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1 Ambre AZALBERT – Guillaume BEAUME – Marie HEGLY – Jean-Charles KULICH – Antoine RIOUAL – Emma THEVENAU Réalité de la stratégie économique américaine face à l’Europe Avant et après Trump

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Page 1: Réalité de la stratégie économique américaine face à l’Europe · Lobbying à l’UE : influence et extension du concept de sécurité nationale. Le Parlement Européen est

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Ambre AZALBERT – Guillaume BEAUME – Marie HEGLY – Jean-Charles KULICH – Antoine RIOUAL – Emma THEVENAU

Réalité de la stratégie économique américaine face à l’Europe

Avant et après Trump

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Sommaire

Introduction .............................................................................................................................. 3

PARTIE I – UE/USA : Des cas de nationalismes économiques conquérants depuis 20 ans .......... 4 1. Quelques leviers de la stratégie américaine ...................................................................................4

(a) La domination américaine : des outils au service du rayonnement de la puissance ....................... 4 (b) Lobbying à l’UE : influence et extension du concept de sécurité nationale .................................... 5

2. La collusion Public-Privé au service d’une stratégie globale ............................................................7

PARTIE II – Les conséquences éventuelles de la politique de Trump sur la montée de(s) nationalisme(s) européens ....................................................................................................... 9

1. Le nationalisme économique de Donald J. Trump : des mesures protectionnistes, des Etats à la scène internationale ..........................................................................................................................9

(a) Un programme nationaliste pour le marché intérieur .................................................................... 9 (b) Trump face au reste du monde : la volonté d’un nationalisme économique meneur dans les relations internationales ..................................................................................................................... 10

2. Trump vs Europe : Un nationalisme économique qui change les relations transatlantiques .......... 11 (a) L’Union Européenne n’est plus un allié mais un concurrent économique comme les autres de l’espace globalisé ................................................................................................................................. 11 (b) Ce qu’il se passe en Europe et comment la politique de Trump pourrait participer à la montée des mouvements nationalistes ........................................................................................................... 12

Conclusion ....................................................................................................................................... 14

Annexes .................................................................................................................................. 15 Annexe A – Liste des litiges et contentieux entre l’Union Européenne et les Etats-Unis devant l’Organisation Mondiale du Commerce ............................................................................................ 15 Annexe B – Trois exemples de mesures phares de dumping fiscal dans l’Union Européenne ............ 15

(a) Luxembourg : Accords sur mesure ................................................................................................. 15 (b) Irlande : Fiscalité avantageuse pour les salariés et pour les entreprises ...................................... 15 (c) Belgique : La pratique des rescrits fiscaux ..................................................................................... 16 (d) Pays-Bas : Combo « régime mère-fille » et « sandwich hollandais » ............................................ 17 (e) Royaume-Uni : exemple différentiel au niveau de l’attractivité fiscale ......................................... 17

Annexe C – Etude de cas : Le libre-échange qui fait monter les prix ? ............................................... 18

Bibliographie .......................................................................................................................... 19

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Introduction La fin de la Guerre Froide a marqué le début d'un changement de paradigme, notamment entre les Etats-Unis et l'Europe. Jusqu’en 1991, les pays étaient rassemblés en blocs. Afin de maintenir cette logique de blocs, notamment celui de l’ouest (États-Unis, Europe de l'Ouest, Canada et d'autres pays), il était impossible de montrer ostensiblement une quelconque compétition, ne serait-ce qu'économique. Dans ce contexte, l’Europe constituait une forme de rempart contre le bloc soviétique. Les relations diplomatiques entre les États-Unis et l'Europe étaient donc le fruit de calculs d'intérêts économiques et géopolitiques nécessaires aux deux pays qui sont donc des compétiteurs alliés, en somme. Suite à la chute du mur et la victoire du bloc ouest, les considérations stratégiques des états se modifient. En effet, la démonstration de puissance d'un état ne se traduit plus par sa stratégie militaire et sa capacité à conquérir des territoires, mais par son économie et sa capacité à rester compétitif face aux autres pays. De ce fait, de nouveaux plans d'action, ciblant le terrain économique, doivent être mis en place. Les États-Unis s'éloignent alors de l'Europe, qui n'a plus besoin de son soutien, afin de se recentrer sur son accroissement de puissance. Jusqu'alors grande alliée privilégiée, l'Europe se retrouve en posture de concurrent principal. S'en suit la création du National Economic Council (NEC) par l'ordre exécutif en 1993, qui a pour mission principale de mettre l'économie au cœur de la politique et donc au service de leur puissance. Les relations euro-américaines se retrouvent à nouveau bouleversées dans le contexte actuel, post-élection de Donald Trump en tant que Président des États-Unis. Cet évènement inattendu marqua l'année 2016 de par le programme choc du président élu. Celui-ci prône un nationalisme économique affiché et favorable à une dislocation européenne. Bien qu’il soit désormais affiché, il ne constitue en rien une nouveauté. Nous réaliserons tout d’abord une analyse des différents leviers de nationalisme économique utilisés par les américains ces 20 dernières années face à ce concurrent qu’est l’Europe1. La seconde partie sera consacrée aux conséquences de la politique de Trump sur la montée de(s) nationalisme(s) européen(s) (abolition du TAFTA, autres cas de Brexit...).

1 Ce listing n’a pas vocation à être exhaustif, mais à être illustratif

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PARTIE I – UE/USA : Des cas de nationalismes économiques conquérants depuis 20 ans2

1. Quelques leviers de la stratégie américaine Les cas de litiges commerciaux portés devant l’OMC constituent la partie la plus visible des stratégies étatiques de nationalisme économique. Ils constituent parfois, comme dans l’affaire du bœuf aux hormones, de véritables bras de fer interétatiques. Dès 1988, l’Union Européenne avait ainsi une législation visant à protéger ses consommateurs d’un éventuel risque de santé publique liée à l’usage d’hormones de croissance dans les élevages bovins. Le « boycott » de facto qui en découla fit l’objet, à la suite d’un arbitrage de l’ORD (Organe de Règlement des Différends), de mesures de rétorsions via l’OMC de la part du Canada et des Etats-Unis, mécontents de ne pouvoirs écouler leurs productions de viande bovine sur le marché européen. Le droit de l’OMC prévoyant la loi du Talion en cas de boycottage illégal, des sanctions douanières furent imposées à la Communauté Européenne par les Etats-Unis et le Canada. Cela passa notamment par l’augmentation des droits de douanes sur les produits agricoles en 1999, ou encore par une taxe ad valorem de 100% sur les produits à base de viande bovine et porcine au Canada. De nouvelles sanctions devaient être appliquées, mais un accord fut trouvé en Mai 2009. Ce dernier a imposé un triplement des importations européennes de viande bovine américaine. En Décembre dernier, prenant ombrage de la diminution de leurs importations en Union Européenne, les Etats-Unis menacèrent d’installer des droits de douanes importants sur divers produits tels que le roquefort, la moutarde ou encore la truffe. L’incident, même si résolu, illustre les dynamiques de guerre commerciale sous-tendant les affrontements au sein de l’OMC. De 1995 à 2005, on dénombre 48 de ces incidents entre l’Union Européenne et les Etats-Unis. Ils concernent une grande variété d’opérations, de nombreux secteurs, et sont souvent porteurs de lourdes conséquences financières et commerciales.

La domination américaine : des outils au service du rayonnement de la puissance Les Etats-Unis usent également de l’extraterritorialité de leur droit afin d’assurer la pérennité de leur économie. Leur outil favori en la matière est le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA). Loi fédérale américaine de 1977 dont l’objectif primaire est de lutter contre la corruption, elle s’est vue donner une portée extraterritoriale. Son entrée en vigueur est conditionnée par un important éventail de facteurs, lui assurant une portée très étendue. En l’occurrence, dès lors qu’une entreprise non américaine utilise la monnaie américaine dans son activité, possède des filiales sur le territoire américain, utilise un FAI ou un opérateur téléphonique américain, ou répond à un appel d’offre la mettant en concurrence avec une entreprise américaine. Elle tombe sous l’égide, ipso facto, du droit américain. Ce maillage législatif, inévitable pour toute multinationale de taille respectable, assure aux Etats-Unis un levier puissant dans la préservation de leurs intérêts économiques et politiques. Le FCPA leur permet en effet d’accéder à un éventail d’actions. Elle permet de facto un processus de veille constante à l’égard des entreprises étrangères. Cette veille peut se combiner avec une surveillance accrue par le biais du FBI ou de la NSA, sur la base de simples soupçons. Enfin, elle place le gouvernement des Etats-Unis en position de belligérant potentiel vis-à-vis des entreprises se dressant contre ses intérêts. Cela peut permettre, au-delà de l’affaiblissement des entreprises étrangères sur des secteurs stratégiques, de placer les entreprises américaines en bonnes positions pour exploiter ces faiblesses, soit en les rachetant, soit par la constitution de quasi-monopoles.

2 Liste des litiges et contentieux entre l’Union Européenne et les Etats-Unis auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce est disponible en Annexe A.

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On peut ainsi dresser une liste non exhaustive des récentes sanctions prises à l’encontre d’entreprises européennes. ALSTOM fut ainsi condamné en 2014 pour corruption par le DOJ américain à 772,29 millions de dollars d’amendes. De même BNP PARIBAS a dû s’acquitter d’une amende de 8,9 milliards en 2015 suite à une accusation de violation des embargos américains. La même année, TOTAL fut accusée par la FERC (Federal Energy Regulatory Commission) d’avoir manipulé les prix du gaz naturel. Le démenti du groupe a débouché sur une enquête de la CFTC (Commodity Futures Trading Commission). On pense également au cas de VOLKSWAGEN en 2016. L’entreprise allemande s’est vue forcée à un paiement de 15 milliards de dollars pour échapper à un procès aux Etats unis. Ce compromis prévoirait également le paiement d’une amende de 2,7 milliards aux agences fédérales et californienne de protection de l’environnement, ainsi que le financement à hauteur de 2 milliards de dollars de technologies d’émissions propres. Là encore la même année la DEUTSCH BANK, accusée d’avoir joué un rôle important dans la crise des Subprimes en ayant trompé les investisseurs en leur vendant des produits toxiques s’est vue demandées 14 milliards de dollars d’amende. La grande efficacité de cet outil réside dans sa légitimité apparente. Les objectifs affichés de ces actions législatives sont en effet louables (lutte contre la corruption, pour la juste concurrence mondiale, pour l’efficacité économique), mais elles n’en demeurent pas moins un outil puissant au service des intérêts américains. Cette dimension morale est par ailleurs renforcée par l’intervention régulière d’Organisation non gouvernementales en amont des accusations américaines. Un autre outil de domination économique américain est la prise de contrôle des entreprises étrangères jugées stratégiques pour les intérêts américains. L’exemple le plus parlant est sans doute « In-Q-Tel ». Fond d’investissement privé à but non lucratif créé en 1999 par un ancien agent de la CIA, sa seule mission est la détection et l’acquisition d’entreprises dont la technologie et les brevets pourraient servir les intérêts américains, notamment dans le domaine de la sécurité. Les technologies et brevets ainsi contrôlées sont mis à la disposition des institutions de renseignement américaines. Le cas le plus emblématique de ces manœuvres est l’entreprise française GEMPLUS, aujourd’hui GEMALTO, développeur du premier lecteur de cartes à puces. L’entreprise fut l’objet d’une prise de participation rapide par le fond d’investissement américain Texas Pacific Group, qui aboutit à la nomination de l’ancien administrateur d’In-Q-Tel à la tête du conseil d’administration. Si l’Etat français récupère en 2009 le contrôle de l’entreprise par le biais du Fond Stratégique d’Investissement (FSI), les technologies relatives aux cartes à puces ont déjà été transférées. Le fond d’investissement « The Carlyle Group », créé en 1987, constitue un autre exemple édifiant. Ce dernier repose sur un réseau puissant comprenant notamment d’ex-membres de l’administration et des services de renseignement américains et investit massivement à l’étranger, notamment en Europe. Parmi les entreprises françaises ayant été rachetées par ce fond, on note ainsi CAMECA, leader mondial spécialisé dans les instruments d’analyse de matériaux, ou encore SAGECOM, leader européen dans les communications haut-débit, et terminaux de communication.

Lobbying à l’UE : influence et extension du concept de sécurité nationale Le Parlement Européen est un autre lieu d’expression de la puissance américaine. Alors que 30% des lobbyistes enregistrés à Bruxelles représenteraient des intérêts économiques américains, on ne peut que comprendre l’influence des Etats-Unis dans le processus législatif européen, et l’avantage concurrentiel lié à leur capacité à modifier ou à influencer le cadre législatif du marché. La guerre des normes, centrale dans les activités de lobbying, est ainsi animée par divers groupes de pression comme la Chambre de Commerce Américaine en UE (Amcham EU), représentant les intérêts de plus de 160 grandes entreprises, majoritairement américaines. Disposant d’un budget annuel annoncé de plus d’un million d’euros, elle promeut, comme d’autres entités, les intérêts économiques américains. Cela est entre autre passé par la

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défense du TTIP.3 Cette guerre des normes, loin de ne concerner que les grands groupes, affecte également les entreprises de type PME. Le cas Markal, relaté par Paturel (2002) l’illustre. Une entreprise américaine produisant du maïs avait ainsi tenté d’influencer la législation européenne concernant la fabrication du boulgour afin d’évincer l’entreprise Markal, leader sur le marché. Les normes auraient alors imposé que le boulgour, sous-produit du blé, soit fabriqué à partir de maïs, ce qui aurait eu pour conséquence la cessation d’activité pour l’entreprise française. Si cette opération d’influence américaine échoua grâce aux procédures de veille législative et de contre influence de l’entreprise française, cette guerre des normes qui sévit à Bruxelles incarne un danger réel pour tout type d’entreprise. Il est enfin utile de mentionner la forte proximité que les Etats-Unis entretiennent entre leur propre prospérité économique et l’idée qu’ils se font de leur « sécurité nationale ». Ce concept, omniprésent au sein de l’opinion public et de la rhétorique gouvernementale, est en effet utilisé par l’administration pour permettre des investissements massifs sur des technologies à usage militaire. Le budget colossal de Défense des Etats-Unis permet au pays d'innover de manière significative, notamment dans le secteur des TIC (Technologies de l'Information-Communication). Cette politique offre ainsi aux entreprises américaines un avantage décisif lorsque vient l’étape de l’application civile de ces innovations, du fait des transferts technologiques et des économies d’échelles inhérentes à ce type de stratégie. Sont emblématiques les cas d’Internet et du GPS, deux outils qui ont redéfini nos moyens de communication et de déplacement et qui sont issus directement de la recherche et développement du domaine militaire américain. Il est même permis de considérer que le concept peut se voir étendu à tous ce qui pourrait menacer le leadership américain sur un secteur stratégique. A ce titre, la moindre tentative de concurrencer une entreprise américaine sur un marché, considéré comme stratégique, peut se voir combattu par l’administration, même si cette concurrence émane d’une puissance alliée. L’exemple de la « saga Galileo »4 illustre cette extension de l’argument concernant la « sécurité américaine » par le gouvernement à tout ce qui pourrait menacer leur leadership. La concurrence exercée par un l’Union Européenne par ce projet a été combattue avec acharnement par l’administration US. En 2001 était créée l’entreprise commune européenne nommée « Galileo » pour gérer un projet de radionavigation par satellite, et ce, pour préserver la souveraineté de l’UE de son homologue et concurrent américain, le GPS5. Ce projet mit du temps à aboutir en raison de pressions exercées par l’administration américaine sur l’Union Européenne. En effet, un important bouclier s’est élevé contre le projet de la part de l’administration américaine. Dans un premier temps, les Etats-Unis mirent en place, une fois encore, une argumentation autour de leur sécurité, justification d’une ingérence (qui prendra peu à peu la forme d’un véritable lobbying) dans le projet les autorités américaines ont communiqué à leurs homologues européens leurs doute quant aux conditions de sécurité de Galileo6. Dès le début, les autorités américaines émettent des doutes quant à la viabilité économique du projet européen. Un rapport du cabinet PWC avait été remis à la Commission Européenne mettant en avant la rentabilité du projet Galileo qui avait été vivement critiqué par l’administration américaine. Grâce à la coopération significative de plusieurs pays européen (notamment la Grèce, les Pays-Bas et le Royaume-Uni), les Etats-Unis obtiennent donc la garantie d’un lancement uniquement civil ne présentant donc pas les avantages évoqués précédemment. Le cas de Galileo est

3 Corporate Europe Observatory, V. Cann, 15/07/2015, The revolving door : greasing the wheels of the TTIP lobby 4 Fondation Robert Schuman, 11/02/2002, Synthèse n°31, Galiléo, un enjeu économique et politique majeur 5 Les Echos, 25/11/2011, L'innovation de défense, locomotive technologique ? 6 Paul Wolfowitz, numéro 2 du Pentagone à l’époque ira même jusqu’à écrire personnellement aux ministres européens de la défense afin d’insinuer que le détournement de Galileo au service d’une puissance non-alliée constituerait une menace pour l’ensemble de l’OTAN.

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fortement représentatif de l’incapacité de l’Europe à se penser en termes de puissance. Contrairement à l’Europe des années 607 qui avait su, sous l’impulsion du Général De Gaulle, protéger leur programme de lancement spatial face aux velléités américaine de contrôle8, l’Europe du 21ème siècle semble avoir perdu la préoccupation de son indépendance stratégique. Là où la coopération aurait pu s’effectuer à l’échelle européenne autour du développement d’une technologie centrale tant sur le plan économique que géopolitique, les décideurs européens ont choisit de montrer un visage désuni et de rester sur des considération stratégiques individuelles.

2. La collusion Public-Privé au service d’une stratégie globale De manière encore plus précise, il est facilement observable à quel point la législation américaine est ostensiblement orientée vers une stratégie de nationalisme économique. La création en 1993 du « National Economic Council » n’est pas isolée, mais s’inscrit au sein d’une dynamique impulsée dès 1975 par la création du Comité pour l'investissement étranger aux États-Unis (CFIUS), composé de 11 agences américaines (le département de la Défense notamment), et dont la mission est de surveiller les acquisitions d'entreprises américaines par des compagnies étrangères. En 1988 est ensuite adopté l'amendement Exon-Florio. Cette disposition mandate le CFIUS pour mesurer l’impact sur la sécurité nationale que pourrait avoir l’acquisition par l’étranger d’une entreprise américaine jugée stratégique. Exon-Florio permet alors au Président, sur la base de cette étude, de suspendre ou non la transaction. L’évolution de cette législation est forte illustratrice des objectifs américains, puisqu’en 1992, l'amendement Byrd étend les prérogatives gouvernementales à toute opération qui affecterait potentiellement « le leadership technologique américain dans des domaines affectant la sécurité nationale ». L’avantage de cette disposition tient au fait que le concept de « sécurité nationale » est défini de manière suffisamment vague pour garantir à l’exécutif américain une réelle marge de manœuvre. Crée en 1992, le Trade Promotion Coordinating Committee (TPCC) travail conjointement avec le gouvernement (il est présidé par le secrétaire d’État au commerce) et divers services de renseignement afin d’obtenir des informations susceptibles d’aider les entreprises américaines pour leur implantation à l’étranger. L’année suivante apparait l'Advocacy Center (1993), en complément du TPCC et avec des fonctions beaucoup plus opérationnelles. Pour dernier exemple, la loi Cohen de 1996 relative à l’espionnage économique. Celle-ci vise à préserver les informations stratégiques des entreprises américaines. Les années 90 auront donc été le théâtre de l’apparition d’un certain nombre de lois ou organes gouvernementaux dont l’objectif est la préservation des intérêts économiques nationaux. Cette politique savamment orchestrée vise à démontrer aux entreprises américaines que le gouvernement écoute leurs préoccupations et constitue une source importante du patriotisme répandu au sein du secteur privé outre-Atlantique. La collusion entre le secteur public et le secteur privé constitue donc un cercle vertueux alimenté par du nationalisme économique d’une part, et par du patriotisme d’autre part (les deux s’alimentant mutuellement). Ce nationalisme économique, nous l’avons vu, peut s’exprimer de manière défensive (loi Cohen, amendements Exon-Florio et Byrd) comme offensive (TPCC et Advocacy Center). Le paradoxe de la politique économique américaine de ces 20 dernières années réside dans le fait que celle-ci s’est toujours accompagnée de discours, émanant de l’administration, très libre-échangiste. Ce double jeu

7 Les relations entre USA et Europe étaient alors, en pleine Guerre Froide, d’une toute autre nature, leurs négociations également 8 Les américains avaient à l’époque proposé de totalement prendre en charge le lancement des satellites européens.

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américain est progressivement devenu de plus en plus évident et est à l’origine de tension avec ses partenaires commerciaux, notamment l’Europe, devenue le concurrent économique majeur à la fin de la Guerre Froide. Rappelons que si d’autres pays comptent désormais également dans cette compétition (la Russie ou la Chine par exemple), l’affrontement est bien plus frontal car assumé de part et d’autre. Ce qui se joue entre les USA et l’Europe est plus subtile, car d’une part, cela met aux prises deux « puissances alliés », et d’autre part l’Europe fait preuve d’une forte tendance à nier l’évidence quant à la nature des relations transatlantiques : tant que les européens continueront d’éviter de penser ces sujets comme l’expression d’un rapport de force, les américains auront tout intérêt à ne pas dépasser certaines limites qui pourrait faire (vraiment) réagir à l’échelle du vieux continent. En entretenant une forme d’ambiguïté, les Etats-Unis misent sur la volonté européenne du maintien d’un statuquo et conditionnent le comportement de nos décideurs. L’accession de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis va sans contexte accentuer le repli nationaliste et protectionniste.

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PARTIE II – Les conséquences éventuelles de la politique de Trump sur la montée de(s) nationalisme(s) européens

1. Le nationalisme économique de Donald J. Trump : des mesures protectionnistes, des Etats à la scène internationale S’il est une chose dont personne ne peut douter, c’est bien la volonté protectionniste dont a fait preuve le nouveau président des Etats-Unis. Point ancré dans son programme, abordé ci-après, ce nationalisme économique et politique a surtout été au centre de sa campagne, de ses discours et au cœur de son électorat. Donald Trump aura su faire preuve d’une ingéniosité farouche concernant le revirement de politique américaine qui, jusqu’à présent, avait toujours (à tout le moins de façade) soutenue un libéralisme économique sans frontières. Concrétisée par les accords économiques (tels l’Alena, ou le Tafta qui était à venir), les règlementations internationales sur la concurrence et le libre échange (dont le Department of Justice se voulait garant malgré sa nécessaire partialité), et même la culture américaine du « Self-Made-Man », cette politique libérale est aujourd’hui enterrée au profit d’un repli national et protectionniste9. Cette victoire électorale était alors l’affrontement entre le choix d’une Amérique en continuité avec les politiques précédentes et le choix d’une Amérique en rupture avec tout ce qui avait était fait : Le libéralisme opposé au nationalisme. Cependant, la véritable preuve de la puissance politique du nouveau président élu s’est révélée avec l’impact de son usage des réseaux sociaux (surtout Twitter) grâce auxquels il a pu communiquer sur des mesures fortes de protectionnisme avant même son investiture. Il a normalement twitter sur le fait que General Motors produisait ces voitures au Mexique et non aux Etats-Unis, en profitant pour souligner une de ses mesures phares : imposer aux entreprises américaines de produire sur le territoire national à moins de payer une taxe aux frontières élevée10. Ce simple tweet a eu un effet considérable pour tout le secteur, poussant des compagnies non ciblées par le message à repenser leurs investissements, notamment comme l’abandon par Ford d’investir 1,6 milliards de dollars au Mexique pour les placer dans ses implantations américaines11. Donald J. Trump, 45ème Président des Etats-Unis d’Amérique est donc le nouveau symbole du protectionnisme, visible à tous les niveaux de son programme de campagne1213.

Un programme nationaliste pour le marché intérieur Les mesures de nationalisme économique prises par Trump se concentrent, pour nombre d’entre elles, sur les questions de fiscalité et de contrôle des frontières. Afin de justifier de mesures protectionnistes, D. Trump s’appuie sur deux faits : le PIB ne s’est pas redressé depuis la crise des Subprimes et les taux d’imposition sont surélevés14. Ses mesures principales seront

9 L’Express, 09/11/2016, Présidentielle américaine : Trump président ou la victoire du protectionnisme 10 Tweet de Donald Trump du 03 janvier 2017 : « General Motors is sending Mexican made model of Chevy Cruze to U.S. car dealers-tax free across border. Make in U.S.A. or pay big border tax! ». 11 L’Express L’Expansion, 03/01/2017, General Motors, nouvelle victoire d’un tweet de Donald Trump 12 L’Express, 09/11/2016, Ce que le Président Donald Trump a promis de faire 13 On the Issues, Page consacrée à Donald Trump 14 Déclarations de Donald J. Trump en Octobre 2016 : « U.S. 1% growth is almost no growth, and due to high taxes » (Traduction : « 1% de croissance n’est pas de la croissance, et ce à cause des taxes trop élevées ») ; « We're

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donc ciblées sur l’objectif d’une diminution drastique de la fiscalité, pour les entreprises sur le sol américain comme pour les foyers. Ces derniers verraient ainsi leurs plafonds d’imposition passer de 39.6% à 33% au maximum, les entreprises quant à elles, seraient sujettes au maximum à 15% de taxes (contre 35% actuellement)15. Cette mesure s’accompagnerait d’une contrepartie pour les entreprises qui consisterait à rehausser le salaire horaire minimum de 7 à 10 dollars de l’heure. Il espère de cette façon, inciter les entreprises à revenir sur le territoire américain, afin de créer 25 millions d’emplois et relancer la consommation des ménages. Ce protectionnisme économique s’accompagne de mesures territoriales, puisque la question de l’expulsion des 6 millions d’immigrés clandestins en provenance du Mexique, ainsi que la construction d’un mur à la frontière mexico-américaine, sont des sujets pointant le nombre d’emplois non déclarés que les travailleurs nationaux n’auraient hypothétiquement jamais obtenu. Un dernier point notable que l’on peut rapprocher d’un nationalisme économique pur serait le démantèlement des régulations de la loi Dodd-Frank qui, suite à la crise de 2008, visait à offrir un pouvoir de tutelle aux autorités pour contrôler le marché. Cependant, et si l’on considère la portée mondiale de la bourse de Wall Street (notamment les risques d’une nouvelle crise financière à échelle mondiale), l’on comprend que les risques encourus par le reste du monde n’intéressent pas le président américain, tant que les places boursières du pays tournent de nouveau à plein régime.

Trump face au reste du monde : la volonté d’un nationalisme économique meneur dans les relations internationales Cette témérité se retrouve sans surprise dans sa vision des relations internationales. Considérant les Etats-Unis comme une puissance indépendante capable d’affronter l’économie globalisée seule contre tous, le programme économique de D. Trump vise à une redéfinition des traités en cours, à l’abandon de ceux à venir, et à une négation des causes ayant donné lieu, par exemple, au protocole de Kyoto de 1995. Le premier élément marquant de cette volonté politique est la croisade menée contre les délocalisations et le dépeuplement industriel du territoire Américain. Cet argument a trouvé une justification, malgré les chiffres positifs du chômage de la période 2009-2016 qui montrent la chute de ce dernier de 10% de la population active à 4.9% ainsi que la diminution du nombre de chômeurs de près de 40% en huit ans. Cependant, l’absence de regain d’activité dans le secteur industriel des territoires du Midwest16 principalement, encourage la mise en place de telles mesures. Ainsi voit-on le NAFTA et le TPP sujet à renégociations, accompagnés de mesures fiscales visant à limiter les exportations à destination des Etats-Unis telles que la taxe à 35%, qui frapperait les industries chinoises et mexicaines, ainsi que le secteur automobile allemand. Plus loin encore dans son volontarisme, D. Trump divise sur les questions essentielles que sont l’énergie et le réchauffement climatique. La puissance du Department of Justice avait déjà été démontrée dans l’affaire Alstom, témoignant de la volonté de domination américaine du secteur de l’énergie. Celle-ci a été de nouveau affirmée par le souhait du nouveau président américain d’obtenir le contrôle du pétrole au Moyen-Orient, notamment pour affaiblir Daesh. Afin de servir la puissance du secteur énergétique américain, D. Trump, soutenu par l’ensemble du parti Républicain, entend revenir sur les accords de Paris pris lors de la COP21. Il a également l’intention de ne pas financer les Nations Unies que son prédécesseur avait promis d’aider, dans cette lutte pour le climat et relancer les projets tel que Keystone XL (un projet américano-canadien pour lequel B. Obama avait avancé son véto en 2015). Enfin,

dying at 1% GDP growth; we don't make things anymore » (Traduction : « Nous mourrons à 1% de croissance du PIB, nous ne fabriquons plus rien »). 15 The Guardian, 09/11/2016, Trump’s economic policies : protectionism, low taxes and coal mines. 16 Région des Etats-Unis qui comprend 12 Etats fédéraux : l'Illinois, l'Indiana, l'Iowa, le Michigan, le Minnesota, le Missouri, l'Ohio, le Dakota du Nord, le Dakota du Sud, le Nebraska, le Kansas et le Wisconsin.

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il déclare vouloir relancer la production des mines de charbon et d’en assouplir les règlementations, favorables à l’environnement et nocives aux coûts de productions. Cela se reflète aussi dans ses tweets, dans lesquels il avance que le concept de réchauffement climatique a été créé par et pour les chinois afin de rendre l’industrie américaine non-compétitive.17 On comprend donc qu’au-delà d’être protectionniste, le programme de D. Trump considère ses alliés, anciens et nouveaux, comme étant négligeables sur le plan économique mais aussi politique ou militaire, bien qu’il n’en ait pas été question ici.

2. Trump vs Europe : Un nationalisme économique qui change les relations transatlantiques

L’Union Européenne n’est plus un allié mais un concurrent économique comme les autres de l’espace globalisé Le 16 janvier 2017, lors d’un entretien au Times18, Donald Trump a pu échanger sur sa vision de l’Europe. Il a ainsi cassé l’image des Etats-Unis au leadership bienveillant et protecteur, et considère l’Union Européenne comme un acteur de l’économie mondiale dont il faut se protéger, comme tout autre. Il a ainsi pu, au travers de cet entretien, souligner son indifférence totale sur l’union ou la désunion de l’UE, a salué le Brexit ainsi que la démarche qui a pu l’accompagner, et en a pronostiqué d’autres. Sa cible au sein de la communauté européenne semble être bien définie : il dénonce un fonctionnement européen au service de la puissance de Merkel. Menaces directes de représailles commerciales notamment pour le passif de l’automobile allemand, stigmatisation de la politique migratoire du gouvernement germanique mis en place, Trump se positionne à l’encontre de l’Europe menée par l’Allemagne. En une seule déclaration, il a réussi à marquer la rupture. La position du nouveau président américain est limpide : son intérêt est uniquement tourné vers son pays et il ne se veut pas protecteur d’une autre puissance mondiale qui pourrait lui faire de l’ombre. En annonçant publiquement son soutien au Royaume-Uni de Ukip et de Nigel Farage, le Président Trump supporte la politique19 souhaitée par Theresa May pour l’après Brexit, qui elle se veut également protectionniste. En effet, les positions économiques annoncées sont une fois encore tournées vers un soutien plus fort du marché intérieur et la promotion des intérêts nationaux. La Première Ministre britannique a ainsi souligné la volonté de son pays de suivre un processus de ré-industrialisation, d’aménagement du territoire et souhaite également mettre un frein à la mobilité des hommes. Dans la même logique que Trump qui souhaite le retour d’une base fiscale délocalisée, May a demandé les comptes fiscaux des GAFA20 afin de poursuivre les cas de dumping fiscal. Par ailleurs, un accord économique entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni ne serait pas surprenant. Trump s’est dit prêt à lutter contre les pays qui proposent un dumping fiscal attirant de grandes entreprises américaines. L’UE en comporte quelques uns et c’est un véritable rapport de force qui pourrait s’installer entre les deux puissances. En effet, nombre de multinationales américaines sont installées sur le territoire européen avec pour but de profiter d’une fiscalité avantageuse. Le dumping fiscal de l’Irlande, où se situe le siège européen de Google, Facebook, Twitter et autres grands acteurs d’Internet, est reconnu et attire

17 Tweet de Donald Trump d’Octobre 2012 : « The concept of Global Warming was created by and for the Chinese in order to make U.S. manufacturing non-competitive». 18 Interview de Donald J. Trump au journal The Times, le 16 janvier 2017. 19 Discours de Theresa May du 17 janvier 2017 à propos du Brexit. 20 GAFA : acronyme constitué des géants les plus connus (Google, Apple, Facebook, Amazon), qui désigne les grands acteurs d’Internet.

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beaucoup de groupes sur le sol irlandais. Le « sandwich hollandais » qui permet de détaxer les dividendes et les accords sur mesure du Luxembourg font des ces deux pays du Benelux des terres propices au dumping fiscal. Trump voit ainsi une partie des capitaux américains imposables partir en UE et cherche à rapatrier les capitaux « à la maison ». L’Union Européenne est donc considérée comme un concurrent et il ne voit donc plus l’intérêt de se place comme protecteur d’une Union qui défavorise, à son sens, le rayonnement de la puissance de son pays. Depuis son investiture du 20 janvier 2017, Trump a déjà cherché à rompre des accords commerciaux qui étaient déjà en négociation et/ou instaurés : il a mis fin à l’accord transpacifique (TPP21) avec nombre de pays asiatiques, et a déjà rendu publique sa volonté de renégocier les principes de l’accord de l’Alena entre les pays nord-américains. En ce qui concerne l’Europe, le TAFTA22, dont les négociations font rage depuis l’été 2013, il semblerait que les prérogatives qui le constituent soient bien loin de la politique de Trump. En effet, critiquées par l’opinion publique depuis le début des discussions entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, les conditions du TAFTA en matière de réductions des droits de douane et des barrières règlementaires apparaissent comme allant à contre-courant des idées du nouveau Président américain. Ce dernier a cependant souligné que le Brexit, qu’il a salué, était une opportunité pour le Royaume-Uni d’obtenir un accord privilégié avec les Etats-Unis. Ainsi de par les différents outils que Trump avance, sa démarche est claire : l’Union Européenne n’est pas un allié mais bel et bien un concurrent sur la scène économique internationale. Trump place ses pions et cherche à jouer de son influence dans l’objectif de « Make America Great Again ».

Ce qu’il se passe en Europe et comment la politique de Trump pourrait participer à la montée des mouvements nationalistes Le souci du protectionnisme de Trump est qu’il est construit sur une vision à court-terme. Le président américain souhaite lutter contre les effets négatifs du libre-échange : la désertification des campagnes, les friches industrielles, le déclin des centres urbains de moyenne taille et l’hyper concentration des activités économiques au sein des métropoles. Sa réaction est alors logique : pour lutter contre l’impact négatif du libre-échange sur les intérêts des Etats-Unis, il veut relancer l’emploi et empêcher la fuite d’une base fiscale importante. Cependant, fermer ses frontières et chercher à produire 100% américain dans l’objectif de relancer l’économie nationale risque d’être un défi face auquel il ne va pas pouvoir s’imposer du fait de la réalité de l’espace mondialisé. En effet, les produits issus des champions nationaux, peu importe leur origine, sont désormais construits à partir d’un assemblage de pièces qui sont, quant à elle, pas forcément produite sur le territoire national23. Au sein de l'Union Européenne, les pays sont plutôt « trumposceptiques » à quelques exceptions près. Seule la Hongrie soutient le très controversé nouveau président des États-Unis. En effet, les idées du premier ministre hongrois Viktor Orbán se rapprochent de celles de Donald J. Trump, notamment ce qui concerne le contrôle de l'immigration: l'interdiction d'entrée des musulmans sur le territoire américain, la construction un mur à la frontière qui touche le pays. Selon Viktor Orbán, l'élection de Donald Trump

21 TPP : Trans-Pacific Partnership Agreement (Accord de Partenariat Transpacifique), signé le 4 février 2016 par les pays suivants : Australie, Brunei, Canada, Chili, Etats-Unis, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour et Viêt Nam. Les Etats-Unis se sont retirés des négociations le 23 janvier 2017, durant la première semaine du mandat présidentiel de Donald J. Trump. 22 TAFTA : Transatlantic Free Trade Agreement (Traité de libre-échange transatlantique). Autre appellation : TTIP : Transatlantic Trade & Investment Partnership (Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement). 23 Voir l’étude de cas sur la construction d’un A380 en Annexe

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annonce "la fin du multilatéralisme" et estime que les autres pays se sentiront maintenant plus libres de placer l'intérêt national de leur pays au profit du bien commun24. En France, le vice-président du Front National Florian Philippot a déclaré que l'élection de Donald J. Trump était "préférable à celle de Clinton du point de vue des intérêts de la France". Marine Le Pen a également félicité sa victoire25. De nombreuses personnalités anti-Trump ont réagit à son élection. En Allemagne, la ministre de la défense, Ursula von der Leyen, a déclaré être surprise par son élection, qualifiée de « choc énorme ». Aux Pays-Bas, le populiste Geert Wilders, a félicité Donald Trump à travers un tweet, saluant sa "victoire histoire" et la qualifiant de "révolution"26. En réaction à la politique ostensiblement protectionniste de Donald Trump, les différentes puissances économiques européennes vont devoir réagir afin de protéger leur propre économie. L’Union Européenne des 28 n’est plus, à l’heure actuelle, « Unie dans la Diversité », l’euroscepticisme s’imposant de plus en plus à Bruxelles. L’Union Européenne, bien plus qu’un simple partenariat économique se voulait plus forte sur le plan politique afin d’aboutir à « une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens ». Toujours en processus de construction, élargissement après élargissement, l’institution européenne a failli à sa volonté première de former une puissance unie entre nombre de différents pays, échouant dans sa démarche d’entretenir cette sensation collective d’appartenir à la même puissance. A l’inverse de s’inscrire dans un mouvement patriotique à l’échelle de l’Europe, on a pu voir apparaître au sein des différents membres de l’Union une volonté de plus en plus prononcée de défendre un nationalisme économique à l’échelle d’une nation. En effet, nombreux sont les pays qui préfèrent des partenariats économiques et financiers avec des puissances non-européennes, choisissant ainsi une flexibilité de marché plus grande et une possibilité plus large d’agrandir le rayonnement de son propre Etat à l’échelle mondiale. L’Union Européenne a alors plusieurs solutions : soit se rassembler pour faire l’avenir du projet européen, faire de nouvelles propositions pour une nouvelle Europe plus forte et unie, capable d’affronter l’adversaire américain. Par ailleurs, il existe déjà au sein de l’Europe une montée des nationalismes économiques, la mise en place de mesures protectionnistes peut être alors la solution face à l’adversaire Trump. Individuellement, les pays membres de l’Union Européenne cherche à soutenir le rayonnement international de leur propre économie en s’alliant à des puissances hors UE. La polémique suscitée par le choix polonais de se positionner comme allié économique des Etats-Unis en rompant le marché avec le groupe Européen Airbus pour entamer des négociations avec l’américain Sikorsky est l’une des illustrations de cette tendance de prise de distance vis-à-vis de l’UE. Par cette démarche favorisant le marché polonais plutôt que la coopération européenne, le gouvernement PiS (Droit et Justice) s’aligne ainsi sur les pratiques mises en place à travers le vieux continent, agissant dans une optique de prospérité individuelle plutôt que de construction européenne que pouvait représenter la « discrimination positive » du choix des hélicoptères Airbus. Trump en proposant des conditions économiques favorables au développement des entreprises du territoire américain peut rendre les Etats-Unis plus attractifs qu’ils ne le sont déjà. Alors, le choix dans les activités économiques d’un partenaire américain plutôt qu’européen peut encourager les nations membres dans leurs démarches individuelles et donc accentuer les divergences et le manque de cohésion intra-UE.

24 Independent, 23/01/2017, Hungary’s Prime Minister Viktor Orban praises Donald Trump’s ‘America First’ nationalism 25 France TV Info, 21/01/2017, Pour Florian Philippot, l’élection de Trump était favorable pour les intérêts de la France. 26 Le Monde, 09/11/2016, Réactions internationales à la victoire de Donald Trump entre inquiétude, liesse et stupéfaction.

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Conclusion

Les Etats-Unis ont toujours eu une stratégie d’accroissement de puissance, plus ou moins agressive. Cette nation s’est imposée grâce à sa position dominatrice, marquée par un droit américain extraterritorial offensif, par le biais du CFIUS. La part conséquente des lobbyistes américains à Bruxelles illustre cette volonté d’influer sur le cadre législatif et normatif européen. Le gouvernement américain ne recule devant rien pour venir en aide à ses entreprises, même à l’international. Cette collusion des secteurs public/privé se manifeste notamment avec le TPCC qui soutient les entreprises américaines dans leur implantation à l’étranger, à l’aide des services du renseignement. Cependant, cette position est d’autant plus remarquable actuellement, depuis que Donald J. Trump a été élu Président des Etats-Unis avec son programme nationaliste affiché. La récente publication d’un document de prospective sur les tendances mondiales intitulé « Le Paradoxe du progrès » publié par la National Intelligence Council27 des Etats-Unis apporte quelques réponses sur l’approche de géopolitique américaine. La stratégie du chaos qui a pu être associée, par des auteurs, à la politique américaine à savoir d’exporter le chaos pour limiter son propre déclin n’est pas démentie ici. En effet, les auteurs, face au constat que le chaos ayant été créé par les interventions militaires successives, l’inaction est la seule préconisation de ces auteurs. Toutefois, ce document met en garde contre un courant « nativiste »28 dangereux qui pourraient proliférer parmi les élites politiques et qui viserait à donner la primauté aux natifs du pays plutôt qu’aux immigrés. Par ailleurs, parmi les scenarii mondiaux envisagés celui d’un monde constitué « d’ilots ». Trump est la sonnette d’alarme qui devrait forcer l’Union Européenne à sortir de sa torpeur et mettre en place un véritable gouvernement ainsi qu’une stratégie répliquant à celle des Etats-Unis.

27 Source: Global Trendds Paradox of Progress, A publication of the National Intelligence Council , Janvier 2017. 28 Source : T. Flichy de La Neuville, 30/01/2017, « Prospective géopolitique : les ÉtatsUnis sur le chemin de la conversion au réalisme », Revue Conflits.

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ANNEXES

Annexe A – Liste des litiges et contentieux entre l’Union Européenne et les Etats-Unis devant l’Organisation Mondiale du Commerce Voir le document joint.

Annexe B – Trois exemples de mesures phares de dumping fiscal dans l’Union Européenne Un rapport de l’Assemblé Nationale du 6 octobre 201529 sur l’Union Européenne et la lutte contre l’optimisation fiscale souligne que nombre d’Etats se défendent d’utiliser le droit fiscal à contre courant du droit de l’UE, invoquant la nécessité de conserver un avantage comparatif. Les dysfonctionnements soulignés sont propres à cinq pays différents : Luxembourg, Irlande, Belgique, Pays-Bas, et Royaume-Uni. Le tableau ci-dessous présente rapidement en quoi consiste les différents cas d’avantages fiscaux proposés aux entreprises dans les pays concernés.

(a) Luxembourg : Accords sur mesure Abriter des filiales de grands groupes en leur proposant une imposition faible

Grandes entreprises concernées

• Agroalimentaires : Coca-Cola, Pepsi, Heinz… • Mobilier : Ikea • Luxe : Burberry, LVMH • Laboratoires pharmaceutiques : GSK, Mylan, Teva • Banques-assurances : HSBC, Axa, CNP

(b) Irlande : Fiscalité avantageuse pour les salariés et pour les entreprises Fiscalité avantageuse pour les dirigeants et salariés à haut potentiel

− Mécanismes d’allègement en matière d’impôt sur le revenu visant à attirer les talents étrangers − Special Assignee Relief Programme (SARP) : inciter les salariés non irlandais de sociétés

multinationales à s’installer dans le pays tout en étant payés de l’étranger ⇒ Sur les revenus imposables de plus de 75000 €, 30% d’abattement fiscal (revenu plafonné

à 500 000 euros, abattement plafonné à 127 500€) − Transfert du crédit d’impôt recherche et développement au bénéfice des salariés-clés travaillant

dans ce domaine

29 Rapport d’information de l’Assemblée Nationale, enregistré à la présidence de l’Assemblée le 6 octobre 2015, déposé par la Commission des Affaires Européennes sur l’Union Européenne et la lutte contre l’optimisation fiscale

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− Exonération des revenus des salariés exerçant également leur activité dans des pays émergents : « Foreign Earnings Deduction »

− « Crossborder relief » : exclure l’impôt sur le revenu le montant des revenus à raison des fonctions exercées à l’étranger

Fiscalité des entreprises avantageuses

− Double sandwich irlandais (*) − Taux d’imposition stable et bas − Régime spécifique d’exonération des plus-values de cession de titres pour les sociétés de holding − Limitation des cas d’application de la retenue à la source − L’absence de règles relatives à la sous-capitalisation et de régime des sociétés étrangères

contrôlées − Crédit d’impôt recherche et développement avantageux − Traitement préférentiel pour les actifs incorporels

(*) Exemple : le cas du double Sandwich Irlandais (ou néerlandais).

i. Une société américaine fusionne avec une entreprise irlandaise, domiciliée en Irlande. L’entreprise irlandaise prête alors des capitaux à la maison-mère basée aux Etats-Unis, créant des paiements d’intérêts qui sont déductibles des impôts, entrainant moins de taxes à payer au final.

ii. L’entreprise irlandaise verse des intérêts et des dividendes à d’autres filiales de la maison-mère, basées aux Pays-Bas. Ces versements réduisent la « facture fiscale » irlandaise et avancent un taux effectif d’imposition sur les sociétés de 6%.

iii. L’entreprise irlandaise considère alors la société comme résidant aux Bermudes : et elle ne paie donc pas d’impôts en Irlande. Les Etats-Unis considèrent cette entreprise comme Irlandaise, et elle échappe donc à la fiscalité immédiate américaine.

iv. Des milliards de dollars de liquidités s’accumulent à l’étranger, échappant aux systèmes de fiscalité appliqués par plusieurs pays. Les Etats-Unis considèrent l’entreprise dont les fonds sont aux Bermudes comme irlandaise, et ne la taxe donc pas.

L’exemple ci-dessus correspond à la technique mise en place par Google pour échapper une taxation sur les revenus de la société. Des multinationales comme Facebook et Microsoft appliquent également ce principe d’optimisation fiscale.

(c) Belgique : La pratique des rescrits fiscaux Mesures phares appliquées par le gouvernement belge :

− Imposition sur les revenus du travail sensiblement plus lourde qu’en France − Système des intérêts notionnels : moyens d’abaisser le taux effectif moyen d’imposition des

sociétés en se financer sur fonds propres : Ceci permet le passage d’un taux facial d’impôt sur les sociétés de 34% à un taux

effectif de 26%, ce qui explique la performance belge en termes d’investissements entrants.

− La pratique belge des rescrits fiscaux : Schémas de planification agressive présentés par les entreprises, attirant ainsi de

la matière fiscale

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Déduction du gain théorique excédentaire tiré de la mise en commun par les entreprises de certaines fonctions.

− Accords bilatéraux conclus avec plus de 24 partenaires et gravitant tous autour d’un unique accord passé avec Hong-Kong. Ce montage Belge permet à toute société originaire de Hong-Kong et établie en Belgique de ne pas payer de taxes sur les dividendes versés. Le dumping n’est toutefois pas l’unique tactique relevant d’une posture offensive.

(d) Pays-Bas : Combo « régime mère-fille » et « sandwich hollandais » Les caractéristiques du dumping fiscal à la néerlandaise sont marquées par une combinaison entre un régime « mère-fille » et ce qui est appelé le « sandwich hollandais ». Ce dernier concept a été décrit plutôt dans cette annexe en tant que « sandwich irlandais ». Les mesures propres aux Pays-Bas en matière de concepts attirant de la masse fiscale sont les suivantes :

− Régime « mère-fille » : régime fiscalement très avantageux qui se construit tel qu’aucune taxation n’est imposée sur les dividendes et les plus-values de cession des holdings.

− Régime pour les impartriés : prime d’impatriation forfaitaire de 30% et un statut de non-résident fiscal en option

− Régime fiscal de la propreté intellectuel : revenus imposables aux taux de 5%

(e) Royaume-Uni : exemple différentiel au niveau de l’attractivité fiscale Les mesures propres au Royaume-Uni en matière d’optimisation fiscale, cherchant à rendre plus attractif pour les entreprises, le territoire britannique, sont beaucoup plus complexes et moins affichées que pour ses voisins continentaux. Ci-après les propositions du gouvernement à cet effet. Comment le gouvernement britannique cherche-t-il à améliorer son attractivité fiscale ?

− Baisse du niveau d’impôt sur les sociétés après la crise − Régime d’exemption de participation : exonération des plus-values de cessions de titres de

participation de filiales détenues à plus de 10% − Régime des sociétés étrangères contrôlées − Exemption de la retenue à la source sur les dividendes, le versement d’intérêts et le payement de

royalties − Exonération sur option des profits des branches d’activités étrangères, notamment au sein des

succursales − Avantage fiscal offert au titre des dépenses de recherche et développement

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Annexe C – Etude de cas : Le libre-échange qui fait monter les prix ? Parmi les mesures que Donald J. Trump souhaite mettre en place, se trouve une réelle volonté de fabriquer 100 % américain afin de promouvoir l’économie des Etats-Unis. Or, il est plus que nécessaire de démontrer que ceci n’est qu’utopique dans un monde mondialisé. L’étude des composants d’un Airbus A380, formant un produit plus « Made in Monde » que « Made in France », se veut ainsi propice à cette situation.

Airbus A380

Composants Origine Moteurs Rolls Royce (UK)

Engine Alliance (US) Train d’atterrissage central Goodrich (US)

Train d’atterrissage avant Messier-Dowty (Canada) (filiale de Safran)

Pneus Michelin (FR)

La volonté protectionniste de Trump se base sur la logique qui suit. La fabrication de produits des champions nationaux à partir de composants implique une augmentation des coûts de consommation intermédiaires (transports, frais de douane, etc.), qui se répercute directement sur le prix final payé par le consommateur. Si le bien n’est plus fabriqué uniquement à partir de composants produits en interne, alors il est impossible de fabriquer sans importer les produits nécessaires à la conception du produit en question et les prix à l’achat augmentent ainsi directement. Il est cependant important de souligner qu’il est impossible de fabriquer des produits issus de ceux qui sont désignés comme des « champions nationaux ». L’hyperspécialisation des pays dans la fabrication de certains biens en particulier, comme Michelin avec les pneus, en font des acteurs mondiaux immanquables. Un champion national qui veut se définir comme leader de son marché fonctionne alors avec d’autres leaders d’autres marchés plus spécifiques pour construire son produit. Le libre-échange a alors rendu les exportations et importations primordiales, allant contre la volonté protectionniste de limiter les importations.

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Bibliographie

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• Clift B., Woll C., « Economic patriotism : reinventing control over open markets », Journal of

European Public Policy, Vol. 19:3, 2012, pp. 307-323.

• Edition Le Seuil, F. Autret, 2007, L’Amérique à Bruxelles.

• Geosophie – Paysages géopolitiques, S. Clairet, 27/03/2014, Litiges commerciaux, quelques enjeux

• HuffingtonPost Mahgreb, B. Jomard, 06/12/2016, USA vs Europe, la guerre économique !

• Infoguerre, 20/10/2014, Les risques et les opportunités liés à la signature d’un traité de libre-échange Europe – Etats-Unis

• La Documentation Française, 30/03/2008, Etats-Unis - Union Européenne, de la concurrence aux

partenariats

• Les Echos, 17/02/2014, Europe/Etats-Unis, La bataille des AOC

• Le Nouvel Economiste, 12/04/2012, Litiges et contentieux commerciaux

• Le Portail de l’IE, 04/03/2016, A. Pinon, La guerre de l’influence en Europe entre les Etats-Unis et la Russie, Partie 1

• Organisation Mondiale du Commerce, Liste chronologique des différends

• Exports.gov, The Trade Promotion Coordinating Committee