le lien entre le succès commercial du cinéma québécois m10223
DESCRIPTION
Success of film in French Canada, Quebec cinemaTRANSCRIPT
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UNIVERSIT DU QUBEC MONTRAL
LE LIEN ENTRE LE SUCCS COMMERCIAL DU CINMA QUBCOIS ET L'VOLUTION RCENTE DU SECTEUR DE LA DISTRIBUTION AU QUBEC
MMOIRE PRSENT
COMME EXIGENCE PARTIELLE
DE LA MATRISE EN COMMUNICATION
PAR
ANNE-CLAIRE VILLENEUVE
JANVIER 2008
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UNIVERSIT DU QUBEC MONTRAL Service des bibliothques
Avertissement
La diffusion de ce mmoire se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a sign le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles suprieurs (SDU-522 - Rv.01-2006). Cette autorisation stipule que cohformment l'article 11 du Rglement no 8 des tudes de cycles suprieurs, [l'auteur] concde l'Universit du Qubec Montral une licence non exclusive d'utilisation et de publication de la totalit ou d'une partie importante de [son] travail de recherche pour des fins pdagogiques et non commerciales. Plus prcisment, [l'auteur] autorise l'Universit du Qubec Montral reproduire, diffuser, prter, distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche des fins non commerciales sur quelque support que ce soit, y compris l'Internet. Cette licence et cette autorisation n'entranent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] [ses] droits moraux ni [ses] droits de proprit intellectuelle. Sauf entente contraire, [l'auteur] conserve la libert de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possde un exemplaire.
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REMERCIEMENTS
D'abord, j'aimerais remercier monsieur Gatan Tremblay, mon directeur de mmoire, pour son soutien plusieurs niveaux, particulirement lors des moments plus difficiles de
confusion thorique et mthodologique. Par le biais de cette recherche, il m'a appris faire
preuve de patience, de persvrance et m'a enseign comment trouver la solution mes
questions.
Je tiens galement remercier Julie-Armstrong Boileau, directrice des communications chez Christal Films, qui m'a si gentiment guide et aide dans mes dmarches de recherche
sur le terrain'. U va sans dire que je suis trs reconnaissante du prcieux temps que m'ont accord tous les distributeurs, producteurs et autres professionnels de l'industrie
cinmatographique. La gnrosit de leurs propos est ce qui a permis la ralisation de cette
recherche.
De plus, je veux remercier mes colocataires et ma fainille pour l'coute et Je soutien moral qu'ils m'ont offerts tout au long du processus de la matrise et lors de cette recherche.
r aimerais spcialement remercier ma mre, rviseure et traductrice, pour son aide sur Je plan
de la langue. Aussi, je tiens remercier Isabelle Lacroix pour son excellent travail de mise en page et de rvision.
Finalement, j'aimerais souligner J'aide de Carl Laperrire, prsent du dbut la fin. Il m'a offert son appui constant, me prodiguant ses encouragements, surtout durant les
moments plus difficiles et stressants. Sans lui, il n'y a aucun doute que la ralisation de ce
mmoire aurait t beaucoup plus ardue.
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TABLE DES MATIRES
RSUM vi INTRODUCTION 1
CHAPITRE 1 LA PROBLMATIQUE 4
1; 1 Prsentation du sujet 4
1.2 Formulation de la question spcifique 5
1.3 Hypothse intuitive 6
lA La mise en contexte 6
lA.l Les industries culturelles l're de la mondialisation 6 lA.2 L'volution de la filire cinmatographique et ses particularits 8
1. 5 L'tat de la question thorique Il
CHAPITRE II LE CADRE THORIQUE 16
2.1 Introduction 16
2.2 Le cinma: un art industrieL 16
2.3 Concepts l'tude 21
2.3.1 Le cinma 21 2.3.2 Le succs 23 2.3.3 La mondialisation 24
2.4 Reformulation de l'hypothse : 25
2.5 Perspective communicationnelle 25
CHAPITRE III
LE CADRE MTHODOLOGIQlJE 27
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IV
3.1 Introduction 27
3.2 Type de recherche: une dmarche qualitative 27
3.3 Notre population d'enqute 28
3.4 Procdures de terrain 29
3.5 Liste des rpondants 30
CHAPITRE IV L'VOLUTION ET LA DYNAMIQUE DE LA DISTRIBUTION 34
4.1 Introduction 34
4.2 Structure de l'industrie et questions d'argent... 34
4.2.1 L'volution de la 11se en march 35 4.2.2 La performance, l'obsession des rsultats et le nouveau mode de financement 37 4.2.3 Les films d'auteur versus les films populaires 40 4.2.4 L'inflation des budgets de mise en march, point de non-retour? 41 4.2.5 L'avenir: le financement priv? 44
4.3 Relations entre les acteurs de l'industrie 46
4.3.1 Travaild'quipe? 46 4.3.2 Rpartition et sources des revenus 48 4.3.3 Les distributeurs et les exploitants de salles 50 4.3.4 Les distributeurs et les tldiffuseurs 51 4.3.5 Les distributeurs et les critiques de cinma 52
CHAPITRE V
LES TAPES DE LA DISTRIBUTION 55
5.1 Introduction 55
5.2 Marketing stratgique 55
5.2.1 La slection et l'analyse des caractristiques du film 56 5.2.2. La segmentation, le positionnement et les tests 60 5.2.3 La slection du nombre de salles et de copies 63 5.2.4 La slection de la date de sortie et la dure de vie en salles 65 5.2.5 Date de dmarrage de la campagne 68
5.3 Marketing oprationnel 70
5.3.l.Cration des outils de communication 70
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v
5.3.2 Achat d'espace mdiatique 72 5.3.3 La cration d'vnements et les entrevues 75 5.3.4 Les partenaliats commerciaux 79
CONCLUSION 82
ANNEXE A
AFFICHES DU FILM CONGORAMA RALIS PAR PHILIPPE FALARDEAU ET DISTRIBU PAR CHRISTAL FILMS 93
ANNEXEB
LE CANEVAS D'ENTREVUE 96
BffiLIOGRAPIIIE 101
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RSUM
Dans le premier chapitre, celui de la problmatique, nous situons le phnomne du succs commercial rcent du cinma qubcois par rapp0l1 sa propre volution historique, mais surtout dans le cadre plus large de l'acclration de la mondialisation et de l'augmentation de la conCU1Tence sur le plan des flux audiovisuels. Nous expliquons en quoi l'industrie cinmatographique est une filire conomique particulire par son dveloppement, effectu lors de l'essor du nolibralisme, de mme que les particularits de fonctionnement du cinma. De plus, ce chapitre fait l'tat de la question entourant l'expJication du succs commercial rcent que connat l'industrie cinmatographique qubcoise. Dans le deuxime chapitre, nous prsentons les auteurs de mme que les concepts qui ont servi plus particulirement pour l'approche thorique de ce mmoire.
Le succs commercial rcent du cinma qubcois s'explique par le fait que les acteurs de l'industrie, plus particulirement ceux du secteur de la distribution, depuis les dix dernires annes, ont modifi leur faon d'effectuer la mise en march et la promotion des films qubcois au niveau stratgique et oprationnel. Cela est caus par les contraintes exerces par la filire et le contexte conomique actuel domin par les tats-Unis. Aussi, avec l'augmentation considrable des budgets de distribution surgit un nouveau paradigme: celui de la performance. Les distributeurs ont une position privilgie et travaillent avec plusieurs allis afin d'optimiser les chances de russite des films qubcois au box office.
Lors du troisime chapitre, nous prcisons pourquoi nous avons privilgi la dmarche qualitative pour effectuer le terrain de mme que l'entretien semi':dirig comme technique de collecte de donnes.
Le quatrime chapitre examine les diffrents aspects entourant les changements rcents en djstribution. Ces modifications jettent les bases d'une nouveJie mthode de mise en march qui vise l'optimisation du succs commercial des films qubcois. De plus, il rvle les dynamiques relationnelles entre les divers acteurs et comment se positionne le secteur de la distribution l'intrieur de celles-ci. Finalement, le cinquime chapitre montre concrtement, travers les tapes de la mise en march de films, quels changements on tt effectus et en quoi ceux-ci ont un lien avec la performance au box office.
Mots cls: clllema qubcois, distribution, marketing, promotion, industrie culturelle, financement, succs commercial, mondialisation.
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INTRODUCTION
Le Sorrunet des Amriques, qui a eu lieu Qubec en 2001, a suscit plusieurs interrogations concernant la mondialisation. Qu'est-ce que ce phnomne? Quels en sont les effets, les risques, les avantages, les consquences? Un des enjeux les plus frappants dans les discours concernant la mondialisation et ses risques est la suppose et invitable
homognisation culturelle. Celle-ci serait cause par la domination des produits culturels
tats-uniens qui a lieu dans le cadre de l'intensification des flux audiovisuels l'chelle
internationale. Or, la suite d'observations effectues lors d'une session d'tudes l'tranger
et de voyages en Europe et en Amrique latine, nous avons constat que malgr
l'omniprsence des produits culturels tats-uniens, les gens continuaient prsenter
essentiellement des caractristiques culturelles locales, et que les lments culturels
emprunts demeuraient superficiels. Bien sr, depuis ce temps, nous avons ralis que ce
sujet, incroyablement complexe, ne peut tre vu aussi simplement; rien n'est blanc ou noir. Toutefois, c'est cette hypothse, de mme que toutes nos interrogations concernant la
mondialisation, les industries culturelles, et les enjeux culturels qui lui sont implicites, qui nous ont amens faire une matrise en communication. Et, de toutes les industries
culturelles, nous avons choisi d'tudier le cinma, car cette industrie est la premire grande
exportation culturelle du XXe sicle (Vasudev et Lenglet, 1984). Elle a, en outre, un statut palticulier parce que, historiquement, elle a toujours t lie autant l'industrie qu' la nation et donc l'identit, un des plus grands enjeux dans le contexte actuel de la mondialisation. De plus, nous avons dcid d'tudier le cinma qubcois d'une part, pour des raisons
d'accessibilit aux donnes et de connaissance du contexte rgional et local et, d'autre part,
parce que l'industrie qubcoise vit plusieurs changements fascinants depuis la dernire
dcennie.
En effet, depuis le dbut des annes 2000, le cinma qubcois connat un succs
commercial grandissant et relativement constant auprs de la population locale. Il est
intressant de constater ce fait alors que, dans la plupart des pays et mme ici, au Qubec, le
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cinma tats-unien est clairement dominant. Nanmoins, il semble perdre du terrain
l'intrieur de la province. Qu'est-ce qui explique ce phnomne? Ce genre d'vnement n'est jamais facilement explicable; plusieurs variables doivent tre prises en compte. Nanmoins, lorsqu'on regarde l'volution rcente de l'industrie cinmatographique
qubcoise, outre les modifications aux programmes de financement dont l'objectif principal est la performance accrue du cinma qubcois, un domaine qui s'est rellement dvelopp
depuis le dbut du nouveau millnaire est celui de la distribution.
Ainsi, souhaitons-nous analyser le lien entre le succs cornrnercial du cinma qubcois
et la mise en march, de mme que la place qu'elle occupe maintenant au sein de l'industrie
cinmatographique la suite des changements rcents que connat le secteur de la
distribution. Quelle est cette industrie? Le marketing est-il plus important aujourd'hui, et si oui, pourquoi? Qu'est-ce qui a chang dans le secteur de la distribution depuis les dix defIres annes? Quel est le rle du marketing dans la carrire d'un film et quel moment intervient-il? Finalement, cornrnent conoit-on la mise en march d'un film qubcois
aujourd'hui au Qubec? Vu la nouveaut du phnomne et l'absence, notre connaissance, d'tudes rcentes portant sur le sujet, nous croyons que nos questionnements et objectifs sont pertinents. Nous ne prtendons pas dcouvrir la vrit absolue avec ce travail, tant donn le
caractre limitatif du format ainsi que la quantit de donnes recueillies. Cependant, nous
croyons tout de mme avoir obtenu de l'information riche et nuance qui dvoile l'essence
d'une vrit refltant la complexit des questions que nous posons. Le chapitre III du travail
prsentera davantage l'approche mthodologique que nous avons choisie pour raliser notre
enqute et il donnera des prcisions sur les rpondants et le processus d'investigation.
Dans le premier chapitre, nous tentons de situer le succs commercial rcent que vit le
cinma qubcois dans son cadre historique de mme que dans le contexte actuel de
l'acclration de la mondialisation des flux audiovisuels. De plus, nous prsentons les
diffrents points de vue de spcialistes et thoriciens qui proposent des explications quant au
succs commercial en gnral et plus spcifiquement cornrnent ce defIer a eu lieu au Qubec.
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Dans le deuxime chapitre, nous prsentons les auteurs qui nous ont fourni le cadre
thorique de ce travail. Nous avons slectionn Laurent Creton, thoricien et auteur de
plusieurs livres portant sur l'conomie et la structure de l'industrie cinmatographique. Ce
dernier a une posture pistmologique qui tient compte de la double nature de l'industrie
culturelle et de son dveloppement l'poque de l'essor du nolibralisme et de la
mondialisation. Aussi, afin de situer le secteur de la distribution par rapport aux autres tapes
de la vie d'un long mtrage, avons-nous tudi Hlne Laurichesse, spcialiste de la question
du marketing de films.
Les chapitres IV et V prsentent l'analyse des rsultats. Le prerruer porte sur le
positionnement du secteur de la distribution la suite des changements qui ont eu lieu dans
l'industrie cinmatographique qubcoise. Le second illustre concrtement de queUe faon
s'effectuent la mise en march et la distribution de films qubcois l'intrieur de la
province.
En guise de conclusion, nous ferons la synthse des principaux constats qui mergent de
notre analyse; nous expliquerons, en outre, en quoi ces lments ont un lien avec le succs
commercial du cinma qubcois et ce que cela signifie pour la sant de l'industrie.
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CHAPITRE 1
LA PROBLMATIQUE
1.1 Prsentation du sujet
Le cinma qubcois connat dj, depuis les annes 1960, une reconnaissance d'envergure internationale, mais cette reconnaissance ne se situe qu' l'intrieur de cercles
d'initis et de cinphiles puisqu'il s'agit souvent d'un cinma intimiste, peu commercial, et
diffus dans des circuits parallles aux circuits commerciaux (Major, 1980). Il Ya bien eu de courtes priodes de succs commercial relatif, avec notamment la mode des comdies
rotiques de Gilles Carle (Deuxfemmes en or) et de Denis Hroux (Valrie) durant les annes 1970, mais outre ces brefs moments de popularit, la frquentation en salles pour les films
qubcois dpasse rarement 5 % (Lever, 1995). Plusieurs auteurs se sont penchs sur cette question, notamment Louise Carrire, Bernard Brub et Ginette Major. Cette dernire, de mme que Marcel Jean, expliquent que la faible frquentation en salles la fin des annes
1970 et durant les annes 1980 est en partie attribuable la qualit ingale de la production (tant au niveau esthtique et narratif que cinmatographique) des comdies et des films rotiques de la fin des annes 1960. Cette situation a contribu ternir l'image du cinma
qubcois auprs d'une large part de son public. De plus, Major affIrme que l'esthtique et les thmatiques des films de cette poque offrent un univers passiste et misrabiliste qui ne
correspond pas aux dsirs de divertissement des Qubcois de mme qu' la nouvelle effervescence culturelle et conomique que vit la socit.
Le cinma qubcois connat quelques succs commerCIaux isols durant les annes
1980, avec notamment Le Dclin de l'empire amricain et Cruising Bar. Toutefois, vers la
moiti des annes 1990, plus prcisment en 1997, le film Les Boys connat un succs
commercial retentissant et constitue, pour plusieurs, un tournant dans l'industrie
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cinmatographique qubcoise (Tl-Qubec, 2002b). Il semble en effet que quelque chose de diffrent se soit ralis dans la production et dans la distribution du film Les Boys qui a
contribu son succs commercial. Quels sont les facteurs responsables de ce succs commercial? Si la rponse cette question est complexe, nous pouvons narunoins affirmer
que ce long mtrage annonce un changement important, li la vague de succs commercial
du cinma qubcois, faisant en sorte que les parts de march dtenues par ce dernier passent
de 2,7 % en 1997 18,2 % en 2005 (Cinac, 2007).
Le phnomne est d'autant plus intressant constater lorsqu'on le place dans le cadre
plus large de l'acclration de la mondialisation depuis les vingt dernires annes, de
l'accroissement important de la concurrence sur les marchs et, surtout, de la domination des
produits culturels tats-uniens dans la plupart des pays du monde. Ainsi, lorsque le
phnomne qui nous intresse est mis en parallle avec la situation dans de nombreux pays
o les parts de march cinmatographiques dtenues par les tats-Unis demeurent crasantes (98 % - 99 %), on constate qu'il se passe quelque chose de fascinant au Qubec. Mais comment expliquer ce succs? Est-ce seulement une mode passagre, ou n'est-ce pas plutt
la maillfestation d'un changement profond qui se produit depuis plusieurs annes au sein de
l'industrie? Est-ce que les films d'aujourd'hui sont diffrents des films produits il ya une dizaine ou une vingtaine d'annes? Est-ce que les acteurs de l'industrie cinmatographique
ont modifi leur faon de financer, de produire et de distribuer les films? Si oui, qu'ont-ils
chang?
1.2 Formulation de la question spcifique
Si on regarde le film Les Boys et le succs commercial incroyable qu'il a connu, outre le
fait que c'est une comdie et que, traditionnellement, ce genre a toujours t populaire auprs de la population qubcoise (Jean, 2006), il semble que la promotion et la mise en march du film se soient droules diffremment. Pour la premire fois, on a investi 600000 $ pour la seule mise en march afin de crer un buzz jusqu' la date de sortie du film, qui s'est
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effectue sur 121 crans (Tl-Qubec, 2002). Dans ce travail, nous aimerions donc analyser cet aspect de l'industrie cinmatographique qubcoise qui s'est dvelopp la suite de la
sortie du film Les Boys et en quoi cela joue un rle dans le succs commercial d'un film. Ainsi, nous demandons-nous : quel lien existe-t-il entre la distribution et le succs
commercial rcent en salles d'une proportion importante de films qubcois? La question
spcifique de notre recherche permet, dans un premier temps, de relever tous les facteurs
pertinents dans le point traitant de l'tat de la question, et de justifier au fur et mesure pourquoi nous avons choisi d'tudier le secteur de la distribution et de la mise en march.
1.3 Hypothse intuitive
Nous croyons, d'une part, que les acteurs de l'industrie cinmatographique qubcoise ont
modifi leur faon de financer, de produire, mais surtout de distribuer et de mettre en march
les films, dans le but d'augmenter la frquentation en salles et, d'autre part, que ces
changements ont contribu au succs commercial rcent que connat le cinma qubcois.
1.4 La mise en contexte
1.4.1 Les industries culturelles l're de la mondialisation
Pour plusieurs, l'vnement qui marque la fin de tout obstacle l'expansion du
nolibralisme est la chute du mur de Berlin en 1989. Toutefois, il faut considrer cet vnement en relation avec l'acclration et l'amplification de la mondialisation dans les
annes 1980. Effectivement, si l'internationalisation des changes existe depuis longtemps,
dans les annes 1980 rapparat la question de la mondialisation, cette fois lie l'ampleur de
l'interdpendance accrue entre les tats et les marchs, la rapidit des volutions techniques ainsi qu' l'insertion des agents conomiques dans l'espace mondial (Beaud, 1999). En conununication, dans le domaine d'tude des mdias de masse, il y a longtemps que l'on se
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penche sur la question de l'imprialisme amricain en ratson de l'omniprsence de ses
produits culturels sur la scne internationale. Mais cette fois, on l'aborde dans le cadre de
cette nouvelle ralit, qui semble donner une tout autre dimension l'change de biens
culturels.
En fait, l'intensification de la circulation transnationale des flux audiovisuels s'est traduite
par l'mergence d'une profusion d'crits thoriques sur les enjeux, surtout culturels, que recle le processus d'internationalisation des produits culturels, dont le symbole de dominance est
souvent reprsent par l'industrie cinmatographique hollywoodienne. La raison pour
laquelle la mondialisation des produits culturels comporte des enjeux pour la diversit culturelle est que ces produits, bien qu'ils soient raliss dans un contexte industriel des fins
marchandes, sont porteurs d'une importante valeur symbolique et de sens (Mnard, 2004). Ainsi, si les mcanismes de la mondialisation engendrent des changements la fois au niveau
conomique, gopolitique et humain, ils affecteront aussi la culture. La mondialisation a donc
pour effet d'acclrer et de complexifier le processus d'acculturation des socits. Cela n'est
pas ngatif en soi puisque la culture est dynamique, appele se modifier afin de s'adapter et
de suivre les changements qui ont lieu dans le monde, mais si cet change est trop ingal, cela
peut tre trs nfaste pour les cultures locales. Confronts ce phnomne, les tats doivent adapter leurs institutions et leurs politiques afin de tirer le meilleur du processus
d'acculturation (optimiser les contacts interculturels, par exemple) et minimiser les impacts ngatifs au niveau local.
La mondialisation est perue comme une nouvelle forme d'assimilation potentielle de la
part des cultures majoritaires et l'action politique du Qubec sur la scne internationale est influence par cette hypothse. Si, historiquement, le Qubec agissait avec une identit plutt de rsistance ou nationaliste, devant la mondialisation, on adopte de plus en plus une
identit projet en ce sens o la socit tenterait de se projeter davantage au niveau international (Castells, 1999; Tremblay, 1990). Ainsi, les industries culturelles sont-elles utilises pour faire la promotion de la culture locale puisque cela constitue un moyen
privilgi de faire rayonner son identit culturelle outre-frontires et donc d'avoir une
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prsence sur la scne internationale. Les industries culturelles sont de ce fait primordiales en
tant que moyen d'expression de cette identit. En effet, les industries culturelles et plus
particulirement les mdias n'ont jamais t aussi prsents dans la vie des gens et ces derniers jouent plusieurs rles, tant au niveau de l'laboration des visions que nous entretenons du monde, du diveltissement, que de l'identification une culture locale par la reprsentation
(ou non) de celle-ci.
Finalement, il Y a donc un double enjeu pour le Qubec car il veut, d'une part, s'insrer sur le march international tout en assurant la production locale, et d'autre part, il doit
s'ouvrir la diversit culturelle pour enrichir les cultures locales. Cependant, les pressions
engendres par la mondialisation font en sorte que la logique du profit domine de plus en
plus, et ce, au dtriment de la valeur symbolique des produits culturels, d'o l'importance de
l'intervention de l'tat afin de permettre une production qui reflte la diversit de la nation.
1.4.2 L'volution de la filire cinmatographique et ses particularits
Le cinma est une industrie qui diffre des autres filires plusieurs gards, et ses
spcificits lui imposent des rgles de fonctionnement et des normes rigides selon lesquelles
les acteurs doivent agir. Par exemple, l'industrie cinmatographique est produite en srie
depuis sa cration. En effet, cause de l'importance de l'investissement initial devant
l'incroyable incertitude de la demande qui commande cette industrie (on ne sait jamais si les spectateurs aimeront le film tant qu'ils ne l'auront pas vu), on assiste rapidement la concentration des capitaux et la cration de grands studios, aussi dcrit comme le clustering
(regroupement) des ressources. Aussi, les producteurs adoptent-ils depuis longtemps des stratgies de gestion de risque; on fait des films qui remplissent toutes les conditions de
succs: structures narratives modles, films concepts, promotion et hypermdiatisation,
effets spciaux, vedettes, dcomplexification des thmatiques culturelles afin d'exporter plus
facilement les produits (Flichy, 1991).
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tant donn le cot lev des productions, et le caractre prototypique de l'industrie, il faut limiter au maximum le risque d'un chec en salles. Ainsi, essaie-t-on de produire des
films dont le potentiel de rapporter beaucoup d'argent est le plus lev possible. Bien sr, il
existe plusieurs petits studios qui rpondent la demande pour les films d'auteur, et ces
derniers cotent moins chers produire. Toutefois, le cot d'investissement initial demeure
important et, considrant la moins grande possibilit rejoindre une masse critique ncessaire la rentabilit puisque ces films s'adressent un public restreint, la production de ces films
peut tre plus risque (Herscovici, 1994). De plus, l'intensification des flux audiovisuels lis l'acclration de la mondialisation fait en sorte que la validation sociale ncessaire au
succs d'un film passe plus que jamais par la diffrenciation des produits, c'est--dire la promotion et la mdiatisation. Donc, la promotion et la publicit deviennent de plus en plus
sophistiques, car il faut tre vu pour s'imposer et maintenir sa position (Mige, Pajon et Salaun, 1986) et elles contribuent normment la monte des cots de distribution. Par ailleurs, la composition du march a chang; celui-ci est constitu majoritairement de jeunes de 15 24 ans qui vont au cinma pour se divertir (Mige, 1980), ce qui peut constituer un lment d'explication dans l'augmentation de la production de films commerciaux, qui
misent sur le divertissement.
En consquence, les longs mtrages canadiens et qubcois sont de plus en plus touchs
par la spirale inflationniste des cots de production et de distribution, typiques des
productions tats-uniennes. La mthode de financement des enveloppes la performance,
actuellement en place, rcompense un film seulement en fonction de ses recettes au guichet.
Ce nouveau programme a jou un rle direct dans la crise de fmancement qui a eu lieu en 2006 et tmoigne de la pression qui existe d'augmenter les budgets de production et de
distribution. Ainsi, selon certains spcialistes, le problme ne concerne pas tant un manque
d'argent, mais plutt la faon dont on finance. Celle-ci serait de plus en plus influence par
les pressions de la filire produire des films gros budget dans le but d'obtenir le plus
d'entres possible.
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Il est intressant de remarquer que lorsque le cinma qubcois se dveloppe dans les
annes 1960, il le fait dans le contexte de la Rvolution tranquille et qu' l'poque,
l'intervention tatique est motive par un dsir d'affirmation nationale. Le cinma et sa
production sont donc dOmlns par un souci d'affirmation identitaire plutt que par un souci
conomique, mais ds les annes 1970, mme si plusieurs efforts politiques sont avancs
pour contrler davantage l'industrie, la rentabilit devient rapidement la proccupation
dominante (Poirier, 2004). Il est galement intressant de voir que la politique qubcoise en matire de communication est mme devenue plus librale sous le gouvernement autonomiste
et sociodmocrate, ce qui fait croire que les forces conomiques nolibrales qui s'exercent
sur le secteur politique sont assez importantes (Tremblay, 1990). Cette poque marque aussi la sparation entre producteurs et cinastes et la naissance d'un dbat entre les films
commerciaux et les films d'auteur.
Par ailleurs, les groupes d'intrts (producteurs et distributeurs) deviennent de plus en plus puissants et influent sur les mcanismes d'aide et les rseaux de contrle du cinma.
Subsquemment, les politiques rcentes, avec notamment les enveloppes la performance,
encouragent les films qui ont eu un succs commercial intressant, et qui ont tendance
adopter les stratgies de gestion de risques la hollywoodienne. De plus en plus, les socits
de production qubcoises ont recours la promotion. Les films qubcois sont plus visibles
qu'avant et atteignent des records d'assistance sans prcdent l'intrieur de la province
qubcoise entre 2003 et 200S.
Par contre, la rcente crise de financement dmontre que cette nouvelle mthode de
financement n'est pas sans inconvnient, car elle semble ne rcompenser que les productions
qui entrent dans la spirale inflationniste des cots de production afm de crer des
blockbusters (superproductions), au dtriment des films d'auteur qui, eux, misent sur la valeur artistique des projets et qui peuvent tre plus signifiants sur le plan culturel. Les enjeux associs au contrle et la visibilit mdiatique grandissent sans cesse pour les films ncessitant des investissements massifs. Selon plusieurs, il faudrait donc rtablir l'quilibre
entre films d'auteur et films commerciaux, car ils craignent que cette obsession du profit
-
Il
risque de nuire srieusement au cinma d'auteur, un cinma qui produit des films avec une
plus grande valeur culturelle, mais qui ne fonctionne pas toujours aussi bien au box-office.
1.5 L'tat de la question thorique
Plusieurs intellectuels mettent des hypothses afin d'expliquer les changements profonds
qui se produisent au sein de l'industrie cinmatographique qubcoise depuis la dernire
dcennie, et surtout depuis les annes de succs commercial sans prcdent qu'elle connat de
2003 2005. Certains croient que l'explication du succs commercial de notre
cinmatographie rside dans le fait que l'on produirait simplement de meilleurs films
qu'avant, ce qui implique que l'on aurait trouv la recette infaillible du succs. Cela n'est
toutefois pas raliste et plusieurs auteurs comme Arthur De Vany et Laurent Creton affirment
qu'un succs commercial est impossible prdire. Ce dernier explique que le nombre
d'entres d'un film rsulte d'un trs grand nombre de facteurs qu'il est bien difficile de
matriser dans leur totalit. Ainsi, s'il tait possible d'tablir une recette du succs, on peut
supposer que les professionnels de l'industrie ne produiraient pas des checs volontairement
(Creton, 1997) Et, De Vany affinne qu'il n'existe pas de film modle , car la rpartition des recettes au box-office, distribues de faon asymptotique, selon la loi Pareto', qui a une
variance infinie, de sorte qu'on ne peut tablir une corrlation entre certaines variables et le
succs (2004). Il est donc impossible de faire quelque prdiction que ce soit, parce que personne ne peut prvoir s'il aimera un film tant qu'il ne l'aura pas vu.
Toutefois, selon lui, il est possible d'augmenter les recettes en distribuant les films sur le
plus grand nombre d'crans possible puisque la dure d'exploitation de ceux-ci est de plus en
plus courte, de sorte que la plupart font leur revenu maximum la premire semaine. Cela peut
La Loi de Pareto est aussi appele loi des 80/20. C'est une loi empirique insplree des observations de Vilfredo Pareto, conomiste et sociologue italien, qui avait remarqu que 80 % des richesses taient possdes par 20 % du monde. Cette loi dcrit donc une ingalit prsente dans un grand nombre de phnomnes et a t formalise en mathmatiques par la distribution de Pareto. Cet outil d'aide la dcision dtermine les facteurs (20 %) cruciaux qui influencent la plus grande partie (80 %) de l'objectif (Vany, 2004)
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nanmoins constituer une arme double tranchant puisque la' cascade d'information (ou le bouche oreille) se fait plus vite, alors si un film est mauvais, cela se saura plus rapidement. Il semble aussi y avoir une corrlation entre la taille du budget et les recettes au
guichet: plus les sommes investies sont normes, plus les recettes sont grandes.
Paralllement, Abraham S. David en est arriv conclure, dans son tude sur le lien entre le
succs en salles et les vedettes, que ce ne sont pas elles qui augmenteront les chances de
remporter du succs de faon systmatique, mais plutt le fait d'avoir de bonnes critiques et,
mieux encore, d'avoir une classification G (gnrale) ou PG (plutt que PG-13 ou 18ans+) ainsi que le fait de faire des suites de films (par exemple Les Boys. Les Boys II, Les Boys III et Les Boys IV) (2004).
Selon Marcel Jean, le succs conunercial rcent du cinma qubcois est plutt le rsultat
d'une longue rconciliation entre le public qubcois et son cinma qui, selon lui, l'avait
abandonn en raison de la qualit ingale des films produits durant la vague des comdies
rotiques la fin des annes 1960. Effectivement, il explique que dans les annes 1980, le
cinma qubcois est englu dans la morosit puisqu'il n'arrive pas rencontrer son public.
La question de la frquentation des films devient ds lors cruciale, un point tel qu'on a
l'impression qu'elle monopolise la rflexion (2006). On assiste une vague de superproductions coteuses et des tlfilms qui russissent plus ou moins bien. Peu de
temps aprs, n'ayant pas obtenu le succs escompt avec ces formules, on assiste au retour de
quelques films qui connaissent un succs commercial intressant, comme Le Dclin de
l'empire amricain, Un zoo la nuit et Jsus de Montral, qui constituent, selon Jean, le dbut
d'une rconciliation du cinma qubcois avec son public.
Par ailleurs, d'autres affirment que le succs que connat la filire cinmatographique au
Qubec ne serait qu'un phnomne circonstanciel. Cependant, plusieurs autres intellectuels et spcialistes du cinma qui se sont penchs sur la question, notamment Christian Poirier,
Gatan Tremblay, Yves Lever et Yves Picard, semblent s'accorder sur le fait que si le cinma
qubcois connat un succs commercial grandissant, cela n'est pas le fruit du hasard ou
d'une concidence conjoncturelle mais plutt le rsultat de plusieurs annes de changements
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profonds qui ont transform la filire en tule industrie rationnelle et efficace qui vise la
rentabilit commerciale. En effet, les tudes rcentes portant sur le cinma qubcois
montrent que, pour se plier aux exigences du march dans un contexte conomique de plus en
plus concurrentiel, l'industrie a effectu un virage nolibral. Christian Poirier explique que
si, dans les annes 1960, le rcit identitaire et culturel domine au Qubec, dans les annes 1970, mme si plusieurs efforts politiques sont avancs pour contrler davantage l'industrie,
l'conomie devient rapidement la proccupation dominante. Cela s'explique par plusieurs
lments, dont notamment l'ingrence du gouvernement fdral qui diminue les marges de
manuvre du gouvernement qubcois, les conjonctures conomiques ainsi que les dveloppements technologiques rapides. De plus en plus prime l'ide que les industries
culturelles et le cinma doivent offrir un produit qui rsiste la concurrence, autrement dit
faire mieux, autrement et plus tt (Poirier, 2004 ; Lever 1995).
Ainsi, les socits de production qubcoises ont-elles recours plusieurs stratgies de
gestion du risque qui s'apparentent de plus en plus au modle conomique de l'industrie
cinmatographique tats-unienne. Selon Poirier, le fait d'entrer en concurrence avec des
produits similaires expliquerait en partie les checs vcus la suite de plusieurs tentatives de
contrler davantage la distribution l'intrieur de la province. Effectivement, les tats-Unis contrlent depuis longtemps les rseaux de distribution, avec notamment la stratgie du
blockbooking 2, et ces tactiques, jumeles une machine promotionnelle bien huile, rendent l'accs des films qubcois aux rseaux de distribution difficile. Pierre Barrette
confirme que l'industrie tente donc de rivaliser, en occupant le mme espace mdiatique,
contre des produits semblables, et que ces derniers auraient, de surcrot, l'avantage de
bnficier d'une sorte de capital de sympathie que lui confre la proximit culturelle
(2003b).
2 Le Blockbooking, est un systme de vente de films par bloc aux exploitants de salles. On leur vend plusieurs films en une seule occasion, souvent un ou deux films fort potentiel commercial avec quatre ou cinq films moins susceptibles d'attirer les spectateurs. (Fischer, 2004)
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Barrette explique, en lien avec la thorie de la mdiation dveloppe par Antoine
Rennion, que dans cette vise de concurrencer les tats-Unis, on essaie de rendre les uvres plus accessibles aux spectateurs au moyen de diverses stratgies tant sur le plan du contenu
mme du film que sur celui de sa mise en march. Ainsi, la rcente multiplication de films de
genre constitue-t-elle dans ce contexte:
... un des lments de mdiation qui opre entre l'industrie et le public, un outil particulirement efficace en ce qu'il permet de baliser les parcours, de rduire l'ambigut, de maximiser sur le plan du film lui-mme les stratgies de sduction auxquelles viennent par ailleurs s'adjoindre, sur le plan externe, une stratgie de marketing calque sur le modle hollywoodien, avec publicit massive, grande premire, synergie commerciale et mise profit maximale des mdias traditionnels. (Barrette, 2003b)
Tiiu Lukk, dans son livre Movie Marketing, crit que le marketing et la mise en march
sont des sciences inexactes, que la plupart des films chouent commercialement et qu'en
dernier lieu, c'est la qualit de l'histoire qui fera en sorte qu'un film atteindra ou non le
succs. Nanmoins, il est clair, selon elle, que dans un monde submerg d'informations, de
trs bons films peuvent se perdre dans l'ocan mdiatique. Par consquent, les producteurs
qubcois, en raison de l'importance de l'investissement initial du projet, veulent s'assurer que leur film puisse concurrencer plus justement les autres longs mtrages disponibles sur le march. II est donc plus que jamais important pour eux d'occuper une place dans l'espace mdiatique car il ne faut pas oublier que les mdias sont omniprsents dans la vie quotidienne
des gens. Selon Simon Galiero, le rcent succs du cinma qubcois serait mme d au fait
que l'on parle incessamment de cette russite dans les mdias dans le but de perptuer les
sentiments chez les spectateurs qui seront responsables de sa prennit (la reconnaissance, l'attendrissement et l'identification collective). Et, il ajoute que cela, accompagn des chiffres qui prouvent sa performance au box-office, contribuent ainsi entretenir cette ide de succs.
Galiero souligne galement que les productions cinmatographiques se soumettent de plus en
plus une esthtique mondialise . En effet, producteurs, ralisateurs, acteurs ou
scnaristes de l'industrie adopteraient ainsi toutes les formes cool du cinma mondial en
vogue. On peut noter, titre d'exemple, la photographie filtre aux accents de publicit
qui se rpand de plus en plus (2005).
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Marcel Jean afftrme que nous sommes dsonnais l're de la performance. Depuis que
Tlfilm Canada a instaur son nouveau programme de financement qui rcompense les films
qui ont obtenu un succs commercial important, plusieurs s'inquitent de ce virage
l'amricaine et des consquences que cela pourrait comporter pour l'avenir de la richesse et
de la diversit de la production cinmatographique (Frigon, 2005). Cependant, si plusieurs s'alarment du fait que le recours croissant aux mcanismes du film hollywoodien pourrait
mener l'assimilation de notre modle celui de l'Autre, selon Yves Picard, cela ne serait
que le rsultat d'une stratgie astucieuse de survie, celle du camlon , consistant offrir
des histoires qui sont codes l'amricaine, mais qui sont enchevtres d'lments
identitaires (Picard, 1997). Aussi, la promotion, la nouvelle gnration d'auteurs, la multiplication des films de genre (comdies, films patrimoniaux, films d'horreur et de suspense)} et la mcanique grandissante de la mise en march tmoignent-elles, selon Jean, d'un rel savoir-faire de production et de distribution (Jean, 2006). Tous ces lments montrent quel point le cinma qubcois a achev, selon lui, son industrialisation et procd
une mise niveau de ses pratiques conomiques, qui lui permettent de tirer son pingle du
jeu l're de la mondialisation.
Finalement, mme s'il n'y a pas consensus pour expliquer le phnomne actuel du succs
commercial du cinma qubcois, tous se rjouissent que le cinma qubcois ait finalement rencontr son public. Nanmoins, dans le contexte actuel de l'accroissement de la
comptition en rapport avec le nombre de films qui sortent chaque semaine, de mme que
celui de la concurrence directe des tats-Unis, la majorit des intellectuels s'entendent sur le fait que le rle de l'tat est absolument essentiel pour maintenir une production de films varie dont la cration ne rsulte pas uniquement d'un souci de rentabilit conomique.
} Selon Agence cinma Cinac, www.cineac.ca , en date du 27 mars 2007, Il des 20 films qubcois ayant amass le plus de recettes depuis les 40 dernires sont des comdies: La Grande Sduction, Les Boys, Les Boys II, Les Boys III, Camping sauvage, Horloge biologique, Les Boys IV, Elvis Gratton, Cruising Bar, Mambo Italiano, La vie aprs l'amour. Outre les comdies, il y a une prolifration des films de genre tels des films patrimoniaux (Sraphin, Aurore, Monica la mitraille), des films d'horreur (Sur le seuil, La Peau blanche, Eterna!) et des suspenses (Liste noire, Le dernier soujJle. La loi du cochon, Le dernier tunnel, Elles taient cinq, Mafille, mon ange) (Jean, 2006).
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CHAPITRE II
LE CADRE THORIQUE
2.1 Introduction
Dans le chapitre prcdent, nous avons prsent le phnomne qui nous intresse et
l'avons situ dans un cadre socioconomique et politique qui aide mieux comprendre le
sujet et l'objet de la recherche. De plus, nous avons expos l'tat de la question thorique afin d'avoir les divers points de vue sur le sujet du succs commercial rcent que vit le cinma qubcois. Nous allons maintenant prsenter la perspective thorique qui, selon nous, aide le
mieux analyser le succs du cinma qubcois sous l'angle de la distribution. Nous
prsenterons galement les principaux concepts thoriques du prsent travail.
2.2 Le cinma: un art industriel
Dans Cinma et march, publi en 1997, Laurent Creton met en relation la nature double
du produit cinmatographique, qui appartient la fois au monde de l'art et celui de
l'industrie; il analyse l'volution de ces deux aspects en tablissant le lien avec les
problmatiques lies la mondialisation et aux changements structurels qu'elle provoque.
Selon l'auteur, le capitalisme et le cinma sont trs semblables par leurs systmes, leurs
logiques et leur institutionnalisation (p.9). En effet, le cinma comme art industriel est parvenu occuper, en raison de sa logique industrielle mme, une position cruciale au sein
des conomies de march. Fond sur l'industrialisation et la large diffusion rendue possible
par le principe de reproduction, il relve d'une 'aura fordiste4 , (pA8). L'auteur fait le pont
4 Le fordisme, invent par Henry Ford, est un mode d'organisation du travail inspir d'une autre organisation du travail, le Taylorisme, dont le but est d'accrotre la productivit d'une entreprise avec
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entre l'art et l'industrie de sorte que, si la plupart des thories stipulent que l'art
cinmatographique est ce point antagoniste au march et l'industrie, il croit le contraire.
Selon lui, en rester cette posture de rejet peut dtourner de la possibilit d'apprhender les diffrents aspects de leur relation, de saisir ce que son tude peut rvler sur la nature de l'un
et de l'autre (p.3l). En effet, la marchandisation accompagne le cinma depuis ses origines et l'oblige se dfinir sans cesse dans le rapport qu'il entretient avec elle.
Laurent Creton croit donc que le cinma s'est dvelopp avec le fordisme, qUi a su
utiliser le premier stade d'institutionnalisation du cinma au service de la diffusion de ses
normes de consommation (p.32). On peut ainsi croire que l'industrie cinmatographique ne peut agir en dehors des contraintes conomiques du contexte nolibral actuel, puisque sa
logique mme de production s'est dveloppe avec le fordisme. Ainsi, les entreprises
culturelles sont-elles soumises aux exigences du march et de la concurrence, ce qui les
amne mettre en uvre une logique commerciale qui les dpasse (p.53). L'auteur croit la puissance du paradigme normatif du systme actuel parce que l'extension et l'intensification
des logiques de march, lies l'acclration de la mondialisation, et l'arbitrage par le
consommateur entre de multiples offres conduisent une mise en comptition incroyable des
produits, des entreprises et des systmes ou filires (p.31). Toutefois, il affirme que le cinma garde dans son essence les traces d'autres poques et Sq fonction culturelle et symbolique, qui
sont des lments qui ne peuvent se rduire l'conomie. En effet, la particularit du cinma,
ce qui en fait une industrie aussi mystrieuse, est qu'il est rempli de contradictions et peut
aussi bien faire partie de la reproduction conomique de la socit que de l'mergence du
renouveau culturel et artistique. Malgr cela, l'auteur souligne que l'art est de plus en plus
instrumentalis et soumis la prgnance croissante des intrts conomiques et que le cinma
relve d'une logique qui place l'art non pas comme origine, mais comme accessoire de la
vente d'objets culturels industrialiss (pA7).
entre autre la division du travail, la standardisation de la production et l'augmentation du pouvoir d'achat des ouvriers afm d'couler la marchandise (Ewen, 1983).
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Le cinma est ainsi un bien culturel qui recherche la double valorisation: conomique et
artistique (p.55). Selon Creton, la projection est une condition teclmique et conomique d'existence de l'uvre. Aux tats-Unis et en Amrique du Nord, c'est la valorisation conomique fonde sur les rsultats commerciaux qui l'emporte largement. En consquence,
on peut croire que cette valorisation gagne en importance au Qubec puisqu'on parle de plus en plus des recettes au guichet et du chiffre magique atteindre d'un million de dollars
d'entres. Ce type de valorisation a surtout lieu en aval de la production: dans la distribution
et la promotion. Les productions les plus commerciales s'appuient sur un march dj structur et un grand nombre de consommateurs ayant intgr les prrequis ncessaires pour
les apprcier (p.57). Consquemment, un film comme Bon Cop, Bad Cop, succs commercial sans prcdent pour un long mtrage qubcois, a mis sur le fait que le march
tait dj trs accoutum aux codes esthtiques du film d'action tats-unien de type blockbuster pour effectuer le lancement.
Laurent Creton explique que, devant la concurrence provoque par la popularit
grandissante d'autres produits de divertissement comme les jeux vidos et l'Internet, la question dcisive pour le film est de parvenir merger et bnficier d'une visibilit qui lui
pennet de rencontrer le public (p.144). De plus, la dure de vie du film en salles est largement conditionne par les entres de la premire fm de semaine. C'est pourquoi les
professionnels de l'industrie cinmatographique sont dpendants plus que jamais d'une reconnaissance rapide par un public. Selon l'auteur, la recherche d'une maximisation de
l'audience conduit influer directement ou indirectement par autocensure sur la nature des
projets dvelopps, de sorte que la production de films consensuels doit ncessairement peser sur les politiques gouvernementales d'investissement (p.169). Le public dtennine librement ses choix et, par consquent, le succs d'un film. Narunoins, selon Creton, le
producteur, le distributeur, les programmateurs et les mdiateurs exercent aussi une grande
influence sur la destine du film (p.l58).
En ce qui concerne le marketing et la nuse en march du cinma, dans son livre
L'conomie du cinma: perspectives stratgiques, paru en 1994, il souligne que ces aspects
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prerment sans conteste de plus en plus d'ampleur et occupent une part croissante dans les
budgets de production et aussi dans la reprsentation que le spectateur se fait du film. Dans
certains cas, la publicit devient mme substitutive au produit tant elle peut tre puissante. Le
spectacle se serait donc dplac vers la mdiatisation et la logique publicitaire. Hlne
Laurichesse, auteure du rcent livre Quel marketing pour le cinma?, publi en 2006, affirme qu'en effet, le marketing du film a pris une telle importance depuis les dix derrres
armes, que les dpenses dans ce domaine ont doubl en France durant cette priode. Elle
explique que le systme actuel de marketing s'est dvelopp la suite de la Deuxime Guerre
mondiale, lorsqu'il est pass d'une relation unilatrale (vendre ce qui est produit) un systme bilatral (produire ce qui va se vendre) plaant ainsi le consommateur au centre du systme en lui recormaissant le pouvoir de conditiormer la survie de l'entreprise. On parle
d'un marketing de la demande qui s'appuie sur une tude des attentes et dsirs des
consommateurs pour y rpondre avec une offre approprie (p.I). Consquemment, la faon de mettre en march le produit se complexifie; on dveloppe des axes stratgiques (le positiormement et la segmentation) accompagns de quatre dimensions opratiormelles (produit, prix, place, promotion) qui guideront la dmarche de mise en march des produits, qui sera applique progressivement au domaine du cinma.
L'auteure affume que la professiormalisation du marketing cinmatographique depuis les
derrres armes est avant tout une raction la logique marchande croissante qui prvaut
dans l'industrie cinmatographique et qui justifie la ncessit de rejoindre le public (donc de vendre le produit), surtout dans le contexte d'un accroissement de la concurrence, c'est--dire l'augmentation du nombre de films qui sortent au mme moment, et la comptition directe et
constante avec les tats-Unis. Selon l'auteur, pour des raisons la fois offensives et dfensives, le marketing devient donc un aspect essentiel des cinmatographies locales,
... d'une part, puisque le lancement d'un film conditiorme son existence commerciale, d'autre part, dans la mesure o une cormaissance prcise du marketing peut aider en combattre certaines drives: le risque d'une acclration des dsquilibres qui menacent la diversit culturelle, l'esquisse d'une ncesSaire conformit des standards s'imposant comme normes de rfrence, une mdiation culturelle emblmatiquement marchande (p.S).
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De plus, selon Laurichesse, c'est autour du lancement du film que s'organise le marketing
de celui-ci. Le marketing se dveloppe autour des deux axes stratgiques et des dimensions
oprationnelles, soit les modalits de communication, que nous avons nommes ci-dessus.
Par ailleurs, Laurichesse et Creton mentionnent que, bien qu'il soit plus important que jamais d'avoir une bonne campagne de marketing, il est nanmoins essentiel de nuancer ces
campagnes, car une saturation promotionnelle peut tre contre-productive. Ainsi,
l'application primaire d'un marketing de grande consommation dans l'industrie
cinmatographique est de nature gnrer, la fois, des optimisations d'un modle dpass
dont il assurerait la prolongation, et la mort lente programme de ce qui lui est essentiel (Creton, 1999). Il faut donc faire attention au type de marketing que l'on utilise, c'est--dire, construire un marketing adapt aux spcificits de la cinmatographie, lui trouver une place
dans le cadre de dcisions qui tiennent compte de sa nature mixte. Finalement, en accord avec
Lukk et De Vany, Creton et Laurichesse soulignent que mme si on ne peut videmment
associer tout le succs commercial d'un film sa mise en march et son marketing, ils sont
nanmoins d'un secours prcieux dans les mois menant jusqu'au lancement d'un film, afin que le public prenne conscience du projet et que s'installe un dsir d'aller voir le film.
En somme, nous choisissons d'aborder l'objet de l'volution du secteur de la distribution du cinma qubcois sous l'angle favoris par ces deux auteurs, parce que les deux tiennent
compte de la double nature du produit filmique et par le fait mme, des enjeux la fois culturels et conomiques qui modlent cette industrie. De plus, Creton et Laurichesse
soulignent l'importance du contexte dans lequel l'industrie cinmatographique volue
prsentement, qui est celui de l'accroissement de la concurrence entre les produits, lie la
mondialisation des flux audiovisuels. Finalement, leur position par rapport au marketing et
la place grandissante que cet aspect a prise dans l'industrie est en accord avec notre
hypothse selon laquelle le dveloppement rcent de ce secteur, qui se montre plus essentiel
que jamais au lancement d'un film, tablit un lien indniable entre le succs commercial rcent d'une. proportion significative de films qubcois. Nous verrons donc en dtail, dans
les chapitres IV et V, comment la distribution a volu au Qubec depuis les dernires annes, comment s'effectue la mise en march des films qubcois aujourd'hui et en quoi cela contribue au succs que remportera un film dans les salles.
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2.3 Concepts l'tude
2.3.1 Le cinma
Nous venons d'expliquer que le cinma est un domaine trs particulier; appartenant la
fois l'art et l'conomie, c'est une industrie culturelle. Les industries culturelles
comprennent les secteurs qui conjuguent la cration, la production et la commercialisation de biens et de services porteurs de contenus symboliques, souvent protges par les droits
d'auteur, soit: l'dition imprime et le multimdia, la production cinmatographique,
audiovisuelle et phonographique, ainsi que l'artisanat et le design (UNESCO, 2005). Ainsi, si pendant longtemps on a dfmi la culture et l'art comme des champs extraconomiques
(Herscovici, 1994), ils ne peuvent plus tre analyss seulement en fonction de leur valeur intrinsque (qu'ils soient populaires ou litistes). L'industrialisation de la culture ajoute une dimension conomique aux produits culturels. Ils possdent donc une nature tout fait
spcifique qui les distingue des autres biens, car ils sont porteurs d'identit, de valeurs et de
sens (Mnard, 2004 p.27).
Maintenant, puisque nous parlons souvent de cinma de type hollywoodien et du
cinma qubcois dans ce travail, il est pertinent de dfinir ces types de cinmas, ainsi que les
autres catgories filmiques, afin de clarifier ce que nous signifions lorsque nous utilisons ces
termes. En premier lieu, il est important de mentionner qu'une part substantielle du cinma
amricain ne relve pas du cinma hollywoodien. Des cinmas indpendants s'en distinguent
ou s'inscrivent dans des rapports de ngociation avec le modle, mais ne s'y opposent pas
(Creton, 1997). De plus, il y a toute la sphre du cinma d'auteur pour laquelle il n'existe pas de dfinition rigoureuse, mais dont l'expression est utilise pour dsigner les films qui sont le
reflet de la personnalit et de la dmarche artistique propre au ralisateur. Ce cinma n'est
toutefois pas totalement affranchi des contraintes institutionnelles, conomiques et
idologiques. En effet, selon certains, il rpond tout simplement d'autres critres et rgles
esthtiques qui ne relvent pas du modle plus corrunercial ou institutioIUlel. ce genre de cinma, s'associent galement les films d'art ou d'essai. De plus, le cinma d'auteur est aussi
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souvent considr comme synonyme de cinma indpendant. Nanmoins, quelques
prcisions doivent tre apportes. Certains croient, d'une faon plutt pessimiste, que le
cinma indpendant (surtout aux tats-Unis, qui possde le systme des studios) n'est qu'une faade promotionnelle des gros studios qui financent ces plus petits studios considrs
comme indpendants alors qu'ils sont contrls par ces derniers. En fait, ce terme dsigne
effectivement les productions faites par un type de studio, souvent plus petit, qui prend des
risques financiers (et esthtiques) que les gros studios ne peuvent se permettre. Ainsi, ces studios font-ils plusieurs petits projets au lieu de quelques gros projets. Il s'agit donc tout simplement d'une autre faon de produire des films, mais qui peut donner des rsultats
artistiques intressants puisque justement on prend davantage de risques.
La majorit du cinma prsent dans les circuits de distribution relve du cinma commercial, qui correspond au modle hollywoodien de production. Ce type de cinma est
caractris souvent par des films qui visent des lancements internationaux et qui sont
slectionns afin d'optimiser les possibilits d'exportation. De plus, le qualificatif
hollywoodien s'applique galement des productions non amricaines. En effet,
le cinma hollywoodien, qui n'est nullement rductible un primtre gographique, existe au travers d'un systme esthtique et conomique au sein duquel il se reproduit dans les limites d'une mimesis relative. Ce systme conomico-esthtique se caractrise principalement par une qute organise et systmatique de russite sur les marchs, ce qui peut se traduire par une multiplicit de formules. Une esthtique mgabudgtaire est mise en avant, qui se caractrise par de lomds budgets de production dont la richesse est perceptible par le spectateur l'cran: stars, dcors, effets spciaux, etc. Cette logique se retrouve galement dans les non moins importants budgets de marketing qui permettent d'organiser une promotion gnralement vnementielle et une diffusion caractrise par la matrise de la distribution et l'occupation d'un nombre lev de salles (Creton, 1997 p.l9).
Ce cinma se caractrise par des films contenu transculturel souvent spectaculaires,
raliss et promus grce d'importants moyens techniques, financiers et humains, et destins
un trs large public. Ce systme fonde sa russite sur des stratgies d'investissement massif
et vise dominer l'espace mdiatique. Ces stratgies finissent par avoir un effet sur les
systmes de valorisation et les spectateurs seraient de plus en plus influencs par une
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promotion mdiatique fonde sur des donnes quantitatives (l'importance du box-office). Une des consquences de ce type de production est la normalisation esthtique. li est noter que la plupart des nations, plus petites, n'ont pas les mmes budgets et doivent faire preuve
davantage de crativit pour mettre le cinma en relation avec le public (Creton, 1997).
Le cinma qubcois, selon Yves Lever, a dbut dans une tradition qui relevait
davantage du cinma d'auteur, avec une forte composante identitaire. Le Qubec tait bien connu dans les circuits des festivals et auprs des critiques et cinphiles. Ce type de cinma a
domin jusqu' tout rcemment, car il semble que le souci de la rentabilit et le dsir d'attirer davantage le public dans les salles ont contribu l'augmentation de productions qui
correspondent de plus en plus la dfinition du cinma commercial.
2.3.2 Le succs
Ce terme est central dans ce travail puisque nous essayons de dterminer, dans l'tat de la
question, tous les facteurs importants dans l'explication du succs commercial rcent du
cinma qubcois. De plus, ce terme est une partie fondamentale de notre hypothse. Afin de
clarifier ce que nous entendons par succs commercial, il est pertinent de traiter des autres
formes de russite qui ont lieu dans l'industrie. Premirement, un film peut obtenir un succs
critique. Cela signifie donc que le film est apprci et respect des spcialistes du domaine.
Le cinma commercial peut obtenir un succs critique, mais ce sont souvent les films
d'auteur, d'art ou d'essai, ceux qui ont tendance avoir une valeur symbolique plus grande,
qui sont susceptibles d'obtenir Wl succs critique. Frquemment, si un film obtient un succs
critique, il risque fort d'obtenir aussi un succs d'estime. Cela se manifeste habituellement
par une forte prsence dans divers festivals de films internationaux, les plus prestigieux tant
ceux de Cannes, de Berlin et de Sundance (pour le cinma dit d'auteur ou indpendant), ainsi que par des nominations dans des galas de remise de prix, comme les Golden Globes, les
Csar, les Gnies, les Jutra et le plus prestigieux de tous, le gala des Oscar. Finalement, il ya
le succs commercial. Ce type de russite, qui consiste valuer le film sur l'chelle
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unidimensionnelle du box-office, est devenu la faon la plus courante d'valuer un film dans
les mdias. Il n'y a pas si longtemps, les chiffres n'intressaient personne mis part les
producteurs et autres cadres de l'industrie, mais prsent le calcul du nombre d'entres et la
dure de vie en salles, les recettes, le classement nord-amricain, etc., sont tous devenus les
centres d'intrt dans les mdias. Cette obsession des chiffres et de la performance a, dans
plusieurs cas, relgu au second plan le dsir d'obtenir une reconnaissance critique et
d'estime, pour atteindre avant tout un succs commercial et quantifiable.
2.3.3 La mondialisation
La mondialisation est un concept central dans ce travail puisque nous stipulons que la
puissance de ce processus irrversible est telle qu'on ne peut s'y soustraire: la mondialisation
touche toutes les sphres d'activit humaine. Il est donc ncessaire de comprendre comment
elle agit sur les acteurs afin d'apprhender d'autres phnomnes qui en dcoulent. La
mondialisation est un processus complexe qui suscite la fois de l'homognisation et de la
diffrenciation, des cohrences, des tensions, des oppositions et des dislocations. La
mondialisation n'est pas un phnomne nouveau. Dans l'histoire, il y a eu plusieurs
mondialisations5. La nouveaut actuelle du phnomne rside dans les caractristiques d'une
rvolution industrielle fonde, en grande partie, sur les technologies renouveles de
l'information et de la communication. La mondialisation n'est pas seulement conomique,
elle est galement technique et culturelle (Creton, 1997). De plus, il existe trois utilisations du mot que nous trouvons pertinentes: d'abord, la mondialisation comme accession la
dimension mondiale d'une ralit, en deuxime lieu, comme la multiplication et
l'intensification des interdpendances au niveau mondial et, finalement, comme un
mouvement organique qui englobe toutes les sphres de la vie. L'enjeu est donc de maintenir l'quilibre entre les acteurs et la plante (Beaud, 1999). Ainsi, dans l'industrie cinmatographique, l'accroissement du dsir d'atteindre le succs sur le plan commercial
5 La mondialisation est un phnomne qui date du XVIe sicle, avec le dbut du commerce international. Nous parlerons ici de la troisime vague de la mondialisation, celle qui concerne la domination des tats-Unis et la cration de discours et thories sur la mondialisation (Noirie l, 2001).
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nat-il des pressIOns conomiques lies l'acclration de la mondialisation et de la
concurrence entre les produits culturels. Cette augmentation invitable de la rivalit entre les
produits culturels modifie donc plusieurs niveaux la faon de produire, de financer et de
distribuer les films.
2.4 Reformulation de l'hypothse
Nous croyons que parmi tous les facteurs qui ont jou un rle dans l'obtention du succs commercial rcent du cinma qubcois, l'aspect qui a le plus chang - et qui touche la
fois le contenu et l'esthtique des films ainsi que le contexte de production et de distribution
de ceux-ci - est la ncessit, devant l'accroissement de la concurrence, d'obtenir un succs
auprs du public, ce besoin se manifestant par l'utilisation croissante de plusieurs stratgies
qui relvent de la sphre du marketing. Par consquent, l'hypothse peut se reformuler
succinctement de cette faon: le dveloppement du secteur de la distribution du cinma
qubcois a contribu de faon importante au succs commercial rcent du cinma qubcois.
2.5 Perspective communicationnelle
Notre perspective communicatioooelle se situe dans une approche sociopolitique, d'o
l'intrt d'avoir recours aux concepts macrostructurels abords par Laurent Creton dans
Cinma et march et L'conomie du Cinma, et par d'autres auteurs cits dans le travail,
comme Mige, Herscovici, Beaud, Flichy, Tremblay et Mnard. Ces derniers expliquent que
l'industrie cinmatographique volue l'intrieur des contraintes conomiques lies la fois
la filire et au contexte de la mondialisation. De plus, ils abordent la complexit de cet objet mixte qu'est le cinma, qui relve la fois de l'art et de l'industrie. Aussi, les concepts
thoriques d'Hlne Laurichesse, qui prsente galement une vision macro de la rcente
croissance exponentielle du marketing cinmatographique, nous aident-ils mieux
apprhender notre objet de recherche. Nous voulons expliquer comment la distribution et la
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mise en march du cinma qubcois ont contribu l'augmentation impressionnante des
parts de march qui ont atteint, en 2005, prs de 20 %. Ainsi, voulons-nous analyser
l'volution de la distribution du cinma qubcois dans son contexte, et les crits cits ci
dessus sont ceux qui conviennent le mieux l' oprationnalisation des concepts que nous
avons choisis.
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CHAPITRE liI
LE CADRE MTHODOLOGIQUE
3.1 Introduction
Dans le chapitre prcdent, nous avons dsign les deux auteurs qui offrent une vision
thorique applicable notre hypothse de recherche. Ces derniers nous permettent de passer
d'un objet abstrait un objet concret par l'oprationnalisation des concepts principaux qui nous aideront mesurer le phnomne qui nous intresse. Dans ce prsent chapitre, nous
expliquerons quelle dmarche nous avons slectionne pour effectuer la recherche. Nous
ferons connatre la population d'enqute, la faon dont nous avons dtermin les indicateurs
des concepts slectionns et celle utilise pour mener l'enqute sur le terrain.
3.2 Type de recherche: une dmarche qualitative
Nous nous sommes fix comme mandat d'analyser le lien qui existe entre le succs
commercial rcent du cinma qubcois et l'volution nouvelle que connat le secteur de la
distribution au Qubec. Le type de recherche que nous avons ralise se situe dans un paradigme explicatif, et relve davantage de la dduction que de l'induction. En effet, nous
avons une hypothse bien appuye par de la documentation thorique relative au sujet et l'objet d'analyse et nous allons vrifier sur le terrain notre hypothse qui part de concepts macrostructurels.
Une analyse quantitative de l'objet aurait pu tre utilise afin d'tablir une corrlation entre le succs commercial et les dpenses en mise en march. Nanmoins, vu la nature
confidentielle des questions budgtaires (et donc la difficult d'avoir accs ce genre de
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donnes), de mme que la complexit du phnomne que nous voulions analyser, nous avons cru qu'une orientation qualitative tait plus pertinente. En effet, la mthode d'investigation
choisie permettait de dcrire et d'analyser les facteurs suivants: la pression du march sur le
secteur de la distribution, la position de la distribution et du cinma qubcois, les rapports de
force qui existent entre les acteurs de l'industrie, la mise en uvre concrte des stratgies de
mise en march et l'impact de la distribution en gnral sur la vie d'un film.
L'approche qualitative nous semble en outre la mthodologie la plus adquate pour ce
type d'objet de recherche puisque la vrification de notre hypothse formule exige une analyse comprhensive et nuance de plusieurs lments (Quivy et Campendhoudt, 2006). En clair, nous analysons les mcanismes qui mettent en relation la distribution, les changements
rcents que connat ce secteur et le succs corrunercial. La technique que nous avons
slectionne est celle de l'entretien documentaire semi-dirig. Premirement, dans l'entretien
documentaire, l'enquteur cherche s'informer sur les connaissances des interviews, par
exemple sur ce que les sujets savent propos des faits ou d'vnements qu'ils vivent ou dont ils ont t les tmoins (Loubet del Bayle, 1986, p.37). Deuximement, les questions dans l'entretien semi-dirig sont ouvertes et refltent ainsi les indicateurs des concepts vrifier
(voir le canevas d'entretien en annexe B). Nanmoins, nous avons pos des questions plus spcifiques la profession et l'exprience du spcialiste interrog (donc paIfois uniques chaque entretien) afin d'obtenir plus d'information, toujours dans le but d'enrichir la cueillette de donnes utiles pour notre analyse. Ce type d'entretien a permis aux rpondants
de donner rellement leur avis sur les thmes abords en lien avec leur connaissance du
milieu et leur exprience professionnelle.
3.3 Notre population d'enqute
Nous avons surtout cherch interroger des distributeurs pUIsque ce sont eux qUI
connaissent le mieux les changements qui ont eu lieu au sein de leur profession: De plus, ils
peuvent rpondre plusieurs questions plus techniques relatives aux tapes de la mise en
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march de longs mtrages qubcois. Ainsi, sur les neuf entretiens semi-dirigs que nous
avons mens, cinq l'ont t auprs de distributeurs, dont un qui est actuellement producteur,
mais qui a t distributeur pendant plusiems annes. Trois rpondants sur les neuf sont
producteurs (dont un qui porte aussi le chapeau du distributeur). Leur vision de la situation est galement trs utile dans la mesure o le producteur travaille de faon intime avec le
distributeur. Nous avons galement deux rpondants dont le travail l'intrieur d'agences de
consultation et de publicit pour le secteur de la distribution nous offre une perspective plus
globale puisqu'ils font affaire avec presque tous les distributeurs. Finalement, le regard
externe d'un chroniqueur et critique de cinma. est tout aussi utile pour nous aider
comprendre les rapports de force qui existent l'intrieur de l'industrie cinmatographique
qubcoise.
Le choix d'interviewer divers types d'informateurs nous a permis de voir la distribution
et son positionnement au sein de l'industrie cinmatographique sous diffrents angles. Notre
chantillon n'est pas exhaustif vu la dimension du prsent travail, c'est pourquoi nous misons
sur la reprsentativit de celui-ci afin d'analyser le lien entre la distribution et le succs
conunercial travers les changements rcents que connat ce secteur. L'utilisation des
renseignements ainsi recueillis peut poser des problmes en ce qui concerne la confiance que
l'on peut accorder ce type d'information puisque l'on peut douter quel point elle
correspond la ralit (Loubet dei Bayle, 1986). Nanmoins, nous croyons avoir suffisatrunent diversifi nos informateurs pour atteindre objectivement la ralit essentielle de notre objet de recherche. En effet, la rptition, la confirmation et la complmentation de plusieurs lments par le croisement des tmoignages des rpondants permettent, selon nous,
de diminuer les traces de subjectivit dans les donnes recueillies.
3.4 Procdures de terrain
Notre travail d'intervieweur, dans le cadre d'entretiens documentaires semi-dirigs,
ncessitait d'abord de nous assurer de la comptence des rpondants dans le domaine.
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Ensuite, le premier contact avec les spcialistes s'est effectu par l'entremise d'un courriel
dans lequel nous nous sommes prsents, et dans lequel nous avons fait connatre le but de la
recherche ainsi que les questions principales qui nous intressaient (voir le canevas d'entretien en annexe B).
Ensuite, avant d'amorcer l'entretien comme tel, nous avons fait un bref survol des thmes
qui seraient abords afin de donner une ide de la structure des questions qui seraient poses.
Nous avons commenc par des questions propres l'individu et ses fonctions, pour passer
ensuite des questions plus larges, sur l'industrie et sa dynamique, et tenniner avec des
questions plus dlicates. Nous nous sommes adapts ce que les rpondants disaient et nous
les avons laiss parler jusqu'au bout de leur ide, tout en restant concentrs sur l'objectif afm de guider la rencontre et d'obtenir un maximum d'information (Jones, 2000). Chaque entretien, enregistr l'aide d'une enregistreuse numrique, a t soigneusement retranscrit
pour crer notre corpus d'enqute. La dure moyenne des neuf entretiens tait de 60 minutes.
L'entretien le plus court a dur environ 25 minutes et le plus long, approximativement
1 heure 40 minutes. Finalement, pour crer notre grille d'analyse, nous avons codifi chaque
entretien en fonction des grands thmes et des sous-thmes de notre instrument de collecte de
donnes (revoir le canevas d'entrevue en annexe B), ce qui nous a permis de former notre corpus d'analyse.
3.5 Liste des rpondants
Dans le but de prserver l'anonymat des spcialistes interviews, nous n'avons pas
identifi les citations. Toutefois, par souci de rigueur, afin de montrer que nous avons cit de
faon quilibre tous les rpondants, nous avons attribu chacun d'eux une lettre de A H,
qui ne correspond videmment pas l'ordre d'numration de la liste ci-dessous. Ainsi, en
identifiant chaque citation par ce code, le lecteur pourra-t-il vrifier si nous avons prsent de
faon gale les propos de tous les professionnels interrogs. Cependant, puisque nous
montrons plusieurs cas de films et des stratgies qui ont t employes pour les mettre en
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march, certains rpondants qui les ont distribus pourront tre reconnus. Dans ces cas, nous
ne codifierons pas les citations qui, en soi, permettent dj d'identifier le spcialiste interrog et que, ce faisant, il serait possible de reconnatre tout ce qui a t cit par celui-ci.
Finalement, pour donner du poids aux propos recueillis ainsi qu'une crdibilit au travail,
puisque les rpondants sont tous des acteurs cls au sein de l'industrie du cinma qubcois
et particulirement dans le secteur de la distribution, nous avons jug pertinent de les nommer. Les personnes qui ont t interviewes sont les suivantes:
1. Luc Dry, prsident et producteur de la socit de production Micro_scope. Aprs
avoir tennin une matrise en gestion d'entreprises culturelles l'Universit York,
Toronto, il devient distributeur chez Malofilm dans les annes 1990. Il devient ensuite
producteur chez Quatre par Quatre Films Inc. Il produit entre autres La moiti gauche du frigo et Un crabe dans la tte. Son plus rcent film est Congorama.
2. Simon Beaudry, prsident de l'agence de cinma Cinac, qui compile les recettes de
tous les films pour l'ensemble des crans du Qubec. Beaudry a travaill au cinma Le Clap, l'Office national du film, au ministre des Communications Ottawa, au
Festival des films du monde de Montral et chez de nombreux distributeurs privs
titre de contractuel. Depuis 1997, il a galement t consultant pour de nombreuses
firmes multimdias, notamment Zaq Technologies et lnfonnission-lntellia (Nurun).
3. Claude Chabot, prsident de l'agence de publicit Groupe Popcorn qui, depuis 2001,
est l'agence de marketing la plus importante de l'industrie cinmatographique. Presque
tous les distributeurs qubcois font affaire avec cette agence.
4. Louis Dussault, prsident et distributeur de K Films Amrique. Il fonde la compagnie
en 1994 et se donne pour mission de rechercher dans les festivals du monde entier les
meilleurs films nationaux et de permettre au Qubec de dvelopper des films qubcois de qualit. Il a distribu entre autres, La Neuvaine, La Lchet et plus rcemment, Toi.
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5. Patrick Roy, prsident et distributeur d'Alliance Atlantis Vivafilm. Diplm en
administration des affaires l'UQM, il uvre dans le milieu de la distribution depuis plus de 15 ans. En 1994, il entre chez Alliance Atlantis Vi vafilm. Il est membre du
conseil d'admiIstration de l'INIS et membre du CNTC (Conseil national du cinma et de la production tlvisuelle). Il a distribu entre autres Bon Cop, Bad Cop. Nitro, Ma Tante Aline, Maurice Richard, Sraphin: un homme et son pch, Aurore et Ma fille, mon ange.
6. Yves Dion, prsident, distributeur et producteur de TVA Films. Il uvre dans le
domaine du cinma depuis 1984. Il a travaill chez Malofilm, o il a t prsident de
1991 1997, chez Blackwatch Releasing et chez quinoxe en 2002, o il a occup le poste de vice-prsident de la distribution. Il est notamment responsable des
acquisitions, du marketing et de la distribution de films pour tous les mdias sur le
territoire canadien et est galement responsable des ventes internationales. Il a distribu
plusieurs films, dont C.R.A.Z. Y.
7. Martin Bilodeau, diteur en chef de Mdiafilm et chroIqueur au Devoir. Il a t nomm rdacteur en chef de l'agence de presse Mdiafilm, organisme qui analyse
l'ensemble de la production cinmatographique diffuse en salles et au petit cran.
8. Marie-Claude Poulin, distributrice et vice-prsidente chez quinoxe Films. Elle travaille depuis plus de 20 ans dans le domaine du cinma et de la tlvision. Elle
devient vice-prsidente des ventes chez Norstar Entertainment et en 1989, vice
prsidente des ventes et acquisitions chez Malofilm Distribution. Elle travaille par la
suite pour Cinepix Film Properties (maintenant Lionsgate Films), pour FillEC et devient ensuite vice-prsidente de la production chez Melenny Productions. De 2002
2004, elle occupe le poste de vice-prsidente chez TVA Films. Elle a travaill
notamment sur la mise en march de C.R.A.z. y.
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9. Pierre Beaudry, prsident et producteur chez Films Zingaro, entreprise active sur le
march de la production tlvisuelle depuis 1993. Son rpertoire se compose de
tlthtres, de tlfilms, de longs mtrages, de sries dramatiques et d'missions pour
les jeunes. Il a produit Dans l 'il du chat.
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CHAPITRE IV
L'VOLUTION ET LA DYNAMIQUE DE LA DISTRIBUTION
4.1 Introduction
Nous avons expliqu dans le chapitre prcdent comment nous avons procd la
collecte de donnes afin d'obtenir de l'information sur le secteur de la distribution de
l'industrie cinmatographique qubcoise. De plus, nous avons prsent les limites et la
porte de la mthodologie slectionne pour la dmonstration de l'hypothse. Dans le prsent
chapitre, nous prsenterons le contenu des neuf entretiens que nous avons raliss. Dans un
premier temps, nous ferons un bref survol des principaux changements qui ont eu lieu dans le
domaine de la distribution. Nous verrons ensuite les causes et les consquences de ces
changements dans le fonctionnement de la distribution et de la mise en march des films
qubcois. Dans un deuxime temps, afin de clarifier davantage la position du distributeur,
nous dresserons le portrait de ses relations avec les principaux acteurs de l'industrie
cinmatographique qubcoise.
4.2 Structure de l'industrie et questions d'argent
En vue de comprendre la dynamique qui structure le secteur de la distribution depuis la
dernire dcennie, nous avons trouv pertinent de poser plusieurs questions gnrales sur son
volution rcente. Dans le mme ordre d'ides, nous avons pos des questions sur les
relations avec le gouvernement, principal bailleur de fonds, de mme que sur les politiques de
financement.
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4.2.1 L'volution de la mise en march
Afin de nous mettre dans le bain, nous avons premirement pos une question pour avoir
un aperu des principaux changements qui ont eu lieu en distribution. Les rponses ont t
assez varies, mais une tendance est ressortie dans plus de la moiti d'entre elles: depuis les
dix dernires annes, et les distributeurs ne le cachent pas, ces derniers essaient de faire
corrune les tats-Uniens.
D'abord, deux rpondants expliquent que dans une certaine mesure, on a toujours fait de la mise en march. Ils affIrment qu'effectivement, les moyens ont chang, mais que dans
les armes 1950, une compagnie, Qubec Productions, a produit plusieurs films grand succs, dont Tit Coq et Un homme et son pch, des films ayant fait l'objet d'une excellente mise en march.
On n'a pas rinvent la roue, on a refait ce qui avait fait que le cinma qubcois tait devenu populaire dans les armes 1950. Par exemple, lorsque Tarzan sortait en salles et qu'on sortait un tigre dans la ville et qu'on faisait une parade. On a juste fait a avec des moyens modernes. (A)
Durant les armes 1970, on cormat une autre priode de succs corrunercial durant
laquelle les films sont bien mis en march et les techniques de marketing cette poque
ressemblent drlement aux techniques d'aujourd'hui, alors, par exemple, on achte une page complte de publicit dans un journal, et on implique normment le vedettariat qubcois (H). la suite d'une priode creuse dans les armes 1980, le cinma et le marketing qubcois reviennent en force vers la fin des armes 1990. Pourquoi? Corrune
nous l'avons mentionn plus haut, parce que, selon la majorit des rpondants, nous avons imit le modle amricain, et que cela implique des changements importants en ce qui a trait
aux techniques de mise en march employes qui devierment un mixte de publicit, de
promotion, de marketing et de produits drivs (H). Cette nouvelle approche entranant une hausse importante des cots lis la mise en march, plusieurs ajoutent qu'elle n'aurait pas pu tre possible sans l'aide du gouvernement et, selon un rpondant, si le gouvernement a
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favoris l'installation d'un nouveau modle de mise en march, c'est grce quelques
individus, dont un en particulier, qui a su convaincre les institutions qu'il fallait changer les
faons de faire. C'est donc lorsque Guy Gagnon a joint Alliance Atlantis Vivafilm Montral que les choses ont rellement commenc bouger:
C'est celui qui a mis au monde la nouvelle faon de faire des films au Qubec. Bon, lui vient du Lac Saint-Jean, alors c'est monsieur et madame Tout-le-Monde. Il est arriv avec des ides; par exemple, le remake de Sraphin, d'Aurore et il avait toujours rv de refaire Maurice Richard. Donc, il y croyait tellement qu'il a convaincu du monde, mis des gros budgets, les programmes de subventions ont commenc mettre des programmes plus vastes d'aide la mise en march et dans la production (A).
Il semble ainsi que le succs de certains films, dont Les Boys (1997) et Sraphin: un homme et son pch (2002), a eu deux consquences. Premirement, on ralise que nos films peuvent rapporter gros, ce qui fait natre un dsir de ne pas se contenter d'un mil1ion de
dollars au box-office, mais de viser quatre et cinq millions (C). Et deuximement, si on veut obtenir plusieurs millions de dollars en salles,
... on ne peut pas penser seulement dpenser 200000 $ ou 300000 $ comme avant en mise en march. En se disant que si on a pay le film 300000 $, qu'on a dpens 200000 $ en mise en march, que le fdm fait un mil1ion, et qu'on rcupre la moiti c'est correct, et si a marche un peu mieux on va faire un peu plus d'argent, mais on n'en perdra pas trop si a ne fonctionne pas. Donc, on s'est dit, on y va pour la longue balle, on dpense 800 000 $, un et mme deux millions de dollars pour Bon Cop, Bad Cop et c'est devenu plus facile dans les dernires annes de dpenser autant parce qu'on a vu que a marchait (C).
La faon dont ces films ont t mis en march jette les bases d'une nouvelle mthode, largement inspire de cel1e dveloppe par les tats-Unis. Les avis concernant ce qui a le plus chang dans le secteur de la distribution sont varis, mais pour plusieurs rpondants, il
semble que les mdias sont beaucoup plus impliqus puisque maintenant, ils couvrent tous
les films, alors qu'avant, t'avais de la misre faire venir les journalistes au film. Mais l, ils savent que le cinma qubcois est important et pour [les] distributeurs, l'impact mdiatique est trs important (B). De plus, le tiers croient que le centre de toute cette attention
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mdiatique repose sur la revalorisation du star-system qubcois qui, cette fois, est
essentiellement fonde sur le vedettariat tlvisuel. Les gens se reconnaissent dans leurs
vedettes, ils s'identifient et a leur donne le got d'aller les voir sur le grand cran (D) (voir chapitre V, sec. 5.2.1). On mise donc beaucoup sur cet lment pour avoir du succs en salles, ce qui semble tre devenu l'objectif principal depuis le dbut des annes 2000.
Nous voyons que les avis sur les lments changeants au sein de la distribution sont
plutt varis: budgets, techniques de mise en march et vedettariat sont tous des lments qui
ont volu rcemment. Mais, une chose est claire: tous ces lments font partie d'une
nouvelle mthode influence largement par celle dveloppe aux tats-Unis, qui vise d'abord et avant tout le succs commercial. Nous verrons plus concrtement dans le chapitre V
comment les techniques de mise en march ont volu et en quoi elles influencent le succs
commercial qu'un film qubcois peut avoir en salles.
4.2.2 La performance, l'obsession des rsultats et le nouveau mode de financement
Le nouveau modle de production et de mise en march mis en place au dbut des annes
2000 a effectivement permis d'atteindre des parts de march jamais atteintes auparavant. Cependant, cela a entran des consquences importantes au sein de l'industrie, notamment
en ce qui concerne le dsir d'atteindre d'importantes recettes en salles. Premirement, les
distributeurs expliquent que leur mandat est de rejoindre le public vis et que c'est cela qui compte avant tout. Donc, alors que certains films font 2 millions de dollars et sont des checs,
d'autres ne rapportent que 600000 $ et sont des succs. Tout dpend du type de film et du public vis (large ou plus cibl, C.--d. les jeunes) et l'investissement dans la production et dans la mise en march effectue par le distributeur.
Nanmoins, malgr les objectifs qu'ils se fixent eux-mmes, tous les rpondants ont affirm qu'ils ressentent davantage la pression de raliser des performances. Environ le tiers
d'entre eux estiment que c'est parce qu'ils se l'imposent eux-mmes. Par exemple, lorsque
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les compagnies de distribution plus grosses dpensent un million de dollars et plus pour sortir
un film, cela met de la pression sur les autres dpenser davantage. On se dit qu'on devrait
faire comme les autres et mettre au moins 600 000 $ (D). Et paralllement, puisque l'on parle tellement de la performance du cinma qubcois dans les mdias, et que la qualit du
film semble se rsumer la seule variable quantitative des recettes en salles, cela cre une
pression qui n'est pas ncessaire (F), parce que, comme nous venons de l'expliquer cidessus,