d’aider, « il convient également d’accroitre la cohérence entre les différents domaines d’action

politique qui ont des répercussions sur le développement ». Le fonds, en plus de s’inscrire dans une

démarche de cohérence des politiques se veut aussi un outil de sensibilisation et d’éducation. C’est

pourquoi il finance des campagnes d’information sur le droit à l’alimentation et la sécurité alimentaire

en Belgique et dans les pays partenaires. La CCF est un des acteurs financés partiellement et

travaillant de concert avec le FBSA dans la lutte contre la faim.

Missions et objectifs de la CCF :

La CCF entend appuyer l’agriculture familiale durable en tant que priorité dans la coopération belge

au développement ; consolider les organisations paysannes faîtières locales afin qu’elles puissent jouer

un rôle plus important et défendre leurs intérêts économiques, politiques et sociaux auprès de leurs

interlocuteurs ; renforcer la CPD afin de soutenir les politiques de développement et enfin créer des

espaces de débats démocratiques entre différents acteurs de la coopération belges autour du soutien à

l’agriculture familiale durable.

Construire une vision commune :

Pour ce faire, les membres ONG de cette coalition constituent différents groupes de travail qui

s’occupent de rédiger et publier des rapports, des fiches thématiques, des dossiers afin d’appuyer leur

travail de plaidoyer sur des bases scientifiques fournies (GT Agroécologie, GT genre, GT plaidoyer et

politique, GT climat, ...)13.

Cette année, la CCF est occupée de créer un cadre commun comprenant les positions et les

revendications claires et précises de ses membres, toujours dans le souci de renforcer leurs actions de

plaidoyer politique. Car bien que les termes très rependus dans le monde de la coopération puissent

faire croire à un consensus général, il est surprennent de s’apercevoir que derrière ces termes, chacun a

sa compréhension et sa mise en œuvre spécifique du concept. Pour ne citer qu’un exemple,

« durable » est devenue LE concept clef du développement depuis la fin des années 80 et pourtant il

recouvre encore des sens si différents pour tous les acteurs. Au sein d’une même ONG, les conceptions

divergent et entre ONG, il faut se mettre d’accord sur les priorités entre viabilité économique et donc

durabilité de l’exploitation agricole et durabilité écologique. C’est donc un travail de longue haleine

qui demande débats, concertations et volonté sur la durée de la part de tous les membres14 . A terme, la

Coalition aimerait parvenir à un document reprenant le fil rouge que ses membres entendent suivre

pour lutter contre la faim.

Pour l’instant les acteurs se sont mis d’accord sur certains points et lignes directrices qui se

retrouveront dans le document-cadre final.

Il est tout d’abord important de noter que la CCF promeut non pas la sécurité alimentaire, mais la

souveraineté alimentaire. Cette dernier reprend les principes de la sécurité alimentaire et y ajoute le 13Pour plus d’informations sur leurs publications, voir http://www.coalitioncontrelafaim.be/, http://www.pfsa.be/14Line Nguyen, Rapport de stage 2015

10

droit des peuples et des états à définir eux-mêmes leurs politiques agricoles et alimentaires, elle donne

la priorité à la production et aux marchés locaux, s’appuie sur la participation actives des agriculteurs

et des consommateurs comme acteur clef du système alimentaire afin de défendre et de promouvoir

une alimentation saine produite dans le respect des individus, des limites des capacité de notre planète

afin d’assurer les besoins des génération futures. Pour ce faire, elle garantit aux producteurs l’accès

aux ressources de productions qui doivent être gérées durablement, un revenu décent couvrant les prix

de production, un commerce transparent qui implique des relations sociales justes et égalitaires.

(Déclaration de Nyéléni, 2007). La défense et la promotion de la souveraineté alimentaire vont bien

plus loin que la sécurité alimentaire qui se cantonne à l’apport suffisant en calories et nutriments grâce

à alimentation disponible et accessible. Elle occulte donc tout l’aspect du COMMENT ces produits

alimentaires sont rendus disponibles et accessibles aux populations vulnérables, ce qui permet aux

pays du nord de réponde à la sécurité alimentaire en exportant leurs surplus de production à bas prix.

Ces produits se retrouvent sur les marché locaux des pays du Sud, ce qui cela dit en passant, ruine

totalement la capacité des agriculteurs locaux à rivaliser avec les produits européens et par ce fait

modifie les habitudes alimentaires des populations se dirigeant naturellement vers les produits les

moins chers faute de pouvoir d’achat suffisant. Cette dynamique est exclue avec la défense de la

souveraineté alimentaire. Elle a été présentée par la Via Campesina au sommet mondial pour

l’alimentation en 1996 15.

C’est donc ce droit que la CFF entend promouvoir et défendre auprès de ses interlocuteurs au Sud

comme au Nord.

Deuxièmement, la Coalition entend apporter un soutien, à travers des relations de partenariat, aux

organisations paysannes et aux petits agriculteurs locaux. Si les relations et les formes de soutient

varient d’une ONG à l’autre, leurs objectifs sont similaires : renforcer les capacités de ces

organisation/collectivités afin qu’elles puissent faire entendre leur voix et défendre leur droit. Aussi,

les membres doivent encore préciser ce qui est ‘’local’’ et ‘’petits’’ bien que cela soit plus des

indicateurs que des définitions arrêtées.

Troisième grande ligne de consensus, les plus grands obstacles à la réalisation de cette souveraineté

alimentaire sont les décisions politiques internationales concernant le commerce et la finance. L’OMC,

qui encadre les relations commerciales et les entérine sous forme d’amendements et de lois

contraignantes, est donc la première organisation mais la plus difficile à intégrer dans la cohérence de

politiques. Comment, au niveau politique faire des avancées importantes dans la lutte contre la faim

quand nous sommes tenus par des lois soutenant la dérégulation des marchés , l’abaissement du rôle

des états dans leur souveraineté et soutenant la logique libérale de la production au plus bas prix 16?

Enfin, la coalition se veut cohérente et entend porter devant les instances politiques belges et les

agences internationales impliquées de près ou de loin dans l’agriculture un message clair, porté par un

15http://www.pfsa.be/spip.php?rubrique46 16Note synthèse présentée à la Coalition lors du séminaire interne le 10 mars 2015.

11

nombre grandissant d’ONG et de citoyens. La plus-value de cette coalition est bien là, le poids

politique. La mise en synergie du travail d’une vingtaine d’ONG sur des sujets tels que l’agro-

écologie, l’accaparement des terre, le genre, la nutrition, l’agriculture, le plaidoyer,… permet à la

coalition mais aussi aux ONG du développement d’adresser des revendications qui ont une influence

sur la politique et une légitimité scientifique et citoyenne, de favoriser les synergies et le partenariat

entre les membres et avec les partenaires au Nord et au Sud17.

Revendications après des politiciens Belges :

La coalition est très active dans le domaine du plaidoyer au niveau belge. De par sa position dans le

paysage de la coopération Belge, elle est un interlocuteur important concernant la lutte contre la faim.

En effet, la CCF comprend parmi ses membres des ONG des deux communautés linguistiques et le

CNCD 11.11.11., coupole des ONG francophones, elle est aussi directement liée au SPF par ses

activités qui ne sont rien de plus que la mise en œuvre des stratégies du FBSA (organe d’aide

bilatérale), elles-mêmes alignées sur les politiques belges en matière de coopération (loi du 19 mars

2013).

Récemment, la CCF a publié un « policy brief » concernant la cohérence des politiques et en appel à

l’engagement politique de nos ministres. Comme nous l’avons évoqué dans les chapitres précédents, la

lutte contre la faim s’appuie sur la sécurité alimentaire, directement liée à l’agriculture et donc aux

politiques agricoles, économiques et commerciales nationales, européennes et internationales. En effet,

l’agriculture locale est à la base de la sécurité alimentaire et de la souveraineté alimentaire et pour que

celles-ci puissent être assurées, il est essentiel de mettre en place la cohérence de politique afin de ne

pas entraver les avancées faites en matière de lutte contre la faim par d’autre décisions politiques. La

CPD est définie dans la loi comme :

«processus visant à assurer que les objectifs et les résultats des politiques de coopération au

développement d’un gouvernement ne soient pas contrecarrés par d’autres politiques de ce

gouvernement ayant un impact sur les pays en développement, et que ces autres politiques

soutiennent, là où c’est possible, les objectifs du développement». 

De plus, ce processus est accompagné de mécanismes de coordination et d’évaluation entérinés par

des arrêtés royaux et assurer par le parlement à titre suivi. Le GT parlementaire du FBSA pourrait

aussi jouer un rôle dans ce suivi. De plus, la Belgique s’est officiellement engagée à soutenir une

agriculture familiale humaine, professionnelle et économiquement rentable18. Malgré cela, les

décisions politiques prises par nos élus et ministres continuent de saper les fondements des stratégies

pour la lutte contre la faim. Différentes ONG membres et la CCF ont publié plusieurs rapports et

études sur l’incohérence de ces choix et leurs impacts sur la sécurité alimentaire des populations déjà

17Entretient de Stéphane Parmentier, responsable plaidoyer pour l’agro-écologie et l’accaparement des terres chez Oxfam-Solidarité, membre de la CCF.18DGD (2010) note stratégique

12

vulnérables mais aussi sur les producteurs et consommateurs belges. En voici quelques

exemples parmi d’autres:

De nombreuses banques en Belgique pratiquent la spéculation sur les denrées alimentaires et

proposent des placements financiers à leurs clients qui alimentent cette spéculation. Or on sait

pertinemment que cette spéculation amplifie d’avantage la volatilité des prix agricoles en

modifiant le cours de ces produits. Cela à des conséquences directes sur le marché

international et les marché locaux où les aliments sont vendus plus chers –les consommateurs

au faibles pouvoir d’achat sont fatalement touchés et des milliers de personnes

supplémentaires ne savent plus se payer à manger- ou moins chers – les producteurs ne savent

plus écouler leurs marchandises à un prix qui couvre leurs couts de production et leur assurent

un revenu décent19. Ces mêmes banques financent également l’accaparement des terres

notamment en octroyant des crédits ou en offrant des fonds d’investissement à des entreprises

privées, celles-ci rachetant d’immenses étendues de terres en chassant les paysans, nomades

de leurs terres20.

Suite à des coupes budgétaires à répétitions décidées par les gouvernements Di Rupo et

Michel, a consacré seulement 0.46% du PIB en 2014 à l’aide publique au développement.

C’est l’ensemble de la coopération qui est mise à mal par les budgets limités qu’elle reçoit

pour fonctionner et mettre en place des projets et programmes efficaces.

La Belgique a renforcé son soutien aux agro-carburants alors que la production de ces

carburants est très gourmande en terres fertiles et en eau, alimentant considérablement

l’accaparement des terres et la déforestation par des grosses firmes21-22.

Au vu des quelques incohérences relevées ici, il est déplorable de constater que la CPD, bien que

faisant l’objet d’une loi, n’a aucune existence concrète dans la pratique. De ce fait, la CCF (mais aussi

FIAN, Le CNCD et sont pendant néerlandophone 11.11.11., Oxfam-Solidarité et d’autres ONG) en

appelle aux autorités Belge :

-Elle encourage le gouvernement à tenir ses promesses en matière de Budget alloué à l’APD et

plus particulièrement pour la sécurité alimentaire et l’agriculture.

-Elle demande aux autorités belges de jouer un rôle actif au sein des agences internationales de

développement concernant les principes liées aux investissements agricoles, la mise en œuvre

des résolutions volontaires adoptées lors de la réunion du Comité de la sécurité alimentaire

mondiale en 2001.

19 CNCD, OXFAM, RFA, 11.11.11 (2013) Spéculation sur les matières premières agricoles. La complicité des banques belges dans la spéculation sur l’alimentation.20CNCD, OXFAM, RFA, 11.11.11 (2013) Les banques en Belgique financent l’accaparement des terres. Quelles régulations du secteur ?21Entretient de Stéphane Parmentier, responsable plaidoyer pour l’agro-écologie et l’accaparement des terres chez Oxfam-Solidarité, membre de la CCF.22CCF (2014) Une cohérence de politique pour le droit à l’alimentation.

13

-Elle pousse les autorités à promouvoir et investir dans les méthodes agro-écologiques qui sont

des méthodes d’agriculture durable et permettant un meilleurs rendement avec moins

d’intrant. Ainsi la Belgique mettrait à exécution ses promesses de soutenir une transition vers

une agriculture durable et humaine.

-Elle incite également l’investissement dans la recherche agronomique dédiée aux méthodes

agroécologiques.

-Elle sollicite les élus pour qu’ils portent l’engagement de mettre en œuvre des politiques

cohérentes à la future conférence ministérielle et qu’elle le concrétise dans une déclaration

politique au plus haut niveau. Il est essentiel que le soutient à l’agriculture familiale concerne

et fasse l’objet d’un engagement de la part des différentes branches du gouvernement.

-Elle demande à la Belgique de soutenir et d’œuvrer pour la CPD au sein des institutions

internationales où se prennent des décisions ayant un impact sur la sécurité alimentaire et

l’agriculture.

-Elle demande que des espaces de débat et d’interpellation soient institués à travers les

mécanismes de la CPD pour plus de transparence politique. (Coalition Contre la Faim

2011,2014).

Les autres interlocuteurs de la Coalition contre la faim :

La CCF est très active en Belgique mais aussi à l’étranger et sur le plan international. Elle organise des

table rondes entre agriculteurs et ONG afin de favoriser les partenariats, les complémentarités, et de

renforcer les capacités et les connaissances de chacun.

Elle soutient les organisations paysannes via l’action de ses membres en matière de participation et

d’appropriation. Certains d’entre eux ont récemment participé à la réunion de Nyéléni au Mali pour

l’agro-écologie en février 2015 et en ont rapporté les points principaux lors d’un séminaire interne23.

De par sa lutte contre la faim, la CCF interagit de près ou de loin avec des instances internationales

variées. D’une part, elle se base, entre autre, sur les rapports de la Commission européenne, la FAO,

de l’ONU, du CSA et la Banque mondiale pour fournir des données jugées fiables. D’autre part, elle

s’adresse à eux via les politiciens belges ou directement pour des actions de plaidoyer. Par exemple,

des membres ont des contacts avec des membres de la FAO et mettent à profit ces relations pour

influencer les décisions de cette dernière en matière d’agro-écologie.

En outre, elle joue un rôle dans des grandes réunions comme la conférence de Nyéléni au Mali, où se

sont rassemblés des nombreux représentants d’ONG, D’OP, d’agriculteurs d’association de femmes et

de paysans,…

23Rapport de réunion, séminaire interne du 10 mars 2015.14

L’Agroécologie pour garantir la souveraineté alimentaire   ?

L’importance des petits agriculteurs :

« Les petits agriculteurs et l’agriculture familiale engendrent 30 à 40 % du PNB dans la plupart des

pays africains, la population agricole représente 43% de la population active dans le monde »24

« Plus de 90 pour cent des 570 millions d’exploitations agricoles à travers le monde sont

gérées par un individu ou une famille et la main-d’œuvre y est principalement familiale. Ces

exploitations représentent plus de 80 pour cent de la valeur de la production alimentaire mondiale.

Dans le monde, 84 pour cent des exploitations familiales sont inférieures à deux hectares et elles ne

gèrent que 12 pour cent de la totalité des terres agricoles. » (FAO 2015).

« 820 millions de personnes souffre de la faim dans le monde, 75% d’entre eux sont des

agriculteurs » (CCF 2008, FAO 2015, Parmentier S. 2014)

Ces différentes statistiques permettent d’avoir un certain point de vue quantitatif sur la question. Nous

comprenons que s’occuper du cas de l’agriculture, c’est s’occuper de l’intérêt du plus grand nombre

qui dépend de l’agriculture pour vivre25.

De plus, toutes les ONG membres de la CCF et de la plateforme pour la sécurité alimentaire mettent

en priorité l’appui aux petits producteurs et aux exploitations familiales créateurs/trices d’emplois, de

relations sociales encrées dans la culture, de nourriture variée et locale, elle aussi ancrée dans la

culture. En effet l’agriculture locale et familiale joue un rôle important dans la structure sociale et la

pérennisation de la culture spécifique aux régions, aux ethnies et aux pays26.

Ensuite, la diversité de ces exploitations et de leurs modes de gestions sont impressionnantes et offrent

de multiples techniques pour travailler la terre de façon adaptée au contexte local (ressources

disponibles, climat, connaissances,..). On retrouve toutefois des caractéristiques communes à ces

exploitations familiales. Outre l’aspect social fondamental, notons que ces productions sont

directement dirigées vers les besoins locaux diversifiés (nourriture humaine et animale, plantes

médicinales, fibres pour les tissus et autres manufactures) et donc les tâches de ces agriculteurs le sont

tout autant, les ressources sont gérées comme un patrimoine familial qu’il faut préserver, les méthodes

sont ancrées dans le contexte culturel économique et social de la région,...27

Le contexte peu favorable à leur prospérité :

Le libéralisme toujours plus poussé qui encadre les logiques économiques et développementalistes

menacent dangereusement la vie de ces milliers de personnes ne parvenant pas à obtenir un revenu

décent de leurs activités. Outre des prix toujours trop bas ou trop hauts mais jamais assez stables, une

24DESGAIN. S., Nourrir la planète, Luc Pire, 200825Selon la Banque Mondiale, l’agriculture est la principale source de revenus pour 70% de la population mondiale pauvre vivant en zone rurale.26CCF 2008 op cit.27PARMENTIER. S., Scaling-up agroecological approaches : what, why and how ?, Oxfam-Solidarité, 2014.

15

aide internationale qui ne fait pas le poids face aux règles du marché et au capitalisme mondialisé 28,

l’accaparement des terres par l’agro-business, pour la production des agro-carburants et l’exploitation

minière constituent des pressions supplémentaires sur les petits agriculteurs. Nombreux sont ceux qui

migrent vers les villes déjà trop remplies des pays pauvres où les plus pauvres d’entre eux se

retrouvent dans les bidons villes. Sans qualification, difficile de trouver un emploi, d’autant plus que

les demandeurs sont bien plus nombreux que les offres disponibles29. Cet exode vient alimenter

d’autres problèmes comme l’hygiène, l’orphelinat, la violence et la misère. Cette dernière est

imposée ; ce qui est bien différent de la pauvreté choisie30-31.

De surcroît, Olivier De Schutter nous dit que ces petites exploitations sont aussi plus productives que

les grandes exploitations intensives. L’économie et l’agro-business ne regardent que pour critère

d’efficience la productivité par tête, ce qui rend les grandes fermes plus compétitives dans certaines

statistiques. Or si l’on considère d’autres critères, on s’aperçoit que les méthodes agro-écologiques

employées sur des petites surfaces sont plus efficientes dans le sens qu'elles produisent plus à l’hectare

en utilisant moins de ressources32.

C’est pourquoi de nombreux acteurs du développement belges et étrangers ainsi que certaines agences

internationales comme l’ONU, La FAO et la BM mettent en garde non seulement sur le manque de

régulation du marché et de la finance, le manque de protection des agriculteurs mais aussi sur

l’importance de la gestion durable des ressources environnementales. Ces facteurs ayant une incidence

considérable sur des aspects économiques, sociaux, culturels, de santé ainsi que sur l’avenir de

l’humanité car nous devons tous nous nourrir, et de préférence avec des aliments sains.

Les réponses agroécologiques face aux défis de l’agriculture :

L’Agro Ecologie (AE), est un ensemble varié de savoirs scientifiques, de pratiques paysannes et de

revendications sociales. Elle reprend un ensemble de méthodes non exhaustives qui permet de

produire plus avec moins de ressources tout en respectant et en alimentant le système écologique dans

lequel nous cultivons. Les pratiques sont spécifiques et directement dépendantes du milieu

(composition des sols, climat, plantes cultivées,…). C’est pourquoi les experts n’en donnent pas une

définition fermée mais se réfèrent à un ensemble de principes qui s’est amplifié au fils des recherches

sur le sujet. Citons brièvement les fondamentaux : permettre le recyclage de la biomasse et optimiser

la disponibilité des nutriments, garantir la condition des sols, minimiser les pertes des ressources,

favoriser la diversification génétique, permettre les interactions et les synergies biologiques (Altieri

1995, Altieri cité par De Schutter 2011).

28http://www.cncd.be/Quand-les-pays-du-sud-percoivent 29TARAKAN. J. Economie du développement, ULg 2014-2015.30Ziegler op cit.31RABIBIH. P., Vers la sobriété heureuse, Acte Sud, 201032DE SCHUTTER. O., VANLOQUEREN. G., the new green revolution : how twenty first century science can feed the world, in Solutions, vol2, issues 4, 2011.

16

Le groupe GIRAF récence dans un rapport différents principes historiques, méthodologiques et

socioéconomique de l’AE ainsi que les perspectives de recherche à mener dans le contexte belge et

européen. Les auteurs insistent sur l’importance de « construire un espace autonome qui permettent

de forger les concepts scientifiques sur lesquels s’appuierait une sortie progressive du verrouillage

actuel du régime de production des connaissances » (GIRAF 2012). En effet, l’AE est un domaine

encore peu étudié dans les champs de la science et porté au niveau politique par une minorité dans les

mouvements sociaux. Cette double marginalisation entraîne de surcroît, la non mise en œuvre de ces

pratiques à plus grande échelle.

Pourtant, elle porte un grand potentiel pour la production durable de denrées alimentaires et nombreux

scientifiques, acteurs du développement, mouvements sociaux et paysans ainsi qu’experts sur les

questions de la faim préconisent l’application des principes AE afin de permettre la souveraineté

alimentaire de tous et éradiquer la faim dans le monde. Les résultats sur le terrain parlent d’eux-

mêmes. Ainsi de nombreux projets et expérimentations en France, au Burkina-Fasso, Mali, Tanzanie,

Kénya, Nicaragua, Guatémala, … ont démontré que la transition vers des systèmes de productions

écologiquement, économiquement et socialement durables est réalisable. (De Schutter 2011, Rabih,

Parmentier 2014, Baret et Chauvassus-Au-Louis 2015)

Rappelons-nous que la souveraineté alimentaire est conçue comme un droit et pour que ce droit soit

respecté, il faut d’une part que la volonté politique de mettre en place des réformes et de restaurer

l’état dans ses rôles souverains (protection, régulation, soutient public). Et d’autre part, que les

systèmes alimentaires (qui va de la production à la consommation en passant par la transformation, le

stockage, le transport vers les marchés,…) intègrent et s’articulent autour des quatre piliers de la

sécurité alimentaire (ce qui, ceci dit, ne pourra se réaliser sans les changements politiques évoqués).

Voyons comment l’AE permet le respect de ces quatre indispensables :

1. La disponibilité : Les méthodes AE, à faible utilisation d’intrants externes permettent, d’augmenter

les rendements à l’hectare bien que sur le court terme, un moment de transition les fait baisser. De

nombreux cas dans diverses régions attestent que le rendement de fermes agroécologiques est

supérieur à celui des fermes utilisant les méthodes classiques de la révolution verte. Les chiffres

tournent autour d’une augmentation de 70 à 100% de la production après être passé à des techniques

agroécologique. Au Brésil 100 000 familles ont même connu un accroissement de 300%33. Même sans

aucun engrais azoté, on constate des augmentations jusqu’à 3 tonnes/hectare34. De par la conjoncture

économique actuelle et le haut rendement à l’hectare de ces méthodes, l’agriculture urbaine se

développe et on voit fleurir un peu partout en Europe des jardins et potager communautaires, des

individus cultiver leurs jardin, faire de la culture en pot sur les terrasses,…

2. L’accessibilité : L’AE recouvre tout un aspect social et sert d’outil aux revendications aux

mouvements sociaux qui se dressent contre l’agro-business prédateur. Maintenir les fermes familiales 33Mc Kay, cité par Parmentier 201434

17

et les savoirs paysans permet aux individus de s’ancrer dans un tissu social et une culture locale

importante. Mis à part l’aspect identitaire non négligeable, ces petites exploitations sont sources

d’emplois et de rémunérations. L’utilisation de méthodes excluant ou diminuant fortement l’utilisation

d’intrants externes chimiques (association bétail-cultures, récupération de la biomasse, technique

attraction répulsion entre plantes, entre plantes et insectes) économise le prix de ces intrants, et

diminue la dépendance des cultivateurs aux intrants et aux subventions de l’état. Le meilleur

rendement grâce à la bonne santé des sols et la gestion écologique des ressources assure des revenus

rémunérateurs qui couvrent les prix de productions et permet aux agriculteurs de se nourrir ou d’avoir

les moyens de se procurer de la nourriture. La relocalisation de l’agriculture peut aussi créer des

emplois hors de la ferme : fabrication d’outils et de nouvelles technologies, transformation des

produits, recherche scientifiques, services en milieu rural,…

3. L’adéquation : De par ses méthodes et principes fondamentalement écologique car inspiré par

l’observation de la nature, l’AE permet de produire des aliments sains, nutritifs et frais (si distribuer

localement) cultivés sur des sols riches et en bonne santé. S’encrant et s’alimentant des techniques

paysannes, les cultures agroécologiques favorisent la diversité des fruits et légumes, des activités

humaines et plus largement de la biodiversité. Cette diversité agro-systémique offre des nutriments

variés indispensables à la santé humaine. (Alloway, De Clerck et al. cités par De Schutter 2010)

4. Stabilité/durabilité : La volatilité des prix ne pourra être un problème résolut seulement si les

décisions politiques vont dans le sens d’une régulation des marchés et de la finance. Cependant, la

faible ou nulle utilisation d’intrant externe et l’auto production de graines (techniques traditionnelles

reprise en AE) permet aux agriculteurs d’être moins dépendant des grandes firmes et des banques

(pour leurs prêts) ce qui réduit dans le même temps le pouvoir de ses acteurs influents sur la scène

internationale. D’autre part, la durabilité de la production est assurée par la gestion durable des

écosystèmes à l’échelle locale. De plus des études ont démontré les capacités de résistance des

systèmes AE face aux catastrophe naturelle et aux changements climatique. Ce qui accroît fortement

les capacités de résilience des populations. Il n’est pas nécessaire de préciser que par toutes les

méthodes sus évoquées, l’AE participe au ralentissement du changement climatique, voir permettrait

d’inverser les mécanismes de réchauffement. (De Schutter 2010 et 2011)

Pour que ces méthodes puissent influencer globalement nos systèmes de production et créer le

changement à grande échelle dont nous avons besoin pour assurer la sécurité alimentaire et climatique,

les dispositions politiques favorables sont indispensables. Au niveau local : les ONG et OP doivent

continuer leur travail de renforcement des agriculteurs des communautés, apporter expertises,

expériences agronomiques et environnementales, connaissances en terme de plaidoyer politiques. Au

niveau national, il faut réinvestir dans les biens publics comme le développement des voies de

communication, les services, le soutient à l’agriculture, à l’éducation et à la recherche. Au niveau

international il est impératif que les pays du nord, et dans notre cas la Belgique, respectent leurs

18

engagements en terme de soutien à l’agriculture familiale et mettent en œuvre la CPD. (CCF 2008, De

SChutter 2011).

En effet, la mise en pratique de l’AE appelle à une révision totale de notre système capitaliste néo

libéral mondialisé. Si l’humanité veut survivre demain, il faut qu’elle remette en cause notre

paradigme modernisateur et nos modes de vies ‘’hors-sols’’ axé sur la compétitivité afin d’amorcer la

transition écologique dès aujourd’hui. (Rabih, 2011)

Analyse anthropologique du discours. L’analyse qui va suivre s’appuie en majeur partie sur les cours d’anthropologie de développement et le

cours de sociologie des interventions dans les pays en voie des développements ainsi que sur les

différents travaux et ouvrages utilisés dans et pour ces cours. Elle présente aussi des analyses issues

des conférences auxquelles j’ai assisté, de mes lectures académiques et personnelles et enfin des

apprentissages acquis lors de mon stage chez Oxfam-Solidarité (09 févier au 31 mars 2015).

S’il est important de ne pas l’omettre totalement, la critique adressée au caractère ethnocentrique et

paternaliste du développement n’est plus à prouver ni à développer auprès de lecteurs aguerris. Les

anthropologues depuis Malinowski (1884-1942) dénoncent l’influence des occidentaux dans les

entreprises coloniales puis développementalistes sur les cultures et les populations à travers le monde

et leur tendance à les considérer comme sauvages/sous-développés, en retard par rapport au modèle

industrialisé vers lequel toute l’humanité doit tendre selon le dogme du progrès. Développer les autres

c’est leur faire adopter nos valeurs, nos paradigmes et notre vision du développement. On retrouve

toujours aujourd’hui dans les rapports, les notes stratégiques et les discussions des acteurs du

développement des termes qui font références à cet ethnocentrisme (retard, décollage économique,

modernisé, développement économique, pays sous-développés,…).

Tout d’abord, à chaque niveau de la coopération on voit l’importance accordée par les acteurs à la

cohérence et l’efficacité des politiques d’aide, non seulement dans les discours, mais aussi dans les

politiques de ces organisations.

Notre première hypothèse envisage que ces politiques communes sont dues à la professionnalisation

des ONG. Celles-ci sont avant tout des initiatives privées émanant de la société civile et qui, au fil du

temps et par une volonté de continuer leurs activités en ayant plus d’impact, se professionnalisent.

C’est-à-dire adoptent un série de méthodes, de stratégies et de modes de fonctionnement internes qui

leurs permettent d’acquérir une certaine légitimité. D’une part auprès des bailleurs de fond dont l’aide

est contrainte par le respect de plusieurs critères. Et d’autre part auprès du grand publique afin d’avoir

une visibilité suffisante et un soutien humain et financier. C’est deux légitimités se renforcent l’une

l’autre et sont essentielles pour la récolte de moyens financier, humains et techniques dans le but de

poursuivre leurs activités. Cette professionnalisation se manifeste par un discours très homogène des

acteurs belges et la similarité des stratégies et des priorités. Les critères d’agrégation par la DGD étant

19

les même pour toutes les ONG pourraient expliquer en partie cette uniformisation du discours et des

politiques. Cela permet-il une plus grande cohérence dans la mise en œuvre programmes et des

projets menés sur le terrain ? Cette relative coordination entraine-t-elle des résultats plus importants ?

D’après les discours de la DGD, il semblerait que cette coordination est effective et qu’elle est

appréciable en terme de résultats chiffrés affichés dans ses rapports annuels.

Revers de la médaille, cette professionnalisation entraîne « une compétitivité accrue, des

méthodologies affinées et sophistiquées, l'instauration de la salarisation et de la régulation du temps de

travail, une expertise sectorielle performante, l'alourdissement des tâches techniques et une

bureaucratisation pesante » (Le Naëlou 2004). Il est vrai que j’ai vu moi-même lors de mon stage ces

aspects négatifs de la professionnalisation35.

Notre deuxième hypothèse envisage l’influence des grandes agences de développement comme une

des causes de normalisation des discours et des politiques des ONGs. En effet, nombreux acteurs du

développement, experts et académiciens se réfèrent aux rapports et aux études menées par ces grandes

agences. Notre accès à la connaissance du monde en développement et des situations de l’autre côté de

l’hémisphère est conditionnée par les cadres théoriques, les méthodes de compilation et d’analyse de

données appliquées par ces agences. On assiste à l’homogénéisation des mots employés et des données

chiffrées présentées dans les rapports, des méthodes d’analyse et d’évaluation utilisées par les ONG,

la DGD ou l’UE au nom de la cohérence et de l’efficacité. Cela a-t-il une incidence sur la mise en

pratique ? Sur les résultats ? Nous pouvons aussi nous questionner sur ce que ces chiffres prennent en

compte ou non, quelle part de la réalité omettent-ils ? Comment sont-ils construits ? Et pour quelles

raisons utilise-t-on des chiffres et des statistiques pour décrire des réalités diverses et changeantes qui

ne rentrent pas toujours dans les cases taillées par les indices de développement ?

Sur la question du pourquoi, l’analyse critique du développement36 nous dit que ces méthodes sont là

pour légitimer le développement. Par l’utilisation massive de données chiffrée (quantophrénie), ces

agences normalisent la réalité en créant des divisions : en dessous d’un certain seuil (défini selon les

conventions occidentales) la situation est problématique et cela requière une intervention de notre part,

nous pays développés, car nous avons le devoir d’aider les autres (paradigme altruiste de De Sardan).

Au-dessus de ce seuil par contre, vous avez atteint l’objectif de développement X ou Y. En effet, qu’on

utilise une méthode de production des données ou une autre, qu’on prenne un compte un indice ou un

autre, les résultats sont totalement différents. Or, les stratégies des ONG reposent sur ces résultats, il

est donc raisonnable d’envisager que cette production de chiffres et de données soit utilisée comme

une légitimation de l’action.

Cependant, il est important de nuancer les analyses critiques qui prennent le développement comme

un ensemble monolithique. Or, si les discours se ressemblent, les interprétations et les mises en œuvre

divergent selon les ONG, au sein même de celles-ci les individus ont des visions du monde et des

manières différentes d’envisager les solutions. La tentative de construction d’une position commune

35NGUYEN. L., rapport de stage 201536Le cours d’Anthropologie du Développement se base sur les travaux d’Escobar, Ferguson, Crush, Mauss.

20

forte par la CCF en est un parfait exemple. Aussi, nous pouvons dire que les organisations concernées

par ces critiques ne sont pas de mauvaise foi et prennent en compte ces critiques afin de s’améliorer.

Les ONG évoluent et cherchent réellement des leviers d’actions efficaces de changement tout en

essayant au maximum de ne pas tomber dans le paternalisme, l’ethnocentrisme et l’occidentalisation

du Sud. Prenons les stratégies de promotion de systèmes alimentaires durables de la Coalition : Partir

des besoins et des demandes des populations cibles, soutenir leurs démarches et leurs stratégies de

développement, renforcer les capacités des OP en terme de plaidoyer afin qu’il ait plus de poids dans

les négociations qui les concernent, réguler le marché afin de stabilisé les prix, protéger l’agriculture

de la concurrence, réinvestir dans les biens publics et la sécurité sociale, apporter un soutien particulier

aux femmes plus directement touchées par les injustices (accessibilité aux revenus, aux ressources

foncière,… ), permettre aux producteurs l’accès au marché, relocaliser la transformation pour créer de

la plus-value et ainsi augmenter les revenus, bref de concevoir l’agriculture comme un secteur à part,

devant être protégé et soutenu par des politiques agricoles favorables aux points cités ci-dessus. Ces

ensembles de stratégies mises en œuvre par les ONG membres et de recommandation à l’égard des

politiques ont été pensés en fonction des critiques adressées au développement, les priorités ont été

définies en collaboration avec des ONG du Sud et des OP.

La CPD est un autre exemple. Celle-ci comme nous l’avons vu n’est pas encore effective au niveau

national et est pourtant inscrite dans la loi belge depuis deux ans, et mise sur la table au sein de la

coopération belge par certains depuis des années. Comment pourrait-on y arriver au niveau

international ? D’autant plus que la majorité des réformes en matière de politiques agricoles pour le

droit à l’alimentation sont contraires aux amendements de l’OMC.

Le récent engouement pour l’éducation au développent (ED) en est pour moi un exemple. En effet,

selon les arguments de l’ED, nos choix de consommation aux nord ont des impacts importants sur tout

le système alimentaire et économique. Prenons l’exemple des banques qui spéculent sur les denrées

alimentaires ou financent des sociétés qui accaparent les terres, si chacun de nous interpellait sa

banque à ce sujet, changeait de banque tant qu’elle ne modifie pas ses politiques d’investissement,

celle-ci aurait vite fait de satisfaire un peu plus la demande de ses client, faute de quoi sa perte

crédibilité lui coûterait cher. Diffuser les méthodes des mouvements sociaux37, sensibiliser les

populations au Nord sont des moyen d’agir sur les habitudes des consommateurs - tout en continuant à

interpeller les politiques- ce qui est, dans certains cas, plus rapide et efficace pour contrebalancer les

dérives capitalistes.

Pour terminer, attardons nous un instant sur la promotion de l’Agroecologie. Si elle est présentée

comme une solution globale au problème de la faim et au changement climatique, elle en est une

parmi d’autres, d’ailleurs les méthodes et les principes définis par les auteurs cités ci-dessus ne se

veulent ni exhaustifs, ni exclusifs. Il est essentiel, selon GIRAF, de continuer la recherche et de

multiplier les expériences en la matière pour parfaire ces techniques. Il est important de mentionner

que la transition vers des systèmes de production durables ou agroécologiques demande du temps et

37A ce sujet, consultez NEVEU. E., Sociologie des mouvements sociaux, Paris, La Découverte, coll. « Repères Sociologie », 2015, 128 p., 6e édition

21

des connaissances spécifiques (temps d’apprentissage). Le temps de cette transition n’est pas

économiquement viable pour la plupart des agriculteurs. L’agriculture est-elle une activité viable sans

subsides ? Selon la CCF, il semblerait que non, c’est pourquoi elle recommande le soutient au

producteurs via des politiques publiques favorables et une sécurité sociale efficace. Pour

l’apprentissage, la Via Campesina, entre autre, à démontrer l’efficacité incroyable de l’apprentissage

de fermiers à fermiers et des Fermes écoles. (De Schutter 2011)

ConclusionLa Belgique, dans le cadre de sa coopération au développement, adopte les stratégies et les principes

préconisés par les instances internationales de développement et les pays de l’OCDE. Les grands

cadres stratégiques signés par la DGD lient la coopération aux Accord de Paris, aux Objectifs du

Millénaires pour le Développement et donc à toutes les méthodes et les priorités qui en découlent. Les

ONG agrées par cette instance y sont de fait liées aussi et doivent répondre aux exigences d’efficacité,

de cohérence et de durabilité.

Plus particulièrement, la Coalition Contre la Faim -qui déplore l’exercice de style que sont en réalité

ces engagements, cantonnés aux discours - tend à constituer un message clair et commun soutenu par

l’ensemble de ses membres afin de plaider avec force et influence en faveur de la souveraineté

alimentaire et de l’application des principes agroécologiques au niveau fédéral et européen (via ses

membres). De plus, l’ensemble de ses membres (mis à part TRIAS et Iles de Paix) font la promotion

de systèmes alimentaires durables basés sur les principes agroécologiques auprès des agriculteurs des

pays du sud et les soutiennent dans cette transition dans le cadre de leurs programmes de

développement. La Coalition constitue donc une plus-value pour les ONG membres en termes

d’influence politique et de partage des connaissances et inversement. Voilà ce qui peut résumer les

stratégies de lutte contre la faim employées par la Coalition.

L’Agro écologie comme un des moyens de parvenir à la souveraineté alimentaire est une piste que

j’aimerais pouvoir explorer plus en profondeur dans mon mémoire. En effet, mes intérêts me poussent

à aller voir sur le terrain les réalisations faites en la matière. Mes lectures, notamment Olivier de

Schutter, Jean Ziegler et Pierre Rabhi, ont alimenté ma réflexion sur le bon sens et l’urgence

d’appliquer des principes respectueux de l’Environnement et de l’Homme dans toutes les sphères de

notre vie si nous souhaitons un avenir prospère pour l’Humanité. Afin d’enrichir une analyse

académique intellectuelle relativement éloignée des réalités quotidiennes, une expérience vivante qui

comprend une démarche et un engagement personnel, une confrontation avec les réalités du terrain,

des émotions, des réflexions, des échanges,… est pour moi la meilleure façon de mettre à l’épreuve et

de donner du sens à la théorie, aux débats en cours dans les ONG concernant les solutions pour

éradiquer la faim.

22

Pour se faire, plusieurs pistes sont à envisagés : Faire un stage avec une OP ou des agriculteurs ayant

participé à un projet de transition vers une agriculture durable d’un des membres de la CCF et ayant

été évalué comme une réussite ou en cours de réalisation soit envisager un stage dans une ferme au

Sud ou au Nord fonctionnant selon des principes agroécologiques. Le but étant d’identifier les facteurs

de réussite d’une transition vers des modèles de production durables.

BibliographieRapports

CONCORD, 2014, Justice, democracy ans diversity in our food system, Bruxelles.

DE SCHUTTER Olivier, 2010, Rapport du rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation,

A/HRC/16/49.

DESGAIN Stéphane, 2008, Nourrir la planète, Luc Pire, Bruxelles.

DGD, 2010, Note stratégique sur l’agriculture et la sécurité alimentaire.

URL :http://diplomatie.belgium.be/fr/binaries/

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CCF, 2008, Souveraineté alimentaire, un agenda pour agir, Bruxelles.

URL :http://www.coalitioncontrelafaim.be/wp-content/uploads/2014/04/

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Ouvrages

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Cours

STASSART Pierre, 2014-2015, Introduction au Développement Durable, Liège.

RUBBERS Benjamin, 2014-2015, anthropologie du développement, Liège.

PONCELET Marc, 2014-2015, Sociologie des interventions dans les pays en voie de développement,

Liege.

TARAKAN Joe, 2014-2015, Economie du développement, Liège.

Vidéos

Témoignage de l’agriculteur français Bernard Ronot.

URL :http://www.dailymotion.com/video/x1crdet_agriculture-durable-entretien-avec-bernard-

ronot_tech

« Je mange donc je suis » produit par la CCF et Demande à la poussière (2009).

URL : https://vimeo.com/7893617

Sites internet

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http://www.planetoscope.com/agriculture-alimentation/1556-le-gaspillage-alimentaire-dans-le-

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http://www.cncd.be/Le-grand-gaspillage-alimentaire (le 26 mai 2015)

http://www.cncd.be/La-Belgique-se-dote-d-une-nouvelle (le 26 mai 2015)

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