antagonistes et complémentaires, le lion et l’éléphant dans la personnalité du buddha

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BIBLIOTHÈQUE DE L’ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES TOME TROIS CENT QUARANTE-CINQ Penser, dire et représenter l’animal dans le monde indien Librairie Honoré Champion, Éditeur PARIS 2008 Textes réunis par Nalini BALBIR et Georges-Jean PINAULT

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BIBLIOTHÈQUE DE L’ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDESSCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES

TOME TROIS CENT QUARANTE-CINQ

Penser, dire et représenter l’animal dans le monde indien

Librairie Honoré Champion, ÉditeurPARIS2008

Textes réunis parNalini BALBIR et Georges-Jean PINAULT

Table des matières

Introduction ....................................................................................................................................... 7Nalini BalBir & Georges-Jean Pinault

I. VUES D’ENSEMBLE

Penser les êtres – plantes et animaux – « à l’indienne » .............................. 21

Jan E. M. HouBen

Attitudes Towards Animals in Indian Buddhism .............................................. 47

Lambert ScHmitHauSen & Mudagamuwe maitHrimurtHi

Les jaina et le règne animal ............................................................................................ 123

Colette caillat

Vers une sensibilité orientale de l’animal en Occident ? ........................... 157Georges cHaPoutHier & Jean-Claude nouët

Les pratiques indiennes d’après le livre IV du De Abstinentia de Porphyre ................................................................................................................................. 173

Jean Bouffartigue

II. ANIMAUX ET SAVOIRS

The Function of Animals in the Rig Veda, RV X.28, and the Origins of Story Literature in India ...................................................... 197

Stephanie W. JamiSon

Les animaux dans le kāvya .............................................................................................. 219Marie-Claude PorcHer

Le bestiaire de Kālidāsa ..................................................................................................... 243

Sylvain Brocquet

Animal usage in the Sanskrit Traditions of Lovemaking, Lawful Conjugal Love, and Medicine ..................................................................... 287

Kenneth G. ZySk

926 l’animal danS le monde indien

Sur le kuṇḍalinīyoga et les charmeurs de serpents ......................................... 305Arion Roşu

On a toujours besoin d’un plus petit que soi ou les animalcules (nigoda) au service de l’équilibre cosmique ....................................................... 309

Jean-Pierre oSier

III. LES ANIMAUX DANS L’ART DE L’INDE À L’ASIE DU SUD-EST

Les animaux dans l’architecture du temple indien. Images et métaphores .......................................................................................................... 333

Bruno dagenS

The archeo-zoological evidence for animal and cultural transfers between South and Southeast Asia ............................................................................ 363

Ian C. glover

The earliest iconographic and archaeological evidence for animal and cultural transfers between South and Southeast Asia ....................... 383

Bérénice Bellina & Ian C. glover

Figurines animales, témoins des premiers échanges entre l’Inde et l’Asie du Sud-Est au tournant de notre ère .................................................... 403

Michel Jacq-Hergoualc’H

IV. ANIMAUX PARTICULIERS, SAUVAGES OU FAMILIERS

Griffes et rugissements : sur la trace des grands félins de l’Indus au Bengale ........................................................................................................... 411

Ronan moreau

siṃhair iti vyāghraiḥ ........................................................................................................... 431

Klaus karttunen

Elephant man. Sur le nom de l’éléphant en tokharien ................................. 447

Georges-Jean Pinault

Le bestiaire de Śiva: de Paśupati à Śarabha ....................................................... 499

Marie-Luce BaraZer-Billoret

taBle deS matièreS 927

Antagonistes et complémentaires, le lion et l’éléphant dans la personnalité du Buddha ................................................................................................ 523

Claudine BautZe-Picron

« Le chien a-t-il la nature de Bouddha ? » ........................................................... 573

Danièle maSSet

La jeune fille au perroquet : un thème iconographique ambigu .......... 599Vincent lefèvre

Contribution à l’étude des combats de coqs en Inde du Sud .................. 623Daniel negerS

V. HOMMES ET ANIMAUX UTILITAIRES

L’extension du devoir de non-violence aux animaux dans la pensée de Gandhi. La question de l’élevage ................................................. 713

Florence Burgat

La place de l’animal, et plus particulièrement des bovins, dans la tradition népalaise ................................................................................................ 743

Jean feZaS

L’abattoir de Deonar (Mumbai, Inde) : centre industriel ou autel sacrificiel ? Représentations de l’animal de boucherie dans le monde indien ........................................................................................................................ 791

Marie-Caroline Saglio-yatZimirSky

Attitudes indiennes vis-à-vis de l’animal domestique ................................. 811Nalini BalBir

L’animal révélateur des rapports de l’homme au monde dans les romans de Nanjil Nadan publiés de 1977 à 1998 ................................... 859

Chantal delamourd

Représentation et fonction de l’animal dans les proverbes bengalis ... 889

Philippe Benoît

Index par Ronan moreau ................................................................................................ 909

Liste des collaborateurs du volume ............................................................................ 923

Antagonistes et complémentaires,le lion et l’éléphant

dans la personnalité du Buddha

Claudine BAUTZE-PICRON

Grand être, de grande sagesse, grand par l’énergie, de grand renom, par l’éclat de la grande Loi, Il est le plus grand, Il a atteint la perfection du sens du grand Dharma.Grand nāga, grand lion, grand moine, grand ascète, glaive aigu de la grande sagesse, Il a détruit les grandes passions.

DANS ces deux strophes de l’« Éloge du Buddha » extraites des Légendes du Buddha (Buddhāvadāna) 1, le Buddha est évoqué comme étant simultanément mahānāga et mahāsiṃha. Le nāga,

qui est tout à la fois « le grand éléphant », « le grand serpent », « le grand dragon » 2, ainsi que le « grand lion », désignent le Buddha comme être d’eau et de feu 3. Nulle part ailleurs qu’au Gandhara, les artistes n’ont

1. Trad. Hofi nger 1990, p. 121.2. Concernant le double sens du mot, voir Vogel 1926, p. 129, 211, 281. La confusion

est mise en évidence dans l’histoire du stūpa de Rāmagrāma, tout à la fois protégé par un génie nāga et vénéré par des éléphants (ibid., p. 127-129). Vogel rappelle aussi que quatre de ces dragons/génies sont rattachés aux quatre directions de l’es-pace (ibid., p. 8-10, 210) – autre point de convergence avec les éléphants (voir ci-dessous). Snodgrass 1992, p. 292-300 et Auboyer 1949, p. 117-125 considèrent tous deux le symbolisme du nāga et du makara.

3. Si le nāga est fondamentalement rattaché à l’élément eau, ainsi que le sont tous les nāga (Vogel 1926, p. 94), force est d’observer que, dans l’iconographie plastique du Buddha, le nāga n’est pas ressenti comme partie intégrante de la personne du Buddha – contrairement au lion ou à l’éléphant, mais bien comme personnage indépendant qui surgit dans divers épisodes de la biographie du saint homme (ibid., p. 93-131).

524 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

traduit aussi clairement cet aspect de la personnalité du Buddha, source de ces deux éléments, en le représentant, des fl ammes jaillissant de ses épaules, de l’eau s’échappant en fl ot de ses pieds 4. Cette version, qui illustre de la manière la plus évidente le mystère de l’eau et du feu, sera abandonnée pour ne réapparaître qu’à Pagan, dans un exemple qui demeure isolé 5, tandis que les artistes indiens tentent de le représenter au moyen d’images symboliques, telles celles exprimées par les auteurs de l’« Éloge du Buddha » dans le passage cité ci-dessus. L’allusion au lion et au grand nāga 6 apparaît ici dans une litanie chantée à la gloire du Buddha, où elle ne constitue toutefois pas un simple embellissement. La confrontation des deux animaux est intimement liée à la riche personna-lité du Buddha, dont certains aspects demeurent encore peu connus bien que présents dans les descriptions littéraires ou dans les images plasti-ques. Dès lors, il nous a semblé intéressant, tout en tentant d’établir le catalogue des témoignages matériels où le lion et l’éléphant se rencon-trent, de proposer une interprétation justifi ant cette rencontre répétitive des deux animaux dans l’iconographie bouddhique.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous nous devons d’évoquer un épisode particulier de la vie du Buddha, qui fut d’ailleurs le point ini-tial de nos interrogations sur le sujet traité ici. Vers la fi n de sa vie, le Buddha revint à Rajgir, où il se trouva menacé par Nālāgiri, un éléphant rendu fou par Devadatta, son cousin jaloux. Le saint homme, confronté au pachyderme, l’apaisa en tendant sa main droite vers lui. Certaines sources mentionnent que cinq lions, voire même des langues de feu,

Dans certaines de ces histoires, le nāga symbolise les eaux complémentaires de l’élé-ment feu, par exemple, dans le miracle de Śrāvastī, où les deux nāga Nanda et Upa-nanda jaillissent des tréfonds de l’océan cosmique pour soutenir le siège du Buddha, ou dans l’histoire évoquant le serpent dragon d’Uruvilvā (ibid., p. 107-108). Ce der-nier récit est, par ailleurs, particulièrement révélateur de l’identifi cation fondamentale du Buddha au feu. Rappelons que le sage passa la nuit dans une hutte, habitée par un nāga, où était gardé le feu sacré. Mais le génie, ici un démon, avait le pouvoir d’émettre des fl ammes et ce fut en se transformant lui-même en feu que le Buddha le détruisit. On pourrait, au contraire, voir en l’histoire du génie de l’arbre Mucilinda, le triomphe de l’eau par l’eau, puisque c’est afi n d’abriter le Buddha des trombes d’eau qui s’abat-taient, que le nāga s’enroula autour du Buddha et forma un capuchon de ses têtes (ibid., p. 102-105).

4. Brown 1984, p. 80-81 et fi g. 3.5. Bautze - Bautze-Picron 2003, fi g. 45 (dans le Tayok-pyi-hpaya-gyi).6. La même expression apparaît par exemple dans le Buddhacarita d’Aśvaghoṣa et est

rendue par Beal comme signifi ant the “great Nâga or dragon” (1883, p. 247).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 525

jaillirent de ses doigts. Cette tradition est reprise en Inde orientale et à Pagan en Birmanie où de minuscules fauves sautent de dessous la main du Buddha alors que l’éléphant se jette aux pieds de ce dernier (fi g. 19-21) 7. Mais pourquoi cette présence ? Pourquoi ces lions, en général au nombre de cinq (comme les cinq doigts) ? Pourquoi cet éléphant a-t-il été rendu fou ? Ce n’est pas le premier qui surgit de manière drama-tique dans la vie du Buddha. Déjà à Kapilavastu, on retrouvait le trian-gle Buddha-Devadatta-éléphant puisque le cousin du Bodhisattva avait tué un éléphant royal chargé de transporter ce dernier. Pourquoi avoir dépêché à Rajgir un éléphant alors que le bestiaire indien regorge d’ani-maux « naturellement » sauvages ? Et comment expliquer la présence des lions, voire des fl ammes qui jaillissent de la main droite tendue du Buddha qui dompte l'éléphant ?

1. Les témoignages artistiques

L’éléphant et le lion apparaissent à divers moments de l’histoire de l’art bouddhique, dans des contextes culturels variés, dans des systèmes iconographiques diff érents, mais complémentaires, que nous allons briè-vement décrire. Ainsi que nous le verrons, cette confrontation n’est pas propre au bouddhisme, mais appartient au vocabulaire pan-indien de la symbolique architecturale. Sans prétendre être exhaustive, je voudrais introduire ici une série de situations artistiques ou littéraires où les deux animaux apparaissent conjointement.

1.a. Grottes excavées du Maharashtra

Le système d’opposition relevé entre le lion et l’éléphant s’observe dans l’un des vihāra de Bhaja, bien que formulé diff éremment. De fait, l’éléphant apparaît comme monture de Māra, image de l’obscurité, de la terre, face au quadrige du dieu solaire 8.

7. Monika Zin a réuni les sources littéraires concernant cet événement dans son article de 1996 et a repris en détail l’étude de cette histoire dans une étude récente (Zin 2006, p. 69-95) ; concernant l’émission des cinq lions et des langues de feu, voir plus préci-sément p. 332 et la note 6 où les variations relatives au nombre de lions ou d’éléphants sont citées ; Hiuan Tsang évoque ainsi 500 éléphants domptés par les cinq lions, une autre source chinoise oppose 500 lions aux 500 éléphants. Mais dans l’ensemble, les sources s’accordent sur le chiff re de cinq lions et sur la présence des langues de feu.

8. Bautze-Picron 1998, p. 8-11 et pl. I-IV.

526 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

L’éléphant est repris dans le premier art bouddhique comme atlante : une frise en haut-relief orne la partie inférieure des murs latéraux du sanctuaire de Karle, une autre supporte la base d’un monastère à Pital-khora, deux animaux s’adossaient aux murs d’une véranda à Kuda 9. Dans cette fonction, l’éléphant est repris comme élément de chapiteau, supportant la roue de la Loi, ou monté par des couples, comme sur les piliers de la cour de Bedsa et du sanctuaire de Karle 10.

À Bedsa, les éléphants et des chevaux dominent les deux piliers encadrant le passage vers le sanctuaire 11, reprise possible de l’opposition clairement établie à Bhaja et c’est probablement dans ce contexte que se place l’origine de l’intégration des deux animaux dans le cycle des sept trésors du souverain cakravartin 12. À Nasik, les lions remplaceront les chevaux au niveau du chapiteau 13.

9. Karle : Nagaraju 1981, pl. 130 ; Zimmer 1955, pl. 79 ; Ramachandra Rao 1984, fi g. 145 ; Pitalkhora : Dehejia 1972, pl. 22 ; Ramachandra Rao 1984, fi g. 124 ; Kuda : Dehejia 1972, pl. 73. Une autre catégorie d’images de l’éléphant est fort probablement à rattacher à ce type ; il s’agit des représentations monolithiques de l’animal, connues depuis le règne d’Aśoka (éléphant de Dhauli, Orissa : Williams 2000, fi g. 5) et pré-sentes par exemple devant la grotte dite de Gaṇeśa à Udayagiri-Khandagiri en Orissa (ibid., fi g. 6 ; Zimmer 1955, pl. 47 ; Franz 1965, pl. 32) ou plus tardivement à Maha-balipuram où il tourne le dos au lion (Zimmer 1955, pl. 270-271 ; Franz 1967, pl. 65) ou encore dans la cour du Kailāsa ou de l’Indrasabhā d’Ellora (Zimmer 1955, pl. 205, 218, 341).

10. Karle : Nagaraju 1981, pl. 129, 131 ; Franz 1965, pl. 86.11. Bedsa : Nagaraju 1981, pl. 23, 27 ; Dehejia 1972, pl. 38 ; Franz 1965, pl. 78 ; Snead

1989, pl. 77. Les chevaux font face à l’extérieur mais derrière eux, ce sont des élé-phants à nouveau qui se tournent vers le sanctuaire. D’autres paires sont sculp-tées au-dessus des pilastres latéraux, par exemple le cheval et le taureau (à droite) (Dehejia 1972, pl. 40 ; Franz 1965, pl. 79-80).

12. Seuls l’éléphant et le cheval représentent le règne animal dans le groupe des sept trésors qui incluent, en outre, le joyau et le disque, le premier ministre, le chef des armées et l’épouse.

13. Grotte 3 (Dehejia 1972, pl. 48 ; Nagaraju 1981, pl. 178) : les lions sont sur le pilier de droite, les éléphants sur celui de gauche entourant le passage vers l’entrée (les piliers suivants sont dominés, à gauche et à droite, par des lions ou des élephants, ceux des angles par des lions ou des taureaux). Grotte 10 (Dehejia 1972, pl. 47 ; Franz 1965, pl. 92 ; Nagaraju 1981, pl. 184) : le chapiteau aux lions est symétrique d’un chapiteau portant des taureaux (on relève ensuite, à gauche et à droite, les taureaux et les lions, et les lions et éléphants aux angles). Les chapiteaux de la grotte Gaṇeśa de Junnar (« Gaṇeśa Lena » ou grotte 7 sur le Gaṇesh Pahar) présentent des compositions simi-laires : les éléphants surmontent les piliers centraux tandis que des taureaux ou des lions sont posés sur les piliers latéraux (Dehejia 1972, pl. 65 ; Nagaraju 1981, pl. 73).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 527

Dès cette période ancienne, qui correspond aux derniers siècles avant et au premier de notre ère, les animaux s’inscrivent non seule-ment dans un système d’opposition, mais aussi de complémentarité. L’animal au sommet de la colonne agit comme emblème, mais lors-que cette colonne devient pilier et soutient la voûte du monument ou celle de sa véranda, la fonction de support est davantage mise en évi-dence. L’opposition des deux animaux, l’éléphant face au cheval ou au lion qui se substitue à l’équidé, rappelle le confl it fi guré à Bhaja entre obscurité (Māra / éléphant) et lumière (Sūrya / quadrige) mais, dans le cas présent, les animaux sont positionnés au même plan frontal alors qu’au vihāra de Bhaja, leur distribution se mettait clairement au service du confl it entre la lumière spirituelle émanant du monument et la nuit dans laquelle baigne le monde profane, confl it inhérent au bouddhisme tout au long de son développement. Dès Bedsa, on peut supposer que la représentation des éléphants et chevaux n’illustre pas ce confl it, mais qu’elle refl ète surtout deux caractères propres à la structure architectu-rale, ou au Buddha. Le Buddha intègre les fonctions symboliques des deux animaux ; le pachyderme indique l’élément stable sur lequel repose le monument (qu’on se souvienne de Pitalkhora, Karle ou Kuda), il sym-bolise la terre alors que le cheval nous rappelle que le Buddha est sou-verain cakravartin, et qu’il marque les limites des terres sur lesquelles règne le saint homme. Cet animal de vélocité est aussi image de l’espace dans lequel la parole bouddhique se répand. On peut dès lors aisément comprendre qu’il cèdera sa place au lion, dont le symbolisme est encore bien davantage axé sur la royauté solaire. Bien plus que le cheval, le lion impose sa voix dans l’univers. L’introduction du lion à cette fonction remonte à l’époque Maurya 14, mais sa substitution au cheval ne fut pas immédiate ni aisée comme en témoignent les sites de Bhaja et Bedsa. C’est probablement en conséquence de relations avec le Nord-Ouest de la Péninsule que le lion remplace le cheval à Nasik et Junnar, et ce de manière défi nitive.

Les piliers de façade et ceux sculptés dans la grotte 17 sont tous dominés par des paires d’éléphants (Franz 1965, pl. 94-95 ; Nagaraju 1981, pl. 190-1). Le lecteur aura reconnu la présence, dans des combinaisons variables, des autres animaux sculptés sur l’abaque du chapiteau de Sarnath, à savoir le lion, le cheval, le taureau et l’élé-phant.

14. Irwin 1976, p. 747.

528 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

1.b. Gandhara

La substitution du lion au cheval s’opère de manière défi nitive dans cette région du Nord-Ouest de la Péninsule. Le « trône aux lions » est introduit dans l’iconographie bouddhique, deux fauves remplaçant les deux pieds antérieurs du siège sur lequel le Buddha a pris place, et ce motif devient partie intégrante de l’image du Buddha jusqu’à la fi n du développement de l’art bouddhique en Inde, dotant le siège d’une conno-tation royale 15.

Deux ou trois éléphants surgissent en barrissant sous le large lotus occupé par le Buddha dans certains panneaux illustrant une iconogra-phie du type « Grand Miracle de Śrāvastī » 16. Force est d'admettre que les artistes se montrèrent peu talentueux dans la représentation des élé-phants, au profi l raide et fi gé. Mais le choix des éléphants, et non des lions, ne résulte certainement pas d’un choix libre de l’artiste. Il se justi-fi e de manière diverse. On pourrait a priori penser que les éléphants sont substitués aux deux nāga Nanda et Upananda qui soutiennent le lotus sur lequel est assis le Buddha lors du Grand Miracle. Mais dans ce cas, on s’explique mal le troisième animal qui nous fait face – et constitue fort probablement une paire avec un quatrième éléphant (non fi guré) dirigé vers l’arrière. Cette composition évoque les quatre éléphants supportant l’univers et distribués de manière rayonnante et symétrique à partir du centre 17. Les animaux rappellent bien sûr aussi les nāga surgissant des eaux dans lesquelles s’enfonce la tige du lotus sur lequel le Buddha a pris place 18, en même temps que leur présence symbolise la nature royale de

15. Auboyer 1949, p. 105-112.16. Ce ne sont pas deux, mais bien trois éléphants qui sont le plus souvent visibles, deux

aux angles et un au centre. Voir Stein 1911-12, pl. XLVII ; Bussagli 1996, p. 328 ; The Exhibition 1984, cat. I-9 ; Kurita 2003, I, pl. 393-394, 396, 400.

17. Les noms de ces quatre éléphants varient selon les sources, toutes citées par Kir-fel 1990, p. 122. Voir aussi Snodgrass 1992 p. 315 et note 233 ; Auboyer 1949, p. 131-132 ; Coomaraswamy 1931, p. 32.

18. Snodgrass 1992, p. 316-317. L’analogie entre l’éléphant et le serpent, tous deux pou-vant être nommés nāga, est mise en évidence en plusieurs sites du premier art boud-dhique. Par exemple, le stūpa de Rāmagrāma, protégé par un nāga dans la légende, est aussi vénéré par des éléphants et tous sont représentés sur les linteaux du grand stūpa de Sanchi (Ramachandra Rao 1984, fi g. 4, 38, 42) ou sur des chapiteaux de la grotte 3 de Kanheri (Franz 1965, pl. 89 ; Nagaraju 1981, pl. 96). Ci-dessus note 2. Voir aussi une dalle d’Amaravati où le serpent est lové autour du monument de part

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 529

celui qu’ils supportent 19. Mais ces animaux qui surgissent et semblent vouloir s’échapper, tout en relevant leur trompe, ne portent-ils pas, par leur barrissement, la parole bouddhique aux quatre orients 20 ?

Fort à propos, les auteurs du Sūtra des Sages et des Fous, dans la des-cription qu’ils donnent du grand miracle de Śrāvastī, affi rment que « le Bienheureux frappa de la main le trône aux lions et, sur-le-champ, il sortit de ce trône une puissante voix pareille au cri de l’éléphant » 21. Et comme Māra et les siens n’avaient pu résister lorsque la déesse-terre avait surgi des tréfonds de son royaume, les hérétiques contestant la parole bouddhique, tombèrent ici à la renverse. Ce passage est probable-ment à mettre en rapport avec les images du Gandhara, même si l’ana-logie avec les nāga ne peut être complètement exclue. Dans son analyse de ce texte, Paul Mus concluait que

cʼest là une répétition du Mâravijaya, y compris le geste classique de l'« attestation » ; on voit mieux ainsi ce que veut dire l'éléphant [intercalé entre les lions : ce n'est pas simplement « le symbole de la sagesse »], c'est l'insigne de l'Illumination, de la Bodhi (dont le Lalitavistara lui donne le nom), ou plus exactement du grand cri qui s’élève du sol ou du trône frappé par la main du Buddha, et qui met en fuite l’armée de Mâra 22.

Divers aspects de la question sont ici évoqués. D’une part, Mus rappelle que l’éléphant qui fait partie des trésors du roi cakravartin se nomme Bodhi dans le Lalitavistara, ce qui renforce le lien que cet animal

et d’autre duquel deux éléphants sont profi lés, off rant des fl eurs (Ramachandra Rao 1984, fi g. 175).

19. Snodgrass 1992, p. 96 ; Auboyer 1949, p. 131.20. C’est en tout cas ce qu’ils sont clairement sur un bas-relief du stūpa 2 de Sanchi

(Agrawala 1964, fi g. 25 ; Snodgrass 1992, fi g. 25). Sur un autre bas-relief du site (Agrawala 1964, fi g. 24), le pilier est couronné par deux lions alternant avec deux éléphants qui soutiennent la roue de la Loi, ce qui souligne bien leur fonction équivalente à cet endroit, qui est simultanément de soutenir la roue en étant « en dessous », et de contribuer à l’expansion de la parole bouddhique dans les quatre dimensions en étant « en haut ». Dans cette fonction noble, les animaux préservent toujours leur forme naturelle. Évoquons brièvement quelques bronzes de la vallée du Swat, au Pakistan, et qui appartiennent à une époque bien plus tardive (VIIe-VIIIe s.), où soit les éléphants, soit les lions sont repris en vue frontale sous le Buddha (The Exhibition 1984, cat. I-22 ; Rhie 1988, fi g. 16).

21. Cité par Auboyer 1949, p. 132, étudié par Mus 1935, p. 180-181.22. Mus 1935, loc. cit.

530 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

entretient de manière générale avec le moment de l’Éveil. D’autre part, cet animal est repris simultanément comme monture de Māra qui, en régnant sur notre monde, a toutes les raisons de posséder le pachyderme pour moyen de locomotion (assis sur l’éléphant, il est non seulement roi, mais surtout règne sur son univers, la terre, symbolisée par l’animal), et comme attestation du pouvoir spirituel du Buddha. En conquérant Māra, ce dernier assimile sa monture ; l’animal jaillit de dessous son siège dans les représentations plastiques tandis que le texte mentionne le cri pro-fond surgissant du siège du Buddha. C’est donc bien le royaume – sym-bolisé par l’éléphant – de Māra qui est ravi à ce dernier par le Buddha à l’instant de l’Illumination, et c’est à partir de ce contexte bien parti-culier que l’éléphant devient l’emblème du Tathāgata Akṣobhya, Jina de l’Est, dont le geste est précisément la bhūmisparśamudrā, geste de l’Illumination.

L’éléphant est symbole de la terre, de l’élément terre, il réfère à ce qui est en bas, passif et paisible 23. En revanche, le lion évoque la parole, la voix du « lion des Śākya », et réfère clairement au Buddha de Sarnath, à celui de la première prédication 24. Cela explique aussi comment dans le système des Pañcatathāgata, la paire de lions devient l’emblème du Buddha central Vairocana dont le geste est précisément d’enseigner, au même titre que les deux éléphants supportent le Buddha Akṣobhya dont le geste, répétons-le, est d’effl eurer la terre des doigts de sa main droite. Mais comme l’avait déjà perçu Paul Mus, ces diff é-rents Tathāgata dont les personnalités se démarquent clairement les unes

23. Auboyer 1949, p. 130-133. Mais nous sommes en Inde et il serait erroné de s’en tenir de manière rigide à une explication exclusive. En outre, il convient de tenir compte du facteur chronologique, même s’il ne nous est pas permis d’introduire une datation précise des phases successives de la perception du symbolisme traduit par l’animal. Dès les premières phases de son apparition dans le vocabulaire mythique, l’éléphant révèle sa nature solaire, qu’il dissimule dans ses lourdes formes : il est le « nuage où s’enveloppent et le soleil et la pluie et le feu du ciel » comme l’écrit Senart (1882, p. 255). Cette perception du pachyderme est antérieure à l’introduc-tion du lion comme image du feu solaire (ibid., p. 254-255, citant un hymne de l’Atharva Veda), et trouva probablement à s’exprimer dans l’image monolithique de Dhauli, ou dans celle du chapiteau de la colonne de Saṅkīsa, lesquelles représentent peut-être le Buddha lui-même comme l’indique Verardi (1999-2000, p. 70, avec des références complémentaires à A. K. Coomaraswamy concernant les relations de l’éléphant et du soleil ; voir encore Senart, p. 256-257).

24. Ebert 1985, p. 39, note 227.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 531

des autres dès l’époque post-Gupta, puisent tous à une seule source, à savoir le Buddha historique Śākyamuni. L’éléphant a vraisemblable-ment constitué le premier animal de référence dans l’élaboration de la personnalité du Buddha qui n’a intégré le lion qu’au cours de l’époque kushane 25. C’est en eff et au premier siècle de notre ère que le fauve est vu pour la première fois en contact direct avec le Buddha, protégeant celui-ci, comme à Sanchi (porte orientale), ou le supportant, lui ou Mai-treya, dans le contexte du Gandhara et de Mathura.

Le lion peut emprunter à l’éléphant sa fonction de soutien. Par exem-ple, des protomes de fauves et de pachydermes alternent avec des atlan-tes pour former une frise supportant la base de stūpa (fi g. 3) 26. Dans cette même situation, mais aussi en relation directe avec leur représentation, observée ci-dessus, sous le lotus du Buddha, les éléphants se retrouvent aux angles du socle soutenant des stèles illustrant le Buddha ou Mai-treya enseignant (fi g. 1-2) 27. Dans un cas (fi g. 1) 28, trois éléphants alter-nent avec des atlantes : la trompe relevée des animaux semble indiquer leur barrissement. Par-delà le Gandhara, le motif de l'éléphant comme atlante se retrouve jusqu’en Chine où il soutient les angles du noyau central du temple 29.

L'idée d'introduire l'éléphant comme atlante trouve certainement son origine en Inde même, comme en témoignent les hauts-reliefs de Kuda ou Karle, cités ci-dessus, ou les chapiteaux surmontant les colonnes iso-lées ou les piliers des portiques de stūpa. Mais la combinaison des deux animaux ne sera pas reprise sans problème dans l’art de la Péninsule. Fort clairement, les fi gurer côte à côte et paisiblement comme au Gan-dhara, ou comme dans la grotte 26 d’Ajanta (ci-dessous) vers la fi n du Ve s., ne convient pas aux concepts qu’ils véhiculent. Le lion symbolise le feu, voire même le feu solaire, il évoque la célérité, le mouvement,

25. Comme l’observe Verardi 1999-2001, p. 70, l’éléphant fait partie de la personnalité du Buddha dès avant les environs de 100 avant notre ère.

26. Avec des variations bien sûr : Franz 1965, pl. 199 illustre la base d’un stūpa de Jau-lian-Taxila où les lions sont sculptés à la base du monument (sous une série d’ima-ges du Buddha enseignant) alors que les éléphants sont positionnés plus haut (sous des images du Buddha méditant).

27. Kurita 2003, II, pl. 294 ; Sotheby’s New York 22.9.2000, lot 112.28. D’après Saunders 1960, pl. XII.29. Jayne 1928/29, p. 165 & 168, ainsi que fi g. 9-10 (et p. 161 fi g. 6 reproduisant le plan

de la grotte de Hsia Wang Mu Miao) et 11-12 (grotte VI à Yün Kang).

532 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

alors que l’éléphant implique la terre, l’eau, l’immobilisme, le calme ; l’un est conçu comme se mouvant dans les airs, comme étant « en haut », l’autre a pour fonction de soutenir l’univers et donc d’être « en bas ». Le développement du motif du VIe au VIIIe siècle dans l’architecture hindoue ou jaïne, refl ète ce confl it et exprime comment le lion tout en voulant être maître des lieux, tend à se libérer, avec violence parfois, de la zone terrestre du temple pour atteindre les espaces célestes 30.

1.c. Ajanta, grotte 26

Le Buddha enseignant et assis à l’européenne sur son trône « royal » constitue l’image la plus souvent illustrée dans ce caityagha, ses repré-sentations couvrant les murs latéraux en une suite de hauts panneaux rectangulaires sculptés en haut-relief. Mais c’est l’image du culte, conte-nue dans la niche creusée dans la base du haut stūpa au fond du sanc-tuaire qui retient ici l’attention (fi g. 5) 31. Cette image superbe se détache dans une niche réservée dans la base du haut stūpa, et c’est sur l’en-semble de ce monument, dont l’iconographie innove et demeure unique dans l’art indien, qu’il conviendrait de se pencher. Laissant de côté cette analyse, je ne voudrais mentionner ici que l’ornementation du trône qui encadre le Buddha central. Cette décoration animale inclut les éléments relevés dans la seconde partie du Ve siècle ou le début du siècle suivant dans plusieurs sites excavés de la région. De fait, nous la relevons avec quelques variations, non seulement à Ajanta, mais encore à Aurangabad, Nasik, Kanheri ou Karle par exemple 32.

Dans le cas présent, le dossier est orné de la superposition de l’élé-phant, du lion cornu monté et du makara de la gueule béante duquel s’en-vole un petit génie, alors que le siège est soutenu par deux lions profi lés devant les pieds du trône, dirigés vers l’extérieur et tournant la tête vers le spectateur. Ici, comme dans tout autre exemple de cette iconographie,

30. Il est possible que cette iconographie, où le lion tente d’affi rmer son indépendance et s’élève vers les hauteurs du temple, ait en fait préservé le concept védique du feu conçu par les eaux (Dumézil 1995, p. 1093-1096).

31. Également publié par : Zimmer 1955, pl. 183 ; Weiner 1977, fi g. 53 ; Takata/Taeda 1971, pl. 167.

32. Concernant l’élaboration du décor animal, consulter Auboyer 1949, p. 32-36 et 40-43, ainsi que les pl. V et VI, p. 33 et 37.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 533

à Aurangabad par exemple (fi g. 6) 33, les artistes ont toujours établi une distinction claire entre les lions supportant le trône, traités de manière réaliste, et ceux des bas-côtés du trône, toujours cornus. Sans que nous puissions pour le moment expliquer cette diff érence, il semble bien que, dans le contexte du trône royal, la forme monstrueuse soit réservée à l’animal symbole du feu et de l’air, alors que l’animal atlante, mais aussi protecteur de l’espace occupé par le Buddha, préserve sa forme réelle 34. En dehors du thème du trône, nous retrouvons cette dichotomie dans l’architecture de l’Inde médiévale, du moins dans le nord de la Pénin-sule : les lions de grandes dimensions peuvent être sculptés en ronde-bosse au pied du temple, et tels on les retrouve jusqu’en Birmanie, alors que le léogryphe debout sur ses pattes postérieures se retrouve plus en hauteur sur les façades du monument. Lorsqu’ils sont distribués dans la partie inférieure du monument, les fauves ne sont perçus que fort rare-ment comme créatures fantastiques, comme par exemple au Kailāsa d’Ellora, où ils assimilent la trompe de l’éléphant (fi g. 7-8) 35.

L’ornementation encadrant le Buddha de la grotte 26, s’enrichit en outre de la présence de deux éléphants fl anquant le lotus sur lequel le Buddha pose ses pieds et sous lequel surgissent deux nāga, fort proba-blement Nanda et Upananda. L’ensemble est présenté de telle façon que les pachydermes soutiennent les lions du trône. Les éléphants, le lotus ainsi que les deux génies serpents composent autant d’allusions directes aux eaux cosmiques fertilisantes d’où surgissent le Buddha enseignant et les lions porteurs de son discours 36. La présence simultanée des deux animaux, l’un dominant l’autre qui en fait le supporte, explique com-ment dans l’iconographie de l’Inde orientale, l’éléphant comme le lion pourront supporter des divinités du centre : le fauve soutient le siège de

33. Ou, toujours à Ajanta, Takata / Taeda 1972, pl. 138 ; Weiner 1977, pl. 35, 57, ou encore, à Karle : ibid., pl. 46.

34. De la même façon, et toujours dans le contexte du bouddhisme, les lions sont trai-tés d’une manière réaliste lorsqu’ils surmontent des piliers ou colonnes, leur fonc-tion majeure étant alors de symboliser la parole bouddhique, son pouvoir, sa nature solaire.

35. Voir aussi Snead 1989, pl. 166-8, 172.36. L’Illumination est instant de création (de l’univers) comme l’indique l’interpréta-

tion des rêves faits par le futur Buddha la nuit précédant cet instant (Bautze-Picron 2003). Concernant l’éléphant en tant que symbole de fertilité, voir Irwin 1976, p. 746-747.

534 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

Vairocana, Buddha du centre au geste de l’enseignement, tandis que le pachyderme ou le lion supporte Vajrasattva 37.

Avant de terminer ces quelques lignes consacrées à Ajanta, signalons la présence des deux grands éléphants sculptés en haut relief de part et d’autre du passage vers le monastère 16, images qui s’inscrivent dans la tradition des animaux soutenant les façades des monuments excavés au début de notre ère et envisagés plus haut (fi g. 4) 38.

1.d. Le lion et l’éléphant, dans l’architecture hindoue et jaïne

Un long détour par l’architecture post-Gupta hindoue est nécessaire, car le thème demeure à la même époque absent de l’art bouddhique. En outre, et comme nous le voyons ci-dessous, le thème de l’aff rontement entre les deux animaux s’y exprime de manière évidente, les animaux occupant des emplacements qui leur sont propres et refl étant des fonc-tions complémentaires. Le rôle du lion rugissant est de protéger le tem-ple que l’éléphant se doit de supporter.

1.d.1. Badami, Aihole, Pattadakal (période cālukya). — De grands protomes d’éléphants et de lions rugissant sont adossés à la plate-forme du temple Śivālaya supérieur de Badami (608-642) ; leur taille impo-sante et leur position – de part et d’autre de la volée d’escaliers – accen-tuent leur nature respective de protecteurs et de supports du temple 39. Une frise continue de niches présente des petits génies faisant fonction d’atlantes ainsi que des protomes d’éléphants sur la base du Mēguṭi d’Aihole (634) ou au Saṅgameśvara de Kudaveli Sangam (début du VIIe siècle) 40.

Plusieurs temples, plus tardifs, off rent une version plus « décora-tive » du motif de l’animal posé sur la base, pratiquement réduit à sa tête sculptée profi lée dans un bloc quadrangulaire qui se détache sur le fond mouluré. Au temple Mallikārjuna de Mahakuta, plus tardif (681-696),

37. Les éléphants sont repris sous une image de Vajrasattva de Nalanda (Bautze-Picron 1989b, p. 281, nos 48 & 287-288, remarque & fi g. 16), ou sur deux stèles de Kurki-har (Saraswati 1977, ill. 156 ; Pal 1978, n° 52). Les lions apparaissent sur une autre stèle de Nalanda (Bautze-Picron 1989b, fi g. 15 ; Saraswati 1977, ill. 157 ou 159 – la même image en fait).

38. Plaeschke 1983, pl. 2.39. Meister / Dhaky 1986, pl. 29-30.40. Ibid., pl. 65-67, 294-295.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 535

éléphants et lions cornus s’aff rontent. En outre cette ornementation a échangé sa place avec la série des lucarnes, lesquelles étaient posées plus haut sur la base moulurée du Mēguṭi d’Aihole 41. Vers la fi n du VIIe siècle, nous retrouvons la frise animalière dans sa nouvelle posi-tion, autrement dit pratiquement à mi-hauteur de la haute base moulu-rée supportant le corps du temple Durga d’Aihole. Le traitement est ici analogue à celui rencontré au Mallikārjuna de Mahakuta 42. De même, le Nāganātha de Nagaral introduit des têtes de lion cornues et profi lées se détachant sur la base de soutien 43. Au Jambuliṅgeśvara de Badami (699), les éléphants alternent avec d’autres motifs, comme le makara ou la volute, où ils sont profi lés et isolés les uns des autres sur une bande moulurée posée dans la partie supérieure des murs intérieurs 44.

À Pattadakal, au VIIIe siècle, les bustes des lions et éléphants sur blocs quadrangulaires dégagés sont repris sur la base moulurée, où les ani-maux sont profi lés et semblent tenter de s’échapper pour se jeter les uns sur les autres. Mais les mêmes fauves sont distribués sur un fond mou-luré dans la partie supérieure des murs extérieurs où ils cernent des pachydermes profi lés ; lion et éléphant peuvent se faire face et bondir l’un vers l’autre en un mouvement qui n’a rien de paisible. C’est dans ces deux positions que nous les relevons au Saṅgameśvara (733) 45. Comme on peut s’y attendre, les bustes d’éléphants et de lions cornus, voire même avec une trompe, profi lés et agités, sont relevés au Virūpākṣa (745) 46, et au Mallikārjuna (745) 47. Mais en outre, dans ces deux tem-ples, comme au Pāpanātha et au Huccapayya, nous retrouvons les ani-

41. Ibid., pl. 124-127. L’ornementation animalière gagne, par ailleurs, la partie supé-rieure du monument : les lions cornus sont adossés aux chapiteaux, une frise d’élé-phants marchant orne le haut des murs (ibid., pl. 131, 133). La frise d’oies est aussi introduite ici (ibid., pl. 132).

42. Ibid., pl. 138, 141-142. Ce temple partage d’autres motifs avec le temple de Mahakuta, par exemple la frise d’oies (ibid., pl. 152), le lion cornu collé au cha-piteau (ibid., pl. 148), des bustes de lion, parfois cornus (ibid., pl. 156-7), parfois menaçant les éléphants en marche (ibid., pl. 155).

43. Ibid., pl. 181, 183, 185.44. Ibid., pl. 173-174.45. Ibid., pl. 216-218. La frise supérieure, mais se soumettant au rythme des niches

et retraits, se retrouve aussi sur l’ornement mouluré de la base du maṇḍapa (ibid., pl. 219).

46. Ibid., pl. 21-23.47. Ibid., pl. 267, 269.

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maux vus de face ou de profi l, et pratiquement immobiles, alternant dans un système de niches et avancées qui supporte les porches 48. La même frise, mais avec lions et éléphants profi lés qui s’en prennent les uns aux autres, orne le pavillon de Nandi dans la cour du Mallikārjuna 49.

Dans les représentations les plus anciennes, les animaux paisibles sont isolés les uns des autres et distribués dans la partie inférieure de la façade. Ensuite, leur position monte sur le mur en même temps que leur agressivité réciproque s’affi rme. Pour fi nir, les deux animaux s’attaquent alors même que la frise initiale des animaux atlantes est réintroduite à certains endroits de la structure architecturale.

1.d.2. Mahabalipuram (Pallava). — Le lion et l’éléphant soutiennent la plate-forme sur laquelle se trouvent les ratha de Draupadī et Arjuna (vers 650) 50, mais cet emploi des bustes d’animaux demeure isolé. Dans l’architecture Pallava, le lion, seul, et généralement cornu, constitue la partie inférieure des piliers, protégeant et soutenant simultanément le temple.

1.d.3. Ellora. — C’est bien sûr dans le contexte des temples de Patta-dakal que se place l’origine de la haute frise qui supporte, dans la seconde partie du VIIIe siècle, le temple du Kailāsa et celui de la grotte Laṅkeśa à Ellora où plusieurs variations du motif sont observées : éléphants pai-sibles vus de face, seuls ou alternant avec des lions rugissant vus aussi de face, éléphants et lions fantastiques (cornus, avec trompe, …) s’atta-quant 51. On relève aussi la frise étroite d’animaux profi lés et s’en prenant

48. Ibid., pl. 236, 267 ; Meister / Dhaky 1988, pl. 627, 631.49. Meister / Dhaky 1986, pl. 279-280.50. Meister / Dhaky 1983, pl. 2, 4 ; Zimmer 1955, pl. 268. Une frise où les animaux sont

profi lés orne aussi le soubassement du Dharmarāja ratha (ibid., pl. 267).51. Dohanian 1970, fi g. 8 ; Zimmer 1955, pl. 206-207, 209 ; 1972, fi g. 26 ; Franz 1967,

pl. 173 ; Williams 2000, fi g. 11 ; Meister / Dhaky 1986, pl. 298, 300-302, 325 et 365 pour le soubassement de la grotte de Laṅkeśvara dans la cour du Kailāsa, où d’autres avant-corps de pachydermes sont aussi sculptés à la base des piliers sou-tenant la façade du monument. Le soubassement est mentionné et décrit pour la première fois par Fitzclarence in 1819, p. 197 : « The centre temple has several smaller, and not so high, [shrines] beyond it, which, from the neighbourhood of the elephants, appear attached to it, but are not so in reality, except by the fl oor of rock, which leaves the whole, as if supported by the statues of animals, projecting more or less from the solid mass, some with half their bodies protruded from it, others with only the heads and fore-quarters. The principal of these are elephants of the size of life, and lions larger than life, and some imaginary animals. For the sake of

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 537

les uns aux autres dans les parties supérieures du monument 52. Mais surtout au Kailāsa, on notera les lions déambulant avec fi erté et majesté sur le toit du temple, orné du large lotus au symbolisme solaire (fi g. 9) 53. Il est vraisemblable que ces animaux font écho aux pachydermes paisi-bles qui soutiennent la base du temple : les uns comme les autres ont ici reconquis leur signifi cation initiale, images du ciel et du feu, de ce qui est en haut d’une part, et de la terre, qui soutient les diff érents niveaux célestes d’autre part. Les lions rugissent, se déplacent à partir du cœur de la fl eur de lotus (ils sont représentés avec une patte antérieure rele-vée) alors que les éléphants sont immobiles, paisibles, la trompe plongée dans les fl eurs de lotus (fi g. 8).

C’est fort vraisemblablement à l’instar de ces soubassements du Kailāsa que les artistes ornèrent les façades latérales de la grotte jaïne 32 : les éléphants s’avancent vers nous, paisibles et la trompe retenant des fl eurs de lotus, alors que les lions monstrueux qui rugissent dans les espaces intermédiaires écrasent d’autres éléphants (fi g. 10) 54.

En fait, on relève plusieurs traitements du motif dans les monuments jaïns d’Ellora : le fauve imprimant son pouvoir sur le pachyderme et les deux gardant l’accès au sanctuaire 55, les bustes d’éléphants se dégagent du soubassement 56, et, surtout, le couple de yakṣa et yakṣī qui se tiennent dans les deux niches profondes réservées de part et d’autre de l’entrée du monument, et qui sont assis, le premier, sur un éléphant, la seconde, sur un lion, un thème sur lequel nous reviendrons 57. Dans les sanctuai-res mêmes, le socle supportant les images de Jina peut lui-même présen-ter les niches séparées par des pilastres et alternant des représentations

diversity, these statues are all in diff erent attitudes; several in fi erce confl ict with their neighbours, and all looking as if executed at the whim of the workmen. »

52. Ibid., pl. 321, 333-334, frise qui est reprise sur le pavillon dans la cour de la grotte 32 (Indrasabhā) : ibid., pl. 360, 362.

53. Ibid., pl. 324, 328 ; Zimmer 1955, pl. 204 ; Franz 1967, pl. 172 ; Berkson 1992, p. 80.

54. Zimmer 1955, pl. 240 ; Meister/Dhaky 1986, pl. 371.55. Ibid., pl. 370 (grotte 30A).56. Ibid., pl. 368-369 (grotte 30A), 372 (grotte 33), un sujet qui, par-delà Ellora, sera

repris au temple jaïn de Pattadakal, daté du IXe ou Xe siècle (ibid., pl. 459) ; Zimmer 1955, pl. 240 (grotte 32, soutenant le premier étage), et dans une position atypique : Plaeshke 1983, pl. 145 (sous le Gommaṭa de la grotte 34).

57. Meister/Dhaky 1986, pl. 384, 386-387 (grottes 32 dite « Indrasabhā » et 33).

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des deux animaux (fi g. 13), une ornementation qui est analogue à celle rencontrée dans les images du Buddha à Kurkihar au IXe siècle (fi g. 14, voir plus loin).

Avant de clôturer ces quelques lignes consacrées au socle dans les monuments d’Ellora, nous devons souligner que c’est exclusivement le trône aux lions qui est relevé dans les grottes bouddhiques, s’inscrivant bien dans la tradition relevée à Ajanta et Aurangabad (fi g. 5-6) 58. Et c’est à cette lignée aussi que se rattache le trône aux lions supportant une image de Brahmā sur la façade du Kailāsa 59 ou celle de Śiva Yogeśvara dans le même monument (fi g. 12), voire celle de Pārvatī, assise aux pieds de son époux lorsque celui-ci tue le démon Andhaka 60. En revan-che, l’éléphant est l’animal proéminent dans l’ornementation des bas-côtés des trônes dans les sanctuaires de la grotte 11, où le Buddha est assis, faisant le geste d’appel de la terre, geste qui symbolise la Bodhi (fi g. 16-17) ; de même les deux éléphants qui soutiennent les bas-côtés du trône sur des tablettes votives découvertes à Prome (Śrī Kṣetra) en Birmanie sont de taille disproportionnée par rapport à l’ornementation qu’ils supportent (fi g. 18) 61. Ces animaux évoquent les larges protomes d’éléphants qui sont accolés à la volée de marches permettant l’accès à la cour du temple 12, similaires à ceux relevés à plus haute époque, à Karle ou Kuda par exemple, ou plus récemment, à Ajanta 62.

La position respective des images du Buddha présentant le geste de l’Illumination ou celui de l’enseignement dans les grottes 11 et 12 est révélatrice : dans le premier monument, l’image du sanctuaire du rez-de-chaussée présente le geste de méditation, les images des trois sanc-tuaires du premier étage sont toutes en bhūmisparśamudrā, celle du sanctuaire unique du second étage en dharmacakrapravartanamudrā. L’image du sanctuaire du rez-de-chaussée de la grotte 12 présente le geste de l’enseignement, celles des sanctuaires des premier et second

58. Malandra 1993, fi g. 230-239, reproduisant les images distribuées sur les murs laté-raux du troisième niveau de la grotte 12.

59. Plaeshke 1983, pl. 131.60. Franz 1967, pl. 175-176 ; Berkson 1992, p. 173.61. Voir aussi Luce 1985, pl. 60-c et vol. 1, p. 156.62. Malandra 1993, fi g. 190-191. Sans négliger le fait que la paire de lions peut aussi gar-

der l’accès au temple, comme à la grotte 29 d’Ellora (Zimmer 1955, pl. 235 ; Berkson 1992, p. 101) ou à Elephanta où les lions se trouvent de part et d’autre des marches menant au sanctuaire de la grotte orientale (Berkson et alii 1983, pl. 9-10).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 539

étages ont celui de l’Illumination 63. Le geste de l’enseignement mon-tré par le Buddha assis en pralambāsana et non en padmāsana n’est observé que dans le sanctuaire du deuxième étage de la grotte 11 ; par-tout ailleurs dans ces deux monuments, ce geste est joint au padmāsana, position qui sera généralement retenue dans les siècles suivants en Inde orientale. En fait, ces deux grottes marquent une rupture par rapport à l’iconographie du Buddha observée à Ajanta, Aurangabad ou dans les premiers monuments bouddhiques d’Ellora, rupture qui montre que l’image de l’Éveil pénètre le vocabulaire iconographique du site et que la position du Buddha lors de cet événement a pu infl uencer celle du Buddha enseignant. Les images de l’Éveil du Buddha sont dissimulées dans les sanctuaires, alors que, comme au deuxième niveau de la grotte 12, de grandes représentations du Buddha enseignant sont majoritaire-ment distribuées sur les murs latéraux de la salle aux piliers 64. Toutes ces images sont supportées par le trône aux lions, alors que comme noté plus haut, le protome d’éléphant est relevé supportant l’ornementation des bas-côtés du dossier du trône dans les sanctuaires avec image du Buddha lors de l’Éveil. L’introduction des images illustrant la Bodhi peut refl éter une importance accrue du site de Bodhgaya, ou de l’Inde orientale, Bihar et Orissa, mais leur présence dans des sanctuaires creu-sés dans une zone déjà sombre du monument, et dans des sanctuaires accessibles par une étroite ouverture, ce qui accentue encore l’obscurité du lieu (en fait, ces sanctuaires sont plongés dans la nuit), introduit l’idée du mystère, alors que les images du Buddha enseignant positionnées par exemple au deuxième étage de la grotte 12 reçoivent de la lumière naturelle puisque la façade est totalement ouverte. L’enseignement du Buddha s’ouvre au monde à partir d’un centre plongé dans l’obscurité et imbu de mystère ; ceci explique la position prépondérante du trône aux

63. Malandra 1993, p. 65-71 (monument 11), 79-90 (monument 12).64. Ibid., p. 85. Le mur de gauche présente quatre niches (la « cinquième », première

dans la rangée, est remplacée par l’accès à ce niveau), le mur de droite cinq niches. Dans les deux cas, les trois images situées au plus près du mur du fond présentent le geste de l’enseignement, alors que deux images du Buddha présentant le geste de la méditation les précèdent et que, sur le mur de droite, la cinquième image, au plus proche de la façade, montre le geste de l’Illumination. Comme les sept Buddha du passé sculptés sur le mur de fond présentent respectivement le geste de la médita-tion à gauche et celui de l’enseignement à droite, il est évident que ce qui transparaît ici, est une évolution du double aspect de Vairocana tel qu’il apparaît à Aurangabad et Nasik (Zimmer 1955, pl. 200-201 ; Huntington 1981 ; Bautze-Picron 2001).

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lions, symboles de la voix du Buddha, dans toutes les images bouddhi-ques. C’est à partir du centre, à la symbolique duquel l’éléphant parti-cipe, qu’émerge le lion. Ainsi peut-on aussi comprendre la présence des lions, réels ou fantastiques, qui jaillissent de la gueule béante du makara dans l’ornementation des trônes (fi g. 11, 16-17), le makara symbolisant les eaux cosmiques, au même titre que l’éléphant 65.

1.d.4. Ceylan. — Une frise de lions, vus de face et de profi l, est sculp-tée en bas-relief sur les faces de bodhighara érigés au VIIIe siècle, refl é-tant dans la présentation de l’animal, une infl uence de l’Inde du Sud 66. Les mêmes fauves, faisant face et à l’expression menaçante, supportent un petit caitya en bronze (VIIIe-IXe siècles), orné de quatre images du Buddha méditant 67, alors qu’un protome d’éléphant supporte un autre caitya ani-conique (VIIe-VIIIe siècle) 68. À époque plus tardive, au XIIe siècle, les lions supportent des images du Buddha au Gal-vihāra où ils alternent avec des vajra 69, et ornent le socle sous des stèles à Polonnaruva 70 et Mihintale 71.

Une moulure ornée de protomes d’éléphants, et judicieusement nom-mée hatthipākāra, suit la base ou le stylobate de plusieurs monuments construits au début de notre ère à Anuradhapura 72 et à Mihintale 73, les

65. Et sur la fi g. 16, un makara soutient le léogryphe, remplaçant le pachyderme dans la partie inférieure des bas-côtés alors qu’un léogryphe jaillit de sa gueule. Fort claire-ment, le lion, ou un de ses succédanés, trouve toujours son origine dans le makara ou repose sur l’éléphant. Le makara ou l’éléphant symbolisent les eaux cosmiques où se dissimule le feu avant de s’en échapper : le lion/le feu sort / jaillit des eaux (makara / éléphant) tout comme la parole bouddhique ne peut prendre forme qu’à partir de l’Éveil. La parole dissimule l’Éveil et ses mystères (et les lions sont bien davantage représentés que ne le sont les éléphants) au même titre qu’elle se trouve déjà en gésine dans l’Éveil (voir Bautze-Picron [sous presse]).

66. Von Schroeder 1990, pl. 30D-F (le premier, complet, à Nillakkagama, le second, un fragment, à Yakabandi Amuna).

67. Ibid., pl. 47D-I.68. Ibid., pl. 47A-C.69. Ibid., pl. 109B-C.70. Ibid., pl. 112C. On retiendra aussi que le foudre seul peut être répété sur le socle

sous le Buddha : ibid., pl. 115D-I.71. Ibid., ill. M9 p. 627.72. Ibid., pl. A-01A (p. 558 ill. A2), A-06 (p. 595 ill. A75)(Ruvanvalisāya et Mirisavoṭiya

dāgoba), pl. A-22 (p. 618-619 ill. A137-8) (Kuruṇāgala-Road-Shrine près d’Anu-radhapura). La décoration de ces divers monuments trouve manifestement son ori-gine en Andhra Pradesh d’où des dalles sculptées furent importées et retrouvées précisément en ce sanctuaire (ibid., pl. 8D-E). Dohanian 1970, fi g. 3-5.

73. Ibid., pl. XXV p. 620 & ill. M8 p. 626 (Kaṇṭaka Cetiya).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 541

protomes attachés à ce mur de soutien pouvant atteindre des dimensions imposantes 74. Dans ce type de structure, les lions peuvent retrouver leur fonction de gardiens, étant notamment introduits aux angles de la base de soutien du stūpa alors que les côtés sont soutenus par les éléphants cariatides 75.

Sous l’infl uence de Ceylan, cette structure se retrouvera en Thaïlande à partir du XIIIe siècle 76 et à Pagan où une frise d’avant-corps d’éléphants orne la base soutenant un stūpa à Minnanthu 77. Les lions ne disparais-sent pas de l’iconographie du Sud-Est asiatique, mais ils y retiennent essentiellement leur rôle de protecteurs du lieu religieux, en étant dis-posés aux accès au sanctuaire 78.

Ce long détour permet de préciser le contexte dans lequel le boud-dhisme a pu faire usage du thème de l’opposition et de la complémenta-rité des deux animaux. Au vu de ce survol, il devient par exemple évi-dent que les bases décorées des stèles de Kurkihar envisagées ci-dessous ne constituent pas une innovation locale, ni, a fortiori, bouddhique. Au contraire, elles marquent l’aboutissement, dans le cadre de l’art boud-dhique indien, d’un mouvement qui a traversé les siècles et la Péninsule. Le lion ou ses variations fantastiques (cornu, avec trompe, …) 79 agresse l’éléphant et dans cette situation, l’emporte toujours : il écrase son rival, le domine, mais ne le tue pas 80. Le confl it illustré ici, et qui est exprimé

74. Ibid, p. 581 & 582 (ill. A45). Voir Donhanian 1970 concernant le mur aux élé-phants du Ruvanveli dāgoba, à Anuradhapura, daté du règne de Parākramabāhu I (1153-86) : ill. P53 chez von Schroeder 1990, p. 665.

75. Donhanian 1970, fi g. 7 et p. 141 note 5 ; Snodgrass 1985, fi g. 46.76. Dohanian 1970, p. 140-141, fi g. 6, et voir Woodward, Jr. 1993, p. 77-78. (En

Thaïlande) où la base du stūpa est toujours appelée « la niche de l’éléphant » dans la terminologie moderne.

77. Ka-tha-pa-htupa-gyi (monument 495), voir Pichard 1993, p. 321.78. En fait, cette fonction leur est déjà dévolue en Inde ; nous avons cité plus haut l’ar-

chitrave du portique oriental de Sanchi (Ramachandra Rao 1984, fi g. 38, 42), et nous retrouvons les animaux en position dominante sur la balustrade des stūpas d’Andhra Pradesh (ibid., fi g. 157, 198, 283, 361, 364, …). Plus tard, à Ellora, des lions couchés étaient sculptés aux portes d’entrée des sanctuaires des grottes 11 et 12 (Malandra 1993, fi g. 163, 164, 166).

79. Concernant ses formes, consulter Dhaky 1965, ou Krishna Murthy 1985, p. 26-28, 54-55. Mentionnons brièvement qu’une forme hybride mêlant éléments du lion et du poisson est relevée au début de l’art indien : de manière quasi générale, le lion et le poisson (ou le makara) ne s’entrecroisent pas.

80. Snead 1989, pl. 45, 154, 161-163 illustrent plusieurs exemples de cette domination relevée dans des monuments et images de l’époque médiévale.

542 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

avec bien davantage de violence et de tension dans les images en ronde-bosse ou en haut-relief des temples tardifs, où le fauve domine aussi par sa taille 81, présente plusieurs niveaux d’interprétation.

L’éléphant se place toujours sous le lion, c’est l’emplacement qui lui est réservé. Il appartient aux fondations du temple, le soutient tout comme quatre de ses congénères soutiennent l’univers dans la cosmo-logie hindoue 82. L’éléphant, par sa masse ronde, par son déplacement, empreint de lenteur, évoque la solidité de la terre, voire les montagnes se découpant dans le paysage 83, mais en pataugeant avec délice dans les rivières, il assume aussi son lien avec le monde aquatique d’en bas, autrement dit avec les eaux cosmiques dans lesquelles plonge l’uni-vers 84. En revanche, le lion est un animal agressif qui chasse – contraire-ment au pachyderme, végétarien –, qui cherche ses proies, qui les pour-suit, qui les écrase, les tue et les dévore. Il est, dans le cadre artistique, présenté comme animal en mouvement (car, dans la réalité, l’animal se repose entre ses périodes de chasse) ; il évoque l’air, le vent, ainsi que le feu solaire auquel sa crinière fl amboyante peut faire allusion 85. Ceci

81. Snead et alii 1989, pl. 45, 161-163, 174.82. Kirfel 1990, p. 122 fournit plusieurs listes de noms qui varient selon les textes.

Snodgrass 1985, p. 314-315 résume d’après Zimmer 1955, p. 160 (ou Zimmer 1972, p. 117, également l’auteur d’une traduction allemande de l’ouvrage), le mythe pré-senté dans la Mātaṅgalīlā, selon lequel des deux parties de la coquille de l’œuf d’où Garuḍa avait jailli, surgirent Airāvata accompagné de sept éléphants mâles, ainsi que huit éléphants femelles. Ces huit couples, dont le rôle fut de supporter l’uni-vers, sont à l’origine des éléphants ailés qui peuplaient le ciel, et, tels des nuages, pouvaient changer leurs formes. Le mythe précise ensuite comment les animaux en furent fi nalement réduits à perdre leurs ailes et à devenir les animaux terrestres qu’ils sont (Zimmer 1955, p. 161 ; Zimmer 1972, p. 119-20). Aśvaghoṣa retient cette tradition lorsqu’il évoque l’épisode de Nālāgiri : « And bending, worshipped at his feet just as a mighty mountain falls to earth. With lotus hand the master pats his head, even as the moon lights up a fl ying cloud » [je souligne] (Beal 1883, p. 247).

83. J. Williams (2000, p. 56-57) rappelle que l’analogie n’avait pas échappé à H. Zim-mer, entre les éléphants jadis pourvus d’ailes et les montagnes volantes qui perdirent leur pouvoir de se déplacer après qu’Indra ait coupé leurs ailes (dans le Rāmāyaṇa), quite à faire l’objet des critiques d’Edgerton qui trouvaient cette idée de Zimmer trop fantaisiste (ibid., p. 57). Mais comme l’évoque elle-même J. Williams, cette analogie est encore aujourd’hui vivante auprès des artistes d’Orissa qu’elle a eu l’oc-casion d’interroger, preuve que son intuition ne trompa probablement pas Zimmer.

84. Auboyer 1949, p. 131-132, 134.85. Ibid., p. 109, 125, 134.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 543

explique également que dès les premières représentations du thème à la base des monuments en terre Cālukya et Pallava, les lions soient cor-nus, emprunt au bouc ou au bélier, et réminiscence de leur lien avec le vent, avec l’air 86.

En fait, le lion et l’éléphant sont les animaux par excellence qui contribuent à transformer le monument religieux en image du mont cosmique Meru, ou par extension, du mont Kailāsa. Dans la descrip-tion qu’ils donnent des festivités ayant accompagné la restauration du Mahāthūpa d’Anuradhapura, les auteurs du Mahāvaṃsa louent la splen-deur du monument comparé « à la beauté du mont Kelāsa avec le soleil à son sommet » 87. Or, le monument d’Anuradhapura, connu sous le nom de Ruvanveli Dagoba, repose précisément sur un mur d’éléphants caria-tides, mentionné par les sources littéraires 88. On peut aisément compren-dre que ce monument est assimilé au mont cosmique, centre de l’uni-vers qui repose sur les pachydermes, et au sommet duquel brille le soleil – en d’autres termes, et dans le contexte indien du Kailāsa d’Ellora par exemple, au sommet duquel peut se déplacer le lion, symbole du soleil. De fait, rappelons-le, des lions irradient sur le lotus sculpté sur le toit du Kailāsa (fi g. 9).

Par-delà l’appartenance à des courants spirituels diff érents, étrangers l’un à l’autre, par-delà aussi la distance géographique, il reste qu’une même conception sommeille derrière l’élaboration du Kailāsa d’Ellora et du Mahāthūpa d’Anuradhapura, à savoir que le sanctuaire est bâti à l’image de la montagne cosmique soutenue par les éléphants et éclairée par l’astre solaire.

1.e. L’Inde orientale : KurkiharL’alternance relevée sur la façade du monument 32 ou sous certaines

images de Jina d’Ellora est reprise dès la fi n du VIIIe siècle à Kurkihar, un site bouddhique localisé non loin des collines de Rajgir, au Bihar. Les images du Buddha réalisées en grand nombre au IXe siècle, illustrent

86. Ainsi que l’a démontré J. Auboyer (1949, p. 125-129).87. Dohanian 1970, p. 144 (« beauty of the Kelāsa mountain with the sun on its sum-

mit »). L’auteur introduit un second exemple où un stūpa est comparé au Kailāsa : il s’agit du Mahāthūpa de Polonnaruva, érigé par Parākramabāhu I.

88. Voir l’article de Dohanian 1970, qui réunit les diff érentes citations dans les chroni-ques cinghalaises, voir aussi ses fi g. 2-5.

544 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

essentiellement l’illumination, le Buddha étant assis sur un coussin ou un lotus qui repose sur une haute base ornée d’un décor architectural où, dans une suite de niches, alternent le lion et l’éléphant. Tous deux se présentent comme on peut s’y attendre, le premier fougueux, le second paisible (fi g. 14).

Par-delà Kurkihar, au Bengale, et à époque plus tardive, les XIe et XIIe s., nous relevons une composition de l’ornementation du socle où le protome de l’éléphant est sculpté de manière évidente sous le Buddha, fl anqué de deux lions profi lés (fi g. 15) 89, composition qui est pratique-ment généralisée sur les petites stèles birmanes en andagu, illustrant le Buddha 90.

2. Le couple jaïn de yakṣa et yakṣī, Kubera et Ambikā

Le plus célèbre des yakṣa jaïns demeure malheureusement sans iden-tité précise 91, alors que son image a donné son nom à une des grottes les plus célèbres d’Ellora, à savoir la grotte 32, aussi nommée ‘grotte d’In-dra’ ou Indrasabhā. Le malentendu se poursuit encore dans des publica-tions contemporaines où il n’est pas rare de le voir nommé « Indra » 92, pour la seule raison que ce personnage à la panse bien évidente est assis sur un éléphant, véhicule, s’il faut le rappeler, d’Indra, souverain des dieux.

Kubera et Ambikā apparaissent soit dans de petites niches ménagées sur la façade, accompagnant un Jina 93, soit sculptés en haut-relief, dans des niches qui se trouvent de part et d’autre de l’accès au sanctuaire ; en fait, ce sont les premières images rencontrées en entrant dans le monu-ment. Kubera est à notre gauche, Ambikā à notre droite, position qu’ils

89. Bautze-Picron 1999, p. 43 & 52, note 16.90. Ibid., et fi g. 5-13.91. Ainsi que nous le rappelle Klaus Bruhn dans un article récemment publié (2000,

p. 284-286), U. P. Shah avait proposé une identifi cation refusée par cet auteur. Je retiens la terminologie de K. Bruhn, à savoir « Kubera et Ambikā » pour des rai-sons évidentes de facilité, car cette dénomination constitue une référence claire à ce que sont physiquement ces deux divinités, et les rattache aux croyances pan-indien-nes relatives à la fertilité et à l’acquisition de richesses matérielles.

92. Zimmer 1972, fi g. 2 (Indra).93. Grotte 32 : Zimmer 1955, pl. 240 ; Pereira 1977, ill. 1 (partie de droite avec la

déesse). Esquisse de la façade reproduite par le même auteur, p. 154, plan J 20.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 545

retiennent lorsqu’ils sont intégrés à des images de Jina 94, et qui respecte le schéma pan-indien du « féminin à senestre, masculin à dextre » dont l’exemple le plus célèbre est l’image de Śiva Ardhanārīśvara. Pour notre propos immédiat, c’est l’emplacement des images qu’il convient de rete-nir : toutes deux se trouvent de part et d’autre du lieu de passage entre les mondes profane et divin – ce qui est aussi leur position dans les images en bronze de Jina où elles sont intégrées : elles y sont comme rejetées de la composition centrale, étant de petites dimensions et posées dans la partie inférieure ou de part et d’autre du piédestal 95. Cette situation est partagée avec d’autres paires dans l’art indien : comme les Trésors de la conque et du lotus, présents sur la façade des grands sanctuaires d’Ajanta, ou de part et d’autre des temples hindous et jaïns d’Ellora ou en terre Cālukya, par exemple ; ou comme le couple de Hārītī et Pañcika dans l’art bouddhique, également présent à Ajanta. Nous n’envisageons pas d’approfondir ici, ce n’en est pas le lieu, cette approche compara-tive, mais nous retiendrons, d’une part, que dans les trois cas, à savoir celui des nidhi, celui du couple tutélaire bouddhique et celui du couple tutélaire jaïn, nous considérons des images de paire ou de couple qui se tiennent toujours à un lieu de passage, celui entre le monde profane et le monde sacré du temple ou de l’image, d’autre part, que ces couples et paires sont des images de fertilité, de richesse, de protection.

Plusieurs auteurs ont déjà mis en évidence le lien qui rattache Ambikā à des formes hindoues équivalentes, en particulier à la déesse śivaïte dont la monture est le lion 96. Mais la présence de l’éléphant reste énigmatique puisqu’elle ne refl ète aucune iconographie analogue dans les arts hindou et bouddhique. Le Gujarat, au VIIIe siècle, et Ellora, aux VIIIe et IXe siècles, constituèrent les lieux de prédilection de cette icono-

94. Le point est aussi indiqué par Bruhn 2000, p. 284. Pour exemple, voir Shah 1950-51, fi g. 24. Les yakṣa et yakṣī se faisant face au premier étage d’Ellora 32 sont repro-duits par Zimmer 1955, pl. 242-243 (Plaeshke 1983, pl. 144 ; pour l’emplacement du couple, voir Pereira 1977, p. 150 : plan J 18 : images 1 et 21). D’autres, encadrant la porte d’un sanctuaire, apparaissent sur sa pl. 244 (détail : pl. 246 ; Plaeshke 1983, pl. 143). Le yakṣa se trouvant dans le monument 33 est reproduit par Franz 1967, pl. 168.

95. Par exemple, Bruhn 2000, fi g. 5. Pour des représentations en bronze et provenant d’Inde occidentale, du couple assis sur le lion et l’éléphant, voir Shah 1952, fi g. 24 ; Shah 1955-1956, fi g. 12 (le même bronze) et 13-14 ; Shah 1959, pl. 54-55.

96. Ibid., p. 282.

546 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

graphie 97, où les deux animaux sont introduits conjointement et systé-matiquement sous les deux divinités. En l’absence de source littéraire, force est de se demander si les artistes jaïns, ou les artistes travaillant pour des patrons jaïns, parmi lesquels le souverain lui-même peut-être, n’exprimèrent pas, au moyen d’une vision claire, un modèle constam-ment présent dans l’art indien. Les deux animaux soutiennent des divini-tés responsables de la fécondité, de la richesse que recèle la terre. En se trouvant sous la divinité, à ses pieds, à l’entrée du temple, ou de part et d’autre du sanctuaire, ces montures et leurs maîtres se trouvent au plus près du monde profane, au niveau le moins élevé de la hiérarchie spiri-tuelle, tout comme les éléphants et les lions de la base du Kailāsa.

3. Mañjuśrī et Samantabhadra

Il est diffi cile encore de proposer une origine géographique à l’image du Bodhisattva Samantabhadra ayant pour véhicule l’éléphant, alors que les premières représentations de Mañjuśrī assis sur sa monture, le lion, semblent bien avoir été réalisées à Bodh Gaya, lieu de l’Illumination précisément 98. Le premier Bodhisattva est relativement anodin en Inde proprement dite où il s’inscrit essentiellement dans le système des qua-tre ou huit grands Bodhisattva 99, mais le Mañjuśrīmūlakalpa le consi-dère néanmoins comme chef des Bodhisattva et le positionne à côté du Buddha 100, et, dans une étude antérieure, nous avons proposé de recon-naître Mañjuśrī et Samantabhadra dans la paire des Bodhisattva peints de part et d’autre de l’accès à l’antichambre de la grotte 1 d’Ajanta 101. Ces deux Bodhisattva constituent une paire vénérée en Asie centrale et jusqu’au Japon, le premier symbolisant la sapience et se tenant sur le lion, le second, emblème de la pratique et montant l’éléphant 102. Bien

97. Concernant la chronologie des grottes jaïnes, voir Pereira 1977, p. 25-28. Pour les bronzes du Marwar, publiés par Shah et datés par cet auteur des environs de la pre-mière moitié du VIIIe siècle, voir ci-dessus note 95.

98. Bautze-Picron 1989a, p. 81.99. Bautze-Picron 1997, p. 3.100. Ibid.101. Ibid., p. 2-3.102. En fait, la seule représentation indienne connue des deux Bodhisattva assis sur leur

véhicule respectif peint en bleu s’observe sur une couverture de manuscrit daté de l’an 4 du règne de Gopāla IV, soit vers 1134 (Coomaraswamy 1923, pl. XXXII ; le Mañjuśrī est reproduit par Pal - Meech-Pekarik 1988, fi g. 22, p. 71) ; les deux

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 547

évidemment, en fl anquant une image du Buddha, tous deux illustrent des aspects de ce dernier. Rappelons sommairement que Mañjuśrī agit comme délégué du Buddha dans sa fonction de maître enseignant au moment même où Śākyamuni s’ouvre à l’Éveil à Bodhgaya 103, d’où pro-viennent les images les plus anciennes le montrant assis sur le lion. Samantabhadra monte un éléphant à six défenses selon le « Sūtra du Lotus », et même si ce nombre se réduit parfois aux seules deux défen-ses naturelles dans les illustrations plastiques 104, il évoque bien entendu les six défenses de l’éléphant, dont le futur Buddha assuma la forme pour pénétrer dans le sein de sa mère dans plusieurs textes, comme le Mahāvastu, ou le Lalitavistara, par exemple 105, ainsi que celles de l’élé-phant-Bodhisattva Chaddanta dans le jātaka 509. Ici aussi, les artistes semblent s’être limités à une représentation réaliste de l’animal 106.

Le chiff re six renvoie à l’image du cosmos où la sagesse bouddhi-que se répand dans les six directions. Il indique aussi, dans le cadre des allusions au Bodhisattva, que le Buddha est souverain de l’univers, qu’il est roi cakravartin 107, alors qu’en rapport avec Samantabhadra, ce nombre évoque les six perfections du bouddhisme 108. Samantabhadra, « être d’Éveil Sage-Universel » 109, est un Bodhisattva particulier en ce

Bodhi sattva entourent en fait une représentation de la Prajñāpāramitā encadrée des sept Buddha du passé et de Maitreya. On retrouve la paire notamment à Dunhuang et à Khara Khoto (Whitfi eld - Farrer 1990, cat. nos 5, 17-18 ; Piotrovsky 1993, cat. 50-51). Ce serait à partir du VIIIe siècle et en Chine que le culte conjoint des deux Bodhisattva se serait développé (Piotrovsky 1993, p. 208). Mais serait-il possible que le Bodhisattva assis sur l’éléphant qui provient des fouilles de Shotorak et est aujourd’hui conservé au musée Guimet (Quagliotti 1989, pl. IIIa) soit une représen-tation de Samantabhadra (comme le suggèrerait Benjamin Rowland cité par Dey-dier 1950, p. 112, n° 199bis). À ce propos, on notera aussi qu’un Bodhisattva assis dans la même position, est, quant à lui, assis sur un lion, auprès d’un Buddha debout de Paitava (Quagliotti 1989, pl. IIb et p. 344).

103. Bautze-Picron 1993, p. 155.104. Frank 1991, p. 125 ; Frank 2000, p. 385. Six défenses sont peintes sur les représen-

tations d’Asie centrale ou de Chine (ci-dessus, exemples cités en note 102).105. Verardi 2000-2001, p. 69-70.106. Ibid., p. 70.107. Ibid., p. 70-71. Le chiff re six peut bien sûr prêter à diverses spéculations, et il est

aussi possible que ces six défenses soient en fait celles d’Airāvata, monture d’Indra, qui a précisément trois têtes (Senart 1882, p. 253).

108. Frank 1991, p. 125.109. Dans la traduction de son nom que donne Robert 1997, p. 387 et suiv.

548 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

sens qu’il se place au centre de l’univers, position confi rmée non seule-ment par les six défenses de sa monture, mais aussi par la nature même de sa monture, un élephant – et quatre éléphants, dont un nommé préci-sément Bhadra dans le Rāmāyaṇa, soutiennent l’univers 110. Il est aussi « chef des Bodhisattva », et il est coiff é d’une couronne portant la repré-sentation des « cinq Buddha » (du centre et des quatre orients) 111. Outre ces témoignages empruntés à diff érents textes liturgiques du Mahāyāna, Samantabhadra « fait ordinairement apparaître dans chacun des pores de sa peau les univers de buddha, les buddha et les bodhisattva qui remplis-sent les dix régions … comme il transforme les êtres, il n’a pas de rési-dence fi xe … S’il réside quelque part, c’est dans tous les univers indis-tinctement. » 112 Et son arrivée au Pic des Vautours marque l’apothéose du « Sūtra du Lotus » 113.

On le voit au travers de ces passages qui refl ètent des courants diff é-rents du Mahāyāna, Samantabhadra, s’il symbolise la pratique en écho à la sapience de Mañjuśrī, intègre dans sa personnalité des aspects qui le rattachent au Buddha de l’Éveil 114. Śākyamuni devenant Buddha accom-plit son destin qui est d’une nature cosmologique : son Illumination mar-que la naissance de l’univers et lui-même s’identifi e au cosmos 115. Ainsi la paire que Samantabhadra forme avec Mañjuśrī trouve probablement son origine dans ces deux aspects de la personnalité du Buddha, attei-

110. Kirfel 1990, p. 122 ; Frank 1991, p. 130-131, reproduit et étudie une image du Bo dhisattva assis sur quatre éléphants, eux-mêmes surmontant une frise de pachy-dermes miniaturisés sculptée sur la base circulaire de l’image (et le cercle bien mieux que le carré indique l’espace illimité du cosmos). Cette image s’intégrait à un culte ésotérique développé au Japon à partir du Xe siècle, mais elle n’en refl ète pas moins des idées probablement déjà présentes en Inde – étant mise en relation avec l’Éveil, comme nous le verrons ci-dessous, et plus précisément en l’occurrence, avec l’éternité inhérente à l’Éveil. Autres exemples : Snodgrass 1992, fi g. 220a-b.

111. Pour ces deux derniers éléments, voir Bautze-Picron 1997, p. 3-4 et notes 6-8.112. Frank 1991, p. 125.113. Robert 1997, p. 387-392.114. Frank 2000, p. 143. Et comme le rappelle cet auteur, Samantabhadra qui « gouverne

l’esprit d’Éveil inné, originellement égal chez tous les êtres … se révèle ici comme manifestement identique à l’« Être adamantin », Kongōsatta (sk. Vajrasattva), qui, lui aussi, est l’incarnation de la buddhéité innée chez les êtres, infrangible comme le diamant. » (ibid., p. 181). Or, Vajrasattva est aussi supporté par un trône aux élé-phants, voire même par quatre de ces animaux, dans ses représentations d’Inde orientale (ci-dessus note 37).

115. Bautze-Picron [sous presse].

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 549

gnant l’Éveil et prêchant. L’éléphant est l’animal emblématique de l’Illu-mination, nous l’avons déjà signalé : il supporte l’univers dans lequel se répand la parole symbolisée par le lion.

4. Le Buddha et l’éléphant furieux

L’histoire est connue et je ne la répéterai pas dans ses détails : lors d’un dernier passage à Rajgir, le Buddha est mis en danger par un élé-phant rendu fou furieux par une boisson droguée que Devadatta, cousin du Buddha, lui a donnée. L’animal détruit tout sur son passage, avant de se précipiter sur le saint homme qui le pacifi e du seul geste de la main droite tendue. C’est à ce moment là que certains textes introdui-sent les cinq, voire cinq cents, lions qui se jettent sur l’animal maîtrisé tandis que d’autres sources évoquent à cet endroit des langues de feu (voir l’introduction).

Ainsi que le rappelle Monika Zin, cette version de l’histoire est rare-ment représentée. De fait, elle ne l’est que dans la statuaire ou les enlu-minures de manuscrits provenant du Bihar, et que dans la fresque du Loka-hteik-pan à Pagan (fi g. 19-21), qui appartient, par son style et son iconographie, à l’école indienne de peinture, alors même que l’his-toire était connue depuis au moins le VIIe siècle puisque Hiuan-ts’ang la raconte 116.

Les lions jaillissant des doigts étendus de la main droite du Buddha prouvent que ce dernier a acquis au cours de son existence l’énergie du fauve, qu’il a assimilé ce dernier dont l’image s’est surimposée à celle du pachyderme présente dans la personnalité du Buddha dès sa nais-sance. Le lion est la forme aboutie du Buddha en tant que maître, en tant qu’être de lumière, centre du monde d’où il enseigne (Vairocana). Ceci justifi e la présence exclusive du trône aux lions sous tous les Buddha

116. Zin 1996, p. 332 note 6. Outre notre fi g. 19, voir Tse Bartholomew, fi g. 1-4 illus-trant quatre exemples de cette iconographie conservés à l’Asian Art Museum de San Francisco, ou Sotheby New York, 16/17 mars 1988, lot 39A (ancienne collec-tion P. C. Nahar, Calcutta). Concernant l’enluminure reproduite à la fi g. 21, consul-ter Huntington - Huntington 1990, cat. 58 ; une autre enluminure illustrant les cinq lions est publiée par Pal 1993, cat. 1. Récemment, G. Bhattacharya 2008 a suggéré que l’éléphant mis à mort par Aparājitā ne serait pas Gaṇeśa / Gaṇapati, alors que le sādhana cite explicitement ce dernier, mais l’éléphant furieux Nālāgiri qui s’en était pris aux habitants de Rajgir.

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du troisième niveau de la grotte 12 d’Ellora, conjointe à la disparition fréquente de l’éléphant des bas-côtés du trône alors que dans les images sculptées dans les sanctuaires et qui illustrent l’Éveil, l’éléphant présente une position dominante dans la partie inférieure.

Comme nous l’avons déjà signalé à diverses reprises, l’éléphant est davantage rattaché au centre, à la base, à ce qui précède, à savoir l’Illu-mination, alors que le fauve tend à s’échapper de ce centre. Il se pré-cipite vers les hauteurs et s’intègre à la symbolique de la prédication du Buddha – postérieure à l’Éveil. Cela n’a pas échappé aux auteurs ; alors que l’éléphant est la forme prise lors de la conception, ces derniers racontent comment le Buddha se coucha après avoir pris son dernier repas, « with the composure and fearlessness of a lion » et, après une dernière courte marche, et alors qu’il possédait encore une force égale à celle de mille millions d’éléphants mâles, Gautama se coucha sur son côté droit « in the grove of the sal-trees, in the manner of a lion… » 117 avant de rendre l’âme.

Nālāgiri ne fut pas le seul éléphant à tenir un rôle dans la vie du Buddha. L’hostilité de Devadatta à l’encontre du Buddha surgit dès l’adolescence, lorsqu’il s’en prend à l’éléphant blanc venu chercher le Bodhisattva, et que le saisissant par la trompe, « il le tue d’un seul coup de sa paume droite. » Survient le futur Buddha, qui dégage le cadavre obstruant la porte de la ville, et le projette par-dessus les sept murailles entourant celle-ci 118.

Enfi n, nous ne pouvons ignorer Girimekhala, la monture de Māra, dieu des sens, de l’obscurité qui s’oppose à la luminosité du Buddha 119. Comme certains textes le rappellent 120, par exemple la Nidāna-kathā, à la fi n de la lutte qui opposa le Buddha à Māra, « the elephant Girimekhalā which was a hundred and fi fty yojanas in height went down on its knees. » 121 Dans ce contexte, les lions domptant le pachyderme consti-tuent un dernier rappel de l’Éveil, victoire du Buddha sur le Malin.

117. Edwardes 1959, p. 148-151 (Bigandet 1880, II, p. 41-45) ; Ebert 1985, p. 27, 62.118. Foucher 1905, p. 330-332 ; 1949, p. 85-86.119. Bautze-Picron 1998, p. 6 résumant les sources littéraires qui décrivent l’aff ronte-

ment entre les deux hommes.120. Malalasekera 1960, II, p. 771.121. Jayawickrama 1990, p. 98.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 551

Plus tard dans sa vie, alors qu’il avait réuni autour de lui de nombreux disciples, le Buddha, las des discussions sans fi n auxquelles se livraient ces derniers, se retira dans la solitude de la forêt de Pārileyyaka locali-sée près de Kausambi, où son unique compagnon fut un éléphant. Dans la stance clôturant la narration de cette histoire, le Buddha nous dit que « the life of solitude is better; one cannot be friends with a simpleton; let a man live in solitude, and do no evil deeds, taking his ease, like an elephant roaming at will in an elephant-forest 122. » Tous deux avaient décidé de faire retraite, et l’animal devint son serviteur. Alors que des illustrations de l’épisode de la jeunesse sont connues dans l’art du Gan-dhara, il faut attendre l’art de Pagan au XIe siècle pour voir Pārileyyaka vénérant le Buddha, couché aux pieds de ce dernier. À Pagan tou-jours, l’épisode se combine à l’histoire du singe venu off rir le madhu au Buddha, un événement traditionnellement localisé à Vaisali, mais, dans les sources employées en Birmanie, c’est bien à Pārileyyaka que se situe l’histoire du singe qui meurt après que le Buddha ait accepté son don 123. S’il faut en croire une prédiction du Buddha relevée dans les sources birmanes, Nālāgiri et Pārileyyaka sont destinés à devenir eux-mêmes Buddha : « In the future (ten) Bodhisattas will attain full awakening in the following order: the most honourable (Ariya) Metteyya, …, (the elephant) Nālāgiri, and (the elephant) Palaleyya » 124. Comme tous les autres personnages de cette liste sont soit de simples humains, soit des êtres hors du commun tels que Maitreya ou Rāma, et comme au cours de sa vie, le Buddha eut aff aire à bien d’autres animaux, nous pouvons en conclure que les deux éléphants tiennent un rôle bien particulier, nous rappelant que le Buddha lui-même assuma cette forme à l’instant de sa conception et que fort souvent, les sources littéraires le comparent au pachyderme. En fait, l’image de l’animal sommeille profondément en l’homme et surgit au travers de certains aspects physiques du Buddha :

When he had returned from the village, he looked upon the country of Vesālī in the manner of a full-grown elephant; … When we say that he looked in the manner of an elephant, we mean this; the bones of men are joined by touching at the ends; the bones of a Boddhisatva are joined by hooks, one hanging on the other; but the bones of a Buddha are joined

122. Burlingame I, p. 182.123. Bautze-Picron - Bautze 2003, fi g. 64-65 (et p. 60-64).124. U Chit Tin 1992, p. 6 et sa note circonstanciée.

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like the links of an iron chain; therefore, if he desires to look behind him he must turn his body like an elephant, whose neck is so short that he must turn around in order to look behind him 125.

Clairement, cette analogie ne demeura pas théorique pour les artistes birmans, il suffi t de regarder ces images du Buddha à la tête enfoncée, au cou extrêmement court, pratiquement inexistant, pour comprendre que le Buddha était réellement perçu comme étant lui-même un éléphant.

Conclusion

Le lion et l’éléphant constituent une paire relevée durant toute l’his-toire de l’art bouddhique en étroite relation avec la personnalité du Buddha. Tous deux refl ètent des concepts opposés mais complémentai-res, et leur concomitance, en ce sens, est bien indienne 126, en évoquant d’autres systèmes d’oppositions, entre le nāga et Garuḍa, entre l’éléphant et Garuḍa – deux paires qui réintroduisent la confrontation entre les élé-ments feu et eau, ou encore entre la tortue et les oies, entre le sanglier et le monstre habitant les profondeurs sous-marines. Dans le monde ani-malier, il n’est pas rare de relever que deux animaux a priori ennemis soient en fait confrontés en une composition dont les tensions agressi-ves ont disparu. En témoigne ainsi la présence simultanée du lion paisi-ble et des gazelles non eff arouchées dans l’iconographie de l’ascète, un motif qui se retrouve au fi l des siècles à Sanchi, Deogarh ou Mahaba-lipuram 127. La complémentarité des deux animaux étudiés ici a été par-ticulièrement ressentie dans l’architecture religieuse où elle contribue à souligner le rapport entre le bas et le haut, entre le centre et la périphé-rie, et dans l’iconographie du Buddha que plusieurs images illustrent de manière explicite. Mais d’une manière générale, nous pouvons affi rmer que cette relation est pan-indienne et dépasse le seul cadre du boud-dhisme même si elle a trouvé à s’exprimer de manière fort évidente dans la personnalité du maître fondateur.

125. Edwardes 1959, p. 142, ou Bigandet 1880, II, p. 35.126. Cette relation particulière entre les deux animaux n’a, cependant, pas été relevée à

ce jour dans les articles ou ouvrages traitant de l’animal dans l’art indien. Concer-nant les deux animaux envisagés dans cet article, on consultera Lockwood Kipling 1891, p. 357-382 ; Gorakshkar 1979 ; Mga 1988, p. 13 (éléphant) et 14 (lion) ; Snead et alii 1989, p. 11, 20 (éléphant) et 20-21 (lion).

127. Snead et alii 1989, pl. 15 (lions et gazelles) ; Zimmer 1955, pl. 276.

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 553

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LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 559

SUMMARY

In the rich bestiary illustrated by Indian artists, the presence of two animals has been privileged in the representation of the Buddha, i.e. the lion and the ele-phant. Each of them represents particular and completing aspects of the Bud-dha’s personality although they are often depicted as opposing each other. The elephant is the animal related to earth and to water whereas the lion refers to heaven and fi re. In integrating their simultaneous representation, the image of the Buddha unifi es opposite elements (water/fi re) and displays his capacity of unifying the superimposed layers of the cosmos (earth/heaven).

A study of the artistic testimonies reveals how this theme found its way till it was fully and clearly articulated from the Gupta period and onwards. The con-fl icting nature of the relation between the two animals has a long history; but whereas from the Gupta period and onwards, both animals and their respective symbolic functions are assimilated within the image of the Buddha, in the early period, the confl ict opposes the Buddha (sun/heaven/lion) against Māra (earth/elephant), a trace of this opposition surviving till a later period in the theme of the taming of Nālāgiri.

This aspect of the Buddha image is only but a segment of his iconogra-phy, but it repeatedly arises in iconic images and in images of a more narrative nature, such as the taming of the wild elephant, and will travel, beyond India, in Buddhist countries like Shri Lanka and Burma. In integrating such a motif, the Buddhist iconography is fully in line with the pan-Indian iconography where the motif ‘lion and elephant’ is commonly met with, in particular in an archi-tectural context: the position of the elephant in the lower part of the monument and of the lion in an upper one is refl ected in the artistic image of the Buddha with the fi re raising out of his shoulders and the water gushing out of his feet; the confl ict between the two animals which is attested from the Cālukya period and onwards is also present in the ornamentation of the throne on which the Buddha sits. Moreover, the presence of the motif in images of Jinas and even of Shiva in a site like Ellora demonstrates how the formulation of the divine image goes across a single period, whatever the obedience.

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FIG. 1. — Buddha, Gandhara (d’après Saunders 1960, pl. XII).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 561

FIG. 2. — Maitreya, Gandhara,collection privée (photo J. Bautze).

FIG. 3. — Base de stūpa, Taxila-Jaulian (photo F. Tissot).

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FIG. 4. — Éléphants fl anquant le passage vers la grotte 16, Ajanta (photo J. Bautze).

FIG. 5. — Buddha, grotte 26, Ajanta (photo J. Bautze).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 563

FIG. 6. — Buddha, Aurangabad (photo J. Bautze).

FIG. 7. — Kailāsa, base, Ellora (photo J. Bautze).

564 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

FIG. 8. — Kailāsa, base, Ellora (photo J. Bautze).

FIG. 9. — Kailāsa, toit, Ellora (photo J. Bautze).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 565

FIG. 10. — Grotte 32, mur latéral, Ellora (photo J. Bautze).

FIG. 11. — Grotte 12, deuxième étage, mur de gauche, au fond (photo J. Bautze).

566 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

FIG. 12. — Piédestal supportant Śiva, Kailāsa, Ellora (photo J. Bautze).

FIG. 13. — Piédestal supportant un Jina, grotte 32, Ellora (photo J. Bautze).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 567

FIG. 16. — Bas-côté du trône derrière le Buddha,grotte 11, Ellora (photo J. Bautze).

FIG. 14. — Piédestal supportant le Buddha, Kurkihar, Lucknow Museum(photo J. Bautze).

FIG. 15. — Piédestal sous l’image du Buddha, Betagi [Chittagong] (photo J. Bautze).

568 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

FIG. 17. — Bas-côté du trône derrièrele Buddha, grotte 11, Ellora (photo J. Bautze).

FIG. 18. — Plaquette en terre-cuite, Birmanie, University of Durham, Oriental Museum(photo J. Bautze).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 569

FIG. 19. — Buddha domptant Nālāgiri, vers 873-874, Indian Museum, Calcutta(photo J. Bautze).

570 CLAUDINE BAUTZE-PICRON

FIG. 20. — Buddha domptant Nālāgiri, Asia Society, New York (photo J. Bautze).

LE LION ET L'ÉLÉPHANT DANS LA PERSONNALITÉ DU BUDDHA 571

FIG. 21. — Buddha domptant Nālāgiri, Loka-hteik-pan, Pagan (photo J. Bautze).