essai de sériation chronoculturelle du néolithique ancien : apport des industries lithiques de la...

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Mémoire de Master 2 mention Histoire, Arts et Archéologie Spécialité Arts et Cultures de la Préhistoire et de la Protohistoire : Europe, Afrique Année universitaire 2011-2012 ESSAI DE SÉRIATION CHRONOCULTURELLE DU NÉOLITHIQUE ANCIEN : APPORT DES INDUSTRIES LITHIQUES DE LA BAUME DE RONZE, ORGNAC-L’AVEN, ARDÈCHE. Présenté par Elsa DEFRANOULD Sous la direction de Thomas PERRIN Mémoire présenté le 19/06/2012 devant le jury du Master composé de : Alain BEECHING, Thomas PERRIN, Nicolas VALDEYRON

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Mémoire de Master 2 mention Histoire, Arts et Archéologie

Spécialité Arts et Cultures de la Préhistoire et de la Protohistoire : Europe, Afrique

Année universitaire 2011-2012

ESSAI DE SÉRIATION CHRONOCULTURELLE DU NÉOLITHIQUE ANCIEN : APPORT DES INDUSTRIES LITHIQUES DE LA BAUME DE

RONZE, ORGNAC-L’AVEN, ARDÈCHE.

Présenté par Elsa DEFRANOULD

Sous la direction de Thomas PERRIN

Mémoire présenté le 19/06/2012 devant le jury du Master composé de :

Alain BEECHING, Thomas PERRIN, Nicolas VALDEYRON

Illustration de couverture : vue de l’intérieur de l’aven de la

Baume de Ronze, cliché Guillaume Roguet, Juillet 2011.

1

REMERCIEMENTS

Il m’est particulièrement agréable de remercier Thomas Perrin, qui cette année encore par sa

disponibilité, ses conseils toujours avisés et la rigueur de ces corrections, a permis de donner une

dimension plus accomplie à ce travail.

Je voudrais également remercier Alain Beeching pour toutes les informations, parfois inédites

qu’il m’a gentiment communiquées et pour l’honneur qu’il me fait d’être présent dans ce jury.

Mes remerciements s’adressent aussi à Nicolas Valdeyron qui pour la deuxième année

consécutive a bien voulu faire partie de mon jury.

Je voudrais encore exprimer ma gratitude à Sylvie Philibert qui a bien voulu consacrer du

temps à l’examen de quelques armatures et m’a largement guidée à la reconnaissance de certaines

traces.

C’est avec plaisir que je remercie les membres du labo au CNED, particulièrement mes

camarades de la salle 16, Célia, Magali et Will pour les échanges fructueux (et moins fructueux !)

autour de ces spirouli goût-tout-sauf-citron qui nous ont permis de terminer l’année dans de

bonnes conditions climatiques.

Un grand merci encore à toute la clique : Joséphine, Agathe, Tiphaine, Élisa, Ana, Théo et la

daurade pour les divers conseils et les discussions motivantes.

Enfin, Mémette et Robin ont été d’un grand secours dans la lutte finale pour l’achèvement du

mémoire. Á la première pour ses méticuleuses relectures et au second pour l’aide précieuse en

anglais : Merci !

2

RÉSUMÉ

Résumé : Le gisement de la Baume de Ronze, situé sur la commune d’Orgnac-l’Aven au sud de

l’Ardèche, est un site majeur de la Préhistoire récente du sud de la France. En effet, ce vaste abri

témoigne d’occupations humaines s’échelonnant du Paléolithique supérieur au Chalcolithique. La

séquence du Néolithique ancien se développe sur un mètre d’épaisseur. Elle consiste en une

quarantaine de dépôts stratifiés et offre ainsi une opportunité exceptionnelle de percevoir le

dynamisme évolutif des productions matérielles des premiers paysans. Ce travail de

caractérisation des industries lithiques s’inscrit dans cette perspective, puisque son objectif

principal, outre une classique étude typo-technologique, est de mettre en évidence des

changements dans la mise en œuvre des productions de pierre. L’analyse a permis de distinguer

trois ensembles lithiques, considérés comme autant de phases évolutives de ce sous-système

technique, et qui permettent dans une certaine mesure de préciser les attributions

chronoculturelles établies à partir des données céramique.

Mots-clés : Industrie lithique, Néolithique ancien, Baume de Ronze, Dynamisme évolutif, Groupe

Cèze-Ardèche.

Abstract : The site of “La Baume de Ronze”, located on the district of Orgnac-l'Aven southern in

Ardeche, is a recent Prehistory major spot in the south of France. Indeed, this large shelter testify

of human occupations from the late palaeolithic until the Chalcolithic. The sequence of the early

Neolithic is situated on one meter thick. It consists of about forty stratified sedimentary deposits

and give us an exceptional opportunity to discern the evolutive dynamism of material productions

of some first peasants. This work of characterization of lithic industries follow on this vision,

since it principal objective, apart a classical typo-technologic study, is to underline some changes

in the implementation of stone productions. The analysis has allowed to distinguish three lithic

sets, considered as many evolutive phases of this technical subsystem, and which enable in a

certain way to precise the chrono-cultural attributions established by the ceramic data.

Keys-words : lithic industry, Early Neolithic, Baume de Ronze, Evolutive dynamism, Cèze-

Ardèche group.

3

SOMMAIRE

REMERCIEMENTS…………………………………………………………………... p. 1

RESUMÉS……………………………………………………………………………… p. 2

INTRODUCTION……………………………………………………………………… p. 5

PARTIE 1 : PRÉSENTATION GÉNÉRALE………………………………………… p. 6

LE SITE DE LA BAUME DE RONZE………………………...………………………. p. 6

CADRE CHRONOCULTUREL….…………………………………………………….. p. 8

Le néolithique ancien méridional : périodisation et historique des recherches p. 8

Le groupe Cèze-Ardèche…………………………………………………….. p.10

PROBLÉMATIQUE…………………………………………………………………… p. 11

PARTIE 2 : L’INDUSTRIE LITHIQUE DE LA BAUME DE RONZE………….... p. 12

MÉTHODOLOGIE…………………………………………………………………….. p. 12

GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES……………………………………………. p. 13

Les différentes variétés de matières premières………………………………. p. 13

Economie des matières premières…………………………………………… p. 14

PRODUCTION LAMINAIRE………………………………………………………… p. 16

PRODUCTION D’ÉCLAT……………………………………………………………. p. 18

OUTILLAGE RETOUCHÉ…………………………………………………………… p. 18

SYNTHÈSE ET COMPARAISONS RÉGIONALES…………………………………. p. 20

PARTIE 3 : ÉVOLUTION DES PRODUCTIONS LITHIQUES AU COURS DE LA

SÉQUENCE DU NÉOLITHIQUE ANCIEN………………………………………… p. 22

MÉTHODOLOGIE : LA CRÉATION D’ENSEMBLES COHÉRENTS…………….... p. 22

4

STABILITÉ DE CERTAINS CRITÈRES…………………………………………... . p. 24

Morphométrie des supports laminaires…………………………………….. p. 24

Modalités d’occupation de l’abri……………………………………………. p. 25

GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES…………………………………………. p. 26

ÉVOLUTION DES ARMATURES…………………………………………………. p. 28

Typologie…………………………………………………………………... p. 29

Dimensions des bitroncatures……………………………………………… p. 34

SÉLECTION DES SUPPORTS……………………………………………………... p. 35

UNE ÉVOLUTION DE L’ÉCONOMIE DU SILEX BÉDOULIEN ?........................ p. 36

SYNTHÈSE………………………………………………………………………….. p. 36

CONCLUSION………………………………………………………………………. p. 39

BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………... p. 42

TABLE DES FIGURES……………………………………………………………... p. 47

TABLE DES TABLEAUX………………………………………………………….. p. 48

ANNEXES……………………………………………………………………………. p. 49

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INTRODUCTION

A partir des années 1950, les recherches sur le Néolithique ancien du sud de la France

s’intéressent particulièrement à la structuration chronologique et culturelle de ces contextes

archéologiques à céramique imprimée. Les travaux fondateurs de Max Escalon de Fonton à la

Font-des-Pigeons et à la Baume de Montclus et plus tard, ceux de Jean Guilaine à la grotte Gazel,

permettent de poser les bases du cadre évolutif du Néolithique ancien par la reconnaissance de

deux faciès culturels principaux : le Cardial et l’Épicardial. Ce sont les productions céramiques

qui furent essentiellement mobilisées dans la sériation de ce Néolithique ancien essentiellement à

cause de la grande variabilité de leur décor. En ce qui concerne les études lithiques, il faut

attendre la fin des années 1980 et la thèse de Didier Binder puis celle de François Briois dans les

années 1990 pour voir apparaître des travaux de synthèse concernant les régions de Provence et

du Languedoc occidental. Si les lacunes de la documentation se comblent peu à peu dans certaines

régions, par exemple dans le Gard et la plaine nîmoise avec l’étude récente ou en cours des séries

épicardiales du Taï et du Mas de Vignoles, des vides persistent dans certaines régions. La

multiplication des études permet alors de définir un cadre comparatif plus étoffé nécessaire à la

documentation d’autres contextes.

Au sud du couloir rhodanien, à la confluence des mondes languedociens et provençaux, une

quinzaine de gisements a livré un mobilier céramique original qui a conduit à les regrouper dans

un faciès régional appelé « groupe Cèze-Ardèche ». Parmi ceux-ci, le site de la Baume de Ronze,

situé sur la commune d’Orgnac-l’Aven, dans le département de l’Ardèche, présente une

importante stratigraphie, qui se dilate sur près d’un mètre d’épaisseur pour les seuls niveaux du

Néolithique ancien. La configuration de ce vaste abri de 1250 m² a encore permis la fouille

extensive d’une zone qui a livré les restes d’une architecture domestique. Ainsi, ce gisement invite

d’une part à établir des comparaisons régionales avec les industries lithiques du sud de la France,

et d’autre part à envisager dans la diachronie la série issue des niveaux du Néolithique ancien.

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PARTIE 1 :

PRÉSENTATION GÉNÉRALE

LE SITE DE LA BAUME DE RONZE

L’aven de la Baume de Ronze

se situe sur le territoire de la

commune d’Orgnac-l’Aven, à

l’extrême sud du département de

l’Ardèche. Il prend place sur le

plateau urgonien de Saint-

Remèze, à mi-chemin entre les

vallées de l’Ardèche et de la

Cèze. L’aven, partiellement

effondré se présente comme une

vaste ouverture de 70 m de

diamètre sur le sol de la garrigue.

Il offre une surface abritée de

1250 m² orientée plein sud (fig. 1 et 2).

Du fait de ses dimensions importantes, le gisement passe difficilement inaperçu ; dès lors, on

comprend aisément l’attention que lui portèrent les premiers préhistoriens ardéchois dès le XIXe

siècle. Les premiers travaux connus sont ceux de P. Raymond qui, aux alentours de 1885, identifie

des niveaux néolithiques et de l’âge du Bronze. C. Gaillard entreprend de nouvelles recherches

entre 1910 et 1913, puis R. de Saint-Perrier entre 1920 et 1935, et enfin l’abbé Roux de 1950 à

1957. En décembre 1977, Alain Beeching entreprend une première fouille de sauvetage, qui se

prolongera par de nombreuses campagnes de fouilles programmées quasiment ininterrompues

entre 1978 et 1996. Ce chercheur explore le gisement à partir de deux zones de fouille et de deux

sondages, dans des secteurs apparemment non perturbés par les fouilles clandestines ou anciennes

(Beeching, 1980). L’exploration à la fois stratigraphique et planimétrique permet de répondre à un

double questionnement, visant d’une part à renseigner la séquence chronoculturelle d’occupation

de l’abri et, d’autre part, à proposer une approche palethnographique des occupations successives

Figure 1 : Vue de l'intérieur de l'abri, les piquets matérialisent la zone de fouille n° 1, cliché J. Caro, juillet 2011.

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(Beeching, 1989). C’est d’ailleurs grâce à la fouille planimétrique que des possibles traces

d’architecture domestique ont pu être identifiées dans la zone 1 (Thirault et Beeching, 2009).

Figure 2 : Coupe schématique de l'Aven, in Beeching 1989.

L’abri a été occupé durant tout l’Holocène. Des niveaux anciens attribués à du Sauveterrien et à

un second Mésolithique mal caractérisé ont été reconnus lors des fouilles anciennes, tandis que la

stratigraphie établie par Alain Beeching témoigne d’une fréquentation de la grotte durant toute la

séquence du Néolithique, depuis sa phase ancienne cardiale jusqu'au Néolithique final Ferrières.

Treize datations radiocarbones permettent de bien caractériser les périodes d’occupation. Pour la

séquence du Néolithique ancien qui nous intéresse ici, une série de cinq datations réalisées dans la

zone 1 et la zone 2 nous permet de caler chronologiquement ces phases d’occupation1 entre 5 600/

5 400 et 4 800 avant notre ère (fig. 3).

Figure 3 : Datations radiocarbones du Néolithique ancien de la Baume de Ronze, calibrées à 1σ (Courbe Intcal 09).

Le Néolithique ancien de la zone 1 à livré 4941 pièces lithiques, réparties sur une quarantaine de

couches archéologiques et un peu plus d’une quarantaine d’anomalies de nature diverse (trous de

poteau, fosses, foyers, cuvettes, terriers…).

1 Ces datations sont inédites, et je remercie Alain Beeching pour leur communication.

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CADRE CHRONOCULTUREL

Le Néolithique ancien méridional : périodisation et historique des recherches

Le Néolithique ancien du Midi de la France peut être scindé en trois entités distinctes :

Impressa, Cardial et Épicardial, qui ne s’articulent pas entre elles de manière strictement

chronologique, les unes succédant aux autres, mais par des phénomènes encore assez mal perçus,

qui traduisent plutôt une évolution non linéaire de l’implantation des premiers agriculteurs dans

ces régions. Des travaux récents proposent une périodisation en trois phases (Manen et Guilaine,

2010 ; Manen et Sabatier, 2003) :

- La phase I, qui voit la mise en place de l’économie de production, peut être scindée en

deux : une première implantation sur le littoral de colonies Impressa datée entre 5 800 et

5 600 cal. B.C., et une seconde implantation plus continentale qui correspond au

développement du Cardial franco-ibérique entre 5 500/5 400 et 5 000 cal. B.C.

- La phase II, entre 5 300 et 4 900 qui voit apparaître, sur la rive ouest du Rhône,

l’Épicardial ancien, qui coexiste avec un Cardial récent présent en Provence ;

- La phase III, datée entre 4 800 et 4 500 cal. B.C., qui correspond à une phase récente de

l’Épicardial, documentée surtout à partir de sites languedociens.

Toutefois, cette sériation chronoculturelle repose essentiellement sur des données issues de la

typologie céramique, au détriment de l’étude des autres sous-systèmes techniques de production,

pour lesquels les études de synthèse sont rares (Binder, 1995). Pour ce qui concerne les études

lithiques, trois régions ont fait l’objet de tels travaux synthétiques : il s’agit de la Provence, du bas

Languedoc occidental et des travaux sont en cours pour des sites du Gard et de la plaine nîmoise

(fig. 4).

En Provence, les travaux de Didier Binder montrent que l’industrie lithique est réalisée à partir de

ressources locales ou en silex blonds bédouliens. La part respective de chaque matière première

dans les assemblages dépend de la position du site dans les réseaux d’échange en silex blond du

Vaucluse, ainsi que de la distance avec les gîtes (Binder, 1998). Deux schémas opératoires

coexistent sur ces gisements : la production est tournée d’une part, vers l’obtention de supports

laminaires débités à la percussion indirecte et, d’autre part, vers la production d’éclats. Les

supports laminaires seront par la suite utilisés bruts ou serviront à façonner des armatures de

projectiles, comme les bitroncatures géométriques à retouches inverses, de types BG3. selon la

typologie établie par Didier Binder (Binder, 1987), tandis que les éclats sont utilisés pour

confectionner des coches clactoniennes et de pièces esquillées (ibid.).

9

François Briois montre dans sa thèse que l’industrie lithique du Néolithique ancien du bas

Languedoc occidental, réalisée au dépend de ressources locales ou régionales, est tournée

principalement vers la production d’éclats obtenus par percussion directe à la pierre, même si des

évidences de production laminaire peuvent être envisagées à Leucate. L’ensemble de l’outillage

du fond commun est ensuite réalisé sur ces éclats, qui en fonction de leur module serviront de

pièces esquillées, de denticulés, de grattoirs, de bec ou d’armatures de flèches tranchantes de type

Jean Cros ou Montclus (Briois, 2005).

Figure 4 : Carte de répartition des sites du Néolithique ancien méridional. Les ronds rouges figurent les gisements dont l'industrie lithique est publiée. 1 : Baume de Ronze, 2 : Baume d’Oullins, 3 : Grotte de l’Aigle, 4 : Les Petites-Bâties, 5 : Le Baratin, 6 : Le Taï, 7 : Mas de Vignoles X, 8 : La-Font-des-Pigeons, 9 : Le Jardin du Capitaine, 10 : Grotte de l’Eglise, 11 : La Baume de Fontbrégoua, 12 : Grotte Lombard, 13 : Grotte Gazel, 14 : Leucate-Corrège (Carte T. Perrin, 2012).

Des travaux récents ou en cours sur l’industrie lithique des sites gardois du Mas de Vignoles X et

du Taï mettent en évidence des modes opératoires plutôt similaires à ceux de la Provence, dans le

sens où les ressources minérales exploitées mettent en jeu des silex blond bédouliens de bonne

qualité. L’exploitation du quartz prend également une part importante dans l’industrie lithique de

10

ces sites. Le débitage est nettement orienté vers une production laminaire à la percussion indirecte

(Perrin et al., 2011 ; Perrin et Remicourt, 2005), tandis qu’une production d’éclats en silex

tertiaires régionaux, débités sur place, est attestée au Mas de Vignoles X (Perrin et al., 2010).

Le Groupe Cèze-Ardèche

Si l’industrie lithique du Néolithique ancien semble relativement homogène à l’échelle du

sud de la France, des variations régionales sont perceptibles par exemple dans les productions

céramiques. Ce qui autorise à définir des faciès culturels restreint à de plus petites aires

géographiques. C’est notamment le cas du groupe Cèze-Ardèche, situé à l’ouest du Rhône, dans

une zone qui couvre le sud du département de l’Ardèche et le nord du Gard, et pour lequel la

majorité des gisements prennent place entre les deux rivières éponymes de la Cèze et de

l’Ardèche. Ce faciès culturel particulier a été défini par Alain Beeching dès 1987 à partir des

stratigraphies établies à la Baume de Ronze et l’aven du Rochas à Saint-Remèze (Beeching,

1987). Il en a par la suite proposé une sériation en quatre phases chronoculturelles sur la base de

l’évolution des décors céramiques d’une quinzaine de sites (Beeching, 1995). Si les phases 1 et 2,

qui présentent un décor à la coquille de Cardium, sont à rattacher au Cardial tel qu’on le connaît

dans les régions voisines, les phases 3 et 4, qui présentent une disparition progressive de l’emploi

de la coquille de Cardium au profit d’un décor de cannelure et de cordon, sont quant à elles

qualifiées de tardi-cardiales par ce chercheur. Il a choisi de ne pas les qualifier d’épicardiales car

« les rapports avec le décor à la coquille restent trop flous pour qu’on arrête sous [le terme

d’Épicardial] une définition culturelle originale » (ibid., p. 96).

Si les productions céramiques de ce groupe culturel sont actuellement bien connues, les données

sur l’industrie lithique sont elles, beaucoup plus lacunaires. La monographie sur la grotte de

l’Aigle, distante d’une vingtaine de kilomètres de la Baume de Ronze, nous livre des indications

essentiellement typologiques sur le mobilier lithique de la couche 5 attribuée au Néolithique

ancien Cardial de la phase 1 d’Alain Beeching. Elle mentionne également la présence de

nombreux éclats et de quelques supports laminaire, en quartz et silex. Elle présente les dessins

d’une grande partie des armatures exhumées. Les informations technologiques sont toutefois

absentes de cette étude (Roudil et Soulier, 1979).

Le gisement de la Baume d’Oullins, situé à environ 5 km de la Baume de Ronze, est actuellement

le seul site du groupe Cèze-Ardèche à avoir fait l’objet d’études technologiques en ce qui

concerne l’industrie lithique. La couche 5 est attribuée par Alain Beeching au Tardi-cardial (phase

3 du groupe Cèze-Ardèche), ou à l’Épicardial par Jean Louis Roudil (Roudil, 1987, p. 526). Elle a

été récemment datée entre 5250 et 5050 cal. B.C. (AA 53292 et AA53293 in Fernandez et al.,

11

2006). La couche 6, attribuée au Cardial (Phase 1 du groupe Cèze-Ardèche), a quant à elle fourni

une vingtaine de datations qui placent l’occupation de ce niveau entre 5 500 et 5 000 cal B.C.

(Fernandez et al., 2006 ; Van Willingen et al., 2010). L’étude du mobilier lithique issu de ces

deux niveaux montre globalement la coexistence sur le site de plusieurs ensembles de

productions spécifiques en fonction des matières premières mises en œuvre : le premier réalisé au

dépens de ressources locales, débitées sur place, à pour objectif une production d’éclats et de

quelques rares lames. Le second effectué sur silex bédoulien vise une production de lames

régulières (et secondairement de quelques éclats) débitées en percussion indirecte. En ce qui

concerne les différences dans l’industrie lithique, les avis des auteurs divergent : Jean-Louis

Roudil indiquait en 1984 qu’en « l’état actuel des recherches, l’industrie lithique [épicardiale] ne

peut se distinguer du Cardial » (Roudil et Soulier, 1984). Roberta Bevilacqua démontre une

gestion différenciée du silex bédoulien qui serait débité sur place dans la couche 6 (affirmation

fondée sur la présence de 11 fragments de lames à crête, et de 2 lames à pans corticaux), tandis

qu’il serait introduit sous forme de produits finis dans la couche 5 (Bevilacqua, 1995). Pour Didier

Binder, en revanche, les pièces en silex blond de la couche 6 « procèdent de l’acquisition indirecte

d’un outillage fini et/ ou semi-fini, sélectionné principalement au sein de l’optimum de plusieurs

débitages sur silex bédouliens et accompagné d’une réserve d’éclat […] Ces tendances se

renforcent avec l’horizon à sillon et cannelures » (Binder, 1998, p. 120).

PROBLÉMATIQUE

Ainsi, pour Oullins, le seul site directement voisin de la Baume de Ronze, qui présente

plusieurs niveaux du Néolithique ancien et pour lequel l’industrie lithique à été étudiée, les

publications sont en contradiction sur la nature de l’évolution entre les industries lithiques

cardiales et épicardiales. C’est pourquoi il apparaît intéressant d’avoir une vision diachronique de

ce sous-système technique à la Baume de Ronze, intensivement occupée durant tout le

Néolithique ancien. Cette étude répond donc à un double objectif, d’une part caractériser

l’industrie de pierre de cette région qui a livré de nombreux sites, et de la comparer aux schémas

opératoires mis en œuvre dans d’autres gisements du Néolithique ancien du midi français. Et,

d’autre part, d’essayer de dégager des schémas évolutifs dans la gestion des outillages de pierre

taillée tout au long de la séquence. En outre, des changements dans les savoir-faire techniques

sont perceptibles par l’étude de la céramique, qui reconnait cinq phases typo-technologiques à la

Baume de Ronze (Baron, 2000) et il sera intéressant de confronter les résultats de l’analyse des

systèmes techniques céramique et lithique.

12

PARTIE 2 :

L’INDUSTRIE LITHIQUE DE LA BAUME DE RONZE

L’industrie lithique de la série présente des constantes dans les schémas techniques mis en

œuvre par les tailleurs néolithiques, c’est pourquoi j’ai choisi de la présenter dans un premier

temps dans sa globalité, et non ensemble par ensemble, afin d’éviter la redondance. La discussion

sur l’évolution des productions viendra dans un second temps.

METHODOLOGIE

L’objectif des études typo-technologiques est de replacer les outils retouchés, considérés

comme des produits finis, dans le cadre plus vaste de leur conception et de leur production. Elles

reposent particulièrement sur la restitution des chaînes opératoires. Il s’agit de reconstruire une

séquence de gestes à l’origine de l’objet étudié, pour par la suite, distinguer les modes opératoires

résultants d’un choix des tailleurs de ceux dus à un déterminisme, tel que la nature du matériau

par exemple.

Les matières premières ont été discriminées à partir d’observation macroscopiques à l’œil nu et à

la loupe binoculaire, selon un tri qui avait été initié par Thomas Perrin et Céline Bressy. Le

vocabulaire technologique employé dans ce travail, renvoie à celui défini dans l’ouvrage de

référence Technologie de la pierre taillée (Inizan et al., 1995). La diagnose des techniques de

détachement n’est possible que par l’identification de plusieurs stigmates caractéristiques sur les

parties proximales des pièces étudiées, on doit l’établissement de ces critères de reconnaissance au

travail des expérimentateurs, notamment ceux de Jacques Pelegrin (Pelegrin, 2000). La typologie

utilisée pour définir l’outillage retouché correspond à celle définie par Didier Binder (Binder,

1987), qui a le mérite de considérer à la fois la localisation, la nature, et la délinéation des

retouches en fonction du support et qui est également fréquemment usité par les néolithiciens du

sud de la France. La catégorisation des différents types de supports laminaires à encore été

empruntée à cet auteur (Binder, 1991), elle permet de rendre compte de la place de support dans la

chaîne opératoire, distinguant d’une part les produits qui ont servi à initier ou ré-initier le débitage

(A1 et A2) de ceux de première intention. Parmi ces derniers, on peut encore ajouter un niveau de

description supplémentaire entre les lames à trois pans (C1 et C2), qui présentent un haut degrés

de standardisation, et les lames dont la face supérieurs livre des négatifs de deux ou plus de trois

enlèvements antérieurs (B1 et B2), donc moins régulières. Toutes les pièces de la série ont été

13

enregistrées dans une base de données, réalisées sur Filemaker Pro, dont les rubriques prenaient

en compte les critères classique d’une étude typo-technologique.

GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES

Les différentes variétés de matières premières

La plupart des matières premières peuvent être regroupées en deux groupes allochtones et

locaux, auxquels il faut rajouter certaines matières de provenances indéterminées.

La région d’Orgnac est très riche en ressources lithiques, parmi lesquelles de nombreuses variétés de

silex tertiaires, qui présentent une grande variabilité de faciès, formés durant le Ludien, un sous-étage

de l’Eocène supérieur (Bressy, 2010). Je n’ai pas jugé nécessaire pour cette étude de distinguer tous

les types de silex entre eux, étant donné qu’ils semblent de qualité équivalente, et étaient directement

accessibles aux préhistoriques d’Orgnac dans un rayon maximum de 10 km. Il faut encore faire part,

dans les ressources locales, de l’utilisation en quantité restreinte des jaspes de Laval Saint-Roman, eux

aussi d’origine locale, qui présentent une grande diversité de couleur, mais qui sont reconnaissables à

l’importance quantitative des inclusions de manganèse (Bressy, com. orale).

Les assemblages du Néolithique ancien de la Baume de Ronze présentent également quelques pièces

en silex blond et dans une moindre mesure gris, à grain fin, à structure homogène contenant une

quantité importante d’oxyde de fer et de grains de quartz, qui peuvent être rattachés à des formations

crétacées, plus précisément au sous-étage bédoulien (Binder, 1998). Deux régions à proximité du site

peuvent être considérées comme des gîtes potentiels : il s’agit d’une part du secteur de piémont du

Mont Ventoux dans le Vaucluse, situé à une soixantaine de kilomètres à l’est du site, et d’autre part du

secteur de Meysse et de Rochemaure, dans le Vivarais ardéchois, situé à une quarantaine de kilomètres

au nord. La distinction entre les deux types de provenance demeure incertaine. La plupart des

publications sur le Néolithique mettent toutefois en évidence une exploitation des silex du Vaucluse,

ce qui est sans doute à mettre en relation avec un contexte historiographique plus fourni dans cette

région que pour le nord de l’Ardèche qui a livré moins de sites pour cette période. On retrouve, par

ailleurs des silex bédouliens en position secondaire dans les alluvions du Rhône, mais l’insuffisance

des pièces corticales dans la série ne permet pas de tirer des conclusions quant à un approvisionnement

en position primaire ou secondaire.

Il faut également mentionner la présence dans la série d’un silex blond, à grain fin et à structure

homogène, mais sans oxyde de fer, et qui ne présente pas de microfossiles permettant d’attribuer une

provenance à ce matériau. On trouve encore des pièces en quartz filonien, et quelques rares artefacts

en quartz hyalin.

14

Figure 5 : Carte des gîtes de matières premières utilisées à la Baume de Ronze, d'après Perrin 2005, modifiée.

Economie des matières premières

Il est possible d’appréhender l’économie des matières premières à partir de l’identification

des chaînes opératoires attestées sur le site grâce à la reconnaissance de certaines pièces typiques

(fig. 6). On peut les diviser en deux ensembles : d’un côté les éléments caractéristiques de la

conduite, d’une partie au moins, des débitages sur place (esquilles, débris, nucléus, éclats

corticaux, éléments de mise en forme) et de l’autre, ceux qui concernent la finalité du débitage

avec les supports de première intention (lames et éclats bruts).

15

Figure 6 : Représentation des pièces technologiques par types de matières premières.

Il apparaît clairement que les ressources siliceuses locales, qui dominent largement la série en

terme d’effectif, ont été débitées sur place, comme en témoigne l’abondance d’esquilles, de

débris, ainsi que la présence d’éclats corticaux et de nucléus. La finalité des débitages en

ressources locales semble double : une production d’éclats majoritaire coexiste avec une

production laminaire, et il conviendra d’examiner plus tard les liens que ces productions ont pu

entretenir entre elles.

Le cas du silex blond indéterminé est un peu plus problématique, mais la présence d’un nombre

important d’esquilles, de débris et d’éclats corticaux semble plutôt plaider pour la conduite des

débitages in situ, même si cette observation est à pondérer par l’absence de nucléus. L’objectif de

la production dans cette matière première semble tourné vers l’obtention de supports lamino-

lamellaires (n= 43) et secondairement vers l’obtention d’éclats (n=33).

Le silex bédoulien semble quant à lui être introduit sur le site sous la forme de produits finis ou

semi-fini, essentiellement laminaires (n= 57), accompagné de quelques éclats (n= 15), comme en

témoigne la faible représentation d’éléments caractéristiques des phases de mise en forme et

d’entretiens du nucléus, ainsi qu’un faible nombre d’esquilles et de débris. Il convient tout de

même de mentionner la présence dans la couche 56 d’un petit nucléus à lamelles débité

vraisemblablement par pression, mais qui est plutôt caractéristique du Chasséen ancien (Vanessa

Léa, com. pers.), donc probablement intrusif, comme d’ailleurs une armature de grande dimension

à retouches bifaciales issue du même niveau.

0

10

20

30

40

50

60

70

80

%

Silex Locaux

Silex Bédouliens

Blond Indéterminés

16

PRODUCTION LAMINAIRE

La série n’a livrée aucun nucléus qui présente des négatifs d’enlèvements laminaires au

moment de leur abandon. Il est donc malaisé de caractériser complètement ces schémas de

production. La présence de deux lames de type A2 en silex blond indéterminé semble indiquer

que le débitage de cette matière première a été initié au moyen de lame à crête, tandis que leur

absence dans l’assemblage tertiaire au profit de lames latérales à un pan cortical montre plutôt que

les nucléus ne sont pas préparés, mais exploités directement à partir d’une arrête naturelle. La

présence ou l’absence de phase de mise en forme des nucléus doit être conditionnée en partie par

la morphologie des matières premières mises en œuvre. Par exemple, le silex tertiaire d’Orgnac se

rencontre fréquemment sous la forme de plaquettes, une morphologie qui offre naturellement les

convexités nécessaires à la mise en œuvre d’un débitage initié à partir de l’interface flan

cortical/table naturelle. On remarque très peu de négatifs d’enlèvements dans le sens inverse du

débitage sur les lames, ce qui invite à considérer que le débitage est unipolaire, et qu’un

réaménagement des convexités s’opère plutôt avec l’enlèvement d’éclats épais dans le sens du

débitage plutôt qu’au moyen de petits enlèvements opposés. Les phases de mise en forme des

nucléus en silex bédouliens ne peuvent quant à elle être appréhendées, étant donné que ce

matériau est débité à l’extérieur du site.

La technique de détachement des lames de plein débitage, lorsqu’elle a pu être déterminée, montre

que la percussion indirecte entre majoritairement en jeu, et ce quelle que soit la matière première

employée (fig. 7). Par ailleurs, les talons sont quasiment toujours lisses, et la corniche est réduite

par de petits enlèvements en direction de la surface de débitage.

Figure 7 : Effectif des types de percussion des produits laminaires de plein débitage.

0

5

10

15

20

25

Bédoulien

Blond Ind.

Tertiaire

17

On observe, en outre, une différence dans la

régularité des supports en fonction des

matériaux utilisés. Ainsi, les effectifs des

différentes catégories de lames de plein

débitage, en fonction de la matière première

employée (fig. 8), montrent qu’il existe deux

tendances dans la production : les lames en silex

blond indéterminé ou en silex bédouliens se

répartissent de manière globalement équivalente

entre des supports de section trapézoïdale (C1 et

C2) et des supports moins standardisés (B1 et

B2) ; tandis que les lames en silex tertiaire sont

de facture beaucoup moins régulière, avec une

grosse majorité de supports présentant les

négatifs de deux ou plus de trois enlèvements

antérieurs (B1 et B2).

Il semble difficile d’affirmer à quoi est due cette différence de facture entre les matières

premières. Néanmoins, deux facteurs explicatifs peuvent être avancés, qui sont ou non liés :

- L’un est dû à la nature du matériau employé : les silex blonds présentent une structure à

grain fin qui leur confère une bonne aptitude à la taille, tandis que les silex tertiaires,

même s’ils sont parfois de bonne qualité, présentent une plus grande variété de faciès, qui

les rende parfois moins propice à la taille. Enfin, la forme des blocs de matière première

détermine encore largement la mise en œuvre de schémas opératoire laminaires (par

exemple les silex en minces plaquettes rendent difficile la mise en œuvre de tels schémas).

- L’autre de nature plus culturelle, évoquée dans certains travaux (par exemple Binder,

1998), suppose l’existence d’un gradient dans le savoir-faire technique des tailleurs, qui

ne travaillent pas les mêmes matériaux, ce qui implique l’existence d’ateliers de taille

spécialisés qui redistribuent ensuite les produits. Or, une partie de la production de lame

0

20

40

60

B1 B2 C1 C2 D

Tertiaire

0

20

40

60

B1 B2 C1 C2 D

Blond indéterminé

0

20

40

60

B1 B2 C1 C2 D

Bédoulien

Figure 8 : Proportion du type de support laminaire, selon les codes définis par Didier Binder, en fonction de la matière première employée.

18

de bonne qualité (en silex blond indéterminé) est réalisée sur place. Dès lors, il devient

difficile d’expliquer cette disjonction spatiale et technique.

Dans tous les cas, il semble qu’il y ait trois productions distinctes de lames : l’une, réalisée sur le

site, au dépend de silex tertiaires locaux, et qui a livré des produits assez irréguliers ; l’autre en

silex blond indéterminé et qui a pour objectif la production de lames de section trapézoïdale,

également réalisée sur le gisement ; et une troisième produite à l’extérieur, à partir de ressources

bédouliennes, qui a livré des produits laminaires plutôt standardisés.

PRODUCTION D’ÉCLATS

Les 19 nucléus retrouvé ont, dans leur dernière phase productive, tous servi à produire des éclats.

Ils ne présentent pas, dans leur état d’abandon, de schémas opératoires récurrents. Ils sont

généralement à plusieurs plans de frappe, et aucune face d’exploitation ne semble privilégiée, les

blocs paraissent plutôt exploités de manière opportuniste, en fonction des aléas de la matière. La

technique de débitage mise en œuvre ici est la percussion à la pierre dure. La présence d’une

quinzaine de blocs testés, mais non productif indique que la matière première est amenée sur le

site puis testée sur place.

Par ailleurs, il me semble que l’industrie de la Baume de Ronze peut répondre à une question

posée à la Baume d’Oullins, et qui visait à savoir si les éclats en silex locaux étaient des sous

produits prélevés au sein d’une chaîne opératoire laminaire ou s’ils résultaient d’une production

autonome (Binder, 1998). Plusieurs arguments permettent d’affirmer qu’une partie au moins des

éclats est produite pour elle-même à la Baume de Ronze : d’abord parce que leur nombre est

considérable comparé au nombre de lames en silex tertiaire (respectivement 603 et 171 sur

l’ensemble de la série), ensuite parce que les nucléus, dans leur dernière phase d’exploitation ont

tous servi à produire des éclats. Et même en envisageant qu’il s’agit d’une réutilisation de nucléus

à lames arrivés à exhaustion, on peut considérer que l’intention réside dans une production

d’éclats.

OUTILLAGE

Le premier constat concernant l’outillage retouché de la Baume de Ronze est que les

tailleurs ont largement privilégié le silex bédoulien pour confectionner leurs outils, puisque 48 %

des pièces de cette matière sont retouchées. Secondairement c’est le silex blond indéterminé qui

est sélectionné, avec un taux de retouche de 21 % et enfin les ressources locales, alors même

19

qu’elles sont les plus abondantes, sont très peu affectées par cette transformation (tableau 1). Là

encore, cette différence de traitement renvoie à la nature des matières premières mises en œuvre et

éventuellement à l’importance symbolique que peuvent revêtir les matériaux plus lointains.

Retouché

Lames et éclats Brut

Effectif % Effectif %

Bédouliens 37 48,1 40 51,9

Blond Ind. 20 22 71 78

Tertiaire local 20 2,6 754 97,4 Tableau 1 : Effectif et proportion d'outils par matières premières.

Le tableau de décompte des distributions des outillages selon la nature des supports (tableau 2)

amène plusieurs constatations. D’abord, on peut remarquer que les outils sont majoritairement

réalisés sur les lames de plein débitage, aux dépens des éclats et des lames corticales ou de mise

en forme. Deux groupes typologiques se détachent nettement des autres en terme d’effectifs, celui

des armatures et celui des enlèvements irréguliers, qui recoupe à la fois des retouches

intentionnelles, et des retouches d’utilisation, qui occupant généralement la partie latérale des

lames.

total Eclat A1 A2 B1 B2 C1 C2 D

Armatures 38 4 0 0 8 6 8 3 9

Troncatures 1 1 0 0 0 0 0 0 0

Bords abattus 3 2 0 0 0 0 0 0 1

Grattoirs 3 1 0 0 1 0 1 0 0

Racloirs 1 1 0 0 0 0 0 0 0

Burins 1 1 0 0 0 0 0 0 0

Microburins 1 0 0 0 1 0 0 0 0 Enlèvements irréguliers 32 7 2 1 7 7 5 2 1

Total 80 17 2 1 17 13 14 5 11 Tableau 2 : Distribution des groupes typologiques selon la catégorie de produits.

De cette première approche globale, on peut retenir que la composition de l’outillage est

semblable à celle que l’on retrouve habituellement dans les séries du Néolithique ancien. La

présence d’un microburin, issu de la couche 70 est à noter, mais si l’on considère que les

microburins disparaissent des assemblages du Néolithique ancien (Binder, 1987), on peut

légitimement considérer qu’il est intrusif et qu’il provient des niveaux du second Mésolithique

sous-jaccents. On peut encore remarquer que les pièces esquillées sont absentes de l’outillage de

la Baume de Ronze, alors qu’elles sont bien représentées dans d’autres contextes du Néolithique

ancien méridional (Binder, 1987 ; 1991 ; Perrin et al., 2005).

20

SYNTHÈSE ET COMPARAISONS RÉGIONALES

Ainsi, dans la série du Néolithique ancien de la Baume de Ronze, on peut reconnaître

quatre chaînes opératoires, une qui a pour objectif la production d’éclats ; les trois autres visent

une production laminaire. Ces trois dernières chaînes opératoires sont réalisées au dépend de trois

matières premières différentes, et doivent être distinguées même si elles partagent ponctuellement

des méthodes et techniques communes lors de certaines étapes. Le schéma suivant (fig. 9), établi

sur le modèle de celui proposé par Thomas Perrin pour les industries de la grotte du Gardon

(Perrin, 2001) permet de récapituler les chaînes opératoires présentes sur le site. Il ne s’agit là que

d’un modèle théorique du schéma opératoire, certaines phases restent incertaines, par exemple il

n’a pas été possible de déterminer si les silex bédouliens arrivent sur le site sous forme de produits

bruts et/ou d’outils déjà retouchés ou bien si la phase de façonnage s’effectue sur le site. En

somme, le schéma opératoire du Néolithique ancien de la Baume de Ronze est similaire à celui

décrit dans d’autres contextes proches comme la grotte de l’Aigle (Roudil et Soulier, 1979), la

Baume d’Oullins (Bevilacqua, 1995), le Taï (Perrin et Remicourt, 2005), avec une opposition

entre une production d’éclats et une production laminaire, qui présentent tout de même diverses

modalités opératoires. En revanche l’économie de débitage diffère de celle du Baratin et des

Petites-Bâties (Binder, 1998), où seul le silex bédoulien est exploité, ce qui s’explique sans doute

par la plus grande proximité des gisements du Vaucluse de ces deux sites.

Enfin, il faut également mentionner la présence d’une industrie sur quartz, qui est relativement

marginale, limitée à une douzaine d’éclats (auxquels peuvent être ajoutées deux lamelles en cristal

de roche). Cette faible représentation de cette matière contraste avec ce que l’on peut observer par

exemple au Taï (60 à 70 % de l’industrie) à la grotte de l’Aigle qui a livré 500 éclats de quartz

pour un millier de pièces en silex (Roudil, 1979), au Mas de Vignoles, où ce matériau occupe 63

% de l’industrie (Perrin et al., 2011), et à la Baume d’Oullins où il occupe 12 % de l’industrie de

la couche 5 (Bevilacqua 1995). On peut éventuellement avancer l’hypothèse que le faible intérêt

porté au quartz par les tailleurs de Ronze est imputable à l’abondance des matières siliceuses

locales.

21

Figure 9 : Proposition de restitution du schéma opératoire des industries du Néolithique ancien de la Baume de Ronze.

22

PARTIE 3 :

ÉVOLUTION DES PRODUCTIONS LITHIQUES AU COURS DE LA

SÉQUENCE DU NÉOLITHIQUE ANCIEN

METHODOLOGIE : LA CRÉATION D’ENSEMBLES COHÉRENTS

Afin de vérifier l’existence d’une évolution des productions lithiques dans la séquence du

Néolithique ancien de la Baume de Ronze, et de mettre en évidence le dynamisme évolutif de ces

industries, il est nécessaire de comparer terme à terme l’ensemble des unités stratigraphiques.

Cependant, l’importance numérique des couches et des anomalies ne permet pas de les étudier

individuellement, d’autant que le nombre de pièces que chaque unité stratigraphique est disparate

(variant de 2 à 359 pièces par couches), et ne permet pas toujours un traitement statistique des

données recueillies. D’où la nécessité de créer des ensembles cohérents fondés sur différents

critères et de les comparer entre eux. Le premier critère retenu concerne la répartition des vestiges

lithiques selon la séquence stratigraphique (fig. 10). Le nombre de restes par couches peut en effet

être interprété comme un témoin de l’intensité des occupations, et permet par là de mettre en

évidence des ruptures dans la séquence. On observe ici d’importantes césures de représentation,

entre les couches 79 et 79 ; 68 et 66 ; 62 à 58 ; 49 et 47. Au dessus de la couche 38, la fin de la

séquence n’a livré que trop peu de matériel pour pouvoir l’inclure à cette étude, d’autant qu’à

partir de la couche 34, du mobilier typiquement chasséen fait son apparition. Il s’agit d’armatures

de grande dimension façonnées sur éclats par retouches bifaciales ou de lamelles très

standardisées en silex bédoulien, parfois chauffées, et débitées à la pression.

La série comporte, en outre, 63 anomalies qui ont livré en tout 1165 pièces lithiques. Elles n’ont

pas été prises en compte pour établir le découpage car l’abondance ou non du mobilier lithique qui

en est issu dépend essentiellement de leur nature, et induiraient dans le graphique des césures

artificielles. Néanmoins, il apparaît important de les intégrer au maximum dans les ensembles afin

de prendre en compte le plus de données possible. Le parti a été pris d’inclure directement le

mobilier issu des anomalies dans les ensembles en fonction de leur position stratigraphique.

Malgré tout, certaines associations sont à rejeter, soit à cause des indications fournies par le

fouilleur (mention de « terrier », ou de « problèmes chronologiques ») soit en raison de la

présence de pièces typiques d’autres contextes chronoculturels. C’est le cas pour les anomalies

136 et 118 qui ont livré chacune des petites armatures trapézoïdales et deux nucléus de petit

module, semblables à ceux que l’on retrouve durant le premier Mésolithique. De la même manière

23

l’anomalie 86 a livré un petit nucléus qui, dans sa dernière phase d’exploitation, a produit des

petits éclats, en silex bédouliens gris possiblement chauffé, que l’on ne peut donc pas attribuer de

manière certaine au Néolithique ancien. Enfin, les anomalies 95 et 85 sont marquées du signe

« = », alors qu’elles appartiennent à deux ensembles sédimentaires distincts ; elles ne seront donc

pas prises en compte pour cette étude.

Figure 10 : Histogramme du nombre de restes par couche.

Cette première analyse du nombre de restes par couche nous permet de proposer de regrouper les

couches en 5 ensembles :

- L’ensemble A comprend les couches 82 à 77 et les anomalies 137, 135, 134, 133,

132, 131, 129 et 127;

- L’ensemble B les couches 76 à 69 et les anomalies 128, 126, 125, 124, 121, 120, 110,

103, 102, 99, 98 et 96;

0 100 200 300 400

25

27

29

31

33

35

38

40

43

45

47

49

52

54

56

58

62

64

66

68

70

72

75

77

79

81

nombre de restes

Co

uch

es

Ens. A

Ens. B

Ens. C

Ens. D

Ens. E

24

- L’ensemble C correspond au couches 66 à 60 et aux anomalies 87, 84, 83, 82, 80, 79, 76

et 74 ;

- L’ensemble D couvre les couches 59 à 48 et les anomalies 71, 67, 66, 64, 63, 62, 61 60,

59, 58, 57, 55, 54 et 52 ;

- L’ensemble E équivaut aux couches 47 à 38 et aux anomalies 51, 49, 48, 47, 46, 45, 44 et

43.

Les ensembles ainsi crées recoupent peu ou prou ceux établis à partir des données céramiques et

les césures observées se superposent aux ruptures sédimentaires observées entre les couches 67 et

66 et entre les couches 60 et 59. Lorsqu’une confrontation des données couche par couche est

impossible, c’est ce premier découpage qui sera mobilisé. La suite de l’étude permettra de

préciser, confirmer ou infirmer ce postulat de départ.

STABILITÉ DE CERTAINS CRITÈRES

Morphométrie des supports laminaires

Divers critères ont été testés afin de cerner l’évolution techno-typologique de

l’assemblage. Certains ne permettent pas de rendre compte de changements dans la mise en œuvre

et la gestion de l’industrie lithique, mais leur constance permet tout de même de tirer certaines

conclusions ou comparaisons suprarégionales, ce qui justifie qu’on les évoque brièvement.

Dans d’autres gisements de la

région, on constate une

augmentation de la robustesse

des produits laminaires au

cours du temps. Les largeurs

moyennes des lames varient

par exemple entre 12 à 20 mm

(Perrin et al., 2011). A la

Baume de Ronze, c’est plutôt

par leur constance

dimensionnelle que les

lames se distinguent, la

largeur des produits tournant

autour de 12 mm (fig. 11).

Figure 11 : Boites à moustache de la distribution des largeurs des produits laminaires de plein débitage, selon les groupes définis par le nombre de restes (la moyenne est figurée par la croix rouge).

25

Modalités d’occupation de l’abri

Ensuite, il semblait intéressant de voir si l’on pouvait discriminer différents types

d’occupation à travers l’analyse du mobilier lithique, selon un protocole qui a fait ses preuves à la

grotte du Gardon (Perrin et al., 2002). Quatre critères sont pris en compte pour cette analyse :

- la proportion de pièces entières par rapport aux fragments de pièces débitées, qui est

révélatrice, entre autres, de l’importance du piétinement, donc de l’intensité de

l’occupation ;

- l’importance des pièces brûlées dans la série ;

- la quantité de débris et d’esquilles par rapport à l’ensemble de l’échantillon, qui permet là

encore de percevoir l’intensité du piétinement ;

- le taux d’esquilles par rapport au nombre total d’esquilles et de débris, qui permet de

pondérer le critère précédent : les esquilles étant considérées comme des témoins d’un

débitage in situ, tandis que les débris peuvent avoir une signification recoupant d’autres

champs d’action, tel que le piétinement.

Figure 12 : Diagramme représentant la proportion des divers critères pris en compte. La droite rouge figure la courbe de tendance linéaire et permet de lisser l’amplitude des variations dues à des problèmes d’échantillonnage. Les pointillés indiquent l’incertitude quant à la représentativité de la courbe linéaire, qui peut gommer certain pics de représentation.

0,00

0,20

0,40

0,60

0,80

1,00

c38

c42

c45

c48

c52

c55

c58

c64

c67

c70

c73

c77

c80

Proportion de produits entiers

0,00

0,20

0,40

0,60

0,80

1,00

c38

c42

c45

c48

c52

c55

c58

c64

c67

c70

c73

c77

c80

Proportion de pièces brûlées

0,00

0,20

0,40

0,60

0,80

1,00

c38

c42

c45

c48

c52

c55

c58

c64

c67

c70

c73

c77

c80

Proportion d'esquilles et de débris

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

c38

c42

c45

c48

c52

c55

c58

c64

c67

c70

c73

c77

c80

Proportion d'esquilles

26

L’objectif était de voir s’il existait des modalités d’occupations différentes entre les sols liés à la

cabane et les niveaux supérieurs. Cependant, les résultats n’ont pas permis de mettre en évidence

des différences, chaque critère pris en compte présentant un taux globalement stable au cours de la

séquence stratigraphique (fig. 12). Il demeure malgré tout possible que le taux de pièces brûlées

enregistre quelques pics d’abondance que le diagramme ne permet pas de distinguer des pics

parasites. Il conviendrait de vérifier par les données de la fouille à quoi correspond chaque pic. Il

serait encore intéressant de comparer ces données à celles de la grotte du Gardon, afin de préciser

si l’on se situe dans la fourchette des occupations temporaires, des habitats ou des grottes

bergeries.

GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES

L’analyse factorielle des correspondances (fig. 13), réalisée à partir du tableau de

répartition des matières premières par couches, montre que ce critère est pertinent pour tester

la validité des ensembles créés par l’examen du nombre de restes par couche, et en affiner la

résolution. Le premier axe factoriel (71,54 % d’inertie) oppose le silex blond indéterminé aux

autres matières premières (quartz, silex tertiaire et bédoulien), tandis que le second (23,26 %

d’inertie) oppose cette fois le quartz aux autres matériaux. Les silex tertiaires et bédouliens

constituent de fait l’essentiel des assemblages et ne permettent pas de distinguer les couches

entre elles, au contraire des silex blonds indéterminés et des quartz.

27

c38

c39

c40

c42

c43 c44 c45 c46 c47 c48 c49 c51

c52 c53

c54

c55

c56 c57

c58

c59 c62 c63 c64

c65

c66 c67 c69

c70

c71 c72 c73

c75

c76

c77 c78

c79 c80 c81

c82

-0,5

0

0,5

1

1,5

2

2,5

-2,5 -2 -1,5 -1 -0,5 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3

F2 (

23

,26

%)

F1 (71,54 %)

c56

c57

c66

c58

c62

c69

c43

c44

c52

c53

c63

c64

c49

c45

c51

c47

c75

c46

c54

c67

c48

c59

c65

c70

c42

c55

c76

c73

c71

c72

c80

c81

c79

c78

c77

c82

c39

c38

c40

0

5

10

15

20

25

30

35

40

Figure 13 : En haut : Plans factoriels 1-2 de l'analyse factorielle des correspondances réalisée à partir du tableau d’effectif des matières premières par couches, les ronds rouges figurent les variables (types de matières premières), les ronds bleus représentent les couches. En bas : dendrogramme de classification ascendante hiérarchique issu des coordonnées factorielles.

Présen

ce de q

uartz

Présen

ce de silex

blo

nd

Ind

.

Ab

sence

de m

atières m

arg

ina

les

Quartz

Blond Ind.

Tertiaire

Bédoulien

28

Le dendrogramme issu de la classification ascendante hiérarchique (fig. 13), réalisé à partir

des coordonnées factorielles, indique que l’on peut regrouper les couches en trois ensembles,

toujours à partir de la part des matériaux employés dans chaque couche :

- Les couches 82 à 71 qui présentent un plus fort taux de silex blond indéterminé dans

leur assemblage ;

- Les couches 70 à 42, pour lesquels la part du quartz et du silex blond indéterminé est

faible ;

- Les couches 40 à 38 qui présentent cette fois un taux de quartz plus important.

Ainsi, bien qui restant toujours minoritaires, l’emploi de certains matériaux permet de

distinguer des évolutions dans l’usage de certaines matières premières au sein de la séquence

du Néolithique ancien. Le silex blond indéterminé se retrouve essentiellement dans la partie

basse tandis que le quartz est lui plutôt présent dans le haut. L’exploitation des silex tertiaires

locaux et bédouliens exogènes reste constante signant là une permanence des réseaux

principaux faisant écho à la permanence des schémas opératoires.

ÉVOLUTION DES ARMATURES

La série a livré quarante pièces qui sont classiquement interprétées comme des armatures.

Sur l’ensemble du lot, dix pièces présentent des fractures perpendiculaires soit à l’axe supposé du

tir soit à l’angle formé par une troncature et la grande base. Ces fractures sont similaires à celle

observées expérimentalement sur des pièces qui ont servi de pointes de projectiles (Gassin, 1991).

D’autre part, certaines pièces présentent un émoussé sur une troncature à l’angle entre celle-ci et

une des bases (fig. 15, n° 4 et fig. 16, n° 7), et pour un spécimen l’émoussé est associé à des stries

transversales, liées à l’abrasion. A Dourgne, de telles traces ont été interprétées comme les

témoins d’une abrasion de la partie active des armatures dans le but de réduire les forces de

friction et assurer ainsi une meilleure pénétration (Vaughan, 1993). On note encore des résidus sur

l’un des angles d’une pièce, qui peut être interprété comme étant des restes de colle (S. Philibert,

com. pers). Ces indices, même si leur observation mérite d’être affinée, autorisent donc à

considérer ces pièces comme des armatures de projectile, d’un point de vue fonctionnel, et plus

seulement typologique.

29

Figure 14 : Dessin et photographie de l’armature présentant des résidus de colle.

Typologie

La représentation des différents types d’armatures par couche (tableau 3) met d’abord en

évidence une césure au niveau des couches 40 et 39. Elles n’ont, en effet, livré que des pièces à

troncatures bifaciales rasantes, réalisées sur éclats du type PB 31 de Thomas Perrin (Perrin, 2001)

ressemblant fortement aux armatures typiques du chasséen ancien (Léa et al., 2009). En revanche,

les ensembles inférieurs, n° 1 à 4, présentent tous une même composante de bitroncatures

géométriques issues de supports laminaires et dont la troncature est façonnée par retouches

inverses et qui présentent souvent des retouches rasantes sur leur face supérieure (BG 32 et 34

selon les codes typologiques de Thomas Perrin et Didier Binder). Ces mêmes ensembles

comportent également des pièces dont la troncature est réalisée par retouches directes abruptes de

type BG2. Parmi ce dernier type de pièces, il est possible de pister une tendance évolutive entre

les niveaux inférieurs qui ont livré des armatures asymétriques donc avec des troncatures

d’obliquité différente et les niveaux supérieurs qui ont fourni des pièces plus symétriques (la

faiblesse numérique de l’échantillon ne permet toutefois pas de conclure définitivement).

Enfin, la partie médiane de la séquence a livré quatre pièces qui n’appartiennent à aucune

catégorie typologique définies par Didier Binder, et que j’ai choisi de classer sous le code BG4

« autres bitroncatures géométriques ». Il s’agit de pièces dont une troncature est façonnée par

retouches bifaciales et l’autre par des retouches directes (sous-type 41) ou inverses (sous-type 42)

(fig. 17, n° 1 à 4).

30

BG 21 BG 22 BG 32 BG33 BG34 BG 41 BG42 PB 31

c 39 1

c 40 1

c 49 2

c 52 1

c 55 1 1

c 56 1 1

c 57 1

c 58 1

A 82 1 1

c 64 1

A 83 2 1 2

c 65 3 2 1

c 66 1

c 73 1 1

A 124 1

c 76 1

c 78 1

c 79 1

c 81 1 1

c 82 1 Tableau 3 : Distribution des types d'armatures en fonction des couches archéologiques.

Ainsi, l’analyse typologique des pointes de projectile permet de mettre en lumière une nette

dichotomie entre les couches 39-40 (fig. 17, n° 6 et 7) et les niveaux sous-jacents (fig. 15, 16 et 17

n° 1 à 4) qui présentent une double composante : à la fois un groupe de pièces à troncatures

inverses et retouches rasantes de la face supérieure, assimilable à des flèches de Montclus et

typique du Néolithique ancien et un groupe plus marginal de bitroncatures réalisées par des

retouches directes.

31

Figure 15 : Bitroncatures géométriques à troncatures directes (type BG2.), n° 1-3 : bitroncatures asymétriques (BG 21), n° 4-12 : bitroncatures symétriques (BG 22), n° 11 : fragment indéterminé.

32

Figure 16 : Bitroncatures géométriques à troncatures inverses (type BG3), n° 1-9 : à troncatures inverses et retouches directes

rasantes (BG 32), n° 10-11 : à troncatures alternes (BG 33), n° 12-14 : à troncatures alternes et retouches rasantes (BG 34).

33

Figure 17 : n° 1-4 : Armatures à une troncature directe ou inverse et une troncature bifaciale (type BG4.), n° 5-7 : armatures à retouches bifaciales (type PB31).

34

Dimensions des bitroncatures

La seule étude typologique des armatures ne permet pas cerner une évolution des

modalités de façonnage de ces outils au cours du temps. Alors que l’étude des caractères

morphométriques des armatures a montré sa pertinence pour pister une évolution des standards de

pointes de projectiles, là où la typologie classique n’était que de faible secours. Il s’agit par

exemple de l’analyse des triangles

sauveterriens de Fontfaurès-en-Quercy

(Valdeyron, 1991), de celle des

bitroncatures à retouches directes

abruptes et à piquant trièdre de l’abri

Gaban (Perrin, 2005).

Pour cette étude, trois critères

dimensionnels ont été pris en compte :

les longueurs des petites et grandes

bases des armatures, ainsi que leur

largeur. Seules les bitroncatures

géométriques à retouches abruptes (BG)

ont été considérées ici, ce qui implique

de rejeter les armatures des couches 39

et 40 qui correspondent à une autre

classe typologique. Par ailleurs, la

représentation des armatures par

couches est insuffisante, c’est pourquoi

j’ai choisi de réutiliser ici les ensembles

définis par le nombre de restes (voir

supra), mais là encore l’échantillon

demeure trop faible numériquement et

ne permet pas de conclure de manière

définitive. Il indique simplement des

tendances dans l’évolution

dimensionnelle des pointes de

projectiles. Les critères qui observent le

plus fort taux de variation sont les

longueurs des bases, essentiellement Figure 18 : Boites à moustache de dimension des armatures. En haut : dimension de la grande base, au milieu : petite base, en bas : largeur.

35

de la plus petite. Mais ce qui frappe surtout, c’est la césure observée entre les ensembles A-B et

C-D. Le bas de l’ensemble stratigraphique a donc livré des armatures de plus petites dimensions,

tandis que la partie médiane fournit des bitroncatures plus grandes, et ce quel que soit le critère

pris en compte (fig. 18). Cela nous conduirait, en outre, à ne considérer que trois ensembles : A-B

d’une part, C-D d’autre part et E.

SÉLECTION DES SUPPORTS

Comme cela a déjà été dit, la taille des produits laminaires n’augmente pas au cours du

temps. Dès lors, le seul facteur explicatif de l’accroissement dimensionnel des armatures réside

dans un choix qui s’oriente de plus en plus vers des lames parmi les plus larges et épaisses de la

production. C’est bien ce qui semble se dessiner lorsqu’on observe la répartition des largeurs et

épaisseurs des produits retouchés par rapport aux produits bruts (fig. 19) : les produits retouchés

des ensembles A et B présentent des dimensions similaires à celles des produits bruts, il n’y a

donc pas de sélection des supports, alors que les supports des outils des ensembles C et D sont

sélectionnés parmi les produits laminaires les plus larges. La faiblesse numérique de l’ensemble 5

(qui a livré seulement 2 outils sur lame) empêche qu’on le prenne en compte pour cette analyse.

Figure 19 : Dispersion de l'épaisseur (en ordonnée) et de la largeur (en abscisse) des produits bruts (carrés rouges) et des produits retouchés (losanges bleus). L’unité de mesure est en mm.

0

2

4

6

8

0 5 10 15 20 25

Ensemble A

0

2

4

6

8

0 5 10 15 20 25

Ensemble B

0

2

4

6

8

0 5 10 15 20 25

Ensemble C

0

2

4

6

8

0 5 10 15 20 25

Ensemble D

36

Avec ce critère, on observe comme pour l’analyse dimensionnelle des armatures une rupture entre

les ensembles A-B et C-D.

UNE ÉVOLUTION DANS LA GESTION DU SILEX BÉDOULIEN ?

En regard de ce qui se passe à la Baume d’Oullins, où les avis sont partagés quant à la

tenue sur place du débitage de silex bédoulien dans les niveaux cardiaux (voir supra), il me

semble intéressant de voir ce qu’il en est à la Baume de Ronze. Le corpus de pièces en silex

bédoulien est insuffisant pour proposer une étude statistique. Par ailleurs, j’ai choisi de rassembler

les échantillons des ensembles A-B et C-D, afin de proposer un échantillon plus conséquent pour

la comparaison. Ce choix se justifie d’autant plus que la césure semble se situer entre les

ensembles B et C, quels que soient les critères pris en compte.

Ens A et B Ens C et D Ens E

Débris - - -

Esquilles - - -

Nucléus - - -

Éléments de mise en forme 1 - -

Eclats non corticaux 2 2 5

Lames 11 18 3 Tableau 4 : Décompte des éléments caractéristiques des phases du débitage, pour le silex bédoulien (les pièces typiques du

Néolithique moyen de la couche 56 n’ont pas été prises en compte ici).

Ainsi, seul un éclat qui présente peut-être un flan cortical peut être interprété comme un élément

de mise en forme, alors qu’on retrouve seulement des produits de première intention dans les

niveaux supérieurs (tableau 4). Malgré tout, cet indice ne constitue pas un argument suffisant pour

conclure à un débitage du silex bédoulien in situ. Il convient toutefois de rappeler que l’intégralité

du mobilier lithique n’a pas été étudiée et que d’autres témoignages des phases de mises en forme

des nucléus bédouliens peuvent peut être se retrouver dans la zone 2, ou dans une partie du site

qui n’a pas été fouillé. Néanmoins, ces résultats, qui restent à étayer, suggèrent que le silex

bédoulien à été apporté sur le site sous la forme de produits de plein débitage et ce quels que

soient les niveaux considérés, et donc vont plutôt dans le sens de l’hypothèse de Didier Binder

(Binder, 1998)

SYNTHÈSE

Pour résumer, cinq principaux critères permettent de proposer une sériation du corpus

(tableau 5). L’analyse de la dimension des armatures et celle de la sélection ou non de

supports laminaires dans la confection de l’outillage retouché repose toutefois sur la partition

établie à partir du nombre de restes par couches.

37

Nombre de

restes par

couche

Gestion des

Matières

Premières

Typologie

Armatures

Dimension

Armatures

Sélections des

supports

Proposition de

sériation

lithique

C 47-38 :

Ens. E

C40-38 :

Ensemble à

quartz

C40-39 :

Pièces

bifaciales Pas de données

Pas de données.

Ens. 3 :

C 40 à 38

C 70-43 :

Ensemble

sans matières

premières

marginales

C 82-49 :

Bitroncatures

géométriques

?

C 59-48 :

Ens. D

Ens. C-D :

Grandes

bitroncatures

géométriques

Ens. C-D :

Sélection des

supports

laminaires de

grande

dimension pour

le façonnage des

outils

Ens.2 :

C66 à 48

b

C 66 -60 :

Ens. C a

C 76-69 :

Ens. B Ens. A-B :

Petites

bitroncatures

géométriques

Ens. A-B :

Absence de

sélection des

supports

laminaires pour

le façonnage des

outils

Ens.1 :

C82 à 69

b

C82-77 :

Ens. A a C82-71 :

Ensemble à

Silex blond

Ind.

Tableau 5 : Corrélation des découpages établis en fonction des différents critères évolutifs et proposition d’ensembles lithiques.

Ainsi, il semble que la série lithique du Néolithique ancien de la Baume de Ronze présente trois

ensembles distincts, qui correspondent à autant de phases évolutives. La phase 1 correspond aux

couches 82 à 69, elle regroupe les ensembles A et B définis par le nombre de restes par couche,

elle a livré des petites bitroncatures géométriques et les outils qui la composent sont façonnés sans

qu’une sélection dimensionnelle des supports laminaires ne soit observé. Au sein de cet ensemble,

il est possible d’envisager une subdivision sur la base du nombre de restes par couches qui

38

présentent une césure au niveau des couches 77 et 76, d’autant que le bas de la séquence mobilise

le silex blond indéterminé, contrairement aux niveaux supérieurs.

La phase 2 se distingue de la précedente par des armatures de plus grandes dimensions, par des

outils réalisés sur des supports laminaires parmi les plus larges de la production et elle ne fait cette

fois plus du tout appel au silex blond indéterminé. Il est là encore possible de subdiviser cet

ensemble sur la base du nombre de restes qui est presque nul au niveau des couches 60 et 59,

césure qui correspond, en outre, au positionnement d’une rupture sédimentaire.

Enfin, la phase 3 se caractérise par l’emploi du quartz et par une rupture typologique avec les

ensembles sous-jacents. Toutefois, les critères mobilisés pour la distinction de cet ensemble et

relevant strictement de l’industrie lithique (et non plus du nombre de restes par couche) sont

présents uniquement à partir de la couche 40. Le statut des couches 47 à 41 demeure donc

incertain : ces niveaux n’ayant pas livré d’éléments diagnostiques, ils ne peuvent pas être

rattachés à ensemble.

39

CONCLUSION

L’étude des industries de pierre taillée du Néolithique ancien de la Baume de Ronze a

permis sans surprise de restituer des schémas opératoires constants sur l’ensemble de la séquence

stratigraphique du Néolithique ancien. Elles présentent des similarités avec les industries

contemporaines du Languedoc oriental et de la Provence. La pérennité des chaînes opératoires

observée sur l’ensemble de la séquence semble confirmer l’impression de stabilité technique des

industries lithiques au cours du Néolithique ancien (Manen et al., 2010).

La sériation des productions lithiques met en évidence au moins trois phases évolutives. Des

attributions chronoculturelles avaient déjà été proposées à partir des données céramiques et en

comparaisons avec d’autres séries du groupe Cèze-Ardèche, mais celles-ci demeurent

hypothétiques pour trois raisons (Beeching, 2002, p.62-63) :

- Une forte variabilité des caractères typo-technologiques des productions céramiques ;

- une fiabilité irrégulière des séries mobilisées ;

- une déficience de datations absolues.

Les données lithiques permettent dans une certaine mesure de les affiner (fig. 20). Les productions

lithiques de l’ensemble 1 confirment sans trop de problème l’attribution au Cardial ancien,

semblables à celles décrites par exemple pour la couche 6 d’Oullins. Les schémas opératoires qui

se divisent en fonction des matières premières mobilisées sont similaires à ceux décrits dans les

assemblages de la couche 6 d’Oullins et des niveaux 45 à 47 de Fontbrégoua (Binder, 1987 et

1998). Les armatures semblent se situer dans la fourchette typologique et dimensionnelle de celles

de la grotte de l’Aigle, même si ces observations reposent uniquement sur la comparaison avec les

dessins publiés (Roudil et Soulier, 1979). Enfin, les datations obtenues dans le bas de la séquence

stratigraphique aux alentours de 5 400 cal B.C. sont également cohérentes avec une attribution au

début de la séquence du Néolithique ancien (Manen et Sabatier, 2003 ; Manen et Guilaine 2010).

En revanche, l’attribution de l’ensemble 2 demeure problématique, et, comme pour la céramique

il est plus difficile de l’interpréter. S’agit-il de la phase 2 du groupe Cèze-Ardèche ou est-ce de

l’Épicardial ? Force est de constater que les différences entre phase 1 et 2 sont ténues, et bien que

l’on constate une tendance à l’accroissement des armatures, ces dernières restent de petites

dimensions comparées à celles que l’on peut trouver dans l’Épicardial du Languedoc oriental

(Perrin et Remicourt, 2005). De plus, la totalité des séries lithiques épicardiales du sud du couloir

40

rhodanien présentent une part importante de leur industrie réalisée en quartz. C’est le cas, au Taï

(ibid), au Mas de Vignoles (Perrin et al., 2011), à la Baume d’Oullins (Bevilacqua, 2005) alors

que cette matière est totalement absente à la Baume de Ronze. Ces quelques éléments tendent

plutôt à rejeter une attribution de l’ensemble 2 à l’Épicardial, et conduisent alors à l’identification

de cet ensemble à une seconde phase du Cardial. Il conviendrait malgré tout de vérifier s’il existe

ou non une continuité d’occupation entre les ensembles 1 et 2 par des datations radiocarbone.

Enfin, l’ensemble 3 se distingue nettement des ensembles sous-jacents. Parmi les rares pièces

caractéristiques qu’il a livrées, on retrouve uniquement des armatures façonnées par retouches

bifaciales sur des éclats, issues de procédés techniques nettement différents de ceux conduisant au

façonnage des bitroncatures géométriques sur lames caractéristiques du Néolithique ancien. Ces

pièces sont classiquement interprétées comme des fossiles directeurs du Chasséen ancien et

conduiraient alors à rattacher cet ensemble au Néolithique moyen si l’on ne tenait compte que de

la seule industrie lithique. Mais, l’ensemble céramique qui lui est associé fait appel à des décors à

la coquille de Cardium et reste ancré dans l’univers typo-technologique du Néolithique ancien

(Beeching, 2002). Il convient toutefois de noter que B. Baron décrit dans cet ensemble un « vase à

très probable embouchure carrée » et des pièces dont la cuisson serait conduite en atmosphère

réductrice (Baron, 2000 p. 86), que l’on retrouve plutôt au Néolithique moyen. Il est donc légitime

de voir dans cet ensemble le témoin d’une phase de transition entre le Néolithique ancien et

moyen, qu’il faudrait pister par l’étude d’autres sous-systèmes techniques.

À l’issue de ce travail, certaines questions demeurent en suspens. Il serait possible d’esquisser des

réponses par la multiplication des études lithiques de gisements stratifiés de la région ou dont

l’attribution chronoculturelle est fiable. Mais, il faudrait également systématiser et affiner la

confrontation des données des différents sous-systèmes techniques, en regard des datations

absolues afin de vérifier si les découpages observés sont synchrones ou non. Ainsi, il me semble

que ce travail démontre une fois de plus la pertinence d’intégrer les données lithiques, au même

titre que celles des autres domaines de la production pour établir une sériation des séquences

d’occupations au Néolithique, et d’en proposer des interprétations en termes d’organisation

sociale des différentes sociétés préhistoriques.

41

Figure 20 : Corrélation des données sédimentaires, céramiques et lithiques.

42

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VAUGHAN P. (1993) – L’aspect fonctionnel des silex taillés du Roc de Dourgne, in J.

Guilaine, M. Barbaza, J. Gasco, D. Geddès, J. Coularou, J. Vaquer, J.-L. Brochier, F. Briois,

J. André, G. Jalut et J.-L. Vernet dir., Dourgne, derniers chasseurs-collecteurs et premiers

éleveurs de la Haute-Vallée de l’Aude, Toulouse, Centre d’Anthropologie des Sociétés

rurales, Caracassone, Archéologie en terre d’Aude, p. 291-294.

47

TABLE DES FIGURES

Figure 21 : Vue de l'intérieur de l'abri…………………………………………………………… p. 6

Figure 22 : Coupe schématique de l'Aven, in Beeching 1989…………………………………… p. 7

Figure 23 : Datations radiocarbones du Néolithique ancien de la Baume de Ronze………..….... p. 7

Figure 24 : Carte de répartition des sites du Néolithique ancien méridional.....……….………... p. 9

Figure 25 : Carte des gîtes de matières premières utilisées à la Baume de Ronze…………...… p. 14

Figure 26 : Représentation des pièces technologiques par types de matières premières……....... p. 15

Figure 27 : Effectif des types de percussion des produits laminaires de plein débitage………... p. 16

Figure 28 : Proportion du type de support laminaire en fonction de la matière première

employée………………………………………………………………………………………… p. 17

Figure 29 : Proposition de restitution du schéma opératoire des industries du Néolithique ancien de la

Baume de Ronze………………………………………………………………………………….. p. 21

Figure 30 : Histogramme du nombre de restes par couche……………………………………… p. 23

Figure 31 : Boites à moustache de la distribution des largeurs des produits laminaires de plein

débitage…………………………………………………………………………………………… p.24

Figure 32 : Diagramme représentant la proportion des divers critères pris en compte…..……… p. 25

Figure 33 : Plans factoriels et dendrogramme de classification ascendante hiérarchique issu de

l’analyse factorielle des représentations de matières premières par couche……………………… p. 27

Figure 34 : Dessin et photographie de l’armature présentant des résidus de colle……….……… p 29

Figure 35 : Bitroncatures géométriques à troncatures directes (type BG2.)……………………... p. 31

Figure 36 : Bitroncatures géométriques à troncatures inverses (type BG3.)…………………….. p. 32

Figure 37 : Armatures à retouches bifaciales (types BG4. Et PB31)……………………………. p. 33

Figure 38 : Boites à moustache de dimension des armatures……………………………………. p. 34

Figure 39 : Dispersion de l'épaisseur et de la largeur des produits bruts et des produits retouchés p. 35

Figure 40 : Corrélation des données sédimentaires, céramiques et lithiques……………………. p. 41

48

TABLE DES TABLEAUX

Tableau 6 : Effectif et proportion d'outils par matières premières………………………………. p. 19

Tableau 7 : Distribution des groupes typologiques selon la catégorie de produits……………… p. 19

Tableau 8 : Distribution des types d'armatures en fonction des couches archéologiques………... p.30

Tableau 9 : Décompte des éléments caractéristiques des phases du débitage, pour le silex bédoulien

…………………………………………………………………………………………………….. p.36

Tableau 10 : Corrélation des découpages établis en fonction des différents critères évolutifs… p. 37

ANNEXES

TABLEAUX DE DÉCOMPTES

TOTAL

SERIE Bédoulien Blond Ind. Silex locaux Quartz Indéterminé/Brûlés Total

Blocs 1 2 12 3 4 22

Esquilles 2 137 917 11 459 1526

Débris 1 217 1022 78 943 2261

Total 1 4 356 1951 92 1406 3809

Eclats 20 45 603 12 97 777

Lame(lle)s

A1 0 1 23 0 3 27

A2 0 2 0 0 0 2

B1 16 14 60 0 11 101

B2 13 7 36 0 13 69

C1 11 9 5 0 11 36

C2 4 2 3 0 3 12

D 10 11 44 2 8 75

Total laminaire 54 46 171 2 49 322

Nucléus 1 1 15 0 1 18

Total 2 75 92 789 14 147 1117

Total général 79 448 2740 106 1553 4926

ENS 1 Bédoulien Blond Ind. Silex locaux Quartz Indeterminé/Brûlés Total

Blocs 0 1 2 0 0 3

Esquilles 0 98 59 0 75 232

Débris 0 184 74 0 160 418

Total 1 0 283 135 0 235 653

Eclats 3 27 78 0 11 119

Lame(lle)s

A1 0 0 1 0 2 3

A2 0 2 0 0 0 2

B1 2 4 5 0 1 12

B2 1 3 2 0 1 7

C1 5 2 0 0 0 7

C2 1 1 1 0 0 3

D 2 4 7 0 4 17

Total laminaire 11 16 16 0 8 51

Nucléus 0 0 1 0 0 1

Total 2 14 43 95 0 19 171

Total général 14 326 230 0 254 824

ENS 2 Bédoulien Blond Ind. Silex locaux Quartz Indéterminé/Brûlés Total

Blocs 1 0 11 1 2 15

Esquilles 0 22 380 5 101 508

Débris 0 21 463 2 300 786

Total 1 1 4 854 8 403 1270

Eclats 3 11 275 1 42 332

Lame(lle)s

A1 0 1 11 0 1 13

A2 0 0 0 0 0 0

B1 4 9 23 0 6 42

B2 6 4 20 0 3 33

C1 4 2 2 0 9 17

C2 1 1 2 0 1 5

D 7 4 21 2 3 37

Total laminaire 22 21 79 2 23 147

Nucléus 1 0 6 0 0 7

Total 2 26 32 360 3 65 486

Total général 27 36 1214 11 468 1756

ENS 3 Bédoulien Blond Ind. Silex locaux Quartz Indéterminé/Brûlés Total

Blocs 0 0 1 2 0 3

Esquilles 0 2 348 6 212 568

Débris 0 0 356 68 324 748

Total 1 0 2 705 76 536 1319

Eclats 5 1 157 10 16 189

Lame(lle)s

A1 0 0 8 0 0 8

A2 0 0 0 0 0 0

B1 2 0 20 0 2 24

B2 1 0 8 0 6 15

C1 0 1 0 0 0 1

C2 0 0 0 0 0 0

D 0 0 10 0 1 11

Total laminaire 3 1 46 0 9 59

Nucléus 0 0 4 0 0 4

Total 2 8 2 207 10 25 252

Total général 8 4 912 86 561 1571

PLANCHES

Planche 1 : Supports et outillages de l'ensemble 1. n° 5, 7, 8 : lames à enlèvements irréguliers (IR22), n° 9 : Perçoir à bord abattus alternes (BA34E), n° 8 : Néocrête. Matières premières : n° 1 : silex bédoulien gris, n° 1, 2, 3, 5 : silex bédoulien blond, n° 4, 6, 8, 9 : silex blond

Indéterminé.

Planche 2: Produits laminaires de l'ensemble 2. Matières premières : n° 1, 2, 3, 7 : silex bédoulien blond, n° 4, 5, 6, 8 : silex tertiaire.

Planche 3 : produits laminaires de l’ensemble 2, n° 1 : lame à enlèvements latéraux irréguliers (IR22), n° 2 : grattoir sur lame et enlèvements latéraux irréguliers (GR22 et IR22). Matières premières : n° 1, 2, 5 : silex bédoulien blond, n° 3 et 4 : silex tertiaire, n° 6 et 7 : silex blond indéterminé.

Planche 4 : Outillage divers, ensemble 2. n° 1, 2 : lames à enlèvements latéraux irréguliers (IR22), n°3, 7 : pièces à 2 bords abattus (BA3), n° 4, 5 : éclats tronqués (TR11 et TR12), n° 6 : racloir (RA11). Matière première : silex tertiaire.

Planche 5 : supports laminaires de l'ensemble 3. n° 9 : lames tronquée et à enlèvements latéraux irréguliers (TR22 et IR22). Matières premières : n° 1, 5, 6, 9 : silex bédoulien blond, n° 3, 4, 7, 8 : silex tertiaire, n° 2 : indéterminé.