perspectives sanitaires & sociales congrès 09
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PSS hors série retranscription du congrès 2009TRANSCRIPT
Hors-sériejuin 2009BIMESTRIEL / 10 €6 NUMEROS PAR AN
34e Congres8-10 avril 2009:le secteur Prive Non Lucratif face aux defis des reformes
2009 : une grande année pour la FEHAP
Lille vient d’accueillir notre 34e congrès les 8-10 avril 2009. Les travaux menéspendant les journées ont montré la nécessité, chaque jour plus évidente, deprendre le temps d’échanger, de partager pour mieux nous connaitre, pourmieux expliquer aux autres qui nous sommes. L’organisation, le contenu etle rythme des sessions ont été appréciés ; vous avez été nombreux à me le dire.
Nos interlocuteurs, ministres, représentants des administrations centrales,hauts fonctionnaires ont ressenti la convivialité et la flamme qui nous éclairaient.
Vous trouverez dans ce numéro de Perspectives Sanitaires et Sociales lereflet de l’ensemble des propos tenus. J’espère que ceux qui étaient présentsy trouveront une traduction fidèle et tous les autres l’envie d’être à Nantesles 7 et 8 octobre 2010.
Juin 2009
EDITO
Antoine Dubout,Président de la FEHAP
3
Directeur de Publication : Yves-Jean Dupuis
Rédactrice en Chef : Ingrid Arnoux
Comité de Rédaction : Philippe Braun, Jean-Marie Creff, Coralie Cuif, Benoît
Dolle, Jean-Claude Guillermet, Michel Hedouin, Bruno Heinry, Simone Timar
Ont contribué à ce numéro : Samah Ben Abdallah, Florian Cahagne,
David Carmier, Muriel Chalancon, Henri-Charles Croizier, Manon Derrienic,
Emmanuelle de Vaublanc, Marine Gey, Magali Martin, Laurent Perazzo,
Annaïta Shirin Zadeh, Maël Simon
Conception graphique : Polen
Réalisation graphique : Atelier des grands pêchers
Image de couverture : Charles Delcourt
Autres Crédits photos : Charles Delcourt, Bertrand Lefebvre, DR.
Imprimeur : Imprimerie Pierre Trollé
Chemin de la Houssoye 62 870 Buire-le-Sec Tél. : 03 21 84 46 60
Régie publicitaire : Mistral Média / Contact : David Bichot
365, rue de Vaugirard 75 015 Paris Tél. : 01 40 02 99 00
Abonnements
FEHAP : 179, rue de Lourmel 75 015 Paris
Emmanuelle de Vaublanc Tél. : 01 53 98 95 21 - Fax : 01 53 98 95 02
Abonnement à l’année civile - Possibilité de souscrire en cours d’année
Abonnement France : 60 euros TVA : 2,10% (port inclus)
En cas de changement d’adresse, merci de nous adresser par courrier
ou télécopie le changement de coordonnées.
CPPAP : N°0709 G 84064 - ISSN : 0757-0481 - Dépot légal à publication
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
le congrès aura lieu les 7 et 8 octobre 2010au palais des Congrès
de Nantes
L’Assemblée Générale se tiendra
le 23 mars 2010 à la Mutualité
à Paris
A noter sur vos agendas
en 2010 :
Reunions en parallele p. 16
Debats p. 22
Réunion des adhérents du secteur social et médico-socialRéunion du secteur sanitaireLa Conférence Nationale des Présidentsde CME des établissements PNL
Le Congrès 2009 de la FEHAP à LilleUn rendez-vous studieux et convivialSur le salon…Une initiative nouvelle : collaborationSciences Po Paris-FEHAPTrois questions à Annie PodeurLa journée de l’IFSCD
Lille : « un pôle d’excellence »de Marie-Christine StanniecAccueil du Délégué Régional, Benoît Dolle
SOMMAIRE
Hors-sérieJuin 2009
Ouverture du Congres p. 12
Allocutions de cloture p. 60
Le defi des reformes p. 28
Discours d’Antoine DuboutDiscours de Valérie LétardDiscours de Roselyne Bachelot-Narquin
La réforme permanente ou……la permanence des réformesLa réforme de l’économie du mieux-être« Nous sommes à un sacré carrefour »Concurrence et éthiqueLes ressources humaines dans les établissements PNLL’évaluation dans les établissementsCoopérer ou ne pas coopérer : risques et opportunitésLa réforme de la gouvernance du secteur PNLLa place des usagers dans les organismes PNLUn Congrès très équilibréSynthèse des travaux : « non vous ne vousreposerez pas ! »
Actualites du congres p. 4
Anticiper les évolutions du champ SSRLa prise en charge des maladieschroniques par le Disease ManagementSanté mentale: échanges avec Edouard Couty
Cahier central détachable
Assembleegeneralestatutaire
Rapport Moral du Conseil d’AdministrationRapport Financier
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4
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ACTUALITÉS I CONGRÈS 2009
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1- Cette année, le congrès de la FEHAP a réuni plus de 800 personnes.
2 et 3- Roselyne Bachelot-Narquin et Valérie Létard sont venuesconclure notre congrès.Ce fut l’occasion de faire un point sur les réformes en cours.
4- Ne pouvant être présente lors des débats, Annie Podeur a participé à la soirée de gala, icien conversation avec Jean-PierreMichel, Sénateur de Haute-Saône.
5- La Délégation régionale du Nord-Pas-de-Calais avait invité le carnavalde Dunkerque à la soirée de gala : animation réussie !
Le Congrès 2009 de la FEHAP à Lille
1
2 3
AG2R - PREMALLIANCE APIC Arès Santé8
Actualites
8
Réunis au Grand Palais àLille, 600 adhérents ontassisté au Congrès annuelde la FEHAP, placé cetteannée sous le thème: «LeSecteur Privé Non Lucratifface aux défis des réformes».
A L’OCCASION DE CE RENDEZ-VOUS devenu
incontournable, les congressistes ont
pu participer à différentes conférences,
ateliers ou réunions et obtenir ainsi un
éclairage précieux sur les réformes en
cours et à venir.
Après deux jours de travail collectif, le
Congrès s’est refermé sur les interven-
tions de Roselyne Bachelot-Narquin,
ministre de la Santé et des Sports, et de
Valérie Létard, Secrétaire d’Etat chargée
de la Solidarité, venues apporter leur
soutien au secteur Privé Non Lucratif.
L’édition 2009 a également attiré une
soixantaine de fournisseurs de services
et d’équipements pour les établisse-
ments de santé, partenaires fidèles pour
la majorité d’entre eux, venus cultiver
leur notoriété et développer leurs contacts
avec les directeurs d’établissements.
Certains sont même repartis avec des
commandes en mains!
Des exposants fidèles et satisfaits pour
92 % d’entre eux qui plébiscitent cet
événement convivial et riche d’échanges.
Les exposants ont également pu prendre
bonne note des deux nouveaux rendez-
vous FEHAP pour 2010 : l’Assemblée
Un rendez-vous studieux et convivial !
LES EXPOSANTS EN 2009
2CSI INFORMATIQUE • ABAQ CONSEIL • ADECCO MEDICAL • AG2R-
PREMALLIANCE • AIA-ARCHITECTES • ALFA-CEGI • ALPES DEIS • ANIOS
• ANTESYS • APIC • ARES SANTE • ASC2I • ASSOCIATION OETH • BERGER-
LEVRAULT • BLUEKANGO • BOUYGUES CONSTRUCTION • CACIC • CAHPP
• CESEGH • CHAVONNET • CHORUM • COFELY • CORWIN • CREDIT COOPE-
RATIF • DALKIA • DEXIA • DUPONT RESTAURATION • GERFLOR • GMF-
ASSURANCES • GROUPE CAISSE D'EPARGNE • GSE • HELPEVIA • ICADE •
INITIAL • L'APPEL MEDICAL • MEDIREST • MERCURI URVAL • MGDIS •
MNH • MOBILIERS MMO • MUTUELLE FAMILIALE • NETLOGON • OCTIME •
OGER INTERNATIONAL • ONTEX - ID • OPCA UNIFAF • POLE SANTE ELIOR
• RESTALLIANCE • SANTELYS • SHAM ASSURANCES • SIEMENS • SOCIETE
GENERALE • SODEXO • SOFTWAY MEDICAL • STAN LE SCOLAN RH •
STERIENCE • STRATELYS • VAUBAN HUMANIS
Générale qui se déroulera le 23 mars
à la Mutualité à Paris et le Congrès qui
s’installera du 8 au 10 octobre 2010 à
Nantes!
Source: Enquête exposants FEHAP 2009
9Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série 9
ACTUALITÉS I CONGRÈS 2009
Le congrès de la FEHAP est toujours un moment d’échangeset de débats dans les salles de réunion… mais aussi dansl’enceinte du salon d’exposition et dans les couloirs.Moments privilégiés pour se retrouver de manière informelle,les coulisses du congrès sont toujours intéressantes!
DANS TOUT CONGRÈS, il y a le côté officiel de l’événement, puis les à-côtés. Cette année,
le congrès de la FEHAP aura, entre autres, été un moment d’une grande convi-
vialité et il régnait, notamment pendant les pauses café, les déjeuners, une
ambiance sympathique.
Par ailleurs, les exposants ont quant à eux pu également développer des anima-
tions autour de leurs stands. Ainsi, par exemple, le stand de la Caisse d’Épargne
a été le lieu de signature d’une convention entre La Vie Active, la Caisse d’Epar-
gne Nord France Europe (CENFE) et Cicobail, filiale crédit-bail immobilier du
Groupe Caisse d’Epargne. Ces trois partenaires ont officialisé leur partenariat
de financement pour la création à Liévin d’un Institut Thérapeutique, Educatif
et Pédagogique (ITEP) de La Vie Active. Le congrès de la FEHAP sert aussi à
ces belles initiatives !
Sur le salon…
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
CETTE COLLABORATION INÉDITE entre la
Fédération et SciencesPo Paris a pu voir
le jour dès le mois de novembre à travers
la création d’un projet collectif, module
pédagogique destiné à placer des étu-
diants en situation professionnelle et
à leur apporter une vision globale du
management de projet. En lien direct avec
les questions sociales, leur mission a eu
pour principal objet de réfléchir à la concep-
tion et à l’organisation des conférences-
débats qui ont ponctué ce congrès 2009
et qui ont donné suite à la table ronde
introductive sur « La réforme perma-
nente ou la permanence des réformes».
Cette initiative nouvelle de la FEHAP a
ainsi constitué un moyen privilégié d’allier
les connaissances, les compétences
et les motivations des étudiants aux
besoins de la Fédération. L’équipe du
projet collectif a, notamment, apporté sa
contribution :
• en matière d’organisation des confé-
rences-débats à travers la définition
des problématiques en binôme avec
les directeurs de la FEHAP, la recher-
che d’intervenants et le suivi relation-
nel, la synthèse des conférences en
vue de la restitution finale
• en matière de communication à tra-
vers la création du logo FEHAP pour
le Congrès, de la rédaction et de la
diffusion des newsletters mensuel-
les, de communiqués de presse et du
dossier de presse
• en matière de relations presse en
définissant les cibles et en établissant
une liste de journalistes à contacter,
en s’adonnant aux relances télépho-
niques les semaines précédant le
Congrès afin de garantir des retom-
bées médiatiques.
Magali Martin,
Chargée de projet
Coordinatrice du projet collectif
Sciences Po
10
Trois questions à…
BENOIT DOLLE, DELEGUE REGIONAL NORD-PAS-DE-CALAIS
Monsieur le délégué régional, que
représente pour votre région l’orga-
nisation d’un congrès de la FEHAP ?
Benoît Dolle : Il est important de rappe-
ler en premier lieu qu’il s’agit d’un signe
de confiance de la part de notre fédé-
ration: le congrès annuel représente un
événement important parce qu’il est un
moment privilégié avec les adhérents.
La région Nord-Pas-de-Calais est connue
pour le dynamisme des initiatives de
ses adhérents, c’est pour cette raison que
nous avons souhaité que s’y organise
cette année ce congrès. C’est, je crois,
aussi pour cette raison que la fédération
a donné suite à ce projet.
En quoi cet évènement peut-il permet-
tre d’améliorer la relation entre la
fédération et ses adhérents? Qu’atten-
diez-vous de ce congrès ?
B.D. : Le thème de ce 34e congrès est
d’actualité; il permet d’échanger sur les
réformes en cours. L’échange est fonda-
mental. La raison d’être d’un congrès,
ce n’est pas seulement la transmis-
sion d’une expertise aux adhérents, mais
c’est aussi et surtout leur apport, leur
réponse aux problématiques actuelles
du fait de leur connaissance du terrain.
Si cette notion d’échange est au coeur
du congrès, alors il a atteint son objectif
et améliore effectivement cette relation.
Quel apport peut être attendu de ce
congrès dans la relation entre la
FEHAP et les acteurs locaux ?
B.D. : La FEHAP, ce sont certes des
adhérents, mais organisés et unis autour
de valeurs communes. La très bonne
couverture médiatique de ce congrès
démontre que la FEHAP porte un projet
connu et reconnu par tous les acteurs.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Une initiative nouvelle :collaboration Sciences Po Paris-FEHAP
Sans doute, les avez-vous croisés lors de vos déplacementsau Siège ou pendant le Congrès… Sept étudiants duMaster Affaires Publiques de l’Institut d’Etudes Politiquesde Paris ont participé à l’organisation du Congrès 2009de la FEHAP.
Actualites
11Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série 11
ACTUALITÉS I CONGRÈS 2009
Trois questions à...
ANNIE PODEUR, DIRECTRICE DE LA DHOS
Madame la Directrice de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins, quel
sens donnez-vous à votre présence au 34e congrès de la FEHAP ?
Annie Podeur : Par ma présence, je tenais à souligner la qualité du dialogue
avec la FEHAP. Ce congrès est également l’occasion d’aller à la rencontre des adhé-
rents de la FEHAP afin de pouvoir répondre à leurs questions et à leurs demandes.
Pour vous, Madame Podeur, quelle place tient le secteur Privé Non Lucratif dans
l’offre de soins hospitalière ?
A. P. : Sa place est capitale à deux titres. En premier lieu, ce secteur est une
entité aux caractéristiques propres. Parce que ses adhérents sont des associa-
tions, des fondations des congrégations, des mutuelles, ils constituent un paysage
diversifié avec, au cœur de leurs projets, la qualité des soins. Ensuite, son offre
dans de nombreuses spécialités en lien avec le secteur social et médico-social
la rend acteur du décloisonnement entre les secteurs, tel que souhaité dans le
projet de loi HPST.
Quel rôle joue la FEHAP dans l’actuelle discussion de ce projet de loi ?
A. P. : Comme toute fédération, organisation professionnelle, la FEHAP a apporté
certaines modifications au projet de loi, prises en compte ab initio par le Gouver-
nement et d’autres par le Parlement. Ce qui importe, c’est la refondation de
notre système de santé par un travail en confiance avec les acteurs, ayant chacun
un rôle clair. En tant que directrice de la DHOS, mon rôle est d’apporter, à partir
de ce travail, un éclairage et des éléments de réponse à la Ministre.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Berger-Levrault Bleue Kango Chavonnet 12
Une communication intensifiée en amont de l’évènement
La communication en amont du Congrès a été intensifiée pour apporter une infor-
mation progressive sur l’organisation et le déroulement de l’évènement. Ainsi,
en complément de la traditionnelle circulaire envoyée début janvier à chaque adhé-
rent, un préprogramme a été réalisé pour faire connaître les grandes lignes des
travaux afin que chacun puisse s’approprier les thèmes abordés et nourrir les
discussions durant les trois jours.
Une newsletter mensuelle spéciale Congrès a été adressée à partir du mois de
janvier pour apporter une information précise et incitative aux participants sur
l’accueil et le programme des festivités.
Un nouveau dispositif de réservation des hébergements a été testé cette année
en partenariat avec les hôtels du Groupe Accor sur Lille et son agglomération
afin de permettre aux participants de bénéficier de tarifs préférentiels et de réser-
ver leurs chambres d’hôtel directement en ligne et au travers un numéro dédié.
C’est ainsi que plus de 730 chambres dans 14 hôtels étaient à la disposition des
participants du Congrès de la FEHAP.
Une programmation riche et de qualité
La FEHAP a souhaité que cette édition 2009 s’inscrive dans la perspective de la
distinction entre l’Assemblée générale statutaire et le Congrès annuel prévu
pour l’année 2010. Cette tendance a été ainsi amorcée nettement dans son
déroulement, avec une première partie consacrée à l’Assemblée générale le
premier jour pour, ensuite, ouvrir les travaux de réflexions et d’échanges du
Congrès sur le thème du «secteur Privé Non Lucratif face aux défis des réformes»
pendant les deux jours suivants.
Le programme de cette année a reconduit l’organisation de conférences-débats
thématiques se déroulant en parallèle, déjà amorcée l’année précédente. Ce
programme c’est vu complété par l’organisation d’une table ronde introductive
avec pour objectif de donner de la hauteur à nos réflexions et de prendre le
temps, tous ensemble, de situer notre activité dans une perspective globale et
de long terme. Pour terminer cette programmation, une personnalité de grande
qualité et proche de nos préoccupations a été sollicitée comme Grand Témoin
Les coulisses du Congrès…
Actualites
de nos travaux. Positionné comme obser-
vateur de nos échanges, il a su nous
apporter son regard avisé et ses éclai-
rages sur les enjeux de notre secteur.
Des petites initiatives pour un Congrès réussi
Chaque année, le congrès est l’occasion
pour les adhérents de découvrir les
nouveautés de la FEHAP.
Pendant ces trois jours de Congrès, les
participants ont pu découvrir chaque
matin une Lettre du Congrès leur dévoi-
lant les informations importantes de
la journée à venir et un bilan de la veille.
Ce document qui a remporté un vif suc-
cès sera amélioré l’année prochaine.
Le Congrès a également été un moment
privilégié pour la diffusion d’un docu-
ment réalisé par Sandrine Haas et
Emmanuel Vigneron sur la répartition
des établissements de la FEHAP en
2009. Sous la forme d’une carte de
France, ce document permet de décou-
vrir la répartition géographique par type
d’activités des établissements adhé-
rents de la FEHAP.
Petite nouveauté, la FEHAP avait prévu
sur son stand un programme d’échange
avec les différents responsables de la
Fédération. Ainsi, pour des questions
spécifiques, chaque adhérent a pu dis-
poser d’un moment privilégié de dis-
cussion sur le stand. Par exemple,
Véronique Chasse, en charge du pro-
jet Achats à la FEHAP, a pu rencontrer
les adhérents qui avaient des questions
spécifiques aux achats. Elle a ainsi pu
présenter la plateforme Achats et la
documentation se rapportant à ce projet.
L’édition 2009 du Congrès a été l’occasion pour la FEHAPde tester de nombreuses innovations dans l’organisationet dans la programmation de cet évènement-phare pournotre Fédération.
13
ACTUALITÉS I CONGRÈS 2009
CAPRARO Pascale, DUR Francis, GOZE Cécile, MARQUIS Daniel, NIO Caroline, PENNETIER Arnaud, RIOU Nicole, ROBE Jean-Marie,
DELATTRE Bruno, LE GUEUX Stéphane, MOGAN Michel, DUPERRON Thérèse, JOURDAN Vanessa, LAPLENIE Franck, MAHIEUX Antoine,
PIOT Bernardin, DUFRESNE Véronique, WANWANSCAPPEL Ghyslaine, BAUDOUIN Cécile, BINET-MARRIS Fabienne, BLIN Christine,
DROCOURT Dominique, BOUTEILLER Laurence, BREYNE Jean-Philippe, BURBAN Frédérique, CAROF Marie-Claire, CORREIA-LOPES
Brigitte, DUSSEAU Jocelyne, FREDJ Karen, FULLER Elisabeth, GATESOUS Nathalie, GERVAIS Véronique, GIRONE Carole, HAUDECOEUR
Marie-Josèphe, HEOUD Chantal, JALAIN Geneviève, JONEAU Christine, LE BORGNE Rolande, LE MAIRE Viviane, MARTIN Carole,MASSET
Soasig, MATYS Nathalie, MORAN Sylvie, PALMA Dominique, PAUGAM Marie-Line, PELERIN Lydie, PICARD Annie, PROUTEAU Chantal,
RIESTER Marie-Hélène, ROLLAND Patricia, RUBAL Danielle, RYCHEN Eric, SCHAAL Pierre, SCHMIDT BERKEL Sonia, SOUILLARD Marianne,
TEYSSEDRE Sonia, THEVENIN Elisabeth.
La journée de l’IFSCD
Le 7 avril 2009, en cette veille du congrès, l’Institut de Formation avait organisé unejournée autour du thème « Anticiper les mutations – La place des directeurs dans uneépoque marquée par des transformations profondes ».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Hélène Gisserot, Présidente
du Conseil scientifique,
Yves-Jean Dupuis, Directeur
général de la FEHAP et
Florence Leduc, Directeur
de la Formation et de la Vie
associative ont remis
les diplômes aux lauréats
du Master : véritable
récompense pour ces étudiants
qui ont mené de front études
et activité professionnelle.
Ouverture
14
AU NOM DE MARTINE AUBRY que j’ai le plaisir
de représenter, je souhaite à chacune
et à chacun d’entre vous la bienvenue
dans notre ville, la bienvenue pour ces
journées de travail – j’ai regardé le pro-
gramme– qui vont être studieuses.
C’est avec un grand plaisir que nous
accueillons aujourd’hui votre Congrès
comme nous accueillons maintenant
avec un peu d’habitude dans notre ville.
C’est pour nous toujours un vrai plaisir
de recevoir des personnes qui viennent
de partout pour leur montrer ce qu’est
notre ville. Nous en sommes généra-
lement tous très fiers, nous pensons que
c’est la plus belle ville qui existe au
monde, je n’hésite pas. D’ailleurs, nous
avons eu la chance d’avoir une image
de marque forte avec Lille 2004 qui a
effectivement dans le monde un petit peu
changé cette image du Nord travailleur,
triste, sombre et un peu abandonné.
C’est vrai qu’aujourd’hui, et on le disait
tout à l’heure en arrivant, François Grateau
a commandé exprès pour vous un temps
gris pour que vous puissiez être studieux
pendant ces journées de travail et pour
que vous puissiez voir ce qu’est l’esprit
du Nord, un temps gris mais du travail,
de l’amitié, de la convivialité. Comme
cela, quand vous repartirez, vous serez
complètement dans notre esprit habi-
tuel. C’est vrai que vous allez peut-être
avoir un peu le temps pour voir la ville,
la qualité architecturale sur laquelle
nous essayons de travailler pour l’amé-
liorer, voir que c’est une ville qui est une
plaque tournante au niveau de l’Europe.
Nous avons une gare de transport SNCF
qui est une des premières aujourd’hui.
Nous avons la chance d’avoir le TGV,
l’aéroport, un port fluvial, même si on
n’a pas l’impression de le voir obligatoi-
rement quand on se promène dans la
ville. Nous avons donc une dynamique
économique forte. On a travaillé, il y a
quelques années à un projet qui était un
peu absurde à l’époque et qui s’appelait
Eura santé qui, aujourd’hui, est un pôle
d’excellence.
Nous avons aujourd’hui un deuxième
pôle d’excellence qui démarre qui est
Euratechnologies. Nous avons la volonté
de développer sur le nord de la métropole
un autre pôle technologique au niveau
du textile, un pôle sur Villeneuve-d’Ascq
au niveau de la recherche, donc une
région qui n’a pas envie de rester simple-
ment une région ouvrière mais d’être
dans un vrai challenge pour le dévelop-
pement demain et pour rester à la pointe
de la ville.
Nous souhaitons rester une ville qui,
bien sûr travaille, mais qui sait aussi
s’amuser. Je vous ai évoqué Lille 2004,
il y a aujourd’hui Lille XXL, Lille 3 000.
Lille : « un pôle d’excellence »
Il est de coutume que le Congrès de la FEHAP soit ouvert par la municipalité de laville accueillant la FEHAP. Marie-Christine Stanniec, Adjointe au Maire de Lille, areprésenté Martine Aubry dans cet exercice et a encouragé le dynamisme lillois dansles secteurs sanitaire, social et médico-social.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
15
OUVERTURE I CONGRÈS 2009
Si vous me demandez pourquoi 3000?,
c’est parce que nous sommes sûrs qu’en
3000 nous serons toujours aussi dyna-
miques et, donc, nous avons une vision
à long terme. Mais ceci est un peu pour
vous donner envie, si vous n’avez pas le
temps de vous promener aujourd’hui, en
tout cas de revenir parmi nous parce
qu’aujourd’hui, pendant ces trois jours,
vous êtes quand même là pour travailler.
En regardant votre programme, j’ai vu
qu’il y avait effectivement beaucoup de
sujets extrêmement importants pour les
établissements que vous représentez.
Il est vrai que nous sommes dans un
contexte législatif fort évolutif, que ce
soit la loi en cours actuellement sur
l’Hôpital, Patients, Santé, Territoires, la
loi qui devrait arriver sur la psychiatrie
mais ne sachant pas encore si c’est l’as-
pect sécuritaire de la psychiatrie, celle
sur le cinquième risque parce que nous
avons effectivement un grand problème
de prise en charge dans notre société
qui risque d’arriver avec les personnes
vieillissantes et qui, donc, ont une problé-
matique de santé complémentaire qui
va en augmentant, y compris une meil-
leure prise en charge du handicap et donc
la nécessité d’avoir des lois qui amènent
un peu plus d’équité et de justice.
Donc un contexte législatif qui évolue avec
une réflexion: quelle sera la gouvernance
demain? Quelle sera la place des élus?
Dans la réflexion et dans la prise en
charge. Comment les élus vont-ils pou-
voir s’inscrire dans ce partenariat-là
avec les directeurs d’hôpitaux? Avec les
médecins? Avec les gestionnaires? Parce
je pense, et nous pensons avec Martine
Aubry, qu’il est important que l’ensem-
ble des partenaires, pas seulement une
catégorie, mais l’ensemble participe à
la réflexion et à la gestion parce qu’une
gestion dynamique c’est un ensemble
de personnes qui avancent ensemble.
C’est vrai que la FEHAP est un peu origi-
nale par rapport à d’autres fédérations.
Vous avez une culture du médico-social
qui vient un petit peu aplanir, amadouer,
rendre un peu le sanitaire moins rude
qu’il ne l’est pour d’autres fédérations.
Vous avez une façon d’aborder effecti-
vement les problèmes un peu différente
tout en ayant toujours –et cela, je pense,
c’est quelque chose qui est, en tout cas
avec les partenaires de la région que je
côtoie pour un certain nombre de réu-
nions de travail et des projets que nous
avons concrétisés– une volonté d’avoir
une gestion, on va dire de type privé, qui
est effectivement une gestion efficace
tant au niveau des ressources person-
nelles que des ressources financières
mais toujours en gardant ce point assez
particulier qui est le vôtre: vous n’êtes pas
un service privé, vous êtes bien un service
qui reste avec cette culture du service
public, du service au public avec ce besoin
de répondre toujours à un besoin de
proximité et non pas seulement et sur-
tout pas à un besoin de rentabilité.
Je crois que ces éléments sont impor-
tants. C’est peut-être ce qui va faire que
vous puissiez vous adapter plus facile-
ment que d’autres structures, en tout cas
au niveau de notre région, vous le savez,
notre région présente un retard en termes
de santé publique majeur. Nous avons
un taux de mortalité qui est de sept ans
supérieur à la moyenne nationale. C’est
malheureusement un taux qui n’a pas
tendance à diminuer encore aujourd’hui.
Je le dis souvent, dans notre région, tout
le monde a sa place parce que malheu-
reusement nous sommes loin d’avoir
répondu aux besoins de la population.
Et c’est vrai qu’au niveau de la santé,
c’est un vrai problème, un petit moins
au niveau du médico-social parce que
le Conseil général du Nord a beaucoup
investi dans l’accès et la prise en charge
des personnes handicapées et des per-
sonnes âgées. Donc, nous avons un peu
moins de retard sur cette question-là,
on est dans la moyenne nationale mais, en
matière de santé, on a un retard beau-
coup plus important.
Alors c’est vrai qu’il y a au niveau du
Gouvernement beaucoup de plans qui ont
été annoncés, des plans qui sont extrê-
mement intéressants, qui marquent
bien la réflexion et un mode de prise
en charge intéressant. Ce qui manque
aujourd’hui, quand même de façon impor-
tante, ce sont les financements derrière
et je crois que l’ensemble des établis-
sements de cette région font le même
constat. L’organisation, la réorganisation,
ce sont des choses qu’ils connaissent,
qu’ils savent faire. Nous sommes prêts,
comme toujours, que ce soit les Privés
Non Lucratifs ou les publics, à faire des
efforts et, récemment, les uns et les
autres ont montré qu’ils étaient encore
capables de faire des efforts majeurs.
Pour autant, il y a une nécessité d’avoir
un regard particulier sur cette région.
Alors c’est vrai que la FEHAP est ici bien
implantée, de nombreux établisse-
ments, des directeurs et des équipes
très dynamiques, porteurs de projets,
capables de réfléchir en partenariat, en
convention, pour avoir cette vision d’ac-
compagnement et de prise en charge
égalitaire sur l’ensemble du territoire.
Et on voit bien, dans certains secteurs qui
étaient un peu abandonnés, des conven-
tions que vous êtes en train de mettre
en place et, en tout cas, en tant qu’élus,
c’est un travail que nous regardons de
très près parce qu’il nous semble impor-
tant effectivement que, quel que soit
l’endroit où on se trouve dans cette région,
comme partout en France, il y ait une
prise en charge de proximité de qualité.
Après, on peut s’inscrire dans une filière
de soins mais, au moins, que l’on soit
sûr que l’accès à la santé ou au médico-
social soit identique pour l’ensemble de
la population.
C’est vrai que le contexte n’est pas sim-
ple, évolutif, nécessité effectivement de
s’adapter, d’être innovant, de réfléchir, en
tout cas les débats que vous allez mener
vont participer à cette réflexion. Je ne
doute pas que les représentants de la
FEHAP nous feront part, me feront part,
de l’ensemble de vos travaux pour que
nous puissions aussi profiter de cette
réflexion pour réfléchir, nous en tant
qu’élus, à d’autres niveaux de respon-
sabilité parce qu’effectivement chacun
a une part de travail à mener et, ici, je sais
que vous êtes des acteurs importants,
que vous êtes des acteurs de proximité
et avec lequel nous avons déjà travaillé
et nous travaillerons encore et la preuve
a déjà été faite que ce soit dans le cadre
de partenariats avec le privé ou avec les
fédérations hospitalières publiques, la
FEHAP est une force de proposition.
Alors c’est vrai que François Grateau
–je le cite plusieurs fois parce qu’on tra-
vaille au niveau de la conférence sanitaire
de territoire avec les trois fédérations–
dit toujours que lui est tout petit par rap-
port à la FHF et qu’il est effectivement
moins écouté. Mais je puis vous assurer
que la FEHAP dans cette région n’est pas
du tout petite et n’est pas du tout non
entendue parce que vous avez des por-
teurs de projets extrêmement importants
et, pour nous, c’est un petit clin d’œil
que je voulais leur faire parce que je
crois qu’effectivement vous avez un rôle
à jouer dans l’espace public.
Alors bon courage, bons travaux et,
avec Martine Aubry et toute l’équipe
municipale, nous sommes encore une
fois très heureux de vous accueillir.
Marie-Christine Stanniec,
Adjointe au Maire de Lille
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
16
C’EST À MOI QUE REVIENT L’HONNEUR, au
nom de la Délégation régionale, de vous
accueillir à Lille pour vous souhaiter
la bienvenue en tant que Délégué régio-
nal à ce 34e Congrès de la FEHAP. J’en
suis particulièrement heureux et j’espère
que vous trouverez à Lille réponses à
beaucoup de vos questions, à vos préoc-
cupations professionnelles, ce qui est,
après tout, le but d’un congrès. J’espère
aussi que vous garderez de votre pas-
sage à Lille –ce n’est peut-être pas le
premier – quelque chose de bien plus
que le souvenir d’un congrès profession-
nel. Cela n’a pas été le seul travail de
la Délégation régionale mais nous avons
aussi un peu œuvré dans ce sens-là.
Vous avez souhaité que cette année le
thème du Congrès porte sur les réformes
auxquelles est confronté le secteur
Privé Non Lucratif. Compte tenu de l’ac-
tualité que Marie-Christine Stanniec a
rappelée, c’est un thème qui s’impose
quasiment. Le rythme des réformes
auquel on est soumis ou parfois le rythme
de ce qu’on nous présente comme étant
des réformes est soutenu, il s’accélère
et il pose d’ailleurs fort justement la
question de la réforme permanente ou
de la permanence des réformes.
Au-delà de ce thème général, le Conseil
d’Administration, présidé par Antoine
Dubout, a souhaité que la question soit
posée d’emblée, non pas dans le cercle
de la seule Fédération qui est la nôtre,
mais bien dans le cadre plus large du
secteur Privé Non Lucratif. Cela rend
ainsi l’exigence plus importante mais
ouvre également moult possibilités et
nous allons ainsi contribuer ensemble
à positionner notre Fédération dans son
champ naturel d’actions, avec ses alliés
naturels, ses partenaires naturels, ceux
du secteur PNL.
Nos travaux, je n’en doute pas, vont
donc être riches et constructif. Mais le
rôle du Délégué régional, au moment
de l’ouverture d’un congrès, c’est évidem-
ment également de présenter sa région,
d’en souligner les atouts, de promou-
voir ses richesses et, pour le Délégué
régional Nord/Pas-de-Calais que je
suis, c’est finalement une tâche des plus
simples, des plus élémentaires.
Tant de choses connues ont été dites sur
cette région, sur le Nord, sur le Nord /
Pas-de-Calais, que finalement je suis
dispensé d’un certain nombre d’énu-
mérations, la littérature vous a parlé du
Nord-Pas-de-Calais. On a même le 7e Art
tout récemment qui vous en a parlé lon-
guement et largement. Et donc, finale-
ment, tout a été dit sur la région, les pla-
ges, la mer, les montagnes, le soleil, ce
n’est donc pas la peine de s’y appesantir.
Ce qui est plus important, je crois et ce
sur quoi il faut rester un petit moment,
ce sont les qualités morales de cette
région et de ses habitants. C’est la région,
on l’ignore souvent, la plus jeune de
France. C’est la région qui, démogra-
phiquement, est la plus dynamique de
France. C’est la région qui est aussi
– malgré quelques déperditions – la
région la plus densément peuplée de
France, bien sûr après la région capitale,
mais la région capitale est-ce une région?
C’est surtout la région qui, au cours des
siècles, mais n’exagérons rien, en tout
cas au cours des décennies passées,
a donné la preuve, je crois à l’ensem-
ble de la Nation, de la capacité d’adap-
tation qu’elle était capable de mener
sur une période qui s’est étendue sur
des décennies.
De ces efforts continus, elle garde quel-
ques traces qui se reflètent négative-
ment dans un certain nombre d’indica-
teurs et, notamment, d’indicateurs de
santé. Mais elle développe aussi et sur-
tout une formidable capacité d’initiative
qui lui est, en fait, devenue comme une
seconde nature et qui, je crois, la carac-
térise avant tout.
Dans le champ d’activités qui est le nôtre
–sanitaire, social et médico-social–, il
faut prendre en compte les institutions
adhérentes, savoir ce qu’elles sont et ce
qu’elles développent.
Côté institution, quelques grands établis-
sements, quelques grands noms aussi
liés à l’histoire de la région, alors je ne vais
pas citer à nouveau François Grateau.
Enfin, je ne voulais pas le faire mais je suis
obligé, je vais citer le Groupe Hospitalier
de l’Institut Catholique de Lille, « la
catho», comme on dit ici, la seule faculté
de médecine non publique de France
qui développe ici à Lille et sur sa métro-
pole une activité qui n’est pas une acti-
vité complémentaire mais de structu-
ration du tissu sanitaire ; l’AHNAC,
Une formidable capacité d’initiative
La Délégation de la région Nord-Pas-de-Calais s’est largement impliquée dansl’organisation de ce 34e Congrès avec à cœur le bon déroulement de cette réunionprofessionnelle, mais aussi le plaisir de faire découvrir cette région !Discours d’ouverture de Benoît Dolle, Délégué régional de la FEHAP.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Ouverture
OUVERTURE I CONGRÈS 2009
l’Association Hospitalière Nord-Artois-
Clinique, avec ses établissements, tel-
lement liée à l’histoire de ce bassin
minier, tellement liée à ces difficultés
passées, tellement liée à son dévelop-
pement nouveau; la Fondation HOPALE
à Berck, un petit peu plus loin au sud-
ouest –vous savez, il y a un sud-ouest
aussi dans le Nord-Pas-de-Calais– que
j’ai l’honneur de servir et qui essaie de
faire confluer au quotidien et de tra-
duire ce que peut être la richesse de
la coexistence au sein de mêmes struc-
tures d’une activité sanitaire de court
séjour, d’une activité de rééducation et
d’une activité médico-sociale.
A côté des institutions, les initiatives. Il y
en a de nombreuses, je ne vais pas vous
les citer: les initiatives menées évidem-
ment par les établissements mais par la
Délégation régionale également, notam-
ment à la faveur de son projet straté-
gique, toutes initiatives que vous retrou-
verez dans le numéro spécial congrès
de «Perspectives Sanitaires et Sociales»
auquel il nous a été donné de participer,
que nous avons préparé pour vous. Je vais
en citer une qui, à notre sens ici, Délé-
gation régionale, est exemplaire: c’est la
création à venir sur la métropole, puis sur
l’ensemble de la région et, peut-être,
au-delà qui sait, d’une plate-forme de
pathologies chroniques sur laquelle
nous avons travaillé et pour laquelle
la Délégation régionale a obtenu, grâce
aussi à la boîte de réception qu’a faite le
siège, le soutien financier du ministère.
La Délégation régionale Nord/Pas-de
Calais et, plus largement, la FEHAP puis,
plus largement encore, le secteur Privé
Non Lucratif dans cette région, jouent
un rôle important. Ce rôle doit être sou-
tenu et développé. Permettez-moi de
voir, Monsieur le Président, dans le fait
que vous ayez souhaité organiser ici à
Lille, aujourd’hui, ce Congrès, d’abord un
signe de soutien de la Fédération, un signe
de reconnaissance qu’elle nous donne
et dont, je l’espère, nous serons dignes.
Mesdames et Messieurs et chers collè-
gues, au terme de ce petit message que
l’on m’a demandé de vous adresser, je
veux vous faire part une fois de plus de
toute la fierté que la Délégation régionale
éprouve à vous accueillir aujourd’hui. Je
veux vous souhaiter un bon, un excellent,
un fructueux Congrès et un bon, un excel-
lent, un fructueux séjour dans cette ville,
dans cette région.
D’autres l’ont dit, je le dis également,
profitez de votre présence ici pour assis-
ter au Congrès, mais également pour
découvrir cette ville, cette ville mer-
veilleuse et pour découvrir cette région,
cette région merveilleuse et attachante.
Benoît Dolle,
Délégué régional de la FEHAP
18
POUR LE SECTEUR DES PERSONNES ÂGÉES,
Sabine Fourcade rappelle que la tarifi-
cation en train de se développer est fon-
dée sur des grilles d’objectifs concer-
nant tant la charge en soins que le niveau
de dépendance, pour tenir compte des
besoins des personnes accueillies: une
dépendance plus lourde entraîne un
besoin d’encadrement et d’accompagne-
ment plus lourd.
La question est plus complexe dans le
secteur du handicap, où il est plus diffi-
cile de faire le lien direct entre le degré de
handicap de la personne et son besoin
d’accompagnement.
Laurent Vachey estime également que
l’approche tarifaire est, par construction,
plus compliquée dans le champ du han-
dicap où la question du projet de vie,
même si bien sûr elle n’est pas absente
du côté des personnes âgées, se pose
différemment. Toutefois, on ne peut en
rester aux modes de tarification actuels,
au regard des écarts constatés et des
défauts des modes de tarification (prix
de journée) qui ne permettent pas de
démontrer que la répartition des moyens
est équitable par rapport aux besoins des
personnes et au projet des structures.
Concernant les Etablissements d’Hé-
bergement pour Personnes Agées
Dépendantes (EHPAD), Laurent Vachey
précise que le calcul sur le nombre d’éta-
blissements qui seraient concernés par
la convergence tarifaire en 2009 a été
fait à partir de données statistiques
moyennes, mais sans pouvoir individua-
liser la liste de ces établissements, le
système d’informations dont dispose la
CNSA ne le permettant pas aujourd’hui.
Pour le secteur du handicap, Sabine
Fourcade précise qu’il n’est pas question
d’appliquer une convergence tarifaire
massive et brutale. Il s’agit de mettre en
place des tarifs plafonds pour les Etablis-
sements et Services d’Aide par le Travail
(ESAT) qui sont financés par des crédits
Etat. Cette mesure existe déjà pour l’en-
semble des établissements financés
par l’Assurance-Maladie. Les Centres
d’Hébergement et de Réinsertion Sociale
(CHRS) sont également concernés.
Lorsque certains établissements ont des
coûts manifestement très supérieurs
à ceux de la majorité des structures
qui accueillent des publics comparables,
les tarifs plafonds les obligent à ne pas
progresser autant que ceux ayant des
coûts inférieurs.
Sabine Fourcade et Laurent Vachey
lancent un appel à la FEHAP et à ses
adhérents du secteur du handicap, pour
travailler ensemble à objectiver les
mécanismes de tarification: les acteurs
doivent s’emparer de cette réforme.
Les adhérents interrogent les interve-
nants sur le problème des délais de réa-
lisation des projets trop longs, au regard
de l’urgence des besoins. Le Gouverne-
ment communique sur la création de
places, afin de renforcer les capacités
d’accueil sur chaque territoire. Or, la
CNSA dispose chaque année de crédits
non utilisés.
Il y a en 2008 une sous-consommation
des crédits dont la gestion est confiée
à la CNSA, d’un peu plus de 500 millions
d’euros. Cette sous-consommation est
concentrée sur le secteur des personnes
âgées. Sur le secteur du handicap, l’en-
semble des crédits est consommé. Cette
sous-consommation s’explique par les
retards de la médicalisation de certains
établissements pour personnes âgées
(cumul de retard et de verrous adminis-
tratifs au niveau local) et également par
l’écart constaté entre le moment où les
places nouvelles sont autorisées et le
moment où elles ouvrent.
Depuis 2005, ces crédits sont sanctua-
risés dans les comptes de la CNSA. Tous
les crédits non consommés dans l’année
se traduisent par un excédent au moment
de la clôture des comptes de la Caisse.
Quelle est l’utilisation de ces crédits ?
C’est d’abord les programmes d’aide à
l’investissement. Par ailleurs, les excé-
dents qui n’ont pas été consommés
dans l’année sont réintroduits pour la
construction de l’Objectif Global de
Dépenses (OGD) de l’année suivante.
L’Etat souhaite également vérifier cette
année sur le terrain l’ensemble des pro-
cédures, pour étudier les allégements
ou modifications qui permettraient
d’accélérer le dispositif.
L’objectif de la Commission d’appel à
projets qui doit succéder au Comité régio-
nal de l’organisation sociale et médico-
sociale, est notamment d’accélérer la
procédure.
Concernant la mise en œuvre des Etats
Prévisionnels de Recettes et de Dépenses
(EPRD) pour les ESAT, Sabine Fourcade
confirme qu’ils ne seront pas mis en place
rapidement, mais de manière pragma-
tique, en concertation avec le secteur.
S’il est possible de le faire pour la cam-
pagne budgétaire 2010, ce sera fait.Sinon,
la mise en œuvre sera reportée en 2011.
Les intervenants sont interrogés sur les
écarts constatés entre les évolutions de
la masse salariale et les moyens alloués
aux structures dans le cadre des enve-
loppes limitatives départementales.
Réunion du secteur social et médico-social
Comme chaque année, le Congrès est l’occasion de se rencontrer et de dresser unlarge panorama des principales questions du secteur social et médico-social.C’est en présence de Sabine Fourcade, Sous-directrice des institutions, des affairesjuridiques et financières à la DGAS, et de Laurent Vachey, Directeur de la CNSA, queces échanges ont eu lieu.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Reunions en Parallele
19
RÉUNIONS EN PARALLÈLE I CONGRÈS 2009
Sabine Fourcade répond que si l’on
regarde l’ensemble du secteur financé
par l’Assurance-Maladie, il y avait pour
2008 un taux d’évolution de + 2,15 %.
L’ensemble des conventions collectives
nationales, des avenants nationaux et
des augmentations salariales se situait
dans cette enveloppe et les enveloppes
limitatives régionales comportaient un
taux d’évolution identique pour les struc-
tures financées dans le cadre de l’OGD.
Pour les établissements financés par
l’aide sociale Etat, les contraintes bud-
gétaires étaient plus dures et il n’a pas
été possible d’obtenir le même niveau
de revalorisation.
Pour 2009, le taux d’actualisation est de
+1,6%, qui se retrouve dans l’ensemble
des enveloppes limitatives Etat et Assu-
rance-Maladie. Il est moins élevé que
l’année dernière en raison de contraintes
budgétaires et d’un ralentissement de
l’inflation qui fait qu’un taux de +1,6%
sur une inflation prévisionnelle de +0,4%
permet quelques évolutions. Les enve-
loppes départementales ont toutes au
minimum un taux de +1,6%. Pour ce qui
concerne les établissements financés
par l’Etat, le taux est de +1,6%; pour les
établissements financés par l’OGD, le
taux est plus élevé: il est de +2% sur les
dépenses salariales. Cela ne veut pas
dire que chaque structure aura un taux
de reconduction de +1,6% ou de +2%,
mais cela dépendra de la situation de
chaque structure.
Concernant la question du différentiel
de charges entre les structures publi-
ques et celles du secteur Privé Non
Lucratif, Yves-Jean Dupuis, Directeur
Général de la FEHAP, rappelle que ce
n’est pas tant une remise à plat des
conventions collectives qui inquiète,
que l’écart entre les structures publi-
ques et celles du secteur PNL. C’est
ce différentiel qui pose problème.
Sabine Fourcade souligne que la sup-
pression de l’opposabilité aux finan-
ceurs accompagne logiquement la modi-
fication de la tarification fondée sur les
charges des établissements. Dans un
autre mode de tarification, par exemple
celui des EHPAD, on a une tarification
qui n’est plus fondée directement sur les
charges, même si le lien existe, mais
sur des référentiels relatifs aux person-
nes accueillies (PATHOS, AGGIR).
Concernant la réforme de la tarification
des Services de Soins Infirmiers A Domi-
cile (SSIAD), une étude a été conduite
sur les patients lourds accompagnés
par ces services. La FEHAP y a participé
activement. Elle a donné lieu à une
remise de conclusions qui seront pro-
chainement publiées. Elle a conduit à
lancer une réforme de la tarification
de ces services, avec un objectif double:
mieux prendre en charge les patients
lourds et assurer une meilleure équité
dans la répartition des ressources entre
services.
Interrogée sur la redéfinition des mis-
sions des EHPAD, Sabine Fourcade consi-
dère qu’il faut y travailler. Le groupe de
travail sur le métier de médecin coor-
donnateur doit réfléchir au statut médi-
cal des EHPAD et sur leur capacité à
accompagner des résidents souffrant
de pathologies de plus en plus lourdes.
Laurent Vachey ajoute que la continuité
des prises en charge sanitaire et médico-
sociale est absolument indispensable.
La réussite des Agences Régionales
de Santé (ARS) dépendra de leur faculté
à rendre le parcours d’une personne
âgée ou d’une personne en situation de
handicap plus fluide qu’il ne l’était avant
leur création, entre la médecine de ville,
l’hôpital, le médico-social et l’accompa-
gnement à domicile. Par ailleurs, il n’est
pas question de faire des EHPAD des
hôpitaux gériatriques.
S’agissant de la formation des profes-
sionnels intervenant auprès des enfants
en situation de handicap, Sabine Fourcade
reconnaît que la question des Auxiliaires
de Vie Scolaire est un sujet complexe
qui doit être travaillé en interministériel.
Une mission est en cours, pour essayer
de proposer des voies d’amélioration
pour ces personnels.
Laurent Perazzo,
Adjoint de Direction du Secteur social
et médico-social FEHAP
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
20
Antoine Dubout, Président de la FEHAP
«Grâce à l’expérience de terrain et aux
responsabilités actuelles de nos interlo-
cuteurs aujourd’hui, ce débat s’annonce
très intéressant».
Dominique Deroubaix, DARHNord-Pas-de-Calais, représen-tant Annie Podeur, DHOS
« Le projet de loi « Hôpital, Patients,
Santé et Territoires» n’est pas une révo-
lution, ni une véritable rupture, mais il
s’inscrit plutôt dans une évolution qui,
depuis fort longtemps, a inscrit pro-
gressivement l’échelon régional comme
le niveau le plus opérationnel.
Rappelez-vous – pour quelques-uns
d’entre nous, il y a 30 ou 35 ans– il y avait
les Services Régionaux des Affaires
Sanitaires et Sociales, les SRASS, puis
il y a eu les DRASS, dans la période la
plus récente en 1996 on a créé les Agen-
ces Régionales de l’Hospitalisation.
A titre personnel, je pense qu’on est
dans la continuité d’un processus qui
s’est progressivement affirmé. On le
voit d’ailleurs sur le plan de l’Adminis-
tration. N’oubliez pas que la réforme
des Agences Régionales de Santé relève
aussi d’une réforme plus importante,
dite RGPP, Revue Générale des Politi-
ques Publiques, qui va impacter l’en-
semble des services préfectoraux et
services départementaux.
Alors, que dire en introduction de ces
ARS?
Il faut rappeler d’abord que les ARH
ont été l’occasion d’un apprentissage
entre les services de l’État et les servi-
ces de l’Assurance-Maladie.
Par ailleurs, il est certain que les Agen-
ces Régionales de l’Hospitalisation ont
été un facteur de développement du
mouvement de recomposition, de
restructuration sur un certain nombre
d’activités. Je pense, en particulier, dans
le domaine de la chirurgie et de la
maternité.
Le début du travail des échanges et des
coopérations entre les établissements
est également un aspect positif laissant
place à un travail d’échanges avec la
création des GCS, mais je suis de ceux
qui pensent que le modèle ARH a atteint
sa limite liée au champ de compétences
exclusivement sanitaires et que le pro-
jet HPST tente de répondre à quatre
enjeux :
• le poids croissant des pathologies
chroniques et le vieillissement de
la population
• l’enjeu économique et financier en
termes d’efficience de performance
de nos organisations dont les éta-
blissements de la FEHAP qui ont
probablement un certain nombre de
bonnes leçons à donner aux uns et
aux autres
• l’accès aux soins, par une couverture
territoriale convenable en dépit des
effets du numerus clausus
• l’enchevêtrement de compétences
entre les institutions et autorités.
Pour faire vite, les caractéristiques de
ce projet de loi concernent :
• l’ensemble du champ de la santé et
des modes de coordination avec les
différents services de l’Etat
• la coordination entre l’Etat et l’As-
surance-Maladie avec la création
d’un établissement public incarnant
cette coordination
• la territorialisation des processus de
décision.
La Conférence Régionale de Santé et de
l’Autonomie bénéficiera du transfert
des compétences actuelles détenues
par les CROSS, les CROSMS, etc. et le
projet de texte prévoit une véritable
coordination au plan national des Agen-
ces Régionales de Santé.
Par ailleurs, la notion de proximité et de
réactivité est capitale. Il faut que les
futures équipes qui vont travailler dans
les ARS garantissent auprès des per-
sonnels de santé et des établissements
avec lesquels ils vont collaborer, cette
capacité de réagir autant que possible
à tel ou tel sujet».
Antoine Dubout
«Vous avez parlé des communautés hos-
pitalières de territoire, vous avez évoqué les
GCS en disant que c’était effectivement
des enjeux de coopération importants».
Dominique Deroubaix
«Sous réserve, bien entendu, de l’écri-
ture réglementaire, nous aurons des
GCS qui pourront être titulaires d’auto-
risations et donc considérés comme
établissements. Ce qui veut dire que la
notion de GCS n’est pas une notion rigide,
enfermée.D’ailleurs, dans le Nord, nous
avons fait un GCS de droit privé pour
faire collaborer un établissement public
de santé et un établissement PSPH».
Antoine Dubout
«Concernant le secteur sanitaire, le taux
de restructuration des PSPH du Privé
Non Lucratif est à peu près semblable
à celui du privé depuis dix ans. En revan-
che, dans tout le champ médico-social,
voire social où la FEHAP est « domi-
nante », il y a un très gros travail de
restructuration, de partenariat, de créa-
tion de plateformes communes, etc».
Dominique Deroubaix
«Faire reposer la permanence des soins
sur le seul registre tarifaire pouvait pré-
senter des inquiétudes pour l’avenir,
dans la mesure où vous avez un tarif
pour faire une activité. Si, dans certains
cas, ou dans certaines circonstances,
il n’y a pas d’activités ou très peu, la
rémunération n’est pas au rendez-
vous. C’est l’exemple-type du fonction-
nement de nos permanences de soins
hospitaliers la nuit, les jours fériés et
les week-ends.
La région Nord-Pas-de-Calais pour les
établissements concernés par cette
permanence des soins sanitaires avait
déclaré un revenu, un financement de
l’ordre de 55 millions d’euros. Lorsqu’on
a reçu notre circulaire budgétaire, notre
droit de tirage en quelque sorte était
de 41 millions. Par conséquent, il faut
voir comment on va passer de 55 à 41 et
Réunion du secteur sanitaireLe projet de loi HPST étant au cœur de l’actualité, les débats ont essentiellementconcerné ce projet de loi. Visite guidée avec ses participants.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Reunions en Parallele
21
RÉUNIONS EN PARALLÈLE I CONGRÈS 2009
procéder aux ajustements nécessaires.
Nous allons travailler sur le réseau
régional des urgences, de manière à ce
que les services d’urgences ne soient
pas isolés et, qu’éventuellement, il y
ait des regroupements de moyens parce
qu’une région comme la nôtre va perdre
d’ici à 2014, c’est-à-dire demain matin,
25% de ses chirurgiens.
C’est la même technique qu’on utilisera
pour l’autre volet qui fait partie d’une
modulation qui est le SSR. Plus large-
ment, il va falloir faire évoluer ce dis-
positif. Par ailleurs, je ne vois pas ce qui
interdirait demain qu’un certain nombre
de nouveaux établissements puissent
avoir une part d’enseignement compte
tenu des problématiques de démogra-
phie médicale. Nous avons dans la
région –et vous savez bien Président–
un Institut illustre qui est le GHICL qu’on
essaie de soutenir. Il faut dépasser des
réticences un peu idéologiques. Il faut
qu’on essaie d’ouvrir les marges de
manœuvre là-dessus».
Dominique Montégu, Présidentede la Comission MCO
«Toutefois, la V11 pose beaucoup de pro-
blèmes. En Rhône-Alpes, puisque c’est
ma région, on va sans doute avoir les
budgets fin juin. Cela pose quand même
un certain nombre de questions comme,
par exemple, quand je vais expliquer à
mes médecins que maintenant il faut
garder le malade un jour de plus pour
que je sois payé au bon prix: c’est quand
même un peu schizophrène».
Dominique Deroubaix
« Vous avez raison, il y a un vrai sujet.
L’outil est, comme d’habitude venant du
ministère, extrêmement intelligent,
techniquement imparable… Simplement,
on a des problèmes de concordance des
temps sur ce sujet. Je rappelle, qu’au
fond, tout cela est issu d’une mise au
point progressive de l’outillage T2A. Cela
va prendre encore quelques années.
On a mis en place la T2A depuis 2004/2005
et on en est déjà à la V11; on est en droit
de s’interroger sur le nombre des adap-
tations. Cette V11 a été largement sou-
haitée par un certain nombre d’établis-
sements qui estimaient que les tarifs
pratiqués ne rémunéraient pas suffi-
samment des activités très pointues.
Nous avons donc essayé de mieux rému-
nérer les activités de pointe mais, du
même coup, on a un peu écrêté, un peu
tassé les activités dites de proximité.
De quoi va-t-on s’apercevoir bientôt?
Le bilan de la V11 dans quelques mois
montrera que l’essentiel du portefeuille
d’activités est constitué par les activités
de proximité, dont la rémunération sera
légèrement affaiblie par rapport à
l’épure initiale. Je pense que, pour parler
très clair avec vous, un certain nombre
de CHU vont avoir des réveils douloureux».
Jean-Louis Garcia, Présidentde la Commission Santé Mentale
«L’implantation de secteur de psychiatrie
à l’hôpital général génère une prudence.
Qu’est-ce que cela peut donner? Où va-
t-on? Qu’est-ce qui a pu se passer dans
votre agence en termes de réorganisa-
tion de la santé mentale, de la psychia-
trie sur le terrain?
En tout cas, tous les secteurs sanitaires
en santé mentale et, en particulier, les
établissements FEHAP –mais ce ne sont
pas les seuls – ont déjà réfléchi à des
dispositifs permettant de passer le court
séjour, le moyen séjour, à trouver des
lieux de vie. On n’est plus patient : on vit.
Comment le médico-social va-t-il pou-
voir être traité d’égal à égal? Comment,
quelque part, ce petit morceau qui est
une petite chose par rapport au monde
sanitaire ne risque-t-il pas d’être victime
de choix ? est absolument nécessaire,
que cela a déjà été fait, que le médico-
social se réorganise beaucoup.
Les CPOM, par exemple, qui commen-
cent à être mis en œuvre sont des outils
structurants ou de restructuration».
Dominique Deroubaix
«La place du médico-social dans cette
cosmologie devra faire l’objet de la plus
grande attention. Je ne partage pas vos
craintes quant au caractère résiduel du
médico-social dans nos préoccupations
futures d’ARS. Cela peut constituer un
axe fort de la réforme car ce sont des
structures relativement modestes avec
des masses critiques réduites. Nous
devons travailler sur cette idée d’avoir
des plateformes médico-sociales dans
les régions, reposant sur des logiques
de coopérations.
Les pouvoirs publics vont être très vigi-
lants là dessus. C’est que – je reprends
votre inquiétude – en aucun cas le
médico-social ne doit être la variable
d’ajustement du sanitaire».
NETLOGON Mutuelle Familiale Société Générale
Retrouvez toutes les
informations relatives à
la Conférence Nationale
des Présidents de CME
sur le site internet :
http://www.cme-psph.fr
• Dr Didier Gaillard, Président de
Conférence et représentant du
champ MCO
– Débat sur l’historique de la res-
ponsabilité organisationnelle du
médecin dans son service
– Qu’est-ce que le projet médical
d’établissement?
– Reconnaissance du temps passé
par le médecin dans des missions
transverses
– Le site Web de la Conférence
Nationale «cme-psph.fr»
– La loi HPST – ESPIC.
• Dr Michel Enjalbert, Vice-président
et représentant du champ SSR
– Les décrets du 18 avril 2008
– La circulaire du 3 octobre 2008
– La tarification à l’activité.
• Dr Marc Hayat, Vice-président et
représentant du champ PSY
– Place des médecins dans le
Conseil d’Administration de l’éta-
blissement
– Le rôle de Edouard Couty, nommé
par Roselyne Bachelot-Narquin,
pour faire un rapport sur la psy-
chiatrie après le projet de loi HPST
– Abstract sur la défense d’iden-
tité du PNL
– Programmation d’un congrès en
2010 sur la psychiatrie associative.
• Dr Chaudot, représentant du champ
HAD
– La création du service d’HAD- Historique
- Obligations, nombre de lits
- Les études de faisabilité
- Le type d’habitat : aggloméra-
tion ou rural
- Le type de fonctionnement :
équipe soignante salariée, libé-
raux, mixte
- Le partenariat HAD-SSIAD.
• Le statut des CME des établisse-
ments PNL a également été débattu
dans le cadre de la loi HPST
• David Causse, Directeur du secteur
sanitaire de la FEHAP et coordina-
teur du Pôle Santé-Social, a fait un
point d’étape sur le projet de loi HPST.
• Marie Françoise Dumay, ARH Ile-
de-France : le signalement des évé-
nements indésirables graves asso-
ciés aux soins :
– Politique nationale de gestion des
risques
– Signalement des évènements liés
à la prise en charge des patients
– Management des risques
– Approche systématique des ris-
ques: Modèle de REASON
– Déculpabiliser et développer une
culture positive de l’erreur
– Objectif de la gestion des risques
en établissement de santé
– Iatrogénie – ENEIS
– Responsabilité et implication des
acteurs
– Management des risques et de
la qualité.
La Conférence Nationale des Présidents de CME des établissements PNL
22Gerflor GMF Assurance Mercuri Urval
LA CONFÉRENCE NATIONALE des Présidents de CME des établissements PNL s’est
réunie le 8 avril 2009 lors du Congrès de la FEHAP à Lille. Au cours de cette
journée, les Délégués régionaux, représentants des Présidents de CME de leur
région, ont abordé différents sujets d’actualité :
Reunions en Parallele
LES INTERVENANTS
Jacqueline Bougeard, Directrice du Pôle de Médecine Physique et de Réadaptation Saint-Hélier (Rennes)
Dr Christine Michel, médecin DIM de l’Hôpital Léon Bérard (Hyères)
Dr Bruno Pollez, médecin de MPR du GHICL
24
LES ÉTABLISSEMENTS SSR sont de plus en
plus sollicités et subissent des pressions
économiques et normatives fortes.
Deux réformes majeures touchant à
l’organisation de l’offre et au financement
peinent à se mettre en place, impliquant
une modification du régime des auto-
risations (révision du volet SSR des
SROS) et des règles de financement
avec un modèle intermédiaire visant à
préparer le passage à la tarification à
l’activité (T2A) en SSR en 2012.
Ce contexte général pousse à la restruc-
turation du paysage sanitaire et au regrou-
pement. S’impose alors la nécessité
encore plus grande d’un positionnement
du champ SSR au sein du secteur Privé
Non Lucratif.
L’effet restructurant du modèle de financement
En 2009, première étape de la démarche
vers la T2A SSR, la modulation du finan-
cement des établissements sur la base
d’un Indicateur de Valorisation de l’Ac-
tivité (IVA) a une visée davantage sym-
bolique de par sa faiblesse (modulation
de 2 %). Les établissements peuvent
donc utiliser cette phase préparatoire
pour adapter leur fonctionnement au
principe de la tarification à l’activité.
En termes d’organisation interne, cela
peut se traduire par l’élaboration de
tableaux de bord médicalisés, médico-
économiques, assurant le suivi régulier
de l’évolution des points IVA mais, sur-
tout, par l’indispensable amélioration de
la qualité du recueil, de son exhaustivité
et de sa précocité.
Les structures SSR doivent ainsi se pré-
parer à une accélération du processus
avec le passage à la T2A et à une construc-
tion de leur EPRD sans connaissance
des tarifs qui seront appliqués et qui
ne sont pas nécessairement le reflet
des coûts réels. Avec la T2A en SSR,
les tarifs seront construits à partir de
l’Etude Nationale des Coûts à méthodo-
logie commune (ENCc).
Les futurs tarifs (évolution des outils de
la classification avec la révision du PMSI
et refonte du catalogue des actes de
rééducation-réadaptation (CdARR), ENCc)
inquiètent les établissements SSR en
raison de l’absence de visibilité sur leur
futur modèle de financement et de l’as-
pect évolutif du modèle intermédiaire.
Si la médicalisation des SSR polyvalents
est favorisée par le modèle intermé-
diaire, elle ne doit pas être remise en
question avec le passage à la T2A, tout
comme les spécialités ne doivent pas
être mises à mal pendant la phase tran-
sitoire pour être mieux valorisées ulté-
rieurement dans les tarifs.
Au-delà du débat contre-productif sur les
établissements gagnants et perdants
à la réforme, le rôle de la FEHAP est
de tenir compte de tous les équilibres
en présence.
Une évolution restructurantevers la prise en charge continue,globale et décloisonnée
Si les missions des SSR et leur pluridis-
ciplinarité sont réaffirmées dans le cadre
de la réforme des autorisations, la
continuité de prise en charge du patient
revenu en milieu ordinaire de vie et la lutte
contre le handicap hors des structures
SSR sont souvent plus délicates.
La mise en place des coordinations
SSR, conformément à la réforme des
autorisations, assurera une orientation
du patient plus adéquate par rapport
à ses besoins sociaux et à ses besoins
sanitaires. La mutualisation de certaines
compétences à des moments où la démo-
graphie est parfois très pénalisante
pourrait également rompre ce principe
de discontinuité entre sanitaire et milieu
social.
D’un point de vue organisationnel, d’au-
tres réponses peuvent aussi être appor-
tées : développer les permissions thé-
rapeutiques lors du séjour, les équipes
mobiles hors les murs, l’HAD de réadap-
tation, l’hôpital de jour, les Services de
Soins de Réadaptation A Domicile
(SSRAD), les réseaux de santé, utiliser
davantage les CLIC (Centres Locaux
d’Information et de Coordination) pour
les personnes âgées, enrichir les syner-
gies avec la MDPH (Maison Départe-
mentale des Personnes Handicapées),
anticiper la réinsertion professionnelle
qui sont autant de pistes à explorer.
Une solution pourrait être la mise en
place d’une plate-forme, permettant
une mutualisation des moyens et des
cultures, tout en disposant de ces diffé-
rents éléments (SSR, HAD, hôpital de
jour, SIAD de réadaptation, SAMSAH,
voire SAVS, services d’accueil de jour,
réseaux de santé).
L’objectif général recherché est celui du
décloisonnement entre les services,
entre l’hôpital et la vraie vie, entre le
patient et sa famille pendant le temps
hospitalier, entre l’hôpital et la ville,
entre le sanitaire et le médico-social.
Marine Gey,
Conseiller Santé-Social FEHAP
Anticiper les évolutions du champ SSR
Le champ des Soins de Suite ou de Réadaptation (SSR) est confronté à une enveloppebudgétaire de plus en plus contrainte pour une activité en développement, dû à l’èredes maladies chroniques, des événements de santé invalidants et du vieillissementde la population.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Debats
LES INTERVENANTS
Pierre-Louis Bras, Inspecteur général des Affaires Sociales
Stphénie Naux, Responsable juridique du projet Sophia pour la CNAMTS
Christine Meyer, Directrice des garanties mutualistes et de l’assurance santé - Fédération Nationale de la Mutualité Française
25
DÉBATS I CONGRÈS 2009
LA PISTE DU «« DDIISSEEAASSEE MMAANNAAGGEEMMEENNTT »» déjà
explorée à l’étranger est en cours d’ex-
périmentation en France. Pierre-Louis
Bras, Inspecteur Général des Affaires
Sociales, coauteur d’un rapport sur ce
modèle à l’étranger, a présenté les pis-
tes pour une implantation en France.
Ce mode d’organisation est né dans les
années 90 à l'initiative des laboratoi-
res pharmaceutiques et repose sur six
principes : des protocoles formalisés,
l’appui de ressources «communautaires»,
une organisation en équipe, un système
informatisé de gestion des patients
(alerte, gestion des rappels…), le soutien
aux patients, la valorisation des résul-
tats. En résumé, il s’agit d’organiser des
interventions proactives, centrées sur les
patients. En pratique, ce sont des centres
d'appels téléphoniques qui prennent en
charge les patients, notamment par
l’intermédiaire d’infirmières formées
de manière spécifique. Ces centres ont
quatre fonctions: éducation thérapeuti-
que, coaching, coordination des soins,
suivi/alerte.
Les pathologies ciblées sont définies
selon des recommandations : le niveau
d’influence du patient sur les résultats,
les complications et les hospitalisations
fréquentes et évitables. De même, les
patients sont inclus dans le programme
après identification sur la base d’un
consentement présumé et bénéficient
d’une intervention adaptée.
Les résultats sanitaires de cette orga-
nisation sont difficilement quantifiables
tant les méthodologies de mesures des
indicateurs peuvent varier d’une patho-
logie à une autre. Néanmoins, il existe un
consensus sur les effets bénéfiques, au
moins sur les processus. Les économies
sur l'hospitalisation sont supérieures
aux coûts du programme et aux dépen-
ses induites en ville, mais ce résultat est
conditionné par la nécessité d'une forte
baisse des hospitalisations (10 à 30%).
Par ailleurs, les études sont divergentes
et de forts doutes existent sur la ren-
tabilité à court terme auxquels s’ajoute
l’absence de réelles études sur la ren-
tabilité à long terme. Toutefois, la ques-
tion se pose de l’appréciation de la notion
de «rentabilité», selon le point de vue de
l’opérateur qui met en place ce dispositif.
Et en France?
Les problématiques rencontrées sont
identiques et les diverses tentatives de
prises en charge par les réseaux ou par
le développement de l’éducation théra-
peutique restent parcellaires, passives
et surtout peu évaluées.
La question du choix de l’opérateur,
selon Pierre-Louis Bras, doit pouvoir
rester ouverte et faire jouer la concur-
rence. Les pouvoirs publics doivent
déléguer aux promoteurs privés afin,
notamment, de minimiser les risques
en cas d’échec. A ce titre, un débat col-
lectif et une concertation préalable pré-
céderont toute expérimentation.
La mise en place du «Disease Manage-
ment»doit respecter la volonté despatients
et le « coaching » peut conduire à cer-
taines dérives, notamment au regard de
la confidentialité. Lors de la table ronde,
deux opérateurs, financeurs de soins et
donc possédant un intérêt économique
direct dans la mise en place d’un tel dis-
positif, ont présenté leurs expériences:
• Stéphanie Naux, nous a présenté
pour la CNAMTS le programme
«Sophia»: dispositif expérimental sur
la base du volontariat pour les patients
en ALD atteints de diabète de types
1 et 2 et âgés de plus de 18 ans. La
cible principale pour relayer la prise
en charge est le médecin traitant.
Cette expérimentation qui doit se
terminer en 2010 sera évaluée pour
être élargie à d’autres pathologies
• Christine Meyer, pour la Mutualité
Française, a présenté un dispositif
plus global. Un accent tout particu-
lier est mis sur la prévention des fac-
teurs favorisant l’émergence des
maladies chroniques comprenant
une dissociation entre patients
atteints de maladie chronique et
patients en ALD. Diverses modalités
pratiques pour améliorer la préven-
tion sont déployées auxquelles s’ajoute
la création «du parcours santé mutua-
liste» qui est, à ce stade, une plate-
forme d’information mais qui a voca-
tion à évoluer. L’accès aux données
médicales des patients aujourd’hui
autorisé à la seule Assurance-Maladie
reste un frein.
Au-delà de l’intérêt d’une telle démar-
che pour les financeurs de soins et
alors que les dispositifs existants sont
davantage tournés vers la médecine
de ville, la question de la place des éta-
blissements de santé subsiste. Ils
pourraient évidemment avoir un inté-
rêt direct pour la prise en charge inté-
grée au sein de filières à développer
ce type de service. C’est ainsi que la
FEHAP est porteuse d’un projet dans
le Nord/Pas-de-Calais qui a reçu le
soutien du ministère et est en cours de
réalisation.
Samah Ben Abdallah,
Conseiller Santé-Social FEHAP
La prise en charge des maladieschroniques par le Disease Management
En France, on estime que 15 millions de personnes, sont atteintes plus ou moinssévèrement de maladies chroniques. Si des mesures éparses ont été prises, cela nerépond pas à la nécessité d’une approche globale de la prise en charge.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
26
EN JUILLET 2008, Roselyne Bachelot m’a
demandé de présider une Commission
chargée d’organiser une concertation
sur le thème de « L’organisation et des
missions de la psychiatrie et de la santé
mentale»; avec un objectif ou en tout cas
le mandat qui m’était confié de formuler
des propositions à l’issue des travaux de
cette Commission pour une politique en
matière de santé mentale.
La Commission était composée d’environ
trente personnes, essentiellement les
représentants institutionnels, les Fédé-
rations d’établissements, les Organisa-
tions syndicales de psychiatres hospi-
taliers salariés et libéraux et d’autres
organisations syndicales, les associations
de patients et les familles et quelques
personnalités qualifiées, c’est-à-dire
une Commission très institutionnelle.
Il était évidemment impensable d’ima-
giner qu’on puisse dégager un consensus
total d’une Commission composée de
cette manière qui, en outre, a été chargée
d’organiser un débat sur la question.
Nous avons donc travaillé pendant qua-
tre mois, entre début septembre et mi-
décembre. Nous avons auditionné environ
200 personnes institutionnelles, mais
aussi des personnes qualifiées puis, des
personnalités de mondes voisins ou exté-
rieurs à la psychiatrie et à la santé men-
tale mais s’intéressant à ces questions.
Il était convenu, dès le départ, que ce qui
ferait consensus serait acté dans le
rapport et que, pour ce qui ne serait pas
consensus, je prendrai mes responsabi-
lités et je ferai mes arbitrages puisque
le mandat m’était confié intuitu personae,
si je puis dire. Donc, j’ai fait ce rapport
à la fin de l’année et, pour des raisons
circonstancielles d’agenda, je n’ai pu
le remettre que fin janvier. Il s’est passé
un délai d’un mois qui n’a peut-être pas
été très opportun, mais c’est comme
cela. Voilà pour la forme.
Sur le fond, il existait déjà deux plans
pour la psychiatrie : un plan 2002/2005
et un plan 2005/2008, dont malheureu-
sement je n’ai pas eu le bilan ni l’évalua-
tion qui est en cours. Partant de là, j’ai
pensé qu’il n’était peut-être pas oppor-
tun de faire à nouveau une liste du type
catalogue de 80 mesures pour un troi-
sième plan concernant la psychiatrie
mais que, conformément à ce qui m’était
demandé, il était peut-être plus pertinent
d’imaginer et de faire des propositions
pour une politique de santé mentale
en réduisant le nombre des recomman-
dations et en donnant quelques grandes
orientations. C’est ce que j’ai essayé
de faire.
D’abord, j’ai essayé de dire ce qui me
paraissait être les orientations essen-
tielles ou déterminantes qui pourraient
fonder une politique en matière de santé
mentale. Ensuite, en tirer les consé-
quences sur le plan de l’organisation du
système et de voir quelles étaient, à
mes yeux, les conditions qui pourraient
favoriser la réussite d’une telle politi-
que. C’est autour de ces points que le
rapport s’est articulé.
Quelles sont les orientations fondatrices
de ce que pourrait être une politique
en matière de santé mentale?
La première, c’est qu’il me semble –et
j’ai acquis cette conviction au travers
des travaux de la Commission et tout au
long des lectures ou des contacts que
j’ai pu avoir ou des visites que j’ai pu
faire pendant ces quatre mois et un peu
de mon expérience précédente– qu’abor-
der la question de la prise en charge
des pathologies mentales par l’optique
de la seule psychiatrie, discipline médi-
cale, n’est pas la bonne approche. Peut-
être que ces questions-là doivent être
abordées par l’entrée d’une politique de
santé publique. Et que, faire une politi-
que de santé mentale, c’est considérer
que la santé mentale est un volet essen-
tiel, important, d’une politique de santé
publique qui inclut la dimension de la
prévention, la dimension de la prise en
charge thérapeutique et du soin, la
dimension du suivi et la dimension de la
réinsertion sociale.
La deuxième considération, c’est que j’ai
constaté avec un certain étonnement
que, dans le champ de la psychiatrie,
les associations de patients et surtout
les associations de familles et l’entou-
rage qui sont quand même en première
ligne dans ces circonstances, sont peu
ou mal représentées dans le système.
La deuxième orientation fondatrice
consiste à dire : il faut donner plus de
place et plus d’importance dans les ins-
tances consultatives, voire décisionnel-
les, de l’ensemble du système à tous les
niveaux aux associations représentant
les familles et l’entourage des patients.
Le troisième aspect qui me paraît tout
à fait important, c’est de considérer que
la dimension de l’évaluation dont on
parle beaucoup doit être en quelque
sorte consubstantielle d’une politique
en matière de santé mentale. L’évalua-
tion des structures, voir si cela marche
ou si cela ne marche pas, et comment
on fait pour le modifier ou pour l’adapter,
évaluation des activités et évaluation
des pratiques.
Ce sont les trois points essentiels qui
me paraissent être quelques principes
en matière de politique de santé mentale.
La conséquence est, qu’en matière
d’organisation du système, le secteur
psychiatrique a été une innovation extra-
ordinaire et une véritable innovation au
Santé mentale : échanges avec Edouard Couty
Edouard Couty a produit, il y a maintenant quelques mois, à la demande de notreministre Roselyne Bachelot-Narquin, un rapport intéressant, discuté. Il nous explique,ici, ce que ce rapport « Missions et organisation de la santé mentale et de la psychiatrie »porte comme sens et valeurs.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
•••
Debats
Source d’inspiration, la Commission Santé Mentale
La Commission Santé mentale s’est réunie en deux temps. Une première réunion, le matin, a permis de perfectionner la position prise par la Commissionet relative à la sortie du rapport d’Edouard Couty en janvier dernier sur les missions et l'organisation de la santé mentale et de la psychiatrie.En effet, suite à l’étude du rapport ainsi qu’à un échange de la FEHAP avec son auteur, la Commission Santé mentale s’est positionnée en tant que forcede proposition sur cette question et, si la Commission est en accord avec lesconstats et certaines propositions du rapport, il est à noter que quelques-unesdes options proposées font l’objet de perceptions différentes, notamment en ce qui concerne les Groupements Locaux de Coopération.Et, plutôt que de laisser place à la critique, les membres de la CommissionSanté mentale ont choisi d’émettre des suggestions différentes et nouvelles et proposé des ouvertures complémentaires.L’ensemble de ces points a été formalisé dans une note qui a servi de base de travail à la préparation de la table ronde, de l’après-midi, sur les missions et l'organisation de la santé mentale et de la psychiatrie lors de laquelle nousavons eu l’honneur d’accueillir Edouard Couty.
29
DÉBATS I CONGRÈS 2009
sens organisationnel à la fin des années
60 et 70, qui a rompu les murs de l’hô-
pital et rompu la structure asilaire,
ouvert l’hôpital sur la ville. N’oublions
pas que toutes les alternatives à l’hos-
pitalisation dans le champ somatique et
de court séjour sont inspirées de ce
concept.
Aujourd’hui, la seule psychiatrie dans
sa dimension sanitaire ne peut pas et n’a
pas les moyens de prendre en charge
les autres volets: la prévention, le suivi et
la réinsertion sociale. Par conséquent,
s’agissant d’un domaine dans lequel les
patients ne sont pas toujours demandeurs
de soins, ils ne vont pas à la recherche
de soins. C’est l’inverse ; il faut que le
système soit à l’écoute et à la proximité
des patients. Contrairement au champ
sémantique où la qualité et la sécurité
passent par la mutualisation et le regrou-
pement sur des territoires de santé
assez vastes –des plateaux techniques
lourds– dans le champ de la psychiatrie
et plus largement de la santé mentale,
la conviction est que la qualité et la
sécurité passent par une approche de
proximité.
Je dis qu’il faut raisonner sur un territoire
équivalant à celui du secteur actuel, à
peu près 100000 habitants, entre 70 et
150000 habitants, modulo la pédopsy-
chiatrie un peu plus large. Et qu’il faut
constituer un système en réseau pour
des secteurs différents qui, aujourd’hui,
se parlent peu, ne se comprennent pas
toujours et ne travaillent pas ensem-
ble vraiment. C’est-à-dire les acteurs
de la prévention, les acteurs du soin, les
acteurs du suivi et les acteurs de la
réinsertion sociale : logement, activité
culturelle, emploi.
Il faut faire en sorte que, dans une struc-
ture de proximité, l’ensemble de ces
acteurs ait des objectifs, des moyens
et une responsabilité. C’est-à-dire des
comptes à rendre et des résultats, donc
soumis à une évaluation, sous l’œil d’un
Conseil Local de Santé Mentale dans
lequel on va trouver des professionnels,
mais à côté d’eux les élus et les représen-
tants du monde associatif, des patients
et des familles. C’est ce que j’ai appelé
–mais je n’ai pas de revendication parti-
culière sur la paternité de ce système –:
il faut structurer. C’est-à-dire que j’ai
considéré qu’il fallait organiser un sys-
tème type Groupement de Coopération
pour la santé mentale sur ce petit terri-
toire, avec des objectifs, des moyens et
une évaluation et donc une responsabilité.
Les facteurs de réussite, c’est la forma-
tion des professionnels: médecins géné-
ralistes, médecins spécialistes, infir-
mières et, en partie, psychologues. C’est
la recherche fondamentale médicale
sciences humaines neuroscience, la
recherche clinique. N’oublions pas que
j’ai constaté avec un certain regret que
seulement 7% des crédits du PHRC sont
consacrés à des projets de recherches
qui touchent de près ou de loin la psy-
chiatrie. On a encore beaucoup de pro-
grès à faire. Quand on voit les enjeux
en matière de santé publique, ne serait-
ce que considérer les chiffres que donne
l’OMS, les défis sont très importants.
On a beaucoup de progrès et d’efforts
à faire dans ce domaine.
Enfin, le troisième facteur de réussite
qui me paraît essentiel c’est le dévelop-
pement de la promotion de la santé
mentale. C’est-à-dire l’information tout
public, mais aussi des informations sur
des publics ciblés au niveau national,
relayées par des campagnes d’infor-
mation locales qui impliquent le monde
associatif, mais aussi le champ des res-
ponsables politiques. Le tout devant se
structurer autour de ce qui pourrait être
–ce que je crois comme nécessaire– un
débat national. Dans notre pays, un débat
national cela signifie quelque chose qui
est du domaine législatif. C’est pour-
quoi j’ai proposé qu’il y ait, pour embras-
ser l’ensemble de ce système et d’autres
aspects, notamment les aspects des
chantiers en cours sur la révision des
dispositions de la loi de 90 HO-HDT qui
est une loi santé mentale, à la faveur
de laquelle on pourrait avoir un débat
sur l’ensemble de ces questions-là.
Quelle est l’image qu’on a dans notre pays
de ces questions de la santé mentale,
de ces pathologies? Comment prend-
on en charge ces patients et comment
les réinsère-t-on dans la cité? Comment
sont formés les professionnels? Quelle
est l’image des professionnels?
Enfin, toutes ces choses qui sont aujour-
d’hui un peu dans le non-dit et qui méri-
tent –je crois– une attention particulière,
compte tenu de l’importance du sujet,
je le dis même si j’ai longtemps plaidé
qu’il fallait généraliser et assez bana-
liser le système qui mérite d’être traité
un peu spécifiquement. C’est pourquoi
il me paraît tout à fait indiqué qu’il y ait
un débat et une loi sur la santé men-
tale dans le pays.
Edouard Couty,
Conseiller-Maître à la Cour des Comptes
et Président de la Commission chargée
de la réflexion sur les missions et
l’organisation des soins en
psychiatrie et en santé mentale
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
•••
30
LE CONGRÈS EST UN EXERCICE un peu diffé-
rent de l’Assemblée Générale statutaire.
C’est l’occasion pour nous de prendre
un moment, le temps de la réflexion, le
temps des rencontres, avec des théori-
ciens, des patriciens, mais aussi le temps
d’échange et de partage. Un moment
rare dans l’année –on ne l’a pas souvent–
pendant lequel on se met en retrait par
rapport à l’activité quotidienne, tellement
prenante, parfois envahissante, et tou-
jours chronophage. C’est aussi le temps
des rencontres entre les Présidents et
les Administrateurs, entre les Présidents,
les Administrateurs et les Directeurs, et
celui d’ouverture sur nos partenaires.
Nous avons choisi cette année la thé-
matique de la réforme. Nous avons voulu
placer notre réflexion sous l’angle des
défis. Ce n’est pas parce que la réforme
est un thème nouveau pour nous, mais
elle n’a jamais été aussi présente. Cela
fait maintenant des décennies que les
grandes réformes ont touché notre sec-
teur d’activité et ce, dans tous les domai-
nes: le droit du travail, la formation pro-
fessionnelle, l’assurance qualité, la
tarification, les grandes lois sociales,
les grands plans de santé publique, la
modification de la gouvernance et des
champs de compétences… Il a fallu à
nos organisations une grande capacité
d’assimilation et de réactivité, d’adap-
tation sur des sujets et dans des dis-
ciplines extrêmement diverses.
Nous avions demandé une pause régle-
mentaire. A vrai dire, c’était un coup
d’épée dans l’eau, car nous l’avions sol-
licitée et elle n’a pas eu lieu. Et de nou-
velles grandes réformes, refondatri-
ces pour certaines, nous obligent sans
cesse à remettre l’ouvrage sur le métier.
Conscients qu’il est de notre responsa-
bilité particulière d’être présents auprès
de ceux qui nous confient leur santé,
leur vulnérabilité, leur vie parfois et leurs
projets de vie, nous nous sentons évidem-
ment particulièrement concernés. Concer-
nés aussi par notre capacité à proposer,
grâce à la connaissance que nous avons
des personnes et de leurs besoins.
Nous avions besoin de nous retrouver
pour partager nos forces et nos espoirs,
pour garder ensemble notre vigilance
et mesurer aussi notre capacité d’ap-
propriation en revendiquant nos spéci-
ficités, en faisant vivre nos valeurs, en
assurant la promotion de l’offre asso-
ciative qui a toujours –toujours, j’insiste–
su devancer les besoins sociaux, avec
son réseau de mutuelles, de congré-
gations, de fondations et d’associations.
Alors oui, nous allons chercher le sens
et la signification de la réforme. Nous
allons passer un premier temps à nous
faire une idée sur le sens de cette
réforme. Et pour ce faire, nous avons
demandé des contributions avec des
éclairages particuliers. Tout d’abord, la
sémantique : que veut dire le terme
réforme ? Et c’est avec une grande
satisfaction que nous présenterons une
interview d’Alain Rey, le spécialiste des
mots s’il en est. Pour mieux l’entendre,
nous avons choisi de ne pas le filmer,
mais juste de l’écouter, lui qui sait si
bien faire vivre les mots en les ancrant,
notamment, dans leur histoire.
Puis la philosophie, avec Patrick Viveret,
philosophe politique, qui connaît si bien
les mouvements associatifs. Je le remer-
cie vivement d’avoir accepté de nous
accompagner dans notre réflexion.
Enfin, l’éclairage politique, madame la
Ministre, ou plus particulièrement des
politiques. Et c’est avec grand plaisir
que nous accueillerons Marie-Anne
Montchamp, actuellement Députée du
Val-de-Marne et qui fut secrétaire d’Etat
aux personnes handicapées. Elle a été
particulièrement concernée par la grande
réforme et ce magnifique projet de
société portant sur la place des person-
nes handicapées.
Antoine Dubout,
Président de la FEHAP
La réforme permanente ou…
Le thème que nous avonschoisi pour ce 34e Congrèsde la FEHAP est : « Le PrivéNon Lucratif face aux défis desréformes ». Antoine Duboutaccueille les congréssistes.
INITIAL l'APPEL Médical 2CSI Informatique
Le defi des reformes
31
LE MOT RÉFORME FAIT UN PEU RÊVER parce
qu’il est utilisé à toutes les sauces par
tous les gouvernements successifs. En
général, il est assez positif parce que,
d’un côté, on a peur de la violence qu’im-
plique la révolution, de l’autre, on a peur
de l’immobilisme parce qu’on constate
bien que les choses ne vont pas pour le
mieux. Entre les deux, il y a eu ce concept
qui s’est construit au cours des âges
et qui est celui de réformer la situation
présente.
Réformer, ce n’est pas très compliqué;
le mot dit lui-même ce qu’il est, c’est fait
sur la forme. Toute réalité humaine, toute
action doit prendre une forme pour s’in-
carner dans la société et, évidemment,
de plus en plus quand c’est une insti-
tution et, notamment, une institution
politique ou une institution de nature
judiciaire ou une institution de la vie
quotidienne, comme l’est par exemple
le monde hospitalier ou l’ensemble des
prestations données par toutes les
pharmacies de France. Cela peut immo-
biliser l’action, mais ça peut aussi garan-
tir un certain nombre de libertés à l’in-
térieur, un certain nombre d’équilibres
qui ont été acquis très longuement.
Parce que, quand on voit l’histoire de
l’institution hospitalière – je rappelle au
passage que le mot vient de «hospece»
(latin) qui veut dire l’hôte, la personne
qu’on abrite chez soi – au Moyen Age,
perpétuellement, on se préoccupe de
revenir à la bonne forme parce que, dès
qu’une institution humaine apparaît,
elle a tendance à se dégrader pour une
raison ou pour une autre.
A partir de la Révolution de 1789, on va
avoir une idée totalement différente de
la réforme. Dans la réforme politique
actuelle, ce n’est plus du tout pareil
parce qu’on a une situation présente, on
a des situations antérieures qui sont
l’histoire de l’institution qu’on peut faire
et on peut préférer le passé mais on peut
aussi dire: c’est impossible de retourner
au passé, ce qui est toujours le cas. Et
on va donc ménager l’avenir pour avoir
des formes, encore une fois, qui soient
meilleures que les formes actuelles.
Encore une fois, quand on parle de la
réforme, on a oublié qu’il y avait la forme
dedans, parce que la réforme peut très
bien, dans la tête des intéressés, être :
«Ça va être mieux, je vais avoir plus d’ar-
gent, je vais être plus libre », enfin des
avantages qui peuvent être abstraits,
concrets, désintéressés ou intéressés,
mais de toute façon qui n’ont plus rien
à voir avec l’idée de forme.
Or, il est vrai que le mot continue à dire
quelque chose qu’on est obligé de res-
pecter qui est que, pour réformer, il faut
changer une structure, une forme. Et ce
changement de structure et ce change-
ment de forme, c’est l’objet-même des
réformes mises en avant par les gouver-
nements successifs et, en particulier,
par le gouvernement actuel.
Pour la réforme avec un grand « R »,
c’est-à-dire l’emploi absolu de ce mot,
c’est aussi dangereux et aussi peu uti-
lisable que la révolution avec un grand
«R». Toute révolution et toute réforme
se traduisent par des actes qui concer-
nent une société précise et qui vont
dans une direction qui est celle que les
politiques, les détenteurs du pouvoir,
ont définie. En tant que sémanticien,
quand on regarde quel est le sens des
mots, on est bien obligé de reconnaître
que la «réforme point», ça ne veut abso-
lument rien dire. Parce que changer la
forme, ça peut être aussi bien ce que j’ai
appelé par dérision dans une chronique
la «déforme», c’est-à-dire qu’on prend
la forme et on l’abolit, on la supprime,
on la déconstruit comme disent les phi-
losophes et on arrive à quelque chose
qui est la suppression d’un état consta-
table, qu’on peut observer, mais pas du
tout une forme nouvelle.
Et quand on fait des réformes, on est plus
près de la réalité, mais encore faut-il
expliquer très précisément à quel genre
de forme elles s’appliquent. Et c’est un
peu ça le problème du discours politi-
que, c’est qu’il se réfugie dans des prin-
cipes abstraits et il agit tout au contraire
avec des mesures extrêmement concrè-
tes. Et on voit bien que, derrière l’es-
prit de la réforme, il y a un esprit d’éco-
nomie qui, il est vrai, devient absolument
inévitable en matière de crise, mais
auquel on peut remédier de diverses
façons. On remarque qu’on ne parle pas
de réforme quand il s’agit justement de
réformer moralement et en profondeur;
par exemple, d’interdire aux sociétés
qui sont en difficulté ou qui sont aidées
par l’Etat actuellement de distribuer
des avantages, alors qu’il n’y a pas de
dividendes réels.
Cet esprit de réforme débouche sur
autre chose, c’est une espèce de prolifé-
ration absolument monstrueuse – tous
les spécialistes le disent– des législa-
tions. Il y a tellement de lois que, primo,
on ne les connaît plus. «Nul n’est censé
ignorer la loi » devient un adage abso-
lument impossible à réaliser, parce
qu’il faudrait passer sa vie à lire les lois
nouvelles tellement il y en a.
Deuxièmement, les lois sont si nombreu-
ses et parfois complètement contradic-
toires, qu’il devient impossible de les
appliquer. Or, une loi sans application,
c’est pire que rien du tout parce que cela
affirme une réforme précisément. Elles
sont généralement faites pour changer
les choses, donc ce sont des lois de
réforme obligatoirement. Il n’y a pas de
loi qui dise «rien ne change», ce n’est pas
la peine.
Quand on m’a fait un quadruple pon-
tage il y a une dizaine d’années et plus,
à côté de moi dans ma chambre, il y
avait quelqu’un qui ne parlait ni français,
ni anglais, ni aucune langue maîtrisée
… la permanence des réformes
Alain Rey, spécialiste de la langue française, revient sur la signification exacte de ceterme de « réforme ».
•••
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
et qui, apparemment, venait du Bengale;
qui n’avait pas de carte de séjour et qui
a été soigné chirurgicalement, exacte-
ment dans les mêmes conditions que moi.
Moi je n’ai pas payé un « rond » quand
je suis sorti de l’hôpital et j’ai des amis
américains qui se seraient mis à genou
pour faire des prières pour que ça
devienne comme ça chez eux. Voilà le
genre de choses qui sont des réformes
internes qui se sont produites au cours
des âges et qui sont totalement admi-
rables. Elles sont dues naturellement à
toutes les initiatives des soignants, des
médecins, des chercheurs et des ges-
tionnaires aussi.
Alors, évidemment, qu’on veuille réformer
parce qu’on a repéré, de-ci, de-là, des
dépenses inutiles, c’est tout à fait pos-
sible. Mais il n’y a qu’à aller dans un
service d’urgences d’un grand hôpital
–n’en nommons pas, mais c’est facile,
l’expérience se fait un jour ou l’autre–
et on s’aperçoit que c’est, au contraire,
cruellement les moyens qui manquent.
Il y a des gens en très mauvais état qui
sont obligés d’attendre pendant des
heures et des heures dans un lit de for-
tune ou dans un couloir de l’hôpital avant
de pouvoir être inscrits et d’être soignés
correctement.
Naturellement, il faut que l’argent vienne
de quelque part. Il ne peut venir dans
une société équilibrée que de la solida-
rité. La solidarité, on est navré de le dire,
mais il n’y a pas d’autre moyen, cela
s’appelle l’impôt. Il faudra évidemment
passer par là.
Donc, réforme absolue, méfiance abso-
lue. Le mot réforme, comme tous les
grands mots généraux, comme égalité
par exemple, sont des mots qu’il faut
tout le temps interroger. C’est-à-dire
que, si on voulait faire un jeu de mot,
mais qui risquerait d’être assez ineffi-
cace, la première chose à faire c’est de
réformer la réforme. On peut se poser
la question de la pertinence de la réforme,
mais moi je constate que l’utilisation de
ce genre de terme est toujours en fonc-
tion de l’effet produit sur l’opinion publi-
que. C’est-à-dire que si on a le sentiment
qu’il y a une réaction positive chaque
fois qu’on prononce le mot réforme, il
va être utilisé à l’excès. Si on a l’impres-
sion que la politique conduite jusqu’à
maintenant est l’objet de jugements
négatifs, vous le constatez déjà et nous
allons le constater de plus en plus, on
va peut-être moins parler de réforme.
La difficulté pour ceux qui gouvernent,
c’est que les mots eux-mêmes sont
perpétuellement à réformer et en cours
de réforme parce qu’il y en a qui sont très
sympathiques à un moment et, quand
ils aboutissent, ils sont identités à une
politique concrète appréciée avec ses
effets positifs et négatifs. Là, ça devient
beaucoup moins glorieux et beaucoup
moins sympathique que la grande
réforme qu’il faut saluer: c’est la réforme
de la technique, c’est la réforme de la
science, c’est la réforme de la médecine.
Lavoisier est un grand réformateur. Les
gens qui ont mis au point l’électricité,
aussi. La réforme qui, dans son prin-
cipe, est positive, présente des risques
et qui sont justement l’occasion de dire:
il y a un défi auquel il faut répondre.
Je pense que des associations comme la
vôtre sont absolument indispensables
pour modérer les élans, parfois sincères,
parfois hypocrites, parfois conduits par
le désir d’améliorer les choses. Il faut bien
croire que les politiques sont toujours à
la recherche de conserver le pouvoir
et qu’ils se fichent du reste. Ils essayent
de concilier les deux. Mais d’être réélus
et d’avoir une activité reconnue comme
positive à l’égard de leurs administrés,
par exemple. Mais il n’en demeure pas
moins qu’ils peuvent se tromper, tous les
hommes peuvent se tromper et qu’en
réalité, vouloir imposer une réforme dans
un milieu qui a un professionnalisme,
une expérience et des connaissances
que n’ont pas justement les politiques,
c’est extraordinairement dangereux. Et
ça, tous les spécialistes, les gens de la
recherche, les physiciens, les biologistes,
les gens de la médecine, les magistrats
en matière judiciaire le disent tous : la
réforme ne peut venir que de ceux qui
maîtrisent la forme actuelle.
Alain Rey,
Linguiste, Lexicographe et
Rédacteur en chef de Le Petit Robert
(intervention enregistrée)
32
•••
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
33
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
LE RETOUR SUR LES MOTS EUX-MÊMES est une
des conditions du déblocage de notre
imaginaire. Quand j’ai eu l’occasion, il y
a quelques années, de faire cette mission
sur une autre approche de la richesse,
j’ai été frappé du fait qu’il y avait un
enfermement dans les chiffres. Par
exemple, les chiffres de notre comptabi-
lité nationale et de notre fameux Produit
Intérieur Brut nous enferment dans
une conception de la richesse qui est
devenue de plus en plus contreproduc-
tive par rapport à du développement
humain soutenable. Mais, au-delà de
l’enfermement dans les chiffres, l’en-
fermement dans les mots est encore plus
pernicieux. Il y a quantité de mots, si
nous ne les réhabitions pas, si nous ne
donnons pas l’autorisation de les faire
revivre, ces mots deviennent enfermants.
Pour donner deux exemples :
• le mot «valeur» est un des mots les
plus forts dans toutes les langues
latines et c’est un des mots qui ont été
le plus victimes de logique réduc-
trice. Valor en latin, ça veut dire force
de vie, le contraire de la valeur. La
valeur ajoutée, c’est un supplément
de force de vie. Vous voyez bien que
quand le mot valeur subit une réduc-
tion économiste, par exemple dans
les langues anglo-saxonnes quand
on parle de value for money, ou pire,
quand on arrive à dire que l’un des
objectifs d’une entreprise est la créa-
tion de valeur pour des actionnaires,
on perd complètement le sens-même
du mot valeur comme force de vie
• c’est la même chose pour un mot très
fort, tel que le mot métier. Métier, ça
ne veut pas dire job, emploi ou travail.
Métier, c’est un mot forgé au XXIIe
siècle par le compagnonnage à par-
tir de deux mots latins : ministerium
pour le ministère, le service, mys-
terium pour le mystère. Le métier,
c’est un ministère mystérieux. C’est-
à-dire que c’est en rapport avec de
la vocation, avec du projet de vie. Ce
qui est d’ailleurs le sens initial du
mot profession avant sa réduction
techniciste. On ne professe que ce qui
nous habite. Vous êtes, vous, dans
des métiers et dans des professions
et dans des vocations qui sont sur
le terrain de projet de vie et qui ont,
par conséquent, une intensité très
au-delà de la question des emplois,
des jobs, du travail.
Revisiter les mots, les réhabiter, se
donner le droit de leur redonner sens
est un élément fondamental. Et je trouve
que c’est effectivement important lors-
qu’on parle de réforme, au singulier
comme au pluriel. Se donner le droit de
revisiter les mots, c’est aussi se donner
le droit, pour mieux préparer l’avenir, de
regarder le temps long, à l’instar de la
recommandation de Fernand Bredel, ce
grand historien du temps long. Et, évi-
demment, quand on regarde le temps
long dans des sociétés comme les nôtres
qui ont été marquées fortement par la
culture du christianisme, le mot réforme
ne peut pas nous dispenser de faire
retour sur un temps de basculement
absolument fondamental dans l’histoire
de nos sociétés qui a été la question
de la réforme au sens de la mutation
interne au christianisme que nous avons
connue.
Vous avez une phrase de Max Weber qui
est je crois extrêmement significative,
parce qu’en replaçant la question de
la réforme dans le temps long du passé,
elle nous aide à mieux prendre en
considération les enjeux du présent et
de l’avenir. Cette phrase de Max Weber
était la suivante dans son ouvrage :
«L’éthique protestante et l’esprit du capi-
talisme ». Il caractérisait l’entrée dans
la modernité et qui s’est trouvée en
Occident comme étant aussi l’entrée
dedans ce qu’on a appelé le capitalisme
par le passage, disait-il, «de l’économie
du salut, au salut par l’économie». Et c’est
important de faire retour sur ce bas-
culement, parce qu’elle nous montre
à quel point les mutations dans l’ordre
économique sont toujours profondé-
ment reliées à des mutations dans
l’ordre culturel –culture au sens le plus
large du terme, le religieux étant une
des dimensions du culturel– et puis la
dimension sociétale.
Lorsqu’on passe de l’économie du salut
au salut par l’économie, c’est un boule-
versement profond qui vient d’un nou-
veau rapport au temps et d’une nouvelle
vision de l’avenir. L’avenir de l’économie
du salut, c’était un avenir qui était struc-
turé par la question de l’Au-delà dans
des sociétés où la moyenne de vie ne
dépassait pas 30 ans et où, pendant
plusieurs siècles avant l’invention du
purgatoire qui a été superbement ana-
lysée par l’historien Jacques Le Goff,
la représentation de l’avenir dans l’Au-
delà était structurée par la question du
couple: salut ou damnation. Le cœur de
l’économie du salut, c’était de construire
un système d’indicateurs et même, plus
précisément, un système comptable qui
avait pour vocation de permettre aux
individus comme aux groupes sociaux
de savoir s’ils étaient sur le bon chemin
du salut ou, au contraire, s’ils étaient en
train de risquer la damnation.
Et c’est pour cette raison, qu’au cœur
de la comptabilité du salut, vous aviez
d’un côté ce qu’on pourrait appeler la
colonne des péchés pertes qui corres-
pondaient à la gradation des risques du
côté de la damnation. C’est intéres-
sant de rappeler, qu’à cette époque, le
péché mortel le plus grave, plus grave
que le meurtre, plus grave que la luxure,
La réforme de l’économie du mieux-êtreUn temps de pause et de recul sur cette question de la réforme est primordial, surtout quandon est pris par le rythme endiablé des réformes successives et parfois contradictoires.Patrick Viveret nous fait part ici sa vision sur cette thématique.
•••
«Revisiter les mots, les réhabiter, se donner le droit de leur redonner sens est un élément fondamental».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
plus grave que les sept péchés capi-
taux, c’était le prêt à intérêts. Pourquoi?
Parce que c’était le blasphème absolu.
L’idée que l’argent pouvait travailler
dans le temps, c’était mettre l’argent au
même niveau que Dieu. C’était donc le
blasphème absolu, c’était le péché
mortel par excellence.
Jacques Le Goff raconte dans sa thèse
–qui a donné lieu à un petit livre abso-
lument magnifique que je vous conseille
qui s’appelle « La bourse et la vie » –
comment il y avait un système extrême-
ment précis et rigoureux qui ne serait
pas forcément inutile en ces temps
d’explosion de revenus indécents, qui
permettait, pour qu’un usurier par exem-
ple puisse racheter son salut, de faire la
distinction entre la part légitime de
revenus qu’il avait acquis par son ser-
vice. On appellerait cela, en termes
modernes, une intermédiation finan-
cière qui est un service donnant droit
à un revenu légitime, cela c’était l’usus.
Et puis l’abusus lié au fait que l’argent
faisait des petits par lui-même par le
biais de l’intérêt composé. Cela c’était
un revenu illégitime. Et, s’il voulait évi-
ter la damnation et s’il voulait pouvoir
transmettre à ses proches une part
légitime, il devait redonner toute la part
de revenu illégitime liée à l’argent fabri-
qué par l’intérêt.
Quand on avait cette colonne comptable
des pertes péchés, elle était équilibrée
par une autre colonne, la colonne des
bénéfices. Mais bénéfices – il faut tou-
jours se souvenir de l’origine des mots :
benefacio en latin –, c’est faire le bien.
Les bénéfices dans la comptabilité du
salut, c’était les bienfaits.
Et vous voyez bien que le basculement
produit par le passage de l’économie du
salut au salut par l’économie est un
basculement qui n’est possible qu’à
partir du moment où il y a une réforme
dans la représentation du temps religieux
lui-même. Réforme qui a été préparée
–comme le rappelait Jacques Le Goff–
par l’invention du purgatoire qui, en subs-
tituant une représentation ternaire de
l’Au-delà à une représentation binaire,
créait en même temps les conditions
sociétales d’un bouleversement lui aussi
ternaire et préparait les premières condi-
tions de l’autonomisation de l’économi-
que et faisait, notamment, qu’un certain
nombre de péchés mortels liés à la
richesse monétaire n’avaient plus le
même caractère de gravité, mais res-
taient pour autant dans l’ordre du péché.
Et puis, ce grand basculement, introduit
justement par la réforme au sens de
la réforme protestante qui fait que la
richesse et, notamment, la richesse
monétaire, ne va plus être dans l’ordre
du péché ; elle peut même devenir un
indicateur du salut. Mais, en revanche,
ce qui reste de l’ordre du péché, c’est
la jouissance de cette richesse. Et donc
les conditions-mêmes de l’accumula-
tion du capital par l’épargne et l’inves-
tissement se trouvent réunies à partir
du moment où la richesse, devenant un
indicateur du salut, mais la jouissance
de cette richesse étant, elle, toujours du
côté du péché, évidemment les condi-
tions de l’épargne et de l’investissement
se trouvent réunies. Et le caractère sys-
témique du bouleversement, introduit
dans l’ordre culturel et religieux, crée
dans l’ordre sociétal et crée dans l’ordre
économique d’autres bouleversements.
Si nous nous souvenons de ce grand
basculement qui est à l’origine des temps
modernes, nous pouvons nous poser
une question qui est, je crois, extrême-
ment importante pour comprendre notre
actualité et notre avenir et qui est au
fond la suivante: est-ce que derrière ce
que nous appelons crise, nous n’avons
pas en réalité un phénomène beaucoup
plus profond et d’ampleur historique
beaucoup plus radicale, au sens racinien
du mot radical? Cette question serait :
est-ce que nous ne sommes pas juste-
ment à la fin de ce second grand cycle
historique, analysé par Max Weber, qui
serait la fin du cycle du salut par l’éco-
nomie? Pour deux raisons majeures :
• d’une part, parce qu’un certain nom-
bre des promesses du salut par l’éco-
nomie n’ont pas été tenues, en parti-
culier la promesse d’un rapport quasi
automatique entre progrès techni-
que, progrès économique, progrès
social, voire progrès moral. Et nous
savons bien, à travers les drames du
XXe siècle et, en particulier, le drame
absolu, ce mal absolu de la barba-
rie interhumaine qu’a représenté la
solution finale, que des éléments
de progrès technique, économique,
scientifique, etc. peuvent être mis au
service de la barbarie interhumaine
• et, d’autre part, à côté de cette non-
promesse tenue par l’économique
comme salut, le fait que la question
du salut fait en quelque sorte retour
pour l’humanité, dans les conditions
laïques de la question du salut.
Lorsque nous évoquons, à travers les
grands défis qui sont autant de rendez-
vous critiques de l’humanité avec elle-
même, les défis écologiques du climat ou,
ce qui est à certains égards plus impor-
tant encore, la question du risque d’une
sixième grande extinction, nous parlons
bien du retour de la question du salut
pour l’humanité. Est-ce que l’humanité
va en finir prématurément avec sa pro-
34
•••
«Est-ce que nous ne sommespas justement à la fin du cycledu salut par l’économie?».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
35
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
pre aventure, risquer en quelque sorte
une sortie de route prématurée dans
son histoire? Ou est-ce qu’au contraire,
l’humanité va être capable d’utiliser
les défis colossaux qui sont devant elle
pour franchir un saut qualitatif dans
sa propre histoire? Le saut qualitatif qui
avait été franchi par l’histoire de l’homi-
nisation, dans l’ordre biologique, est-ce
que l’humanité est capable de le franchir
dans l’ordre de l’humanisation dans
l’ordre politique, culturel, économique,
sociétal? A ce moment-là, nous som-
mes bien sur le terrain d’une nouvelle
grande réforme, mais d’une réforme
qui articule la question de la réforme
intellectuelle morale, la question de la
réforme culturelle avec les autres élé-
ments de réformes économiques et
sociétaux.
Si cette hypothèse mérite d’être regardée
de près, cela nous permettrait de voir
à quel point, dans la figure de la crise
actuelle, vous avez un couple particuliè-
rement important à analyser qui appelle
en retour des éléments de stratégie
positive qui sont justement sur le terrain
des nouveaux métiers, des nouvelles
professions, au cœur des politiques et
des économies du mieux-être qui sont
le cœur-même de votre activité.
Parce que ce que nous avons dans la crise
du cycle historique du salut par l’écono-
mie est un couple constitué par le rapport
entre la démesure et le mal-être. La
démesure, ce que les Grecs appelaient
lubris, est au cœur du dérèglement de nos
rapports avec la nature et du défi écolo-
gique. Elle est au cœur du creusement
des inégalités sociales mondiales: quand,
selon les chiffres des Nations Unies,
la fortune personnelle de 225 person-
nes est égale au revenu cumulé de deux
milliards et demi d’êtres humains, nous
sommes dans de la démesure. Elle est
au cœur du découplage entre l’économie
financière et l’économie réelle.
Bernard Lietaer, un des anciens direc-
teurs de la Banque Centrale de Belgique,
rappelait, qu’avant l’entrée dans la crise
financière, sur les 3 200 milliards de
dollars qui s’échangeaient quotidienne-
ment sur les places financières, moins de
3%, 2,7% exactement, correspondaient
à des biens et des services réels. C’est
donc bien de la démesure. Mais la déme-
sure a été au cœur aussi, cette fois, dans
les rapports au pouvoir de l’autre grand
effondrement qui est extrêmement pro-
che à l’échelle de l’histoire puisqu’il
date d’une vingtaine d’années, qui a été
l’effondrement de l’empire soviétique.
Les Nations Unies avaient mis en évi-
dence en 1998 dans un rapport que les
sommes qui auraient été nécessaires
pour traiter les questions les plus vita-
les de l’humanité: la faim, l’accès à l’eau
potable, les soins de base et le logement,
représentaient un dixième seulement
des sommes dépensées annuellement
dans l’économie des stupéfiants, qui est
par excellence une économie de mal-
être ; représentaient le vingtième des
dépenses militaires, qui est au cœur là
aussi d’une économie de mal-être et de
maltraitance, beaucoup plus qu’une
économie de protection ; et le dixième
aussi des budgets annuels de publicité.
Si nous rassemblons ces éléments, nous
voyons bien qu’il y a un couple qui est
formé par la démesure et le mal-être et
que le couple positif est, au contraire,
formé par la question de la mesure, pas
au sens de l’obsession quantitative,
mais de la mesure au sens de l’accep-
tation des limites. Mais l’acceptation
des limites qui est une nécessité pour
des raisons de soutenabilité écologique
et sociale de nos sociétés doit s’accom-
pagner d’un supplément de qualité dans
l’ordre de l’être. Parce que si l’on se
contente d’avoir simplement de la logi-
que de limitation sans avoir des politiques
et des économies du mieux-être, nous
sommes dans la contradiction d’un toxi-
comane auquel on chercherait à impo-
ser une cure de sevrage. S’il n’a pas une
perspective positive au-delà de sa cure,
il préfèrera encore sa toxicomanie.
Et sortir de sociétés qui sont des sociétés
de consolation et qui utilisent la consom-
mation comme consolation des éléments
de mal-être que sont la course perpé-
tuelle, le stress renouvelé, le fait de consi-
dérer autrui comme un rival menaçant,
tous ces éléments qui sont constitutifs
d’un mal-être et que l’on doit en perma-
nence compenser, consoler par un rêve
•••
«Si l’on se contente de la logique de limitation sans avoir des politiques et des économies du mieux-être, nous sommesdans la contradiction d’un toxicomane auquel on chercherait à imposer une cure de sevrage».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
de mieux-être dont la publicité est le
vecteur par excellence puisque vous
savez comme moi que ce que nous pro-
met la publicité, ce ne sont pas des objets.
Il suffit de regarder une campagne publi-
citaire: c’est de la beauté dans le rapport
à la nature, c’est de l’amitié, de la paix,
de l’amour dans le rapport à autrui,
c’est du bonheur, c’est de la sérénité,
c’est de l’authenticité. C’est-à-dire que
c’est une promesse dans l’ordre des
rêves, dans l’ordre du développement,
dans l’ordre de l’être, mais qui nous fait
croire que c’est par une consommation
dans l’ordre de l’avoir que nous accéde-
rons à cette promesse. Et c’est là que se
trouve le mensonge.
Si nous rassemblons ces éléments et si
nous disons que la sortie positive de
ce cycle historique que nous sommes
en train de vivre, la sortie positive de
cette crise systémique qui appelle une
réponse elle-même systémique, c’est
l’alliance de l’acceptation des limites,
l’alliance de la frugalité, de la sobriété,
avec la question du mieux-être, avec
la question du bien vivre, pour repren-
dre un terme fort évoqué lors du dernier
forum social mondial qui s’est tenu en
Amazonie, alors, à ce moment-là, nous
voyons bien que le cœur des nouveaux
enjeux des réformes à venir est centré
sur la question des métiers du mieux-
être, des métiers comme ministères
mystérieux. Et là, vous êtes au cœur de
ces projets !
Cette approche nous permet, en quel-
que sorte, d’aller faire un tri sélectif entre
ce que l’on appelle réforme au sens
limitatif du terme et qui s’est trouvée
souvent une espèce d’hésitation entre
deux cycles qui eux sont des cycles
courts: un cycle plutôt marqué dans les
années 1970 par des excès de régula-
tion et de gestion bureautique et un cycle
dont nous sortons à peine qui a été, au
contraire, marqué dans les années
1980 par des excès de dérégulation.
Si nous plaçons la question de la
réforme dans une perspective histori-
que plus longue, plus positive, qui est
celle de la question des ministères,
nous voyons que l’un des enjeux fon-
damentaux au service de politique et
d’économie du mieux-être, c’est d’allier
le meilleur de la créativité et de la sou-
plesse que l’on retrouve, par exemple,
dans le secteur privé, avec le meilleur
d’une logique d’intérêt général qui cor-
respond, par exemple, à votre exigence
de non-lucrativité. Et que ce couple-là
qui est positif est évidemment l’alterna-
tive nécessaire à l’autre couple extrême-
ment destructeur qui a eu tendance à se
mettre en place au cours de ces derniè-
res années et qui avait plutôt tendance
à cumuler les inconvénients de la mar-
chandisation à outrance avec les incon-
vénients de logique bureaucratique.
Vous voyez que la vision longue de la
question des cycles historiques peut
nous permettre en même temps d’aller
travailler sur les défis de l’avenir, en
cessant d’être simplement ballottés
par les cycles courts de réformes suc-
cessives, reprendre de la force –comme
l’évoquait Florence Leduc dans son
intervention initiale –, c’est-à-dire se
redonner une capacité de donner au
mot valeur son sens initial de force de
vie, au mot métiers leurs sens initiaux
de vocations, de professions au service
du mieux-être. Et, si nous sommes dans
cette perspective, nous sommes effec-
tivement dans une ambition qui permet
de donner sens et de donner force à la
capacité de vivre au présent, dans sa
difficulté, dans son incarnation; mais un
présent qui est, à ce moment-là, habité
par ces enjeux de transformation.
C’est au fond ce que résumait bien
Oscar Wilde dans une de ses phrases
magnifiques quand il disait : « Il faut
avoir des rêves suffisamment grands
pour ne pas les perdre de vue au fur et à
mesure qu’on les poursuit».
Patrick Viveret,
Philosophe et anthropologue
36
•••
«Le cœur des nouveaux enjeux des réformes à venir est centré sur la question des métiers du mieux-être».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
37
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
POUR RÉFLÉCHIR À LA QUESTION DE LA RÉFORME,
comme la question des mots et la ques-
tion linguistique étaient très présentes
je le savais dans les propos de ceux qui
m’ont précédée, il y a une chose qui
m’est revenue spontanément en prépa-
rant cette intervention: c’est la question
du langage, mais moins à travers les
mots qu’à travers leur assemblage et
à travers ces deux axes qui structurent
notre discours de façon permanente qui
est l’axe de la grammaire où les mots
s’enchaînent les uns aux autres pour
produire des idées puis cet axe beau-
coup plus vertical qui est l’axe du choix,
où en fait on hésite pour produire des
nuances et pour créer des priorités
dans le choix des termes que l’on utilise.
Je me disais qu’aujourd’hui, si on veut en
quelque sorte démarquer les réformes
les unes des autres, je ferais un grand
distinguo entre ce que j’appellerais les
réformes de maintenance, destinées à
réparer le système existant pour sa
pérennité en préservant soigneusement
les institutions telles qu’elles sont, au
risque parfois de faire le choix de l’im-
mobilisme, alors même qu’on parle du
progrès et la réforme, beaucoup plus
fondamentale, qui consiste à produire
des articulations nouvelles, articula-
tions syntaxiques, en proposant à des
acteurs qui ne sont pas traditionnelle-
ment articulés les uns aux autres et qui
ne travaillent pas habituellement dans
le même système, de produire des inno-
vations d’organisation, des innovations
sociales, en même temps qu’effecti-
vement on peut chercher –et c’est l’axe
de la verticalité– à bouleverser les hié-
rarchies traditionnelles.
Pour tenter d’illustrer mon propos, je
me référerai à l’actualité législative,
somme toute assez récente, en parlant
d’un texte qui, je sais, a beaucoup occupé
la FEHAP. Monsieur le Président, vous
avez été très actif, et j’ai eu l’occasion de
recevoir des émissaires pour alerter le
politique sur le risque d’oublis fâcheux
qui pouvaient ici et là se faire jour, ou
même pour renforcer certains aspects
de la loi HPST. J’évoquerai aussi la loi
que je connais peut-être le moins mal,
celle que j’ai contribué à faire adopter
à l’Assemblée en 2005 portant, encore
une fois, réforme de la politique du han-
dicap. Mais aussi d’autres sujets qui
vous tiennent à cœur : la question du
cinquième risque.
Pour ce qui concerne HPST, on a là en
germe –parce que rien n’est fait encore,
d’abord parce que la loi est dans la navette
et parce qu’en plus il faudra que cette
loi soit appliquée, ce qui est encore une
autre affaire– cette idée d’articulation
innovante avec, en particulier, la créa-
tion par le texte des futures Agences
Régionales de Santé. Ce défi qui, pour
le coup, me semble vraiment réforma-
teur, qui consiste à prétendre que l’on
peut désormais associer de manière
extrêmement intime, dès la conception,
dès l’ingénierie de nos futurs systèmes,
la logique sanitaire, la logique médico-
sociale. Une aspiration très ancienne de
nos mandants, de tous ceux que nous
connaissons et qui, au bout de la chaîne,
attendent un accompagnement de qua-
lité, une réponse à 360° là où, jusqu’à
présent, nous leur avons souvent pro-
posé un parcours du combattant où il
s’agissait pour eux de faire leur marché
auprès de professionnels distincts
s’ignorant les uns les autres, pour se
construire un accompagnement per-
sonnalisé dans des situations complè-
tement individuelles.
Les ARS : une avancée pour notre système
Si nos ARS voient le jour dans l’esprit
que, je crois, le législateur a voulu leur
donner, avec votre aide et dans cette
coproduction – toujours cette idée de
syntaxe dont je parlais tout à l’heure–,
je pense que nous allons produire une
avancée extrêmement importante qui
marquera pour longtemps nos systè-
mes sociaux et de protection sociale.
Une avancée qui les marquera dans les
processus qu’ils seront capables de
mettre en œuvre, les marquera dans
l’idée qu’il n’y a pas désormais ou qu’il
n’y aura plus de prévalence d’un sys-
tème sur l’autre mais que ces deux sys-
tèmes pourront ensemble coproduire
des solutions originales. Une avancée
qui marquera aussi sans doute nos
réflexions demain sur les modes de
financement et sur les allocations de
ressources aux uns et aux autres.
Mais cette dimension, il faudra que nous
ayons le souci d’en vérifier l’application
précise par des systèmes de contrôle et
de pilotage intégrés. Oublier les béné-
ficiaires, oublier les usagers comme on
dit, oublier ceux qui sont à l’origine de
l’expression du besoin serait une erreur
fatale et ferait de la réforme une manière
de normer un système contraignant qui,
«Nous sommes à un sacré carrefour»
Ancienne Secrétaire d’État aux personnes handicapées, actuelle députée du Val-de-Marne mais aussi Présidente de fondation, Marie-Anne Montchamp nous apporte sonéclairage.
•••
«Oublier les bénéficiaires,oublier les usagers, serait une erreur fatale».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
du coup, perdrait de son efficacité et
de sa pertinence.
J’ai été très marquée, lors des travaux
sur la loi 2005 pour la politique du han-
dicap, en constatant cette réalité que
souvent on oublie de formuler, c’est que
dans notre paysage français de la pro-
tection sociale et, en particulier, sur le
champ du handicap, ce sont les familles,
les personnes qui ont structuré ce sec-
teur. Et que, curieusement, là où notre
Etat jacobin est tellement prompt à
décider d’en haut, à normer et à impo-
ser, nous devons ce tissu absolument
remarquable de solutions, comme on
dit parfois, pour les plus fragiles d’entre
nous, à cette capacité d’innovation, à cette
audace infinie, à cette aversion au risque
si faible qui a été celle des familles des
personnes handicapées qui ont, en fonc-
tion des sujets, dans leur coin de France,
sur leur bout de territoire, fabriqué tout
ce tissu qui, aujourd’hui, s’est structuré
et, au-delà de se structurer lui-même,
structure nos politiques sociales.
Là, j’en viens à ce deuxième axe que
j’évoquais qui est celui de la verticalité
et celui du choix. L’axe qui, quand on
parle, fait qu’on va choisir ou pas le mot
réforme, qui fait que l’on va plus ou moins
appuyer sur une notion pour aborder
une question de nuance, c’est cet axe de
la hiérarchie des sens que l’on apporte
effectivement quand on construit une
approche réformatrice.
Le rôle de la CNSA
Vous évoquez souvent dans vos propos le
rôle de la Caisse Nationale de Solidarité
pour l’Autonomie, qui est – j’ose dire –
un OVNI dans nos systèmes de protec-
tion sociale. Pourquoi un OVNI? Vue de
loin, elle ressemble à une institution
comme les autres. Mais vue d’un peu
près, on a su associer l’Etat, évidem-
ment, les partenaires sociaux, à n’en
pas douter mais aussi les associations
représentées dans le tour de table de la
Caisse Nationale de Solidarité et les
collectivités locales. Cela veut dire que
l’on a pensé puissance publique, que
l’on a pensé partenariat social, mais que
l’on a aussi pensé ancrage territorial
et genèse, ingénierie de projets, en sou-
tenant les initiatives associatives. Faire
la Caisse Nationale de Solidarité, faire
adopter par le législateur cet OVNI, contre
la volonté plus ou moins explicite de
nombre de tenants des institutions tra-
ditionnelles, cela a été une réforme qui
est passée quasi inaperçue, c’était en août
2004. Mais c’était une audace marquante.
Car, demain, nous avons là un marqueur
que nous pourrons réutiliser pour
structurer les petits de cette réforme-là
et proposer –et j’en suis convaincue– si
nous nous en donnons la peine, si nous
avons assez conscience du fait que main-
tenant nous changeons d’époque, que
l’ordre des choses doit être repensé et
revisité, de réformer plus profondé-
ment encore nos systèmes sociaux.
Pourquoi? Parce qu’en créant, par la loi
de 2005 et par la loi de 2004, à la fois la
Prestation de Compensation du Handi-
cap, la PCH, et à la fois la Caisse Natio-
nale de Solidarité, nous avons en quelque
sorte créé un diptyque qui permet d’im-
pulser dans ce paysage un outil de
contrôle, un outil ressource, de savoir et
de compréhension, tout en même temps
qu’un système ascendant, là où nous ne
savions raisonner traditionnellement
que de manière descendante.
Je vais préciser ma pensée: qu’est-ce
que c’est que la PCH, la Prestation de
Compensation pour le Handicap? C’est
partir du projet de vie de la personne
handicapée. C’est analyser son besoin
de compensation pour lui permettre de
réaliser son projet de vie. C’est construire
avec elle, comme on ferait un devis, les
moyens qu’il faudra solvabiliser pour
qu’elle puisse être indépendante et
faire ce qu’elle veut faire. Une approche
ascendante qui part du besoin pour
construire la solution, opposée totale-
ment à cette logique de financement
public barémisé qui descend en pluie de
manière indistincte sur un ayant droit
mis au même niveau que l’ayant droit de
la porte d’à côté, alors même que son
besoin diffère. Il faut que nous ayons en
tête la genèse de cette nouvelle vision de
la construction d’une prestation sociale
pour que, demain, nous soyons capables
d’imaginer, pour le cinquième risque
notamment, un chemin inédit.
L’idée n’est pas d’opposer les uns aux
autres, mais de chercher des voies troi-
sièmes, des points de médiation permet-
tant de faire émerger des modèles de
troisième génération, là où notre pensée
est par trop binaire. Opposer l’autorité
au conseil, opposer le non-choix baré-
misé au projet de vie, opposer la mal-
traitance ordinaire d’une société autori-
taire qui écrase les réalités individuelles
à l’idée d’une soutenabilité fondée sur
la coopération, la responsabilité, la
38
•••
«C’est analyser son besoin de compensation pour lui permettrede réaliser son projet de vie. C’est construire avec elle, commeon ferait un devis, les moyens qu’il faudra solvabiliser pourqu’elle puisse être indépendante et faire ce qu’elle veut faire».
«C’est partir du projet de viede la personne handicapée».
Le defi des reformes
•••
SODEXO Vauban Humanis CACIC
41
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
coproduction, c’est je crois une question
qui nous est posée maintenant.
Le PLN constitue la 3e voix
Et, dans vos propos tout à l’heure
Patrick Viveret, j’entendais interpréter,
avec ma sensibilité propre, cette invita-
tion à creuser cela. Or, précisément, il
me semble que vous êtes cette voie troi-
sième. Opposer de manière caricatu-
rale le public au privé, privé lucratif,
public généreux et dépensier, pour
analyser cet apport spécifique que vous
conférez en apportant cette troisième
hypothèse dans un modèle si bien
ordonné qu’on finirait par l’oublier telle-
ment on le connaît et tellement on pour-
rait le passer sous silence, c’est pour ça
qu’il faut être prudent quand des lois
sont discutées. C’est je crois quelque
chose d’extrêmement important.
Il y a une phase que j’ai toujours en tête,
je la traîne avec moi dans mes diver-
ses activités. Cette phrase est de Valéry
–mais je parle sous votre contrôle– qui
est : « Le fond de la pensée est pavé de
carrefours»… Nous sommes à un sacré
carrefour.
Et je pense que par cette conscience
que vous avez de la force que vous repré-
sentez, de votre apport à une vision
refondée, globale, soutenable, bien trai-
tante, sur un modèle économique ori-
ginal, c’est un devoir que de la faire
prospérer. C’est pour ça que c’était
audacieux ce temps des mots et des
idées en début de votre Congrès, après
votre Assemblée générale. Mais c’est
un véritable investissement, en tout cas
c’est comme cela que je le perçois. Et je
vous souhaite, vraiment du fond du cœur,
que sur ce chemin chacun puisse,
autant qu’il le souhaitera, faire son par-
cours. En revanche, c’est à un apport col-
lectif que cette contribution reviendra.
Marie-Anne Montchamp,
Députée du Val-de-Marne,
ancienne Secrétaire d’Etat aux
Personnes handicapées
•••
Association OETH STAN LE SCOLAN RH ET CONSEIL CAHPP
42
LA CONCURRENCE est à la fois une situation
objective «que le meilleur gagne» et un
comportement subjectif « le souci que
chacun des protagonistes aura d’être le
meilleur».
L’éthique, si l’on suit la définition qu’en
donne Lévinas, est la conscience que les
sujets ont d’agir pour et devant autrui :
son sens se construit donc bien sous le
regard d’autrui, ce qui va à l’encontre de
la logique individualiste de la concur-
rence. Or, la saine gestion ne peut être
conçue comme exclusive de la logique du
juste soin. L’hôpital devrait en théorie
être le lieu de l’éthique le plus haut, le
lieu de l’«hospitalité» par excellence où
se rencontrent un malade et un soignant,
un dépositaire du savoir et un être en
attente d’être aidé.
Si ces logiques entrent durablement en
conflit, l’arbitrage ne saurait dès lors se
faire qu’au profit des valeurs de soin qui
garantissent le sens de l’œuvre de santé.
Un certain nombre de mesures vont à
l’encontre-même de cette primauté du
soin. L’application de la T2A aux soins
palliatifs suppose ainsi non seulement
un tri des malades à l’entrée, mais aussi
la nécessité du transfert de patients
d’un hôpital à un autre, au bout d’un
certain nombre de jours, ce qui va à l’en-
contre de l’intérêt-même du patient. De
même, les conflits parmi les membres
du personnel qui préfèreront tel ou tel
établissement en raison des conditions
de travail s’opposent au principe d’un accès
au soin qui soit le même pour tous.
La demande éthique est, en effet, forte-
ment tributaire de la fragilité des popu-
lations prises en charge. L’éthique est
inextricablement liée à l’acte soignant.
On ne peut parler que d’une éthique
de situation. Il n’y a pas, en effet, de dis-
cours éthique tout fait, d’où la nécessité
de penser l’éthique en termes évolutifs.
La concurrence ne s’immisce pas uni-
quement dans le fonctionnement des
établissements, elle s’immisce au cœur-
même des relations individuelles entre
le praticien et son patient, d’où la confron-
tation problématique entre ce que le
médecin devrait faire et ce qu’il peut
faire réellement, à l’aune de la contrainte
économique qui pèse sur lui.
Le patient est la première victime d’un
mésusage de la concurrence. Les indi-
vidus doivent être vigilants à l’égard de
ces dérives, notamment en ouvrant le
débat public à ces questions. Pour que
la concurrence fonctionne, il faut aussi
une stratégie d’action élaborée, définie,
à partir d’un diagnostic commun à l’en-
semble du personnel, afin que chacun
puisse donner sens à son action.
De fait, la concurrence ne doit pas être
diabolisée. Celle-ci peut ainsi par certains
côtés amener une amélioration de la
culture gestionnaire du Privé Non Lucra-
tifqui n’est pas à rejeter d’emblée. Le PNL
a, en effet, à apprendre du privé, ne serait-
ce que par la mutualisation des moyens
et des compétences. Le débat éthique
n’est d’ailleurs pas propre au PNL et se
pose dans tous les secteurs. La concur-
rence pourrait alors être un lieu de
confrontation des méthodes de gestion.
L’irruption de la concurrence répond
aussi à une évolution de la société dont
il faut tenir compte. La logique d’aide et
de solidarité qui primait dans la société
sous les trente glorieuses a fait place,
depuis les années 80, à une logique
dominée par la dimension économique.
L’idéal de prise en charge du besoin se
heurte alors aux limites de la généro-
sité de la collectivité. La contrainte éco-
nomique et la rareté des ressources
nées de l’imposition nécessitent un arbi-
trage entre des questions qui ont cha-
cune un coût. L’éthique peut jouer un rôle
dans ces arbitrages, mais celui-ci reste
limité. Face à des moyens qui se raréfient,
le gestionnaire peut être amené à faire
des choix qui entrent en contradiction
directe avec l’éthique, d’où le fait que la
question éthique ne puisse se poser
qu’au-delà d’un certain seuil de moyens.
En définitive, s’il faut veiller à ce que
l’outil qu’est l’argent ne devienne pas
une finalité en soi, le déni radical de la
nécessité de la concurrence n’est pas
non plus la solution. De fait, on ne doit pas
moraliser quelque chose qui n’est pas
moral en soi. Deux risques se présen-
teraient alors : d’une part, l’utopie qui
consisterait à confondre l’idéal et la réa-
lité, d’autre part, le pharisaïsme qui
consisterait à utiliser l’éthique comme
un alibi pour refuser une adaptation qui
s’impose. La concurrence doit être incor-
porée et adaptée au sens de l’action
hospitalière, à savoir l’éthique. Cette inté-
gration ne se fera pas sans résistance
et sera donc porteuse de résiliences
qui, à terme, témoigneront de la capa-
cité du PNL à s’adapter aux nouvelles
exigences auxquelles il doit faire face.
Manon Derrienic,
Membre du projet collectif
Sciences Po-FEHAP
Concurrence et éthique
La concurrence est aujourd’hui une réalité à laquelle le secteur médico-social ne peutplus échapper. Celle-ci bouleverse le mode de fonctionnement du secteur Privé NonLucratif, en entraînant un alignement du mode de fonctionnement du privé, du PNLet du public.
INTERVENAIENT LORS DE CETTE CONFERENCE-DEBAT
Marie-Eve Joël , Professeur à l’Université Paris-IX Dauphine,
Directrice du Laboratoire d’Economie et de Gestion des Organisations de santé
Elisabeth G. Sledziewski , Philosophe, Maître de Conférence à l'Université de Strasbourg (IEP/Faculté de droit)
Florence Leduc , Directrice de la Formation et de la Vie associative de FEHAP.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
LE THÈME DU CONGRÈS : « Le défi du Privé
Non Lucratif face aux Réformes » s’est
décliné très concrètement lors de cet
atelier sur les spécificités de la gestion
des ressources humaines dans les éta-
blissements PNL.
Durant l’atelier, animé par Francis Morel,
Directeur Général des Hôpitaux Privés
de Metz, plusieurs questions ont été
abordées par les divers intervenants
– Jean-Denis Combrexelle, Directeur
Général du Travail (Ministère du Tra-
vail), Ghyslaine Wanwanscappel et Guy
Courtois, respectivement Présidente et
Vice-président de l’UNIFED –, notam-
ment celle sur les conséquences de la
nouvelle donne législative. En effet, la
question essentielle était de savoir :
quelles sont les conséquences des
réformes pour la gestion des ressources
humaines?
Les intervenants ont, à plusieurs repri-
ses, souligné l’importance de s’empa-
rer des réformes, de les utiliser à bon
escient, en développant une vision de la
gestion tournée vers l’avenir.
Le législateur privilégie désormais le
niveau local des négociations? Qu’à cela
ne tienne! Le secteur Privé Non Lucra-
tif doit savoir s’adapter et, puisque la loi
se contente de fixer les grands princi-
pes de gestion sans pour autant rentrer
dans les détails, chaque établissement
pourra s’emparer de cette réforme pour
décliner localement son organisation
en fonction des réalités de son propre
terrain et ainsi trouver une réponse
adaptée à ses problématiques internes.
Il s’agit de sujets aussi importants pour
le fonctionnement de l’entreprise que:
l’organisation et l’aménagement du
temps de travail, la Gestion Prévision-
nelle des Emplois et des Compétences
(GPEC)…
Les négociations nationales ne seront-
elles pas dans ce cas amenées à s’ins-
crire désormais dans une dimension de
régulation sociale dont le rôle consis-
tera à définir un cadre en matière de
politique sociale qui pourra, ensuite,
être décliné au niveau des entreprises?
Il convient de cesser de réduire la gestion
des ressources humaines à la Conven-
tion Collective de 1951 : l’organisation
du travail, les conditions de travail doivent
être pensées dans une perspective locale.
La gestion des ressources humaines au
plus près du terrain est essentielle, elle
permet, dans le cadre d’une vision pros-
pective, d’apporter des réponses en
adéquation avec les besoins.
Encore plus à l’heure actuelle, ces
réformes nécessitent une gestion des
ressources humaines dynamique et
souple, adaptée aux nouveaux métiers,
aux problèmes de démographie et à
l'évolution des modes de financement
des établissements.
La FEHAP est prête à aider ses adhé-
rents et à leur donner les outils nécessai-
res pour qu’ils soient le mieux à même
de s'emparer des réformes et d'en tirer
le meilleur parti. L’important est de per-
mettre aux adhérents d’agir, d’entrer
dans le droit commun de la négociation.
Il appartient à la FEHAP de développer
une ingénierie permettant de donner
aux entreprises les moyens de s’inscrire
dans le mouvement actuel de décentra-
lisation des négociations au niveau
micro-économique.
Les intervenants ont également souli-
gné l’absence de représentativité dont
souffre le secteur Privé Non Lucratif en
matière de dialogue social.
La représentativité pour les employeurs
du secteur ne tient pas uniquement à la
représentativité électorale – bien que
les dernières élections prud’homales
aient constitué une première base de
représentativité (progression de 11 %
à plus de 19%)–.
La représentativité passe également
par la capacité d’un secteur d’activité
à être un acteur fondamental dans le
champ d’intervention économique qui
est le sien. Il ne tient désormais qu’à
chacun de s’emparer des réformes et
de démontrer que les entreprises du
secteur Privé Non Lucratif ont tout pour
être un acteur incontournable.
La FEHAP est prête à aider ses adhé-
rents à relever le défi des réformes.
Annaïta Shirin Zadeh,
Membre du projet collectif
Sciences Po-FEHAP
Les ressources humaines dans les établissements PNL
Les nombreuses réformes récentes ont des impacts directs en matière de ressourceshumaines. Le but de cet atelier a été d’explorer les spécificités de la gestion desressources humaines dans les établissements PNL depuis ces récentes évolutions.
43
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
INTERVENAIENT LORS DE CETTE CONFERENCE-DEBAT
Jean-Denis Combrexelle, Directeur général du Travail au ministère
Ghyslaine Wanwanscappel, Directrice générale-adjointe de l’ADAPT, Présidente de l’UNIFED, Vice-présidente de la FEHAP
Guy Courtois, Vice-président du SNASEA et de l’UNIFED
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
44
ALORS QUE L’ÉLABORATION DE LA V2010 pour
la certification des établissements de
santé est en cours et que l’évaluation
externe des établissements sociaux et
médico-sociaux va démarrer en juin
2009, ces questions sont au cœur du
mouvement de réforme que connais-
sent ces structures.
C’est dans ce contexte que Raymond Le
Moign de la Haute Autorité de Santé
(HAS), Pascale Dorenlot de l’Agence
Nationale de l’Evaluation et de la Qualité
des Etablissements et Services Sociaux
et Médico-Sociaux (ANESM), et Patrice
Blanc du Centre Beauséjour à Hyères,
nous ont fait part de leur point de vue,
au cours d’un atelier animé par Vincent
Renault, Administrateur de la FEHAP,
et Marine Darnault, Directrice du Secteur
Social et Médico-Social.
Plusieurs constats sont ressortis de
cet atelier
Pour Patrice Blanc, la démarche-qualité
élaborée au sein d’une même associa-
tion gestionnaire gérant à la fois des
activités sanitaires et médico-sociales
doit donner lieu à un enrichissement
mutuel entres ces différentes activités,
dans le cadre d’une démarche unique
intégrant bien évidemment des décli-
naisons spécifiques. L’évaluation et la
certification doivent profiter d’apports
réciproques. La gestion des risques, les
problématiques d’hygiène et de sécu-
rité, la culture palliative, issues du sani-
taire, peuvent également enrichir le
secteur médico-social. Réciproquement,
la bientraitance et le fait de concevoir
les établissements comme des lieux de
vie peuvent enrichir le secteur sanitaire.
Il est à rappeler que les usagers du
sanitaire et du médico-social sont sou-
vent les mêmes personnes, à des stades
différents de la vie.
La transversalité qui caractérise la
FEHAP, constituée d’établissements et de
services sanitaires, sociaux et médico-
sociaux, peut donc représenter un atout
dans le cadre de cette démarche.
Pour l’ANESM, l’évaluation doit également
être pensée comme une dynamique et
non comme une photographie prise à
un moment précis. Il est important d’im-
pliquer les équipes dans cette dyna-
mique de qualité qui doit tendre vers une
perpétuelle amélioration. Il faut rap-
peler que l’évaluation externe sociale et
médico-sociale est distincte de la cer-
tification HAS des établissements.
La HAS recommande alors d’éviter toute
confusion entre ces deux dispositifs dis-
tincts qui, toutefois, bien sûr, ne doivent pas
s’ignorer non plus. Il semble aujourd’hui
prioritaire de concilier calendriers et
procédures, ainsi que de promouvoir
l’utilisation coordonnée des résultats
de ces deux démarches distinctes.
Au regard de la diversité des adhérents
de la FEHAP, il est d’une grande impor-
tance de construire des passerelles. Qui
L’évaluation dans les établissements
L'évaluation dans les établissements sociaux et médico-sociaux et la certification dansles établissements sanitaires : quelles opportunités ? Quelles interactions possibles ?Quelles ouvertures sur d'autres dispositifs ?
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
INTERVENAIENT LORS DE CETTE CONFERENCE-DEBAT
Raymond Le Moign, Directeur de l’accréditation et de la certification de la HAS
Michèle Pondaven, Chef de projet du service évaluation de l’ANESM
Patrice Blanc, Directeur-adjoint du Centre Beauséjour
plus est, les structures ne doivent pas
être évaluées isolément, mais intégrées
dans leur milieu.
L’articulation est également à penser
avec les autres démarches du type cer-
tifications AFNOR, Qualicert… Si de
telles certifications ne remplacent évi-
demment pas l’évaluation externe, per-
mettent-elles de l’alimenter.
Par ailleurs, l’absence de financement
par les autorités de tarification de l’éva-
luation externe demeure problématique
pour nombre de structures sociales et
médico-sociales.
Cet atelier – premier débat associant
la HAS, l’ANESM et des acteurs de ter-
rain – a permis de faire émerger les
nombreuses problématiques du sujet et
la nécessité de continuer à travailler
ensemble. Au regard de notre diversité
et alors que la liste des organismes
habilités à procéder à l’évaluation ex-
terne va être publiée prochainement,
cet échange est essentiel.
Florien Cahagne,Membre du projet
collectif Sciences Po-FEHAP
45
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
LES DIFFÉRENTS INTERVENANTS se sont tout
d’abord entendus sur le fait que la
question n’était plus celle de « coopé-
rer ou ne pas coopérer ? », mais bien
celle de «comment coopérer?». La coo-
pération semble, en effet, aujourd’hui
plus encore qu’auparavant, indispensa-
ble aux acteurs PNL pour s’associer
entre eux ou mutualiser leurs compé-
tences avec des acteurs d’une autre
nature.
Si la coopération permet de surmon-
ter des contraintes de nature régle-
mentaire (obligation de permanence de
soins, autre exemple) ou économique
(réunion d’établissements déficitaires,
par exemple) et vise à éviter des rup-
tures dans les parcours de soins, elle
est nécessaire au positionnement stra-
tégique du secteur PNL face à l’émer-
gence de nouveaux acteurs, tels que les
futures Communautés Hospitalières de
Territoire (CHT) qui réuniront unique-
ment des établissements publics de
santé.
Le projet de loi HPST prévoit effective-
ment de nombreuses transformations
dans le domaine de la coopération et
offre de nouvelles opportunités aux
acteurs PNL.
La mise en place des Agences Régiona-
les de Santé (ARS) constitue une pre-
mière transformation. Les futures ARS
devraient être des interlocuteurs pri-
vilégiés intervenant dans un champ
élargi et favorisant une meilleure coor-
dination et une plus grande visibilité.
Par ailleurs, le projet de loi HPST intro-
duit une nouvelle diversification des
outils de coopération à la disposition
des établissements. Si les outils tradi-
tionnels – convention, Groupement de
Coopération Sanitaire (GCS), Groupe-
ment de Coopération Sociale et
Médico-Sociale (GCSMS), Groupement
d’Intérêt Public (GIP), Groupement d’In-
térêt Economique (GIE), pour les prin-
cipaux– sont maintenus, de nombreu-
ses innovations sont introduites par le
projet de loi. La perspective de la trans-
formation des GCS en établissement de
santé peut ainsi s’analyser comme une
opportunité intéressante pour le sec-
teur Privé Non Lucratif.
Le témoignage de Bernard Lecat est
révélateur de cette situation : le GCS
formé entre le CHU de Nice et la Fon-
dation Lenval ayant vocation à devenir
un établissement de santé. Toutefois,
cette qualification juridique du GCS en
établissement de santé comporte éga-
lement des risques inquiétants de
nationalisation ou de privatisation des
autorisations sanitaires. Une autre
innovation importante réside dans la
possibilité ouverte aux GCS de droit
privé de choisir leur tarification (échelle
publique ou échelle privée).
L’atelier a également été une occasion
d’expression des différentes craintes
des établissements liées à la coopé-
ration. La mise en place des futures
CHT, considérées comme un instru-
ment de restructuration du secteur
public, réunissant les seuls établisse-
ments publics, suscite des interroga-
tions quant au positionnement des
acteurs PNL. Ces derniers se trouvent
dans une position intermédiaire entre
des établissements publics bénéficiant
d’un soutien politique et de l’appui des
ARH et des acteurs privés disposant
d’une capacité financière souvent supé-
rieure.
Il ressort des différentes questions de
la salle que la coopération ne doit pas
se transformer en une absorption pure
et simple : la coopération ne doit pas
être forcée mais rester incitative et fon-
dée sur la volonté des acteurs ; elle doit
respecter les cultures et identités de
chacun des partenaires. La politique
managériale consistant à gérer les dif-
férents statuts de personnels revêt une
importance particulière dans cette
perspective.
Bien que parfois difficile à mettre en
œuvre, la coopération apparaît indis-
pensable à la pérennité des structures
et constitue, en conséquence, un enjeu
stratégique majeur pour le secteur
PNL.
Henri-Charles Croizier,
Membre du projet collectif
Sciences Po - FEHAP
Coopérer ou ne pas coopérer :risques et opportunités
Face aux réformes en cours, et, notamment, la mise en place des futures CHT dans lecadre du projet de loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires » (HPST), la coopération serévèle être un outil indispensable au positionnement stratégique des acteurs PrivésNon Lucratifs.
INTERVENAIENT LORS DE CETTE CONFERENCE-DEBAT
Fabrice Laurain, conseiller technique à l’ARH de Picardie, en remplacement de Pascal Forcioli, Directeur de l’ARH de Picardie
Laurent Houdart, Avocat au barreau de Paris, spécialiste du droit de la santé
Bernard Lecat, Directeur de la Fondation Lenval Hôpital pour Enfants à Nice, administrateur FEHAP.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
46
LA GOUVERNANCE DES ÉTABLISSEMENTS PNL
est souvent considérée comme unique
et fait partie intégrante de sa spécificité.
On se trouve cependant à la croisée des
chemins avec une évolution institution-
nelle s’imposant au PNL (loi HPST, influ-
ence du droit communautaire). Dans ce
cadre, les intervenants ont tenté de
souligner la singularité du secteur Privé
Non Lucratif en mettant en exergue ses
avantages mais aussi ses faiblesses.
Pour eux, la gouvernance est «un projet
politique et stratégique » dans lequel
collaborent les médecins et les gestion-
naires. Précurseur dans ce domaine, il
tente de réconcilier les concepts d’entre-
prise managériale et d’entreprise de santé.
L’établissement PNL : une entreprise
Selon Didier Ernst, l’établissement de
santé est une entreprise s’appuyant
cependant sur une finalité humaine supé-
rieure. La gouvernance d’un établisse-
ment de santé, particulièrement dans
le PNL, est parfois marquée par un
relatif cloisonnement existant entre les
différents acteurs de l’établissement
PNL, principalement les médecins et
les acteurs «managériaux», deux mon-
des qu’il faut absolument «réconcilier».
Il est aussi impératif d’avoir un conseil
de surveillance équilibré, regroupant en
son sein des professionnels du mana-
gement, des membres disposant de
contacts et d’appuis et de personnes
ayant une parfaite connaissance des
racines de l’entreprise. Enfin, il est pri-
mordial de mettre en place des outils de
management et de progrès au sein de
l’établissement, notamment en faisant
appel à des techniques « maintes fois
éprouvées » dans le monde de l’entre-
prise, telles que benchmark, contrôle de
la performance ou encore intéresse-
ment. Il s’agit de techniques qu’il ne faut
pas avoir peur de mettre en œuvre, y
compris au sein d’établissements PNL.
Les forces du PNL
Le PNL et ses établissements, du fait
de leur positionnement à mi-chemin
entre le public et le privé, possèdent
une importante capacité d’adaptation et
«d’absorption des à-coups». Par ailleurs,
en plaçant l’humain au centre de son
action, le PNL donne un «sens» à l’enga-
gement de tous les acteurs, du méde-
cin au bénévole en passant par le direc-
teur. L’idéal de « médecine pour tous »
est un axe fondateur des projets d’éta-
blissements PNL. Ainsi, les dépasse-
ments d’honoraires sont un problème
auquel le PNL est peu confronté. Une
de ses forces réside dans ses bénévoles
Une des forces du PNL réside dans ses
bénévoles qui font preuve d’une réelle
motivation et d’un engagement désin-
téressé. Cependant, s’appuyer sur une
telle force ne suffit pas, encore faut-il
savoir la valoriser. Le bénévole doit être
formé par l’établissement afin de
transformer «la chaleur en mouvement»
(D. Ernst). Il faut, en quelque sorte,
« professionnaliser » le bénévolat et ne
pas seulement se satisfaire de sa pré-
sence. C’est un élément crucial de la
gouvernance.
Vers une nouvelle équation de la gouvernance ?
Si la gouvernance du PNL semble à la
fois performante et «humaine», elle fait
face à de nouveaux défis. La réforme
HPST est, à ce titre, un tournant majeur.
Elle semble cependant susciter moins
de remous dans le secteur PNL, précur-
seur en matière de coopération et de
regroupement d’établissements. Un
risque cependant: issues du monde
public, les nouvelles Agences Régiona-
les de Santé ne tendront-elles pas à
La réforme de la gouvernance du secteur Privé Non Lucratif
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
INTERVENAIENT LORS DE CETTE CONFERENCE-DEBAT
Maryvonne Lyazid, adjointe du Directeur Général de la Fondation des Caisses d’Epargne pour la Solidarité
Didier Gaillard, Président de la conférence des présidents de CME du PNL
Didier Ernst, Président de la Fondation des Diaconesses de Strasbourg et Président de l’école de management de Strasbourg
Bernhard Kitous, professeur à l’IEP de Rennes, spécialiste de la question du management de la sphère sanitaire
Cet atelier fut l’occasion de confronter différents points de vue sur la notion degouvernance et ses implications. Praticiens et universitaires ont pu livrer leursexpériences et leur vision d’une notion au cœur de la réforme initiée par la loi HPST.
47
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
favoriser le secteur public, voire à deve-
nir des «Louis XIV locaux»? (B. Kitous).
Selon ce dernier, la nouvelle gouver-
nance du PNL doit s’inscrire dans une
équation, conjugaison de trois facteurs:
• le pouvoir : la gouvernance doit être
fondée sur un élément démocrati-
que: quelle place donner à la démo-
cratie participative dans le projet
stratégique de l’établissement?
• l’argent : le contexte d’accroisse-
ment des dépenses et de déficit
grandissant de l’Assurance-Maladie
nécessite une meilleure gestion des
budgets, mais l’argent doit toujours
être utilisé comme un moyen et non
perçu comme une finalité
• la déontologie : comme le dit le doc-
teur Gaillard, «nos valeurs nous sau-
veront». Le PNL est issu de cet idéal
fondateur de compréhension et de
réponse aux besoins d’autrui.
Les intervenants ont pris appui sur
cette équation pour en formaliser une
autre, plus spécifique au PNL: la gouver-
nance du secteur Privé Non Lucratif
doit être guidée par nos valeurs tout
en s’efforçant de trouver le meilleur
rapport d’efficience (qualité/coût).
La perspective européenne
Bernhard Kitous a souligné les risques
que pouvait entraîner la mise en concur-
rence du secteur de la santé, initiée
par le paquet Monti-Kroes. La logique
d’appels d’offres dans les services de
santé pourrait entraîner une dégrada-
tion de la qualité de l’offre de soins. Le
secteur PNL doit savoir mettre en avant
ses atouts car le risque d’être devancé
par les «moins-disants» économiques
est réel. D. Ersnt propose à ce sujet de
développer la lisibilité du secteur Privé
Non Lucratif en «professionnalisant les
valeurs du PNL » et en menant des
actions de «marketing» et de commu-
nication efficaces.
Certes, la qualité, valeur essentielle du
PNL, ne se décrète pas et doit se prou-
ver quotidiennement. Le secteur pos-
sède tous les atouts d’une filière, une
conscience réelle de la qualité du ser-
vice rendu et un management fort, fondé
sur un «sens» des valeurs et un souci
permanent d’adaptabilité.
Maël Simon,
Membre du projet collectif
Sciences Po-FEHAP
LES RÉFORMES EN COURS soulignent la
nécessité de définir la place de l’usager
(malade, personne âgée ou handicapée,
proche, entourage) dans nos établisse-
ments. Ce débat fut coanimé par Pascal
Cacot, Directeur de la Société Parisienne
d’Aide à la Santé Mentale (SPASM) et
membre des Commissions de la Santé
mentale et de la Vie associative de la
FEHAP, et par Pierre-Marie Lebrun, Vice-
président du Comité Interassociatif Sur
la Santé (CISS).
Les représentants des usagers sont
présents à tous les échelons, de l’asso-
ciation locale jusqu’à l’élu, avec le souci
commun de défendre les usagers et de
les informer sur leurs droits, le rôle de
chacun devant clairement être défini
pour travailler davantage en complé-
mentarité qu’en rivalité.
Si l’élu bénéficie de la légitimité démo-
cratique, les associations, en raison de
leurs missions, connaissent parfaitement
les difficultés réellement rencontrées
par les patients comme leurs proches
au quotidien. Ainsi, les représentants
des usagers savent comment les informer
de leurs droits et de toutes les actions
et organisations mises à leur disposi-
tion, notamment au sein des maisons des
usagers présentes dans de nombreux
établissements.
Néanmoins, ces démarches sont aujour-
d’hui trop peu nombreuses et doivent
être développées et encouragées, par
exemple en donnant davantage de visi-
bilité aux représentants des usagers,
en les invitant notamment à siéger au
conseil d’administration (ou de surveil-
lance) afin que leurs avis soient intégrés
aux décisions de l’établissement.
La discussion a fait ressortir certaines
peurs ou interrogations manifestées à
travers les questions posées par des res-
ponsables d’établissements, redoutant
l’intégration des représentants des usa-
gers dans les structures décisionnelles,
craignant que leurs demandes puissent
affecter significativement l’organisation
des services ou des pôles. L’expérience
des responsables d’établissements ayant
intégré les réflexions des usagers à
l’ensemble de leurs décisions a convaincu
ceux qui s’interrogeaient quant à cette
démarche et de l’intérêt et des avanta-
ges d’un tel partenariat. Il ressort, en effet,
clairement de ces échanges que les sug-
gestions formulées par les représen-
tants des usagers apportent un autre
regard sur l’aménagement de l’établis-
sement, sans jamais perturber l’organi-
sation des soins, bien au contraire.
Les différentes expériences partagées
entre les participants ont fait apparaître
des avantages significatifs pour tous les
acteurs des établissements, les usagers
bénéficiant d’un environnement adapté
et d’informations claires étant davantage
à l’écoute et disposés face à l’ensemble des
personnels et, notamment, des médecins.
Les craintes qui avaient initialement pu
se manifester entre les directeurs d’éta-
blissements et les représentants d’usa-
gers se sont rapidement dissipées. Cet
échange leur a permis de se comprendre
mutuellement, de se rassurer et de pren-
dre conscience qu’ils avaient en réalité
un but commun: celui d’améliorer le sort
des usagers.
David Carmier, Membre du projet
collectif Sciences Po-FEHAP
La place des usagersdans les organismesPrivés Non Lucratifs
A l’heure de la réforme de la gouvernance de l’hôpital,votée à l’Assemblée nationale et en cours d’examen au Sénat,la question de la place des usagers dans les établissementssanitaires, sociaux et médico-sociaux se pose.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
INTERVENAIENT LORS DE CETTE CONFERENCE-DEBAT
Loïc Ricour, Directeur du Pôle santé et sécurité des soins du médiateur de la République
Pierre-Marie Lebrun, Vice-président du CISS, président de la Fédération du Nord
48
Frédéric Tiberghien
Ce qui m’a frappé dans les échanges qui
ont eu lieu, c’est d’abord la grande qua-
lité d’écoute et une participation très
active qui s’est traduite par des témoi-
gnages dans les conférences-débats,
des questions pratiques, mais aussi des
questions politiques, des suggestions,
des interrogations, donc un rassemble-
ment très participatif.
J’ai noté également qu’il y avait une par-
faite complémentarité entre les interve-
nants dans les différentes conférences-
débats. Puis, les participants qui ont
ajouté à chaque fois des touches ou des
remarques qui m’ont semblé très perti-
nentes et sur lesquelles je reviendrai
tout à l’heure.
La deuxième grande caractéristique
est, je crois, la tonalité de ce Congrès,
une tonalité beaucoup plus offensive
que défensive. Je n’ai entendu personne
dire : « le ciel nous tombe encore sur la
tête». Nous sommes tous des gaulois,
donc on a toujours terriblement peur
que le ciel nous tombe dessus. Je n’ai
pas entendu : « On est foutu, etc. ». En
revanche, la tonalité de ce Congrès était
vraiment offensive: «On a des difficultés,
on a des défis à relever mais on a des
atouts pour le faire».
La troisième caractéristique c’est la
grande liberté de ton dans ces échan-
ges. J’ai entendu –mais c’est tout à fait
normal– l’expression d’un certain nom-
bre d’inquiétudes. Je reviendrai aussi
là-dessus car la réforme est toujours
anxiogène. Elle crée des angoisses, des
incertitudes, c’est normal d’avoir un peu
peur et d’être inquiet sur un certain
nombre de choses.
J’ai retrouvé cette liberté de ton aussi
parce qu’il y a des questions politiques
et des questions techniques et tout cela
a été soulevé durant les échanges.
Sur le fond, j’ai trouvé aussi que c’était
un Congrès très équilibré car –cela a été
aussi très bien dit d’emblée – je crois
que dans les métiers du service, dans
les métiers que vous faites, on a en per-
manence un sentiment d’épuisement.
On est mangé par l’activité quotidienne.
C’est cette répétitivité de l’activité quo-
tidienne pour délivrer le service attendu.
On a de la difficulté à prendre du recul et
de la hauteur. Et je crois que les congrès
sont faits précisément pour offrir une
respiration, une coupure et nous per-
mettre de prendre de la hauteur: c’est
l’hélicoptère, on s’élève très haut, on
revient très bas.
Je crois que le Congrès c’est cela; c’est
de faire le lien entre nos pratiques quo-
tidiennes et des réflexions plus théori-
ques sur ce qu’est la réforme. Quel est
le sens de la réforme? Qu’est-ce que la
gouvernance? Qu’est-ce que la concur-
rence? Pour quoi faire? A quoi cela sert-il?
Quelle est la place de l’éthique dans nos
activités? Coopérer pourquoi et avec qui?
Des questions vraiment fondamentales
qui engagent notre avenir.
Puis, en même temps, des sujets plus
techniques : comment gérer les res-
sources humaines? Comment obtenir
ou maintenir sa certification ? Ou bien
quelle place faire aux usagers? On voit
bien que c’était un mélange que je trouve
très équilibré entre des questions tout
à fait fondamentales et des questions de
gestion quotidienne.
Florence Leduc
Vous parlez de cette richesse des débats,
des échanges et des sujets. Comment
avez-vous fait pour pouvoir tout à l’heure
nous livrer et nous restituer quelque
chose de tous ces travaux?
Frédéric Tiberghien
J’ai d’abord beaucoup écouté. J’ai parti-
cipé aux travaux d’ouverture, à la séance
plénière. J’ai participé aux travaux de
deux conférences-débats. Puis, hier
soir, en fin de journée, nous avons eu
une longue séance de travail avec nos
jeunes rapporteurs. Nous avons eu pen-
dant deux heures un échange sur le
compte rendu de toutes les conféren-
ces-débats. Je les remercie aussi pour
leur synthèse. C’est grâce à eux que je
vais pouvoir en quelque sorte restituer
ce qui m’a semblé le plus saillant dans
nos échanges.
J’ai préféré me concentrer sur les ques-
tions les plus difficiles que j’ai enten-
dues, les plus controversées. Peut-être
aussi revenir sur ce qui me semble plus
utile pour vous, pour votre avenir et puis,
ce qui mériterait peut-être d’être repris
plus tard dans les travaux de vos instan-
ces dirigeantes.
Florence Leduc
Nous allons maintenant passer à ce
temps de restitution. Bien évidemment,
ce qui va nous être renvoyé va susciter
beaucoup de questions. Mais c’est ce
que nous avons voulu essentiellement:
un éclairage.
C’est également une feuille de route
qui serait donnée à l’institution, à la
FEHAP. C’est aussi restituer pour l’en-
semble des congressistes ce qui fait
point fort. Je vais vous demander de bien
vouloir nous dire ce que vous avez
retenu, quels sont les points forts que
vous souhaitez nous renvoyer?
Un Congrès très équilibré
Frédéric Tiberghien, rapporteur Général du Conseil d’Etat et ancien Délégué inter-ministériel à l’Economie Sociale, a été invité au Congrès de la FEHAP comme grandtémoin, afin de réaliser la conclusion du thème: « le PNL face aux défis des réformes».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
49
•••
LA TONALITÉ DE CE CONGRÈS est beaucoup
plus offensive que défensive, ce qui est
assez rassurant. La grande liberté de
ton dans ces échanges a également été
remarquable, même lorsque des ques-
tions politiques et techniques ont été
évoquées. J’ai entendu l’expression d’un
certain nombre d’inquiétudes, j’y revien-
draicar la réforme est toujours anxiogène,
elle crée des angoisses, des incertitudes.
Sur le fond, j’ai trouvé que ce Congrès
était très équilibré car dans les métiers
du service, dans les métiers que vous
faites, on a en permanence un sentiment
d’épuisement. On est mangé par l’acti-
vité quotidienne. C’est cette répétitivité
de l’activité quotidienne pour délivrer le
service attendu. On a de la difficulté à
prendre du recul et de la hauteur. Et je
crois que les congrès sont faits précisé-
ment pour offrir une respiration, une
coupure et nous permettre de prendre
de la hauteur. C’est faire le lien entre nos
pratiques quotidiennes et des réflexions
plus théoriques sur ce qu’est la réforme?
Quel est le sens de la réforme? Qu’est-ce
que la gouvernance? Qu’est-ce que c’est
la concurrence? Pour quoi faire? A quoi
cela sert-il? Quelle est la place de l’éthi-
que dans nos activités? Coopérer pour-
quoi et avec qui? Des questions vraiment
fondamentales engageant notre avenir.
Puis, en même temps, des sujets plus
techniques: comment gérer les ressour-
ces humaines ? Comment obtenir ou
maintenir sa certification ? Ou quelle
place faire aux usagers ? On voit bien
que c’était un mélange très équilibré
entre des questions tout à fait fonda-
mentales et des questions de gestion
quotidienne.
Quand on parle de défis des réformes,
«réforme» cela renvoie au changement
social, au-delà de l’injonction de se
réformer qu’Alain Rey nous a rappelée.
Il faut commencer par se re-poser cette
question fondamentale : pourquoi se
réformer? Cela renvoie à ce qu’on pour-
rait appeler l’écologie du changement,
avec peut-être deux aspects importants.
Le monde bouge autour de nous, qu’est-
ce qui bouge autour de nous? Ensuite,
qu’est-ce qui bouge chez nous? Le chan-
gement étant bien la rencontre entre
des modifications affectant notre envi-
ronnement extérieur et ce qui se passe
chez nous.
Première grande question ou série de
remarques: qu’est-ce qui bouge autour
de nous et qui justifie, le cas échéant, que
l’on se réforme?
D’abord, il y a beaucoup de changements
qui affectent le secteur privé. Dans le
fond, le Privé Non Lucratif est situé entre
deux univers ou deux types de rapports:
d’un côté, le marché, le secteur privé et,
de l’autre, le secteur public et l’Etat.
Une grande activité
Il se passe beaucoup de choses du côté
du secteur privé. Il y a, notamment, la
question de la demande de santé, de
la marchandisation qui guette le monde
de la santé et du social, avec un phéno-
mène bien connu: le marché, deman-
deur d’exclusion, il ne s’intéresse qu’à
ceux qui peuvent payer. C’est le pouvoir
d’achat qui dicte la logique de marché.
On voit bien que nous sommes dans
une période de marchandisation accé-
lérée dans un certain nombre de servi-
ces sociaux, dont les services de santé.
Deuxième point important, le marché
se restructure énormément par les
technologies. Il y a deux grandes forces
qui orientent le marché : la concurrence
et les technologies. Il y a un certain
nombre de progrès technologiques dans
les questions médicales, en particu-
lier. Il y a une irruption du progrès tech-
nique qui fait que cela modifie aussi
les équilibres, la nature des offres et
le marché s’empare des technologies
pour gagner en compétitivité, faire de
nouvelles offres, baisser ses coûts. Nous
avons la question, qui pointe à l’horizon,
du low cost, évoquée dans certains ate-
liers comme une des conséquences de
ces évolutions très profondes du marché.
Des évolutions très fortes du côté de l’Etat
Première grande question, c’est celle
de l’avenir du well fair, de l’Etat provi-
dence dont quelqu’un a rappelé hier
dans une conférence-débat que s’il n’y
avait pas la CADES à qui ont été trans-
férés déjà des dizaines de milliards d’eu-
ros, notre système de protection sociale
serait mort, serait en faillite. Nous avons
un vrai sujet, l’Etat est un vrai sujet et,
collectivement, quel avenir pour le well
fair? Cela veut dire comment va se redes-
siner la frontière entre la protection col-
lective et la protection individuelle ?
Pourra-t-on toujours financer tout cela?
A quelles conditions? C’est une ques-
tion absolument majeure. D’ailleurs, on
la retrouve dans le secteur hospitalier
avec une particulière acuité, la maîtrise
de la dépense de santé, la question de
la tarification. Vous voyez bien qu’on
touche là aux grands paramètres de
l’équilibre de l’Etat providence.
Deuxième grand sujet sur lequel nous
ne sommes pas assez attentifs. Nous
sommes en train de nous engager dans
Synthèse des travaux : « non vous ne vous reposerez pas ! »Après les 6 conférences-débats, Frédéric Tiberghien, rapporteur Général du Conseild’Etat et ancien Délégué interministériel à l’Economie Sociale, en sa qualité de grandtémoin du Congrès a réalisé une brillante synthèse de nos travaux et nous a fait partde sa vision sur notre secteur. Un texte de référence pour le secteur Privé Non Lucratif.
«Comment va se redessiner la frontière entre la protection collective et la protection individuelle? Pourra-t-on toujoursfinancer tout cela? A quelles conditions?».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
une réforme des professions de santé
qui va s’esquisser lentement. Il est pro-
bable qu’il y aura de nouveaux partages
entre les interventions des uns ou des
autres. C’est un sujet important à noter
que les rôles et leur répartition entre les
professions de santé vont être amenés
à bouger au cours des années à venir.
Troisième grand sujet du côté de l’Etat,
c’est précisément la gouvernance du
système de santé. Nous avons eu une
réforme importante en 2004. Je ne suis
pas certain que cette gouvernance très
complexe, difficilement lisible, ait donné
et produit toute son efficacité. Je constate,
alors que la gouvernance nationale du
système de santé n’est pas encore
parfaitement opératoire, qu’on passe
à une étape suivante qui est peut-être
la conséquence de la précédente, c’est
de dire qu’il faut décentraliser et pas-
ser la gouvernance au plan régional.
Peut-être est-ce parce qu’on ne s’en
sort pas au plan national?
On voit bien également qu’il y a un sujet
tout à fait important, consistant peut-
être à tirer les conséquences d’une cer-
taine forme d’impuissance de l’Etat à
réguler la santé au plan central, en se
disant que, dans le fond, il faut en tirer
les conséquences assez rapidement et
essayer de jouer au plan régional pour
rétablir la cohérence et le meilleur
contrôle des dépenses de santé.
Les évolutions de société
Voilà les grands bouleversements qui
me paraissent structurer le marché et
l’Etat. Tout cela se fait dans une société
qui connaît aussi deux ou trois évolu-
tions importantes.
D’abord, celle du vieillissement de la
population, facteur commun derrière
tout cela et qui ne nous ne laisse pas
indifférents.
Deuxième grand problème qui nous
touche aussi comme organisation Privée
Non Lucrative, c’est la croissance des
phénomènes d’exclusion et de mal-être
dans notre société. Il y a des mécanis-
mes d’insertion sociale qui ne fonction-
nent plus comme il y a 20 ou 30 ans; il
y a toujours dans notre société une forte
demande d’inclusion sociale à laquelle
ni l’Etat, ni le marché ne répondent.
C’est ce qui justifie l’existence d’un tiers
secteur entre les deux. Nous, en quelque
sorte, notre fonds de commerce, c’est
l’inclusion sociale sur fond d’échec du
marché et fond d’échec de l’Etat. Nous
avons dans notre société l’importance de
ces phénomènes d’exclusion auxquels
nous devons apporter des réponses.
Puis, il y a un troisième élément qui
me paraît très important, dans l’évolu-
tion sociale générale, c’est l’importance
de plus en plus reconnue des modes de
vie sur l’état de santé. Les grands pro-
blèmes de santé publique sont et seront
de plus en plus des phénomènes de
comportement, d’éducation, la façon
dont on s’alimente, l’hygiène de vie, la
pratique du sport, etc., une éducation
basique qui n’est plus assurée. Tout ceci
se traduit par du mal-être, des états
de santé dégradés. Nous avons cette
difficulté devant nous et c’est égale-
ment un des rôles du secteur PNL que
d’y apporter des réponses.
On voit bien qu’on est dans une période
de craquement, avec remise en cause
de l’Etat providence, puissance accrue
du marché. Mais faut-il s’en étonner ?
Car il y a derrière cela un enjeu encore
plus important, c’est que la santé est en
train de devenir ou va devenir le premier
secteur économique de notre pays.
Aujourd’hui, cela représente environ 10%
du PIB ; c’est déjà 15% aux Etats-Unis
et toutes les analyses d’experts tendent
à montrer que vers 2015/2020, la santé
deviendra la principale activité écono-
mique dans notre pays.
C’est à la fois une chance pour nous,
mais cela explique aussi beaucoup de
ces bouleversements car, quand un
secteur devient la principale activité
«Les grands problèmes desanté publique sont et seront deplus en plus des phénomènesde comportement, d’éducation,la façon dont on s’alimente,l’hygiène de vie, la pratique du sport, etc.».
50 Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes•••
économique, la question de sa régula-
tion se pose. C’est bien la montée en
puissance des préoccupations de santé,
de l’importance économique de ce sec-
teur et la recherche de nouvelles règles
de régulation. C’est le fond de tableau
sur lequel nous sommes.
Pour autant, nous ne restons pas immo-
biles chez nous. Vous avez aussi observé
que ça bouge. J’ai retenu là-dessus
deux thèmes:
Le premier, c’est le thème de la qualité.
Vous avez tous noté que ce n’est pas
parce que nous sommes PNL, que nous
sommes marqués PNL, que nous garan-
tissons la qualité. La qualité est un
combat quotidien qui nous occupe. Cela
renvoie aux démarches d’évaluation, de
certification que la plupart d’entre vous
ont entreprises.
C’est une dynamique extrêmement
importante, car il n’y a pas d’offre sans
qualité. La qualité est une dimension
centrale. J’ai noté dans vos travaux une
aspiration à mieux coordonner les deux
démarches, interne et externe, d’évalua-
tion et de certification. Il y a une petite
formule qui résume cela : « Marier de
façon logique évaluation et certification
pour éviter des divorces ultérieurs».
Vous avez aussi noté que c’était la pre-
mière fois, au cours de ce Congrès, qu’il
y avait une rencontre entre des repré-
sentants de la Haute Autorité de Santé
et de l’ANESM au sein de la FEHAP,
avec des acteurs de terrain pour mettre
à plat ces questions d’évaluation et de
certification. Il y a une demande pour
continuer à travailler sur ce sujet et elle
me paraît tout à fait essentielle, car la
qualité est aujourd’hui une des com-
posantes incontournables pour gagner
la confiance des usagers.
La question des ressourceshumaines
Deuxième sujet évoqué et qui bouge, c’est
la gestion des ressources humaines. Le
fait que la convention collective ne soit
plus opposable va dessiner un paysage
nouveau et j’ai retenu, sur ce plan, deux
ou trois idées importantes :
Finalement, la fin de ce mécanisme
d’agrément fait que le secteur va retom-
ber, en quelque sorte, dans le droit com-
mun de la négociation collective. Se
posent tout de suite une ou deux ques-
tions que vous avez bien relevées. La
première, c’est que la gestion des res-
sources humaines ne se résume plus
à la gestion d’une convention collective
et il faut intégrer dans la négociation
des dimensions nouvelles. Il y a, bien
sûr, la question salariale, celle de la for-
mation professionnelle dont vous avez
noté qu’elle était importante avec le
renouvellement des générations et les
nombreux départs à la retraite qui allaient
avoir lieu dans les années à venir.
Il y a également la dimension de la Ges-
tion Prévisionnelle des Emplois et des
Compétences, puis celle qui touche à
l’organisation du travail, à l’aménage-
ment du temps du travail. Vous êtes
dans un secteur où il y a beaucoup de
temps partiels. On voit bien qu’il y a
52
•••
« Il y a toujours dans notresociété une fort demanded'inclusion sociale à laquelleni l'Etat, ni le marché nerépondent. c'est ce qui justifie l'existence d'un tierssecteur entre les deux».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Le defi des reformes
53
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
des contraintes, des permanences, de
l’urgence. La question de l’organisation
du travail sera un champ extrêmement
important à couvrir.
Deuxième remarque que vous avez faite
et qui est essentielle, c’est que le lieu
privilégié de la négociation collective
sera le local et non pas le national. Depuis
quelques années, notre législation invite
plutôt à mettre au cœur de la négocia-
tion la négociation d’entreprise ou d’éta-
blissement ou locale, le national ne
jouant qu’un rôle subsidiaire. Je crois que
c’est extrêmement important de rentrer
dans cette dynamique et de donner aux
acteurs locaux le pouvoir et le savoir-
faire pour pouvoir négocier et conclure.
C’est un changement extrêmement
important car, dans le secteur de la
santé comme de manière générale
dans le secteur des services, c’est une
activité de ressources humaines. L’or-
ganisation des relations avec le person-
nel est aussi un élément-clé dans toute
stratégie et dans toute amélioration de
la qualité.
La réforme en question
Je voudrais aborder maintenant un troi-
sième thème qui est celui de la réforme,
puisque notre Congrès s’intitule : «Les
défis de la réforme». Quand on parle de
réforme, je crois qu’il faut essayer de
répondre à quelques questions simples.
Pourquoi réformer et pour qui? La ques-
tion qui me semble fondamentale, c’est:
Pour qui ? Pour quels usagers ? Pour
quels clients? Pour quelles catégories
sociales? Pour le personnel? Pour modi-
fier des institutions qui ne fonctionnent
pas bien? Est-ce que dans toute réforme,
cela me rappelle Margaret Thatcher, il
faut toujours chercher qui est le malade
et, derrière la loi dont on parle, est-ce
que c’est l’hôpital public ? Quand on
parlait de la réforme, quel est l’homme
malade de l’Europe ? C’est aussi très
important de pouvoir identifier ce qu’on
veut traiter d’abord.
Quel est l’objet principal de la réforme?
Car on ne peut pas analyser une réforme
sans être au clair d’abord sur son
objectif principal.
Quand on parle de réforme, c’est le
« Quand » : est-ce le bon moment ? Le
rapport au temps est un des sujets sur
lesquels il faut être très conscient. Les
réformes étant toujours très longues
à mener, notamment lorsqu’elles le
sont dans le secteur public, elles ont
le risque d’arriver à contretemps. Le
bon exemple, c’est la fusion ANPE-
UNEDIC dont tout le monde disait, il y
a trois ans, que ce serait formidable.
Le problème, c’est qu’elle se fait, devient
effective maintenant, alors qu’il y a un
retournement horrible du marché de
l’emploi et cela ne fonctionne pas au
moment où, au contraire, on a besoin
de l’outil.
On a cette question extrêmement dif-
ficile quand on est un homme politique:
quel est le tempo que je vais deman-
der à la réforme, l’exécution, est-ce le
bon moment? C’est aussi une question
extrêmement importante car tout cela
se fait sur un contexte que j’ai aussi
noté de « raz le bol » des réformes. Il y
a une accumulation de réformes, il y a
la RGPP, il y a mille autres sujets, légi-
timement on se pose la question: est-ce
le bon moment de réformer ? Est-ce
aussi urgent que cela?
Il y a un bon usage de la réforme et dans
la méthodologie, également soulevée
dans nos travaux. Il y a d’abord sur quelle
expertise j’adosse en amont ma réforme?
Il n’y a pas de bonne réforme sans avoir
des investigations préalables et c’est
important de se faire une conviction sur
le sérieux des diagnostics préalables.
Deuxième aspect de la méthode, c’est le
couple concertation-imposition. Est-ce
qu’on réforme avec ? Est-ce qu’on
réforme contre? Est-ce qu’on réforme
en concertation? Ce sont aussi des choix
extrêmement importants. Je pars plutôt
de l’idée qu’il vaut mieux réformer avec
si on veut avoir des chances de succès,
mais certains sont partisans inverses
en disant qu’il faut passer en force. D’ail-
leurs, c’est une des grandes caractéris-
tiques du secteur public que de dire
que, comme nous sommes les plus forts,
on finira toujours par passer, allons-y.
Il y a des embranchements à ne pas
rater : est-ce qu’on réforme avec ou on
réforme contre?
Ensuite, il y a l’explication de la réforme,
le discours sur la réforme, la mobili-
sation des acteurs. Nous sommes en
plein dans le discours car il ne peut pas
y avoir de réformes réussies sans mobi-
lisation des acteurs.
Puis, l’étape suivante est la mise en
œuvre qui est la plus difficile parce que
nous avons noté que, quand on met en
œuvre des réformes, il y a des résis-
tances, on va heurter des intérêts des
groupes sociaux. La réforme est longue
à mettre en œuvre. Une loi nécessite
des décrets. Beaucoup de gens disent
qu’il faut des mois pour prendre les
décrets et, tant qu’on n’a pas les décrets
d’application, la réforme ne peut tou-
jours pas entrer en vigueur. Cette ges-
tion du temps est difficile, la vitesse
d’exécution, le rythme.
Nous avons évoqué hier que, dans toute
réforme, il y a des marges d’interpré-
tation pour les acteurs. Il n’y a jamais
identité entre ce qu’on a voulu au départ
et ce qu’on retrouve à la fin, parce que
tout cela est «tordu» en cours de route
par les acteurs.
La réforme en difficulté
Puis, dans toute réforme –c’est le dernier
point– il y a aussi des erreurs de choix,
parfois on se trompe, soit parce qu’on
a mal étudié, soit parce qu’on a mal
exécuté : qui dit réforme, ne dit pas for-
cément succès au bout de la route.
Sur les leviers de la réforme, ne soyons
pas dupes! L’Etat réforme avec les outils
•••
OPCA UNIFAF MEDIREST DEXIA
qu’il maîtrise, c’est-à-dire des lois, des
procédures, des institutions, des contrô-
les. Le marché réforme autrement : il
réforme par la technologie, l’innovation
des produits, les prix. Aujourd’hui, on
assiste à un retour de l’Etat qui impose
son rythme, des réformes avec des
leviers particuliers que sont les législa-
tions, les procédures, les institutions :
ce sont les leviers traditionnels de l’Etat.
Cela pose une question difficile: est-ce
que ce recours de plus en plus fréquent
à ces outils-là n’est pas aussi un signe
d’impuissance de l’Etat à régler un cer-
tain nombre de situations. Le fait qu’on
ait besoin de faire de plus en plus sou-
vent des lois, de les revisiter, n’est-ce pas
aussi, dans une vaste scène politique,
une sorte de mise en scène où l’Etat
joue le rôle de celui qui maîtrise et
orchestre le bal, d’où la répétition des
lois et des inconvénients mais c’est
aussi un jeu d’acteurs. Cela consiste à
dire: «Beaucoup de choses m’échappent
de plus en plus mais je montre, par mes
leviers, que c’est toujours moi qui maîtrise
le champ et qui, en fait, influe et dicte aux
autres acteurs les calendriers, les métho-
des et perturbe finalement nos façons
de faire».
HPST fait largement débat
Par rapport à cela, que dire de la loi
«Hôpital-santé» en débat aujourd’hui?
J’ai entendu qu’elle va changer beau-
coup de choses. C’est votre analyse, elle
va changer l’articulation entre le domaine
de la santé et le médico-social. Elle va
se traduire par la création des ARS, ce
sont des institutions nouvelles au plan
régional qui vont être des outils puis-
sants. Et on va modifier, à travers cette
loi, les modes de financement. Vous dites,
à juste titre, que tout cela va produire
des changements importants.
Deuxième touche de vos débats, c’est
que cette loi suscite de grands espoirs,
une plus grande cohérence dans l’orga-
nisation des soins et une meilleure coor-
dination territoriale. Nous sommes prêts
à suivre, comme on le fait souvent, les
promoteurs d’une réforme qui vous
racontent toujours : « Ma réforme est
formidable, vous allez voir ce que vous
allez voir» et nous sommes entrés dans
ce discours en disant qu’on attend de la
réforme qu’elle règle tous nos problèmes.
Troisième remarque que vous avez faite
et également très juste, c’est que cette
réforme va verrouiller les frontières
entre les catégories. Le service public
va être davantage accessible à tous les
acteurs et on va trouver un mélange des
genres qu’on ne trouvait pas auparavant.
Cette réforme est faite surtout pour
résoudre les problèmes du secteur
public, cela est mon point de vue et vous
pouvez ne pas le partager. D’ailleurs,
dans la présentation faite dans un ate-
lier, j’ai été absolument terrorisé à l’idée
que le secteur public conservait treize
missions extrêmement larges. C’est une
réforme ambitieuse pour le service public
et comment peut-on accomplir treize
missions différentes? C’est un défi extrê-
mement difficile pour ce secteur.
En revanche, ce qui est certain –et vous
l’avez dit–, c’est que cette réforme va per-
turber le fonctionnement de nos organi-
sations pendant longtemps. Nous allons
connaître une période de transition
assez longue – surtout d’ailleurs dans
le secteur public– et elle va nous per-
turber, nous imposer des contraintes
supplémentaires et nous en avons déjà
beaucoup.
Vous avez souligné le risque d’une cer-
taine forme de bureaucratisation à tra-
vers des procédures, des nouveaux
acteurs, de nouvelles règles du jeu, afin
de retrouver les équilibres avec les ARS.
Il faut avoir un peu de distance par rap-
port à la loi. Nous vivons dans un pays où,
en quelque sorte, nous reconnaissons
à la loi une vertu magique, c’est la pensée
magique des primitifs. La loi est un acte
de souveraineté qui va régler tous nos
problèmes comme par magie. Je vous
mets en garde sur cette croyance primi-
tive car les réalités résistent. Les réfor-
mes ne peuvent pas réussir si elles ne
s’accompagnent pas d’un changement
des comportements, des mentalités.
Tout cela prend du temps, c’est du temps
long et, ce n’est pas parce qu’on prend un
texte, qu’on règle tout avec une baguette
magique. Méfions-nous de surinvestir
dans les attentes vis-à-vis de la loi qui
n’est rien tant qu’elle n’est pas confron-
tée aux comportements, réalités ou
mentalités, et c’est cela qui est le plus
résistant.
J’ai entendu dans nos débats: «S’agit-il
d’une grande loi?». Vous voyez bien com-
ment à travers ce débat, certains disent
que c’est une grande loi, comment on
est entré dans l’espèce de magie: «C’est
une grande réforme!». Alors qu’elle n’est
même pas votée, on est déjà en train
de dire que c’est une grande réforme.
J’ai envie de vous dire qu’on jugera dans
quelques années si elle est convenable-
ment appliquée, ne soyons pas dupes
du discours sur la réforme.
HPST suscite de nombreuses questions
L’autre sujet qui me paraît tout à fait
essentiel est la coopération, également
au cœur de nos discussions et qui pose,
à son tour, des questions que vous devrez
reprendre. Dans tout projet de coopéra-
tion, il y a deux aspects: un aspect tech-
54
•••
«Les réformes ne peuvent pas réussir si elles ne s’accompagnent pas d’unchangement des comporte-ments, des mentalités».
Le defi des reformes
CHORUM SHAM Assurances Mobiliers MMO
55
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
nique, dans lequel on a trop facilement
tendance à plonger d’abord, et un aspect
stratégique, qui renvoie au rôle des
décideurs.
Première question : quand on veut coo-
pérer, pourquoi coopérer? Vous avez fait
un catalogue des bonnes raisons de
coopérer et je voudrais vous redire qu’il
faut s’en pénétrer et s’en convaincre.
Première raison, vous souhaitez mieux
articuler l’offre sur les territoires pour
rendre un meilleur service à l’usager,
c’est la continuité des parcours de soins
et d’accompagnement : c’est un motif
tout à fait essentiel, on part de l’usager.
Une coopération n’a de sens que si elle
est orientée vers une amélioration de la
situation de l’usager.
Deuxième raison que vous avez mise en
avant : éviter des redondances et des
concurrences inutiles ou coûteuses
entre les différents intervenants. En
disant cela, on touche à une ambiguïté
du rôle de l’Etat. L’Etat veut à la fois de
la concurrence mais, comme tout cela
a des contreparties, il veut en même
temps contrôler, organiser la concur-
rence. A travers la coopération, la
recherche de synergies, l’élimination
des redondances, on tue en même temps
la concurrence, on l’organise et c’est
le thème de la compétition.
Troisième raison mise en avant, c’est
renforcer les expertises et mutualiser
les compétences. Il est vrai que, plus
le progrès technique avance, moins on
peut maîtriser la totalité des savoirs,
des savoir-faire et donc coopérer. C’est
aussi partager la charge d’acquérir
l’expertise, de l’entretenir et c’est une
bonne raison.
Puis la dernière raison qui n’est pas la
moins importante, c’est de gagner en
efficacité. Vous l’avez dit : «Nous avons
aussi des contraintes économiques »,
donc on devrait pouvoir mieux acheter en
commun. Nous ne sommes aujourd’hui
pas suffisamment organisés, nous ne
pesons pas assez vis-à-vis de nos four-
nisseurs. La coopération est une réponse
à cela.
Il faut aussi assurer des permanences
avec un personnel réduit. Donc partager
les permanences est un gain d’efficience.
J’ai noté que dans les témoignages,
beaucoup disent : «Il y a des activités
dans lesquelles on perd de l’argent». On
veut, à travers cette coopération, réorga-
niser et partager les coûts. Vous voyez
que tous ces objectifs sont parfaitement
légitimes, en tout cas ils me paraissent
convaincants.
Les GCS marquent une rupture
La deuxième question sur la coopéra-
tion, c’est le « comment ». Vous avez
rappelé qu’il y a une palette d’outils
existante extrêmement large, puisqu’elle
va du contrat jusqu’au Groupement de
Coopération Sanitaire, en passant par
les GIE et les GIP. Il y a déjà un « cou-
teau suisse» –la formule a été employée
dans l’atelier– des outils de coopération,
c’est-à-dire qu’il y en a trop et on ne sait
plus comment s’en servir… mais on en
ajoute encore.
Le GCS marque une rupture, c’est impor-
tant de le noter, parce qu’il va vous don-
ner un outil permettant d’aller beaucoup
plus loin. On ne se contente plus de
mettre en commun des moyens, mais de
pouvoir gérer ensemble des activités,
c’est un point important.
Ensuite, c’est un outil souple parce qu’il
vous donne la possibilité de choisir
entre le droit public et le droit privé et
le mode de tarification. C’est un outil
puissant parce qu’il offre des libertés de
manœuvre et la façon d’utiliser au mieux
le GCS sera pour vous une question tout
à fait stratégique.
Enfin, j’ai noté que coopérer est une
dialectique. Est-ce qu’il faut écrire
d’abord le projet, ou coopérer d’abord
et inventer le projet ensuite? Alors, il y
a les deux thèses. Il n’est pas inutile
d’apprendre à travailler ensemble et
puis, petit à petit, d’augmenter l’am-
pleur du partenariat. Mais il n’est pas
mauvais non plus de savoir au début
ce que l’on veut obtenir à travers la coo-
pération. Retenons cette idée que la
coopération est une dialectique avec
des étapes et qu’il y a les deux jambes: le
projet et la relation avec les partenaires.
Vous avez également fait une liste très
complète des dangers et des risques de
la coopération.
La coopération ne fait pas l’unanimité
Il y a un risque de prédation et de capta-
tion de notre activité, de nos savoir-faire,
de nos compétences, il est vrai pour
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
•••
tout le monde, pas seulement pour vous.
Il y a un risque de banalisation et de
normalisation, dans le fond de dilution de
notre identité : quand on s’associe avec
quelqu’un, on crée une nouvelle entité,
donc c’est un risque fort de perte d’iden-
tité. Puis, il y a le risque des rapports
avec les communautés hospitalières de
territoire dont on craint, à travers leurs
mécanismes de restructuration et de
regroupement, qu’ils ne pèsent très lourd
dans les coopérations. Nous avons une
attitude de peur de déséquilibrer des
forces sur le territoire, finalement entre
le «gros» et le «petit». Quand on parle de
coopération, on a toujours peur que le
«gros» mange le «petit». Mais l’histoire
n’est pas toujours celle-là, le « petit »
étant plus souple, plus rapide, il arrive
que ce soit lui qui, finalement, mène
la coopération. Donc, pas d’inquiétude
excessive.
Puis, surtout, n’oublions pas que coo-
pérer a un coût et, surtout, cela prend du
temps. Nous avons un exemple, là encore,
pour nous méfier des séductions des
appellations, celui présenté sur Lenval.
Ceux qui sont venus témoigner nous
ont expliqué qu’ils ont commencé à
bâtir le projet en 2004 et, si tout va bien,
il sera homologué en 2009. Il a fallu rien
que cinq ans pour négocier les termes
de la coopération. Ne nous trompons
pas non plus: la coopération n’est pas un
long fleuve tranquille, c’est semé d’em-
bûches, de difficultés, cela prend du
temps, il y a des complications et on n’a
pas forcément tous les mêmes pratiques
professionnelles. Ne sous-estimons pas
non plus que c’est un investissement tout
à fait important en coûts et en argent.
A côté de cela, il y a des opportunités.
La plus importante de mon point de vue
est que vous êtes les plus séduisants
puisque vous êtes coincés, le plus petit,
entre deux secteurs: le privé et le public.
Vous avez des affinités avec les deux
et les deux vont se tourner vers vous
pour vous dire: «Chers amis, coopérons».
Vous allez avoir la « danse du ventre »
autour de vous, vous êtes le plus prêt :
c’est un atout formidable, vous êtes
incontournables pour les deux et c’est
important.
La deuxième opportunité est que cela va
vous donner à nouveau la possibilité
de rentrer dans l’émission de services
publics et ceci va conforter une tradition
que vous connaissez bien.
Enfin, la dernière opportunité est de
ne pas rester seul. Vous avez relevé que
vous étiez les plus petits par rapport
aux deux gros qui vous entourent. Ne pas
rester seul et isolé est un point impor-
tant. J’ai retenu ce slogan qui nous
ramène à la compétition. Il y a eu trois
étapes dans la vie économique: la pre-
mière, darwinienne: «Mangez-vous les
uns les autres», la deuxième d’où nous
sortons c’était : «Aimez-vous les uns les
autres» entre les trois partenaires puis,
maintenant, cela va être: «Aidez-vous les
uns les autres à travers la coopération».
Vous abordez cette question avec beau-
coup de lucidité, en disant qu’il y a des
précautions à prendre quand on coopère.
Il faut garder les autorisations, il ne faut
pas forcément accepter d’aller sur un
site public parce que, quand on est sur
un site public, c’est beaucoup plus
contraignant. Faut-il mettre toutes nos
activités dans le périmètre, donc définir
le périmètre ? Est-ce qu’il faut que le
personnel garde chacun son statut?
En tout cas, vous avez raison d’insister
sur le fait que la coopération repose sur
un libre choix et qu’il n’est pas question
d’accepter des coopérations imposées,
compte tenu des risques.
Pour les Conseils d’administration, les
organes dirigeants, la conséquence va
être de vous obliger à refaire davan-
tage de stratégie, à revoir vos projets.
Par exemple, pour l’hôpital public : est-
ce que je privilégie l’intégration avec les
autres hôpitaux de mon territoire ou
est-ce que je tente la carte de la coopé-
ration? Les acteurs vont avoir des stra-
tégies alternatives et il faut apprendre
à se mettre à la place des autres, jouer
un peu sur ces stratégies alternatives.
Cela vous renvoie à l’élaboration d’un
projet stratégique: que veut-on au plan
médical ? Que veut-on sur notre terri-
toire ? et va vous obliger à reformuler,
à réfléchir à nouveau à votre projet stra-
tégique et quelle place la coopération
peut-elle y trouver?
Un groupement se prépare
La plupart des coopérations échouent
parce qu’elles sont mal préparées et ne
tiennent pas compte des différences
culturelles. Quand on se lance dans la
coopération, il est très important de
préparer la cohésion des équipes et de
réfléchir aux différences culturelles.
Nous n’avons pas les mêmes critères
d’évaluation dans le public et dans le
privé, etc.
Sur la gouvernance qui a été longue-
ment débattue, il faut toujours repartir
du fait que c’est une notion qui a plusieurs
définitions. On entre dans la gouvernance
souvent par une définition simple qui
consiste à dire: c’est l’organisation et la
répartition des pouvoirs dans une orga-
nisation. Mais, en réalité, il y a une autre
définition plus approfondie qui consiste
à dire que toute organisation est faite de
conflits d’intérêts. Qu’est-ce que la
56
•••
«Ne nous trompons pas non plus : la coopération n’est pas un long fleuve tranquille, c’est semé d’embûches, de difficultés,cela prend du temps, il y a des complications et on n’a pas forcément tous les mêmes pratiques professionnelles».
Le defi des reformes
Pôle santé Elior Groupe Crédit Coopératif CORWIN
57
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
gouvernance, sinon la manière de tran-
cher les conflits d’intérêts au sein des
organisations? Sachant que les intérêts
du personnel ne sont forcément pas les
mêmes que ceux des usagers, pas les
mêmes que ceux des actionnaires quand
il y en a, pas les mêmes que ceux des
fournisseurs. Il faut retenir cette idée
qu’il y a plusieurs conceptions de ce
qu’est la gouvernance.
Vous n’avez pas de problème spécifique
de gouvernance dans le secteur Privé
Non Lucratif et c’est un atout formida-
ble, alors que cette question est cen-
trale dans le secteur public. L’hôpital
public est, en quelque sorte, malade de
cette question de gouvernance. Il n’a
jamais trouvé, je crois, les équilibres
et cette question de gouvernance est
toujours débattue. Cela ne veut pas dire
qu’il n’y a pas de difficultés.
La gouvernance PNL
La composition de nos organes sociaux
n’est pas toujours parfaite. Il y a eu des
propositions : un tiers pour la légiti-
mité historique, un tiers pour le carnet
d’adresses, un tiers pour des managers.
La question de la composition des
conseils est à rouvrir en permanence.
Vous avez tendance à ramener –comme
vous n’avez pas de problème de fonds–
la gouvernance à la question des outils,
en disant : « Bien gouverner, c’est avoir
des outils pour gérer», on a tendance à
ramener la gouvernance à la bonne
gestion et c’est une dimension impor-
tante. Vous avez évoqué la nécessité
d’avoir des tableaux de bord, de mesu-
rer pour bien gérer, d’avoir les paramè-
tres pertinents. Je vous invite à rentrer
dans les tableaux de bord car ils ne sont
pas seulement économiques et finan-
ciers. Mais comment mesurer l’utilité
sociale de mon activité? Dans l’écono-
mie sociale –et c’est ce qu’il y a de plus
difficile –, il faut travailler sur l’appré-
hension parce que vous créez de la
richesse qui n’est pas seulement écono-
mique et financière, mais il faut essayer
d’appréhender cette utilité sociale qui
est votre raison d’être.
Deuxième outil, c’est le décloisonne-
ment entre les administratifs et les pro-
fessionnels, le médical. Tout cela a été
très bien dit. En revanche, il y a un travail
important à faire, c’est ce que j’appelle
identifier ou hiérarchiser le poids des
parties prenantes car, quand on parle
de gouvernance, on renvoie à qui sont
nos parties prenantes? Et qui sont les
plus importantes?
Chaque organisation a ses réponses
selon le secteur d’activité, selon la nature
de l’organisation : pour les uns, c’est
l’actionnaire, pour les autres, c’est le
client, pour les autres encore, c’est le
salarié. J’ai noté que, sur ce point, vous
n’êtes pas très explicites sur qui sont
vos parties prenantes principales. J’ai
compris que c’est d’abord l’usager ou
le client dans votre secteur : tout part et
tout va vers l’usager, d’où le débat très
intéressant sur : « Faut-il faire rentrer
l’usager dans les Conseils d’administra-
tion?». Certains ont peur. La conclusion
de l’atelier est assez convaincante: «On
a peur avant, mais quand on est l’ESA, on
est bien content» et l’expérience mon-
tre que c’est un enrichissement. Il me
semble juste de dire que notre finalité
et notre partie prenante essentielle,
c’est l’usager. Comment peut-on vivre
sans avoir la partie prenante absente
des instances où s’élabore la stratégie?
Les bénévoles sont aussi une origina-
lité de votre secteur, un atout. Il faut
simplement les professionnaliser car,
quand ils ne sont pas bien formés, bien
intégrés, cela prend beaucoup d’énergie,
beaucoup de temps, pour des résultats
pas toujours à la hauteur. «Transformer la
chaleur en mouvement», c’est un slogan
intéressant à retenir pour une meilleure
utilisation des bénévoles.
Autre question : les adhérents. Une des
définitions dans les associations, il y a
des adhérents dans les mutuelles, donc
il faut revoir la place des adhérents et
c’est une partie prenante extrêmement
importante. Il y a une démocratie interne,
question qui est tout à fait vitale dans
nos organisations.
Une autre partie prenante évidemment
importante, c’est le personnel dont vous
avez noté, à juste titre, qu’il ne travaillait
pas dans nos organisations par hasard.
En même temps, ce personnel dans les
activités de services est déterminant
puisque c’est lui qui détient le savoir-
faire, l’expertise, qui fait la qualité de
service dans le contact direct avec les
usagers.
Et puis, il y a une autre partie prenante
spécifique dont on ne parle pas beau-
coup, ce sont les pouvoirs publics et le
financeur. Quelle place en fait-on dans
l’organisation? Comment prend-on en
compte les attentes de ce partenaire
difficile?
Cela doit nous amener à redéfinir le rôle
des organes dirigeants dans votre sec-
teur. La première attente des organes
dirigeants est qu’ils écrivent le projet,
qu’ils actualisent le projet de l’organisa-
tion, qu’ils donnent leur vision et qu’ils
l’explicitent. La deuxième attente est
écrire et formaliser les valeurs de l’or-
ganisation. On s’est beaucoup référé à
nos valeurs et c’est le rôle des organes
dirigeants que d’expliciter et de les for-
maliser, pour que tout le monde soit au
clair et qu’elles ne soient pas seule-
ment implicites.
•••
«Notre finalité et notre partieprenante essentielle, c’estl’usager».
«Bien gouverner, c’est avoirdes outils pour gérer».
•••
ICADE Groupe Caisse d’Épargne ANTESYS
Si l’on admet que la gouvernance, c’est
trancher des conflits d’intérêt, eh bien
on est en plein dans l’éthique. Qu’est-ce
que l’éthique, sinon résoudre des dilem-
mes ? Dans nos organisations, nous
avons des dilemmes permanents entre
la contrainte économique, le temps que
je donne à l’usager, le nombre d’actes
que je fais, comment j’utilise ou non la
tarification pour optimiser mon résul-
tat économique? C’est un rôle majeur
des Conseils d’administration que de
clarifier cette manière dont le person-
nel tranche tous ces conflits d’intérêts,
ces dilemmes auxquels il est confronté
en permanence, sinon on le met en situa-
tion d’injonction paradoxale. Et il n’y a
rien de pire dans une organisation, quand
tout repose sur le personnel, que les
organes dirigeants placent ceux qui
sont en contact avec l’usager en situation
de régler tout seuls, par eux-mêmes,
des conflits de missions, de valeurs,
qu’il appartient aux organes dirigeants
d’aider à trancher. C’est une demande
forte qu’il faut entendre car tout à fait
essentielle.
Quel est le bon niveau de gouvernance?
Quand on parle de gouvernance, on doit
aussi distinguer le local, le régional, le
national, l’européen. Vos débats ont aussi
abordé ces questions. J’ai une intuition
forte là-dessus : c’est qu’avec la mise
en place des ARS, le niveau régional
va prendre un poids très important.
Vous allez devoir adapter votre organi-
sation pour accompagner ces réformes
qui vont se produire au plan régional.
Comment organiser des synergies entre
les réseaux? Comment optimiser le fait
que nous avons déjà des filières? Com-
ment fertiliser les passages d’une filière
à une autre? Comment ne pas se faire
avoir dans les coopérations? Comment
les piloter? Comment les accompagner?
Un renforcement régional
J’entends à travers vos propos une attente
du renforcement de l’échelon régional
car on pressent bien que c’est là que les
choses vont se passer et qu’il faut que
l’outil, le plan, le niveau régional soit
outillé pour accompagner tout cela. Il
y a un changement de ce qu’on attend par
rapport au niveau national: on en attend
du lobbying – cela a été très bien dit –
et efficace.
Vous aurez aussi insisté sur l’égalisation
des conditions de concurrence, parce
qu’on a vu que cette réforme allait met-
tre en compétition les acteurs de diffé-
rentes natures et vous avez commencé
à la faire. Mais la question de l’égalité
des conditions de concurrence entre les
différents acteurs va devenir majeure
sur le plan de la fiscalité, sur le plan des
charges sociales. Vous aurez à revendi-
quer, en quelque sorte, au plan natio-
nal cette égalité des conditions de la
concurrence.
Il y a aussi au plan national une forte
demande d’accompagnement, en disant
que tout cela va nous bouleverser. On
a besoin de trouver, au niveau central
de l’expertise, des occasions d’échanger
sur les bonnes pratiques, de partager
nos difficultés.
N’oublions pas –parce qu’on en a très peu
parlé – l’Europe. Je trouve qu’il y a un
vide dans vos préoccupations aujourd’hui.
La régulation, à travers la directive ser-
vices et ses suites, se fait essentielle-
ment au plan européen. Il faut aussi
s’organiser pour peser au plan euro-
péen, peut-être avec d’autres, car c’est
là que se décide la régulation.
Je voudrais dire maintenant quelques
mots sur votre identité, notre identité: qui
sommes-nous? car c’est une question
qui a traversé nos débats. Nous sommes
coincés entre le marché et le secteur
public. Nous sommes le modèle invisi-
ble qui a failli le rester –pour reprendre
la formule employée–, mais ce n’est pas
le cas. Ce qui m’a toujours frappé, c’est
que l’économie sociale a toujours eu un
complexe d’infériorité : on est plus petit
que les autres, on est moins puissant,
58
•••
«Quand on parle de gouvernance, on doit aussidistinguer le local, le régional,le national, l’européen».
Le defi des reformes
OCTIME GSE SIEMENS CESEGH
59
LE DÉFI DES RÉFORMES I CONGRÈS 2009
on rase les murs et on n’ose pas s’affir-
mer. Il y a une demande de reconnais-
sance : on aimerait bien être reconnu
mais, pour se faire reconnaître, il faut
parfois pousser un peu le ton et ne pas
se laisser écraser.
Se faire reconnaître
C’est d’autant plus important que l’éco-
nomie sociale est fragmentée. Elle est
composée d’une diversité d’acteurs,
diversité de statuts : il y a des associa-
tions, des fondations, des mutuelles, des
congrégations, des coopératives. Il faut
savoir que c’est un monde qui a ten-
dance à se fragmenter en famille et à
mettre au premier plan l’approche sta-
tutaire. Je mets simplement un « cli-
gnotant» : le statut n’est pas tout. Vous
avez la chance à la FEHAP d’avoir
dépassé cette étape en disant : on a des
acteurs qui ont tous les statuts ; on par-
tage toute une série de choses en com-
mun. Mais il n’y a rien de pire : c’est la
logique de l’Etat que de rentrer dans une
logique purement statutaire, donc dépas-
sons-là pour retrouver notre identité.
Vous avez des risques que vous avez
bien soulignés. Vous avez le risque de
singer le privé et de perdre votre âme
à travers la lucrativité: si jamais la lucra-
tivité entre chez nous, on est mort. Puis,
vous avez l’autre risque qui est de s’ali-
gner sur le public ou de se faire ins-
trumentaliser par le public. Il faut résis-
ter entre les deux.
Vous avez fait aussi une remarque très
importante que je vous restitue. Si vous
êtes les plus séduisants pour les deux
autres, vous êtes aussi les plus malléa-
bles, vus des pouvoirs publics. J’ai
entendu cette remarque que je vous
livre en disant : le PNL est le plus mal-
léable des acteurs. Il a plutôt tendance,
en gros, à se coucher devant l’Etat. Il a
l’habitude de s’incliner, il est très gen-
til, très respectueux. Le privé lucratif
est plus méchant. Retenez cette idée un
peu caricaturale car il ne faut pas hési-
ter à se faire respecter avec l’Etat, de
temps en temps, il faut élever le ton,
sinon on est laminé.
Cela renvoie aux fondamentaux de votre
identité: quels sont-ils? Premièrement,
vous avez une gouvernance spécifique
avec le poids des adhérents, des usagers,
la double qualité. Deuxième grande
caractéristique, c’est un modèle écono-
mique particulier – les universitaires le
décrivent bien– en disant que l’écono-
mie sociale a une caractéristique et une
force, c’est ce qu’on appelle un modèle
d’hybridation des ressources.
Quand vous regardez le personnel, vous
avez des professionnels et des béné-
voles. Quand vous regardez les ressour-
ces économiques, vous avez des pro-
duits d’activités, des subventions et des
dons ou des adhésions. N’oubliez jamais
ces trois catégories qui sont un modèle
qui vous distingue. Vous n’avez pas non
plus à vous servir d’intérêt pour le capi-
tal. Ceci vous donne un avantage com-
pétitif important puisque vous avez une
diversité de ressources et, par l’hybri-
dation des ressources, des coûts plus
faibles que l’économie marchande.
C’est un point extrêmement important.
L’autre grande caractéristique est que
l’économie sociale offre une alternative
au marché et au secteur public. C’est le
grand thème de l’entreprendre autre-
ment qu’il faut réhabiliter, et qui est
un véritable marqueur de votre identité.
Dans le fond, nous voyons aujourd’hui
les limites de l’Etat providence qui n’a
pas réussi à vaincre les phénomènes
d’exclusion. Nous voyons aussi les limi-
tes du marché qui en crée également
parce qu’il ne satisfait que la demande
solvable. L’économie sociale est là pour
identifier les besoins sociaux non satis-
faits, les catégories émergentes qui ont
des difficultés d’insertion, les handi-
capés, tous ceux qui ont des addictions,
les drogués, les sortants de prison, toute
la difficulté des activités d’insertion par
l’activité, ceux qui ne trouvent pas d’em-
ploi. Véritablement, le rôle de l’économie
sociale est bien celui-là, d’entreprendre
autrement, identifier des besoins nou-
veaux, créer de nouvelles offres, c’est
l’aspect innovation sociale. Il faut être
très attentif à cela et y apporter des
réponses. C’est bien une vocation très
particulière, une création de richesses
sociales d’une nature particulière et c’est
cela qui est aussi une des spécificités.
Dans l’économie sociale, on se définit
par un projet et c’est le rapport au projet
qui mobilise les acteurs ou les parties
prenantes. Tout projet dans l’économie
sociale a une quadruple dimension. On
a trop tendance à le réduire au projet
économique. n’oubliez pas que, dans
l’économie sociale, il y a aussi un projet
social: c’est le rapport avec le personnel,
sa fidélisation, sa formation. Il y a un
projet qui a une dimension territoriale.
L’économie sociale est enracinée sur
des initiatives locales, des relations
locales et, comme la réforme va renforcer
le niveau local, c’est pour vous un atout
extraordinaire de dire que notre projet
est d’abord un projet territorial et local.
Puis, c’est enfin un projet politique.
L’économie sociale, à travers les adhé-
rents, est une école d’apprentissage de
la démocratie. C’est aussi un lieu où
l’on apprend à prendre sa destinée en
main. C’est un rôle d’éducation et de
formation. Je rappelle toujours que vous
avez un rôle formidable d’éducation vis-
à-vis des usagers et des adhérents. Un
des problèmes essentiels, ce sont les
modes de vie et les comportements :
utilisez les leviers que vous avez pour
contribuer à faire de la prévention, de
l’éducation sanitaire. C’est un atout for-
midable pour vous, vous avez cela au
cœur de votre projet politique. Puis, ce
•••
«L’économie sociale offre une alternative au marché et au secteur public».
•••
HELPEVIA PG Promotion ASC2I
sont enfin les valeurs de fraternité et de
solidarité au cœur de la démarche asso-
ciative et pour laquelle on se mobilise.
Vous avez des atouts énormes à faire
valoir, que vous avez relevés, un encrage
territorial de la proximité, un capital
de confiance auprès de la population
et des adhérents. Vous suscitez de la
motivation et de l’engagement chez les
bénévoles. Vous avez des réseaux d’élus,
d’adhérents qu’il faut mobiliser. Vous
avez des filières complètes de soins.
Vous avez des entités à taille humaine
où on peut identifier qui est le dirigeant?
Vous avez un rapport qualité/prix favo-
rable, une capacité d’innovation sociale,
donc des atouts formidables dans cette
période.
Puis, vous avez aussi des valeurs. Vous
avez dit: «Nous avons des valeurs fortes».
Alors il faut formaliser et expliciter ces
valeurs. La première, c’est l’égalité de
traitement. Il n’y a pas de sélection
adverse dans l’économie sociale et c’est
une valeur qu’on retrouve également
dans le service public. Deuxième grande
valeur, c’est l’adhésion au projet collec-
tif. Ce que je viens de vous dire du pro-
jet montre aussi que l’organisation est
structurée au cours d’un projet où tou-
tes les parties prenantes s’engagent.
Vous avez là une capacité de donner du
sens à votre action. L’économie sociale
donne un sens à l’action sur lequel peut
adhérer l’ensemble des parties prenan-
tes et c’est finalement la croyance dans
le fait, qu’au-delà de l’individualisme qui
est devenu la valeur dominante, nous
croyons à la puissance de l’action col-
lective. En nous regroupant, nous pou-
vons élaborer et faire avancer un pro-
jet collectif qui soit fédérateur et
mobilisateur et qui ne consiste pas sim-
plement à s’asservir au marché ou à
l’exigence de rentabilité.
Vous avez les valeurs de fraternité et
de solidarité qui correspondent à une
demande très forte de nos compatriotes
dans un monde de plus en plus incer-
tain. Il y a une demande de sécurité face
aux aléas de la vie et vous faites partie
des institutions qui répondent à cette
attente de sécurité sociale, sanitaire,
alimentaire, mode de vie. Vous voyez
bien que vos valeurs sont en parfaite
correspondance avec les attentes domi-
nantes de notre population.
Pour tout cela, vous n’avez pas d’inquié-
tude à avoir sur votre avenir. Mais, sim-
plement, votre identité mériterait de
revoir la formation de votre personnel
car j’ai entendu cette réflexion: on a été
formé dans le secteur public ou dans
le secteur privé. Je crois qu’une partie
du fait que vous posez la question «Qui
sommes-nous ? » tient à ce que notre
secteur n’assure pas lui-même la for-
mation de son personnel suffisamment
à l’éthique et aux valeurs de l’économie
sociale et on se pose toujours la question
de l’appartenance à l’un des deux autres.
Renforcer l’outil de formation initiale
des dirigeants, des administrateurs, est
aussi un levier très fort pour lever défi-
nitivement cette question de doute sur
notre identité: formons nous-mêmes nos
managers et notre personnel.
On aimerait bien une pause législative et
réglementaire. Non, vous ne vous repo-
serez pas ! La réforme va vous tomber
dessus. Vous allez être soumis à de plus
en plus de contraintes, de plus en plus
d’exigences, de plus en plus de procé-
dures. Les règles du jeu vont changer.
Simplement, ne vous laissez pas piéger
par l’anxiété ou par l’agenda que vou-
draient vous imposer les autres acteurs.
Vous avez beaucoup de facteurs à l’éco-
nomie sociale et à vous-mêmes. Vous
avez les aptitudes à les relever. Vous avez
une aptitude à innover. Vous avez cette
formidable aptitude à mobiliser vos
énergies.
Bon courage pour les années qui vous
attendent. En tout cas, j’ai été heureux
de participer à vos débats et je serai à vos
côtés si je peux continuer à réagir à vos
propos. Bonne conclusion de Congrès.
Frédéric Tiberghien,
Rapporteur Général du Conseil d’Etat
et ancien Délégué interministériel
à l’Economie sociale
60
•••
«Vous avez les valeurs de fraternité et de solidarité qui correspondent à une demande très forte de nos compatriotesdans un monde de plus en plus incertain».
«Renforcer l’outil de formationinitiale des dirigeants, desadministrateurs, est aussi un levier très fort pour leverdéfinitivement cette questionde doute sur notre identité».
Le defi des reformes
MNH ABAQ DUPONT RESTAURATION
62
DANS LES RÉFORMES que les secteurs
sanitaire, social et médico-social connais-
sent aujourd’hui, vous le savez, notre
Fédération est force de propositions.
Elle énonce parfois des désaccords,
mais se présente toujours comme un
partenaire aussi loyal que franc, un par-
tenaire « debout », suivant l’expression
dorénavant consacrée. Et il convient
bien de parler de partenariat, compte
tenu du chemin parcouru, notamment
s’agissant du projet de loi HPST.
Le secteur Privé Non Lucratif, ignoré
par l’avant-projet de loi présenté en
Conseil des Ministres, a été largement
entendu et pris en compte dans le cadre
de l’examen du texte par les députés.
La notion d’Etablissement de Santé Privé
d’Intérêt Collectif (ESPIC) a été votée
à l’unanimité avec votre approbation, ce
qui est pour la FEHAP une satisfaction
profonde.
Le réajustement opéré pour les Grou-
pements de Coopération Sanitaire (GCS),
dont nous nous étions entretenus lors du
rendez-vous que vous m’aviez accordé,
Madame Bachelot, est également une
réelle satisfaction. En effet, les GCS
pourront poursuivre la gestion partagée
d’activités de soins et d’équipements
matériels lourds, sans que leurs mem-
bres perdent la maîtrise de leurs auto-
risations et de leurs financements.
Sur le plan médico-social, de nombreu-
ses améliorations du texte initial sont
également à souligner :
En premier lieu, l’instauration d’une
«fongibilité asymétrique dynamique» qui
correspond aux attentes de la FEHAP.
Dans le même esprit, le pilotage et la
gouvernance du secteur médico-social
ont été améliorés. Des représentants des
usagers ont été intégrés dans nombre
d’instances. Et les fédérations d’établis-
sements sont mieux associées même si,
pour la FEHAP, le dispositif est encore
perfectible.
Pour les appels à projets, les notions
d’expérimentation et d’innovation ont
été intégrées pour nuancer le caractère
nettement plus « descendant » de la
nouvelle planification médico-sociale.
Partenaire constructif et loyal des pou-
voirs publics, la FEHAP a salué avec
autant de force les satisfactions issues
des travaux de l’Assemblée Nationale,
qu’elle avait regretté avec netteté le
texte initial.
La présence équilibrée de la FEHAP sur
les activités sanitaires, sociales et médico-
sociales la place d’emblée dans la
modernité de la nouvelle gouvernance
promue par la loi HPST et le périmètre
des nouvelles Agences Régionales de
Santé (ARS).
Nos valeurs de service public, conju-
guées avec nos contraintes d’établisse-
ments privés, représentent aussi un
gage de vision équilibrée et transversale
de toutes les composantes de l’offre
sanitaire, médico-sociale et sociale. Je
pense que vous reconnaîtrez ces quali-
tés dans les analyses et les propositions
que nous formulons pour que le débat
parlementaire au Sénat permette d’amé-
liorer encore la qualité de la Loi.
C’est ainsi que pour le nouveau statut
d’ESPIC, la FEHAP estime qu’il est
nécessaire de compléter le projet de
loi pour tirer plusieurs conséquences
pratiques de ce nouveau concept. La
FEHAP demande, qu’à l’instar des éta-
blissements publics de santé, les ESPIC
puissent collaborer avec des profes-
sionnels de santé libéraux en les rému-
nérant en honoraires ou sous des for-
mes alternatives au paiement à l’acte.
La FEHAP demande également d’ins-
crire la possibilité de recruter des pra-
ticiens hospitaliers détachés dans les
ESPIC.
Au-delà, Madame la Ministre de la
Santé, nous avons noté avec intérêt que,
durant le débat parlementaire, vous
avez indiqué que les hôpitaux publics et
les ESPIC ont une vocation prioritaire
à se voir déléguer les missions de ser-
vice public : la FEHAP estime avec la
Fédération Hospitalière de France qu’il
est indispensable de traduire votre
explication de texte en droit positif.
Madame la Ministre chargée des Soli-
darités, la FEHAP souhaite vivement
que l’Intérêt Collectif, désormais inscrit
dans le paysage hospitalier avec les
ESPIC, puisse également être reconnu
dans le secteur social et médico-social.
Se donner pour objectif de répondre à
des besoins émergents ou non satis-
faits, ou vouloir un reste à charge aussi
Discours d’Antoine Dubout
Moment fort de rencontres et d’échanges, le congrès de la FEHAP a été l’occasiond’accueillir Roselyne Bachelot et Valérie Létard. Antoine Dubout a précisé les positionsde la FEHAP quant à l’actualité de nos secteurs.
«La notion d’Etablissement de Santé Privé d’Intérêt Collectif(ESPIC) a été votée à l’unanimité».
«La présence équilibrée de la FEHAP sur les activités sanitaires, sociales et médico-sociales la place d’emblée dans la modernité de la nouvelle gouvernance».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Allocutions de cloture
63
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
limité que possible pour les résidents et
leurs proches, voilà bien l’expression
d’une spécificité du secteur Privé Non
Lucratif qui mérite sa place dans le
Code de l’action sociale et des familles.
Pour revenir au statut d’ESPIC, vous
savez que la FEHAP milite pour l’ouver-
ture plus large au secteur Privé Non
Lucratif des missions de service public: je
pense, notamment, à la mission confiée
au Professeur Jacques Marescaux pour
la modernisation de l’enseignement
universitaire et de la recherche qui doit
faire une plus large place aux établis-
sements de la FEHAP. Mais, vouloir la
complémentarité de plusieurs secteurs
suppose aussi la mise en œuvre de règles
ne favorisant aucun d’entre eux.
Il faudra poursuivre nos échanges pour
organiser une mise en concurrence
loyale pour l’obtention d’une autorisation
sanitaire ; nous suggérons un amen-
dement en ce sens.
Plus encore, la FEHAP estime que le
principe d’une allocation équitable et
juste des financements entre les opé-
rateurs publics et privés n’est pas res-
pecté aujourd’hui, notamment s’agissant
des Missions d’Intérêt Général et d’Aide
à la Contractualisation (MIGAC). Ainsi,
Madame la Ministre, l’augmentation
des dotations MIGAC de plus de 4,75%
pour l’année 2009 n’est pas une solution
pérenne aux déficits des hôpitaux publics.
Dans le cadre de la convergence tarifaire
des établissements de Médecine-Chirur-
gie-Obstétrique (MCO), cette augmen-
tation des MIGAC est symptomatique de
la résurgence du financement au statut
de l’établissement et non à ses services
rendus. Nous risquons un dévoiement du
système de la T2A. Ce modèle devient,
année après année, illisible. Il est rendu
toujours moins efficient parce que cha-
que jour modifié.
Il en va ainsi des « aménagements »
concernant la Permanence Des Soins
Hospitalière (PDSH) et la précarité.
Pour la FEHAP, mais également pour la
Fédération de l’Hospitalisation Privée,
le tarif doit porter la plus large part des
activités de soins, permanence incluse.
Nous souhaitons que les options adop-
tées en 2009 soient prudentes, pour
pouvoir être réversibles en 2010.
Sur la précarité, tous les experts s’ac-
cordent également sur le fait que les
travaux qui ont fondé les calculs en
2009 sont insuffisants et doivent être
approfondis.
Concernant l’équité de traitement entre
les opérateurs de différents statuts,
vous savez que la FEHAP reste très
amère concernant le différentiel de
charges sociales en sa défaveur, objec-
tivé par l’IGAS à 4,05 %. La FEHAP est
d’autant plus mécontente sur ce sujet
que ces charges supplémentaires sont
aussi, sous un autre angle, des recettes
de la Sécurité Sociale! La FEHAP appelle
avec insistance à l’instauration d’un
principe de neutralité fiscale et sociale
entre les opérateurs publics et privés.
Certains de nos adhérents nous enga-
gent à un contentieux sur ce sujet, faute
de pouvoir être entendus! •••
«La FEHAP estime que le principe d’une allocation équitable et juste des financements entre les opérateurs publics et privés n’est pas respecté».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
«La FEHAP reste très amèreconcernant le différentiel de charges sociales en sadéfaveur».
64
Ce sujet émerge également dans le
secteur social et médico-social, Madame
la Ministre des Solidarités, dès lors que
l’on abandonne une logique d’appro-
bation de dépenses pour lui substituer
une tarification à la ressource comme
pour les maisons de retraite ou encore
les Etablissements et Services d’Aide
par le Travail (ESAT).
Au différentiel de charges déjà évoqué,
s’ajoute aussi le décalage fiscal avec les
structures pour personnes âgées gérées
par les centres communaux d’action
sociale, établissements publics qui
n’acquittent ni la taxe sur les salaires ni
la TVA ! Au-delà de ces revendications
que je crois justes, la FEHAP salue avec
la même netteté la modernisation des
pratiques de soins qui est au cœur de
plusieurs politiques publiques: la FEHAP
soutient pleinement l’impulsion donnée
en direction de la chirurgie ambulatoire.
Nous sommes en complet accord avec
le projet de loi HPST lorsqu’il met en
place des indicateurs de qualité publiés
par les Agences Régionales de Santé.
Mais nous ne pouvons évidemment pas
nous arrêter là. Je pense, notamment,
à la dialyse hors centre où la FEHAP est
leader dans le développement des alter-
natives, sans pour autant que cela soit
financièrement reconnu. En effet, les
tarifs 2009 ont augmenté de manière
indifférenciée de 0,50% pour toutes les
modalités de soins. Si l’efficience est
la matrice de votre politique de santé,
comment comprendre cette politique
tarifaire?
Mais, partenaires, nous ne l’avons pas
été que dans le cadre de ces sujets.
Nous nous sommes efforcés de l’être, non
sans mal, sur d’autres dossiers comme
la campagne budgétaire 2009. Si je puis
me permettre, Madame la Ministre, une
expression forte : «Plus jamais cela !».
Jamais les gestionnaires d’établisse-
ments n’ont été informés aussi tardive-
ment dans l’année du niveau probable
de leurs recettes. Jamais vos services et
l’ATIH n’ont tant tardé à communiquer
à la FEHAP les données financières et
les fichiers lui permettant d’éclairer ses
adhérents.
Partenaires, nous le fûmes encore et
toujours sur de grands dossiers que
sont le plan Cancer 2 et le rapport
d’Edouard Couty sur la psychiatrie.
Pour le premier, la FEHAP a fait des
propositions constructives à la com-
mission présidée par le Professeur
Grunfeld. Elle attend vos réponses sur
les Soins de Suite ou de Réadaptation
(SSR) où se pose un sérieux problème
de financement des molécules onéreu-
ses pour les patients traités pour un
cancer, lorsque ces structures fonc-
tionnent sous dotation globale.
Sur le rapport relatif à la psychiatrie et
à la santé mentale, notre Fédération a
reçu Edouard Couty pour approfondir
les échanges ouverts par son rapport.
Ces échanges ont concerné nos points
d’accord, mais aussi les points cristal-
lisant nos inquiétudes, comme la propo-
sition de scinder les équipes soignantes
et leur pilotage, entre celles en charge
des soins ambulatoires et celles chargées
des hospitalisations. Nous n’en sommes
pas restés à des réserves ou des criti-
ques, mais nous avons émis des contre-
propositions constructives. Là encore,
le pluralisme constitutif de la FEHAP
fait la différence, puisque nos adhé-
rents en psychiatrie sont à la fois des
établissements sectorisés et non sec-
torisés.
Comme vous le voyez, le chemin par-
couru ensemble est le fruit d’un travail
en confiance entre notre Fédération et
vos services. Nous avançons vers un
but commun : un meilleur accès des
assurés sociaux à un système de soins
de qualité.
Toutefois, être partenaire, c’est aussi
s’entretenir de manière très directe des
difficultés à venir pour mieux les affron-
ter. Je me permettrais, dès lors, d’expri-
mer ici nos inquiétudes sur deux sujets
en particulier :
Le premier concerne la convention signée
par la CNAM avec un syndicat infirmier.
Elle crée un clivage entre, d’une part,
l’exercice traditionnel des infirmiers
libéraux et, d’autre part, la coopéra-
tion avec un service d’Hospitalisation
A Domicile (HAD), ou un Service de Soins
Infirmiers A Domicile (SSIAD), ou encore
un centre de dialyse.
En effet, cette convention qui différen-
cie ces deux exercices, du point de vue
de la prise en charge des cotisations
sociales des infirmiers libéraux, installe
un conflit artificiel entre ces partenai-
res dont les premières victimes seront
les assurés sociaux, chaque fois qu’il ne
sera pas possible d’organiser une alter-
native salariée. Il nous tient à cœur que
ce problème sur lequel la FEHAP vous
a écrit avec la Fédération Nationale des
Infirmiers (FNI) qui refuse comme nous
le clivage instauré entre nos adhérents,
soit revu dans le projet de loi HPST.
Plus globalement, cela rappelle la néces-
sité de faire intervenir une consulta-
tion des fédérations hospitalières repré-
sentatives, publiques et privées, sur les
conventions conclues entre les profes-
sionnels libéraux et l’Union Nationale des
Caisses d’Assurance-Maladie (UNCAM),
car nombre d’entre elles ont des réper-
cussions importantes sur les établisse-
ments : un amendement en ce sens
rassemble la FEHAP, la FHF et la FHP.
Le second dossier sur lequel nous som-
mes inquiets est celui des délais de
paiement dans le cadre de la Loi de
Modernisation de l’Economie (LME). Ce
texte, dans sa rédaction actuelle, repré-
sente un danger pour les trésoreries
déjà très tendues des établissements de
la FEHAP, alors que nos adhérents sont
comparables à des PME, en présence
de fournisseurs qui sont souvent l’éma-
nation de puissantes multinationales.
L’intervention du Ministère est une néces-
sité pour établir une concertation équi-
librée avec ces représentants de grands
fournisseurs que sont le LEEM, le SNITEM,
ou encore les entreprises intervenant
en prestations multitechniques comme
dans l’énergie ou la maintenance.
En attendant, et avec la FHP, nous vous
proposons de prévoir un dispositif per-
mettant aux pouvoirs publics de décaler
la mise en application de ce texte en
fonction de l’évolution des concertations,
aujourd’hui bloquées.
Mesdames les Ministres, nombreux ont
été les thèmes que je viens de passer
en revue. Ces derniers participaient sur-
tout du secteur sanitaire. Madame la
•••
«Le cinquième risque constitue un défi collectif ».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
Allocutions de cloture
65
Ministre chargée de la Solidarité, la
FEHAP est tout autant investie dans le
secteur social et médico-social. Avec
plus de 2600 établissements et services
représentant quelque 156 000 lits et
places, notre Fédération porte une grande
attention aux dossiers en cours dans ce
secteur.
Le cinquième risque constitue un défi
collectif. Cette réforme suppose de
trouver les moyens qui permettront à
notre offre sociale et médico-sociale de
faire face aux évolutions démographi-
ques, en gardant le cap de la solidarité
et de l’équité de traitement.
C’est à ce titre que la concertation avec
les acteurs de ce secteur doit être au
cœur de la démarche, seule possibilité
pour que le défi soit relevé. La FEHAP
a la volonté de faire en sorte que l’inté-
rêt de l’assuré social vulnérable consti-
tue la ligne directrice du projet porté
par vos services. La réflexion portant
sur l’aide unique dégressive en établis-
sement, aujourd’hui avancée pour les
personnes âgées dépendantes, devra
donc être approfondie.
Il est nécessaire que cette réforme ne
se révèle pas pénalisante pour ses
bénéficiaires au regard des autres aides
existantes. Si le contexte économique et
social ne se révélait pas favorable à un
élargissement du financement solidaire,
il vaudrait mieux alors rééchelonner les
travaux et se focaliser sur des avancées
peut-être plus modestes mais certaines,
comme l’amélioration de l’Aide Personna-
lisée à l’Autonomie en établissement, ou
le périmètre de financement de la Pres-
tation de Compensation des Handicaps.
Nous partageons assurément, Madame
la Ministre, le même point de vue
concernant l’objectif de cette réforme.
Celui-ci consiste en la reconnaissance
d’un nouveau risque de protection
sociale, pour toute personne en man-
que ou en perte d’autonomie. Ce point
d’accord constitue un ancrage solide
pour un travail en commun et il s’agira
de s’entendre sur les meilleurs moyens
pour y parvenir.
Sur ce point, soyez assurée que la FEHAP
constituera une force d’initiative en la
matière. C’est à ce titre que nous atten-
dons de vous, Madame Létard, que vous
nous éclairiez plus précisément sur le
calendrier envisagé par le Gouverne-
ment pour la présentation du projet de loi
au Parlement et sur ses grandes lignes.
La FEHAP est également très atten-
tive sur le dossier de la convergence
tarifaire. Désormais, l’application des
tarifs-plafonds concerne non seulement
le secteur des personnes âgées, mais
aussi celui des personnes handicapées
avec les ESAT.
Au-delà et pour 2010, entre dans cette
logique le secteur de la lutte contre l’ex-
clusion. La FEHAP regrette les condi-
tions dans lesquelles s’engage cette
convergence, sans le support de bases
de données financières nationales à la
hauteur de l’enjeu.
Comparons avec la préparation qui a
précédé la tarification à l’activité dans
le secteur sanitaire: les enquêtes natio-
nales de coûts et la base de données
analytiques du CHU d’Angers ont été
mises en place plus de quinze ans avant!
C’est pour cette raison que la FEHAP
demande à vos services la liste des
maisons de retraite et des Unités de
Soins de Longue Durée (USLD) se situant
aujourd’hui au-dessus du tarif-plafond,
pour pouvoir vérifier les données et
engager avec vos services un examen
au cas par cas des situations.
Mais la FEHAP se veut être également
constructive sur ce dossier.
Madame la Ministre, n’y a-t-il pas lieu
de fixer des obligations de résultats à
vos services déconcentrés, pour que les
établissements qui vont pouvoir amé-
liorer leur médicalisation, avec les nou-
velles règles du Plan Solidarité Grand
Age (PSGA), obtiennent au plus tôt les
crédits correspondants?
N’y-a-t-il pas lieu aussi de délivrer un
message clair et chiffré sur le niveau de
mise en œuvre du PSGA aujourd’hui et du
chemin qui reste à parcourir jusqu’en
2012?
Autre proposition, ne faudrait-il pas
prendre en compte une marge prudente
de + ou - 15 % dans l’appréciation des
tarifs-plafonds, compte tenu d’aléas
dans leurs modalités de calcul? Il s’agit
d’abord d’un principe de précaution si
l’on considère que les services de la
DGAS et de la CNSA ne disposent pas
d’informations budgétaires précises et
exhaustives à ce jour. Cette marge de
prudence peut permettre de prendre en
considération le différentiel de charges
déjà évoqué.
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
«La FEHAP est égalementtrès attentive sur le dossierde la convergence tarifaire».
«Les règles actuelles des méthodes d’évaluation des besoinsd’accompagnement et de soins techniques, AGGIR et PATHOS,peuvent se traduire par des résultats injustes ou paradoxaux».
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
•••
66
Par ailleurs et concernant les méthodes
d’évaluation des besoins d’accompa-
gnement et de soins techniques, AGGIR
et PATHOS pour les avertis, les règles
actuelles peuvent se traduire par des
résultats injustes ou paradoxaux. En
effet, certains résidents hospitalisés le
jour de la coupe par le médecin-conseil
ne sont pas comptabilisés dans la sta-
tistique PATHOS. Or, leur prise en charge
est souvent la plus lourde.
Dans le même esprit, des personnes
handicapées de moins de 60 ans héber-
gées dans une maison de retraite à la
demande de leurs proches vivant à proxi-
mité et dont l’accompagnement est par-
fois lourd ne comptent pas dans AGGIR.
Au total, ces exclusions peuvent peser
lourdement dans certains établissements
et les exposer injustement à l’application
du tarif-plafond, d’où notre proposition
d’intégrer un intervalle de prudence :
Il s’agit ici d’une ouverture sur laquelle
nous souhaiterions connaître votre
position.
Ces situations montrent à quel point il
est nécessaire d’adopter une démarche
au cas par cas, en commun entre votre
Ministère et notre Fédération pour éva-
luer la situation de ces structures et
définir d’autres critères d’appréciation
que celui du seul dépassement du (ou
des) tarifs-plafonds.
Ce pluriel quant aux tarifs vise évidem-
ment le secteur des ESAT où, pire encore
que dans le secteur des personnes
âgées du point de vue de la méthode,
nous ne disposons à ce jour d’aucun
référentiel d’évaluation des besoins
d’accompagnement individualisé des
personnes accueillies.
Ce sont les raisons pour lesquelles
nous vous avons écrit avec l’APAJH et la
FEGAPEI afin de vous proposer un amen-
dement à la loi HPST visant à élargir les
compétences de la CNSA. Il s’agit de
pouvoir mener des enquêtes nationales
de coûts dans le secteur médico-social,
mais aussi d’avancer sur la construc-
tion partagée d’un référentiel de besoin.
Parallèlement, la Loi de Financement
de la Sécurité Sociale pour 2009 a intro-
duit le principe d’une expérimentation
relative à la réintroduction des médi-
caments dans le forfait soins des maisons
de retraite.
Sur cette question, la FEHAP vous a
interrogée sur le rôle du médecin coor-
donnateur. En effet, cette expérimenta-
tion ne constitue qu’un point d’étape dans
la perspective d’une éventuelle généra-
lisation à l’ensemble des maisons de
retraite sans Pharmacie à Usage Inté-
rieur, à partir du 1er janvier 2011.
La clé de voûte du dispositif réside, en
effet, dans la capacité du médecin coor-
donnateur à faire partager par leurs
confrères libéraux les principes de
bonne prescription en gérontologie.
Cela repose, notamment, sur la défi-
nition par la Haute Autorité de Santé
d’une liste de médicaments à utiliser
préférentiellement.
Sans cette articulation entre médecin
coordonnateur et médecins libéraux, le
directeur d’établissement ne pourra
garantir l’équilibre entre les nécessi-
tés de soins, d’une part, et l’enveloppe
budgétaire allouée, d’autre part.
Dans le même esprit, quelle est votre
position sur l’élaboration d’une conven-
tion nationale entre les médecins trai-
tants libéraux et les maisons de retraite?
Enfin, je souhaiterais évoquer briève-
ment la publication en juin prochain de
la liste des organismes habilités à
procéder à l’évaluation externe des
établissements et services sociaux et
médico-sociaux par l’Agence Nationale
d’Evaluation Sociale et Médico-sociale
(ANESM). Cette publication lancera la
procédure d’évaluation externe pour les
établissements et services sociaux et
médico-sociaux qui était attendue depuis
longtemps.
Comme vous le savez, la FEHAP encou-
rage ses adhérents à s’engager au plus
tôt dans ces démarches.
En effet, quelle meilleure méthode de
prévention de la maltraitance, dont aucun
établissement ne peut se prétendre
totalement à l’abri, que d’engager une
évaluation externe avec l’intérêt de l’in-
tervention d’un regard tiers?
Il est prévu que les cabinets de consul-
tants seront habilités systématique-
ment dès lors que leur dossier sera
réputé complet. Là encore, Madame la
Ministre, un travail en coopération avec
«Force de proposition et partenaire, la FEHAP l’était hier,l’est aujourd’hui et le sera encore demain».
«Quoi de plus naturel dès lors que de communiquer sur quinous sommes, sur ce que nous faisons, avec qui et comment?».
•••
Allocutions de cloture
Bouygues Construction OGER international COFELY
67
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
les fédérations représentatives des éta-
blissements s’avère nécessaire afin
d’harmoniser les schémas d’interven-
tion des organismes, mais aussi pour
que ces organismes soient eux-mêmes
évalués au fur et à mesure, s’ils ne le
sont pas au moment de leur habilitation
initiale.
Je pense ainsi à nos propositions d’amen-
dements pour relancer l’hébergement
temporaire médicalisé des personnes
âgées, secteur aujourd’hui «en panne»
alors que cette offre a une valeur ajoutée
sociale indéniable et s’inscrit pleinement
dans le cadre du plan Alzheimer du
Président de la République.
Ce militantisme de la FEHAP est
consubstantiel à son identité. Cette
identité évolue aussi sous l’influence
d’ailleurs des nombreuses réformes en
cours cette année parce qu’elles impac-
tent directement le fonctionnement de
nos établissements.
La procédure d’agrément de la conven-
tion collective qui constituait la particu-
larité de notre secteur d’activité a été
supprimée dans le secteur sanitaire, en
janvier 2008.
La même dynamique d’extinction s’ob-
serve dans le secteur social et médico-
social.
En outre, les modes de financement
de certains établissements ont été
considérablement modifiés. Ils intro-
duisent une nouvelle donne en matière
de gestion des personnels. Les moyens
financiers accordés sont limités et
strictement encadrés. Nous avions
demandé, dans le cadre d’une propo-
sition d’amendement au PLFSS 2009,
un moratoire de trois ans sur la suppres-
sion des agréments pour nous permet-
tre de gérer ces adaptations. Il a été
refusé. C’est regrettable car il va fal-
loir traiter la question «à chaud», alors
que les conditions de recrutement, de
formation, de rémunération ont un impact
très direct sur la qualité de service, la
bientraitance et les négociations avec
les Conseils généraux, par exemple.
Il va donc falloir, dans les prochains
mois, adapter nos outils conventionnels.
J’ai confié à Francis Morel, président de
la Commission Convention Collective,
et à Yves-Jean Dupuis, Directeur général,
la mission de présenter à notre prochaine
assemblée des propositions d’évolution
de notre convention collective.
Pour répondre aux nombreux défis que
nous avons collectivement à relever,
chacun à notre niveau de responsabi-
lités, vous pouvez compter, Mesdames
les Ministres, sur ce qui fait la vie quo-
tidienne de la FEHAP. Je pense évidem-
ment aux associations adhérentes et,
avec elles, à ces hommes et femmes
qui travaillent chaque jour à l’améliora-
tion de la qualité des soins et de l’accom-
pagnement des usagers. Parce que nos
adhérents sont porteurs d’un projet
auquel ils croient : la gestion désinté-
ressée bien sûr, mais aussi la prise en
compte des personnes vulnérables
comme des personnes à part entière.
Ils participent à la dynamique d’amélio-
ration continue de la qualité et de l’ef-
ficience de notre système de protection
sociale par l’offre de services qu’ils
réinventent chaque jour.
Des questions restent en suspens comme
vous avez pu le noter au cours de mon
intervention, Mesdames les Ministres,
des inquiétudes également. Leur énoncé
est nécessaire dans une relation de
partenariat étroit, pour nourrir le dialo-
gue. Ce projet que nous portons, nous
nous devons de le faire connaître au
plus grand nombre.
La FEHAP a donc confié à la Nouvelle
Fabrique des Territoires (NFT) une étude
approfondie des spécificités et de l’ap-
port de ses établissements au sein du
système de protection sociale français.
Cette mission sera conduite par
Sandrine Haas, Directrice Générale,
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
•••
68
et le Professeur Emmanuel Vigneron,
tous deux spécialistes des questions
d’aménagement sanitaire du territoire,
auteurs de nombreuses études et ana-
lyses de données statistiques du domaine
sanitaire et social.
Elle s’inscrit dans la droite ligne du rap-
port Langlais. Il préconisait, en effet, une
meilleure connaissance mutuelle entre
les pouvoirs publics et les associations.
L’étude a vocation à déboucher sur un
ouvrage illustrant les spécificités des
établissements de la FEHAP pour mieux
en faire connaître l’apport à un large
public. Elle sera présentée au prochain
congrès qui se tiendra à Nantes en
octobre 2010.
Puissiez-vous, Mesdames les Ministres,
voir en nous un partenaire de confiance
et de référence, creuset naturel avec
notre diversité interne de toutes les
questions que vous portez: privé œuvrant
au service du public, performance éco-
nomique et gestion désintéressée,
décloisonnement sanitaire et médico-
social, développement des alternati-
ves à l’hospitalisation ou à l’héberge-
ment à temps complet, évaluation de la
qualité au service des assurés sociaux
et, notamment, des plus vulnérables.
Les présidents, les administrateurs, les
directeurs et les personnels des 3 260
établissements et services adhérents
partagent avec la FEHAP la même
volonté de continuer à développer les
valeurs et les spécificités du secteur
Privé Non Lucratif en menant une
réflexion prospective sur son évolution
et sur la nécessaire dynamisation de
la vie associative.
Demain comme hier, lorsque naissaient
les premières structures caritatives,
mutualistes et associatives, vous trou-
verez, Mesdames les Ministres, des
partenaires vigilants et actifs. Je vous
remercie.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
1/2 appel médical
•••
Allocutions de cloture
69
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
C’EST AVEC BEAUCOUP DE PLAISIR QUE J’AI
ACCEPTÉ DE VENIR M’EXPRIMER devant vous
aujourd’hui. Et j’ai écouté votre discours,
Monsieur le Président, avec beaucoup
d’intérêt. Bien sûr, j’ai été très attentive
à vos réflexions et propositions en ce qui
concerne le secteur médico-social et je
ne manquerai pas de vous répondre sur
certaines d’entre elles plus avant dans
mon propos.
Mais je n’ai pas manqué d’être aussi
très attentive aux mots que vous avez
employés, aux valeurs auxquelles nous
renvoient ces mots. Et, là, je pense que
lorsque vous évoquez l’attachement de
votre Fédération aux valeurs de soli-
darité et d’équité de traitement, à la place
à accorder à la concertation, je peux
dire que ce sont des valeurs dans les-
quelles le Secrétariat d’Etat à la Solida-
rité se reconnaît évidemment très bien
dans la conduite des politiques en faveur
des personnes âgées et des personnes
handicapées.
Ce que j’ai souhaité faire, dès mon pre-
mier jour au ministère, c’est construire
dans la durée des politiques ambitieu-
ses mais réalistes, pragmatiques mais
justes avec comme objectifs, outre les
valeurs que vous avez soulignées, d’as-
surer le respect de la dignité des per-
sonnes, toutes les personnes, même les
plus diminuées dans leur corps ou leur
esprit, de promouvoir la responsabili-
sation des acteurs et d’agir au plus près
des besoins. Pour ce faire, nous avons
besoin de partenaires pour construire
ensemble. Votre Fédération est l’un
d’entre eux et je m’en réjouis.
A la veille de la discussion du projet de
loi portant réforme de hôpital au Sénat
et après la tenue du conseil de la CNSA,
notre actualité est riche et quelque peu
mouvementée. Mais le dialogue est
ouvert, même si, et c’est bien normal,
nous ne sommes pas d’accord sur tout.
•••
Discours de Valérie Létard
Elue du Nord-Pas-de-Calais, Valérie Létard, Secrétaire d’Etat à la Solidarité est venuefaire le point avec les adhérents de la FEHAP sur ses projets pour le secteur médico-social.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
«Construire dans la durée des politiques ambitieusesmais réalistes, pragmatiquesmais justes».
«L’attachement de votre Fédération aux valeurs de solidarité etd’équité de traitement, à la place à accorder à la concertation».
70
nos compatriotes est légitime et nous
tâchons d’y répondre de multiples façons:
• en développant l’offre de services à
domicile : à titre d’exemple, nous
finançons désormais chaque année
6 000 places de Services de Soins
Infirmiers A domicile (SSIAD) ; avant
2001 c’était 2000, l’effort a donc tri-
plé depuis
• en expérimentant de nouveaux modes
de prise en charge, notamment dans
le cadre du plan Alzheimer, pour que
ces services s’adaptent aux person-
nes désorientées : dès cette année,
40 équipes pluridisciplinaires expé-
rimenteront dans les SSIAD une prise
en charge spécifiquement orientée
vers les malades Alzheimer. D’ici à
2012, ce sont 500 équipes pluridisci-
plinaires qui interviendront dans ces
mêmes services
• en adaptant notre réglementation
pour que le mode de financement des
SSIAD tienne compte des besoins des
publics pris en charge, en particulier
des cas les plus lourds. Dans cet
esprit, un projet de décret permettant
de combler cette lacune sera soumis à
concertation dans les prochains mois
• en développant l’aide aux aidants :
notre objectif est le doublement de
l’offre d’accueil de jour et d’héberge-
ments temporaires. Ces structures
de répit sont essentielles pour per-
mettre aux aidants naturels –sans qui
rien n’est possible– de souffler un peu.
Nous avons fait un pas en ce sens en
intégrant en droit le transport dans
le budget soins et dépendance des
accueils de jour. Il s’agit désormais
de s’assurer qu’il est réellement mis
en œuvre sur le terrain.
En matière d’accueil temporaire, je ne
suis pas hostile, Monsieur le Président,
sous réserve d’arbitrage favorable, à ce
qu’un amendement à la loi HPST vienne
donner une base législative à une évolu-
tion de la tarification des services d’hé-
bergement temporaire afin de favoriser,
enfin, leur développement effectif.
De la même façon, la discussion à
l’Assemblée Nationale de la loi HPST a
permis d’ouvrir la possibilité de finan-
cement de la formation des aidants
familiaux par la CNSA : je crois que c’est
primordial car les aidants familiaux se
trouvent bien souvent démunis devant
la maladie d’Alzheimer et la grande
dépendance.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
•••Mais vous avez voulu vous inscrire dans
une logique d’analyse et de propositions,
loin de tout esprit polémique. Cette
démarche ne peut être que positive car
c’est par le débat et l’échange de propo-
sitions, en s’appuyant sur des faits, que
l’on fait avancer les politiques publiques.
Je voudrais maintenant rappeler les
grandes lignes de notre politique à
l’attention des personnes âgées et han-
dicapées. Cela me permettra, chemin
faisant, Monsieur le Président, de répon-
dre à vos interrogations.
La politique en faveur du grand âge que
nous voulons mener avec Brice Hortefeux
a d’abord pour objectif d’adapter notre
société et notre protection sociale à la
révolution du quatrième âge. En effet,
pour la première fois dans l’histoire
humaine, l’espérance de vie progresse
non pas au début de la vie mais surtout
après 75 ans. Cette catégorie d’âge voit
sa population s’accroître rapidement,
puisque d’ici à 2020, on dénombrera un
million de personnes supplémentaires
âgées de 85 ans.
Faire face au vieillissement de la population
De cela, nous devons d’abord nous réjouir
car un nombre croissant de nos conci-
toyens vieillissent en bonne santé. Mais
notre société doit aussi se préparer à
accueillir et prendre en charge un nombre
croissant de personnes très âgées dont
une part sensible est en perte d’autonomie.
Or, le souhait le plus cher de l’immense
majorité des Français dans ce domaine
est de rester à domicile, si possible
jusqu'à leur dernier souffle. Ce vœu de
Allocutions de cloture
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
• Enfin, nous devrons réfléchir à l’évo-
lution de l’Allocation Personnalisée
d’Autonomie, notamment pour les
personnes isolées ou atteintes par la
maladie d’Alzheimer.
Mais le soutien à domicile trouve par-
fois ses limites dans une société de plus
en plus éclatée et du fait d’une perte
d’autonomie de plus en plus forte. Aussi,
le recours à l’hébergement médicalisé
est-il parfois indispensable. En l’absence
d’aidants naturels, ou face à l’épuise-
ment de ces derniers, le maintien à
domicile contraint est un réel danger.
De ce point de vue, l’Etat déploie, dans
une logique pluriannuelle, des moyens
considérables pour offrir aux usagers
un nombre de places en EHPAD au plus
près des besoins, dans des établisse-
ments dotés de locaux adaptés et d’un
personnel qualifié dont le nombre pro-
gresse d’ailleurs régulièrement. Pour
100 résidents, le nombre moyen d’agents
est désormais de 62 dont 25 soignants.
Les personnels soignants ont augmenté
de 40% entre 2001 et 2007, soit 40000
postes. Et nous avons obtenu les crédits
pour financer la création d’environ
20 000 emplois supplémentaires, soit
600 M€ sur les deux années 2008 et
2009 dans les établissements existants.
Mais je souhaite le dire d’emblée: beau-
coup reste à faire car les attentes de
la population augmentent et les rési-
dents accueillis dans les maisons de
retraite sont de plus en plus dépen-
dants, de plus en plus souvent atteints
de la maladie d’Alzheimer.
En outre, d’importantes inégalités de
répartition des crédits existent entre les
établissements. En effet, pour un même
besoin en soins, les ressources attri-
buées par l’assurance maladie peuvent
varier de 1 à 3 et il n’est pas acceptable
de laisser subsister de telles inégalités.
C’est pourquoi un effort raisonnable est
demandé à environ 7 % des établisse-
ments aujourd’hui beaucoup mieux dotés
que les autres, de façon à concentrer
les moyens nouveaux sur les établis-
sements qui nécessitent d’être renforcés
davantage en moyens humains.
Je sais que ce processus fait débat.
Mais nous le ferons dans le dialogue et
nous communiquerons la liste précise
des établissements concernés par la
convergence tarifaire. Ces établisse-
ments seront invités à signer un contrat
d’objectifs et de moyens afin que ces
établissements puissent répondre au
mieux aux besoins des personnes âgées.
Une chose est claire et mérite d’être
rappelée : aucun établissement pour
personnes âgées ne verra ses moyens
réduits en 2009. Même les mieux dotés
verront leur dotation progresser de 0,5%.
Je suis en mesure également de vous
annoncer que j’ai décidé de faire droit
à la demande que vous avez formulée
d’améliorer le niveau du tarif partiel des
EHPAD, en le portant de 9,2€ à 9,36€.
Un arrêté rectificatif paraîtra en ce sens
dans les tout prochains jours. Je tiendrai
ainsi l’engagement que j’ai pris de voir
tous les établissements bénéficier
d’une évolution de leur budget supé-
rieure à l’inflation.
En matière d’investissements mainte-
nant, je crois nécessaire de souligner
l’importance de l’effort public pour
rénover les établissements et créer de
nouvelles places en établissements
pour personnes âgées dépendantes.
Une politique d’investissement
En quatre ans, de 2006 à 2009, près d’un
milliard d’euros aura été consacré à
l’investissement dans les maisons de
retraite soit, en moyenne, 250 M€par an
en regard d’un rythme de 70M€ anté-
rieurement. Grâce à cela, 5 milliards de
travaux ont été engagés, le taux de sub-
vention étant en moyenne de 20%.
Le rythme de création de places a, quant
à lui, été porté de 2 500 places par an
jusqu’en 2004, date de création de la
Caisse Nationale de Solidarité pour
l’Autonomie, à 7500 à partir de 2008 et
même 12500, cette année, grâce au plan
de relance. Là aussi, la progression est
spectaculaire. D’ailleurs, dès le conseil
de la CNSA la semaine dernière, la liste
des 67 opérations financées par ce plan
a été publiée avec leur localisation exacte.
Je souhaite maintenant évoquer la
question de la tarification des EHPAD.
Des dispositions législatives ont été
adoptées à l’occasion de la LFSS pour
2009, elles vont faire l’objet d’un décret
d’application. Un texte sera soumis à la
concertation dans les meilleurs délais.
Je souhaite que ce texte traduise une
réelle avancée, non seulement pour
simplifier la tarification, mais également
pour assouplir les règles de répartition
du personnel entre les budgets soins et
dépendance –je pense, notamment, aux
aides-soignantes, mais également aux
postes de psychologues et d’anima-
teurs–. Vous conviendrez que ces élé-
ments peuvent constituer des avancées
appréciables pour les établissements
que vous gérez.
Permettez-moi de répondre maintenant
à votre question sur l’évolution du rôle et
du statut des médecins coordonnateurs
•••
72
et sur l’expérimentation des médica-
ments dans le forfait soins des EHPAD.
Je partage votre analyse sur la nécessité
d’une approche conjointe. A cet effet,
deux groupes de travail sur le rôle et les
relations des médecins coordonna-
teurs, l’un présidé par le Docteur Alain
Lion et, l’autre, sur le métier de médecin
coordonnateur, présidé par le Docteur
Nathalie Maubourguet, se réuniront dès
le 21 avril.
Le Professeur Jeandel est chargé de la
supervision de ces deux groupes et de leur
articulation avec la mission que j’ai confiée
à Jean-Pierre Lancry sur la préparation
des conditions de l’expérimentation de la
réintroduction des médicaments dans
les tarifs soins des EHPAD.
Ces groupes feront des propositions
au comité de pilotage de façon à ce que
les évolutions, y compris réglementaires,
puissent intervenir avant la fin de l’année.
Naturellement, Monsieur le président,
je suis tout à fait favorable au principe
d’une convention nationale liant les
médecins traitants libéraux et les EHPAD.
Certes, cette démarche suppose des
arbitrages délicats et ne pourra se réali-
ser immédiatement mais je souhaite que
nous allions clairement dans ce sens.
Le volet social et médico-socialdu projet HPST
En ce qui concerne l’organisation et la
gouvernance du champ médico-social,
vous l’avez souligné Monsieur le Prési-
dent, la loi « Hôpital, Patient, Santé et
Territoires» suscite autant d’inquiétudes
que d’attentes. Pour répondre à ces atten-
tes, plusieurs évolutions importantes ont
été introduites dans le projet de loi adopté
en première lecture par l’Assemblée
Nationale. Vous avez bien voulu les rap-
peler et je vous en remercie.
• En effet, la nouvelle procédure d’appels
à projets qui se substitue aux actuels
CROSMS sera plus simple. Elle per-
mettra d’accorder d’emblée autorisa-
tion et financement aux projets
répondant le mieux aux besoins, tant
en ce qui concerne les personnes
âgées que les personnes handicapées.
• Le mécanisme financier de fongibi-
lité asymétrique, y compris dynami-
que, constitue un grand pas pour
garantir au secteur médico-social
un financement pérenne et croissant
pour répondre à l’importance des
besoins à venir. Ainsi les restructu-
rations hospitalières se traduiront
par des transferts de crédits vers le
médico-social chaque fois qu’il sera
nécessaire de développer l’offre.
Je crois que la discussion de la loi HPST
au Sénat pourra être l’occasion de nou-
velles avancées.
Sous réserve des arbitrages interminis-
tériels et du vote du Sénat, je suis favo-
rable à des initiatives parlementaires,
notamment en ce qui concerne la réduc-
tion de la TVA à 5,5 % pour l’investis-
sement dans les structures d’accueil de
jour et d’hébergement temporaire qui
sont aujourd’hui défavorisées alors que
leur développement – je l’ai souligné –
«Pour 100 résidents, le nombre moyen d’agents est désormaisde 62 dont 25 soignants. Les personnels soignants ont augmentéde 40% entre 2001 et 2007, soit 40000 postes».
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Allocutions de cloture
MGDIS ADECCO Médical Santélys Dialyse Softway médical RESTALLIANCE
75
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
est un axe majeur du plan Alzheimer.
Je trouve également intéressante, dans
son principe, votre idée de mettre en
place un observatoire des coûts dans
le secteur médico-social, en lien avec
la volonté du Gouvernement de voir
mieux maîtriser le reste à charge et
d’instaurer dans le champ du handicap,
comme dans celui des personnes
âgées, un mode de financement qui
tienne mieux compte des besoins des
personnes.
J’ai bien entendu, Monsieur le Président,
votre idée de voir reconnu dans la loi
le nouveau statut d’Etablissement et
service d’intérêt collectif et j’en saisis
tout l’intérêt. Mais il faut cependant
prendre garde à ne pas créer de nou-
veaux cloisonnements statutaires au
sein du secteur médico-social, alors que
la création des ARS a justement pour
objet de supprimer les cloisonnements
institutionnels.
Il me semble important de revenir un
instant sur cette question du reste à
charge. C’est un domaine où –c’est ma
conviction– d’importants progrès sont à
accomplir. 4 personnes âgées sur 5 n’ont
pas les revenus leur permettant de faire
face aux tarifs des maisons de retraite
et cela est, à juste titre, incompris. Met-
tre en place une aide plus généreuse
et plus équitable, dégressive avec le
revenu, constitue l’une des réflexions
majeures du 5e risque. Mais cela signi-
fie aussi que les établissements, qu’ils
soient privés ou publics, doivent maîtri-
ser leurs tarifs.
Maîtriser le reste à charge, cela signifie
aussi prendre en compte l’impact finan-
cier des mesures réglementaires en
matière de sécurité et s’assurer que
celles-ci sont soutenables. C’est pour-
quoi je tiens à vous annoncer la publi-
cation, dans les tout prochains jours,
d’un décret rectificatif en matière de
sécurité électrique qui prorogera de 2 à
5 ans le délai d’installation des groupes
électrogènes pour les établissements
médico-sociaux. Je souhaite également
que les services de l’Etat puissent accom-
pagner financièrement l’acquisition de
ces matériels, dans la limite des dispo-
nibilités de leur enveloppe.
Un mot sur le défi de la dépendance et
le «5e risque»: sur ce sujet complexe, dont
les enjeux sont multiples, les travaux
préparatoires se poursuivent afin de
préciser dans quelles conditions, selon
quel rythme et avec quels financements.
Mais soyez assurés de la détermination
du Gouvernement à mener à bien cette
réforme.
L’évaluation des besoins des ESAT
Vous avez évoqué la question des ESAT:
je partage votre sentiment – commun
à d’autres associations du secteur du
handicap – qu’il nous faut progresser
dans la mise en œuvre du référentiel
d’évaluation des besoins. C’est pour-
quoi, dans un premier temps, la fixation
d’un tarif-plafond dans les ESAT devra
respecter trois principes :
• la fixation d’un tarif-plafond ciblant
seulement les ESAT ayant des coûts
beaucoup plus élevés que la moyenne
• la détermination de «plafonds spéci-
fiques » pour les ESAT accueillant
certains publics particuliers
• le respect des engagements pris
dans les CPOM.
L’arrêté qui organise ce dispositif n’est
pas encore prêt et le dossier sera soumis
à concertation avant toute décision, je
m’y engage.
Comme vous le voyez, Monsieur le Pré-
sident, Monsieur le Directeur Général,
Mesdames et Messieurs, les chantiers
sont multiples et nous aurons de nom-
breuses occasions de débattre des sujets
qui nous passionnent et nous animent
car ils sont au cœur des préoccupations
de millions de nos concitoyens et d’abord
des plus fragiles d’entre eux.
Nous ne baissons pas la garde devant
la crise même si, c’est vrai, elle rend les
choses plus difficiles. Certains, hélas,
préfèrent attiser la peur en suscitant de
vaines polémiques, en proclamant, contre
toute évidence, le désengagement de
l’Etat. Ce n’est pas la démarche que la
FEHAP a choisie et je tenais encore une
fois à vous en remercier car c’est juste-
ment parce que nous vivons une période
de crise sans précédent que nous avons
besoin des idées et de l’enthousiasme
de chacun, pour construire ensemble
les solutions de demain.
« Je suis favorable à des initiatives parlementaires,notamment en ce qui concernela réduction de la TVA à 5,5%pour l’investissement dans lesstructures d’accueil de jour etd’hébergement temporaire».
«Nous avons besoin des idéeset de l’enthousiasme de chacun,pour construire ensemble les solutions de demain».
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Alpha CEGI ANIOS DALKIA ONTEX-ID
77
ALLOCUTIONS DE CLOTURE I CONGRÈS 2009
A L’HEURE DES GRANDS CHANGEMENTS ET DES
GRANDES RÉFORMES pour notre système
de santé, il m’a semblé important de
venir vous rencontrer aujourd’hui.
Ce 34e congrès de la Fédération des
Etablissements Hospitaliers et d’Aide
à la Personne m’offre, en effet, l’occa-
sion de rappeler la place et le rôle des
professionnels du secteur Privé Non
Lucratif dans l’offre de soins, mais
aussi dans l’important mouvement de
modernisation qui s’instaure.
Voici la première fois que nous nous
retrouvons depuis le vote du projet de loi
«Hôpital, Patients, Santé et Territoires» par
l’Assemblée nationale, projet de loi qui sera
soumis au Sénat dès le 11 mai prochain.
Ce projet de loi, vous le connaissez bien,
puisque vous avez participé à son éla-
boration. Comme vous, je me réjouis
que notre dialogue ait été constructif.
Comme vous, je souhaite qu’il se pour-
suive, avec la même sérénité et la même
ambition pour notre système de santé.
C’est pourquoi je ne peux m’adresser à
vous sans répondre aux préoccupations
qui sont les vôtres.
Vous rappeliez, dans votre propos, vos
inquiétudes quant à la disparition de la
notion d’établissement privé Participant
au Service Public Hospitalier (PSPH)
dans le projet de loi.
Nos rencontres régulières et nos échan-
ges fructueux, dont le dernier a eu lieu
quelques jours avant le début de la
discussion du projet de loi, nous ont
permis de progresser ensemble et de
proposer une place nouvelle à vos éta-
blissements.
Au-delà du rôle d’établissement à statut
privé assurant une mission de service
public, déjà reconnu dans le projet de loi
initial, j’ai souhaité que nous puissions
confirmer sans ambiguïté le lien indis-
soluble qui existe entre l’exercice de
certaines activités de santé ou certains
modes de prise en charge et l’engage-
ment que représente cette charge pour la
structure et les médecins qui l’exercent.
Les établissements PSPH en ont d’ail-
leurs parfaitement démontré l’intérêt
pour les patients, pour les professionnels
et pour l’ensemble du système de soins.
Le projet de loi «Hôpital, Patients, Santé
et Territoires» réaffirme les missions de
service public des établissements de
santé: la permanence des soins, l’accueil
des urgences, la formation, la recherche
et l’accueil des personnes en situation
de précarité.
Ainsi que vous l’avez souligné, c’est en
fonction des besoins de la population
sur un territoire donné que les missions
de service public doivent pouvoir être
attribuées aux établissements de santé,
non en fonction du statut de ceux-ci.
Dès lors, l’appellation de «participant au
service public» ne peut plus être réservée
à une seule catégorie d’établissements.
Cependant, j’ai entendu vos demandes
légitimes sur la nécessité de reconnaî-
tre l’identité des établissements PSPH.
J’ai donc accepté un amendement visant
à proposer que les PSPH deviennent
des Etablissements de Santé Privés
d’Intérêt Collectif, dès lors que ces éta-
blissements choisiront de s’engager
dans des missions de service public et
de respecter les obligations d’accueil et
de prise en charge qui s’y attachent.
Les Etablissements de Santé d’Intérêt
Collectif exerçant des missions de service
public continueront de fonctionner
selon les mêmes modalités :
• sur le plan financier, les dispositions
relatives au financement des PSPH
qui leur permettent de bénéficier
de l’échelle tarifaire publique, sont
maintenues
• sur le plan juridique, la possibilité de
détacher des praticiens hospitaliers
et des professeurs des universités-
praticiens hospitaliers dans un éta-
blissement assurant des missions
de service public relève du niveau
réglementaire et cette disposition
continue d’exister.
Vous savez à quel point je suis attachée
à ce modèle, consciente que les établis-
sements Privés à but Non Lucratif
jouent un rôle majeur dans notre pay-
sage hospitalier.
La large concertationque j’ai menée avec
les fédérations et la qualité de nos échan-
ges n’ont fait que confirmer mon souhait
de poursuivre le développement des
établissements privés sans but lucratif.
Il ne s’agit là que d’une première étape.
J’ai pris connaissance avec un vif inté-
rêt de vos propositions pour la discus-
sion au Sénat, visant à étendre les
•••
Discours de Roselyne Bachelot-Narquin
Roselyne Bachelot-Narquin, Ministre de la Santé et des Sports, est venue à Lilleretrouver les adhérents de la FEHAP auquels a expliqué son projet de loi HPST.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
78
compétences et les possibilités d’ac-
tion des Etablissements de Santé
Privés d’Intérêt Collectif.
Je sais que vous souhaitez en particulier,
avec la Fédération Hospitalière de France,
que les hôpitaux publics et les Etablis-
sements de Santé d’Intérêt Collectif
aient un droit de priorité pour l’attri-
bution des missions de service public.
Vous le savez, j’ai été sensible aux argu-
ments développés à l’Assemblée sur
cette question. Je compte apporter des
précisions au Sénat sur ce sujet, sans
pour autant avoir à exclure les partenai-
res de l’hospitalisation privée qui pour-
ront apporter leurs ressources et leurs
compétences sur certains territoires, et
toujours en fonction des besoins.
L’intérêt que vous portez au nouveau
plan cancer et au rapport d’Edouard
Couty est un autre signe de votre atten-
tion vigilante.
Comme vous l’avez signalé, la FEHAP,
à l’instar des autres fédérations hos-
pitalières, a contribué de façon active au
rapport du professeur Grünfeld et je
salue votre démarche. Les recomman-
dations qui figurent dans ce rapport tra-
duisent les vœux de la grande majorité
des acteurs de la lutte contre le cancer.
J’ai bien entendu les réponses que vous
attendez. Sachez que les différents
ministres concernés vont traduire en
mesures concrètes ces recommanda-
tions. A la mi-mai, une présentation de
ces travaux sera faite. Je serai particu-
lièrement attentive à ce que les axes qui
ont été dégagés dans ce rapport appa-
raissent comme les priorités du nouveau
plan prévu à la fin du mois de juin.
Je sais aussi que vous avez activement
participé aux travaux de la commission
sur les missions et l’organisation de la
psychiatrie et de la santé mentale, pré-
sidée par Edouard Couty. Je prendrai
connaissance avec intérêt de vos propo-
sitions qui vont, j’en suis sûre, contribuer
à enrichir notre réflexion en cours.
Bien entendu, la modernisation de notre
offre de soins qui est l’ambition du projet
de loi, doit s’accompagner de la moderni-
sation de notre système de financement.
La campagne hospitalière pour 2009
constitue à cet égard une étape impor-
tante. La nouvelle classification des pres-
tations d’hospitalisation, dite V 11 et
l’introduction de niveaux de sévérité,
l’identification des charges relatives à
la permanence des soins médicale, ou
encore l’accompagnement financier
des établissements qui accueillent un
nombre important de patients en situa-
tion de précarité, tendent à une alloca-
tion plus précise et plus juste des
moyens mobilisés pour les patients.
Ces évolutions sont importantes. Elles
sont la traduction d’une double orien-
tation: une meilleure prise en compte de
la situation des patients et l’allocation
des financements en fonction des mis-
sions assurées par les établissements.
Le passage à la version 11 de la classi-
fication qui constitue l’élément principal
de complexité de l’actuelle campagne
tarifaire, répond à une demande de l’en-
semble des acteurs. Cette complexité a
conduit à la mise au point définitive de la
campagne dans des délais contraints.
Mes services, en particulier l’agence
technique de l’information sur l’hospi-
talisation, assurent actuellement un
accompagnement des établissements et
des Agences Régionales de l’Hospitali-
sation sur les évolutions de la campagne.
Vous souhaitez que les évolutions amor-
cées en 2009 soient approfondies. Je
souscris bien volontiers à votre demande.
La tarification à l’activité présente le
très grand mérite d’être un dispositif de
financement évolutif. Les travaux métho-
dologiques vont se poursuivre au cours
de l’année 2009 afin de conforter et de
préciser le modèle pour la prochaine
campagne tarifaire.
Vous m’interpellez également sur les
financements au titre des Missions
d’Intérêt Général et d’Aide à la Contrac-
tualisation et de leur mobilisation en
faveur des établissements en difficulté.
Vous le savez, monsieur le président, la
dotation de financement des MIGAC ne
peut être réduite à cette seule dimension.
La réduction des déficits est une prio-
rité. Cet objectif vaut à la fois pour les
hôpitaux publics et les établissements
Privés à but Non Lucratif. Il en va de
leur pérennité.
Les crédits d’accompagnement dont
bénéficient les hôpitaux publics et les
établissements privés en difficulté,
pour des montants significatifs dans
certains cas, sont à la mesure des dif-
ficultés qu’ils rencontrent et du temps
d’adaptation qui leur est nécessaire.
Je ne souhaite stigmatiser aucun éta-
blissement en difficulté, qu’il soit public
ou privé PSPH, mais l’accompagnement
financier constitue la contrepartie des
efforts demandés et n’est que temporaire.
La campagne 2009 prévoit, comme en
2008, des crédits spécifiques d’accom-
pagnement des établissements privés
PSPH.
De plus, vous comprendrez aisément,
qu’au-delà des difficultés de certains
établissements, les évolutions du modèle
de financement impliquent des modi-
fications des ressources des établis-
sements.
Des crédits de contractualisation desti-
nés à l’accompagnement des établisse-
ments les plus impactés par ces modi-
fications ont été prévus dans le cadre de
la campagne 2009. Si tel n’avait pas été
le cas, on me l’aurait reproché.
Je suis disposée, bien évidemment, à
travailler avec votre fédération sur les
ajustements du modèle. Les modalités
de financement de la dialyse peuvent
faire l’objet d’un examen particulier.
Ainsi, mes services analyseront toute
contribution à caractère économique
que la FEHAP pourra réaliser.
Préserver l’accès de tous à des soins de
qualité : c’est conformément à ce prin-
cipe intangible que nous devons repen-
ser l’organisation de notre système.
Nous devons, collectivement, une réponse
adaptée aux besoins de nos concitoyens,
de tous nos concitoyens.
Cela, la FEHAP a toujours su le faire et
je sais qu’encore et toujours elle le fera.
Sanitaires & Sociales I Juin 2009 I Hors-série
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Allocutions de cloture