lva n°18 - dialogue civil

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  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    1/48

    Dge cdge c

    Joer la complmear

    Me GcEntrEtiE

    Por e dmocraieracie

    Emmee Ctribun

    Il a orir de l'ere oi poaricler d aire eemle

    18 mai 2012 cc.Le magazie de la Corece permaee de coordiaio aociaie

    DialoGuE CivillEs Corps intErMDiairEs,

    lEs assoCiations Et la DMoCratiE

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    2/48

    Mll MM l F l l MM.ocit dassurance mutuee cotisations variabes. ntreprise rgie par e code des assurances. ige socia : 2 et 4, rue pied de fond 79000 iort.

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    3/48 18 mai 2012 la vie aociative

    N ous venons de vivre une campagne lectoraleau cours de laquelle les corps intermdiairesont parois t instrumentaliss dans le discours politique, prsents tour tour comme des crans entl'tat et le peuple ou au contraire comme des partenaires dont l'utilit civique et sociale est reconnue.

    Le mouvement associati dr revendique cettappellation de corps intermdiaire, composante

    d'une socit civile organise dans le cadre d'une dmocratie plusparticipative et plus dlibrative.

    Aujourd'hui, les citoyennes et les citoyens se sont exprims. Le pr-sident de la Rpublique est lu, bientt une nouvelle Assemblenationale sera appele siger. C'est le moment pour nous, mouve-ment associati organis, d'tre orce de propositions, de partager notrrexion sur le cadre d'un dialogue civil ouvert, transparent et rgulieavec les nouveaux pouvoirs publics.

    L'enjeu du dialogue civil est ancien. Ce numro de La Vie associa-

    tive a vocation aire acte de pdagogie en revenant sur ce qu'est ledialogue civil et comment il s'est construit en France, tout en ques-tionnant les soupons autour de la reprsentativit associative et eninterrogeant les dirents cadres territoriaux du dialogue civil.

    Mais pourquoi vouloir participer un dialogue civil avec les pou-voirs publics ? Par narcissisme ? Non. Nos associations sont des voied'expression citoyenne : c'est ce titre que nous souhaitons participe une co-construction des politiques publiques, respectueuse de lalgitimit de la dmocratie reprsentative mais attentive ce que ladcision publique soit mieux comprise et accepte par les citoyenneet citoyens. En ces temps de dsaection civique, les associationsuvrant pour l'intrt gnral et ayant l'ambition de rhabiliter lepolitique ont un rle majeur jouer. Le dialogue civil est l'une desrponses la crise dmocratique.

    Faire ace de pdagogieP Jean-Marc Roirant, psd du Gup ds sssu Csl mqu, sl vml

    Direcer de la plicaioAndr Leclercq

    Repoale de la rdacioJean-Marc Roirant (prsident du Groupedes associations au Conseil conomique,social et environnemental)

    RdacioAlice Loredo (CPCA),Hlne Spoladore (La Pirogue)

    O paricip ce mroMlanie Gratacos (Cese), dith Arnoult-Brill (Cese), Daniel Boy (Cevipo), ClaudyLebreton (conseil gnral des Ctesd'Armor), Marcel Grignard (CFDT), AhmedEl Khadiri (Animaac), Emmanuelle Cosse(conseil rgional d'le-de-France).

    Illraio

    Flow

    MaqeeJonathan Debauve

    ImpreioChevillon Imprimeur,26 boulevard Kennedy 89 101 Sens

    Publication ralise avec le soutien de laCaisse des dpts et de la Mission cono-mie sociale de la Direction gnrale de lacohsion sociale (DGCS).

    Nos partenaires, le Crdit Cooprati, leGroupe Chque Djeuner, Chorum, la Maci

    et la Mai, nous soutiennent au titre dumcnat d'entreprise pour le dveloppe-ment d'un mouvement associati organis,autonome et d'intrt gnral.

    Vous pouvez commander ce numro parmail [email protected] ou sur notresite cpca.asso.r/la-vie-associative.

    Exemplaire papier4 (5 , rais de port inclus)

    Plicaio die par la CPCA28 place Saint-Georges 75 009 Paris01 40 36 80 10contact@cpca. asso.rcpca.asso.r

    ISSN : 1761- 9149Dpt lgal parutiondite en 3 500 exemplaires

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    4/484 la vie aociative mai 2012 18

    8

    DialoGuE Civil Et DMoCratiE

    ARtICLE Les associations, acclaratrices de dmocratie

    EntREtIEn

    Mlanie Gratacos : Pour une dmocratie interactive

    14

    la ConstruCtion Du DialoGuE Civil En FranCE Et En EuropE

    ARtICLE Tours et dtours du dialogue civil

    EntREtIEn

    dith Arnoult-Brill : Le CNVA a t un ple d'clairage des politiques publiques

    EntREtIEn

    Daniel Boy : Un tel processus ne onctionne que s'il est port politiquement

    ARtICLE Le dialogue civil en Europe : un outil d'appropriation

    de la construction europenneARtICLE Dialogue territorial 2

    EntREtIEn

    Claudy Lebreton : Il aut runir tous ceux qui reprsentent nos territoires

    DItORIAL

    Jean-Marc Roirant : Faire acte de pdagogie

    ARtICLE Le dialogue civil, qu'est-ce que c'est ?

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    5/48 18 mai 2012 la vie aociative

    POsItIOnnEMEnt DE LA CPCA 4

    tRIbunE

    Emmanuelle Cosse : Il aut sortir de l'entre soi pour articuler du aire ensemble 4

    30

    DialoGuE Civil : ConstruirE DEs intErDpEnDanCEs 3

    ARtICLE Dialogue civil et dialogue social : jouer la complmentarit

    EntREtIEn

    Marcel Grignard : La complexit sociale est telle qu'aucun acteur

    ne peut prtendre couvrir le champ 3

    ARtICLE Dialogue civil et dmocratie participative 3

    EntREtIEn

    Ahmed El Khadiri : Donner la parole ceux qui ne l'ont pas 3

    ARtICLE Reprsentativit : un aux dbat ? 4

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    Ericir la dmocraie repreaie :

    e rpoe la crie de coace

    En quelques mots, le dialogue civil peut tre entenducomme le dialogue intervenant entre les autoritspubliques et la socit civile organise. Il rassemblel'ensemble des organisations de la socit civile, no-tamment les partenaires sociaux et les associations.Le dialogue civil se distingue du dialogue social (voirp. 32) et exclut donc de son champ les enjeux lis aumonde du travail. Le cadre du dialogue civil recouvrel'interlocution entre les pouvoirs publics et les orga-nisations de la socit civile sur les grandes questionsde socit : galit des droits, environnement et dve-

    loppement durable, sant publique, protection dconsommateurs, action sociale, ducation, lutte contles discriminations

    Cette interlocution, pour tre reconnue commlgitime la ois par les pouvoirs publics et par lcitoyennes et citoyens, s'intgre dans le cadre d'udmocratie interactive (voir p. 12). aucun mment le dialogue civil ne suppose la dvalorisatiou la remise en cause de la dmocratie reprsentati(voir p. 36). Au contraire, les lus de la Rpubliquel'tat restent les garants de l'intrt gnral. Mais, daun contexte de crise dmocratique qui se caractrnotamment par une abstention globalement cro

    Le dialoge ciil,q'e-ce qe c'e ?

    Tenter de dessiner les contours du dialogue civil, c'est s'interroger sur la

    dmocratie. Comment se construit la dcision publique ? Qui est associ la construction des politiques publiques ? Comment les citoyennes etles citoyens participent la mise en uvre et l'valuation de l'actionpublique ? Comment construire un dialogue entre les lus, les citoyensorganiss (les corps intermdiaires) et la population ?

    Dialogue civil et Dmocratie

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    sante et par une dsaection vis--vis du politique,la dmocratie reprsentative peut tre enrichie par lepluralisme des acteurs impliqus dans la constructionde la dcision, comme dans sa mise en uvre. L'enjeuest bien d'accrotre la lgitimit de la dcision publiquepour renorcer son appropriation par les citoyennes etles citoyens.

    Si la reprsentativit des associations est parois ques-tionne (voir p. 40), la lgitimit du monde associati participer ce dialogue civil est dsormais accep-te par la plupart desacteurs dmocratiques(voir p. 34). Les associa-tions sont des lieux col-lectis qui regroupent parune dmarche volontaire,autonome, personnelle,des citoyens autour de

    projets les plus divers.Lieux d'ducation lacitoyennet et d'exercice quotidien de la dmocratie,elles tissent du lien social et constituent ainsi des outilsdu mieux-vivre ensemble. Au-del de ces onctionsciviques et sociales, les associations assument biensouvent des missions d'intrt gnral non couvertespar le secteur public ou le secteur priv. Leur lgitimits'appuie donc la ois sur leur nature et les onctionsqu'elles remplissent.

    Forme e liex d dialoge ciilLe dialogue civil, c'est l'inverse de ce que PierreRosanvallon1 appelle la dmocratie immdiate quisuppose que le peuple peut s'exprimer [] comme unensemble qui fait clairement sens et prend avec videnceforme 2. Le dialogue civil c'est redonner la socitles moyens de se connatre et de se reprsenter 3.

    Mais le dialogue civil n'est pas une thorie politique : ils'inscrit dans des pratiques dmocratiques formalisesou non, et dans des lieux. Trois formes complmen-

    taires de dialogue civil peuvent tre identifes : un dialogue civil sectoriel entre les organisations

    de la socit civile et leurs interlocuteurs au sein

    1. Proesseur au Collge de France, titulaire de la chaire dhistoire moderneet contemporaine du politique.

    2. Pierre Rosanvallon, Le modle politique franais, la socit civile contre lejacobinisme de 1789 nos jours, ditions du Seuil, 2004.

    3. Sortir de la crise , Entretien avec Pierre Rosanvallon par Goulven Boudic,mip-ms.cnam.r/servlet/com.univ.collaborati.utils.LectureFichiergw?ID_FI-CHIER=1295877018178

    des pouvoirs lgislatis et excutis, dit dialogvertical ;

    un dialogue rgulier et structur entre les instittions et l'ensemble des composantes de la socicivile, dit dialogue transversal ;

    un dialogue entre organisations de la socit civelles-mmes, dit dialogue horizontal .

    Le dialogue civil horizontal est sans doute la ormela ois la plus souple et la plus rpandue du dialogcivil. La Conrence permanente des coordinations a

    sociatives (CPCA) et, pllargement, le ait drasont des expressions de dialogue civil horizonappliqu la vie assoctive. Le dialogue verticet le dialogue transverprennent, quant eux, dormes tout ait divers

    Des plus institutionnlises comme le Cons

    conomique, social et environnemental (Cese) et shomologues rgionaux (Ceser) aux plus inormelcomme les concertations bilatrales avec les ministen passant par les Conrences de la vie associative, gouvernance cinq 4 initie au travers du Grenede l'environnement, les conseils consultatis rattachaux direntes instances de la Rpublique, etc.

    Enn, le dialogue civil s'exprime tous les niveaux

    la dcision publique : au niveau des territoires de proj(voir p. 26), au niveau europen o le dialogue civit reconnu dans le trait sur l'Union europenne (vop. 23) et mme au niveau international.

    En dnitive, le dialogue civil, s'il existe dans les prtiques, doit dsormais tre mieux ormalis et instittionnalis.

    4. Reprsentants des collectivits territoriales, des entreprises, des salarides associations et de l'tat.

    Redonner la socit les moyens dese connatre et de se reprsenter.

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    9/48 18 mai 2012 la vie aociative

    L s ls l dm l v ssv smbux, dymqus, mplxs. Hsqumd'bd, l lb d'ss s u ds ds v-

    s ggs p l Rpublqu su u ulu m-hqu lbs .

    Au l du XX sl, ls sss s s vls

    d vbls lbs d dm : lu s, ls

    ys ys puv l ss du ll, l s-

    psbl, l pg d pjs, .

    L dm psv ll qu'll xs F

    s's, d s , ppuy d mbuss pss su l

    vx ds sss. E , puss d'u dmdy d'v plqu sl, ls sss

    puv sds mm ds us d'ds u d

    pjs, qud lls s ps vus mm d smpls

    mphuss d u d.

    Cmm l dlgu vl s's-l ds mplx

    Cmm pu-l pp d l'lus dmqu ?

    Dialoge ciile dmocraie

    18 mai 2012 la vie aociative

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    10/4810 la vie aociative mai 2012 18

    De apiraio cioee e olio

    Claudy Lebreton, prsident du conseil gnral des Ctesd'Armor l'admet : Nous sommes dans une socit encrise, la plus grave tant celle de la dance envers lespolitiques. Les nombreuses aspirations et attentes de noscitoyens interrogent la capacit des politiques rgler les

    problmes. Un constat largement partag par le person-nel politique, les politologues, les sociologues et les asso-ciations. Pour dith Arnoult-Brill, ancienne prsidente duConseil national de la vie associative, il aut renouvelerle regard sur la participation, aire vivre la dmocratie au-trement, et surtout en dehors des chances lectorales .C'est aussi ce que promeut Dominique Rousseau1 traversle concept d'une dmocratie continue . D'autant quesi le jeu dmocratique reprsentati est boud, l'activitcitoyenne reste orte : mobilisations, ptitions, participa-tion aux orums citoyens, etc. Elle trouve un driv naturel

    dans l'implication dans des associations.

    De cole de dmocraie

    Dire que les associations sont des lieux de dmocratietient du ponci. Mais combien d'lus ont ait leurs pre-mires armes sur les bancs associatis ? Au-del de l'du-cation populaire, en permettant l'engagement de emmes

    1. Proesseur de droit constitutionnel l'universit Montpellier I et l'universit Paris I.

    et d'hommes autour de projets collectis, les associatiosont des laboratoires de ormation politique. D'autant qles procdures dmocratiques y sont la norme : assembles gnrales souveraines, dlgation des instances direction, etc. Leur implication politique va au-del deormation des citoyens : l'cologie politique est ne po

    partie de l'action des associations environnementales. One compte plus les grands dbats de socit, traduits non dans des politiques publiques, ports par les assoctions : droit l'interruption volontaire de grossesse, pren charge du sida, droit au logement, accessibilit des psonnes handicapes En propulsant des besoins initlement vcus comme privs au-devant des politiques, associations sont des moteurs de changement social.

    Si les pouvoirs publics tendent les considrer parcomme de simples prestataires, elles n'en ont pas mo

    acquis une lgitimit intervenir dans l'laboration de plitiques publiques qu'elles contribuent mettre en uv

    Mliplier le orce de lgiimi

    dith Arnoult-Brill est claire : L'tat n'a plus le monpole de l'intrt gnral. Dans une "nouvelle gouvernandmocratique", la consultation de la socit civile organse revient le co-construire par le dialogue civil. PoMlanie Gratacos, conseillre associative au Conseil cnomique, social et environnemental (Cese), une dm

    Le aociaio, acclrarice

    de dmocraieL'indice de conance accorde par les citoyens et citoyennes auxassociations erait plir d'envie nombre d'lu-e-s en proie la dancegrandissante d'une partie de la population. Cette crise interroge lesmodalits de la reprsentation et plaide en aveur de nouveaux espacesdmocratiques. Le mouvement associati, souvent dni comme unmdiateur entre les citoyens et les institutions, est un agitateur depolitique. De mme quand il orme des individus la citoyennet ou

    qu'il prend en charge des services d'intrt gnral. Et que dire de saonction d'alerte et de surveillance ? Les associations ont un rle jouerdans une dmocratie renouvele.

    Dialogue civil et Dmocratie

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    cratie interactive suppose de multiplier les modes d'enga-gement et d'intervention dans la socit ; elle joue sur lescomplmentarits des lgitimits et non sur leur aronte-

    ment. Elle s'appuie sur la socit civile organise dans undialogue civil institutionnalis. Pour elle, l'expertise desassociations onde leur lgitimit. Les sujets traits par leParlement sont de plus en plus complexes, parois tech-niques et peuvent ncessiter de conronter une pluralitde connaissances expertes et contradictoires. Transmettredes inormations peut tre utile an d'clairer les parle-mentaires trop souvent amens statuer dans l'urgence. Elle aborde ici un point central de l'apport des associa-tions : le temps. Bien plus long, celui des associations per-met d'approondir des questions de socit sur plusieurs

    annes, garantie d'une dcision rchie collectivement.

    Reste structurer la participation de la socit civile or-ganise. Pour Ahmed El Khadiri, dlgu gnral d'Ani-maac, la socit civile ne veut pas s'emparer de la dci-sion mais y tre associe. Un travail est mener surune charte du dialogue civil expliquant aux deux partiesles objectis, les processus d'inormation, de dlibrationou de dcision suivis. Une pdagogie de l'ensemble desacteurs , conclut-il. Car les politiques auraient tout gagner s'appuyer davantage sur la socit civile.

    Le dialoge ciil o la cioeepar la praiqe

    Selon Loc Blondiaux2, plus nombreux seront les acteursd'une dcision politique, plus elle sera lgitime. Cette participation renorce enrichit en outre la dcision.Le renorcement de la dmocratie participative (c. p. 36)et l'armation du rle de la socit civile organise

    2. Politologue, proesseur l'universit Paris I Panthon-Sorbonne.

    pourraient davantage contribuer la conception, mise en uvre et l'valuation des politiques publiquesUne manire de dnir les onctions du dialogue civil.

    L'valuation renvoie la onction d'alerte, de surveillanet de contrle des associations. Pierre Rosanvallon dnd'ailleurs la contre-dmocratie comme une exigende contrle par les citoyens eux-mmes de l'engagemedes autorits en aveur du bien commun . Les assoctions ont dvelopp une expertise indpendante, ondala conance de leurs adhrents. Ce sont bien des assoctions de malades qui ont pouss le gouvernementlgirer sur l'interdiction de l'amiante. Elles ont aussi cr

    des agences de notation citoyenne ou des indicateurs dveloppement durable. Pour Pierre Rosanvallon, l'des enjeux essentiels du progrs dmocratique rsidans l'expertise et la veille citoyennes. Restera alors qulibrer entre participation au processus de dcision potique et posture d'alerte et de contestation des associatio

    Por e iclio dmocraiqe

    Selon Loc Blondiaux, l'interaction entre socit civile politiques rimpliquerait des citoyens marginaliss da

    les processus de dmocratie reprsentative . Si les assciations sont lgitimes demander un dialogue civil intitutionnalis, elles doivent elles-mmes inclure dans lepropre onctionnement dmocratique les minorits sciales ou politiques. Car comment parler d'une dmocrarenouvele par le dialogue civil si elle continue de marginliser les plus vulnrables ? Le renorcement de la lgitimassociative dans le cadre d'un dialogue civil institutionnlis passe galement par la rnovation des pratiques dmcratiques des associations (voir La Vie associative n 17).

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    Que peut apporter le dialogue

    civil ?

    On ne peut que constater un ma-laise des citoyens vis--vis de laonction dmocratique. La criseest double : elle se caractrise d'unepart par une dance vis--vis deslus, une mise en cause plus ortede leur aible reprsentativit so-ciodmographique ; d'autre part,par une crise de l'ecacit. Pour lescitoyens, les politiques ont perdu lepouvoir ; ils ne sont plus capablesde transormer la vie.

    Le dialogue civil ne rpondra passeul au d, mais il y contribuera.D'abord parce qu'il participe de lalgitimit des dcisions : quand unedcision politique est co-construite

    avec les corps intermdiaires ntamment, elle a une lgitimit plorte car onde sur une base pllarge. Ensuite parce qu'il contribuune plus grande ecacit ; une dsion est plus ecace ds lors qu'eest dbattue et donc pluraliste.

    temps du dbat est du temps gagpour l'acceptabilit des dcisions.

    Comment dfniriez-vous

    le dialogue civil ?

    Comme la pluralit des procesus de prise de dcision politiquLe dialogue civil, c'est assocl'ensemble des organisations desocit civile l'laboration, la mi

    en uvre et l'valuation politiqde tous les sujets de socit en dhors de la sphre du travail qui rlve du dialogue social. Le dialogcivil n'a pas vocation se substituau dialogue social, mais les derelvent de la dmocratie interative qui ait plus de place aux corintermdiaires. Ce qui n'empcpas la participation des citoyens dbat ; il y a complmentarit.

    Por e dmocraie ieracieEntREtIEn AvEC MLAnIE GRAtACOs

    On tend aujourd'hui simplier le processus dmocratique. Ce aisant,on perd en lgitimit sociale des dcisions car on ne laisse pas place audbat. Il audrait plutt rechercher la complexit et les complmentarits

    des processus dmocratiques. Ce qu'explique Mlanie Gratacos,conseillre associative au Conseil conomique, social et environnemental.

    Pour les citoyens, les politiques ont perdu le pouvoir.

    Le dialogue civil ne rpondra pas seul au d de laconance, mais il y contribuera.

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    Il est vrai quele oisonnementassociati est tel qu'ilest ncessaire desavoir qui ait quoi,qui est lgitime.

    Participer au dbat, c'est enrichirla dcision politique qui reste entreles mains de l'lu en dernier ressort.Les lus se sentent parois menacspar le dialogue civil alors que c'estun outil de renorcement de la d-mocratie. L'institutionnalisation du

    dialogue civil permettrait de dpas-ser ces rticences.

    Qui dit institutionnalisationpose la question de lareprsentativit des acteurs ?

    On ne peut pas aire l'impasse surcette question de la reprsentati-vit des acteurs du dialogue civilorganis parce que cet argument

    est toujours avanc par ses oppo-sants. Il est vrai que le oisonne-ment associati est tel qu'il est n-cessaire de savoir qui ait quoi, quiest lgitime. Mais ce dbat ne doitpas conduire des critres d'exclu-sion ; les critres sur la taille ne sontpas toujours pertinents. Les travauxmens dans ce domaine en listentd'autres : la capacit d'une associa-tion reprsenter l'intrt gnral,

    son onctionnement dmocratique,son expertise sur une niche , etc.Les associations doivent pouvoirparticiper au dbat civil ds lorsqu'elles ont su rvler des besoins etapporter des rponses.

    L'institutionnalisation du dialoguecivil constituera une scurit sup-plmentaire par rapport aux pou-voirs publics ; la onction politiquedes associations sera enn recon-nue. Mais aujourd'hui, on en estencore opposer les lgitimits, lepeuple et les corps intermdiaires

    Est-ce dire que le personnelpolitique n'est pas prt ?

    Il n'y a qu' voir la charge deNicolas Sarkozy contre les corps in-termdiaires pendant la campagneprsidentielle, quand d'autresdisent qu'on dtourne la parole dupeuple. Il y a des reins culturelsqui tiennent notre conceptionde l'autorit politique. Sau que lemonde a chang, que les citoyens etles citoyennes veulent une partici-

    pation plus continue la politiqupas limite leur vote. Ils sont ajourd'hui plus critiques et attendeune justication orte des dcisio

    prises. Cette aspiration doit trouvsa concrtisation dans l'volutides processus dmocratiques.

    Si les associations s'emparent de csujets, elles peuvent devenir ucaisse de rsonance, tre l'inittive de tels dispositis. Il serait inressant que la CPCA porte de telinitiatives.

    Mlaie GraacoConseillre au Cese

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    15/48 18 mai 2012 la vie aociative

    L s hms vs ds pssus plus dlbs,mm vs l suu du muvm sslu-mm, s ps d lgs fuvs qulls.

    Au vu l, l su du dlgu vl s's

    ppuy su ds lux l Csl l d l v ss-

    v, l Csl mqu, sl vml

    l CPCA su ds mms, mm l Gll d

    l'vm. Mm mp, l Gll

    pms d ppuls l pp ds sss l'lb ds plqus publqus.

    Ms l dlgu vl dpss l sul vs l

    g, d pgmqu, l p d'u guv-

    mul-vux . E Eup, ds ls s, l

    dlgu vl s glm u ju ls pss s

    s ps plus mbuss !

    E Frace e e Erope

    La corciod dialoge ciil

    18 mai 2012 la vie aociative

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    16/4816 la vie aociative mai 2012 18

    1983-1992 : De la aiace la rcraio

    La naissance du dialogue civil national en France peutsans doute tre date du 25 vrier 1983, c'est--dire de lapublication du dcret de cration du Conseil national dela vie associative (voir l'interview d'dith Arnoult-Brill).C'est Pierre Mauroy, Premier ministre et ondateurdu mouvement d'ducation populaire Lo Lagrange,

    que revient cette dcision. l'origine, trois missionssont conres cette instance : tablir un bilan annuelde la vie associative ; aire toute proposition de rormesusceptible d'amliorer la vie associative ; conduire lestudes qui lui paraissent utiles au dveloppement dela vie associative. Quelques annes plus tard, le CNVAaura galement pour mission de donner son avis sur lesprojets de textes lgislatis ou rglementaires impactantdirectement ou indirectement la vie associative.

    La constitution du CNVA a volu avec le temps. Dans

    sa dernire ormule, il comptait 70 membres titulaires et70 membres supplants, dsigns par leur association elle-mme nomme par le Premier ministre , et 10 per-sonnalits qualies. En outre, les reprsentants de l'tatet des collectivits territoriales disposaient d'une voixconsultative.

    Le Conseil national de la vie associative a produit desdocuments essentiels au dveloppement de la vie asso-ciative mais il a souert de sa composition. En eet, sila dsignation des associations par l'tat permettait de

    garantir le ait que celles-ci taient bien dans un procsus d'interlocution avec les pouvoirs publics, ce mode dsignation entravait le caractre de reprsentativassociative des membres du CNVA.

    Un an aprs la cration du CNVA et quelques jours avala dmission de Pierre Mauroy de la onction de Premministre, le dcret du 4 juillet 1984 modie les conditiode dsignation des membres du Conseil conomique

    social (CES) et cre le groupe des associations. Cinq rprsentants associatis sont en eet dsigns pour sigau CES, au moment o se cre galement un groupe la coopration et un groupe de la mutualit permettaainsi une reprsentation eective de l'conomie sociaux cts des partenaires sociaux. Auparavant, seules associations amiliales taient reprsentes au CES.

    1992 2002 : ver l'iiioaliaio

    Dans la lance de la cration du Conseil national de

    vie associative, les prsidents de quelques coordinatioassociatives nationales se runissent en 1992 de maniinormelle an de porter une voix spcique des assciations, par les associations, pour les associations sein d'une Conrence des prsidents.

    Ce collecti est stabilis en 1999 par la cration sous stut associati de la Conrence permanente des coordnations associatives (CPCA) qui rassemble alors doucoordinations nationales. Puis, la CPCA s'largit, agrgeant aujourd'hui seize coordinations associatives nati

    tor e dor d dialoge ciil

    Au niveau national, le dialogue civil a commenc merger au dbutdes annes 1980. Intgrant progressivement les dirents lieux de lareprsentation de la socit civile organise, le mouvement associatis'est ensuite structur pour devenir un vritable interlocuteur despouvoirs publics. Aprs le centenaire de la loi 1901 et la signature de laCharte des engagements rciproques en 2001, le soue du dialoguecivil s'est amenuis, malgr les espoirs suscits par le Grenelle del'environnement ou la reonte du Cese. L'anne 2012 signera-t-elle leretour du dialogue civil dans le dbat public ?

    la construction Du Dialogue civil

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    17/48 18 mai 2012 la vie aociative

    nales et vingt dclinaisons rgionales. Les missions dela CPCA sont de trois ordres : discuter et dnir la placedes associations dans la socit ranaise ; constituerun lieu d'changes, de rencontres et de dbats entre les

    grandes amilles de la vie associative ;aire reconnatre le monde associaticomme corps intermdiaire pour undialogue civil indispensable l'exerciced'une dmocratie vivante.

    Le dialogue civil est donc au cur del'objet social de la CPCA. Aprs quelquesannes de discussion avec les gouverne-ments Jupp puis Jospin autour de lacoordination et de la reprsentativit

    des instances associatives, des Assisesnationales de la vie associative se d-roulent en 1999 et aboutissent en 2001 la signature d'une Charte d'engagementsrciproques entre l'tat, reprsent parle Premier ministre Lionel Jospin, et laCPCA. Cette Charte permet de placer la clbrationdu centenaire de la loi instituant la libert d'associationsous le signe du dialogue civil. Elle dnit les principespartags entre l'tat et les associations, reconnat laonction de recherche et d'innovation sociale, culturelle

    et ducative des associations et prcise les engagemende chacune des parties prenantes.

    L'tat s'engage ainsi respecter l'espdu contrat associati, organiser nancements des associations dans dure, consulter les associations sles dcisions qui les concernent, sotenir le dralisme associati, doner cohrence et visibilit la politiqassociative en l'inscrivant dans un cadinterministriel, etc. Les associatios'engagent notamment respecter rgles de onctionnement dmocratiqet de gestion dsintresse conormment la loi de 1901, mettre en uvune thique du nancement des acvits associatives, participer de aconstructive aux actions de consultatimises en place par les pouvoirs public

    La dmarche de la Charte des engagements rciproquprsentait l'intrt de prserver l'autonomie des assoctions dans leur partenariat avec la collectivit publiquMais pour que cette Charte ait du soufe et soit imp

    La Charte desengagementsrciproques

    dfnit lesprincipes partags

    entre l'tat etles associations.

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    18/4818 la vie aociative mai 2012 18

    quante pour les deux parties, il allait qu'elle soit va-lue de manire triennale, comme elle le prvoyait elle-mme.

    2002-2012 : terriorialiaio e claricaio

    Depuis dix ans, la CPCA s'est renorce dans les terri-toires par l'mergence des CPCA rgionales. Ce mou-vement s'est accompagn d'une dclinaison des chartesd'engagements rciproques dans quelques rgions etdpartements.

    Si la Charte des engagements rciproques n'a jamais tvalue, deux Conrences nationales de la vie associa-tive ont nanmoins t organises en 2006 et en 2009permettant un dialogue structur entre le mouvement

    associati organis et les pouvoirs publics sur la politiqueassociative mise en uvre.

    La rorme constitutionnelle de 2008 transormant leConseil conomique et social (CES) en Conseil cono-mique, social et environnemental a permis de renorcerla prsence associative, notamment par l'arrive desassociations de protection de la nature et de l'environ-nement. Malheureusement, les propositions mises enavant par le groupe des associations et soutenues par laCPCA rajeunissement des conseillers du Cese et ren-

    orcement global de la prsence associative n'ont que trs partiellement suivies.

    Enn, le CNVA a conduit sa propre rorme pour abouen 2011 l'installation d'un Haut Conseil la vie assciative (HCVA) permettant de clarier la onction

    reprsentation de la vie associative organise dvol la CPCA et la onc-tion d'expertise auHCVA (voir interviewd'dith Arnoult-Brillci-contre). Les nomina-tions au HCVA ont eulieu l'automne 2011,mais n'ont pas com-pltement permis decentrer les missions du

    HCVA sur l'expertiseassociative. Il n'en restepas moins ncessairepour les pouvoirs pu-blics de conrer au HCVA les moyens humains et naciers mme de lui permettre de onctionner.

    Il s'agit aujourd'hui d'impulser un nouvel lan pourdialogue civil en France. La CPCA, dle ses missiooriginelles, sera attentive ces volutions et prendtoute sa place dans les rormes conduire (voir p. 42)

    Pour que cetteCharte soit

    "imliquante", iallait qu'elle sovalue, comm

    elle le prvoyaielle-mme.

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    19/48 18 mai 2012 la vie aociative

    Peut-on revenir aux origines

    du Conseil national de la vie

    associative ?

    Le CNVA a t cr l'initiative dePierre Mauroy, Premier ministre,qui souhaitait disposer d'une ins-tance ddie au dveloppementde la vie associative. Le CNVA estalors le symbole de la reprsenta-

    tion associative et peru comme le Parlement des associations . sa cration, y sigent direntescatgories de membres dont desreprsentants de hauts comi-ts et dix personnes qualiesdont trois sont cibles conomiesociale. l'poque, le paysageassociati est surtout constitu degrands rseaux et mouvementsassociatis, mme s'il commence

    se diversier. La compositiondu CNVA, qui a beaucoup voluau l du temps, tant du point devue du nombre de membres quede leur qualit personnes phy-siques ou personnes morales ananmoins permis de reter unecertaine diversit associative.

    Le Conseil a trait de nombreuxsujets. titre d'exemple, il a no-

    tamment inspir la cration duFonds national de dveloppementde la vie associative (FNDVA) enappui du bnvolat. La croissanceen nombre et en diversit du sec-teur associati, double de l'mer-gence d'un univers de complexit,notamment sur le plan rglemen-taire, a progressivement conduit

    le CNVA produire de l'expertise.Il devient une instance consulta-tive o s'laborent les doctrinescommunes sur des sujets trans-versaux tels que le bnvolat oula scalit par exemple. Sur cedernier point, les instructions s-cales de 1998 et 1999 ont consti-tu un dossier majeur. Le CNVAtudie les questions poses sousdirents angles (juridiques, co-

    nomiques, sociaux) en incluantune vision stratgique de leursconsquences sur l'identit dumodle associati et son dvelop-pement dans le respect des on-damentaux de la loi 1901 et desliberts qui y sont attaches. Saonction le conduit construiredes propositions et entretenirun dialogue permanent avec l'tatsans recourir au rapport de orce.

    Le CnvA a ple d'clairagede poliiqe pliqeEntREtIEn AvEC DIth ARnOuLt-bRILL

    di Arol-brill,Vice-prsidente de Cese

    dith Arnoult-Brill, vice-prsidente du Cese, a t prsidente du CNVAde 2000 2011. Elle revient sur l'volution d'un Conseil qui, s'il n'a jamaist prsent comme une instance de dialogue civil, a pu s'inscrire dansun tel processus.

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    20/4820 la vie aociative mai 2012 18

    Ce qui amne la crationde la CPCA ?

    C'est surtout de cette posturedu CNVA que dcoule l'articu-lation ncessaire avec la CPCA.Rassembles dans la CPCA, lescoordinations associatives gnrent

    une orme de reprsentation dumonde associati transversale plusieurs secteurs d'intervention :la jeunesse et l'ducation populaire,le sport, la solidarit internationale,le tourisme social La lgitimitde la CPCA porter une paroleassociative construite repose surcette ralit. Elle lui permet de or-muler une opinion collective surles mesures prises ou les politiquesmenes par les pouvoirs publics.

    Elle peut s'appuyer sur les travauxdu CNVA pour porter des reven-

    dications associatives. Ainsi, l'avisremis par le CNVA en 2007 sur lacommande publique visant sur leond suggrer un mode de rgula-tion des relations entre les associa-tions et les collectivits publiques,spcique aux activits non lucra-tives, a pu constituer un outil queles associations, via la CPCA, ontpu s'approprier.

    Ainsi le dialogue CNVA/CPCA nepeut qu'enrichir la parole des asso-ciations et aciliter la promotionde propositions qui intressent lesassociations dans leur diversit.

    Comment le CNVA a-t-ilvolu ?

    Ces missions sont quasiment res-tes les mmes. Mais un dcret de

    mai 1996 prcise que le Conseildonne son avis sur les projets detextes lgislatis et rglementairesqui lui sont soumis, ce qui supposequ'il doit tre saisi. Dans les an-nes 1990, les mthodes de travailvoluent. Des groupes de travail mixtes sont orms qui com-

    prennent des membres associa-tis du CNVA et des reprsentantsdes ministres. La prsidence estcone un reprsentant associatidu CNVA et la rdaction du rap-port l'administration. Le diagnos-tic est ds lors partag. Les propo-sitions valides sont consensuelles,mais les points de dsaccord sontconsigns dans le rapport. Cettemthode de travail, consacre par

    le dcret de mai 1996, a t unetape importante dans l'histoire du

    CNVA : elle a permis la porositdes cultures, le rapprochement despoints de vue de deux sphres quise connaissent mal, ce qui n'est pasngligeable. Des sujets importantssont alors traits : la situation desdirigeants associatis, les cons-quences de l'activit conomique,les agrments. Le statut de l'ins-tance, place auprs du Premierministre, permet la parole asso-ciative d'tre entendue direm-ment par le gouvernement.

    Que dire de sa composition ?

    De 59 membres, on est pass 70avec autant de supplants et 10 per-sonnalits qualies, soit un poten-tiel de 150 personnes en plnire ! Etcet aspect quantitati a laiss penserque le CNVA devait jouer un rle

    de reprsentation. Pour rsoudl'quation, il allait reonder l'idetit du CNVA autour de sa onctide consultation et d'expertise. C'le ond de la rorme qui a cond la cration du Haut Conseil vie associative (HCVA).

    La question de la composition termes qualitatis constitue namoins un vrai d. Il aut en eque le gouvernement comme associations comprennent que cecomposition doit tre en adqution avec les 11 onctions d'expetise dnies. Ce n'est pas gagn.

    Diriez-vous pour autantqu'il s'agit d'une instancede dialogue civil ?

    Les Assises nationales de la vassociative organises en 19avec l'appui du CNVA constuent un exercice du dialogcivil en grandeur relle. Lors la dernire Conrence de la vassociative en 2009, le HCVA a annonc comme une instance dialogue civil. Il reste cependan

    traiter au ond des modalits deconstruction du dialogue civil, qpermettent de dterminer les patenaires associatis ayant la lgimit y participer, reprsenla parole des associations dansdiversit. Le dialogue civil est umanire d'associer les citoyensl'laboration de la dcision pblique. Il est ond sur la capcit de la socit civile organisprendre la parole, intervenir s

    une ralit sociale Le CNVAt longtemps un ple d'clairades politiques publiques , il se tuait bien alors dans une dmarcde dialogue civil. Le HCVA constuera une charpente du dialogcivil, sans pour autant en avl'exclusivit.

    Le statut du CNVA, plac auprs du Premierministre, permet la parole associative d'treentendue diremment par le gouvernement.

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    21/48 18 mai 2012 la vie aociative

    Comment s'est construit

    le processus du Grenelle

    de l'environnement ?

    Il aut revenir sur le contexte : laproblmatique de l'environnementtait orte avec la sortie du lm d'AlGore1 en 2006 et les dbats organi-ss autour du climat. Les associa-tions environnementales veulentalors aire un coup , s'inviterdans la campagne prsidentielleen aisant signer un pacte colo-

    gique aux candidats. La mayon-naise prend et Nicolas Sarkozy,une ois lu prsident, convoque leGrenelle.

    l't 2007, les groupes de travailsont runis (350 personnes) ; c'estla partie merge de l'iceberg, la

    1. Une Vrit qui drange (An InconvenientTruth), ralis par Davis Guggenheim.

    seule sur laquelle on communique.Puis viennent les tables rondesbeaucoup moins visibles, puis lescomits oprationnels chargs deprciser les propositions avant lestravaux parlementaires.

    Qui y participait ?

    La premire phase constitue unerelle innovation institutionnelledu ait d'un onctionnement en

    collges, dans lesquels sont repr-sents les dirents corps indpen-damment de leur poids. Ce systmede collges est un progrs, d'autantque c'est la premire ois que l'onrunit autour d'une table les col-lectivits territoriales, les repr-sentants des entreprises, ceux dessalaris, des associations environ-nementales et l'tat.

    Daiel bo,Directeur de recherche au Cevip

    Daniel Boy est directeur de recherche au Cevipo, Centre de recherchespolitiques de Sciences Po. Il a notamment tudi le Grenelle del'environnement, premire vritable consultation publique l'chellenationale. Il en tire des enseignements pour le dialogue civil.Pour la CPCA, le Grenelle de l'environnement et la gouvernance cinqqu'il a mise en place doivent tre considrs comme un lment d'undialogue civil plus vaste. La CPCA porte nanmoins un regard nuancsur la reprsentation associative au Grenelle de l'environnement dans lamesure o des pans entiers du mouvement associati impliqus dans ledveloppement durable et vecteurs citoyens des volutions portes parle Grenelle en ont t carts.

    u el proce e ocioeqe 'il e por poliiqemeEntREtIEn AvEC DAnIEL bOy

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    22/4822 la vie aociative mai 2012 18

    Les associations participantes ontt slectionnes arbitrairement.Si les onctionnaires taient d'assezbonne oi, cette slection a singu-lirement manqu de transparence.Or l'absence de rgles permet ladomination. Elle laisse penser quecertaines associations sont plusreprsentatives que d'autres, no-tamment celles proches de NicolasHulot, plus visibles politiquement.

    Le problme pos par ce processusest l'afux de candidats ds lors queles associations l'estiment intres-sant, quelle qu'en soit la raison : entermes d'image, de reconnaissanceinstitutionnelle, de possibilit de

    peser dans le dbat ou de aire vo-luer la lgislation.

    Que penser du processus ?

    Si toutes les propositions concrtesont pu tre dbattues, on peuttouteois s'interroger sur le rledes excutis (prsidents, vice-prsidents et rapporteurs), sur lanon-conormit des rapports aux

    termes du dbat. la dcharge desrapporteurs, les runions se sontenchanes et il leur a allu tretrs rapides dans leur retranscrip-tion. Mais presque tous taient desonctionnaires. La gouvernance duGrenelle est reste dans les mainsde l'tat, ce qui constitue une ai-blesse dans ce dispositi, un bmolau succs de l'entreprise.

    Les dbats sont ensuite passs moulinette des tables rondes, pu celle des comits oprationn(Comop) o la rgle de la collgiat n'a pas t respecte. On retouralors au mode tatique de dcisisous la direction des grands cor

    de l'tat, plus opaque, en dehors processus reprsentati ; ce qui poproblme ce stade car les Comont t chargs de prparer les lodbattues au Parlement.

    Que retenir ?

    Le Grenelle a t vcu de manitrs motionnelle. Les associatioimpliques gardent un souven

    positi de cet vnement car, poune ois, on les coutait. Elles ne rmettent pas en question le procesus, mais regrettent qu'il ne se spas concrtis dans la rgulatioIl n'y a pas eu prennisation processus, aucun comit de surel, ni de stratgie gouvernemetale de dveloppement durable. vrai daut du Grenelle tient que la traduction des dbats en

    (Grenelle II) a t trs dcevanpour les participants (et c'est euphmisme) du ait de l'inexipolitique prise.

    Quelle leon en tirer pour le

    dialogue civil ?

    Un tel processus ne peut onctioner que s'il est port politiquemeQuand il y a respect de l'esprit dbrati, a marche. Dans le cas Grenelle, le portage politique a ort, mais intermittent avant s'eondrer ds lors que le gouvenement a tourn casaque. Il y avpourtant disponibilit des departies, les mentalits avaient susamment volu pour qu'elles rencontrent, mais le cadre instittionnel n'a pas t trouv.

    Pour aller plus loin

    Le Grenelle de l'environnement : une novation politique ? ,Revue ranaise d'administration publique, L'administration audf du dveloppement durable, n 134, aot 2010, p. 313-324.

    Lire l'avis du Cese consacr au bilan du Grenelle de l'environnement :http://www.lecese.fr/travaux-publies/bilan-du-grenelle-de-l-environnement-pour-un-nouvel-elan

    La gouvernance duGrenelle est restedans les mains del'tat ce qui constitue

    une aiblesse dans cedispositi.

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    23/48 18 mai 2012 la vie aociative

    Poi d'acoppeme

    En Europe comme en France, les citoyennes et lescitoyens ne s'y retrouvent gure dans les institutionspolitiques. Ce sentiment de dance, proond quand ils'agit de l'Union europenne, pourrait mme se trans-ormer en accusation d'illgitimit. C'est pourquoi l'chelle europenne, les autorits publiques gagneraient

    mettre en place des gouvernances plus participatives.L'article 11 du trait de Lisbonne ait du dialogue civilun principe ondamental de la gouvernance de l'Unionet recommande de dnir un cadre structur pour undialogue ouvert, transparent et rgulier avec les organi-

    sations reprsentativeset la socit civile .

    Mais, le dialogue civileuropen achoppe : mo-dalits de consultation

    publique trs lourdes,reprsentation associa-tive assez aible (di-cults d'organisation demouvements associa-tis europens, absenced'un statut d'associa-tion europenne acili-tant l'identication desacteurs susceptibles departiciper au dialogue

    civil). Car comme le rappelle Jean-Marc Roirant, prsident du Groupe des associations au Conseil conmique, social et environnemental, qui dit participatiodit rle des corps intermdiaires et un dialogue ci norm et prcis institutionnellement au-del deconsultation du seul Comit conomique et social (CEeuropen. Or le trait de Lisbonne ne dnit pas les orgnisations de la socit civile. Et les opposants au dialog

    civil d'invoquer la reprsentativit pour lgitimer leuatermoiements, voire le rejet d'une consultation assoctive . L'adoption d'un statut de l'association europenavoriserait un dialogue avec la socit civile organise

    Dialoge ciil erope : iace e oil

    Le dialogue civil europen se cantonne donc aux consutations publiques via le site votre point de vue sl'Europe 1, quelques consultations sectorielles et saisine du CES europen. Instaur par le Trait de Rom

    pour consulter les groupes d'intrts conomiquessociaux sur toute question relative la constructidu march unique, le CES europen a vu son chamd'action largi par le trait de Maastricht : politique sciale, cohsion conomique et sociale, environnemeducation, sant, etc. Il est compos de trois groupeemployeurs, employs et activits diverses dans lequsigent des organisations de la socit civile autres qles partenaires sociaux. La constitution de ce troisim

    1. http://ec.europa.eu/yourvoice/index_r.htm

    Le dialoge ciil e Erope, oil d'appropriaio de lacorcio eropee ?

    La construction de l'Union europenne sur un projet essentiellementconomique, la mise en place d'un march unique, a longtemps tenu lesassociations l'cart. Les choses changent pourtant, ne serait-ce quepar la prise de conscience des lus europens du poids conomique etsocial de ces structures, et du rle qu'elles pourraient jouer pour rendreplus lgitime la construction europenne. Est-ce dire pour autant que

    les associations sont devenues des actrices essentielles d'un dialoguecivil europen pourtant institu par les textes ?

    la construction Du Dialogue civil

    La pratiquedu dialoguecivil en Europeest tropdpendantedu bon vouloirdes directions

    gnrales de laCommission.

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    24/4824 la vie aociative mai 2012 18

    groupe interroge : les tats-membres ont tendance yinscrire des personnes qui relvent normalement desdeux premiers groupes. Un Groupe de liaison entrele CES europen et les rseaux associatis europens(une vingtaine ce jour) a t cr pour pallier l'insu-sance de la prsence associative dans l'institution. Mais l'impact des avis du CES europen sur les propositionsde la Commission est aible , reconnat AlexandrinaNajmowicz, coordinatrice du Forum civique europen2.

    A o oloir de erice

    Pour elle, la pratique du dialogue civil en Europe esttrop alatoire, trop dpendante du bon vouloir des tech-niciens des directions gnrales (DG) de la Commission.Il n'existe aucun cadre transparent, uni de consulta-tion. La Commission s'adresse qui elle veut, et mlangegroupes experts, lobbies, associations et ONG .

    Quant aux consultations publiques, le constat est amer : de pure orme , dplore Alexandrina Najmowicz. Lesmodalits des consultations publiques sont galement en

    2. Ce rseau runit 100 associations europennes autour d'un objecti encourager, aciliter une appropriation civique et populaire de l'Europepar les citoyens . Il coordonne l'Alliance europenne pour le statut d'asso-ciation europenne. www.civic-orum.eu

    cause : uniquement en anglais et dans des dlais partrop courts. La Commission ne laisse que trois moaux citoyens pour rpondre ; un temps durant lequles plateormes associatives doivent consulter tous leumembres nationaux. Or, contrairement au lobbying dentreprises, il n'existe pas de structure associative une au niveau europen comme peut l'tre la CPCA France , regrette Alexandrina Najmowicz. Ainsi, avis d'une organisation ont le mme poids que celle d'citoyen ou d'un lobby industriel.

    Jean-Marc Roirant va plus loin en soulevant le problmdu nancement. Car les consultations, la rdaction livres blancs ou verts, l'apport d'expertise supposent la disponibilit. Pour viter les micro-trottoirs et le rcours systmatique aux mmes autoproclams , l'Unieuropenne doit nancer la mise en rseau des organsations associatives, pour peu qu'elles soient repres. c'est ici qu'intervient le statut de l'association europenn

    Aociaio eropee : erpe de me

    C'est de l'histoire ancienne, on peut remonter trenans en arrire , s'amuse Alexandrina NajmowiArrive sur le bureau de la Commission europenen 1991, la question de l'association europenne e

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    25/48 18 mai 2012 la vie aociative

    retire de l'agenda en 2005, du ait de l'opposition decertains pays craignant un statut supranational.

    En 2010, les discussions autour de l'acte pour le marchunique sont une nouvelle opportunit puisque l'acte envi-sage la question de l'entrepreneuriat social. Aprs un ortlobbying de l'EASEA (European Alliance or the Statuteo the European Association3), une dclaration crite por-te par quelques dputs obtient la majorit des voix etdevient un acte ociel du Parlement, avec transmission la Commission europenne. Sau que le Secrtariatgnral de la Commission est ortement oppos l'idedu dialogue civil ; toute ide connexe est donc rejete .Les associations ont touteois obtenu le soutien du com-missaire europen en charge du march intrieur qui lesintgre dans la proposition en aveur de l'entrepreneuriatsocial mais le statut reste trop dpendant de l'agendadu Conseil de l'Europe sur lequel elles ont peu de prise.

    De ejex e aer d dialoge ciil

    Pourtant, la question de la reprsentativit des organisa-tions appeles participer au dialogue civil serait d-nitivement rgle par l'adoption du statut de l'associationeuropenne . Les enjeux sont essentiellement politiques ; il s'agit de crer une culture politique europenne com-

    3. Elle rassemble une quarantaine d'associations europennes, de rseauxet de plateormes qui militent pour l'adoption d'un statut europen pourles ondations, les mutuelles et les associations. http://www.easea.eu/

    mune . Ce statutpermettrait les syner-gies transnationaleset la projection descitoyens dans un pro-jet transnational. Ilaidera aussi l'iden-tication des acteursdu dialogue civil euro-pen, tels que dsignsdans l'article 11 dutrait de Lisbonne ,explique AlexandrinaNajmowicz, pourajouter immdiate-ment : On ne pourrapas aire l'conomied'une discussion surles critres . Mais les

    associations peuvents'appuyer sur ceux labors par le CES europen dans avis de 2002.

    Ce statut assoira enn la reconnaissance de la onctiocivique des associations, au-del de leur poids conmique et social. Il est donc temps pour l'Europe de sorde la seule perspective conomique pour construire projet politique plus dmocratique. Et les associatiopeuvent y contribuer.

    Modles europens ?

    Si la Charte des engagementsrciproques signe en 2001 parle gouvernement ranais et lesassociations reprsentes ausein de la CPCA pourrait ser-vir de cadre au dialogue civil,de tels accords rgissent dj lesrelations tat/organisations de la

    socit civile dans d'autres payseuropens1. Le plus connu estsans doute le Compact bri-tannique qui instaure des codesde bonnes pratiques sur le mode

    1. Voir tude et Documents, mai 2008 :http://cpca.asso.r/actualite/les-dossiers-de-la-vie-associative/mai-2008-etudes-et-documents-4-les-relations-associations-etat-dans-leurope-des-27

    de subvention, les consultationset la mise en place des politiques,sur l'inclusion des minorits eth-niques, sur les groupes commu-nautaires. Les engagements prispar le gouvernement peuventtre invoqus comme argumentpour la dense des associations.

    Le degr de contrainte est dis-tinct en onction des pays : d'unprogramme juridiquementcontraignant au Pays de Galles une plus grande souplesse dansla plupart des pays. Les outilsmis en place vont de la consul-tation la codcision, voire lacogestion. Le Programme decoopration croate instaure ga-lement des codes de bonnes pra-

    tiques pour l'allocation des res-sources aux associations et pourles consultations sur l'adoptionet l'application des lois et rgle-ments administratis. Les asso-ciations sont aussi consultes surl'valuation de l'action gouver-nementale. En Lettonie, le dia-logue civil est ouvert dirents

    chelons par le biais de pro-tocoles de coopration entreONG et instances publiques (duconseil municipal aux cabinetsministriels). Les associationssont engages dans les proces-sus de dcision et mettent despropositions examines par lePremier ministre.

    La question dela reprsentativitdes organisationsappeles

    participerau dialoguecivil seraitdnitivementrgle par le statutde l'associationeuropenne.

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    26/4826 la vie aociative mai 2012 18

    construire Des interDpenDances

    Les conseils conomiques, sociaux et environnementaux

    rgionaux (Ceser) sont issus d'une volont d'associerd'abord les acteurs socioproessionnels puis associatisaux actions publiques engager dans les dirents ter-ritoires. Cette collaboration a t initie avant mme queles rgions existent en tant qu'entits administratives. partir de 1972, date de cration des rgions administra-tives, des comits conomiques et sociaux sont placsauprs du pret de rgion. La loi de dcentralisation de1982 transormant les rgions en collectivits territo-riales part entire a galement permis que ces CESR(devenus conseils) soient placs sous l'autorit des prsi-

    dents de rgion avec droit d'auto-saisine, ce qui a consi-drablement renorc leur rle.

    ue aoomiaio progreie

    Ds 1972, les acteurs associatis ont t associs cesorganes et leur poids a progressivement augment. Suiteau Grenelle de l'environnement, les CESR se sont mis auvert en 2010 en devenant Ceser (conseils conomiques,sociaux et environnementaux) et en intgrant en 2011de nouveaux reprsentants environnementaux, dontquelques associatis.

    Sans doute plus proches que le Cese national des acteursdcisionnaires, les Ceser sont reconnus pour leur rled'expertise et leur poids dans les grandes orientations d-nies par les conseils rgionaux, notamment en termesde transport ou de dveloppement conomique.

    Dans le sillage des Ceser, la loi d'orientation pour l'am-nagement et le dveloppement durable du territoire du25 juin 1999, dite loi Voynet , des conseils de dve-

    loppement ont t crs au niveau des agglomratio

    et des pays, dont les membres, tous bnvoles, sont issde la socit civile. Aujourd'hui, la Coordination natinale des conseils de dveloppement estime que sur 480 conseils identis, 350 sont actis. Au-del de leutravaux, ces instances mritent d'tre davantage connuet reconnues comme une orme institutionnalise d'iterlocution entre les pouvoirs publics locaux et la socicivile.

    De aemle pl colaieqe dliraie

    En ralit, la mconnaissance de ces instances est sadoute lie une certaine habitude d'une dmocralocale dans laquelle la consultation est plus pisodiquplus inormelle, plus bilatrale que vritablement dlibrative ou participative. Partant de ce ait, certaines expriences ont nanmoins permis dans certains territoirque les associations soient intgres dans un disposispcique de co-construction des politiques publiques

    Ainsi, les CPCA rgionales ont obtenu dans quelqu

    rgions la signature d'une Charte rgionale des engagments rciproques dnissant les rles de l'autorit pblique, lgitime de par son lection, et des mouvemenassociatis rgionaux qui structurent et impulsent dynamiques sur le territoire. Au-del, certains dpartments se sont engags dans des politiques en aveur dereconnaissance de la vie associative comme une actriincontournable d'une dmocratie vritablement partipative. C'est le cas par exemple dans le dpartement dCtes d'Armor (voir page suivante) ou dans la rgiChampagne-Ardenne.

    Dialoge erriorial

    Le dialogue civil ne s'arrte pas une vision jacobine de la dmocratie.Bien au contraire, c'est au niveau local et au niveau territorial que lesassociations ont d'abord t reconnues comme actrices du dialoguecivil. Progressivement, l'institutionnalisation de ce dialogue civil se meten place et certaines expriences rgionales semblent particulirementintressantes pour permettre d'envisager des nouvelles ormes dedialogue civil au niveau national.

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    27/48 18 mai 2012 la vie aociative

    Pourquoi avoir mis en place

    le CDVA ?

    Le dpartement des Ctes d'Ar-mor participe nancirement au

    dveloppement de la vie associa-tive, par le biais de conventionspluriannuelles d'objectis, et saproessionnalisation nous nan-ons ainsi 400 emplois associa-tis locaux. Notre dpartementconsacre 35 euros/habitant/an lavie associative, un ratio nettementsuprieur la moyenne.

    Les associations relvent de la

    dmocratie au mme titre que ladmocratie sociale ou locale. Ellesmettent en relation des hommeset des emmes, elles expriment deschoix, ont des propositions utiles.Les associations sont devenues des services publics ds lors qu'ellesagissent dans la sphre publique.Ds lors, nous avons intrt dve-lopper un partenariat respectueuxde leur identit, de leur proonde

    autonomie, garanti par exemple pune convention librement consetie sur des objectis partags.

    Comment intervientle CDVA dans votre politique

    associative ?

    Pour aire onctionner la dmocrtie, il aut tre raliste : on ne perunir tous les habitants ensembMais il aut runir tous ceux qui rprsentent nos territoires, les lbien sr mais aussi les syndicats

    En 2007, le conseil gnral des Ctes d'Armor met en place le Conseildpartemental de la vie associative (CDVA) avec pour objecti de promouvoir un outil de dmocratie participative . Il se dnit comme une instance consultative et de dialogue et comme un partenairedans la mise en uvre des politiques publiques. Un dispositi au servicede la dmocratie de proximit chre Claudy Lebreton, prsident duconseil gnral et de l'Assemble des dpartements de France.

    Il a rir o cex e celleqi repree o errioireEntREtIEn AvEC CLAuDy LEbREtOn

    Clad Lereo,Prsident du conseilgnraldes Ctes d'Armor

    Il est paroisdicile de partagerla responsabilit. Onest encore loin de laco-construction.

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    28/4828 la vie aociative mai 2012 18

    les associations. On doit accepteret encourager la parole critique desassociations, c'est une garantie dela dmocratie et de sa vitalit. Nousavons donc besoin d'instances dedialogue et de concertation. Nousavons touteois prr privilgierdes instances multiples (comit

    dpartemental du dveloppementdurable, de la solidarit interna-tionale, etc.) pour dialoguer avecles associations plutt que de crerun Conseil conomique, social etenvironnemental dpartementalunique.

    Le CDVA a t cr pour que cha-cun puisse tre consult sur lessujets du moment ; c'est un lieu

    ressource, d'change et de conron-tation. En France, on parle plus deconsultation que de ngociation.L'esprit de ngociation impliquedu temps et suppose une vritableconrontation des ides puis lecompromis. Le CDVA est pensdans cet esprit, il donne un cadre la ngociation.

    Comment ont t

    dsign-e-s ses membres ?

    Nous voulions un processus la ois original et dmocratique.Toutes les associations subven-tionnes ont t sollicites pourprsenter des candidats et par-ticiper leur lection. 60 repr-sentants ont ainsi t dsigns,mais qui provenaient surtout desgrands rseaux associatis. Dansun deuxime temps, l'annoncedes lections au CDVA s'est aitepar voie de presse pour permettrela participation de toutes les asso-ciations, y compris les plus petites.

    Le processus n'a pas t simple ; trouvera toujours des associatiopour dire que ce n'est pas parapour contester sa reprsentativiMais cette lection est un sigrel de dmocratie. Le CDVA, c'la transparence intgrale, tous secteurs s'expriment devant

    autres ; c'est un exercice nouveaplus compliqu, qui suppose pexemple de bien mesurer le poides mots.

    Il aut aussi que les lus et les assciations apprennent mieux trvailler ensemble. Des lus ont pexemple reus que des assoctions participent leurs commsions. Il est parois dicile de pa

    tager la responsabilit. Si les lsont d'accord pour auditionner associations, on est encore loin la co-construction.

    Y tes-vous avorable ?

    Je suis convaincu de l'intrt la dmocratie participative. Mil aut accepter que ceux qui ot dsigns au surage univer

    assument le pouvoir, en relatipermanente avec les citoyens.

    La dmocratie participative n'pas qu'une question de procdures, mais un tat d'esprit. Il na pas de loi du Saint-Esprit qrglerait la participation. C'estnous de construire notre mondEt l'une des voies passe bien ples associations pour peu qu'elacceptent leur tour que les modd'engagement, des jeunes notamment, voluent. C'est une questide bon sens. Une construction pemanente.

    L'annonce deslections au CDVAs'est aite par voie de

    presse pour permettre

    la participationde toutes lesassociations, ycompris les plus

    petites.

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    31/48 18 mai 2012 la vie aociative

    L dlgu vl pu ps uss s'l s vu vu mm xlus, mm sul u pssbd'u dm plus ppv plus dlbv.

    Pu gg lgm, l dlgu vl d s'ul

    sulm v l dm psv ms

    glm v l dm d sl ls us

    ms d l dm ppv.

    E, pu u p ls puvs publsmm u luu dbl, l muvm ss-

    pu ps l'm d l d d

    s pp psv.

    Cs s dmss ls v l dlgu sl, v l

    pp y l psv ssv

    ppss mm ls ls du sus du dlgu vl.

    Dialoge ciil

    Corire deierdpedace

    18 mai 2012 la vie aociative

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    32/4832 la vie aociative mai 2012 18

    Lgiimi ioriqe

    Les organisations syndicales et socioproessionnellesont t reconnues en France en 1884 pour reprsenterles intrts individuels et collectis des salaris et desentreprises, et ngocier en leur nom. Le code du travailleur conre ds 1910 un pouvoir de ngociation et decontractualisation. partir de 1945, les syndicats inter-viennent dans la ormation proessionnelle, l'emploi, la

    protection sociale et le logement par le biais de commis-sions paritaires ou d'instances de cogestion. Le dialoguesocial, inscrit dans la loi, dsigne les relations entre untat rgulateur et employeur, et les partenaires sociaux(syndicats de salaris, organisations patronales), maisaussi entre les partenaires sociaux eux-mmes. Il seconstruit sur l'inormation, la ngociation pour abou-tir l'accord entre des acteurs clairement dnis dontla reprsentativit est galement xe par la loi ; il a uneorce contraignante.

    Le dialogue civil pourrait se dnir en creux : il s'tablitentre les autorits publiques et la socit civile organise,sur les sujets de socit hors du monde du travail, desdomaines d'intervention des associations, de l'action so-ciale au dveloppement durable, de la sant la densedes droits, du sport aux discriminations Ses proc-dures ne sont pas codies et vont de la gouvernance cinq, exprimente lors du Grenelle de l'environnement(dans laquelle les partenaires sociaux taient d'ailleursreprsents), aux conseils consultatis instaurs par di-vers excutis, jusqu' la Conrence nationale de la vie

    associative. Pour Mlanie Gratacos, conseillre au Ce il gagnerait tre prcis et norm, car il constitue umoyen d'clairer et d'enrichir la dcision publique .

    nceaire afroeme ?

    Mais ces dirences de statut contraignent-elles l'arotement, la mise en concurrence des deux dialogues da

    le onctionnement dmocratique ? Certaines ractiosyndicales pourraient le laisser penser, ce dont se plgnait Jean-Marc Roirant, lors d'un colloque organis pla CGT-Force ouvrire sur les relations entre syndicatconomie sociale1 : Les associations sont souvent vucomme les complices du gouvernement qui souhaitersubstituer le dialogue civil au dialogue social. Une asstion qu'il rutait ; les associations savent rester [leuplace : il y a des questions qui se rglent au sein des syndcats, mais comme les syndicats sont lgitimes intervenen dehors de l'entreprise stricto sensu, les associations o

    vocation tre entendues sur un certain nombre de sjets . L'institutionnalisation du dialogue civil constiturait-elle un danger pour le dialogue social ? C'est mconatre la ralit associative et ses aspirations. Cette craindes syndicats ne serait-elle pas le signe de leur ragilistion dans le dialogue social ces dernires annes, lors dbat sur la rorme des retraites notamment ?

    1. Quelles relations entre une organisation syndicale et l'conomiesociale, indpendance ou indirence ? , colloque organis par la CGTForce Ouvrire le 13 janvier 2011 Paris.

    Dialoge ciil e dialoge ocial :joer la complmeari

    Dialogue social et dialogue civil ne se conondent pas. Si le premierest codi, le second soure du manque de cadre institutionnel quilui conrerait une lgitimit quivalente au premier. Et pourtant, lessyndicats ont pu craindre l'mergence d'un nouvel acteur dans leonctionnement dmocratique au point de ne pas tre de erventssoutiens du dialogue civil ; et les associations ont eu beau jeu en retourde railler la aiblesse de la syndicalisation et de s'enorgueillir de leurdynamisme. Au-del des querelles de chapelle, n'y a-t-il pas une place

    pour la complmentarit l'heure o la crise sociale s'enlise ?

    Dialogue civil : construire Des interDpenDances

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    33/48 18 mai 2012 la vie aociative

    Alors que certains corps intermdiaires, syndicats etassociations, ont t brocards par certains respon-sables politiques, n'ont-ils pas plutt intrt rchirensemble ? Certaines centrales syndicales acceptentvolontiers de travailler avec des associations, mme surdes questions qui concernent la qualit de vie au sein del'entreprise. La CFDT2 et la CFTC ont t les premires ;depuis peu, on a vu la CGT s'acher aux cts des asso-

    ciations pour dendre les droits des travailleurs sanspapiers . Les points de rencontre sont sans doute plusnombreux aujourd'hui.

    Coergece

    y regarder de plus prs, des convergences peuvent seaire sur des objectis communs : dveloppement territo-rial, dense des droits ondamentaux, problmes sani-taires, action sociale. Les mobilisations peuvent se croi-ser, voire se renorcer. Le dialogue social pourrait ainsis'emparer des questions environnementales, longtempsddaignes sous couvert de dense de la production etde l'emploi industriels. Les centrales syndicales pour-raient galement s'inspirer des pratiques dveloppes pardes associations en matire de plaidoyer. Les associationspourraient s'appuyer sur les syndicats pour aire aboutirleurs revendications, notamment au sein des entreprisespar la voie d'accords collectis 3. La structuration et les

    2. c. interview de Marcel Grignard, page 34.

    3. Rapport de l'Ena sur la dmocratie sociale renouvele , 2004.

    limites du dialogue social pourraient galement servir base de rexion l'instauration du dialogue civil.

    Pour Jacqueline Doneddu, conseillre au Cese apparnant au Groupe de la CGT, la convergence doit se ai l'chelle territoriale, car les territoires sont devenle lieu d'laboration de stratgies conomiques et sciales, de construction de l'action publique : la orm

    tion et l'emploi, les conditions de travail, les transporla sant, l'environnement . Associations et syndicpourraient ainsi rchir aux rapports entre citoyenemploi, travail et lieux de vie . Jacqueline Doneddu slue aussi le principe de gouvernance cinq (tat, colectivits locales, patronat, organisations syndicales salaris et associations) rsultant du Grenelle de l'envronnement comme participant l'amlioration dmthodes de concertation des organisations de la soct civile . Elle se demande si ce principe peut inspirdes volutions dans la composition des instances de dlogue civil [et sur] leur gouvernance .

    La dmocratie a tout gagner renorcer toutes les intances de consultation, voire de ngociation, les mulplier pour lgitimer davantage l'intervention publique.

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    34/4834la vie aociatiemar 2012 17

    La complexi ociale eelle q'ac acer e pepredre corir le campEntREtIEn AvEC MARCEL GRIGnARD

    La socit civile a-t-elle

    un rle jouer dans la

    dmocratie ?

    La rponse est vidente dans un

    monde o l'interdpendance entreles entreprises, les populationset les institutions de toute natureest orte, o le rle de l'tat est repenser pour construire le aireensemble . La dmocratie ne peutse restreindre au seul surage.L'organisation de la socit civilepermet de aire vivre la dmocra-tie ; on ne peut se passer des corpsintermdiaires. S'il n'y a pas dedbat des politiques avec la socitcivile, comment aire avancer lasocit ? Comment mettre en routedes acteurs sociaux s'ils ne sont pasimpliqus dans la dcision ?

    Quel rle attribuer

    au dialogue civil ?

    Il y a une complmentarit vi-dente entre dialogue civil et dia-

    logue social pour une raissimple : la complexit sociale telle qu'aucun acteur ne peut prtendre couvrir seul le champ. Lsyndicats sont trs prsents dans

    grandes entreprises, un peu dales moyennes, presque absendans les petites ; les salaris les plprcaires sont en dehors du syndcalisme. ATD-Quart Monde, pexemple, prend en charge des pesonnes que les corps constitus voient jamais.

    Les syndicats doivent aire l'ort de mesurer leurs limites,

    endroits o ils n'agissent pas sveulent dendre une vision du scial dans une perspective globaSur certains sujets, d'autres acteuont une expertise plus orte. CFDT travaille avec France NatuEnvironnement (FNE) sur l'enronnement. La comptence celle-ci a mis en vidence des prblmatiques que les syndicats voient pas de cette manire par

    Alors que les syndicats et les associations sont les uns et les autres descorps intermdiaires, il est courant de les opposer, d'en aire des acteursconcurrents du dialogue civil organis. Pour Marcel Grignard, secrtairenational de la CFDT (Condration ranaise dmocratique du travail),l'heure est plutt la complmentarit.

    Si on veut porterdes remdes aux

    situations socialesanormales, il autconstruire des

    passerelles entredialogues socialet civil.

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    35/48 17mar 2012la vie aociatie

    que, dans leur approche de l'int-rt gnral, les consquences envi-ronnementales de l'activit de l'en-treprise ne sont pas abordes sousun angle prioritaire, au contraire

    de FNE.

    Et il n'y a pas de conusion desrles entre dialogue social et dia-logue civil. Mais si on veut porterdes remdes aux situations so-ciales anormales et aboutir desrormes proondes, il aut des pas-serelles. Elles se construiront surnotre capacit collective dresserun tat des lieux. Ce qui suppose

    de prendre le temps du diagnostic.On peut regretter que, dans notrepays, la culture de l'valuation soitembryonnaire. Il y a un lien ort organiser entre tous les acteurs dela socit civile pour aire avancerce diagnostic et valuer des solu-tions respectueuses de la pluralitdes acteurs et des bnciaires. Ily a une ncessit absolue recher-cher la coopration, aire en-

    semble mme si les proccupationssont direntes. Les syndicats nedoivent pas craindre cette conron-tation, elle les era progresser.

    Faut-il institutionnaliserle dialogue civil ?

    Oui et non. On peut prendrel'exemple du Grenelle de l'environ-nement. Le travail des cinq partiesprenantes a montr tout l'intrt institutionnaliser le dialoguecivil. Mais on peut galement tirerdes enseignements du dialoguesocial qui a bien du mal adapter

    le cadre existant aux volutionsde la socit. La socit civile doitconserver sa racheur et son dyna-misme, sa relation directe avec lesgens, son rle de poil gratter. Il estncessaire de ormaliser des lieuxd'changes o acteurs du dialoguesocial et civil s'exprimeraient surl'tat des lieux, les enjeux, avec desallers-retours organiss. Mais celane doit remettre en cause ni le man-

    dat des acteurs sociaux, ni le rdes politiques issus de la dmocrtie reprsentative.

    La lgitimit du dialogue civil d

    s'appuyer sur trois ondements :transparence et le compte rende ce que l'on ait et pour qui,transparence nancire et la reprsentativit (qui parle au nom de qet pourquoi lui). Depuis cinq ancette dernire est dbattue autode critres tels que le nombre d'ahrents ou les ressources (quantiqualit, provenance). Il ne s'agit pde ger le modle : la structuratidu dialogue civil pourrait tre riterroge tous les cinq ans.

    Marcel GrigardSecrtaire national

    de la CFDT

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    36/4836 la vie aociative mai 2012 18

    Qelle dmocraie paricipaie ?

    Comme le rappelle Daniel Boy, politologue au Cevipo, laFrance a une longue tradition d'administration consulta-tive, dans le secret de ses bureaux et sa guise, souventavec des partenaires consults pour leurs comptences ouce qu'ils reprsentent . Ds 1840, les enqutes publiques,organises autour des grands travaux d'amnagement duterritoire, aboutissent la Commission nationale desdbats publics (CNDP1) qui parie sur les associationsquand elle instaure un principe d'quivalence ; toutes ontla possibilit de s'exprimer dans un cahier d'actions etlors de dbats organiss , rappelle Daniel Boy.

    Le politologue identie trois temps du dialogue avecla socit civile : l'inormation, la consultation ( deman-der un avis, mais sans se lier ), la concertation avecl'intention d'aboutir une dcision plus co-prpare queco-construite , mais c'est bien le mode le plus aboutide consultation de la socit civile . Sant, environne-ment, urbanisation, etc., les instances de concertationexistent, mais onctionnent-elles ?

    L'illio de la colaio cioee

    Je pourrais parler des consultations sur la politique de laville, se rsumant trois questions aux rares habitants pr-sents, dont on n'attend mme pas de rponse , s'amuse unagent territorial ; mais les habitants ont t consults Autres gries : des conseils de quartier envahis par des rive-rains bien loin de la dense de l'intrt gnral, le consen-sus mou des jurys citoyens , des participants retour-ns par l'intervention d'experts ou d'lus charismatiques.

    1. www.debatpublic.r

    L'omniprsence des associations est galement dcrie. U

    lu parisien dplore l'absence de vrais usagers dans dcommissions phagocytes par des associations. Un aula logique corporatiste d'associations vieillissantes. Utude sur la participation des usagers citoyens la prise dcision en sant2 rvle un autre travers : la aiblesse nombre de bnvoles pour des instances trop nombreusavorisant le dveloppement de positionnements d'usgers proessionnels ou de patients sachants .

    quoi s'ajoute l'ingalit des reprsentations : les classmoyennes, voire les hommes bac + 5, sont toujou

    majoritaires au dtriment des plus jeunes, des emmdes plus pauvres, carts de ces processus par la manimme dont ils sont conus.

    De ejex do

    Sauveur Fernandez, dans Les chausse-trappes de dmocratie participative 3 revient sur ces exprimentions. Il relve l'utilisation pragmatique de la dmocraparticipative par le pouvoir pour redorer l'image du potique et enrayer la baisse de la participation aux votes.

    Pour Mlanie Gratacos, conseillre au Conseil conmique social et environnemental (Cese) du groupe dassociations, la dmocratie participative reste cantone au discours, il n'y a pas d'inuence de la socit civsur l'action publique . Pour Daniel Boy, les dbats pblics la ranaise sont inoprants par manque de rglation, et d'objet destin en sortir. Ce que conrm

    2. Pour un dbat sur la sant plus acti , Plante publique, pour lecompte du ministre de la Sant, 2011.

    3. Interview sur www.econovateur.com

    Dialoge ciile dmocraie paricipaie

    l'heure o certains responsables politiques reprochent aux corpsintermdiaires de consquer la parole des Franais , la question de laparticipation des citoyens non organiss l'laboration des politiquespubliques n'est pas anodine. Au-del du dialogue civil, comment articulerla participation des mouvements organiss et le retour des sans-voix dansle jeu dmocratique, dans le respect des engagements citoyens ?

    Dialogue civil : construire Des interDpenDances

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    37/48 18 mai 2012 la vie aociative

    Mlanie Gratacos : Les lus tiennent peu compte desrsultats de ces consultations, ni ne rendent compte desdcisions issues du dbat. La dmocratie participative nese era pas sans une volont politique relle, une clartdes rgles du jeu et de ce qui est produit.

    Iormer, ormer

    Daniel Boy constate : En France, on peine convoquerla socit civile au niveau national, contrairement auxconrences de consensus la danoise o on invente unesocit civile : une quinzaine de personnes tires au sortet ormes la question le temps d'un week-end au termeduquel elles sont consultes. La rilosit de certainesassociations ou de certains dcideurs ou dcideusesenvers ces mthodes tient l'incomptence supposedes proanes (les citoyens) trop mallables pour rsisteraux arguments du technicien. Pourtant, leur prsencedans la discussion est intressante, car ils bousculent

    l'ordre tabli et questionnent le ond de ces politiques.Sans proane, les mmes arguments tournent en boucle.Dpoussirer le dbat public passe par l'inormation pr-alable des participants , ajoute Daniel Boy.

    Mlanie Gratacos poursuit : Pour viter l'instrumenta-lisation, il aut se doter de garde-ous, nommer un tiersgarant de la neutralit des dbats, un comit scientiquepluraliste donnant des inormations aux citoyens, unehonntet et une transparence des dispositis de consul-tation. Le temps de l'inormation et de la ormation des

    citoyens, puis de la dlibration collective, empche lemallabilit.

    Miio cioee

    Les associations ont un rle jouer en contribuantl'mergence de citoyens actis, par l'ducation popula

    notamment. Elles peuvent aussi servir de point d'appaux dispositis de consultation citoyenne. Notre prod'ducation populaire est bien de avoriser la citoyennedans un monde complexe. Il aut rinterroger les outpour que monte l'empowerment, l'implication citoyennEt pour inormer ces citoyens sur des enjeux de sociles acteurs de la socit civile sont l. Le mouvement oganis peut avoriser l'appropriation des enjeux, donneproduire des avis , assure Ahmed El Khadiri, dlggnral d'Animaac.

    Les associations dsignes pour participer au dialogcivil doivent touteois viter de reproduire les travede la reprsentation qu'elles dnoncent : notabilisatioproessionnalisation, dtachement du terrain. PoJean-Pierre Worms : On ne peut pas se dclarer dedmocratie participative quand on laisse s'enoncer dal'invisibilit une partie de la population qui n'est plintresse par l'action politique orce d'en tre excluePorter la voix des sans-voix est aussi une des missiocitoyennes des associations.

  • 7/28/2019 LVA n18 - Dialogue civil

    38/4838 la vie aociative mai 2012 18

    Doer la parole cexqi e l'o paEntREtIEn AvEC AhMED EL KhADIRI

    Pourquoi la Fabrique

    citoyenne ?

    Elle trouve son origine dans deuxquestions qui animent constam-ment Animaac : celle de la partici-pation citoyenne, car la dmocra-

    tie ne peut se rsumer au bulletinde vote gliss de temps autre dansl'urne, elle doit tre un proces-sus continu ond sur le dialoguesocial, le dialogue civil et la dmo-cratie participative. L'autre ques-tion porte sur la place des jeunesdans le dbat public ; leur dicult se aire entendre explique, pourune part, leur aible implicationdans les dbats publics.

    Cette dmarche de dmocra-tie participative a ceci d'excep-tionnel, pour reprendre les motsde Loc Blondiaux [lors de sonintervention dans la Fabriquecitoyenne], que pour la premireois, c'est la socit civile qui s'enest empare alors que l'initiativerevenait jusqu'alors aux lus. PourAnimaac, la Fabrique citoyenne

    relve d'une orme politique d'itervention, de l'ducation la toyennet par la pratique.

    Ce type de dmarche

    onctionne-t-il ?

    Tous les citoyens, conditid'tre orms et inorms, peuveparticiper la dlibratioNotre dmarche relve de l'ansondage. Lors des sondages, ne se demande jamais si les pesonnes interroges ont comprissens de la question, ce qui n'empche pas les sondeurs d'amgamer les rponses et d'en tir

    conclusions et analyses. Novoulions aussi sortir du moddu tmoin prtexte ( je suchmeur donc on m'interroge sl'emploi ). Ces jeunes n'taiepas centrs sur leur intrt mbien sr l'intrt gnral.

    La Fabrique citoyenne a surtoait merger l'avis de citoyens pranes. Tout le processus consist

    Ahmed El Khadiri est dlgu gnral d'Animaac, un rseaud'associations tudiantes. Il revient sur une dmarche de dmocratieparticipative organise dans son mouvement, la Fabrique citoyenne,qui a runi 40 jeunes proanes invit-e-s aire des propositions auxcandidats l'lection prsidentielle.

    Notre rle estde permettre quetous les citoyenss'approprient lesdbats.

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    les rendre capables d'apprhen-der tous les enjeux. Le ntre taitjustement de dpasser cette inca-pacit suppose des citoyens seprononcer sur des sujets de socitcomplexes. 50 propositions ontainsi t labores puis prsen-tes lors du Forum national desinitiatives jeunes aux candidats

    l'lection prsidentielle. Ils taientappels y ragir ; une inversiondes dbats en quelque sorte.

    Pourquoi avoir cd la tribuned'Animaac des citoyensnon organiss ?

    On ne doit pas se comporter avecles citoyens comme les pouvoirs

    publics le ont avec les mouve-ments organiss. Tous ont unelgitimit s'exprimer et ces lgi-timits sont complmentaires.Nous vivons dans un monde com-plexe ; la diversit des processus dedlibration est souhaitable parcequ'elle multiplie les prismes. Nousavons besoin d'intelligence collec-

    tive pour ormuler une solution.

    Et nous voulions donner la parole celles et ceux qui ne l'ont pas. Onne peut pas penser que les jeunesc'est nous. Les tudiants ne repr-sentent que la moiti des jeunes, sion prend ceux impliqus dans desmouvements associatis, on peutencore en retirer 90 %. Quand on

    est dmocrate, on ne doit jampenser qu'il y a trop de citoyenLes bonnes ides ne s'embarassent pas des statuts, l'essentest qu'elles mergent. Notre rest d'alimenter le dbat public manire globale, permettre qtous les citoyens s'approprient dbats en ne dlguant pas le

    avis chaque ois.

    Amed El KadiriDlgu gnral d'Animaac

    La complexit des processus de dlibration estsouhaitable parce qu'elle multiplie les prismes.

    Pour aller plus loin

    Consulter le site de laFabrique citoyenne :http://fabrique-citoyenne.fr/

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    Qe cace le da aorde la repreaii ?

    1,3 million d'associations dont certaines revendiquent2 000 bnvoles, quand d'autres achent 2 000 sala-ris Comment choisir des interlocuteurs reprsenta-tis, aptes participer au dialogue parmi cette diversitassociative ? C'est la premire question pose et le pre-mier argument avanc par les opposants au dialogue ci-vil pour justier qu'un tel processus dmocratique tarde voir le jour. tel point que cela devient douteux.

    On prte aux associations les plus vilaines intentionsds lors qu'elles revendiquent de participer au dialoguecivil : vouloir enterrer le systme reprsentati, voiresubstituer le dialogue civil au dialogue social, avec lacomplicit des pouvoirs publics bien heureux de se d-barrasser d'un corps intermdiaire turbulent. Sau queles associations ont bien la distinction et qu'elles recon-naissent la lgitimit des uns et des autres. Mais elles ontaussi quelques arguments aire valoir pour demanderune place relle dans le jeu dmocratique.

    De la lgiimi aociaie

    Les associations sont des regroupements de citoyenneset de citoyens autour d'un projet ; ils y pratiquent au quo-tidien la dmocratie et le vivre ensemble. Pratiques ci-viques et lien social peuvent ainsi constituer une sourcede lgitimit. D'autres associations se sont cres autourd'un objet relevant de l'intrt gnral ; leurs adhrentset adhrentes, bnvoles, militantes et militants ont aitle choix de s'investir en aveur de la cit. Les dernires

    enn contribuent la mise en uvre de politiqupubliques (insertion, action sociale, lutte contre l'exclsion, amille, vie tudiante, sport, aide la personnculture, etc.). Et ces trois ormes ne sont pas exclusivl'une de l'autre. Si on ajoute leur implication sur les teritoires et la conance que les Franais et Franaises leaccordent, on se demande pourquoi elles devraient cartes du dialogue civil.

    Jean-Pierre Dubois1, lors de son audition par un dgroupes de travail de la dernire Conrence nationale

    la vie associative, armait : La prime au militantismn'est ni absurde, ni injuste []. L'exercice de la libed'association apparat comme l'acte politique par exclence, celui qui permet l'intervention de citoyens actdans le processus dlibrati. Et nombreux sont les oservateurs constater leur prsence dans des instancde dmocratie participative dans lesquelles la questide leur reprsentativit ne semble pas aire tant de cas.

    Por de crire de repreaiigoci

    Pour dith Arnoult-Brill, vice-prsidente du Consconomique, social et environnemental, institutionnliser le dialogue civil ne veut pas dire qu'on ge la ontion, mais qu'il aut organiser le dialogue avec des ateurs reprsentatis choisis sur critres tablis et connuLe l de la reprsentativit se tire un moment donnmais le socle est bien la lgitimit. Il aut reprer les ptenaires avec lesquels on discutera, et il s'agit orcme

    1. Prsident d'honneur de la Ligue des droits de l'homme.

    Repreaii : ax da ?

    Alors que la crise de la reprsentation est amorce, l'aspiration descitoyens et citoyennes au dialogue civil se renorce. Le mouvementassociati organis l'appelle de ses vux et la liste des points quirendent sa demande lgitime est longue. Oui, mais. Les opposants audialogue civil arguent d'une difcult choisir des interlocuteurs valables.L'argument de la reprsentativit ne relve-t-il pas du procs d'intention ?

    construire Des interDpenDances

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    du mouvement organis. Sau que les pouvoirs pu-blics, dans un dcret 12 juillet 20112, ont ait du nombred'adhrents la pierre angulaire de la reprsentativit desassociations environnementales. Ce qu'ont contest cer-tains mouvements associatis, dont la CPCA. D'autantque depuis quelques annes, direntes instances onttravaill sur l'laboration de ces critres pour contrerdnitivement l'opposition la participation associative

    au dialogue civil. L'un des groupes de travail pralable la tenue de la dernire Conrence de la vie associa-tive liste ainsi : l'engagement sur des objectis et des mis-sions d'utilit sociale et d'intrt gnral, des modes deonctionnement participatis garantis pour elles-mmeset pour les autres. Sont galement dsignes les asso-ciations qui ont co-labor la Charte des engagementsrciproques entre l'tat et les associations, celles qui l'ontsigne, et toutes celles qui contracteront avec l'tat ou lescollectivits territoriales sur cette base. Le groupe de tra-vail ajoute la couverture sectorielle, la capacit de conseil(d'expertise) ou d'animation d'un rseau. Le Comit

    conomique et social europen en 2002, puis le Conseilconomique social et environnemental en 2008, ont,quant eux, propos neu critres. On peut notammentretenir le caractre durable de la structure, une obliga-tion de rendre compte ( accountability ) ses adh-rents, l'indpendance vis--vis d'intrts extrieurs et latransparence des nances e