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septembre-octobre 2017 PIANISTE n°106 23 À L’AFFICHE 22 PIANISTE n°106 septembre-octobre 2017 TANGUY DE WILLIENCOURT Diplômé en piano, en accompagnement et en direction de chant du Conservatoire de Paris et un temps inscrit en classe de direction d’orchestre, le jeune artiste est un musicien complet. Soliste remarqué et pianiste recherché en musique de chambre, il n’oublie pas pour autant la voix de la symphonie. À l’occasion de la parution d’un disque Beethoven/Schubert en septembre, puis d’un double CD de transcriptions Wagner/Liszt un mois plus tard, nous l’avons rencontré à Saint-Nazaire, au bord de l’océan. L’HOMME- ORCHESTRE V Vous êtes apparenté au violoncelliste Dominique de Williencourt : est-ce par cette filiation que vous êtes venu à la musique ? Dominique est le cousin de mon père. Certes, il me suit de loin, parfois de près, nous avons partagé la scène ensemble, et nos échanges sont fré- quents, mais l’envie de commencer le piano m’est venue spontanément à l’âge de 7 ans : mes grands-parents possédaient un piano et celui-ci m’intriguait. Il arrive très souvent que les parents décident pour leur enfant du choix de l’instrument. En ce qui me concerne, ce ne fut pas le cas. La présence de Dominique, le fait d’assister à ses concerts ont été, bien sûr, des facteurs stimulants ; d’ailleurs, j’ai aussi appris le violoncelle pendant mes deux premières années d’études et, aujourd’hui, je joue très souvent aux côtés de violoncellistes. Vos parents sont-ils également musiciens ? Pas du tout, mais mon père est un grand mélomane. Il est le premier à m’avoir sensibilisé à la musique : il avait une discothèque bien fournie et m’emmenait aux concerts. Lors- que nous partions en vacances, nous écoutions aussi des CD dans la voi- ture pendant tout le trajet. Cela peut paraître banal, mais ce souvenir reste gravé dans ma mémoire. Vous souvenez-vous de la première œuvre qui vous a marqué enfant ? C’était un soir et, à cette époque, nous étions quatre membres d’une fratrie qui allait s’agrandir à six. Mon père nous a réunis et, non sans une certaine solennité, il nous a fait écouter la Cinquième Symphonie de Beethoven comme s’il s’agissait du chef-d’œuvre absolu. C’était l’une des versions de Karajan qui faisait autorité en ce temps-là. J’ai été frappé par cette œuvre. A-t-elle orienté votre goût pour un répertoire particulier ? Beethoven est un compositeur phare pour moi et je reviens régulièrement à lui. Cependant, je m’attache à tra- vailler un répertoire très varié. J’ai beaucoup de gratitude pour mes professeurs qui m’ont encouragé à étudier toutes les écritures, du baro- que au contemporain. Bien sûr, la tentation de me spécialiser est grande, mais je l’envisage le plus tard possible. Je souhaite continuer à explorer les styles et les époques, à me confronter à des œuvres qui, de prime abord, ne m’attirent pas particulièrement. Cela me semble très important, même si, ces derniers temps, j’ai beaucoup joué Liszt, en concert et en studio. Vous évoquez votre tout premier CD en tant que soliste. Liszt a donc emporté votre préférence, devant Beethoven… Je suis ravi de ce premier choix : il représente l’aboutissement d’un pro- jet qui me tenait à cœur. Ce double CD, qui réunit des transcriptions [ TANGUY DE WILLIENCOURT EN QUELQUES DATES 1990 Naissance à Paris 1999 Études au Conservatoire de Boulogne-Billancourt 2007 Premier Prix du Conservatoire 2009 Entrée au Conservatoire de Paris 2013 Masters de piano et d’accompagnement 2015 Premier CD Brahms/ Schumann, avec Bruno Philippe, violoncelle (Evidence Classics). Masters de direction de chant et de lied 2016 Révélation classique de l’Adami. Prix du Jury et du Public de la Société des Arts de Genève 2017 Musicien « Génération Spedidam » Septembre 2017 CD Beethoven/ Schubert, avec Bruno Philippe, violoncelle (Harmonia Mundi) Octobre 2017 Double CD de transcriptions Wagner/Liszt (Mirare) : intégrale des transcriptions d’opéras de Wagner par Liszt SDP PIA0106_022-026AFF_En_couverture.qxp 25/07/17 17:18 Page22

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septembre-octobre 2017 ■ PIANISTE n°106 ■ 23

À L’AFFICHE

22 ■ PIANISTE n°106 ■ septembre-octobre 2017

TANGUYDE WILLIENCOURT

Diplômé en piano, en accompagnement et en direction de chant du Conservatoire de Paris et un temps inscrit en classe de direction d’orchestre,le jeune artiste est un musicien complet. Solisteremarqué et pianiste recherché en musique de chambre, il n’oublie pas pour autant la voix de la symphonie. À l’occasion de la parution d’un disque Beethoven/Schubert en septembre, puis d’un double CD de transcriptions Wagner/Lisztun mois plus tard, nous l’avons rencontré à Saint-Nazaire, au bord de l’océan.

L’HOMME-ORCHESTRE

VVous êtes apparenté au violoncelliste Dominique de Williencourt : est-ce par cette filiation que vous êtesvenu à la musique ?Dominique est le cousin de monpère. Certes, il me suit de loin, parfoisde près, nous avons partagé la scèneensemble, et nos échanges sont fré-quents, mais l’envie de commencerle piano m’est venue spontanémentà l’âge de 7 ans : mes grands-parentspossédaient un piano et celui-ci m’intriguait. Il arrive très souventque les parents décident pour leurenfant du choix de l’instrument.En ce qui me concerne, ce ne fut pasle cas. La présence de Dominique,le fait d’assister à ses concerts ont été,bien sûr, des facteurs stimulants ;d’ailleurs, j’ai aussi appris le violoncellependant mes deux premières annéesd’études et, aujour d’hui, je joue trèssouvent aux côtés de violoncellistes.Vos parents sont-ils également musiciens ?

Pas du tout, mais mon père est ungrand mélomane. Il est le premierà m’avoir sensibilisé à la musique :il avait une discothèque bien fournieet m’emmenait aux concerts. Lors-que nous partions en vacances, nousécoutions aussi des CD dans la voi-ture pendant tout le trajet. Cela peutparaître banal, mais ce souvenir restegravé dans ma mémoire.Vous souvenez-vous de la première œuvre qui vous a marqué enfant ?C’était un soir et, à cette époque,nous étions quatre membres d’unefratrie qui allait s’agrandir à six.Mon père nous a réunis et, non sansune certaine solennité, il nous a faitécouter la Cinquième Symphoniede Beethoven comme s’il s’agissaitdu chef-d’œuvre absolu. C’étaitl’une des versions de Karajan qui faisait autorité en ce temps-là. J’aiété frappé par cette œuvre.A-t-elle orienté votre goût pour un répertoire particulier ?

Beethoven est un compositeur pharepour moi et je reviens régulièrementà lui. Cependant, je m’attache à tra-vailler un répertoire très varié. J’aibeaucoup de gratitude pour mesprofesseurs qui m’ont encouragé àétudier toutes les écritures, du baro-que au contemporain. Bien sûr,la tentation de me spécialiser estgrande, mais je l’envisage le plustard possible. Je souhaite continuerà explorer les styles et les époques,à me confronter à des œuvres qui,de prime abord, ne m’attirent pasparticulièrement. Cela me sembletrès important, même si, ces dernierstemps, j’ai beaucoup joué Liszt,en concert et en studio.Vous évoquez votre tout premier CDen tant que soliste. Liszt a donc emporté votre préférence,devant Beethoven…Je suis ravi de ce premier choix :il représente l’aboutissement d’un pro-jet qui me tenait à cœur. Ce doubleCD, qui réunit des transcriptions [

TANGUY DE WILLIENCOURTEN QUELQUES DATES1990 Naissance à Paris1999 Études au Conservatoire de Boulogne-Billancourt2007 Premier Prix du Conservatoire2009 Entrée au Conservatoire de Paris2013 Masters de piano et d’accompagnement2015 Premier CD Brahms/Schumann, avec Bruno Philippe,violoncelle (Evidence Classics).Masters de direction de chant et de lied2016 Révélation classique del’Adami. Prix du Jury et du Publicde la Société des Arts de Genève2017 Musicien « GénérationSpedidam »Septembre 2017 CD Beethoven/Schubert, avec Bruno Philippe,violoncelle (Harmonia Mundi)Octobre 2017 Double CD de transcriptions Wagner/Liszt(Mirare) : intégrale des transcriptionsd’opéras de Wagner par Liszt

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des metteurs en scène que je ne voispas de contradiction entre ces colla-borations et ma carrière de pianiste.La spécialisation est l’apanage del’époque moderne. Autrefois, les pia-nistes compositeurs improvisaient,jouaient et dirigeaient leurs œuvresdu piano. C’était naturel. Cela s’estperdu avec les concours. Je ne veuxpas me priver de ces expériencespour le moment.Comment votre connaissance du répertoire vocal nourrit-ellevotre interprétation des œuvrespour piano ?Le rapport entre la poésie et la musi -que est très important chez Wagneret, évidemment, dans le lied chezSchubert, Schumann et Brahms.Il éclaire le répertoire pianistiquede ces compositeurs: on retrouve desenchaînements harmoniques issusdes lieder, on comprend alors l’émo-tion contenue et on imagine le textequi pourrait être caché derrière lesnotes. Chez Mozart, il y a aussi

ce lien avec l’opéra. Il est manifestedans sa Fantaisie en do mineur.On le rencontre au niveau du phrasé,des couleurs orchestrales, des choixde tempi et, surtout, de la dramatur-gie: comment tenir tel point d’orgue,arriver sur telle harmonie, amenerun sforzando… La connaissance dulied et de l’opéra nous donne des clés.On parvient à davantage de subtilitéet de relief dans l’interprétation.Le déchiffrage et la réduction des partitions d’orchestre sontpour le chef de chant que vous êtesaussi un jeu d’enfant…Il est vrai que la lecture et la réductiondes partitions d’orchestre permettent

d’accélérer l’apprentissage des par-titions. Par exemple, on décèle rapi -dement la forme. Le danger estqu’on a l’impression d’avoir les mor-ceaux très vite dans les doigts etqu’on peut s’en contenter. Il faut aucontraire approfondir, questionnerla partition. Chez les grands com-positeurs, il y a mille énigmes àchaque mesure, alors on n’a pas finide chercher ! Et on ne peut s’exoné-rer du travail du son, ni de celui dela technique, de tout cet artisanat.Qu’entendez-vous par artisanat ?Je travaille toujours la technique.J’aime faire des exercices un peu pri-maires. Les 51 Exercices de Brahms

sont exceptionnels pour le confortde jeu et leur côté plaisant. J’aimeaussi ceux de Marguerite Long, beau-coup plus basiques, mais très com-plets et efficaces pour obtenir l’acuitédes doigts et l’articulation ou pourtravailler les octaves et les tierces.Sa préface de 25 pages est passion-nante : elle baignait tout de mêmedans l’univers de Debussy et de Saint-Saëns. Si ces exercices font du bienà notre jeu, qu’on en ressent un confort,il ne faut pas s’en priver. Ensuite, onadapte toujours la technique à l’œu-vre, et le mouvement que l’on trou-vera pour réaliser un passage, le fairesonner, reste très personnel. C’est

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À L’AFFICHE TANGUY DE WILLIENCOURT

du compositeur moins connue dupublic: un Beethoven parfois humo-ristique, très tendre et surprenant.C’est intéressant de les proposeren concert.Vous avez étudié au Conservatoirede Paris auprès de Roger Muraro,Claire Désert et Jean-FrédéricNeuburger. Après plusieurs prix(piano, accompagnement etdirection de chant), vous abordez à présent la direction d’orchestre.À 27 ans, comment voyez-vousvotre avenir de musicien ?Le pianiste soliste est confronté à unegrande solitude. L’univers pianistiqueest en cela très difficile. Même sij’adore être en tête à tête avec monpiano, il est indispensable de travailleravec différents musiciens sur d’autresrépertoires tels que la musique dechambre. Je me suis aussi passionné

très tôt pour la musique d’orchestreet l’opéra ; Wagner, mais pas seu-lement : Carmen, La Traviata…Comme au Conservatoire je parvenaisà monter très rapidement les pièces,j’ai pu mener de front les classes dedirection de chant et d’accompagne-ment des chanteurs, puis j’ai été tentépar la direction d’orchestre. J’ai donc commencé à suivre les cours d’Alain Altinoglu. Mais les concerts se mul-tipliant, j’ai dû mettre en stand-bycet apprentissage. Je suis très contentde diriger prochainement l’orchestredu piano, autant que d’avoir participécette année à l’Académie Mozartd’Aix-en- Provence en tant chef dechant. L’an prochain, je remplirai ànouveau ce rôle auprès de RaphaëlPichon pour La Flûte enchantée. C’estun tel enrichissement d’être au contactdes chanteurs, des chefs d’orchestre,

des opéras de Wagner par Liszt,sortira chez Mirare le 13 octobre.Il est né de ma passion pour la musi-que de Wagner, qui a trouvé son échodans les magnifiques transcriptionsde Liszt. Ma formation auprès demon professeur Roger Muraro n’estpas étrangère à ce choix. J’ai consacréces deux dernières années à ce com-positeur, à ses transcriptions, maisaussi à la Sonate en si mineur et auxAnnées de pèlerinage. Je ne perds tou-tefois jamais de vue Beethoven, mêmesi, aujourd’hui, je ne me sens pas légitime pour enregistrer ses sonates.J’aime les inclure dans mes récitals,et il se trouve que j’ai été sélectionnépour participer au Concours Beetho-ven de Bonn en décembre [ville etmois de naissance du compositeur, ndlr].Auparavant, au mois de septembre,je jouerai son Deuxième Concerto avec

l’Orchestre de chambre de Paris àla Philharmonie, dans le cadred’une académie sur le joué-dirigé.Pendant huit jours, nous serons qua-tre pianistes à bénéficier des ensei-gnements de Stephen Kovacevich,Michel Béroff, Momo Kodama etIgor Levit. C’est une grande chance !Avec quelles sonates de Beethovenavez-vous des affinités ?J’en ai travaillé un grand nombre.Je joue l’Opus 111 depuis déjà unedizaine d’années: j’ai passé le concoursd’entrée au Conservatoire de Parisen interprétant le premier mouve-ment ! J’ai une fascination pour cetteultime sonate et je la présenterai àBonn. J’aime aussi jouer celles à deuxmouvements, comme la Sonate en fadièse majeur opus 78, qu’on appelle« À Thérèse », et l’Opus 90 en mi mineur.Toutes deux révèlent une facette

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« LE PIANISTE SOLISTE EST CONFRONTÉ À UNE GRANDESOLITUDE. MÊME SI J’ADORE ÊTRE EN TÊTE À TÊTE AVEC MON PIANO, IL EST INDISPENSABLE DE TRAVAILLERAVEC DIFFÉRENTS MUSICIENS SUR D’AUTRES RÉPERTOIRESCOMME LA MUSIQUE DE CHAMBRE. »

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À L’AFFICHE TANGUY DE WILLIENCOURT

doit à la fois affirmer sa personnalitéet s’effacer derrière le compositeur,laisser parler l’œuvre.Si vous deviez donner des conseilssur la façon de travailler une transcription pour piano…Je pense à Auf dem Wasser zu singende Schubert transcrit par Liszt, parexemple. Toutes ses notes répétéesprésentent une première difficulté,celle de parvenir à la fluidité, à rendrel’image de l’eau qui coule. Une grandesouplesse du poignet doit être com-binée à une acuité du doigt: à chaquedouble-croche, il faut doser la préci-sion digitale, tout en effectuantun mouvement circulaire du poignet.La seconde difficulté est de réussirà mettre en avant la ligne vocale quipasse d’une main à l’autre, sans qu’ellesoit perturbée par les doubles-croches.Ce que je conseille, c’est de chanterle poème en même temps que le jouer.Cela permet de savoir quelle notedoit être appuyée ou relevée. Dansles mouvements lents des musiquesissues de mélodies populaires alle-mandes, Paul Badura-Skoda inventeun texte sur la mélodie ; il pratiquecela pour les sonates de Beethoven.Cette démarche originale permetde trouver les appuis et les carrures,de donner une consistance et du natu-rel au jeu. On peut imaginer des textestrès simples, des dialogues. Pour lestranscriptions de lieder, on choisitbien sûr le texte tel qu’il est écrit.Pour conclure, cette magnifiquevue sur l’océan pendant notreentretien, que vous évoque-t-elle ?Justement La Mer de Debussy ! Je l’aiinterprétée le mois dernier dans

la transcription d’André Capletpour six mains à deux pianos (quatre+ deux) ; encore une ! Une versionétonnante et très réussie que j’aimeraisbien rejouer. Cela m’évoque égale-ment ma première croisière musicalequi aura lieu à l’automne, aux côtésde Dominique et de merveilleuxmusi ciens comme le violoniste Tedi Papavrami et la violoncelliste Emma -nuelle Bertrand.

Propos recueillis par Jany Campello

seulement ainsi que l’on peutaborder un trait difficile en touteconfiance.Revenons à vos projetsdiscographiques: après le disqueSchumann/Brahms et le double CDWagner/Liszt, resterez-vous dans le répertoire romantique ?Je vais m’en éloigner, mais de façonsomme toute relative : je vais enre-gistrer les deux cahiers des Préludesde Debussy en 2018, à l’occasion del’anniversaire de sa mort. Ce qui meplaît chez ce compositeur, c’est évi-demment le travail sur le timbre quiouvre sur toute la musique du XXe siè-cle, mais aussi, comme on ne vientjamais de nulle part, qui puise sessources dans les répertoires de Wag-ner et de Liszt. On trouve trace, chezDebussy, de textures, d’harmoniesqui sont issues de leurs œuvres. Il fautrappeler que celui-ci a rencontré Lisztà Rome et a été fasciné par son uti-lisation de la pédale. On sait le rôlequ’elle joue dans ses compositions.Par exemple, Feux d’artifice a un rap-port évident avec l’écriture lisztienne.À l’inverse, des partitions commeAu bord d’une source ou d’autres piè-ces tardives plus sombres, telles queLa Lugubre Gondole, sont très avant-gardistes et annoncent l’impression-nisme et Debussy.Vous avez enregistré votre premierCD avec le violoncelliste BrunoPhilippe. De nouveaux projets vous réuniront-ils encore ?C’est déjà fait ! Un deuxième CDparaîtra le 22 septembre chez Harmonia Mundi: un programmeplus classique, qui associe la Sonate

« À Kreutzer » de Beethoven, dansune transcription pour violoncelle deCzerny, et la Sonate « Arpeggione »de Schubert, transposée aussi. Deuxsonates dont le premier point com-mun est la tonalité de la mineur, maisqui en comptent beaucoup d’autres.La musique contemporaine fait-ellepartie de votre répertoire ?Si je l’ai souvent travaillée, je ne l’aijamais vraiment introduite dansmes programmes de concerts, à deuxexceptions près : outre Thierry Escaich, je propose sur scène des œu-vres de Jean-Frédéric Neuburger quia été mon professeur, notammentdeux d’entre elles : Maldoror, sa pre-mière partition pour piano, poéti-que et virtuose, et Les Lumières dumanège, un tango pour piano, trèsaccessible et vivant. Je présenteraid’ailleurs cette pièce au ConcoursBeethoven et je suis très heureux dedéfendre sa musique.Comment la musique s’inscrit-elledans votre vie quotidienne ? Avez-vous un rituel pour démarrer la journée ?J’aime travailler le matin. L’atmo-sphère du soir est aussi très propice,on se sent libéré de diverses contin-gences. Le travail de la matinée estefficace. Je n’ai pas vraiment de rituel,mais j’essaie d’organiser mon tempsen fonction des partitions. Je ne com-mence pas par la technique pure.Je file un morceau et celle-ci vientensuite, en cas de besoin. La lectureaccompagne mon travail : je viens delire Réflexions faites de Brendel. Cetouvrage m’a beaucoup intéressé. Il posela question du rôle de l’interprète qui

26 ■ PIANISTE n°106 ■ septembre-octobre 2017

EN CONCERT8 septembre Philharmonie deParis : Concerto n°2 de Beethoven,avec l’Orchestre de chambre de Paris, dans le cadre de la Play-Direct Academy9 et 10 septembre Récital dans le cadre des Pages Musicalesde Lagrasse (11)15, 16 et 17 septembre Récital et musique de chambre au festivalLes vacances de Monsieur Haydn à la Roche-Posay (86)19 septembre Concert du Trio desVictoires de la Musique Classique,avec Adélaïde Ferrière, marimba,et Juanjo Mosalini, bandonéon,dans le cadre du Beaulieu ClassicFestival (06)30 septembre Récital de pianoseul, à quatre mains et deuxpianos, avec Pierre-Yves Hodique,au Festival Muse & Piano au Louvre-Lens (62)1er octobre Duo avec BrunoPhilippe, violoncelle, au Festivalde La Courroie, à Avignon20 octobre Salle Gaveau, Paris :récital seul et en duo avec BrunoPhilippe (violoncelle)22 octobre Récital au Jardin de La Borde, à Leugny (89)

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