neurotoxicité des substances naturelles

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Neurotoxicité des substances naturelles D Caparros-Lefebvre Résumé. Identifier l’origine toxique environnementale d’un syndrome neurologique aigu n’est pas aisé. La mise en évidence d’une toxicité chronique est encore plus difficile, ce d’autant qu’il n’existe pas toujours de corrélation entre la toxicité cellulaire ou animale et les conséquences humaines. Le lathyrisme, le cassavisme et le « lytico-bodig » de l’île de Guam sont des entités bien caractérisées, dont l’origine toxique environnementale est avérée ou probable, mais dont les mécanismes pathogéniques et parfois les principes neurotoxiques ne sont pas toujours élucidés. Il faut savoir évoquer une cause toxique devant un syndrome confusionnel, un déficit moteur brutal en rapport avec une neuropathie aiguë ou un syndrome myasthénique, en particulier dans des régions rurales où il existe des pratiques de médecine traditionnelle par les plantes. La recherche du toxique est souvent négative et un interrogatoire précis est plus utile qu’une recherche étendue de toxiques. Un inventaire des principales substances neurotoxiques issues de plantes est proposé. © 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : neurotoxicité, lathyrisme, alcaloïdes, neuromyélites tropicales, lytico-bodig, syndrome parkinsonien. Introduction Le but de ce chapitre est d’aider le clinicien à évoquer une cause toxique naturelle devant une histoire neurologique aiguë ou chronique, et de fournir un inventaire des « neurotoxiques » environnementaux. Cependant, cet inventaire ne peut prétendre être exhaustif. Spencer et Schaumburg, en 2000, dans un manuel encyclopédique sur la neurotoxicologie expérimentale et clinique, recensent plus d’une centaine de familles de toxines naturelles connues à ce jour [64] . Leur description des plantes neurotoxiques est basée sur les ouvrages de référence de Bruneton, qui décrit la toxicité de plusieurs centaines de plantes, chez l’homme et l’animal [7, 8] . De plus, de nombreuses plantes contiennent vraisemblablement des neurotoxines non connues à ce jour. Il en est de même pour les neurotoxines synthétisées par certaines espèces d’insectes, ou d’animaux marins. Par exemple, les acétogénines [1] , puissantes neurotoxines inhibant le complexe I de la chaîne respiratoire mitochondriale (qui seront évoquées plus loin), viennent d’être découvertes chez une espèce marine : le stolonica [22] , et dans des larves d’insectes [5] . Enfin, la mise en évidence d’une toxicité chronique est souvent le fait du hasard et sa confirmation est particulièrement laborieuse. Prouver la toxicité à long terme de substances naturelles chez l’homme nécessite non seulement une démonstration épidémiologique claire, mais aussi la création d’un modèle animal reproduisant à la fois le syndrome clinique et les lésions neuropathologiques. Sur l’île de Guam dans l’archipel des Mariannes, où la prévalence de la sclérose latérale amyotrophique et de syndromes parkinsoniens atypiques fut jusqu’à 100 fois supérieure à celle des États-Unis ou de l’Europe, de nombreuses hypothèses étiologiques ont été émises, et furent la source d’un débat scientifique international [21, 33, 34, 54, 66] . L’hypothèse d’une toxicité de la farine des graines de cycas circinalis a été battue en brèche, après avoir été défendue pendant plus de 20 ans ; c’est le meilleur exemple de la difficile tâche des neurotoxicologues cliniciens [78] . Syndromes neurotoxiques d’allure épidémique La toxicité de plantes alimentaires a été reconnue depuis plus de 2000 ans, avec le lathyrisme. Le cassavisme fut décrit ultérieurement. Les neuromyélites optiques tropicales dont l’origine toxique n’est pas formellement prouvée constituent un groupe hétérogène d’affections, dans lesquelles prédomine tantôt l’atteinte myélitique, tantôt l’atteinte périphérique. Enfin, le syndrome « lytico-bodig » de l’île de Guam représente un modèle très intéressant de pathologie d’origine environnementale, bien que la cause exacte demeure mystérieuse pour la plupart des observateurs. LATHYRISME Les plantes légumineuses ou fabales, dont de nombreuses espèces sont toxiques, constituent un groupe de 17 000 espèces d’aspect très différent [7, 8] . Elles se divisent en deux groupes principaux : d’une part, des plantes tropicales (dont la neurotoxicité sera évoquée plus loin), d’autre part des plantes européennes, qui sont le plus souvent de petites herbacées dont les fruits sont des gousses ou « légumes ». Les graines de ces gousses permettent la fabrication d’une farine. Celles de certaines espèces : jarosse (Lathyrus sativus), gesse chiche (Lathyrus cicera), gesse pourpre (Lathyrus clymenum) furent (et sont encore parfois) l’aliment de base en période de grande famine. La consommation de cette farine est à l’origine du lathyrisme [64] , déjà décrit par Hippocrate au IV e siècle avant JC, puis par Pline l’Ancien et Galien. C’est un syndrome médullaire stéréotypé marqué par une Dominique Caparros-Lefebvre : MD, PhD. Service de neurologie, CHU, 97159 Pointe à Pitre, France. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 17-181-C-05 17-181-C-05 Toute référence à cet article doit porter la mention : Caparros-Lefebvre D. Neurotoxicité des substances naturelles. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Neurologie, 17-181-C-05, 2003, 8 p.

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Neurotoxicité des substances naturellesD Caparros-Lefebvre

Résumé. – Identifier l’origine toxique environnementale d’un syndrome neurologique aigu n’est pas aisé. Lamise en évidence d’une toxicité chronique est encore plus difficile, ce d’autant qu’il n’existe pas toujours decorrélation entre la toxicité cellulaire ou animale et les conséquences humaines. Le lathyrisme, le cassavismeet le « lytico-bodig » de l’î le de Guam sont des entités bien caractérisées, dont l’origine toxiqueenvironnementale est avérée ou probable, mais dont les mécanismes pathogéniques et parfois les principesneurotoxiques ne sont pas toujours élucidés. Il faut savoir évoquer une cause toxique devant un syndromeconfusionnel, un déficit moteur brutal en rapport avec une neuropathie aiguë ou un syndrome myasthénique,en particulier dans des régions rurales où il existe des pratiques de médecine traditionnelle par les plantes. Larecherche du toxique est souvent négative et un interrogatoire précis est plus utile qu’une recherche étenduede toxiques. Un inventaire des principales substances neurotoxiques issues de plantes est proposé.© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : neurotoxicité, lathyrisme, alcaloïdes, neuromyélites tropicales, lytico-bodig, syndromeparkinsonien.

Introduction

Le but de ce chapitre est d’aider le clinicien à évoquer une causetoxique naturelle devant une histoire neurologique aiguë ouchronique, et de fournir un inventaire des « neurotoxiques »environnementaux. Cependant, cet inventaire ne peut prétendre êtreexhaustif. Spencer et Schaumburg, en 2000, dans un manuelencyclopédique sur la neurotoxicologie expérimentale et clinique,recensent plus d’une centaine de familles de toxines naturellesconnues à ce jour [64]. Leur description des plantes neurotoxiques estbasée sur les ouvrages de référence de Bruneton, qui décrit la toxicitéde plusieurs centaines de plantes, chez l’homme et l’animal [7, 8]. Deplus, de nombreuses plantes contiennent vraisemblablement desneurotoxines non connues à ce jour. Il en est de même pour lesneurotoxines synthétisées par certaines espèces d’insectes, oud’animaux marins. Par exemple, les acétogénines [1], puissantesneurotoxines inhibant le complexe I de la chaîne respiratoiremitochondriale (qui seront évoquées plus loin), viennent d’êtredécouvertes chez une espèce marine : le stolonica [22], et dans deslarves d’insectes [5].Enfin, la mise en évidence d’une toxicité chronique est souvent lefait du hasard et sa confirmation est particulièrement laborieuse.Prouver la toxicité à long terme de substances naturelles chezl’homme nécessite non seulement une démonstrationépidémiologique claire, mais aussi la création d’un modèle animalreproduisant à la fois le syndrome clinique et les lésionsneuropathologiques. Sur l’île de Guam dans l’archipel desMariannes, où la prévalence de la sclérose latérale amyotrophiqueet de syndromes parkinsoniens atypiques fut jusqu’à 100 foissupérieure à celle des États-Unis ou de l’Europe, de nombreuseshypothèses étiologiques ont été émises, et furent la source d’un

débat scientifique international [21, 33, 34, 54, 66]. L’hypothèse d’unetoxicité de la farine des graines de cycas circinalis a été battue enbrèche, après avoir été défendue pendant plus de 20 ans ; c’est lemeilleur exemple de la difficile tâche des neurotoxicologuescliniciens [78].

Syndromes neurotoxiques d’allureépidémique

La toxicité de plantes alimentaires a été reconnue depuis plus de2000 ans, avec le lathyrisme. Le cassavisme fut décrit ultérieurement.Les neuromyélites optiques tropicales dont l’origine toxique n’estpas formellement prouvée constituent un groupe hétérogèned’affections, dans lesquelles prédomine tantôt l’atteinte myélitique,tantôt l’atteinte périphérique. Enfin, le syndrome « lytico-bodig » del’île de Guam représente un modèle très intéressant de pathologied’origine environnementale, bien que la cause exacte demeuremystérieuse pour la plupart des observateurs.

LATHYRISME

Les plantes légumineuses ou fabales, dont de nombreuses espècessont toxiques, constituent un groupe de 17 000 espèces d’aspect trèsdifférent [7, 8]. Elles se divisent en deux groupes principaux : d’unepart, des plantes tropicales (dont la neurotoxicité sera évoquée plusloin), d’autre part des plantes européennes, qui sont le plus souventde petites herbacées dont les fruits sont des gousses ou « légumes ».Les graines de ces gousses permettent la fabrication d’une farine.Celles de certaines espèces : jarosse (Lathyrus sativus), gesse chiche(Lathyrus cicera), gesse pourpre (Lathyrus clymenum) furent (et sontencore parfois) l’aliment de base en période de grande famine. Laconsommation de cette farine est à l’origine du lathyrisme [64], déjàdécrit par Hippocrate au IVe siècle avant JC, puis par Pline l’Ancienet Galien. C’est un syndrome médullaire stéréotypé marqué par uneDominique Caparros-Lefebvre : MD, PhD. Service de neurologie, CHU, 97159 Pointe à Pitre, France.

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Caparros-Lefebvre D. Neurotoxicité des substances naturelles. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Neurologie,17-181-C-05, 2003, 8 p.

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paraparésie spastique isolée, sans trouble sensitif, ni ataxie. Lesanciens auteurs avaient déjà mis en évidence le lien entre lesyndrome clinique et la plante toxique [68]. Au XVIe, en Allemagne,un édit du duc de Wurtemberg en interdit la consommation [8].Malgré cela, la consommation de farine de lathyrus s’est pérenniséeau cours des périodes de famine du XVIe au XVIIIe siècle. Denombreuses « pseudoépidémies » de lathyrisme surviennent enItalie entre 1690 et 1873. Durant cette période, Cantani décrit pour lapremière fois la maladie sous le nom de lathyrisme [10]. De nombreuxcas surviennent aussi en Inde vers 1860, bien corrélés à l’importancede la vente de lathyrus sur les marchés, qui devient un index de lapauvreté des villages ou des familles. Des survivants de camps deconcentration, victimes du lathyrisme et vivant actuellement enIsraël ont été décrits avec précision et suivis au long cours. Uneatteinte de la corne antérieure a été mise en évidence dans certainsde ces cas [19]. Les manifestations neurologiques de la phase aiguë nesont pas seulement liées à un facteur toxique, mais aussi auxprofondes carences alimentaires et vitaminiques. Il ne s’agit doncpas d’un modèle neurotoxique « pur ». Le lathyrisme n’a pasdisparu : en 1999, une nouvelle épidémie fut décrite en Éthiopie [25].Le diagnostic repose sur quatre critères :

– la consommation de farine de lathyrus comme base del’alimentation durant les mois précédents ;

– le développement d’une paraparésie pure ;

– la stabilisation clinique après l’arrêt de la consommation delathyrus ;

– l’absence d’autre cause évidente [64].S’il n’existe pas de doute sur les dangers de l’alimentation par lafarine de gesse, en revanche, il n’est pas certain que la toxinecandidate, extraite de la graine du Lathyrus soit la cause de lamaladie. Il s’agit d’un dipeptide : l’acide bêta-N-oxalylamino-L-alanine (BOAA), dont l’administration à l’animal reproduit defaçon très inconstante un syndrome clinique apparenté au syndromemédullaire de l’homme [68]. Le BOAA serait un agoniste glutama-tergique [30, 61].

CASSAVISME

Le manioc est une des racines les plus consommées dans les régionstropicales pauvres. La farine de manioc ou cassave, est connue enFrance sous le nom de tapioca. Il existe deux principales variétés demanioc : le manioc doux et le manioc amer. Le manioc contient undérivé cyanogène (le linamaroside), qui se localise dans la variétédouce dans l’enveloppe et est facilement éliminé après épluchage etlavage. Dans la variété amère, il est présent dans tout le tubercule etn’est éliminé qu’après trempages et rinçages itératifs de la pulpedans l’eau. L’intoxication aiguë après ingestion de manioc amer setraduit par des troubles digestifs, voire un état de choc et parfois undécès. Plusieurs pathologies neurologiques ont été associées à laconsommation chronique de manioc amer, malgré sa détoxificationtelle qu’évoquée ci-dessus. Des troubles cognitifs ont été décrits, liésà une hypothyroïdie résultant d’une inhibition de la fixation del’iode sur la thyroïde par le thiocyanate. Les manifestations le plusfréquemment rapportées sont des neuropathies et des myélites, avecatteinte du nerf optique, et parfois d’autres nerfs crâniens. Lesneuropathies tropicales ataxiantes décrites au Nigeria associent à desdegrés divers une neuropathie sensitivomotrice, une myélopathie,une atrophie optique bilatérale [50]. Le konzo, décrit dans différentspays d’Afrique noire, comporte une paraparésie spastiqued’installation aiguë, associée à une atteinte optique [29, 74]. Plus de3 700 cas ont été rapportés, surtout en zones rurales. L’existence defoyers endémiques, voire épidémiques, a pu faire croire à une causeinfectieuse. Plus fréquent au Zaïre, le konzo a été décrit égalementen Tanzanie, au Sénégal, en Sierra Leone, au Mali, en Côte d’Ivoire,au Ghana, au Togo, en Ouganda, en Afrique du Sud et auMozambique [16, 26, 30, 53]. Quelques cas ont été observés en Inde [52].Plusieurs hypothèses étiologiques ont été discutées [15]. Si une originetoxique environnementale est vraisemblable, aucune certitude

n’existe quant au lien avec la consommation de manioc [20]. De plus,l’exposition à des dérivés cyanogènes provenant d’autres sourcesn’est pas associée à ce type de troubles [64]. La toxine candidate varieselon les auteurs. Pour certains, il s’agit du thiocyanate, pourd’autres, il s’agit du 2-iminothiazolidine-4-carboxylic acid, dont laneurotoxicité est avérée in vitro. Les patients victimes de ces troublesne bénéficient habituellement pas des examens morphologiques etneurophysiologiques qui permettraient d’authentifier les lésionsmédullaires et d’obtenir un diagnostic syndromique formel. Lekonzo et la neuropathie ataxiante sont considérés comme deuxformes de cassavisme. Il est vraisemblable que ce groupe hétérogènede troubles sensitivomoteurs où prédomine tantôt l’atteintepériphérique, tantôt l’atteinte médullaire, englobe en fait deuxsyndromes distincts : d’une part une neuropathie périphérique,peut-être d’origine carentielle, d’autre part une myélite avec atteinteoptique, proche des neuromyélites optiques et dont l’originepourrait être toxique.Ces neuromyélites sont très proches de celles décrites dans laCaraïbe.

NEUROMYÉLITES OPTIQUES TROPICALESDE LA CARAÏBE

Les neuromyélites optiques ont bénéficié récemment d’uneredéfinition de leur cadre diagnostique. Cette pathologie, rare auxÉtats-Unis et en Europe, semble avoir une prévalence plusimportante sur les îles de la Caraïbe. L’histoire clinique est marquéepar la survenue d’une paraplégie ou d’une tétraplégie rapidementspastique, chez une femme jeune, associée à des phénomènesdouloureux sévères, et une neuropathie optique souvent bilatéraleévoluant vers la cécité. Les patients, après plusieurs épisodesd’aggravation, le plus souvent par poussées, décèdent de détresserespiratoire lorsque les lésions médullaires atteignent la moellecervicale haute.Décrites dès 1897 par Strachan à la Jamaïque [69], les neuromyélitesoptiques caribéennes paraissent plus homogènes que cellesrapportées en Afrique. Les patients, qui sont habituellementd’origine africaine, développent d’abord des douleurslatérovertébrales, dorsales ou lombaires, puis des paresthésies desextrémités, une hyperpathie, des douleurs constrictives en ceinturede topographie abdominale ou thoracique. Une paraparésiespastique survient secondairement, dont l’évolution est variable.Une atteinte optique est fréquemment associée. En 1964,Montgomery rapporte dans les petites Antilles (îles de Trinidad,Barbade, Montserrat et Antigua) une série de 181 cas de myélitesaiguës, dont la sémiologie est très comparable [44]. L’étiologie restemystérieuse.La « pseudoépidémie » de neuropathies et neuromyélites de Cuba,au début des années 1990, est, elle, très hétérogène. Plus de 50 000personnes développent entre 1992 et 1993 une pathologieneurologique aiguë ou subaiguë [39], le plus souvent une neuropathieoptique (près de 70 % des cas), plus rarement une neuromyélite(24 % des cas), ce qui représente tout de même plus de 10 000 cas !Les études épidémiologiques menées par des médecins étrangerssuggèrent diverses hypothèses, mais la piste toxique est rapidementabandonnée au profit d’une étiologie carentielle [56, 57], qui émeutl’opinion internationale et permet à Cuba d’obtenir un aménagementdu blocus économique et l’envoi de suppléments vitaminiques dugroupe B par l’aide humanitaire internationale. Malgré cet apportvitaminique, il semble persister de nouveaux cas de neuromyélites àCuba.Dans les Antilles françaises, trois à quatre nouveaux cas deneuromyélite optique surviennent chaque année pour unepopulation respective de 380 000 et 420 000 habitants. Vernant et alont rapporté en 1997, huit cas de neuromyélite optique, associéeparfois à une endocrinopathie (galactorrhée, hypothyroïdie), etdémontré la sévérité de la maladie (6 décès sur 8), qui ne répondpas aux traitements immunosuppresseurs classiques [76]. Neuf autrescas ont été colligés ultérieurement. En Guadeloupe, dix observationsde neuromyélites optiques ont été recensées entre 1995 et 2000 [17],

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survenant chez des femmes jeunes, neuf fois sur dix, et consommantdes plantes médicinales de façon régulière. Un lien avec le SMON(subacute myelitis with optic neuritis) a été suggéré en raison d’unecommunauté sémiologique (myélites, syndrome algiqueprédominant) et d’un facteur causal proche. Le SMON, survenu surun mode épidémique au Japon à partir de 1964, associe une myélite,une neuropathie périphérique et une atteinte optique rétrobulbaire,dont l’intensité respective est variable [18, 59, 60]. Le SMON a étérattaché à la consommation (importante à cette époque au Japon) declioquinol, antiseptique intestinal. Le suivi épidémiologique apermis de confirmer cette hypothèse, puisque le SMON a disparuaprès l’arrêt de la commercialisation du clioquinol. Il fut rarementdécrit en dehors du Japon [55, 77], et exceptionnellement après laconsommation d’autres formes d’isoquinolines [58]. Le mécanismetoxique pourrait être la formation de complexes lipophiles, forméspar le clioquinol, chélateur de métaux lourds [71, 72]. Ces complexespourraient pénétrer les cellules gliales, et être à l’origine d’une lésioninflammatoire, primum movens de la maladie [48 , 75 ] . Desisoquinolines proches du clioquinol sont présentes dans des plantesmédicinales utilisées aux Antilles comme tisanes pour leurspossibles vertus purgatives et sédatives [ 3 1 ] . L’origineenvironnementale des neuromyélites a été évoquée récemment enAfrique du Sud [43].

« LYTICO-BODIG » DE L’ÎLE DE GUAM

Le « lytico-bodig » recouvre deux affections distinctes et qui n’ontaucun lien, en apparence, avec les maladies inflammatoires décritesci-dessus. Il fut essentiellement observé sur l’île de Guam, l’île laplus méridionale de l’archipel des Mariannes, situé à 5 000kilomètres à l’ouest d’Hawaii, et à 3 000 kilomètres au sud du Japon.Cette île fut conquise par les Espagnols au XVIe siècle, puis reprisepar les Américains au début du XXe siècle. Elle est essentiellementpeuplée d’Indiens Chamorros, d’origine indonésienne, mais depuis50 à 60 ans, les Philippins y représentent le deuxième groupeethnique. Ces derniers ne sont qu’exceptionnellement affectés par lamaladie. Dès le début du XIXe siècle (vers 1805), une affectionressemblant à la sclérose latérale amyotrophique (SLA) fut décritechez les Chamorros [34]. Sa prévalence a pu atteindre dans le sud del’île, 50 pour 100 000 habitants dans la population masculine. Pourune raison inconnue à ce jour, la commune d’Umatac (qui n’a jamaiscompté beaucoup plus de 2 000 habitants) fut l’épicentre de lamaladie. C’est là que la fréquence de la SLA fut jusqu’à 100 foissupérieure à celle de l’Europe. [80] Un syndrome parkinsonienatypique avec démence a été rapporté dans la même zone au coursde la Seconde Guerre mondiale par des médecins militairesaméricains. Néanmoins, il est vraisemblable qu’il fut contemporaindu syndrome SLA, mais qu’il suscita initialement moins d’intérêt.En effet, les certificats de décès, disponibles sur l’île depuis plus d’unsiècle, révèlent une cause très fréquente de décès : « la sénescence »au début du XXe siècle, y compris chez des sujets jeunes, ce quipourrait correspondre à une description banalisée du syndromeparkinsonien atypique avec démence, dans un environnement peumédicalisé. Ce complexe Parkinson-démence (PDC) est surnommé« bodig » par les Chamorros dont la langue s’apparente à l’espagnol.Le terme « bodig » semble avoir été attribué à un des patientsatteints, qui possédait un bar (ou « bodega »). Le syndrome SLA futsurnommé « lytico », toujours par les Chamorros. Le PDC comporteun syndrome parkinsonien doparésistant, associé à une démencesous-corticale. Le syndrome parkinsonien est habituellementsymétrique, avec une prédominance axiale de la rigidité. Il s’associeparfois à une attitude dystonique d’un membre ou du cou,indépendante de la Ldopa. Corollaire de la doparésistance, il n’existehabituellement pas de dyskinésies de milieu de dose. Letremblement est possible, mais inconstant. La durée d’évolution esttrès variable, de quelques années à plus de 20 ans. En find’évolution, les patients sont encore capables de comprendre lesordres simples, voire de communiquer, mais ont un syndromepseudobulbaire sévère. Le PDC est exceptionnellement associé à laforme SLA. Steele, qui fut en 1964 un des auteurs de la descriptionde l’ophtalmoplégie supranucléaire progressive ou PSP, a montré

depuis son arrivée sur l’île de Guam en 1983, qu’environ 30 % descas de PDC ont aussi une ophtalmoplégie supranucléaireprogressive, suggérant une forte ressemblance avec la PSP [3, 38, 65, 66,

67, 70]. Le « lytico-bodig » fut également observé dans l’île voisine deGuam : Rota. La forme SLA a presque disparu et la prévalence duPDC ne cesse de diminuer [24, 78]. Parallèlement à la disparition du« lytico-bodig », l’apparition de cas probables de maladie deParkinson depuis quelques années est un fait clinique intéressant ;sur la base d’un même patrimoine génétique de susceptibilité auxmaladies neurodégénératives, l’exposition à un facteurenvironnemental pourrait influencer de façon importante lephénotype le plus fréquent [14].De nombreux arguments plaident en faveur d’une cause toxiqueenvironnementale à Guam : le « lytico-bodig » disparaît [24, 37, 80], cequi n’est jamais le cas des maladies à déterminisme génétiqueprépondérant, dès lors que l’espérance de vie permet d’avoir unedescendance. Il ne survient jamais chez les Chamorros qui sont néset ont toujours vécu loin de Guam (comme en témoigne un groupeimportant, ayant émigré en Californie). Diverses hypothèsesenvironnementales ont été proposées, mais aucune ne futdémontrée : déficit en calcium et magnésium de l’eau courante,alimentation riche en aluminium, parasite à tropisme oculaire etneurologique. L’hypothèse qui rencontra l’adhésion plus durable estcelle de la toxicité d’un acide aminé potentiellement excitotoxique :la L-b-N-méthylamino-L-alanine (L-BMAA) [33, 35, 78]. Cet acide aminéest présent dans la farine des graines de cycas circinalis (espèceressemblant à un palmier, mais phylogénétiquement différente).Cette farine était consommée par les habitants de l’île de Guam,sous forme de galettes cuites. Cependant, l’administration deL-BMAA à l’animal ne produit pas les symptômes, ni les lésionsneuropathologiques observées chez l’homme [21, 40]. De plus, leL-BMAA, thermolabile, disparaît lors de la préparation des galettes.Plus tard, l’hypothèse de la toxicité de la cycasine, autre toxique dela graine, fut proposée [62, 63], mais n’obtint pas l’adhésion descliniciens et chercheurs travaillant sur l’île [66]. La cycasine a unetoxicité aiguë, systémique et non neurologique, bien connue desChamorros, et la préparation de la farine de cycas permet d’éliminerla cycasine. Pourquoi le « lytico-bodig » a-t-il principalement sévi àUmatac ? Aucune réponse ne fut apportée clairement. Umatac estun petit village, pauvre, longtemps isolé du reste de l’île, fauted’axes routiers. Cette zone, dans le sud de Guam, est aussi la zonela moins sèche de l’île. Il y coule plusieurs rivières. Entre 1968 et1983, une grande enquête épidémiologique fut réalisée. Elleapportait un maigre résultat : le « lytico-bodig » est fortement associéà un mode de vie traditionnel (consommation de viandes fumées,de poissons crus...), mais aucun lien précis n’était démontré [54]. Deuxautres foyers de PDC, d’importance confidentielle, ont été rapportésdans la péninsule de Kii au Japon et en Nouvelle-Guinée [78]. Ladescription d’un nouveau foyer de syndrome parkinsonien atypiqueressemblant au « lytico-bodig » dans les Petites Antilles relance lesinterrogations sur l’origine environnementale de ce type de maladieneurodégénérative [12]. Séparées par près de 20 000 kilomètres, cesdeux îles ont cependant en commun un climat tropical, et uneoccupation plus ou moins longue par les Espagnols, qui y ontintroduit de nombreuses plantes communes, originaires d’Amériquecentrale.

Description des principaux syndromesneurotoxiques

TOXICITÉ AIGUË

Des symptômes d’appel très divers peuvent faire rechercher unecause toxique, mais c’est souvent l’absence d’étiologie qui peutamener à une hypothèse toxique, après plusieurs jours d’explorationd’un syndrome neurologique lorsque, ni une anomalie métabolique,ni une anomalie morphologique n’a été identifiée. Il est alorssouvent trop tard pour détecter un toxique dans le sérum ou dansles urines. Il est donc utile de penser à collecter des urines dès

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l’admission d’un patient ayant un syndrome confusionnel d’origineindéterminée. En effet, les manifestations neurologiques les plusfréquentes des syndromes toxiques sont : confusion, hallucinations,convulsions et troubles sensitifs ou visuels. L’interrogatoire précis etrépété de l’entourage, voire du patient permettra parfois de préciserla suspicion clinique. D’autres tableaux cliniques sont classiques :neuropathie périphérique, syndrome associé à un dysfonc-tionnement aigu des canaux ioniques avec détresse respiratoire,syndrome myasthénique et myopathie. Les signes associés : troublesdigestifs inauguraux, signes cutanés, ou signes végétatifs pourrontparfois orienter vers une origine toxique. Par exemple, une diarrhéeassociée à une hypoesthésie et des dysesthésies péribuccales aprèsla consommation de poisson font penser à une ciguatera chez unpatient ayant une neuropathie sensitivomotrice aiguë [64].Un screening toxicologique large offre rarement la preuve de laprésence d’un toxique dans les liquides biologiques. De plus, il esttrès onéreux. Il n’existe pas de dosage précis pour la majorité dessubstances naturelles, mais des laboratoires expérimentés entoxicologie peuvent identifier une toxine nouvelle et fournir undosage semi-quantitatif, si toutefois la toxine a été isolée et sastructure caractérisée par spectrométrie de masse ou par imageriepar résonance magnétique (IRM) en deux dimensions. Le recours àces techniques doit être exceptionnel. Selon le contexte, il peut êtreutile de doser l’activité anticholinestérasique du sérum. Les examensmorphologiques en IRM ou scanner de l’encéphale n’apportenthabituellement pas d’indice étiologique, sauf dans les raresobservations de nécrose bilatérale des noyaux gris centraux, aprèspiqûre d’insecte [36].

TOXICITÉ CHRONIQUE

Il existe très peu de preuves de la toxicité différée, ou à long termede neurotoxines environnementales. Elle est suspectée dans deuxcirconstances :

– un foyer de maladies neurologiques a été détecté dans un espacegéographiquement restreint ;– une neurotoxine avérée est connue dans l’environnement.Les exemples les plus connus sont ceux décrits plus hauts :syndrome parkinsonien, myélite ou atteinte du motoneurone. Dansun contexte de recherche clinique, il est possible de rechercher letoxique dans les phanères, mais seules les molécules de petite tailles’y fixent. Les cheveux, dans la région occipitale, peuvent être letémoin d’une exposition à un toxique durant les 6 mois quiprécèdent. Les poils pubiens qui se renouvellent plus lentementpeuvent refléter une exposition à une toxine durant les 12 à 24 moisqui précèdent le prélèvement. La technique est identique à celleréalisée pour la recherche de cocaïne ou de crack dans un contextemédico-légal.

Données épidémiologiquessur les intoxications par les plantesEn France, les principales sources d’information sur les intoxicationspar les plantes sont les centres antipoisons. Près de 5 % des appels ysont relatifs à des intoxications par les plantes. La moitié de cesappels concernent des baies et fruits bacciformes et l’ingestion estsurvenue chez des enfants de moins de 3 ans [42]. Ces chiffres sontvariables selon les pays, mais les intoxications par les plantesreprésentent habituellement 5 à 10 % des cas enregistrés par lescentres antipoisons d’Europe, sauf en Espagne où les intoxicationspar les plantes seraient très rares.Cependant, ces intoxications ont exceptionnellement desconséquences graves. Sur 598 décès par empoisonnement d’enfantsrecensés en 20 ans en Angleterre, deux seulement étaient liés auxplantes. [23]

Recherche d’imputabilitéCinq critères ont été définis pour établir l’origine toxique d’unsyndrome neurologique [64].

– La présence du toxique est confirmée par l’anamnèse, et/ou parsa mise en évidence par l’analyse chimique de tissus biologiques oude l’environnement.

– La date de début des troubles est corrélée à la période d’expositionau toxique et la sévérité des symptômes à l’intensité de l’exposition.

– Les troubles sont régressifs lorsque l’exposition au toxique estinterrompue.

– D’autres cas similaires ont été rapportés et le lien avec le toxiquedéjà évoqué.

– L’existence d’un modèle animal et/ou cellulaire de toxicitéapporte seule la certitude du lien entre le toxique et lesmanifestations cliniques.Cependant, la relation dose-effet n’est pas toujours patente, et peutêtre modulée par des facteurs endogènes : âge, sexe, poids,conditions prémorbides, en particulier pathologies rénales ouhépatiques. Par exemple, les troubles sensitifs de la ciguaterapeuvent persister plusieurs mois ou années après l’intoxicationinitiale, voire être réactivés. Une intoxication peut être responsabled’une affection asymptomatique, telle qu’une paraparésie trèsdiscrète, observée chez des fermiers indiens, exposés aux toxines dulathyrisme. Une interaction avec une seconde toxine ou une carencealimentaire peut aussi modifier l’expression clinique. Différentssyndromes cliniques peuvent résulter de l’exposition à une seule etmême neurotoxine. Enfin, la structure chimique n’est pas toujoursprédictive d’un effet neurotoxique.

Phytothérapie, médecinestraditionnelles et risque neurotoxiqueà travers le monde

La médecine par les plantes ou phytothérapie est une pratiqueancestrale. Au cours des trois dernières décennies, en dépit d’unexceptionnel enrichissement de la pharmacopée chimique classique,de nombreux extraits de plantes nouvelles ou déjà connues sontarrivés sur les étalages des pharmacies et des supermarchés,parallèlement à l’engouement des pays occidentaux pour lesmédecines dites naturelles. Cependant, les herboristes ont peu à peudisparu en France, et il n’existe plus de diplôme d’herboristeofficiellement reconnu dans notre pays. Que les plantes soientcommercialisées par une officine d’herboriste ou de pharmacien, onpeut regretter que la commercialisation des spécialités contenant desplantes ne soit pas conditionnée à une évaluation scientifique deseffets thérapeutiques et du risque iatrogène aussi rigoureuse quepour les substances de synthèse, et à un dossier d’autorisation demise sur le marché aussi exigeant. Dans les pays pauvres, enparticulier en Afrique noire et en Haïti, l’accès aux médicamentsfabriqués par les pays industrialisés est très limité. Le recours à lamédecine traditionnelle par les plantes est logiquement préconisé.L’usage des plantes est transmis par la tradition orale, dans les zonesrurales et pauvres. Cet usage fait l’objet d’un recensementminutieux [32, 46]. Les modalités d’emploi des plantes, leursindications thérapeutiques sont décrites avec précision. Cependant,aucune évaluation scientifique de la toxicité à long terme, ni de laréelle efficacité (étude randomisée, double aveugle...) n’a pu êtremenée à ce jour.Dans les Antilles françaises, la médecine traditionnelle reste trèsprésente [2, 31, 73]. La connaissance des plantes médicinales estvéhiculée par la culture et la langue créole, mais aussi par desouvrages de synthèse de plus en plus nombreux. Ces ouvrages sontécrits par les membres du groupe TRAMIL qui regroupent lesspécialistes de pharmacognosie (science de l’identification desplantes et de leur composition chimique) et de phytothérapie de l’arcantillais (îles sous influence anglaise, espagnole ou française) [2, 31, 73].Il existe cependant quelques différences d’utilisation entre les îles :une même plante peut avoir une indication traditionnelle totalementdifférente d’une île à l’autre. La plante la plus utilisée pour soigner

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un symptôme fréquent (troubles digestifs, troubles du sommeil) peutvarier d’une île à l’autre. Le groupe TRAMIL, sur la base d’étudessommaires de toxicité animale, ou d’efficacité thérapeutique, enparticulier antiparasitaire, a tenté de séparer les plantes tropicalesen trois groupes : celles qui ont un intérêt thérapeutique, celles quisont toxiques, et celles sur lesquelles les connaissances sontinsuffisantes. Ce travail préliminaire est cependant long etambitieux, en raison de la grande richesse de la flore tropicale. Parexemple, l’étude de la flore de Guadeloupe (dont le territoire est300 fois plus petit que celui de la France métropolitaine) a permis dedénombrer un nombre total d’espèces végétales équivalent à celuide l’hexagone.Au Japon, et plus encore en Chine, la consommation de plantesmédicinales est importante et les pharmacies japonaises proposentde nombreuses spécialités de phytothérapie, dans des cataloguespréconisant l’utilisation de plusieurs dizaines de plantes médicinalesspécifiques, souvent en association.

Inventaire des substancesneurotoxiques issues de plantes– L’absinthe : la toxicité de l’huile essentielle d’Artemisiaabsinthium est liée à la thyone. Elle semble avoir un effetconvulsivant, et favoriser la survenue d’une encéphalopathie.Commercialisée par Henri Louis Pernod, elle fut interdite à partirde 1915 [7, 8]. D’autres plantes contiennent de la thyone : thuya,tanaisie, sauge officinale. D’autres huiles essentielles pourraientavoir un effet toxique comparable, par exemple le pinocamphomeissu de l’hysope.

– Les acétogénines sont des dérivés aliphatiques, apparentés auxlipides. Ils sont essentiellement produits par des arbres tropicaux :les annonaceae. Ce sont de puissants inhibiteurs du complexe I dela chaîne respiratoire mitochondriale, comme le MPTP. Ils ont uneffet cytotoxique documenté sur différents types de culturecellulaire [1, 7, 8]. Leur toxicité, ou cotoxicité est évoquée dans lessyndromes parkinsoniens atypiques anormalement fréquents enGuadeloupe. [13]

– L’aconitine, alcaloïde issu des aconits, a pu être utilisée parméprise botanique ou surdosage dans le cadre d’une utilisationphytothérapeutique. Elle est responsable de troubles sensitifs, etd’un syndrome myasthénique. L’intoxication peut être mortelle. Lesaconits sont employés pour la fabrication des poisons de flèches.

– Les alcaloïdes des fabales : parmi les 17 000 espèces de fabales,certaines sont cosmopolites, d’autres sont tropicales. Les alcaloïdeset autres substances apparentées synthétisés par ces plantes sont trèsdivers. Les plantes les plus toxiques sont :

– la jéquirity (responsable de confusion, coma avec mydriase) [8],

– le crotalaria [6], utilisé comme plante médicinale dans toute lazone Caraïbe, il induit une encéphalopathie hépatique parsyndrome de Budd-Chiari, souvent mortelle chez l’enfant,

– la cytise dont les effets sont de type nicotinique, avec rarementun syndrome délirant,

– les lupins dont la toxicité aiguë est de type anticholinergique,et dont la toxicité chronique pourrait se manifester par unsyndrome SLA et une dystonie [8].

– Les alcaloïdes des solanaceae : ces alcaloïdes de type tropaniquesont les anticholinergiques de référence. Les plus connus sont labelladone, la stramoine ou datura et la jusquiame noire. Utilisésdans l’industrie pour la fabrication de l’atropine et de lascopolamine, ils étaient déjà employés au Moyen-Âge, dans lespratiques de sorcellerie, et provoquaient des scènes de lévitation etd’hallucinations collectives. Le datura, qui est une plante communedes pays tempérés et tropicaux, est parfois l’arme d’homicidesvolontaires, si elle est administrée à fortes doses.– L’amanite muscaria, ou amanite tue-mouches, parfois cultivée, esthallucinogène et peut induire des crises convulsives et desmyoclonies. Une des substances toxiques est l’acide iboténique.

– L’anisatine, issue du badianier du Japon, utilisée comme plantemédicinale en Asie et en Amérique peut induire des convulsions,par effet antagoniste de l’acide gamma-aminobutyrique (GABA). Laconfusion avec l’anis étoilé est à l’origine d’intoxications récenteschez l’enfant.

– La bicuculline, qui est une phtalyltétrahydro-isoquinoléine, estconvulsivante. Elle est présente dans les fumaraceae. Inhibitrice duGABA, elle est utilisée dans plusieurs modèles animaux de lésionsfocales réversibles, en particulier au niveau des noyaux griscentraux.

– Le cannabis (cannabaceae) dont le principe actif est le cannabinol,est connu pour ses propriétés psychoactives, amnésiantes ethallucinogènes à fortes doses. Il pourrait prévenir l’effet émétiquedes chimiothérapies anticancéreuses, mais la dépendance qu’il induitest peu compatible avec un usage thérapeutique.

– La ciguë vireuse (apiaceae) plante aquatique des zones humides,contient dans ses racines, la cicutoxine, responsable d’un état de malconvulsif, parfois mortel. L’intoxication n’est pas rare : elle est due àune confusion avec les racines de ginseng. Dans la même famille,l’oenanthe safranée produit les mêmes symptômes. La grande ciguëqui contient essentiellement la coniine, bloque la transmissionneuromusculaire. Une intoxication par la grande ciguë auraitprovoqué la mort de Socrate.

– La cocaïne, issue des feuilles de coca, agit en bloquant la recapturede la dopamine, de la norépinephrine et de la sérotonine. Elle estresponsable d’encéphalopathies aiguës, de crises convulsives,d’accidents vasculaires cérébraux ischémiques ou hémorragiques etd’un syndrome de dépendance.

– La coriamyrtine, issue du redoul (coriaria myrtifolia, arbrisseaupoussant dans le sud de la France) peut induire des convulsions, uncoma avec myosis.

– Les curares naturels ont des structures très différentes en fonctiondes familles qui les produisent : ce sont des bisbenzylisoquinoléinesdans la famille des menispermaceae, des benzyltétra-isoquinoléinestétracycliques dans les erythrina (très toxiques), et des alcaloïdes bis-indoliniques dans les loganiaceae. Ce sont des poisons de guerrefréquemment utilisés en Amérique du Sud.

– La digitale qui borde les chemins de campagne en été, contient ladigitaline, isolée par Nativelle en 1868 [ 7 ] . Si ses effetsbradycardisants et inotropes positifs sont bien connus, l’intoxicationcomporte aussi des signes neurologiques : troubles de la vision descouleurs, encéphalopathie aiguë avec convulsion, atteinte dutrijumeau.

– Les ergolines : l’ergot du seigle (claviceps purpurea), champignonsaprophyte de la céréale, fut responsable des épidémies d’ergotisme,ou « feu sacré », décrites dès l’an mil en Europe, et jusqu’au débutdu XXe siècle en Russie. Le lien avec la consommation de pain deseigle parasité ne fut démontré qu’à la fin du XVIIe. L’ergotisme semanifestait sous deux formes : une gangrène sèche des extrémitésou une confusion mentale avec délire et convulsions appelé « maldes ardents ».

– Les euphorbes : de nombreuses variétés contiennent un latexayant un effet irritant pour la peau et les muqueuses, et purgatif.Exceptionnellement, chez l’enfant, l’ingénol, substance toxique dece latex peut provoquer des convulsions. Certaines euphorbes sontutilisées dans la médecine traditionnelle antillaise.

– Les hypoglycines sont produites par les ackees dont les fruits nonmûrs entraînent des convulsions et un coma. Le ackee ou blighiasapida fut importé d’Afrique par Bligh, le capitaine du Bounty [8].La toxicité est liée à une inhibition de la voie énergétiquemitochondriale.

– Les isoquinolines : suspectée depuis plus de 20 ans, l’hypothèsede la toxicité des benzyltétrahydro-isoquinolines (Be-TIQ) estévoquée en Guadeloupe où une fréquence anormalement élevée desyndromes parkinsoniens doparésistants a été mise en évidence.Cette affection ressemble au syndrome de l’île de Guam. Dans ces

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deux maladies, des dépôts de protéine tau constituent les principaleslésions cérébrales [3, 14]. En Guadeloupe, les patients atteintsconsomment régulièrement des tisanes et des fruits d’annonaceae(corossol, pomme-cannelle, cachiman) [12]. Le suivi des patientspendant 3 à 6 ans a révélé une amélioration ou une stabilisation dusyndrome parkinsonien chez les plus jeunes d’entre eux, après l’arrêtde la consommation de ces plantes. Les tisanes réalisées avec lesfeuilles des annonacées sont utilisées en médecine traditionnellecomme purgatifs, hypnotiques ou encore aphrodisiaques, dans denombreuses régions tropicales et subtropicales, y compris sur l’îlede Guam [27, 28, 31]. Feuilles et fruits contiennent des alcaloïdes de typeBe-TIQ (concentration inférieure ou égale à 0,5 %) [27, 28]. Les Be-TIQde synthèse ont une toxicité spécifique pour les neuronesdopaminergiques in vitro et chez l’animal [45, 47, 49, 51], et une affinitéspécifique pour les récepteurs dopaminergiques, inhibant larecapture de la dopamine [9, 49]. Les alcaloïdes totaux et quelquesfractions purifiées, extraits des annonacées de la Guadeloupe, ettestés sur des cultures de cellules dopaminergiquesmésencéphaliques de rat se sont révélés cytotoxiques, et capablesd’inhiber la recapture de la dopamine [35]. L’alcaloïde le plus toxiqueest un dérivé des Be-TIQ : une tétrahydro-protoberberine (THPB),dont seule l’affinité pour les récepteurs dopaminergiques étaitconnue, et non la neurotoxicité.– Le khat, arbuste commun d’Afrique de l’Est et du Yemen, contientun analogue de la D-amphétamine, la cathinone, anorexigène etmydriatique, qui crée une dépendance psychologique.– La mescaline, issue d’un cactus d’Amérique centrale (le peyotl)est une phénéthylamine hallucinogène dont les effets cliniques sontproches du LSD. Elle peut aussi provoquer une encéphalopathiehypertensive et des hémorragies intracrâniennes.– Les morphinanes : ces alcaloïdes sont spécifiques despapaveraceae. Leur précurseur est la réticuline [41], présente dansd’autres plantes, telles que les annonaceae. La plante la plus connuedans la famille des papaveraceae est le pavot, utilisée depuis plusde 4 000 ans. Le latex du pavot est l’opium qui contientessentiellement la morphine, la codéine, la narcotine et la thébaïne.Les effets centraux sont dominés par une analgésie, une dépressionrespiratoire, un myosis et un syndrome de dépendance.– La nicotine, alcaloïde des feuilles de tabac, peut être responsableen cas d’intoxication aiguë chez l’enfant de crises convulsives, d’unsyndrome confusionnel et d’un coma. Chez l’adulte, l’intoxicationchronique est anorexigène et entraîne un syndrome de dépendance.– Les patates douces : les graines de certaines variétés de patatesdouce (ipomoea) contiennent des alcaloïdes hallucinogènes.– Piper methysticum, ou kava poivrier des îles de la Polynésie ades effets sédatifs et antalgiques, liés aux styrylpyrones qu’ilcontient.– Les protoberbérines : dérivées des tétrahydro-isoquinolines, sontprésentes dans plusieurs plantes médicinales : l’hydrastis, très utiliséen Amérique du Nord (golden seal), le fumeterre, la chélidoine, lasanguinaire, le pavot de Californie, les annonacées et diversesplantes chinoises. Elles sont inhibitrices dopaminergiques. Leurtoxicité cellulaire a été démontrée récemment. [35] Chez l’homme,elles pourraient avoir une toxicité à long terme.– Les pyréthrines naturelles sont des insecticides et desantiphtiriasiques connues depuis l’antiquité. Elles sont produites pardifférentes plantes : l’artemisia, la lavande, le pyrèthre de Dalmatie...Elles sont de plus en plus utilisées. L’intoxication aiguë se manifestepar une asthénie, des troubles de la conscience et des convulsions.– La quinine, alcaloïde de l’écorce de quinquina peut provoquer uneencéphalopathie aiguë avec crises convulsives et coma. Elle est parailleurs ototoxique et induit une rétinopathie en cas d’utilisationprolongée à doses thérapeutiques.– La ricine serait le poison des parapluies bulgares (des espions del’Europe de l’Est), qui ont défrayé la chronique dans les années 1970.Elle est contenue dans l’écorce des graines de ricin, mais pas dansl’huile de ricin. L’ingestion de quelques graines peut être mortelle(hépatite fulminante, coma, déshydratation).

– La réserpine est un alcaloïde de la rauwolfia (sarpangandha del’Inde). Cette plante fut utilisée par la médecine ayurvédique,médecine indienne traditionnelle, pour soigner l’épilepsie. Laréserpine fut très prescrite dans les années 1950, pour ses effetsantihypertenseurs et neuroleptiques. Le corollaire est l’inductiond’un syndrome parkinsonien et de dyskinésies orofaciales.

– Les rhododendrons (ericaceae) contiennent des grayanotoxines(diterpènes tétracycliques), qui bloquent la transmissionneuromusculaire, entraînant une paralysie extensive.

– La roténone, insecticide naturel, est produit par des fabales derégions tropicales. C’est un puissant ichtyotoxique, utilisé par lesIndiens d’Amazonie pour pêcher dans les rivières à petit débit. Elleest produite par des lianes (derris), par des plantes tropicalescommunes et par des plantes asiatiques utilisées dans lapharmacopée chinoise. La roténone est un inhibiteur du complexe Ide la chaîne respiratoire mitochondriale. L’intoxication subaiguëchez l’animal peut se manifester par un syndrome parkinsonien [4].La toxicité à long terme chez l’homme n’est pas connue.

– La solanine, alcaloïde des morelles (plante herbacée) peutproduire des hallucinations et des convulsions.

– La strychnine est un alcaloïde du vomiquier (strychnos nux-vomica). La dose mortelle chez l’homme est de 0,2 mg /kg.L’intoxication ressemble au tétanos, avec des spasmes musculaires,des crises convulsives et une détresse respiratoire.Enfin, pour d’autres plantes, une neurotoxicité a été démontréeuniquement chez l’animal (se référer à l’ouvrage de Bruneton),l’homme n’étant pas exposé à ces toxiques.

Intoxication par des venins

Les agatoxines, synthétisées par une araignée (Agelenopsis) ont uneffet insecticide paralysant, bloquant l’activité des canaux ioniques,il en est de même des latrotoxines.Les piqûres d’hyménoptères peuvent produire des syndromesneurologiques divers, par toxicité directe (apamine) ou par réactionanaphylactique. Elles peuvent être responsables d’uneencéphalopathie avec nécrose putaminopallidale [36].Certaines espèces de tiques ont une salive venimeuse, bloquant latransmission neuromusculaire.Des grenouilles de Colombie ou de Nouvelle-Guinée synthétisentde puissantes neurotoxines : la batrachotoxine, inhibiteur des canauxioniques, les histrionicotoxines, inhibiteur des récepteursnicotiniques. Certains concombres de mer dans les eaux tropicales,sécrètent les holothurines et les holotoxines, inhibant la transmissionneuromusculaire. Des escargots de mer (Philippines) synthétisent lesconotoxines.Une espèce d’abeille (apis mellifera) et de guêpe (philantustriangulum) sécrètent la delta-philanthotoxine, inhibant les canauxcalciques et antagoniste glutamatergique.Différents serpents synthétisent des neurotoxines : la ceruleotoxine,la nereistoxine, la crotoxine, la dendrotoxine, les fasciculines, lapelamitoxine, la taicotoxine.Les neurotoxines des scorpions sont les charybdotoxines,l’iberiotoxine, la kaliotoxine, la leiurotoxine, la margatoxine, lanoxiustoxine [64].

Intoxication par des poissons

La ciguatera est due à la ciguatoxine synthétisée par une alguemicroscopique : Gambierdiscus toxicus, endémique dans les merschaudes. Dans les zones d’endémie, les poissons consommentl’algue et le toxique est stocké dans le tube digestif. Laconsommation du poisson par l’homme produit dans tous les casune gastroentérite durant 24-48 heures. Dans 60 % des cas, 6 à12 heures après le repas surviennent des paresthésies distales et

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périorales, une grande asthénie, une neuropathie sensitivomotriceaiguë où prédominent le déficit sensitif et les dysesthésies et dessignes dysautonomiques avec hypotension orthostatique. Cettepolyneuropathie aiguë est le plus souvent bénigne et ne nécessitejamais une ventilation assistée. Cependant, des séquellesdouloureuses, avec paresthésies et une réactivation desmanifestations neurologiques lors de la consommation de poissons(y compris non contaminés) est possible. Les barracudas et lesmurènes sont des espèces souvent responsables de la ciguatera, maisd’autres peuvent l’être aussi. D’autres algues, moins connues,contiennent des toxines plus ou moins puissantes : la clupeotoxine(algue des côtes de Madagascar) est souvent mortelle, la charatoxine(antagoniste cholinergique), la saxitoxine, l’acide domoïque, et laneurotoxic shellfish. La tetrodotoxine, puissant poison stocké dans lesgonades, le foie, la peau ou les œufs de divers poissons japonais,plus rarement tropicaux, est mortelle dans 50 % des cas.

L’intoxication se manifeste par une neuropathie aiguë, desconvulsions et une dépression respiratoire. Il n’existe pas d’antidote.

Conclusion

Cet inventaire des plantes neurotoxiques et des principaux veninsdémontre que des neurotoxines naturelles peuvent avoir des effetspharmacologiques aussi puissants et spécifiques que des droguessynthétiques. La pharmacognosie est une science qui offre un largepotentiel d’avenir et d’espoir thérapeutiques [7, 79]. Cependant,démontrer une origine environnementale et le mécanisme toxiquecausal est souvent une gageure, et peut ne jamais aboutir complètementdans l’analyse de certains foyers de maladies chroniques. Laneurotoxicologie analytique des substances naturelles, actuellement peudéveloppée, pourrait apporter un éclairage utile à l’étude de cesaffections.

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