la campagnole
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La Campagnole Pourquoi et comment l’utiliser ?
Pourquoi ce nouvel outil ? La Campagnole est le fruit des recherches menées à la Ferme du Bec Hellouin, dans le cadre de l’étude « Maraîchage biologique permaculturel et performance économique ». Ce programme a été soutenu par plusieurs fondations, la recherche sur les outils ayant bénéficié du soutien de la Fondation de France, que nous remercions. La Campagnole a été conçue en association étroite avec La Fabriculture et a bénéficié du talent et des idées de son créateur, Vincent Legris. Elle est donc le fruit d’une coopération amicale entre des maraîchers et un artisan. Cet outil, présenté en deux largeurs, sera utile tant aux jardiniers amateurs qu’aux maraîchers professionnels. Les lignes qui suivent ont pour objectif de vous présenter cet outil innovant et les usages que vous pourrez en faire, en nous appuyant sur notre expérience de terrain, dans notre ferme maraîchère. Imiter la nature La Ferme du Bec Hellouin s’inspire des concepts de la permaculture, une approche qui propose de prendre la nature comme modèle pour nos installations humaines. Dans la nature, le sol n’est jamais travaillé par des engins mécanisés, jamais à nu, il ne bénéficie pas d’engrais ni de système d’irrigation… Et pourtant les végétaux s’épanouissent et engendrent une biomasse généralement bien plus importante que celle de nos espaces cultivés ! La fertilité naturelle des sols est le résultat des processus biologiques (microfaune du sol, racines, champignons, arbres…). La vie du sol, si précieuse, est mise à mal par un travail mécanisé et par le recours aux engrais de synthèse. En agriculture bio, on n’a pas recours à ces derniers, mais le travail mécanisé du sol reste souvent la norme. Une terre arable qui est régulièrement bêchée ou labourée, ou émiettée entre les dents d’un motoculteur, puis laissée à nu, voit une part de sa fertilité naturelle s’évanouir à chaque cycle de culture. 30 % des terres arables de la planète ont été désertifiées au cours des dernières décennies… Prendre soin de l’humus, c’est donner aux générations à venir une chance de se nourrir !
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La culture sur buttes permanentes Pour se rapprocher d’un sol naturel, mieux vaux donc ne pas avoir recours aux engins mécanisés, dans la mesure du possible. La culture sur buttes permanentes, une pratique agricole pluri-‐millénaire, peut être une alternative au travail du sol. Les buttes de cultures peuvent être réalisées de nombreuses manières différentes, mais leur point commun est de créer un amoncellement de terre arable que l’on évite ensuite de perturber. Dans nos jardins au Bec Hellouin, nous avons ainsi créé des buttes de forme arrondie, aux tailles diverses (idéalement, leur largeur doit être comprise en 80 et 120 centimètres). Nous apprécions leurs multiples avantages et le potentiel de productivité élevé qu’elles autorisent.
Un verger-‐maraîcher : des arbres fruitiers, des buttes rondes et des planches plates… Les planches plates Mais ces buttes rondes présentent un inconvénient : de par leur forme, elles rendent difficile, voire impossible, l’utilisation de semoirs maraîchers. Et les semis manuels sont moins précis… Comment faire ? Nous en sommes donc venu à adopter un autre type de buttes permanentes, aux côtés des buttes arrondies : des buttes plates… que nous appelons tout naturellement planches plates.
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Ces planches plates sont inspirées des travaux menés depuis des décennies aux USA par un maraîcher de génie : Eliot Coleman (nous vous recommandons la lecture de son livre : Des légumes en hiver, Actes Sud, 2013). Eliot a conçu un semoir de précision à 6 rangs qui permet de tirer la quintessence de ces planches plates. Avec une largeur standardisée à 80 centimètres, elles autorisent, en un aller-‐retour de semoir, l’implantation de 12 rangs de petits légumes (carottes, radis, navets, jeunes pousses…). Du coup, à la Ferme du Bec Hellouin, nous cultivons sur deux types de buttes permanentes : les buttes rondes, particulièrement adaptées aux repiquages, et les planches plates de 80 centimètres de large, plutôt dédiées aux semis directs. La conjugaison de ces deux systèmes offre une grande souplesse et autorise une productivité très élevée, sans avoir recours à la mécanisation ni aux énergies fossiles. Le sol, donc, devient de plus en plus vivant, meuble, profond… Et si les paillages et/ou les apports de compost sont bien gérés, on assiste à une création d’humus qui peut être relativement importante. Il devient donc dès lors possible de concilier un très haut niveau de production au mètre carré, et une aggradation du milieu, avec création de sol…
Utilisation du semoir Coleman sur une planche plate. Entretenir les buttes de cultures permanentes Qu’elles soient rondes ou plates, les buttes nécessitent des soins… Même si elles ne sont jamais piétinées, leur sol a tout de même tendance à se compacter, ne serait-‐ce que sous l’impact des gouttes de pluie. Selon la nature du sol, cette compaction sera plus ou moins marquée, les sols argileux y étant davantage sujets. Pour éviter cette compaction, il est hautement recommandé de déposer un paillage, ou mulch, sur la butte. Ce paillage remplit quatre fonctions principales : il protège du lessivage, limite l’évaporation, contient les adventices (« mauvaises herbes »), et fertilise le sol en se décomposant. Toutefois, il peut être intéressant de ne pas pailler les buttes à certaines périodes. Au printemps, le paillage freine le réchauffement du sol et favorise les limaces… Et puis certains semis de petites graines : carottes, radis, navets… s’accommodent mal d’un paillage. Enfin, le mulch empêche d’avoir recours au semoir mécanique, qui est bien utile pour les maraîchers…
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Il est donc parfois nécessaire de décompacter les buttes et de leur redonner leur forme. Au Bec Hellouin, cette opération est généralement réalisée à la sortie de l’hiver. Une intervention de type décompactage va remettre de l’oxygène dans le sol, contribuant au réveil de la vie microbienne et au réchauffement des buttes. Comment réaliser ce décompactage ? Pour les buttes rondes, nous utilisons le merveilleux outil qu’est la grelinette. Elle est bien connue et appréciée des jardiniers biologiques. Mais nous avons cherché une solution technique mieux adaptée pour préparer nos planches plates sans les détruire, car les outils habituels lèvent des mottes qui tombent dans les allées et obligent à reformer la planche -‐ un processus long et fatiguant : tendre des cordeaux, briser les mottes, remonter la terre, ratisser…. Le recours à un motoculteur ne nous satisfait pas non plus : lui aussi à tendance à détruire la planche, et son impact sur la vie du sol n’est pas bénéfique. De plus, nous cherchons à réaliser une agriculture post-‐pétrole, qui n’ait pas recours aux énergies fossiles !
Des buttes rondes avec des cultures associées et étagées.
La naissance de La Campagnole Nous avons découvert sur des sites web russes une belle idée : ajouter un cadre horizontal à un outil à dent. Avec Vincent Legris, nous avons cherché comment améliorer cet outil et l’adapter à un système de culture sur planches permanentes. Au fil des discussions, des prototypes, des essais dans nos jardins… La Campagnole est née, riche de plusieurs innovations très simples, mais terriblement efficaces, qui en font un outil révolutionnaire !
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Le fonctionnement de La Campagnole est d’une simplicité biblique : il suffit d’enfoncer les dents dans la planche et de les remonter à l’aide des deux manches, dont l’ergonomie a été soigneusement étudiée. La terre passe entre les dents horizontales, rigides ou souples pour les sols caillouteux, et se trouve émiettée. L’effort à fournir est d’autant plus minime que nous travaillons des planches permanentes, jamais piétinées ni tassées (le passage de La Campagnole est la seule occasion de marcher dessus…). Cette opération aisée et rapide permet, d’un seul geste, de décompacter le sol à une vingtaine de centimètres de profondeur (plus profond que n’irait un motoculteur), sans retourner ses différents horizons, et de l’affiner. La terre ne tombe plus dans les allées (ce qui permet de pailler ces dernières et limite d’autant leur entretien). Un rapide coup de râteau suffit ensuite pour préparer le lit de semences.
La Campagnole en version 50 cm, en position de transport. Un jardin
de planches plates,
avec des cultures associées.
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Concilier efficacité et simplicité La Campagnole est donc un outil merveilleux pour les jardiniers comme pour les professionnels, elle permet de concilier le respect d’un sol vivant et la nécessité de le décompacter parfois (une fois par an, voire plus en cas de sol lourd). La culture sur planches permanentes autorise des rendements qui surprendront ceux qui l’essayeront. La Campagnole en largeur de 50 cm conviendra aux jardiniers amateurs et aux personnes dont la santé n’autorise pas d’effort soutenu. Elle se révèle également utile lors de la création des buttes, pour ameublir le sol avant de le pelleter. Un autre usage enfin : elle permet de décompacter les allées, lorsque l’on souhaite récupérer l’humus qui s’y est formé par le compostage des paillages que l’on y dépose, afin de redonner ce précieux compost aux buttes. La Campagnole en largeur de 80 cm comporte un grand nombre de dents, elle est destinée à l’entretien des planches permanentes plutôt qu’à leur création. Elle est conçue pour les planches permanentes de 80 cm de large. Ce système de culture est d’une efficacité étonnante. Nous avons mené au Bec Hellouin une étude technico-‐économique sur la culture sur butte, de 2011 à 2015, en partenariat avec AgroParisTech et l’INRA, qui met en évidence, chiffres à l’appui, les rendements qu’il devient possible d’atteindre, dans une approche qui se révèle par ailleurs très naturelle et bénéfique pour l’environnement (ceux qui désirent se documenter sur cette étude pourront lire les rapports sur notre site www.fermedubec.com). Pour rejoindre les jardins, la Campagnole se bascule aisément et se transporte ensuite sans effort sur ses deux roues. Une gamme d’outils complémentaires
La Campagnole vient compléter une gamme d’outils manuels, simples et robustes, parfaitement cohérents avec une agriculture naturelle. Voici une rapide évocation de ces outils, qui ne sont hélas pas encore commercialisés en France, mais peuvent être commandés aux USA sur le site de Johnny’s selected seeds. Semoir Coleman : pour semer rapidement 12 rangs de petits légumes, voir 24 rangs si l’on pratique une association radis + carottes.
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Une association particulièrement dense : radis + carottes, semés avec le semoir Coleman,
plus des choux chinois et des salades, repiqués, soit 26 rangs de légumes sur 80 cm de large !
-‐ Binettes de précisions : de très petite taille, pour travailler entre des rangs de légumes serrés. Ces binettes peuvent être fabriquées aisément en retaillant des outils du commerce, ou des outils anciens achetés dans les brocantes.
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-‐ Râteau grande largeur : le modèle américain de 80 cm complète idéalement La Campagnole, mais il est aussi possible d’utiliser un râteau à feuilles commercialisé par des marques distribuées en France.
-‐ Plaques à picots : elles permettent, d’un geste, de creuser avec une précision
parfaite les trous pour repiquer les jeunes plants ou effectuer un semis en place. Nous les fabriquons nous-‐mêmes à la ferme et espérons qu’un artisan les réalisera dans un avenir proche !
Cultures associées sur planche plate : carottes
et choux – les radis ont déjà été récoltés.
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Cultures associées sur planches plates, sous serre.
Une approche résolument nouvelle La culture sur buttes permanentes est une porte d’entrée vers une manière complètement différente de produire les légumes dont nous avons besoin pour nous nourrir. Contrairement aux idées reçues, une micro-‐agriculture pratiquée entièrement à la main sur une toute petite surface, allant dans le sens de la vie, se révèle ultra-‐productive si elle est bien menée. Produire beaucoup sur une petite surface libère de fait de l’espace agricole, qui peut être dédié à d’autres usages : planter des arbres (nous vous y invitons vraiment : plantez des arbres fruitiers en aussi grand nombre que votre terrain l’autorise, et cultivez en verger-‐maraîcher !), élever des animaux, creuser une mare, installer une forêt-‐jardin… Ainsi revisité, votre jardin peut devenir d’une grande beauté. Riche et diversifié, il vous procure davantage de nourriture, mais aussi de plaisir. Un jardin permaculturel, bio-‐inspiré, subvient à vos besoins tout en améliorant, à sa petite mesure, l’état de la planète : il est une oasis de biodiversité, il s’y crée de l’humus, il stocke du carbone dans les sols et les arbres… Le temps joue pour vous : chaque année le jardin devient plus autofertile, plus résilient face aux aléas climatiques, moins sujet aux maladies et attaques de ravageurs. Vous profitez des services écosystémiques, ces services que la nature vous rend gratuitement !
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Pour en savoir plus Si vous désirez en apprendre davantage sur la permaculture et la méthode de la Ferme du Bec Hellouin, plusieurs supports sont à votre disposition :
-‐ Site internet de la Ferme du Bec Hellouin : le Fonds documentaire, en accès libre, propose plusieurs centaines de documents.
-‐ Films pédagogiques : une série de films est proposée sur notre site. -‐ Notre livre Permaculture – Nourrir les hommes, guérir la Terre – Actes Sud 2014
vous permettra d’approfondir les concepts rapidement exposés dans ces pages. Nous espérons que votre Campagnole vous permettra de rendre votre jardin plus productif, mais aussi plus naturel… La nature est généreuse ! Ferme biologique du Bec Hellouin, le 29 mai 2015 Charles HERVE-‐GRUYER Photos copyright Ferme du Bec Hellouin – Reproduction interdite sans autorisation.