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MÉMOIRE COMMISSION SUR LES ENJEUX ÉNERGÉTIQUES DU QUÉBEC
DÉPOSÉ PAR KRUGER ÉNERGIE INC.
LE 11 OCTOBRE 2013
2 | Mémoire sur les enjeux énergétiques du Québec | 11 octobre 2013
TABLE DES MATIÈRES
1. INTRODUCTION ........................................................................................................... 3
2. LES SURPLUS D’ÉLECTRICITÉ ................................................................................. 5 2.1 L’ampleur des surplus ........................................................................................ 5 2.2 Les surplus comme opportunités ........................................................................ 8
3. LA PRODUCTION D’ÉNERGIE RENOUVELABLE ................................................... 10
3.1 Diversifier les sources de production ................................................................ 11 3.2 La production hydroélectrique .......................................................................... 13 3.3 Diversifier les modèles d’affaires ...................................................................... 14
4. LE DÉVELOPPEMENT D’UNE EXPERTISE QUÉBÉCOISE .................................... 16
5. L’ACCEPTABILITÉ SOCIALE AU COEUR DU
DÉVELOPPEMENT ÉNERGÉTIQUE ......................................................................... 17
6. CONCLUSION ............................................................................................................ 19
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1. INTRODUCTION
Kruger Énergie est une unité d'affaires de la société Kruger inc. Elle se spécialise dans le
développement et la gestion de centrales d’énergie verte et renouvelable. Kruger Énergie et
Kruger inc. ont à leur actif 35 sites de production totalisant une puissance installée de 523 MW,
ce qui inclut des installations hydroélectriques, éoliennes, de cogénération à la biomasse et de
production d’électricité à partir de biogaz. Ces installations sont situées au Québec, en Ontario,
à Terre-Neuve-et-Labrador, ainsi qu'aux États-Unis. Elles emploient une centaine de personnes
dont près de cinquante au siège social de Montréal et dans les installations du Québec.
La mission de l’entreprise se déploie selon trois axes :
• se consacrer au développement énergétique par l'utilisation optimale et
respectueuse des ressources naturelles;
• développer des projets d'énergie renouvelable, principalement d'hydroélectricité,
d'énergie éolienne, de cogénération à la biomasse et de valorisation des biogaz,
entraînant une réduction des émissions de gaz à effet de serre;
• assurer une diversification géographique ainsi qu'une diversification des
méthodes de production d'énergie.
Kruger Énergie accomplit sa mission dans un esprit de bon voisinage, en harmonie avec les
objectifs de vie des collectivités et dans le respect de l'environnement.
Kruger Énergie est affiliée à la société Kruger inc. qui est basée à Montréal depuis sa fondation
en 1904. La société Kruger œuvre dans sept secteurs d’activités. En plus de ses secteurs
traditionnels, soit les pâtes et papiers, les produits forestiers et les cartons et emballages,
Kruger œuvre dans des domaines aussi diversifiés que l’énergie renouvelable, les vins et
spiritueux, les produits de papier domestiques et institutionnels et le recyclage.
4 | Mémoire sur les enjeux énergétiques du Québec | 11 octobre 2013
Ses établissements sont situés au Québec, en Ontario, en Colombie-Britannique, à Terre-
Neuve-et-Labrador et aux États-Unis. Au Québec seulement, elle compte plus de 21
établissements qui ont un impact important sur l’économie de plusieurs régions.
Dans le cadre des consultations devant mener à l’élaboration de la prochaine politique
énergétique du Québec, Kruger Énergie est heureuse de présenter quelques éléments de
réflexion à la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec.
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2. LES SURPLUS D’ÉLECTRICITÉ
2.1 L’ampleur des surplus
Dans une société qui a privilégié l’hydroélectricité comme vecteur de développement dans le
passé, il n’est pas étonnant que des surplus apparaissent à l’occasion, compte tenu de
l’importance de la consommation électrique au Québec. Ainsi, dans l’État d’avancement 2012
du Plan d’approvisionnement 2011-2020 déposé à la Régie de l’énergie1, Hydro-Québec
Distribution fait état de surplus qui représentent 20 TWh pour la période 2014-2020 (voir
Tableau 1 ci-après, à la ligne intitulée « AAR » pour les années 2014 à 2020).
Ces surplus découlent du ralentissement de l’économie observé depuis quelques années,
notamment la restructuration du secteur des pâtes et papiers où l’on a observé la fermeture de
plusieurs usines durant cette période.
Se basant sur ces résultats, plusieurs intervenants en ont profité pour exiger la suspension du
développement éolien au Québec. C’est pourquoi il est important de remettre ces quantités en
perspective.
Selon l’État d’avancement, les besoins du Québec sur la même période sont de 1352 TWh (voir
Tableau 1 ci-après, à la ligne intitulée « Besoins visés par le Plan » pour les années 2014 à
2020). Un surplus de 20 TWh correspond donc à moins de 1,5 % des besoins estimés sur la
période. Or, le Québec a choisi dès le début des années 60 d’accorder à l’électricité une place
prépondérante dans son bilan énergétique. Il est donc normal que les cycles économiques
causent des fluctuations importantes dans les besoins d’électricité et, en conséquence, dans
l’équilibre offre-demande.
1 http://www.regie-energie.qc.ca/audiences/Suivis/SuiviD-2011-162_PlanAppro_2011-2020/HQD_EtatAvancement_01nov2012.pdf, page 22
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TABLEAU 1
BILAN EN ÉNERGIE APRÈS REDÉPLOIEMENT DES MOYENS DE GESTION (EN TWh)
2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
Besoins visés par le Plan 181,8 186,2 187,7 188,7 192,3 193,0 194,7 196,5 199,2
- Volume d'électricité patrimoniale 178,9 178,9 178,9 178,9 178,9 178,9 178,9 178,9 178,9
= AAR au-delà du patrimonial 2,9 7,3 8,9 9,9 13,4 14,1 15,8 17,7 20,3
- Appro. non patrimoniaux 7,3 11,5 13,9 15,5 16,2 17,0 18,0 18,9 20,5
▪ TransCanada Energy - - - - - - 0,7 0,7 0,7 ▪ HQP - Base et cyclable 3,9 4,4 4,3 4,2 2,6 2,6 2,8 3,2 3,9
▪ Cyclab le 0,1 0,6 0,5 0,5 0,7 0,7 0,8 0,9 1,2
▪ Base 3,1 3,1 3,1 3,1 3,1 3,1 3,1 3,1 3,1
▪ Énergie différée - - - - (2,1) (2,1) (2,0) (1,8) (1,7)
▪ Énergie rappelée 0,7 0,8 0,7 0,6 0,9 0,9 1,0 1,1 1,3 ▪ Autres contrats de long terme 3,3 6,3 9,0 10,8 12,8 13,2 13,2 13,2 13,2▪ Éolien I : 1 000 MW 2,2 2,5 2,6 2,6 2,6 2,6 2,6 2,6 2,6 ▪ Éolien II : 2000 MW 0,5 2,5 4,3 5,2 6,2 6,1 6,1 6,1 6,2
▪ Éolien III : 500 MW - 0,0 0,2 0,6 0,9 0,9 0,9 0,9 0,9
▪ Biomasse (Kruger et Tembec) 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2
▪ Biomasse II : 125 MW 0,1 0,4 0,4 0,4 0,4 0,4 0,4 0,4 0,4
▪ Biomasse III : 300 MW 0,2 0,4 0,7 1,1 1,8 2,3 2,3 2,3 2,3
▪ Petite hydraulique : 150 MW 0,1 0,2 0,6 0,7 0,7 0,7 0,7 0,7 0,7 ▪ Achats de court terme 0,2 0,7 0,6 0,5 0,9 1,3 1,3 1,9 2,7
= AAR (surplus) (4,4) (4,1) (5,1) (5,6) (2,8) (2,9) (2,2) (1,3) (0,1)
SOURCE: État d’avancement 2012 du Plan d’approvisionnement 2011-2020, Hydro-Québec Distribution
Par ailleurs, si on se réfère au bilan des apports hydrauliques d’Hydro-Québec, tel que rapporté
dans le Plan stratégique 2009-2013 d’Hydro-Québec2, l’écart-type des apports relativement à la
moyenne de la période 1943-2008 est de 20 TWh (voir figure 1). Sur cette période, on a
observé plusieurs années consécutives où les apports annuels ont été inférieurs de plus de
30 TWh par rapport à la moyenne.
Un surplus de 20 TWh sur une période de sept années (2014-2020) ne correspond même pas à
une année de faible hydraulicité au Québec.
2 http://www.hydroquebec.com/publications/fr/plan_strategique/pdf/plan-strategique-2009-2013.pdf, page 12
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FIGURE 1 SOURCE : HYDRO-QUÉBEC, PLAN STRATÉGIQUE 2009-2013
À cause de l’importance du secteur électrique dans le bilan énergétique du Québec, il est très
difficile sinon impossible de prévoir la demande de façon exacte. Il est donc inévitable que nous
ayons à vivre dans une situation de surplus, l’alternative étant de devoir affronter des situations
de déficit énergétique lorsque la demande aurait été sous-estimée, par exemple lors d’une
période de reprise économique.
Une telle situation a failli se produire au début des années 2000, quand l’équilibre offre-
demande est devenu si précaire qu’Hydro-Québec Distribution a dû demander un traitement
accéléré pour lancer un appel d’offres afin de faire face à des besoins qui augmentaient plus
rapidement que prévu3.
3 http://www.regie-energie.qc.ca/audiences/3470-01/Requete3470/Requete3470_25oct01.pdf, page 8
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Cette situation a conduit à l’ajout d’une centrale alimentée au gaz naturel à Bécancour parce
que ce type de centrale pouvait être mis en place rapidement. En comparaison, le processus
d’approvisionnement dans le cas de l’éolien a été plus long par le passé pour permettre la prise
de mesures de vent fiables et, surtout, pour maximiser le contenu québécois des éoliennes à
construire, de façon à développer une industrie de fabrication au Québec.
2.2 Les surplus comme opportunités
Par ailleurs, la présence de surplus ouvre des possibilités de restructurer des pans importants
de l’économie québécoise. C’est ce qui s’est produit dans les années 80 lors de la mise en
service des centrales de la Baie James. Les importants surplus qu’a connus le Québec à
l’époque ont été utilisés pour déplacer le mazout au profit de l’électricité dans le chauffage
résidentiel notamment.
Ce changement a eu une influence durable sur les habitudes des Québécois, à un point tel que
la popularité du chauffage électrique ne s’est jamais démentie par la suite.
C’est également à cette période qu’ont été développées les interconnexions avec les états
américains, ce qui s’est avéré une source importante d’enrichissement collectif, tout en assurant
dans ces états un remplacement des combustibles fossiles utilisés pour la production
d’électricité par la fourniture d’électricité renouvelable en provenance du Québec.
Nos choix collectifs passés (pénétration accrue de l’électricité dans le bilan énergétique et
prédominance de l’énergie renouvelable, exigences de retombées économiques des projets de
nouvelle production) nous placent donc dans une situation où des surplus sont inévitables si on
veut éviter les déficits associés à la variabilité de nos sources renouvelables de production.
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De plus, compte tenu des délais requis pour développer des projets de production d’électricité,
surtout si on veut mettre en place des processus sérieux de concertation avec les populations
affectées, et compte tenu de la volonté du gouvernement de maximiser les retombées
économiques des activités de développement de projets, il n’est pas souhaitable d’interrompre
brutalement tout développement lorsque l’équilibre énergétique est atteint et que des surplus
apparaissent. Il faut plutôt trouver le moyen d’utiliser ces surplus pour provoquer ou accélérer
des changements structurels au bénéfice de la société.
RECOMMANDATIONS
Le gouvernement du Québec devrait profiter de la marge de manœuvre offerte par les surplus conjoncturels d’électricité, d’une part comme d’un outil de développement économique et, d’autre part, comme moyen de modifier les habitudes des Québécois.
Il devrait accélérer l’électrification du secteur des transports, notamment dans les transports en commun et par la mise en place de mesures favorisant le déploiement du véhicule électrique.
Il devrait encourager la venue d’entreprises en quête de tarifs d’électricité stables, telles que les centres d’hébergement de données qui sont associés à la création d’emplois liés à la société du savoir.
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3. LA PRODUCTION D’ÉNERGIE RENOUVELABLE
Depuis le début des années 2000, par le biais des appels d’offres d’Hydro-Québec Distribution,
le gouvernement du Québec a favorisé l’éclosion d’une capacité manufacturière structurante
dans la région désignée de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine et de la MRC de Matane, une
région qui était durement frappée par la disparition des pêcheries, les fermetures de mines et
les difficultés de l’industrie forestière.
Aujourd’hui, l’industrie éolienne emploie plus de 5 000 personnes chez les manufacturiers de
composantes, développeurs, consultants, chercheurs4. Ce succès s’explique par le dynamisme
de l’industrie qui a su répondre avec empressement aux appels d’offres d’Hydro-Québec
Distribution lancés dans la foulée des encadrements édictés par le gouvernement.
Au-delà des avantages vécus par la région désignée, l’avènement de l’éolien a permis
d’amorcer une diversification des sources de production d’énergie renouvelable au Québec,
ainsi qu’une diversification des modèles d’affaires.
RECOMMANDATION
La politique énergétique devrait viser à accélérer cette diversification des sources de production d’énergie renouvelable, ainsi que la diversification des modèles d’affaires.
4 SECOR, Retombées économiques de l’industrie éolienne québécoise, mars 2013
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3.1 Diversifier les sources de production
Alors que les changements climatiques s’accélèrent avec des conséquences souvent
imprévisibles, cette diversification s’avère une nécessité pour éviter de dépendre d’une source
unique de production telle que l’hydroélectricité. De plus, cette diversification des sources
permet à Hydro-Québec de moduler son offre de produits sur les marchés d’exportation, dans
un contexte où l’hydroélectricité provenant des grands barrages est souvent perçue dans
plusieurs états américains comme non respectueuse de l’environnement.
La poursuite de l’exploitation du potentiel éolien devrait constituer l’un des axes de la future
politique énergétique. À cet égard, la pratique des appels d’offres s’est avérée un outil puissant
pour assurer le choix des projets à moindre coût, tout en assurant une répartition géographique
optimale des projets en incluant la prise en compte des coûts de transport et l’optimisation de la
capacité du réseau existant.
En imposant des conditions de contenu régional et québécois, les différents gouvernements qui
se sont succédé ont supporté le développement d’une industrie éolienne au Québec.
Compte tenu du fait que l’éolien continue de connaître une forte croissance à travers le monde
et que le potentiel est loin d’être épuisé au Québec, il est important d’assurer la poursuite du
développement de cette industrie, notamment en encourageant le développement de la chaîne
d’approvisionnement et des industries connexes, ainsi que la recherche et le développement.
Pour ce faire, les approvisionnements par appel d’offres se sont avérés un moyen efficace qui a
permis à la créativité des partenaires de s’exprimer. À long terme, cette approche semble la
plus à même d’assurer que les meilleurs projets soient retenus et que ces choix soient
transparents.
Il est à noter que la supervision de la Régie de l’énergie a fait en sorte que, à aucun moment, la
justesse économique des choix effectués dans les appels d’offres n’a été remise en question.
12 | Mémoire sur les enjeux énergétiques du Québec | 11 octobre 2013
La diversification ne devrait pas se limiter à la promotion de l’énergie éolienne. Les technologies
utilisant l’énergie solaire ont connu une rapide évolution ces dernières années et leurs coûts
continuent de diminuer. Sur l’horizon de la future politique énergétique, il est à prévoir que cette
forme de production pourrait contribuer à la satisfaction d’une part des besoins en électricité et
en chauffage au Québec.
Les hydroliennes constituent également un mode de production dont le déploiement mérite
d’être encouragé puisque le Québec possède déjà une avance technologique en ce domaine.
La modularité de la technologie, sa simplicité d’installation et sa faible empreinte
environnementale en font une solution attrayante, notamment pour les réseaux isolés, là où
l’électricité est le plus souvent produite à partir de combustibles fossiles. Les hydroliennes
peuvent également être raccordées au réseau interconnecté sur des cours d’eau où la mise en
place de centrales hydroélectriques conventionnelles ne peut se justifier pour des raisons
économiques ou environnementales.
RECOMMANDATIONS
La politique énergétique devrait prévoir la poursuite du développement éolien en privilégiant les approvisionnements par appel d’offres, sous la supervision de la Régie de l’énergie, à un rythme d’environ 350 MW de mise en service annuel d’ici à 2025 afin d’assurer la pérennité de l’industrie manufacturière en région.
La politique énergétique devrait encourager la production d’énergie solaire par le biais d’un tarif pré-établi permettant l’amorce d’un développement solaire au Québec.
Elle devrait également favoriser le déploiement de technologies novatrices telles les hydroliennes, notamment en réseau isolé, mais également en région éloignée, là où le réseau électrique le permet.
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3.2 La production hydroélectrique
Historiquement, l’hydroélectricité a été à la base du développement économique de plusieurs
régions au Québec. Depuis la première nationalisation en 1944, elle a été une source de fierté
pour les Québécois et un symbole de prise en main de nos destinées. Il y a donc lieu de
rechercher des moyens novateurs pour que les régions puissent continuer de tirer parti de ce
potentiel hydroélectrique local qui, plus souvent qu’autrement, peut s’accompagner d’une
revitalisation des lieux, au bénéfice des résidents de la région.
Si le Québec a su développer ses grands barrages dans le respect de l’environnement, il y a
tout lieu de penser que des citoyens concernés par leur environnement pourront en faire autant
pour des rivières qu’ils côtoient régulièrement. Le gouvernement du Québec devrait être en
mesure d’encadrer ce développement comme il le fait pour le développement des grandes
rivières du Québec.
RECOMMANDATION
La politique énergétique devrait faire une place au développement hydroélectrique en région au bénéfice des communautés locales et autochtones.
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3.3 Diversifier les modèles d’affaires
Le déploiement de l’éolien au Québec a permis de développer un modèle d’affaires qui a fait
ses preuves. C’est Hydro-Québec qui agit comme maître d’œuvre de ce déploiement puisque
c’est elle qui fixe les conditions des appels d’offres, qui détermine les dates de mise en service
et les conditions des contrats; c’est elle qui assure le raccordement au réseau et qui dicte les
exigences techniques auxquelles doivent satisfaire les équipements à être ajoutés sur son
réseau; c’est elle qui fait la prévision de la production de l’ensemble du parc éolien du Québec;
et c’est elle qui assure l’équilibrage de cette production à l’aide de sa capacité de stockage
dans ses réservoirs.
Les développeurs de projets, quant à eux, se sont concentrés sur le choix des meilleurs sites,
sur l’identification des technologies les plus appropriées pour répondre aux besoins du réseau,
sur les relations avec les communautés et sur l’obtention des permis requis. Ils assument les
risques découlant de la variabilité de la ressource, de la performance des éoliennes, des
fluctuations des marchés de financement, etc.
D’autres intervenants se sont également intéressés à la production éolienne : municipalités,
MRC, communautés autochtones, coopératives locales. Ces intervenants se sont la plupart du
temps associés à des producteurs privés qui possédaient l’expertise requise pour mener à
terme les projets, diminuant d’autant les risques assumés par les communautés.
La politique énergétique devrait encourager le développement de ces nouveaux modèles
d’affaires. Pour ce faire, il est nécessaire d’ouvrir la porte à l’initiative des acteurs du secteur en
laissant place à des arrangements qui permettent une modulation des paramètres d’association
en fonction du niveau de risques que peuvent assumer les différents partenaires d’une même
entité. Il faut notamment éviter d’imposer des niveaux de participation minimaux du secteur
municipal ou coopératif, ce qui aurait pour effet d’empêcher des acteurs aux capacités
financières plus limitées ou avec une aversion au risque plus grande de participer au
développement éolien.
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Ces intervenants devraient avoir le choix entre le niveau de participation qu’ils veulent prendre
dans un projet et le niveau des compensations volontaires sans participation au risque qu’ils
pourraient recevoir du développeur du projet, quitte à ce qu’une grille soit établie par le
gouvernement pour baliser ces choix.
Une telle approche permettrait une plus grande participation des différentes régions du Québec
et une saine émulation qui conduira à la prise en charge du développement éolien par le milieu
d’accueil.
RECOMMANDATION
La politique énergétique devrait proposer des modes de participation flexibles aux appels d’offres pour encourager la participation des communautés locales et autochtones et la collaboration entre ces milieux et les producteurs privés.
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4. LE DÉVELOPPEMENT D’UNE EXPERTISE QUÉBÉCOISE
Dans les années 60-70, les grands projets d’Hydro-Québec ont contribué au développement
d’une expertise locale en génie-conseil. Les firmes qui ont vu le jour à l’époque ont acquis une
expérience qui leur a permis de croître et d’exporter leur savoir-faire à l’échelle internationale.
Cette collaboration entre Hydro-Québec et les firmes de génie-conseil a permis de développer
une expertise québécoise qui s’est exportée par la suite à l’échelle mondiale, créant ainsi un
créneau d’expertise très rentable pour la société québécoise et sa main-d’oeuvre.
Il peut en être de même pour la production d’énergie renouvelable. La participation des
producteurs privés aux appels d’offres d’Hydro-Québec a permis le développement d’une
expertise québécoise dès le début des années 90. Ce développement s’est accéléré au
tournant des années 2000 avec le lancement des premiers appels d’offres d’Hydro-Québec
Distribution. Aujourd’hui, plusieurs de ces firmes sont actives sur les marchés extérieurs où
elles exportent leur savoir-faire et contribuent à l’enrichissement du Québec.
À titre d’exemple, Kruger Énergie s’est appuyée sur ses contrats avec Hydro-Québec pour
asseoir sa croissance accélérée. Avec une centaine de personnes œuvrant à l’exploitation et à
l’entretien de ses centrales et au développement de nouveaux projets au Québec et ailleurs en
Amérique du Nord, l’entreprise est à même de faire profiter la société québécoise des
retombées liées à ses activités. Cette histoire n’est pas unique : le nombre de firmes
québécoises actives en production privée et la taille de ces entreprises ont augmenté de
manière significative ces dernières années, preuve que la collaboration entre Hydro-Québec et
le secteur privé peut porter des fruits.
RECOMMANDATION
La politique énergétique devrait continuer de soutenir une plus grande participation du secteur privé au développement de projets d’énergie renouvelable en collaboration avec Hydro-Québec.
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5. L’ACCEPTABILITÉ SOCIALE AU COEUR DU
DÉVELOPPEMENT ÉNERGÉTIQUE
Par ailleurs, les producteurs privés ont su démontrer qu’il était possible de développer des
projets en accord avec les collectivités locales. À titre d’exemple, le parc éolien Montérégie,
construit à 25 km au sud de Montréal, s’est développé dans un milieu agricole dynamique avec
le support des agriculteurs, des municipalités et de la communauté environnante.
Plus de 25 rencontres publiques ont été tenues entre 2008 et 2012 pour faire connaître le projet
et l’adapter aux préoccupations des citoyens. Plus de 75 firmes de la Montérégie ont participé à
sa construction, les retombées directes pendant la construction ont atteint 180 millions $ au
Québec, dont 45 millions $ en Montérégie. Par ailleurs, près d’un million de dollars seront
versés annuellement aux propriétaires terriens et aux cinq municipalités qui accueillent le parc
éolien.
De plus, le parc éolien est en voie de devenir une attraction touristique dans la région et il
contribuera à consolider sa vocation agricole en renforçant la santé financière des fermes qui
accueillent des éoliennes et en éloignant les spéculateurs fonciers à cause des distances
séparatrices imposées par la réglementation.
Employés et visiteurs lors d’un événement portes ouvertes organisé durant la construction du Parc éolien Montérégie
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Plusieurs autres projets se sont développés au Québec en harmonie avec les communautés
locales. Ces projets ont reçu peu d’attention de la part des médias, cependant ils sont la preuve
qu’une collaboration fructueuse est possible entre producteurs privés, intervenants locaux et
Hydro-Québec.
RECOMMANDATION
La politique énergétique devrait réaffirmer l’importance de l’acceptabilité sociale des projets de production et de transport de toute forme d’énergie au Québec et proposer une modernisation des processus de concertation avec les milieux touchés à l’heure des communications électroniques.
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6. CONCLUSION
La future politique énergétique du gouvernement du Québec se doit de proposer aux citoyens
une vision d’avenir qui positionne le Québec comme un leader dans la lutte aux changements
climatiques. Pour ce faire, il est indispensable d’élargir notre portefeuille énergétique tout en
créant les conditions où la créativité des groupes et des individus pourra s’exprimer.
Dans une perspective de développement durable, la force d’une société comme la nôtre tiendra
non pas tant dans sa capacité à prévoir le futur, mais bien dans sa capacité à s’adapter aux
changements pour les orienter.