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La compagnie Nutrasweet face à la loi sur la concurrence

Technical Report · January 1994

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François Petry

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LA COMPAGNIE NUTRASWEET FACE À

LA LOI DE LA CONCURRENCE ÉTUDE DE CAS PAR FRANÇOIS PETRY MARINA LÉVESQUE Septembre 1994 François Petry, Groupe de recherche sur les interventions gouvernementales, Département de

science politique, Université Laval, Québec G1K 7P4.

EXPOSÉ DE LA SITUATION La spirale rouge qui orne les cannettes de boissons gazeuses diététiques ou les emballages de gomme à mâcher sans sucre est bien connue des consommateurs canadiens. Elle indique la présence d'aspartame dans ces produits, ou plus précisément de Nutrasuc, la marque dominante de cet édulcorant artificiel au Canada. Nutrasuc bénéficie d'une image favorable dans l'opinion. Il ressemble beaucoup au sucre, mais il coûte moins cher et n'a ni son effet cariogène ni son apport calorique.1 C'est pourquoi on associe souvent le logo Nutrasuc avec un style de vie personnel axé sur l'exercice physique et des habitudes alimentaires saines. Pour certains, il symbolise les techniques de marketing de l'avenir. Cependant l'image de Nutrasuc n'est pas que positive. Dans un jugement datant de 1990, le Tribunal de la concurrence a enjoint la compagnie Nutrasweet, qui commercialise Nutrasuc au Canada, de cesser certaines pratiques anticoncurrentielles. L'affaire Nutrasuc va au coeur de la Loi sur la concurrence, dont le rôle est de protéger les consommateurs face aux agissements de compagnies trop soucieuses de gonfler leurs profits aux dépends de la compétition. La question est de savoir où tracer la ligne -- à quel moment la concurrence sévère devient tellement sévère qu'elle suffoque la compétition? La loi canadienne favorise la concurrence en définissant les pratiques commerciales inacceptables, en particulier, l'utilisation abusive par les monopoles de leur puissance commerciale pour écarter la concurrence. Les dispositions portant sur l'abus de position dominante dans l'ancienne législation canadienne (Loi relative aux enquêtes sur les coalitions) n'avaient jamais donné les résultats escomptés. En 75 ans seulement deux firmes canadiennes avaient reconnu leur culpabilité relative à des pratiques monopolistiques. Cette situation était d'autant plus paradoxale que la concentration des entreprises est plus forte au Canada que dans la plupart des économies occidentales, de sorte que les entreprises canadiennes sont bien plus en mesure qu'à l'étranger d'abuser de leur domination du marché. En 1985 le gouvernement conservateur de Brian Mulroney introduisit un nouveau projet de loi sur la concurrence, projet qui fut adopté (loi C-34) par la Chambre des communes l'année suivante. La nouvelle Loi sur la concurrence comportait deux grandes nouveautés par rapport à l'ancienne Loi relative aux enquêtes sur les coalitions en ce qui concerne le monopole et l'abus de

1KOHUT, John, "Competition body charges NutraSweet with monopolizing Canadian market",

The Globe & Mail, 2 juin 1989, p. B2.

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position dominante. D'une part, elle remplaçait l'infraction criminelle sur les monopoles par une disposition civile sur l'abus de position dominante. Cette nouvelle disposition civile est beaucoup plus efficace que l'ancienne disposition pénale parce qu'elle est plus facile à appliquer2. D'autre part, en axant la disposition sur le comportement anticoncurrentiel, la nouvelle loi devenait plus claire que l'ancienne législation qui reposait sur la notion vague de monopole "au détriment du public". C'est en vertu des nouvelles dispositions sur l'abus de position dominante de la Loi C-34 que furent engagées des poursuites contre la compagnie NutraSweet Co. Canada. En 1989, NutraSweet détenait 95 pour-cent des ventes d'aspartame au Canada. Suite à une plainte formulée par Tosoh Canada, un producteur d'aspartame générique, le Bureau de la concurrence fit enquête et conclut que les agissements de NutraSweet contrevenaient aux articles 77 et 79 de la Loi. Le directeur des enquêtes et recherches déposa le premier juin 1989, un avis de demande auprès du Tribunal de la concurrence pour qu'il interdise à la compagnie les pratiques commerciales allant à l'encontre de ces deux articles. Dans son jugement du 4 octobre 1990 le Tribunal donna raison au Directeur sur l'essentiel des accusations portées contre NutraSweet. Ce jugement, en invalidant certaines clauses commerciales avec les clients de NutraSweet, touchait directement les contrats des deux plus importants acheteurs d'aspartame au Canada, Coca-Cola Co. Ltd. et Pepsi-Cola Canada Ltd. Le cas NutraSweet constituait le premier test des dispositions de la Loi sur la concurrence en matière d'abus de position dominante. Il était, de ce fait, doublement important. D'une part, il donnait au gouvernement la possibilité de démontrer ses nouveaux pouvoirs en matière d'abus de position dominante; d'autre part, il suscitait l'intérêt des milieux d'affaires soucieux de connaître les pratiques commerciales jugées acceptables dans le cadre de la nouvelle politique de concurrence.3 L'affaire a aussi donné lieu à une controverse dans l'opinion. Certains ont jugé que

2Le droit pénal imposait un lourd fardeau de preuve puisqu'il fallait démontrer l'infraction au-

delà de tout doute raisonnable. En outre, l'obligation pénale était mal adaptée à l'examen de phénomènes économiques complexes et à l'évaluation d'effets souvent non encore survenus.

3FAGAN, Drew, "NutraSweet case a chance for law to show its teeth", The Globe & Mail, 22 janvier 1990, pp. B1 et B2.

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l'on avait mis au pilori une compagnie très performante sans motif valable, alors que d'autres ont trouvé que le Tribunal aurait dû punir la compagnie NutraSweet de façon encore plus sévère. LES ACTEURS Les organismes gouvernementaux: La nouvelle législation a été accompagnée par la création du Tribunal de la concurrence, un tribunal quasi judiciaire chargé de fonctions décisionnelles pour les causes d'offenses civiles à la Loi de la concurrence. Le Tribunal remplace la Commission sur les pratiques restrictives du commerce qui avait un rôle plus modeste. Tout comme la Commission, le Tribunal de la concurrence ne peut juger que des causes d'offenses civiles. Le Tribunal se compose d'au plus quatre juges provenant de la Division de première instance de la Cour fédérale et d'au plus huit autres membres experts dans les domaines de l'économique et des affaires selon la cause à entendre.4 Pour cette affaire, le Tribunal était composé de trois membres: le juge Barry L. Strayer, président, le juge Max M. Teitelbaum et le Dr. Frank Roseman, un économiste. Le Bureau de la Politique de Concurrence a quant à lui la responsabilité des opérations et des enquêtes liées à la Loi de la concurrence. Les plaintes quant au non-respect des dispositions de la loi sont recueillies et examinées par le Directeur des enquêtes et recherches, qui agit en tant que procureur devant le Tribunal. Les producteurs d'aspartame: NutraSweet Canada, une filiale de NutraSweet Company de Deerfield, Illinois vendait l'aspartame sous la marque de commerce Nutrasuc principalement à des fabricants de boissons gazeuses, de gomme à mâcher et de céréales. NutraSweet avait obtenu un brevet d'exclusivité pour vendre l'aspartame au Canada en 1981. Ce brevet avait expiré en 1987. Tosoh Canada, le seul concurrent canadien de NutraSweet, a déposé une plainte au Bureau de la politique de la concurrence, en février 1988, en alléguant que NutraSweet

4Consommation et corporations Canada, Réforme de la législation sur la concurrence, Ottawa,

décembre 1985, p. 13.

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l'empêchait d'obtenir une part raisonnable du marché. Après un an d'effort, suite à l'expiration du brevet d'exploitation de NutraSweet, Tosoh n'avait pu obtenir que 3% du marché alors que son objectif était de 30%.5 Des contrats d'approvisionnement avaient été conclus avec Cadbury Schweppes Canada Inc. et H.J. Heinz Co. of Canada Ltd. suite à des arrangements financiers pour faire disparaître la spirale Nutrasuc des emballages de ces entreprises. Tosoh Canada avait obtenu le statut d'intervenant lors des audiences du Tribunal, malgré l'opposition de NutraSweet.6 Tosoh désirait avoir accès aux documents confidentiels, ce qui lui a été accordé, mais seuls les avocats qui le représentaient ont bénéficié des informations pour cette affaire. Les principaux acheteurs de Nutrasuc: Les deux principaux acheteurs d'aspartame de marque Nutrasuc sont Coca-Cola Ltd. et Pepsi-Cola Ltd. Ces deux compagnies avaient aussi demandé l'autorisation d'intervenir, mais ont finalement retiré leurs demandes. Elles ont préféré l'entente selon laquelle leurs témoins seraient accompagnés chacun par un avocat chargé de défendre l'intérêt de la société durant les interrogatoires. Vu l'énorme concurrence existant entre les deux entreprises, il semble qu'elles craignaient de voir divulguer des informations utiles à leur adversaire. Les deux entreprises ont d'ailleurs l'habitude d'adopter la même conduite pour éviter de s'exposer au risque de faire une erreur à l'avantage de l'autre. Le sceau de la confidentialité dans l'affaire Nutrasuc a privé l'opinion publique des arguments cruciaux qui ont motivé la décision rendue par le Tribunal. Par exemple, le témoignage du président de Coca-Cola, Anthony Eames, n'était pas du domaine public lorsqu'il s'agissait des contrats de la compagnie avec NutraSweet. L'affaire qui devait servir de barème aux industriels n'a donc pas vraiment rempli ce rôle.7 5GRAHAM, Clyde, "NutraSweet's contracts struck down, rivals unfairly squeezed out,

Competition tribunal says", Montreal Gazette, 5 octobre 1990, p. B9.

6GRAHAM, Clyde, "NutraSweet's trial will be test for law", Montreal Gazette, 8 janvier 1990, p. C11.

7CORCORAN, Terence, "NutraSweet hearing's secrecy rises incomplete conclusions", The Globe and Mail, 23 février 1990, p. B2.

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L'article 79 de la loi sur la concurrence énonce les éléments qui doivent être pris en compte par le Tribunal pour juger une affaire d'abus de position dominante (voir annexe). La prise en compte de ces éléments pose trois sortes de questions dans le cas NutraSweet: a) comment doit-on définir le marché? b) les agissements de NutraSweet sont-ils anticoncurrentiels? c) NutraSweet occupe-t-elle une position dominante? LE MARCHÉ DE L'ASPARTAME Pour arriver à une définition du marché précise, il convenait de distinguer trois aspects: le marché du produit; le marché géographique; les conditions d'accès au marché. Le marché du produit: L'alinéa 79 (1)(a) de la loi sur la concurrence fait référence aux "pratiques qui ont pour effet de réduire la concurrence de façon substantielle dans un marché" ainsi qu'à l'identification d'un produit pertinent. La question se posait donc de savoir premièrement s'il fallait considérer comme pertinents tous les édulcorants ou seulement l'aspartame. NutraSweet préférait une définition large du produit, incluant peut-être tous les édulcorants, et au moins tous les édulcorants à toute intensité. La compagnie NutraSweet craignait qu'une définition étroite du produit de marché ne conduise le Tribunal à conclure qu'elle détenait un pouvoir sur le marché alors qu'une conclusion différente aurait pu être tirée si toutes les pressions concurrentielles (y compris les pressions provenant de producteurs d'édulcorants autres que l'aspartame) étaient prises en considération dans l'examen de la question de pouvoir sur le marché. Le Directeur a allégué que seul l'aspartame constituait le produit pertinent. Le Tribunal a décidé dans le même sens. La conclusion du Tribunal reposait sur plusieurs considérations touchant notamment à la nature (goût, apport calorique) du produit, à la réglementation de sa commercialisation, aux écarts de prix constatés entre différentes régions et aux réactions des utilisateurs face aux variations de prix. Aspartame vs. édulcorants caloriques: Parmi les édulcorants, il convient de distinguer les édulcorants caloriques (sucre, sirop de maïs) et les édulcorants artificiels à forte intensité.

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L'aspartame fait partie de la famille des édulcorants à forte intensité. Sa forme de poudre blanche cristalline sans odeur se rapproche beaucoup du sucre. Il possède cependant un pouvoir sucrant 180 fois supérieur à celui du sucre à poids égal. L'aspartame se distingue aussi des édulcorants caloriques par ses débouchés. Comme l'indique le tableau 1 en annexe, les ventes d'aspartame à l'industrie obéissent irrésistiblement à le demande du secteur des boissons gazeuses. Environ 85 pour-cent des ventes industrielles d'aspartame sont réalisées dans ce secteur. Le pourcentage élevé d'aspartame vendu à l'industrie des boissons gazeuses contraste avec les ventes limitées d'aspartame à d'autres fins industrielles. Certains témoins ont soutenu devant le Tribunal qu'il existait une concurrence au niveau des prix entre l'aspartame et les édulcorants caloriques et de ce fait, la demande de l'aspartame était sensible au mouvement des prix du sucre. Dans ces conditions, les producteurs d'aspartame étaient peu enclins à augmenter leurs prix parce qu'une telle décision entraînerait des pertes de vente. En outre, selon ces témoins, le marché grandissant des boissons gazeuses diététiques constituait la preuve d'une concurrence indirecte entre l'aspartame et les édulcorants caloriques.8 Le problème avec cet argument est qu'il était impossible de distinguer l'effet des changements de prix d'autres facteurs qui avaient un effet sur les ventes (publicité, changement dans les préférences des consommateurs). En outre, la question de la concurrence indirecte entre l'aspartame et les édulcorants caloriques était inséparable de la question de l'autoconcurrence entre boissons diététiques et boissons qui renferment du sucre. Cette dernière question relevait plus de la stratégie commerciale des clients de NutraSweet que des agissements anticoncurrentiels de NutraSweet. Le Tribunal n'a pas jugé utile de l'examiner. Aspartame vs. autres édulcorants à forte intensité: Contrairement aux édulcorants caloriques, avant d'être commercialisés, les édulcorants à forte intensité doivent faire l'objet d'un processus d'approbation sévère et prolongé. En 1990, il existait quatre édulcorants à forte intensité, mais seul l'aspartame avait été approuvé par Protection de la santé Canada pour une utilisation dépassant 8On entend par concurrence indirecte la concurrence qui se fait au niveau des produits qui

renferment des édulcorants. On parle de concurrence directe entre édulcorants lorsqu'un édulcorant est préféré à un autre pour une utilisation particulière. L'élasticité croisée entre les édulcorants caloriques et l'aspartame a été évaluée à 0,14 en ce qui concerne les boissons gazeuses diététiques. En d'autres termes, une diminution de 1% du prix de l'aspartame donnerait lieu à une augmentation de 0,14% de la part du marché des boissons gazeuses diététiques.

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l'usage domestique.9 L'aspartame était principalement utilisé comme ingrédient dans les boissons gazeuses, un débouché qui représentait 60 pour-cent de l'aspartame consommé au Canada.10 L'aspartame avait été découvert en 1966 par la société G. D. Searle & Co. qui obtint des brevets pour son exploitation dans plusieurs pays. Une division de Searle, The NutraSweet Company, de Deerfiled, Illinois avait le mandat de produire et de commercialiser l'aspartame. Comme il a fallu beaucoup de temps aux autorités réglementaires de la santé pour autoriser la commercialisation, l'entrée sur le marché s'est produite alors que la durée des brevets était déjà entamée.11 L'aspartame avait deux avantages par rapport aux autres édulcorants à forte intensité. Il n'avait pas d'arrière-goût, contrairement à la saccharine, et il était sécuritaire. Toutefois, il avait des défauts d'ordre technique12 qui tendaient à en limiter l'utilisation et qui l'exposaient à la concurrence d'autres édulcorants et en particulier le sucralose dont la commercialisation était sur le point d'être approuvée. Le sucralose constitue une menace inquiétante pour l'aspartame parce qu'il a toutes les qualités de l'aspartame et en plus il offre une plus grande stabilité à la chaleur.

9Les édulcorants artificiels, tels que le sucralose, l'acésulfame-K et l'alitame, étaient des

substituts potentiels de l'aspartame pour certains usages. Leur demande d'approbation au Canada pour leur utilisation dans les boissons gazeuses était en cours de traitement. Les cyclamates avaient l'approbation canadienne pour leur utilisation domestique, mais étaient bannis aux États-Unis à cause de leur lien supposé avec le développement du cancer. La saccharine pouvait être vendue pour utilisation domestique, mais seulement en pharmacie.

10FOX, John, "Tosoh challenges NutraSweet, Canada looms as a bitter battleground for aspartame wars", Financial Post, V.83(22), 3/5 juin 1989, p. 3.

11Aux États-Unis, la première autorisation a été aussi obtenue en 1981, mais l'usage en était restreint; il a fallu attendre en 1983 pour pouvoir utiliser l'aspartame dans les boissons gazeuses. La durée des brevets d'exploitation a été prolongée dans certains pays: de 1983 à 1987 au Royaume-Uni et jusqu'en décembre 1992 aux États-Unis et en Australie.

12L'aspartame perdait sa saveur sucrée lorsqu'il était chauffé (ce qui empêchait son utilisation dans les produits de boulangerie) et suite à de longues périodes d'entreposage (un inconvénient majeur pour son utilisation dans les boissons gazeuses). Le problème de stabilité à la chaleur a été résolu par une forme encapsulée d'aspartame. En ce qui concerne le problème du stockage, l'utilisation d'un mélange de deux édulcorants, l'aspartame et la saccharine, permettait d'obtenir un produit beaucoup plus stable.

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Le Tribunal a considéré qu'il existait vraisemblablement une concurrence entre l'aspartame et les autres édulcorants. Cependant, la véritable question, aux yeux du Tribunal était de savoir si cette concurrence empêchait les producteurs d'aspartame d'augmenter leurs prix. Le Tribunal a jugé qu'il n'existait aucune preuve que cela est le cas. En conséquence c'est la définition étroite du produit qui a été retenue. D'une part, les ventes d'aspartame pour la consommation domestique étaient trop faibles pour que l'on puisse parler d'une véritable concurrence par les prix dans ce secteur. D'autre part, l'influence des autres édulcorants sur les prix de l'aspartame dans le secteur industriel était trop limitée pour que l'on puisse parler de véritable concurrence. L'aspartame était le seul édulcorant à forte intensité à avoir été approuvé comme additif alimentaire au Canada. Par conséquent, l'impact sur la concurrence au Canada d'autres édulcorants à forte intensité ne pouvait être qu'indirect, c'est-à-dire qu'il ne pouvait découler que des prix de l'aspartame à l'étranger tels qu'ils se répercutaient sur les prix canadiens. La question qui se posait donc était de savoir dans quelle mesure le marché canadien était protégé des répercussions de la concurrence internationale. La réponse à cette question se trouvait dans la définition du marché géographique.

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Le marché géographique: Le Directeur a allégué que le Canada était la région géographique pertinente. Cette opinion était étayée par plusieurs considérations, notamment, les différences de prix existant entre les différentes régions géographiques (Canada, États-Unis, Europe), le traitement distinct accordé au Canada relativement aux prix et aux volumes dans les contrats conclus entre NutraSweet Coke et Pepsi, ainsi que le régime propre de réglementation et d'approbation des édulcorants à haute intensité au Canada, régime qui entraînait des résultats différents de ceux que l'on retrouvait à l'étranger. Plus précisément, le Directeur a soutenu que la sévérité des règlements canadiens en matière d'approbation des édulcorants à forte intensité autres que l'aspartame risquait d'accroître la demande en aspartame et de maintenir un haut niveau de prix. NutraSweet a soutenu que le Canada n'était pas suffisamment à l'abri des tensions suscitées par les prix à l'étranger pour que les caractéristiques particulières du marché canadien permettent d'imposer des prix sensiblement différents des prix des autres régions. NutraSweet fondait cette opinion sur les observations suivantes: comme il n'existait pas de producteur canadien d'aspartame, le Canada faisait nécessairement partie d'un marché géographique qui s'étendait au-delà de ses frontières; les frais de transport de l'aspartame étaient très peu élevés; il n'existait pas de barrières tarifaires ou non tarifaires pour l'aspartame; le peu d'infrastructure requise pour la distribution facilitait l'accès au marché canadien. En conséquence, tant qu'il y aurait des fournisseurs à l'étranger, ceux-ci accéderaient rapidement et facilement au marché canadien directement ou indirectement, si NutraSweet tentait d'augmenter ses prix au Canada. Le Tribunal a suivi l'avis du Directeur. Il a considéré qu'il était peu probable qu'une péréquation des prix de l'aspartame découle de son déplacement d'une région où les prix sont bas vers une région où ils sont élevés, car les contrats d'approvisionnement d'aspartame sont conclus pour un pays donné. D'autre part, l'existence même de ces contrats d'exclusivité et l'utilisation du logo Nutrasuc sur les emballages constituaient une barrière à l'entrée dans le marché canadien à laquelle se heurtaient les nouveaux distributeurs. Les clauses particulières à chaque pays ainsi que les différences de prix d'une région à l'autre permettaient donc, aux yeux du Tribunal, de traiter le Canada comme un marché géographique distinct aux fins de l'évaluation des effets des pratiques commerciales de NutraSweet.

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Conditions d'accès: En 1990 les ventes canadiennes d'aspartame représentaient environ 385 tonnes métriques d'une valeur de 25 millions de dollars par année. Sur cette quantité, 300 tonnes métriques servaient à satisfaire la demande de cinq fabricants de boissons gazeuses: Coke, Pepsi, Crush, Cadbury-Schweppes et A&W. Le marché canadien ne représentait que 5% du marché mondial de 7500 tonnes dont 75% se retrouvaient aux États-Unis et 15% en Europe. NutraSweet contrôlait 95% du marché au Canada, et 85% en Europe. Il était le seul fournisseur aux États-Unis.13 L'aspartame vendu par NutraSweet Canada provenait de deux usines américaines d'une capacité combinée de 5400 tonnes. NutraSweet Co. était la seule compagnie au monde à posséder un brevet pour toutes les étapes de la production d'aspartame. Elle avait des contrats de licence avec les autres compagnies de production, notamment en ce qui concerne l'étape de la cristallisation. Selon les témoignages d'économistes devant le Tribunal de la concurrence, pour produire à un coût concurrentiel avec le niveau de coût de NutraSweet, un concurrent devait posséder une usine entièrement spécialisée, d'une capacité substantielle et opérant à un pourcentage élevé de sa capacité de production. Spécifiquement, les usines polyvalentes, les très petites usines ou les usines qui opéraient à un niveau très inférieur à leur capacité de production ne pouvaient vraisemblablement devenir compétitives avec les niveaux de coûts existants de NutraSweet. Toujours selon ces mêmes témoignages, seule une usine possédant une capacité de production de plus d'un tiers de la production mondiale pouvait espérer tirer avantage d'économies d'échelle.14 Un nouvel entrant dans l'industrie de l'aspartame devait donc non seulement assumer les coûts irrécupérables associés à la possession d'usines spécialisées dans la production d'aspartame (estimés à 100 millions de dollars), mais aussi surmonter les obstacles associés aux brevets d'exclusivité des producteurs déjà existants, et réaliser les économies d'échelle relatives à la demande mondiale.

13THOMPSON, Donald N., «NutraSweet: The evolution of law on abuse of dominant position»,

Canadian Business Law Journal, V.18(1), mai 1991, pp. 18 et 19.

14L'usine de NutraSweet à Augusta en Georgie était en construction à l'époque; elle devait avoir une capacité de 2100 tonnes représentant plus du quart de la production mondiale et plus que le total des ventes d'aspartame en dehors des États-Unis, mais malgré tout, elle ne correspondait pas aux estimations de la production minimale rentable.

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Le seul compétiteur canadien de NutraSweet, Tosoh Canada Ltd. de North York, Ontario, commercialisait l'aspartame fabriqué par Holland Sweetener Compagny, une entreprise à risques partagés entre Naamloze Vennootschap DSM des Pays-Bas et Tosoh Corporation du Japon. Cette entreprise possédait une usine d'aspartame en Hollande d'une capacité de 500 tonnes par année. Outre NutraSweet et Holland Sweetener, la seule autre compagnie dans le monde avec la capacité de produire de l'aspartame à un faible coût, Ajinomoto and Co. Ltd du Japon, produisait 1500 tonnes par année dans ses usines spécialisées. NutraSweet possédait une entente avec Ajinomoto qui lui octroyait le droit de vente nord-américain pour l'aspartame fabriqué par Ajinomoto jusqu'en 1996 alors qu'elle octroyait à Ajinomoto le droit de vente japonais pour l'aspartame fabriqué par NutraSweet. Ajinomoto et NutraSweet possédaient une entreprise à risques partagés, NutraSweet AG, qui mettait en marché de l'aspartame sous la marque de commerce Nutrasuc en Europe. Aucun producteur d'aspartame en Amérique du Nord ou en Europe, excepté NutraSweet, n'avait la capacité de production pour satisfaire l'ensemble des demandes courantes des plus importants acheteurs nord-américains d'aspartame ni la possibilité de satisfaire les demandes courantes des deux plus importants acheteurs canadiens, Coca-Cola Canada et Pepsi-Cola. Le Tribunal a estimé qu'il existait d'importants obstacles à l'accès de nouveaux fabricants d'aspartame autres que NutraSweet. L'accès au marché était difficile parce que les nouveaux producteurs qui voulaient atteindre des coûts de production comparables à ceux de NutraSweet devaient surmonter les obstacles liés à l'obtention de brevets, aux économies d'échelle relatives à la demande mondiale, et aux coûts irrécupérables. CONTRÔLE DU MARCHÉ PAR NUTRASWEET Un autre élément entrant en ligne de compte pour qu'une ordonnance soit rendue par le Tribunal est qu'un agissement anticoncurrentiel ait pour effet de diminuer sensiblement la concurrence dans un marché. Comme nous l'avons vu, le marché en question est la vente et l'achat d'aspartame au Canada. Pour déterminer si les agissements de NutraSweet risquaient de diminuer la concurrence, le Tribunal devait donc examiner la question de savoir si NutraSweet avait une emprise sensible sur le marché. Selon le Directeur, il était évident que NutraSweet disposait d'une puissance de marché appréciable compte tenu de sa part de marché, des conditions d'accès et des restrictions imposées

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à ses clients les plus importants. À l'inverse, NutraSweet a allégué qu'elle n'était pas en situation de puissance commerciale en raison d'une part de l'existence de concurrents actuels ou potentiels et d'autre part, de la capacité de Coke et Pepsi, en tant qu'acheteurs très importants, de protéger leurs intérêts et de faire obstacle à tout pouvoir qu'elle pourrait détenir. En ce qui concerne l'existence de concurrents, NutraSweet a observé que sa puissance commerciale avait évidemment diminué depuis l'expiration de son brevet d'exploitation canadien. La baisse des prix et l'augmentation de la production d'aspartame depuis 1987 prouvaient que NutraSweet ne possédait pas de puissance commerciale. Le Tribunal a jugé qu'il était difficile de tirer cette conclusion de la preuve fournie compte tenu de l'allégation selon laquelle NutraSweet fixait des prix inférieurs aux coûts de revient (voir infra). NutraSweet n'a pas manqué d'observer que Coke et Pepsi possédaient une forte position stratégique du fait qu'ils contrôlaient un volume suffisant pour leur permettre, au besoin, d'aider un concurrent à s'établir afin de répondre à leur demande ou de devenir eux-mêmes producteurs d'aspartame. Selon NutraSweet, la position de Coke et Pepsi était d'autant plus forte que les coûts irrécupérables de NutraSweet la rendaient très vulnérable si une telle situation se produisait. Le Tribunal n'a pas jugé l'argument convaincant. En effet, il ne tenait pas compte du fait que les coûts irrécupérables nuisaient également à la position de Coke et Pepsi en tant que producteurs potentiels. Par ailleurs, la capacité de Coke et Pepsi d'accéder à l'industrie de l'aspartame n'était pas aussi évidente qu'il y paraissait si l'on considère les obstacles stratégiques et financiers auxquels se heurtait un tel accès. Coke et Pepsi étaient dans une situation telle que chacun devait tenir compte de la réaction de l'autre. Par exemple, si les deux compagnies décidaient de retirer le logo Nutrasuc de leurs contenants, le risque de perdre des ventes était moins élevé que si seulement l'une d'elle le ferait. L'historique de l'adoption du logo Nutrasuc par Coke est révélateur à cet égard. Lorsque l'utilisation de l'aspartame a été approuvée dans les boissons gazeuses aux États-Unis en 1983, Coke a d'abord choisi d'utiliser un mélange d'aspartame et de saccharine tandis que Pepsi optait pour l'aspartame seulement, ce qui lui permettait de reproduire le logo Nutrasuc sur ses contenants en vertu des contrats en vigueur avec NutraSweet. Coke a décidé de faire de même après quelques mois. Pour le Tribunal, il ne faisait aucun doute que NutraSweet dépendait en grande partie de Coke et Pepsi, mais l'inverse était également vrai. Coke et Pepsi dépendaient et dépendraient encore longtemps de NutraSweet même après l'expiration du brevet d'exploitation américain. En

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conséquence, le Tribunal a conclu que NutraSweet contrôlait le marché canadien de l'aspartame grâce à sa puissance commerciale. AGISSEMENTS ANTI-CONCURRENTIELS, EXCLUSIVITÉ ET VENTE LIÉE Dans sa plainte, Tosoh a allégué que NutraSweet se servait de ventes exclusives, de ventes liées et d'une série d'autres pratiques de vente qui constituaient un abus de position dominante. Suite à l'enquête du Bureau de la concurrence, le Directeur des enquêtes et recherches, Calvin Goldman, a présenté sa demande accompagnée d'un rapport de trente-trois pages résumant les faits au Tribunal de la Concurrence en juin 1989.15 Selon le rapport du Directeur, NutraSweet était engagé dans la pratique d'actes anticoncurrentiels décrits à la section 78. Le Directeur demandait au Tribunal un ordre défendant à NutraSweet d'utiliser ces pratiques sur le marché canadien. Les allégations du Directeur se regroupaient sous deux rubriques: les clauses de contrats qui créaient une relation d'approvisionnement exclusive entre NutraSweet et ses clients et la vente d'aspartame à un prix inférieur à son coût d'acquisition. Les allégations sur les clauses de contrats étaient fondées sur l'article 77 qui traite de l'exclusivité et des ventes liées et l'article 79 qui porte sur les "agissements anticoncurrentiels". L'allégation sur le niveau de prix constituait un des agissements définis par l'article 78.16 NutraSweet a rejeté ces allégations dans un document déposé devant le Tribunal. Selon ce document, "le succès [de NutraSweet] dans la promotion de sa marque d'aspartame reposait seulement sur son innovation, sa prise de risque et sa performance supérieure." Elle a aussi démenti posséder 95% du marché, mais sans fournir sa propre évaluation.17 Huit accusations d'agissements anticoncurrentiels se fondaient sur l'article 79 de la Loi, à savoir:

15Demande présentée par le Directeur des enquêtes et recherches en vertu des articles 79 et 77

de la loi sur la concurrence, 1989.

16Tribunal de la concurrence du Canada. Motifs et ordonnances dans l'affaire entre le Directeur des enquêtes et recherches, the Nutrasweet company et Tosoh Canada Ltd., 1990, no. 17.

17GRAHAM, Clyde, "NutraSweet denies it has aspartame market control", The Globe and Mail, 2 août 1989, p. B3.

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Abus touchant les exigences relatives aux déclarations gouvernementales: Selon le Directeur, le fait que NutraSweet avait déclaré une perte dans ses déclarations d'impôt de 1986 à 1988 constituait un agissement anticoncurrentiel compte tenu de sa situation de puissance sur le marché. Étant donné qu'elle ne payait pas d'impôts au Canada sur ses opérations canadiennes et qu'elle n'en paierait pas pendant un certain temps en raison de ses pertes accumulées, NutraSweet jouissait d'un avantage concurrentiel par rapport aux concurrents existants ou éventuels. Selon NutraSweet, il convenait d'examiner l'ensemble des obligations d'impôt de la compagnie, car, si elle faisait des économies d'impôt au Canada, elle en payait alors davantage aux États-Unis. Le Tribunal a décidé que les allégations du Directeur ne pourraient être admises puisqu'il n'avait pas démontré que les abus touchant les exigences relatives aux déclarations d'impôt gouvernementales avaient un but anticoncurrentiel.18 Mais dans le jugement du Tribunal, le juge Teitelbaum a noté que l'argument de NutraSweet ne constituait pas une excuse valable pour ne pas payer de taxes au Canada.19 Exclusion contractuelle des concurrents éventuels: Le Directeur a prétendu que l'exclusion d'Ajinomoto du marché canadien à titre de fournisseur indépendant d'aspartame aux termes d'une entente avec NutraSweet constituait un agissement anticoncurrentiel. L'entente écrite n'avait pas été déposée, mais des témoins de NutraSweet ont déclaré qu'Ajinomoto avait convenu de ne pas vendre au Canada, ni aux États-Unis, jusqu'à la fin de 1995. Selon NutraSweet, la décision d'Ajinomoto n'était pas un agissement anticoncurrentiel, mais faisait partie d'une entente globale en vue d'accroître l'efficacité. Cependant, rien ne prouvait que l'entente entre Ajinomoto et NutraSweet ait eu des effets positifs sur la performance des deux compagnies. Le Tribunal a jugé que les deux

18Des représentants de la haute direction de NutraSweet, y compris son président, avaient

témoigné sous serment que NutraSweet avait réalisé des profits durant cette période grâce à ses opérations canadiennes. Il était donc évident qu'au moyen d'une "comptabilité créative", NutraSweet avait réussi à ne pas payer au gouvernement du Canada des impôts au titre des profits qu'elle avait réalisés au Canada.

19GEDDES, John, "Sour taste of sweet tax deal, NutraSweet case revives concern over profit-siphoning", Financial Post, V.84(42), 6 octobre 1990, p. 10.

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principaux producteurs, chacun ayant des atouts considérables, quoique différents, avaient convenu de ne pas se faire concurrence. Pour qu'un agissement soit considéré anticoncurrentiel aux termes de l'article 78, le critère que le concurrent de l'entreprise dominante soit une cible et non un allié devait s'appliquer. Le Tribunal a estimé qu'on ne lui a pas apporté de preuves suffisantes pour conclure que l'entente entre NutraSweet et Ajinomoto (dans la mesure où elle touchait le Canada) constituait un agissement anticoncurrentiel aux termes de l'article 78. Clause d'approvisionnement exclusif: Cette clause imposait au client d'acheter tout l'aspartame dont il avait besoin de NutraSweet. Le client devait en outre utiliser l'aspartame produit par NutraSweet comme seul ou principal édulcorant dans une partie ou la totalité de ses produits. Le Directeur a allégué que cette clause constituait un agissement anticoncurrentiel dans le contexte de la stratégie de l'ingrédient de marque, stratégie utilisée par NutraSweet pour faire connaître et apprécier la marque de l'ingrédient Nutrasuc aux consommateurs de produits qui contenaient cet ingrédient. Cette stratégie avait un double avantage pour NutraSweet. D'une part, elle lui permettait de faire de la publicité pour Nutrasuc auprès des consommateurs de produits diététiques en se servant des emballages de ces produits comme support publicitaire. D'autre part, elle incitait les compagnies clientes à continuer de s'approvisionner en aspartame chez NutraSweet. Selon NutraSweet il s'agissait d'une technique de marketing particulièrement efficace, mais inoffensive, destinée en partie à dissiper les craintes des consommateurs au sujet de l'innocuité du produit. Le Directeur a allégué que la promotion de Nutrasuc par voie d'apposition d'une marque de commerce était beaucoup plus qu'une technique de marketing inoffensive, il s'agissait en fait de l'élément clé d'une stratégie destinée à éliminer la concurrence. La stratégie de l'ingrédient de marque avait été mise en place à l'époque où NutraSweet bénéficiait encore d'un brevet exclusif d'exploitation. Les bénéfices qu'en retirait NutraSweet n'étaient pas évidents à l'époque puisque les clients devaient obligatoirement s'approvisionner chez elle. Ce n'est qu'à partir du moment où le brevet d'exploitation eut pris fin que cette stratégie a commencé à porter ses fruits. En obligeant les clients industriels désireux de changer de fournisseur à effacer le logo Nutrasuc de leurs emballages, elle augmentait leur coût de production et rendait leurs produits potentiellement moins désirables aux yeux des consommateurs de ces produits. L'interprétation

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du Directeur a été acceptée par le Tribunal qui a conclu que la clause d'approvisionnement exclusif recherchait bien l'exclusivité et constituait donc un agissement anticoncurrentiel. Déduction relative à l'apposition de la marque de commerce ou du logo: Un rabais important du prix brut de l'aspartame (40%) était accordé au client. En retour, celui-ci devait reproduire le nom Nutrasuc et le logo sur ses emballages et dans sa publicité à la télévision et dans les journaux en identifiant les produits qui contenaient de l'aspartame de marque Nutrasuc. Les programmes de commercialisation en commun comportaient un autre rabais sous la forme d'un montant par livre que NutraSweet versait au client pour ses programmes de commercialisation des produits contenant de l'aspartame de marque Nutrasuc. Sans les rabais pour l'apposition du logo et la publicité, les prix consentis par NutraSweet à ses clients auraient été sensiblement plus élevés que ceux de la concurrence. Le Tribunal a conclu que ces réductions visaient à renforcer l'exclusivité et constituaient, elles aussi, un agissement anticoncurrentiel. Clause de prix concurrentiel ou de dédit: La clause de prix concurrentiel ou de dédit permettait aux clients de NutraSweet de faire des appels d'offre competitive pour leur approvisionnement en aspartame. NutraSweet avait alors le choix de vendre son produit au prix inférieur du concurrent ou de dégager le client de son obligation, lui permettant ainsi d'acheter auprès d'autres fournisseurs. Lorsqu’un client se prévalait de cette clause, il devait transmettre à NutraSweet les informations sur les offres des concurrents. Ceci permettait à la compagnie NutraSweet de cibler ses offres concurrentielles de façon à conserver ses clients quand elle le désirait. Le Directeur a allégué que cette clause renforçait les effets anti-compétitifs des contrats d'exclusivités qui existaient entre NutraSweet et ses clients. Les concurrents n'étaient pas incités à faire des soumissions d'offre s'ils anticipaient que cette offre ne servirait que de monnaie d'échange. Selon NutraSweet, puisqu'elle permettait aux clients de faire des appels d'offre compétitive, la clause avait pour résultat d'atténuer les effets des contrats d'exclusivité. Le Tribunal, quant à lui, a estimé que la clause de prix concurrentiel ou de dédit constituait une enfreinte à la Loi de la concurrence parce qu'elle incitait les clients importants à conclure des ententes d'exclusivité comme c'était le cas pour Coca Cola et Pepsi. Par

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ailleurs, rien ne portait à conclure que la clause atténuait les barrières à l'entrée associées aux contrats d'exclusivité. Clause de la nation la plus favorisée: Cette clause garantissait que le prix consenti à un client était le plus bas prix offert par NutraSweet pour un volume équivalent d'aspartame. À la fin de l'année, NutraSweet envoyait au client, sans autre explication, un chèque couvrant un paiement de péréquation découlant de la clause de la nation la plus favorisée. Selon le Directeur cette clause constituait une incitation supplémentaire à l'exclusivité. En leur garantissant qu'ils seraient traités aussi bien que n'importe quel autre client, elle incitait les clients de NutraSweet à ne pas chercher d' offres compétitives auprès des autres producteurs. Le Tribunal a été du même avis que le Directeur. Cependant, il a estimé que les gros clients de NutraSweet bénéficiaient de la clause de la nation la plus favorisée aux dépends des petits clients. Il a donc autorisé NutraSweet à continuer d'offrir la clause à un client seulement si elle était offerte à tous ses concurrents. Tout comme la clause de prix concurrentiel et de dédit, la clause de la nation la plus favorisée ne rendait pas moins contestable l'approvisionnement exclusif. Vente à un prix inférieur au coût: norme de coût pertinente: Le Directeur a prétendu que NutraSweet se livrait à l'agissement anticoncurrentiel décrit à l'alinéa 78(i) qui consistait à "vendre des articles à un prix inférieur au coût d'acquisition de ces articles dans le but de discipliner ou d'éliminer un concurrent". Il a indiqué comme preuve que NutraSweet aurait eu un intérêt commercial certain à vendre à un prix inférieur à son prix de revient, à l'extérieur des États-Unis, afin d'empêcher l'accès aux marchés internationaux de façon à protéger son gigantesque marché aux États-Unis lorsque le brevet y arriverait à expiration en 1992. Le Tribunal a trouvé la preuve fournie par le Directeur peu convaincante en ce qui concerne la question de savoir si NutraSweet fixait ses prix au-dessous du coût. Le Directeur n'a pas expliqué de façon uniforme ou cohérente comment le coût est établi à cette fin. Le Tribunal a déterminé que le coût d'acquisition pouvait être le mieux approximé par le coût total moyen par unité de production. Toutefois, d'après la preuve soumise, le Tribunal ne pouvait fournir que des

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conclusions provisoires. Comme le Directeur dans son plaidoyer n'avait pas parlé de réparation au sujet des prix, une conclusion précise n'était pas nécessaire.20 Utilisation du brevet américain pour faire obstacle à la concurrence: La dernière accusation du Directeur, en ce qui concerne les agissements anticoncurrentiels, était que NutraSweet avait utilisé de trois façons différentes son brevet d'exploitation américain pour s'assurer un avantage concurrentiel au Canada. Premièrement, l'existence même du brevet avait incité les sociétés Coke et Pepsi à conclure des contrats d'approvisionnement exclusifs à l'extérieur des États-Unis.21 Selon le Tribunal, la preuve soumise ne permettait pas de conclure que l'existence d'un brevet américain (conjointement à l'absence d'un brevet à l'étranger) constituait un agissement anticoncurrentiel distinct ou soit un élément d'un tel agissement. Deuxièmement, le brevet aurait été utilisé pour financer la vente à un prix inférieur au prix de revient au Canada. L'argument selon lequel le brevet permettait à NutraSweet d'avoir un portefeuille bien garni fait partie de l'allégation voulant que l'entreprise ait vendu et vende encore à un prix inférieur au prix de revient au Canada. Selon le Tribunal, cet argument n'ajoutait rien à l'allégation. Troisièmement, le Directeur a accusé NutraSweet d'utilisation abusive du brevet en ce qui concerne la société U.F.L. Foods Inc., une entreprise canadienne de conditionnement à forfait pour Nutri/System. UFL fournissait divers plats ou préparations à faible teneur en calories commercialisés par Nutri/System. UFL avait conclu un accord d'approvisionnement avec la société Tosoh. NutraSweet avait obtenu par la suite la collaboration des dirigeants de Nutri/System, en leur offrant un certain nombre

20Bruce McDonald, un des avocats de NutraSweet, a affirmé que si le Directeur avait cru que

NutraSweet était coupable de charger des prix trop bas, la compagnie aurait été accusée de l'offense criminelle de prix prédateur. Le Directeur ne l'a pas fait, car il n'en avait pas la preuve. Voir DALGLISH, Brenda, "The test of competition", Maclean's, V.103(29), 16 juillet 1990, p. 32.

21Peu avant l'expiration du brevet canadien de NutraSweet en 1987, le conservateur Claude Lanthier avait introduit un projet de loi pour son extension après que la compagnie eût déclaré qu'elle voulait construire une usine de 10 millions de dollars dans sa circonscription de LaSalle au Québec. Après que Tosoh et plusieurs acheteurs de l'édulcorant artificiel se soient plaints, le projet de loi fut retiré et NutraSweet abandonna son projet de nouvelle usine.

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d'encouragements pour qu'ils exigent de l'entreprise UFL qu'elle achète l'aspartame de NutraSweet. L'un des avantages offerts était une remise, sur tous les produits contenant de l'aspartame que Nutri/System importait de l'entreprise de conditionnement à forfait aux États-Unis, d'un montant égal à la différence entre les prix de NutraSweet au Canada et aux États-Unis multipliée par la quantité d'aspartame contenue dans les importations. Pour le Tribunal, cette remise comportait plusieurs aspects qui l'ont porté à conclure que le brevet américain était utilisé pour empêcher la concurrence. Il s'agissait d'une forme de dumping, en ce sens que NutraSweet pouvait effectivement exporter son produit à un prix inférieur à celui qui était pratiqué aux États-Unis, sans que cela ne risque d'affecter son prix domestique qui était protégé là-bas par les droits exclusifs que lui conférait le brevet. Le Tribunal a accepté l'observation du Directeur selon laquelle l'utilisation d'un monopole créé par le brevet américain, en vue d'obtenir un avantage concurrentiel pour une entreprise dominante dans un autre marché, constituait un agissement anticoncurrentiel. Deux autres accusations portées par le Directeur se fondaient sur l'article 77 de la Loi: L'exclusivité: Le Directeur a soutenu qu'il pouvait être prouvé que pour approvisionner ses clients canadiens en aspartame, NutraSweet exigeait que les clients signent des contrats exclusifs ou bien que les divers "rabais de fidélité" (déduction relative à l'apposition du logo et à la commercialisation en commun) dans les contrats constituaient des incitatifs pour les clients d'acheter uniquement de l'aspartame de marque Nutrasuc. Le Tribunal a conclu à l'existence d'incitatifs financiers et à une dérogation à la clause d'exclusivité au sens de l'alinéa 77(1)b): les clients s'étaient clairement engagés à utiliser uniquement ou essentiellement les produits de NutraSweet et, en retour, bénéficiaient de divers rabais rendus possibles grâce à l'utilisation exclusive de l'aspartame de marque Nutrasuc. Les ventes liées Le Directeur a prétendu que la marque de commerce de NutraSweet constituait un produit clé et il a soutenu que, comme condition pour qu'elle fournisse la marque de commerce (le

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nom de marque Nutrasuc et le logo) à un client, NutraSweet exigeait que le client achète un autre de ses produits, c'est à dire l'aspartame et qu'il s'abstienne d'utiliser l'aspartame de tout autre producteur. Le Tribunal a reconnu que, dans certaines circonstances, une marque de commerce pouvait faire l'objet d'un accord de ventes liées. Il n'a cependant pas été convaincu par l'argument du Directeur que c'était le cas d'après les faits qui lui ont été présentés. En fait, l'argument du Directeur à cet égard manquait de cohérence. JUGEMENT DU TRIBUNAL ET POSITION DE NUTRASWEET Le Tribunal a rendu le 4 octobre 1990 une ordonnance interdisant à NutraSweet de mettre à exécution ou de conclure des contrats renfermant certaines clauses relatives à la fourniture d'aspartame à des clients canadiens, à savoir: - les clauses qui obligeaient le client à acheter ou à utiliser uniquement de l'aspartame de

NutraSweet; - les conditions qui comportaient des incitatifs financiers en vue d'acheter de l'aspartame de

NutraSweet, notamment les déductions relatives à l'apposition de la marque de commerce et à la publicité ou d'autres déductions semblables;

- les clauses de prix concurrentiels ou de dédit et des clauses de la nation la plus favorisée, à

moins que de telles clauses ne fassent également partie de contrats d'approvisionnement liant NutraSweet et tout concurrent de ce client canadien.

NutraSweet a tenté de faire annuler l'ordre du Tribunal qui pesait contre elle en remettant en question sa validité étant donné que tous ses membres n'étaient pas des juristes. Le Tribunal a lui-même évalué la question et a conclu qu'il était validement constitué. NutraSweet a ensuite adressé une demande à la Cour d'appel fédérale pour faire annuler la décision du Tribunal; elle souhaitait que l'ordre du Tribunal ne s'applique pas avant qu'une décision ne soit rendue, mais cela lui a été refusé. Finalement, NutraSweet a abandonné son appel en mai 1992. Durant les audiences, NutraSweet avait soutenu les arguments suivants:

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- les conditions d'approvisionnement d'aspartame de marque Nutrasuc n'étaient pas particulièrement restrictives;

- l'incapacité de Holland Sweetener à progresser plus rapidement était attribuable à des

problèmes de croissance qui devraient éventuellement se régler; - la part importante du marché détenue par NutraSweet découlait en bonne partie de son

rendement supérieur à produire l'aspartame et de ses techniques révolutionnaires en marketing;

- les gros acheteurs étaient capables de créer leurs propres débouchés d'approvisionnement

susceptibles de nuire aux intérêts de NutraSweet et à ceux de leurs consommateurs; - l'exclusivité était nécessaire pour protéger NutraSweet contre le resquillage. NutraSweet

avait assumé tous les coûts liés à l'obtention des autorisations réglementaires et au développement des marchés; il était normal qu'elle tire un maximum d'avantages de son brevet.

D'autres arguments en faveur de NutraSweet ont été proposés. Certains commentateurs ont pris la défense de NutraSweet dans les médias en alléguant que le marché canadien de l'aspartame fonctionnait très bien sans l'intervention de l'État.22 Selon les allégations du Directeur, la compagnie NutraSweet aurait vendu son aspartame à un prix défiant toute concurrence. Il était donc logique de penser qu'en la forçant à s'ouvrir à la concurrence, on provoquerait une augmentation des prix de l'aspartame sur le marché canadien. Or l'objectif fondamental d'une politique de concurrence ne devrait-il pas viser à assurer un approvisionnement au plus bas prix pour les consommateurs? Pour certains observateurs, la véritable enfreinte à la concurrence dans cette affaire ne résidait pas dans les prétendues violations par NutraSweet de règlements tatillons érigés par une bureaucratie fédérale en mal d'interventions, mais plutôt dans l'interdiction par cette même 22Voir en particulier CORCORAN, Terrence, "NutraSweet case raises question about

compétition law's purpose", The Globe and Mail, 10 juin 1989, p. B3 et "Not so sweet hounding of NutraSweet", The Globe and Mail, 13 décembre 1990, p. B8.

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bureaucratie de commercialiser des édulcorants artificiels parfaitement inoffensifs, tels que les cyclamates ou la saccharine. En 1993, NutraSweet avait toujours une aussi grande part du marché et la situation de sa concurrente, Tosoh Canada, n'avait guère évolué depuis la décision du Tribunal.

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ANNEXE Article 79 de la Loi sur la concurrence: Lorsque, à la suite d'une demande du Directeur, [le Tribunal] conclut à l'existence de la situation suivante: a)une ou plusieurs personnes contrôlent sensiblement ou complètement une catégorie ou espèce

d'entreprise à la grandeur du Canada ou d'une de ses régions; b)cette personne ou ces personnes se livrent ou se sont livrées à une pratique d'agissement

anticoncurrentiel; c)la pratique a, a eu ou aura vraisemblablement pour effet d'empêcher ou de diminuer

sensiblement la concurrence dans un marché, le Tribunal peut rendre une ordonnance interdisant à ces personnes ou à l'une ou l'autre d'entre elles de se livrer à une telle pratique.

Tableau 1: pourcentages d'utilisation des édulcorants en 1988

Utilisation domestique en % des ventes totales

Utilisation dans les boissons gazeuses en % des ventes industrielles

Tous édulcorants confondus

Canada 29 35

États-Unis 21 40

Europe 36 30

Aspartame

Canada 3 85

États-Unis 4 84

Europe 27 87 Source: Annexe 6 de l'affidavit du témoin expert de NutraSweet, J. Fry.

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Bibliographie Canada (Directeur des enquêtes et recherches: Loi sur la concurrence) c. NutraSweet Co., (Tribunal de la Concurrence) (une demande présentée par le directeur des enquêtes et recherches en vertu des articles 79 (abus de position dominante) et 77 (exclusivité et ventes liées) de la Loi sur la concurrence, L.R.C. (1985), ch. C-34, telle que modifiée, 1 juin 1989), 134 pages. CONSOMMATION ET CORPORATIONS CANADA, Réforme de la législation sur la concurrence,

guide, décembre 1985, 39 pages. CORCORAN, Terence, NutraSweet hearing's secrecy rises incomplete conclusions, The Globe and

Mail, 23 février 1990, p. B2. DALGLISH, Brenda, The test of compétition, Maclean's, V.103(29), 16 juillet 1990, p. 32. FAGAN, Drew, NutraSweet case a chance for law to show its teeth, The Globe & Mail, 22 janvier

1990, pp. B1 et B2. ---------, Anti-monopoly ruling hailed, Competition Act gets timely win in NutraSweet case, The

Globe and Mail, 18 octobre 1990, pp. B1 et B2. FOX, John, Tosoh challenges NutraSweet, Canada looms as a bitter battleground for aspartame

wars, Financial Post, V.83(22), 3/5 juin 1989, p. 3. GEDDES, John, Sour taste of sweet tax deal, NutraSweet case revives concern over profit-

siphoning, Financial Post, V.84(42), 6/8 octobre 1990, p. 10. GRAHAM, Clyde, NutraSweet's contracts struck down, Rivals unfairly squeeze out, Competition

Tribunal says, Montreal Gazette, 5 octobre 1990, p. B9. ---------, NutraSweet denies it has aspartame market control, The Globe and Mail, 2 août 1989, p. B3. ---------, NutraSweet's trial will be test for law, Montreal Gazette, 8 janvier 1990, p. C11. KOHUT, John, Competition body charges NutraSweet with monopolizing Canadian market, The

Globe & Mail, 2 juin 1989, p. B2. SHAW, Daniel, Politique de concurrence: fusions verticales et restrictions contractuelles verticales du

commerce, Bibliothèque du Parlement, juillet 1991, 45 pages. SOLOMON, Hyman et WILLIS, Andy, NutraSweet charged by competition watchdog, The

Financial Post, 2 juin 1989, p. 1.

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THOMPSON, Donald N., NutraSweet: The Evolution of Law on Abuse of Dominant Position, Canadian Business Law Journal, V.18(1), mai 1991, 26 pages.

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