Évaluation d’institutions de microfinance en milieu rural à madagascar (afd/2008)

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    AFD 2008

    Srie valuation et capitalisation

    Dpartement de la Recherche

    Division valuation et capitalisation

    valuation dinstitutions de microfinanceen milieu rural Madagascar

    Alain RIES, division de lEvaluation, AFD

    Grgoire CHAUVIERE LE DRIAN, Secteur financier et appui au secteur priv, AFD

    Agence Franaise de Dveloppement

    5, rue Roland Barthes 75012 Paris < France

    www.afd.fr

    exPostExPost

    n 13juillet 2008

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    Avertissement

    Les analyses et conclusions de ce document sont formules sous la responsabilit

    de ses auteurs. Elles ne refltent pas ncessairement le point de vue officiel de

    lAgence Franaise de Dveloppement ou des institutions partenaires.

    Directeur de la publication : Jean-Michel SEVERINO

    Directeur de la rdaction : Jean-David NAUDET

    ISSN : 1958-590X

    Dpt lgal : juin 2008

    Mise en page : Vif-Argent

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    que cette offre de crdits profite de prfrence aux mnagesmoyens ou aiss qui acquirent une vritable capacit de

    production. Toutefois, la microfinance classique montre ses

    limites pour poursuivre laccompagnement de ces catgories

    mergentes qui sinscrivent dans un march naissant : la

    msofinance.

    De plus, le secteur de la microfinance Madagascar est en

    pleine volution, avec larrive de nouveaux acteurs et de

    stratgies concurrentes qui peuvent perturber la relative sta-

    bilit des institutions dj implantes alors quelles peinent atteindre leur quilibre financier. Des contraintes psent sur

    la gestion des ressources humaines, les dbauchages pou-

    vant fragiliser les institutions. Un risque de captation des

    meilleurs clients menace galement les IMF qui, plus quune

    stratgie dextension, dveloppent un vritable accompagne-

    ment de leurs clients. La coordination des bailleurs et des

    oprateurs doit donc tre renforce. Les IMF pourraient sta-

    biliser ces pratiques autour dune charte de bonne conduite.

    Madagascar dispose des instances de coordination nces-

    saires pour mener bien ce travail dans le cadre de sa stra-tgie nationale de la microfinance (SNMF), qui cre un

    contexte national porteur et dont la vision est clairement affi-

    che (2008-2012) :

    Disposer dun secteur de microfinance professionnel,

    viable et prenne, intgr au secteur financier malgache

    offrant des produits et services financiers diversifis et inno-

    vants la population rurale et urbaine, tout en assurant une

    couverture satisfaisante de la demande sur lensemble du

    territoire, et oprant dans un cadre lgal, rglementaire, fis-cal et institutionnel adapt et favorable.

    Enfin, si la microfinance est un outil pour rpondre aux

    besoins du milieu rural, elle nen est pas la panace. Elle doit

    sinscrire dans une vraie stratgie de dveloppement qui

    sappuie sur lamlioration des techniques agricoles mais

    aussi sur le dveloppement des infrastructures ce qui,

    Madagascar, est crucial pour fluidifier le march agricole,

    amliorer les circuits de distribution et limiter les risques

    pesant sur ce secteur. La microfinance apparat comme unoutil au sein dune chane de valeur pour le dveloppement

    dune filire intgre de lagriculture associant secteurs priv

    et public.

    Aprs avoir dfini les lments favorables au dveloppe-

    ment de la microfinance (section I), les auteurs abordent les

    limites et les contraintes du secteur Madagascar (sec-

    tion II). Pour que la microfinance continue dappuyer le dve-

    loppement de lagriculture et, de faon gnrale, du milieu

    rural, elle devra toutefois relever un certain nombre denjeux(section III). Les auteurs analysent ensuite en profondeur

    loffre actuelle (section IV), avant de sinterroger sur la pren-

    nit financire de ces produits (section V). Deux problma-

    tiques transversales font lobjet dun dveloppement spci-

    fique : la fixation des taux et les instruments de financement

    (annexe H).

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    1. Des conditions favorables au dveloppement de la microfinance rurale

    Peu intensif, le secteur agricole malgache a dimportants

    besoins de financement. Selon le recensement national agri-

    cole 2004/2005, 85 % des exploitations ne pratiquent pas la

    fertilisation, lutilisation de semences amliores est loin

    dtre gnralise, la culture attele est encore rare et legros matriel agricole nest prsent que dans les greniers

    riz du pays.

    Le secteur peut toutefois sappuyer sur le dynamisme des

    acteurs de la microfinance : implantation des premires IMF

    en milieu rural au dbut des annes 1990, forte extension des

    rseaux partir de 1996, dbut aujourdhui dune nouvelle

    phase avec larrive dacteurs qui se lancent directement

    dans une activit de microfinance sans passer par la phase

    du projet de dveloppement et concurrence accrue entrerseaux. Ce dynamisme est relay par une politique nationa-

    le agricole qui pousse lintensification le Plan daction pour

    Madagascar (MAP)1 et la SNMF qui se met en place et se

    dcline progressivement2, avec une libert des taux.

    Le secteur se dveloppe autour de produits adapts mis au

    point par les caisses dpargne et de crdit agricole

    mutuelles (CECAM) qui se diffusent progressivement dans

    les autres IMF. Ces produits sinscrivent dans une gamme

    cohrente articule autour des besoins des paysans : crditproductif pour accrotre la production (intrants, semences,

    main-duvre, petit matriel), crdit GCV pour valoriser au

    mieux la production, crdit LVM pour soutenir linvestisse-

    ment, crdit social et produits dpargne. ce stade, les cr-

    dits spcifiques pour lhabitat et les produits dassurance

    sont encore absents.

    Lune des cls de cette russite est ladaptation des outils

    et des remboursements cals sur le cycle cultural. Les outils

    sinscrivent dans une trajectoire de crdit (un prt GCV peut

    permettre de rembourser un crdit productif, de financer des

    cultures de contresaison) quil faut prserver.

    Lexprience du crdit GCV est trs intressante pour lesproduits agricoles qui connaissent de fortes fluctuations des

    prix pendant la priode de soudure ce qui est en gnral le

    cas du riz. Ce crdit doit sappuyer sur une bonne anticipa-

    tion des prix agricoles (grce aux observatoires locaux). Le

    GCV est utilis par les producteurs pour stocker leur rcolte

    et le riz achet par ailleurs (taux diffrencis CECAM). Le

    crdit LVM, oprationnalis par les CECAM et dvelopp

    aujourdhui par dautres IMF, est lui aussi tout fait intres-

    sant par son exemplarit au niveau international. Dailleurs,

    cet outil ne finance pas uniquement les besoins de lexploi-tation agricole (voir lenqute CECAM auprs de

    500 mnages).

    Cette gamme cohrente permet de mettre en place des tra-

    jectoires vertueuses de crdit : on assiste alors lmergen-

    ce de microentrepreneurs ruraux, qui amliorent et diversi-

    fient leur exploitation puis accumulent du capital. Ces

    classes mergentes sont accompagnes dans leur parcours

    conomique par les IMF, qui y trouvent une source de renta-

    bilit (volumes de crdits croissants par client et risquesrduits).

    1 Le MAP (rpublique de Madagascar, 2007) prvoit dans lengagement4 relatif au dveloppement rural et, plus prcisment au dfi 3, de lancer unervolution verte durable pour doubler le rendement moyen du riz, qui sesitue actuellement autour de 2 tonnes/ha(http://www.map.gov.mg/index.php/les-8-engagements/engagement-4/defi-3/).

    2 Loi 2005-016 sur la microfinance et ses dcrets dapplication (rpublique deMadagascar, 2005).

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    Tous ces facteurs provoquent une explosion de lencoursde crdit : selon les donnes les plus rcentes, les IMF

    compteraient 306 000 adhrents et clients pour un encours

    global de crdit de 49 milliards dariary (MGA) dont un peumoins de la moiti (22 milliards MGA) en milieu rural.

    2. confrontes cependant certaines limites

    Face ce dveloppement, les IMF se heurtent toutefois

    un certain nombre de contraintes, car les besoins restent trsimportants et sont insuffisamment couverts. La SNMF

    2008/2012 se fixe un objectif de 856 000 emprunteurs et

    162 milliards MGA dencours de crdit en 2012. La couvertu-

    re territoriale demeure incomplte : deux rgions sont

    dpourvues de points de service mais, surtout, le dvelop-

    pement des caisses et agences des IMF se fait essentielle-

    ment le long des axes goudronns et des pistes rgulire-

    ment entretenues, pour des raisons videntes de cot. Le

    nombre de socitaires/clients parat faible par rapport au

    nombre dagriculteurs des zones desservies : il reste unemarge importante pour des actions de densification des

    rseaux.

    La microfinance rurale nest quun lment parmi dautres

    permettant le dveloppement du secteur agricole. Citons

    notamment, car il sagit dlments primordiaux

    Madagascar, la scurit foncire et les rseaux routiers ainsi

    que les autres infrastructures (greniers pour le stockage des

    rcoltes dans certaines zones). Sy ajoutent galementlamlioration des techniques agricoles, lorganisation des

    approvisionnements en intrants et de la commercialisation

    des produits, des prix dachat durablement rmunrateurs

    Par ailleurs, certaines zones sont soumises des crises ali-

    mentaires rcurrentes. Comment, dans ces conditions, faire

    accepter un crdit un paysan si sa rcolte est totalement

    tributaire dlments climatiques ou dpidmies quil ne ma-

    trise pas et, partant, alatoire ?

    Ainsi, la viabilit financire des IMF reste fragile en milieu

    rural enclav mais envisageable avec un taux mensuel du

    crdit de lordre de 4 4,5 % et sous rserve dune stricte

    matrise des cots de fonctionnement et des impays et

    dune dlgation dune partie du travail des bnvoles. En

    outre, le cot de la ressource doit rester trs faible, ce qui

    imposera parfois lappui de bailleurs de fonds qui accom-

    3. et plusieurs enjeux

    Ces diffrentes contraintes amnent considrer les

    enjeux entourant lavenir de la microfinance en milieu rural

    Madagascar. Lun dentre eux concerne la formation et la

    politique de ressources humaines : Madagascar connat une

    forte expansion du secteur mais qui ne peut sappuyer sur un

    nombre suffisant de personnes formes. Cette raret des

    ressources est encore plus accentue en milieu rural. Les

    IMF doivent donc investir lourdement pour former leurs

    agents mais avec un risque toujours possible de dbaucha-

    ge. Cette situa tion concerne autant les salaris que les lus,

    pour les systmes mutualistes, le cot de formation tant

    souvent sous-estim et structurellement rcurrent alors quil

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    a une valeur de bien public. Le besoin de formation sinscritdans le long terme et mrite dtre soutenu par un mcanis-

    me national appropri impliquant la profession et soutenu

    par les bailleurs de fonds.

    Il faut galement poursuivre la professionnalisation des IMF

    travers la dfinition de procdures claires et rgulirement

    mises jour, lintroduction de systmes dinformation et de

    gestion rapides et fiables, un contrle interne performant et

    une poursuite de linnovation financire pour sadapter

    lvolution des demandes de la clientle.

    Pour rpondre ces besoins, des centrales de services ou

    des structures fatires ont t mises en place. partir dun

    certain niveau de dveloppement en effet, le besoin de pro-

    fessionnalisation des rseaux soulve ncessairement la

    question dune structure fatire. Limpratif technique de

    cette centrale est en gnral bien admis, en dpit des rti-

    cences sur le transfert de pouvoir que cela implique. La prin-

    cipale question est celle du cot dune telle structure et de la

    capacit du rseau le supporter. Les subventions initialesdes bailleurs sont ncessairement dgressives et des ten-

    sions peuvent apparatre partir du moment o les presta-

    tions sont pleinement refactures. Seuls les rseaux impor-

    tants peuvent financer une telle structure. Pour remdier ce

    problme de taille, des centrales non ddies un rseau

    pourraient tre mises en place.

    La viabilit financire des IMF fait elle aussi partie des inter-

    rogations. Cette viabilit est une condition du maintien en

    milieu rural et cela dautant plus que la concurrence se ren-force dans les zones les plus porteuses et auprs des

    meilleurs clients. Un code de bonne conduite pourrait tre mis

    en place entre les diffrents acteurs sous lgide de la pro-

    fession.

    De toute vidence, les oprateurs ont tendance aller vers

    le milieu urbain, jug plus rentable et capable dassumer la

    viabilit de lorganisation. Mais cette volution reprsente un

    risque de drive par rapport la mission initiale en milieu

    rural de lIMF, qui insiste sur la ncessit dun contrepouvoir.Dans tous les cas, il faut adapter les procdures dinterven-

    tion en milieu rural au milieu urbain.

    Il convient aussi de sinterroger sur le financement de la

    croissance : les plans daffaires des IMF reposent tous sur

    des volumes de crdit en trs forte croissance, cohrents

    avec la demande potentielle et le dynamisme du march. La

    disponibilit de ressources adaptes en volume et en cot

    est donc un enjeu majeur pour les IMF qui doivent faire face

    aux problmatiques suivantes :

    lpargne collecte en milieu rural reste de faible mon-

    tant, peu en phase avec les besoins en ressources pour

    lactivit de crdit. Ce service est coteux, do des

    dpts faiblement rmunrs ce qui amne lpargne

    sinvestir sur de meilleures opportunits. En milieu

    urbain, il y a une logique de collecte de dpts unitaires

    importants notamment auprs de structures vocation

    sociale (ONG). Au-del de la rduction du cot de la res-

    source, cette politique rpond une volont de rduire ladpendance de lIMF vis--vis des crdits externes ;

    les refinancements auprs des banques malgaches se

    dveloppent : cest un signal fort de la maturit atteinte

    par certains rseaux. Les IMF ont tout intrt disposer

    dune offre globale : lignes de crdit globalises, lignes

    adosses des produits spcifiques (LVM par exemple),

    autorisations de dcouvert pour lisser la trsorerie. Les

    banques ont besoin dun outil de partage de risque tel

    que le propose lAFD avec ARIZ (assurance pour le

    risque des investissements).

    Le rle des bailleurs de fonds doit voluer avec le march.

    Il faut en effet enrichir la gamme des produits pour accom-

    pagner les IMF dans leur volution : subventions au dmar-

    rage, prt en monnaie locale bonifi en phase de croissance

    en contrepartie dobjectifs de dveloppement spcifiques,

    garantie des banques locales pour les IMF matures. Enfin, il

    convient de rflchir ladditionnalit permise par les sub-

    ventions dans un contexte de concurrence accrue entre IMF.

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    4. Une offre de produits adapts aux besoins du secteur rural malgache

    4.1. Les conomies rurales et leurs besoins de services financiers

    De nombreuses tudes se sont dj intresses aux co-

    nomies rurales malgaches3. Il ne sagit pas ici den faire une

    nouvelle synthse mais didentifier quelques grandes carac-

    tristiques du milieu rural et de lagriculture malgaches per-

    mettant dclairer la demande de services financiers.

    A. Une agriculture domine par la culture du riz

    Madagascar est une conomie dominante agricole dont

    lun des moteurs essentiel est la culture du riz. Celle-ci a t

    au centre des politiques publiques conduites par le pass et

    continue dy occuper une place privilgie (rhabilitation de

    primtres rizicoles notamment).

    Cette culture marque les paysages : le riz est cultiv partout

    et a une place prpondrante dans toutes les rgions, lex-ception de lextrme sud du pays. La riziculture occupe 60 %

    de la surface cultive et 87 % des exploitants agricoles la

    pratiquent. Plusieurs systmes de production avec des

    calendriers spcifiques coexistent selon les zones agro-co-

    logiques.

    En dehors du riz, Madagascar dispose dune grande varit

    de productions agricoles : mas, manioc, pommes de terre

    mais aussi caf, vanille, letchis, haricots verts, coton, sucre

    Les cultures destines lalimentation sont largement auto-

    consommes. Lenqute ralise auprs des mnages en

    2004 rvle ainsi que 45 % de la rcolte de riz paddy sont

    consomms par les riziculteurs et 18 % sont stocks pour

    faire face des imprvus. Seuls 27 % sont destins tre

    commercialiss. Les filires letchis , vanille et cre-

    vettes mais aussi haricots verts sont trs orientes vers

    le march international. Le sucre, le coton et le caf se rpar-

    tissent entre le march local et lexportation.

    Enfin, llevage bovin est pratiqu partout Madagascar,

    avec une importance sensiblement variable selon les

    rgions. Dans le sud, considr comme une zone pastorale,

    les zbus jouent un rle particulier en termes de capitalisa-

    tion mais aussi sur le plan social. La production de lait sedveloppe dans les zones proches de la capitale avec une

    forte intgration autour de deux industriels.

    B. Les enjeux de la croissance dmographique

    La population malgache est en croissance dmographique

    forte : elle est passe de 12,2 millions de personnes en 1993

    17,5 millions en 2006. Cette tendance est appele se

    poursuivre, entranant des besoins alimentaires croissants :

    les projections des Nations unies (PNUD, base de donnes

    sur la population rvision 2004), prvoient en hypothsemoyenne une population de 27 millions en 2020. Estims

    300 000 en 2005, les nouveaux arrivants sur le march du

    travail vont augmenter de manire exponentielle pour

    atteindre prs de 530 000 en 2020.

    La population reste trs majoritairement rurale. Des esti-

    mations ralises en 2005 montrent que les trois quarts des

    Malgaches vivent en zone rurale, contre les 5/6 en 1960. Le

    secteur agricole a donc t capable jusqu prsent dabsor-

    ber une grande partie des jeunes entrant sur le march dutravail.

    Pendant les 20 dernires annes, le nombre dexploitations

    agricoles a augment des deux tiers, passant de 1,5 million

    en 1984-1985 2,4 millions en 2004-2005. Sur la mme

    3 Voir notamment Pierre Bernard, A., R. Ramboarison, L. Randrianarison et L.Rondro-Harisoa (2007). La prsente analyse sappuie largement sur cedocument de synthse tabli dans le cadre du programme RuralStruc, uneinitiative conjointe de la Banque mondiale et de la coopration franaise(http://go.worldbank.org/VZ3YM438G0).

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    priode pourtant, la superficie totale agricole ne sest accrueque de 18 %. Ainsi, laugmentation du nombre dexploitations

    sest faite au dtriment de leur superficie, qui passe en

    moyenne de 1,2 ha/exploitation en 1984-1985

    0,86 ha/exploitation en 2004-2005.

    Cette diminution de leur taille moyenne entrane une viabi-

    lit de plus en plus incertaine des exploitations. Les paysans

    sadaptent en diversifiant leur production agricole et en dve-

    loppant de nouvelles activits non agricoles (fabrication de

    charbon de bois, production de briques, petit transport parbicyclette ou charrette, divers petits boulots). Lobjectif

    prioritaire est dassurer la scurit alimentaire de la famille

    par une combinaison dactivits agricoles et non agricoles.

    De vritables petits entrepreneurs ruraux font paralllement

    leur apparition, avec un capital dexploitation important et

    diversifi. Ils disposent de plusieurs dizaines dhectares de

    terre et se sont diversifis dans llevage (vaches laitires,

    levage bovin extensif, volaille, porcs) ou dans dautres

    activits (vers soie notamment) en ayant recours desmtayers et des saisonniers, offrant ainsi des opportunits

    demploi en milieu rural ceux dont les terres nassurent plus

    la survie.

    Les migrations de population entre rgions sont de faible

    ampleur : elles sont limites certains groupes tels que les

    Antandroy dans le sud ou concernent des zones trs faible

    densit de population dans le Moyen-ouest et le Centre-

    ouest. Des migrations saisonnires ont lieu, par exemple

    pour la rcolte des letchis sur la cote est. De nouveaux typesde migrations temporaires ont galement vu le jour vers des

    zones minires (pierres prcieuses, or) mais leurs cons-

    quences sur les conomies rurales sont mal connues.

    C. Un besoin de scurisation foncire et de rhabilitation

    des infrastructures

    Le paradoxe entre lexistence de vastes tendues de terre

    non cultives et ltroitesse des exploitations sexplique en

    partie par le manque de scurit foncire.

    La procdure dimmatriculation foncire est longue, com-plexe et coteuse. Le titrage des terres na t effectu que

    dans les zones agricoles les plus riches et autour des

    grandes villes. Ainsi en 2006, 10 % seulement du territoire

    national est dot de titres et certificats fonciers. Ailleurs, lin-

    scurit foncire est gnralise, pnalisant linvestissement.

    Ce point ayant t identifi comme une contrainte majeure

    au dveloppement agricole, une rforme foncire est en cours

    dans le cadre du programme national foncier (2004-2015).

    Cette rforme se fonde sur la mise en uvre dune gestionfoncire dcentralise au niveau des communes par le biais

    de guichets fonciers. Le MAP prvoit que 75 % des parcelles

    agricoles seront scurises en 2012, contre 7 % actuellement.

    La construction et la rhabilitation du rseau routier sont

    lun des leviers majeurs de dveloppement des zones

    rurales Madagascar, dont le relief et le climat (cyclones

    rguliers sur la cote est) ne favorisent pas les dplacements.

    Des efforts ont t accomplis ces dernires annes. Certains

    axes goudronns et des pistes ont t rhabilits avec lap-pui de laide extrieure. Un fonds dentretien routier aliment

    partir de ressources nationales est devenu oprationnel.

    La volont de dsenclaver certaines rgions comme lAnosy

    ou la SAVA (Sambava, Antalaha, Vohmar et Andapa) est

    vidente. Cependant, en dehors de quelques grands axes,

    les possibilits de dplacement sont toujours trs limites au

    sein des rgions. Ce point ressort nettement des visites

    effectues auprs des IMF implantes dans le sud du pays

    mais aussi dans le Menabe.

    Les primtres rizicoles ont reu depuis longtemps de nom-

    breux investissements pour la construction et la rhabilitation

    des ouvrages et des rseaux hydro-agricoles qui correspon-

    dent, avec les pistes, la premire demande des paysans

    vis--vis de la puissance publique. Ces programmes se

    poursuivent actuellement travers par exemple le program-

    me bassins versants primtres irrigus mis en place

    par ltat avec le soutien de la Banque mondiale et de

    lAgence franaise de dveloppement (AFD).

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    D. La formation des prix agricoles et les modes de com-mercialisation

    Dans les annes 1960 et 1970 et dans une volont dassu-

    rer la satisfaction des besoins des populations, ltat contr-

    lait les prix des produits alimentaires, notamment le riz, au

    moyen dimportantes subventions. partir de 1972, un

    monopole public de la collecte, de la transformation et de la

    commercialisation du paddy a t mis en place, avec un prix

    dachat unique sur tout le territoire. Il en a rsult une dcon-

    nexion des prix aux producteurs et des cots de production,

    conduisant une baisse de la production. Les premiresmesures dajustement prises ds le milieu des annes 1980,

    avec le soutien du Fonds montaire international (FMI) et de

    la Banque mondiale, visaient doper la production qui ne

    parvenait plus satisfaire les besoins par laugmentation

    des prix au producteur puis la libralisation progressive des

    prix et des circuits de commercialisation.

    Le dsengagement de ltat de la commercialisation a

    entran une multiplication du nombre dintervenants et din-

    termdiaires entre producteurs et consommateurs un ph-nomne particulirement marqu dans la filire du riz. Les

    prix sont dsormais fixs par le jeu de loffre et de la deman-

    de, avec des limites pour les filires monopoles ou oligo-

    poles (sucre, coton, haricots verts). Les prix du riz sali-

    gnent sur les prix limportation. Il nexiste plus de prix

    unique sur le territoire mais plusieurs prix du riz qui dpen-

    dent de lenclavement de la zone de production et du niveau

    de comptition entre rseaux de collecte, de la saison (sou-

    dure ou rcolte) ainsi que de la varit du riz. Ltat est

    cependant rest prsent dans la filire riz par le biais de laconstitution de stocks, des oprations dimportation et de la

    politique fiscale (taxes et TVA limport). Il favorise actuelle-

    ment la constitution de plateformes telles que lobservatoire

    du riz.

    E. Une agriculture peu productive avec des besoins din-

    vestissement

    Lagriculture malgache reste en gnral une agriculture tra-

    ditionnelle avec un faible degr dintensification.

    Le recensement national agricole de 2004-2005 fait ressor-tir que 85 % des exploitations nont recours aucune fertili-

    sation. La seule province se distinguer est celle de la capi-

    tale, o le morcellement excessif des parcelles oblige les

    paysans intensifier leur production en utilisant du fumier de

    zbu mais, mme l, le recours aux intrants ne touche que

    45 % des exploitations. Seuls 15 % de la surface rizicole

    totale sont fertiliss (engrais organiques, minraux et

    mixtes).

    Lutilisation de semences amliores est loin dtre gnra-lise malgr les progrs raliss dans le cadre de la politique

    nationale semencire.

    La mcanisation est galement trs faible. La bche (anga-

    dy), la faucille et la machette sont les principaux outils de tra-

    vail des paysans. La culture attele est peu prsente, avec

    une herse pour sept exploitations et en moyenne une char-

    rue pour quatre exploitations. La taille moyenne des exploi-

    tations ne ncessite pas toujours leur possession et les pay-

    sans prfrent, quand ils en ont la possibilit, louer le mat-riel. Lutilisation de gros matriels agricoles est rserve aux

    grandes exploitations que lon ne trouve que dans les gre-

    niers riz du pays (Alaotra, Marovoay, Moyen-ouest).

    Cette situation fait ressortir des besoins dinvestissement

    relativement importants dans le secteur agricole malgache.

    Ceux-ci portent sur les intrants, les quipements agricoles

    mais aussi lacquisition de btail et de terres.

    Cest lun des dfis du MAP que de faire voluer cette situa-tion en amliorant la productivit par llargissement de la

    mcanisation agricole et lapplication de nouvelles tech-

    niques agricoles ainsi que par la fourniture et lassistance en

    semences et engrais4. travers une rvolution verte, lob-

    jectif affich du MAP est de parvenir doubler en moyenne

    4 Voir notamment lengagement 4, dfi 3.

  • 8/6/2019 valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar (AFD/2008)

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    13exPostexPost AFD 2008

    le rendement moyen de riz, qui se situe aujourdhui autour de2 tonnes par hectare. Laccs au financement rural est un

    lment cl pour relever ce dfi5.

    F. Face la demande rurale, plusieurs canaux de finance-

    ment

    Loffre en financement rural est limite. Selon une tude sur

    le financement de lUnion europenne (UE) (accs des

    ruraux aux services financiers, 2005), cette offre slevait

    31,8 milliards MGA en 2004, soit moins de 0,5 % du PIB

    alors que lagriculture reprsente 30 % du PIB. Cette esti-mation ne tient pas compte de loffre dusuriers ni des pra-

    tiques de vente de rcoltes sur pied, largement rpandues.

    Une premire source de financement du milieu rural est

    constitue par des programmes et projets dont le plus impor-

    tant est le projet de soutien au dveloppement rural (PSDR)

    lanc en 2001 et qui se termine. Ce projet avait pour objectif

    daccrotre la productivit et les revenus des petits agricul-

    teurs dans les diffrentes rgions du pays, dappuyer le

    dveloppement des organisations de producteurs et groupescommunautaires ainsi que de rduire la pauvret en milieu

    rural et de prserver les ressources naturelles de base. tra-

    vers sa composante dappui aux investissements productifs

    et activits agricoles, le PSDR alloue des fonds sans intrt

    des organisations paysannes, leur remboursement devantservir des oprations communautaires. Le suivi du rem-

    boursement et de la ralisation des investissements commu-

    nautaires sur un grand nombre doprations (plus de 9 000)

    se rvle particulirement difficile.

    Les banques prives au premier rang desquelles la Bank

    of Africa (BOA anciennement BTM), qui conserve un

    rseau important en milieu rural, mais aussi la Banque natio-

    nale de lindustrie (BNI) interviennent galement dans le

    financement du milieu rural mais de manire plus cible(clients offrant un bon niveau de garanties mme si celles-ci

    donnent lieu un niveau de formalisation moindre que pour

    une activit bancaire classique ; accord avec des agroindus-

    triels ; refinancement dIMF). Les rseaux publics de la

    Caisse dpargne de Madagascar (CEM) et de la Poste

    apportent galement des services financiers en milieu rural.

    La dernire source de financement rural provient des IMF.

    Avant 1990, elles taient totalement absentes de

    Madagascar. Profitant des crneaux laisss libres par le sec-teur bancaire et acceptant de relever le dfi du financement

    de lactivit agricole juge haut risque, les IMF implantes

    se sont dveloppes rapidement en milieu rural pendant les

    annes 1990.

    4.2. La rponse des IMF aux besoins de services financiers en milieu rural

    La rponse des IMF aux besoins de services financiers est la fois quantitative et qualitative, avec le dveloppement

    dune gamme complte de produits adapts aux besoins.

    Cette gamme comprend deux produits phares : le crdit GCV

    et un crdit de moyen terme pour linvestissement, la loca-

    tion-vente.

    A. Lmergence des IMF Madagascar

    Lmergence des IMF en milieu rural a t favorise par

    laction conjugue :

    doprateurs techniques spcialiss, qui ont assur len-cadrement technique des IMF en sappuyant sur leurs

    expriences en Afrique et ailleurs. Il sagit entre autres du

    Centre international de dveloppement et de recherche

    (CIDR), de Dveloppement international Desjardins

    (DID), de la Fondation pour lpanouissement et le renou-

    veau de la terre (FERT), de lInstitut de recherches et

    5 Il est reconnu comme tel dans le MAP (engagement 4, dfi 2).

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    Srie Evaluation et capitalisation n 13

    14 exPostexPost AFD 2008

    dapplications des mthodes de dveloppement (IRAM),du Conseil mondial des coopratives dpargne et de cr-

    dit (WOCCU) et, plus rcemment, du Groupe de

    recherches et dchanges technologiques (GRET) ;

    des bailleurs de fonds (Banque mondiale, UE, AFD,

    coopration allemande, Intercooperation Suisse...) qui

    ont mis en uvre plusieurs programmes ;

    du gouvernement, qui a initi une politique en faveur de

    ce secteur avec le concours de la Banque mondiale,

    travers le projet dexcution PATFR/ADMMEC (Projet

    dassistance technique aux finances rurales/Associationpour le dveloppement du mouvement mutualiste

    dpargne et de crdit) jusquen 1997 puis le projet de

    microfinance (PMF) pour une phase de deux ans (1998-

    1999) et lAGEPMF (Agence de gestion du programme

    de microfinance) depuis lors. Ce programme a fait lobjet

    en 2007 dune ultime prolongation, pour une dure de

    deux ans.

    En raison de leur implantation rurale de dpart, notamment

    agricole, les IMF mutualistes sont les plus importantes avec :

    les CECAM implantes partir de 1993 dans la rgion du

    Vakinankaratra avec lappui de la FERT ;

    les rseaux de la mutuelle dpargne et de crdit OTIV

    (Ombona Tahiry Ifampisamborana Vola), dont loprateur

    technique est DID et qui ont dmarr leur implantation

    dans les rgions de Toamasina et du lac Alaotra ;

    les Associations dpargne et de crdit autogres

    (AECA) mises en place par le CIDR dans la rgion de

    Marovoay ; le rseau des caisses mutuelles dpargne et de crdit

    TIAVO (Tahiry Ifampisamborana Aminny Vola), dvelop-

    p dans la rgion de Fianarantsoa avec le WOCCU puis

    lIRAM et maintenant lInternationale de crdit agricole

    rural (ICAR), qui regroupe la FERT et des caisses rgio-

    nales du Crdit agricole (CA) en France ;

    lAction pour le dveloppement et le financement des

    micro-entreprises (ADFI) dans la rgion dAntsirabe avec

    lappui technique dACEP dveloppement.

    LAssociation professionnelle des institutions financiresmutualistes (APIFM), cre en 1997, couvre lensemble des

    institutions mutualistes. Les institutions non mutualistes sont

    regroupes au sein de lAssociation des institutions de

    microfinance non mutualistes (AIM), cre en 1999.

    Dans cette dernire catgorie figurent :

    la Socit dinvestissement pour la promotion de lentre-

    prise Madagascar (SIPEM) cre en 1990

    Antananarivo par le Groupement des entrepreneurs mal-gaches (GEM) avec une vocation urbaine et priurbaine ;

    lAssociation pour la promotion de lentreprise

    Madagascar (APEM) dont la cration date de 1987 et qui

    intervient par des participations et des partenariats sur

    Antananarivo et Tular ;

    Vola Mahasoa ( Largent qui apporte du bien ), cre

    en 1993 et implante dans la partie sud de lle, Tular,

    avec la matrise douvrage de lAPEM et la matrise

    duvre du CIDR ;

    Entreprendre Madagascar (EAM), initie sous forme deprojet en 1990 par le Programme des nations unies pour

    le dveloppement (PNUD) et le Bureau international du

    travail (BIT) et transforme en association de droit mal-

    gache en 1996 ayant plusieurs activits dont le microcr-

    dit.

    Depuis 1996, une phase de croissance trs importante a

    t engage, marque par lextension et la consolidation des

    rseaux prexistants :

    OTIV : extension des activits avec louverture de nou-

    velles caisses dans la zone priurbaine de la capitale

    Antananarivo et du Nord-est (SAVA) en 1996 puis dans la

    zone urbaine dAntananarivo en 2000 ;

    CECAM : premire extension du rseau ds 1996 dans

    les rgions dAmoroni Mania, Vakinankaratra et

    IvonImerina sur les Hautes-Terres centrales. En 1998, le

    rseau sest install dans le Moyen-ouest (Bongolava et

    Itasy), le nord-ouest (Sofia) et sur la cte ouest (Menabe) ;

  • 8/6/2019 valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar (AFD/2008)

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    15exPostexPost AFD 2008

    TIAVO : extension du rseau en 1999 dans le sud-est Manakara et Farafangana ;

    AECA : installation Ambato Boeni en 1998.

    On observe aussi le dmarrage en 2005, avec le GRET, de

    Mahavotse dans lAndroy, au sud de Madagascar.

    Mahavotse est issue du volet microcrdit du projet Objectif

    sud (OS), conu au dpart pour tre prennis.

    Une nouvelle phase est en train de dbuter avec larrive

    de nouveaux acteurs (Aga Khan, Microcred, AccsBanque)qui se lancent directement dans une activit de microfinan-

    ce, sans passer par une phase de projet de dveloppe-

    ment.

    B. Des encours de crdit et un nombre de socitaires en

    croissance exponentielle

    La microfinance malgache a connu ces dix dernires

    annes une croissance trs importante, qui sest traduite par

    lextension de la couverture territoriale tant en milieu rural

    quurbain, laugmentation du taux de pntration et le dve-loppement des activits. Cette croissance sest poursuivie

    malgr la crise politique de 2002.

    Au plan national, les IMF mutualistes et non mutualistes

    regroupaient au 30 juin 2007 plus de 307 000 membres,

    dont 38 % de femmes. De 1998 juin 2007, le nombre de

    membres pour les institutions mutualistes a t multipli

    par six, passant de 47 476 291 878. Pour les institutions

    non mutualistes, le nombre de bnficiaires de crdit avait

    atteint 15 413 au 30 juin 2007. En considrant une moyen-ne de cinq personnes par mnage et une population de

    17,5 millions dhabitants, le nombre de mnages

    Madagascar serait de lordre de 3 500 000. Environ 8,8 %

    des mnages malgaches seraient donc bnficiaires des

    services financiers offerts par ces institutions de microfi-

    nance, contre moins de 1 % il y a 15 ans. Ce chiffre tho-

    rique doit tre considr comme un maximum, les IMF

    comptant des membres inactifs selon une proportion non

    connue.

    De 1998 juin 2007, les encours dpargne des mutua-listes sont passs de 1,3 milliard MGA (0,5 million deuros6

    [EUR]) plus de 31 milliards MGA (12,4 millions EUR). Cela

    concerne uniquement les mutualistes, car les institutions non

    mutualistes ne collectent pas dpargne, du moins pour le

    moment.

    Toujours sur la mme priode, les encours de crdit se sont

    accrus de 3,3 milliards MGA (1,3 million EUR) 43,8 mil-

    liards MGA (17,5 millions EUR) pour les mutualistes, soit un

    accroissement de plus de 13 fois. Les encours de crdit desIMF non mutualistes slvent 5,2 milliards MGA (2,1 mil-

    lions EUR) au 30 juin 2007.

    Les donnes les plus rcentes font ressortir la situation sui-

    vante par rseau.

    Ces donnes sont globales pour lensemble des IMF. Les

    CECAM, TIAVO, OTIV et AECA sont trs orientes vers le

    secteur rural alors quADFI travaille surtout en zone urbai-

    ne et priurbaine. Parmi les IMF non mutualistes, VolaMahasoa est la plus oriente vers le secteur rural. La SIPEM

    a une part dactivit en priurbain puisquelle couvre une

    zone de 30 kilomtres autour des ses implantations

    Antananarivo et Antsirabe.

    Il ny a pas de statistiques disponibles concernant les parts

    respectives de lurbain et du rural dans lactivit des IMF.

    Sur la base dune estimation par IMF7, leurs encours de

    crdit en milieu rural slveraient 22 milliards MGA(8,8 millions EUR), soit environ la moiti des encours glo-

    baux.

    6 Sur la base de 1 EUR = 2 500 MGA.

    7 CECAM (80 %), TIAVO (60 %), OTIV (50 %), AECA (100 %), ADEFI (10 %),Vola Mahasoa (30 %), SIPEM (10 %).

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    16 exPostexPost AFD 2008

    Nom de lunion Localisation

    Nombre de

    caisses/agences Nombre dadhrents Encours de crdit (1)

    URCECAM*

    VAKINANKARATRA Antsirabe 32 16 307 1 733,8

    MENABE Morondava 13 7 535 280

    AMORONI MANIA Ambositra 25 12 540 1 894,5

    BONGOLAVA Tsiroanomandidy 14 9 549 957,7

    ITASY Miarinarivo 24 11 455 2 672,1

    IVONIMERINA Ambatolampy 18 8 006 799,1

    ANALAMANGA Antananarivo 26 13 974 2 442,9

    SOFIA Antsohihy 17 12 350 485 4

    ALAOTRA Ambatondrazaka 12 4 701 2 094,5Sous-total 181 96 417 13 359,9

    TIAVO

    FITIA Fianarantsoa 59 33 481 2 256,9

    Sous-total 59 33 481 2 256,9

    OTIV

    ANTANANARIVO Antananarivo 41 61 583 4 013,3

    TOAMISINA Toamasina 13 28 527 4 148,1

    AMBATONDRAZAKA Ambatondrazaka 12 19 082 5 616,8

    DIANA Antsiranana 12 22 123 784,5

    SAVA Sambava 18 19 177 1 732,3

    Sous-total 96 150 492 16 295,1

    AECA

    TAFITA Marovoay (rive droite) 20 2 299 11,1

    AVOTRA Marovoa (rive gauche) 13 986 21,9

    Sous-total 33 3 285 33

    ADFI 42 8 203 11 874

    Sous-total 42 8 203 11 874

    TOTAL 411 291 878 43 818,9

    * Union rgionale des caisses dpargne et de crdit agricole mutuelles. (1) en millions MGA.

    Source : APIFM.

    (1) en millions MGA.

    Source : AIM.

    Nom de lIMF non mutualiste Nombre de clients (encours) Encours de crdit (1)

    CEFOR 4 547 314,2

    VOLA MAHASOA 6 498 814,2

    SIPEM 1 441 3 867,1

    SOAVITA 75 15,5

    SAF FJKM 476 11,4

    APEM PAIQ 2 376 149,6

    TOTAL 15 413 5 172

  • 8/6/2019 valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar (AFD/2008)

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    17exPostexPost AFD 2008

    C. Une gamme complte de produitsParmi les IMF soutenues par les concours de lAFD, les

    CECAM constituent assurment une exprience unique et

    atypique au niveau international. En effet, une gamme com-

    plte de produits articule autour des besoins du paysannat

    a t mise en place : le crdit productif pour accrotre la pro-

    duction (intrants, semences, main-duvre, petit matriel),

    le prt GCV pour valoriser dans les meilleures conditions

    cette production et le crdit LVM pour soutenir linvestisse-

    ment. Si le crdit bail est une technique connue, sa mise en

    uvre effective en milieu rural par les CECAM constitue uneinnovation au niveau des pratiques de la microfinance inter-

    nationale.

    Ces produits sinscrivent dans une certaine trajectoire de

    crdits : ainsi un prt GCV pourra permettre de rembourser

    un crdit productif et de financer des cultures de contre-sai-

    son, alors que le crdit LVM permet de soutenir une diversi-

    fication des activits et le dveloppement de la productivit

    agricole8.

    La force de loffre CECAM est de partir des besoins du pay-

    san et darriver adapter la mise en place et les rembourse-

    ments sur le cycle cultural. Les produits CECAM sont dfinis

    au niveau national dans leurs caractristiques gnrales

    mais avec un calendrier spcifique par rgion et une dcision

    doctroi prise au plus prs du terrain par un comit de crdit

    constitu de socitaires. Ainsi, il est possible dintgrer, dans

    une certaine mesure, les spcificits agro-cologiques

    locales qui vont conduire, par exemple, une, deux voire

    trois rcoltes de riz par an et donc des dures de crditsdiffrentes.

    Cette offre de crdits lis lactivit conomique est ren-

    force par des prts permettant de satisfaire les besoins

    sociaux mais il nexiste pas doffre de crdit spcifique pour

    lhabitat (construction ou amlioration). Des produits

    dpargne (compte vue non rmunr, compte terme,

    compte pargne) compltent la gamme. En revanche, aucun

    produit dassurance (maladie, conomique) nest propos.

    Les deux produits phares et innovants des IMF malgaches le crdit GCV et la LVM mritent un dveloppement sp-

    cifique.

    D. Le crdit GCV

    Le crdit GCV est un crdit de stockage visant aider le

    producteur agricole commercialiser ses produits un

    moment o les prix dachat lui seront les plus favorables. Il

    existait avant (exprience franaise mene dans les annes

    1930 ou exprience malgache conduite par la BTM), mais il

    est devenu pleinement oprationnel grce au rseauCECAM dont cest le produit phare (7 milliards MGA octroys

    en 2006, soit un tiers de lactivit crdit). Ce modle se diffu-

    se et ses modalits sont reprises par dautres, que ce soit

    Vola Mahasoa, TIAVO ou dautres institutions.

    Le GCV est un produit intressant lors des fortes fluctua-

    tions de prix pendant la priode de soudure. Cest le cas pour

    le riz Madagascar, lexception de 2005 o le processus a

    t perturb par un stockage massif du riz et des importations

    bas prix qui se sont retrouves simultanment sur le mar-ch la soudure, entranant une chute des cours et des diffi-

    cults de remboursement des crdits GCV. Le crdit GCV est

    en train dtre tendu dautres spculations (manioc, mas,

    girofle) mais avec certaines difficults : ainsi pour le mas du

    sud-ouest stock cette anne et dont la valeur baisse au lieu

    daugmenter. Lenjeu du GCV est donc une bonne anticipa-

    tion des prix agricoles (passant notamment par la consolida-

    tion des observatoires des prix agricoles).

    Ce type de crdit ne connat que trs peu dimpays car lespaysans rcuprent normalement plus la vente que le

    montant de leur crdit (les CECAM prtent 75 % du prix de

    vente estim pour le riz et 65 % pour les autres produits +

    intrts) si le march a bien augment. Le produit stock sert

    en outre de garantie pour lorganisation.

    8 Lenqute auprs de 500 mnages ralise par les CECAM en 2006 montreque 19 % des socitaires ont recours au moins quatre produits diffrents ;35 % utilisent trois produits avec pour combinaisons les plus frquentes lescrdits productif-GCV-social et les crdits productif-GCV-LVM ; 30 % dessocitaires ont deux crdits avec un crdit productif associ soit un GCV, soit un crdit social ; 11 % nont quun crdit et 5 % des socitaires nen ont pas.

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    Srie Evaluation et capitalisation n 13

    18 exPostexPost AFD 2008

    Le crdit GCV va toucher les producteurs qui dgagent unsurplus commercialisable, dont la vente va leur permettre de

    subvenir une grande partie de leurs besoins. Il concerne

    moins les exploitants qui natteignent pas ou qui sont la

    limite de lautosuffisance en temps normal et dont la probl-

    matique est de conserver des stocks pour leur alimentation

    et non pour la vente.

    Le crdit GCV nest pas utilis uniquement pour stocker les

    rcoltes. Il sert galement dans certains cas stocker du riz

    achet. Cette pratique concerne des agriculteurs quiempruntent au dpart avec leur riz puis achtent du riz sur le

    march et contractent un nouveau prt GCV. Elle peut aussi

    concerner des collecteurs professionnels. Les IMF mutua-

    listes sefforcent dtre vigilantes sur ce point pour viter tout

    phnomne spculatif. Certaines IMF pratiquent des taux

    diffrencis9. Signalons galement que le manque de gre-

    niers aux normes dans certaines zones freine la mise en

    place des crdits.

    Au final, le crdit GCV semble constituer un bon outil pourmaintenir les rcoltes sur le lieu de production et donc am-

    liorer la scurit alimentaire locale. Il contribue la rgulation

    du march et a un impact favorable sur les revenus des pay-

    sans qui disposent dun excdent de production commercia-

    lisable.

    Le savoir-faire de lIMF sexprime travers sa capacit

    bien dfinir les prix de rfrence des produits permettant

    dasseoir le montant du crdit et mettre en place les crdits

    au bon moment pour lagriculteur. Les observatoires locauxdes prix de crdit et des agents de crdit ont un rle dter-

    minant jouer cet gard.

    E. La LVM

    La LVM (appele aussi LVE dans des structures non

    mutualistes) sappuie sur une procdure classique de crdit

    bail10. Lexprience de LVM dmontre que le crdit bail

    adapt la microfinance est une innovation permettant de

    financer linvestissement agricole une chelle significative

    pour le dveloppement. Conjugu des procdures rigou-reuses daccs et de suivi, le mcanisme de crdit bail per-

    met dobtenir un niveau satisfaisant de scurisation du cr-

    dit11.

    Le crdit bail est un rel lment de dynamisme dans le

    monde rural. Ainsi, le rseau CECAM a mis en place prs de

    2 400 LVM en 2006 pour un montant de 3,4 milliards MGA.

    La LVM est utilise pour financer une large gamme dinves-

    tissements allant de 60 000 MGA 17 millions MGA, avec

    une dure de crdit de deux 36 mois (20 mois en moyen-ne en 2006). Lobjet du financement volue dans le temps.

    Ainsi, la comparaison des rsultats des enqutes menes

    par les CECAM auprs de 500 mnages en 2003 et 2006 fait

    apparatre une rduction des utilisations de la LVM pour lac-

    quisition dquipements agricoles au profit de lachat dani-

    maux (vaches laitires notamment) et dquipements non

    agricoles. En revanche, la part des quipements mnagers

    financs avec des LVM reste stable. Ces donnes sont diffi-

    cilement extrapolables tant donne la taille de lchantillon

    mais elles suggrent des tendances.

    Ce produit participe laccumulation de capitaux et

    lamlioration des capacits de production dans le milieu

    rural. Il soriente plus vers des mnages moyens et aiss12,

    9 La CECAM pratique des taux dintrt distincts pour les producteurs (3 %par mois) et pour les oprateurs conomiques (3,5 % par mois).

    10 Le rseau CECAM acquiert un bien choisi par le socitaire qui en fait lademande. Celui-ci en devient locataire, moyennant un apport personnel,une garantie dun montant quivalant une fourchette allant de 50 150 %

    de la valeur du bien et le versement rgulier dun loyer, avec un taux din-trt de 2,5 3,5 % par mois. Le rseau reste propritaire du bien jusquce quil soit entirement rembours. En cas de dfaut de paiement du loyer,le rseau peut reprendre son bien, sans procdure spcifique de conten-tieux.

    11 Wampfler, B., E. Bouquet et E. Ralison (2007).

    12 Ltude mene par le Centre de coopration internationale en rechercheagronomique pour le dveloppement (CIRAD) souligne galement desmodalits dimpact diffrencies selon les catgories dusagers des ser-vices financiers. Pour les mnages pauvres, limpact se traduit plutt entermes de rduction de la vulnrabilit conomique, damlioration de lascurit alimentaire et daugmentation ponctuelle de la capacit de pro-duction, via notamment le produit GCV. Pour les mnages moyens etaiss, limpact se traduit plutt en termes daugmentation des investisse-ments et donc damlioration moyen et long termes de la capacit de pro-duction et daccumulation.

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    19exPostexPost AFD 2008

    avec de lemploi induit en milieu rural (fourniture de fourra-ge, journaliers).

    Le crdit investissement se dveloppe en cohrence avec

    lmergence de microentrepreneurs souligne plus haut. Ceux-

    ci sont accompagns par les IMF (en particulier les CECAM,

    Vola Mahasoa et TIAVO) dans leur trajectoire conomique. Les

    IMF y trouvent une source de rentabilit avec des volumes de

    crdit croissants par client et des risques se rduisant avec la

    diversification des activits et des actifs possds.

    F. Les limites au dveloppement de la microfinance rurale

    Si lon reprend une division du pays en 20 rgions agro-

    cologiques13 telles que dfinies par le projet dappui la

    microfinance (PAMF) (statistiques au 30 juin 2003), on ne

    trouve que deux rgions sans point de service (Betsiboka et

    Melaky). Cependant, plusieurs restent trs peu couvertes

    par des IMF offrant du crdit (Atsimo-Andrefana, Mangoro,

    Tolagnaro, Atsimo-Atsinana, Horomb) et les disparits entre

    rgions sont importantes (CGAP, 2005).

    Cette relativement bonne couverture apparente ne doit pas

    faire oublier que les caisses et agences des IMF se dve-

    loppent essentiellement le long des axes goudronns et des

    pistes rgulirement entretenues, pour des raisons vi-

    dentes de cot du service. Par ailleurs, le nombre de soci-

    taires/clients parat faible par rapport au nombre dagricul-

    teurs dans les zones desservies : il y a de la marge pour

    conduire des actions de densification des rseaux.

    Notons galement dans certaines zones frappes par descrises alimentaires rcurrentes la difficult de financera prio-

    ri toute forme dagriculture : un paysan peut-il accepter un

    crdit si sa rcolte est totalement alatoire, du fait de fac-

    teurs climatiques ou dpidmies quil ne matrise pas ? Il

    convient de souligner ici la dmarche engage par

    Mahavotse dans lAndroy.

    Cette rgion au sud de Madagascar est rgulirement tou-

    che par des crises alimentaires (kr). Sa population est

    rpute pour la force et la richesse de ses traditions et sabonne cohsion sociale, ce qui donne une assise aux inter-

    ventions solidaires mais sur quel type de solidarit se

    baser et quels produits faut-il mettre en uvre ?

    Confie une jeune anthropologue, une premire tude14

    a t ralise pour mieux comprendre les structures cono-

    miques familiales, les logiques et les stratgies des habitants

    de lAndroy face aux situations de crise et les modalits de

    gestion de la trsorerie familiale (pargne, recours au crdit).

    Ce travail sarticule avec une seconde tude plus classiquede clientle15 qui analyse les usages de crdit, apprhende

    la satisfaction de la clientle, propose une typologie socio-

    conomique permettant de segmenter la clientle et, enfin,

    examine les raisons de non-adhsion. Ces deux travaux ont

    t complts en juin 2007 par une tude du directeur scien-

    tifique du GRET16 dont lobjet est de contribuer une

    meilleure adaptation des mthodes et du mode opratoire de

    Mahavotse dans son contexte, travers trois axes de travail :

    amliorer les mthodes de gestion des risques, affiner la

    rflexion sur linnovation produit et capitaliser sur lesmthodes de gestion de crise sur la base de lexprience du

    kr en 2006. Ces tudes ont permis didentifier plusieurs

    pistes pour des produits innovants, en particulier concernant

    laccompagnement des sorties de crise.

    Dans un autre registre, il est remarquable de constater que

    le rseau CECAM ne finance pratiquement plus les organi-

    sations paysannes (OP) alors quelles ont eu un long par-

    cours commun. Les prts aux OP ont donn lieu des

    impays importants et les IMF considrent que la profes-sionnalisation de leur gestion na pas suivi. Pourtant, le

    besoin de financement des OP demeure.

    13 La division administrative comprend 22 rgions.

    14 Bidaud-Rakotoarivony, C. (2007).

    15 Manach, J. (2007).

    16 Lavigne Delville, P. (2007).

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    Srie Evaluation et capitalisation n 13

    20 exPostexPost AFD 2008

    Des partenariats de type projets agricoles et IMF exis-tent en milieu rural (Mahavotse Vola Mahasoa, TIAVO) mais

    ils ne sont pas toujours faciles mettre en uvre, notam-

    ment lorsquil y a des logiques diffrentes face la prenni-

    sation : pour une IMF, cette prennisation sera financire

    alors quun projet agricole peut sintresser avant tout aux

    dynamiques cres.

    Enfin, il est intressant de noter que le dbat sur la bonifica-

    tion des taux dintrt revient dans lagenda politique mal-

    gache17

    alors que la position de la communaut financire yest plutt dfavorable (voir par exemple CGAP, 2005). Une

    bonification dintrts pour des intrants agricoles a t mise en

    place depuis trois ans. Cette question mriterait dtre value

    plus prcisment en dehors de tout a priori idologique. Il

    serait aussi intressant de mieux capitaliser sur une exprien-

    ce de bonification avec des crdits dquipement (moiti des

    intrts pris en charge par TIKO pour lachat de vaches lai-

    tires sur ses parcours de collecte de lait) qui peut rpondre

    des critres dadditionnalit et de bnfice rciproque.

    4.3. Une prennit de loffre actuelle encore fragile

    Lensemble de ces points pose plus largement la question

    de la prennit de loffre actuelle. La fragilit de la microfi-

    nance malgache est un thme qui revient de manire rcur-

    rente (CGAP, 2005). Les structures lorigine de la crois-

    sance exponentielle de lactivit sont-elles viables ?

    Cette question mrite dtre tudie au niveau national

    (stratgie, organes de contrle) et au niveau des institu-

    tions de microfinance (gouvernance interne, viabilit finan-

    cire et concurrence entre IMF). Celles-ci pourront-elles

    financer leur croissance ? Ne vont-elles pas tre tentes de

    se dvelopper sur de nouveaux marchs plus rentables ?

    4.4. Un contexte institutionnel favorable

    Le secteur de la microfinance Madagascar est en pleine

    volution, avec la mise en place dune stratgie nationale en

    juin 2004, actualise en octobre 2007 lissue dune valua-

    tion mi-parcours, et ladoption dun nouveau cadre lgislatif

    (loi 2005-016 du 29 septembre 2005 et ses dcrets dappli-cation) qui doit tre complt par des instructions sur la sant

    financire des IMF, la mise en conformit des institutions ce

    nouveau cadre ainsi que le renforcement des capacits de

    contrle de la Commission de supervision bancaire et finan-

    cire (CSBF) et de suivi de la Coordination nationale de la

    microfinance (CNMF). Aujourdhui, la libert des taux existe,

    ce qui est un lment favorable dans la perspective de lau-

    tonomie financire : les IMF peuvent, si elles le souhaitent,

    appliquer des taux leur permettant dquilibrer leurs activits.

    A. Une stratgie nationale de la microfinance qui vient

    dtre actualise

    La SNMF a t approuve et valide par le gouvernement

    en juin 2004. Elle faisait suite un diagnostic et un tat des

    lieux raliss en aot 2003, en concertation avec les acteursde lpoque. Le secteur de la microfinance prsentait alors

    les faiblesses suivantes :

    absence de cadre lgal et rglementaire, de politique

    nationale adquate pour le secteur et de vritable coordi-

    nation au niveau national ;

    17 Le colloque organis Paris par la Fondation pour lagriculture et la rurali-t dans le monde (FARM) en dcembre 2007 a abord cette question enprsentant plusieurs exemples de bonifications de taux (Brsil,Madagascar).

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    21exPostexPost AFD 2008

    couverture gographique incomplte, surtout en milieurural un problme aggrav par ltat des infrastructures

    routires ;

    absence de professionnalisation du secteur et manque

    dappuis pour y faire face ;

    insuffisance des sources de refinancement sur le moyen

    et long termes et difficult datteinte de lautonomie finan-

    cire.

    Forte de ce diagnostic, la SNMF 2004/2009 sest fix plu-

    sieurs grands objectifs :

    amliorer le cadre conomique, lgal et rglementaire pour

    un dveloppement harmonieux et scuris du secteur ;

    offrir des produits et services adapts, diversifis et en

    augmentation de faon viable et prenne notamment

    dans les zones non encore couvertes par des IMF pro-

    fessionnelles ;

    organiser le cadre institutionnel de manire permettre

    une bonne structuration du secteur, une meilleure infor-

    mation et communication entre les acteurs, une coordi-nation efficace du secteur et une conduite efficiente de la

    SNMF.

    Ces principaux objectifs constituent les trois axes strat-

    giques de la SNMF 2004/2009 qui sont ensuite dclins en

    objectifs spcifiques et traduits en actions. La ralisation de

    ces actions devait se traduire par un nombre demprunteurs

    actifs de lordre de 296 000 et un encours de crdit atteignant

    120 milliards MGA (48 millions EUR) en 2009.

    Une actualisation de la SNMF (2008/2012) a t ralise

    en octobre 2007, la suite dune revue mi-parcours de ses

    rsultats.

    Ce nouveau document confirme les principes gnraux

    retenus pour la SNMF 2004/2009, savoir :

    le rle prminent accord au secteur priv et aux IMF

    dans loffre de produits et de services financiers ;

    labsence dexcution directe de programmes de microfi-nance par le gouvernement ;

    lorientation vers le march des politiques financires et

    de crdit.

    Ces principes sont conformes aux bonnes pratiques pour le

    secteur de la microfinance dfendues par le Groupe consul-

    tatif dassistance aux pauvres (CGAP).

    Par rapport aux trois axes voqus ci-dessus, les ralisa-

    tions peuvent se rsumer ainsi :

    le cadre macro-conomique a t amlior et une nou-

    velle loi sur la microfinance publie. Des mesures com-

    plmentaires sont cependant ncessaires (voir infra) ;

    les actions pour le renforcement de la professionnalisa-

    tion des IMF sont poursuivre et intensifier (voir

    point 2, supra) ;

    les acteurs du pilotage et de la coordination prvus par la

    SNMF devraient affirmer leur leadership dans la conduite

    du plan daction.

    Comme pour la stratgie initiale, une dclinaison sous

    forme dactions a t ralise et annexe dans la SNMF

    2008/2012. Des objectifs quantitatifs ambitieux ont t

    nouveau fixs : 856 000 emprunteurs et un encours de cr-

    dit de 162 milliards MGA (64,8 millions EUR) en 2012.

    Ce type de dmarche et les opportunits de march qui

    existent constituent videmment un contexte favorable pour

    les IMF qui souhaitent se dvelopper Madagascar.

    B. Un nouveau cadre lgal et rglementaire oprationna-

    liser

    Avant les annes 1990, le secteur financier tait largement

    public et se composait de banques sectorielles (une banque

    agricole, une banque pour lindustrie). Comme nous

    lavons vu propos du secteur agricole, le systme bancaire

    a t libralis et privatis au dbut des annes 1990, avec

    les encouragements du FMI et de la Banque mondiale. Les

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    Srie Evaluation et capitalisation n 13

    22 exPostexPost AFD 2008

    banques nationales ont t privatises et, cette occasion,rachetes par des groupes trangers (la BTM par la BOA, la

    BNI par le Crdit lyonnais, la BFV par la Socit gnrale).

    Par rapport dautres pays en dveloppement, Madagascar

    dispose dun secteur bancaire relativement solide et en plein

    essor : on dnombrait la fin de lanne 20 tablissements

    de crdit dont huit banques territoriales, cinq tablissements

    financiers et huit institutions financires mutualistes.

    Une premire rglementation, adopte en 199618, a donn

    la responsabilit de la supervision bancaire la CSBF de labanque centrale. Elle limitait lexercice de la microfinance

    aux structures mutualistes ou associatives. largi en 2005,

    ce cadre juridique autorise dsormais des socits prives,

    SA ou SARL, exercer la microfinance.

    La nouvelle loi distingue trois niveaux dIMF, progressifs en

    fonction de la taille, de la complexit et du volume des op-

    rations et selon quelles collectent ou non les dpts de leurs

    membres ou du public (annexe E).19

    Cette loi a t complte par le dcret 2007-012 fixant les

    formes juridiques des IMF et les modalits de leur immatricula-

    tion au registre du commerce et des socits ainsi que par ledcret 2007-013 portant fixation du capital minimum des ta-

    blissements de crdit et de la valeur nominale des titres de par-

    ticipation (rpublique de Madagascar, MEFB, 2007a et 2007b).

    Ce cadre reste finaliser par des instructions complmen-

    taires concernant la sant financire des IMF : modalits pr-

    cises de calcul des provisions pour crances douteuses,

    dtermination des actions entreprendre dans le cas de

    dpassements de seuils critiques en matire dimpays

    Pour assurer une surveillance adquate dun secteur en

    pleine croissance, les capacits de la CSBF doivent tre ren-

    forces. La mise en place progressive dune centrale des

    risques est galement envisage, en commenant par traiter

    les lments dinformation qui font consensus. Ce point est

    sensible, compte tenu du dveloppement de la concurrence

    dans certaines zones.

    Enfin, lun des grands enjeux est la mise en conformit des

    IMF avec le nouveau cadre lgal et rglementaire ce qui pose indirectement la question de lamlioration de leurs

    capacits et de leurs modes de gouvernance internes.

    4.5. Des gouvernances internes en progrs

    Lanalyse de la gouvernance a port sur deux rseaux

    mutualistes (CECAM et TIAVO) et deux structures non

    mutualistes (Vola Mahasoa et Mahavotse). Lexamen aconcern le double niveau du mode de gouvernement et du

    mode de gestion mis en place par ces institutions.

    Si les modes de gouvernement sont par nature diffrents

    entre tablissements mutualistes et non mutualistes, il est

    remarquable de constater que, dans la pratique, leur inter-

    vention en milieu rural se fonde sur des valeurs communes

    de solidarit. Lun des enjeux partags est limplication des

    lus et des responsables aux cts des salaris.

    Des procdures claires, un systme dinformation fiable et

    rapide pour prparer les dcisions et rendre compte de lac-

    tivit, un systme de contrle efficace sappuyant sur cesinformations et des niveaux appropris de comptences

    chez les salaris sont galement des lments cls dune

    bonne gouvernance. ce niveau, des progrs importants ont

    t raliss. La gestion se professionnalise avec pour princi-

    pal enjeu la cration de centrales de services et de structures

    fatires prennes.

    18 Loi 95-030 du 22 fvrier 1996 relative lactivit et au contrle des tablis-sements de crdit, dite loi bancaire (rpublique de Madagascar, 1996).

    19 Loi 2005-016.

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    23exPostexPost AFD 2008

    A.. Des modes de gouvernement qui se rapprochent Madagascar, les rseaux mutualistes se sont dvelopps

    sur la base de produits de crdit individuel. Lapproche

    mutualiste faonne une solidarit financire qui sopre tra-

    vers le versement de parts sociales fixes ou variables. Ces

    rseaux reposent sur des lus locaux, reprsentatifs de la

    population paysanne, assists de salaris pays par le sige

    de linstitution. La gestion revient aux salaris, tandis que les

    dcisions appartiennent aux lus.

    Ce mode dorganisation, qui requiert ladhsion des luspour toute prise de dcision, est susceptible de gnrer des

    lourdeurs dans le processus de dcision. Des divergences

    peuvent apparatre entre les stratgies dinstitutionnalisation

    des salaris et les stratgies interventionnistes des lus.

    Toutefois, on observe dans le rseau CECAM un rapproche-

    ment des points de vue entre techniciens (qui font la part des

    choses) et lus (qui apprhendent mieux la ncessit dqui-

    librer lactivit au plan financier) sur, par exemple, lintrt

    des gros crdits en milieu urbain la suite dimpays. Des

    tensions sont nanmoins apparues lors de difficults rencon-tres par les caisses rgionales du Menabe et de Sofia (arrt

    de lactivit ou restructuration).

    Madagascar abrite plusieurs formes de structures non mutua-

    listes : ONG, associations malgaches ou trangres, tablisse-

    ments financiers. Les structures tudies (Vola Mahasoa et

    Mahavotse) appuient leur intervention en milieu rural sur une

    garantie solidaire au sein dun groupe de personnes.

    Le crdit individuel est galement propos mais il sadres-se une population ayant dj contract plusieurs crdits

    solidaires ou prsentant, le plus souvent en milieu urbain,

    des garanties solides. Mahavotse tente dvoluer vers un

    crdit individuel, mais la question de la connaissance des

    clients est pose pour valuer de faon pertinente les

    demandes de crdit et les garanties.

    Toutefois, le crdit assis sur des groupes solidaires prdo-

    mine en milieu rural pour ces structures non mutualistes ce

    qui permet davoir une meilleure information sur les bnfi-ciaires et de limiter les cots. Par ailleurs, on constate une

    tendance soutenue de crer au-dessus de ces groupes une

    structure souveraine qui runit ces entits au sein dun orga-

    nisme solidaire qui na pas forcment dexistence juridique

    relle. Cest le cas des intergroupes Vola Mahasoa, qui

    sarticulent autour de sept groupes et assurent les dcisions

    de crdit ainsi quune caution mutuelle entre ses membres.

    Par dfinition, les modes de gouvernance entre mutualistes

    et non mutualistes sont diffrents. Nanmoins, desdmarches similaires de cautionnement mutuel ont pu tre

    mises en avant, que ce soit par le mutualisme, au niveau de

    la structure mme ou via la structure fatire, ou par des

    structures non mutualistes telles que Vola Mahasoa, qui

    assure une caution mutuelle entre les groupes par des inter-

    groupes qui sont parties prenantes de la dcision doctroi.

    On assiste ainsi un rapprochement entre un mutualisme

    qui pratique le crdit individuel (arrt des prts aux OP) et un

    crdit solidaire qui se consolide par le cautionnement mutuel(intergroupes de solidarit). Ds lors, les organisations se

    distinguent nettement moins par leur forme de gouvernance

    que par les activits pratiques (crdit, collecte de

    lpargne) et les montants octroys. Lapproche de la nou-

    velle loi sur la microfinance devient dautant plus cohrente

    que la classification des IMF se fait selon leur activit et non

    selon le type dorganisations (mutualistes et non mutualistes)

    et avec la volont de crer une association des IMF.

    B. Entre intrt et intressement : comment impliquer leslus et les responsables ?

    Pourquoi un lu va-t-il consacrer une partie de son temps

    la gestion dune caisse en milieu rural ? Est-ce lhonneur de

    llection et de la reprsentation ? Pourquoi un responsable

    dun groupe solidaire va-t-il se sentir investi dune mission au

    sein dun intergroupe dans un village ?

    Les expriences tudies rapportent des vcus divers mais

    tmoignent dun rel intrt pour organiser et diriger ces

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    Srie Evaluation et capitalisation n 13

    24 exPostexPost AFD 2008

    rseaux et pour concourir au dveloppement local. Notonsque lune des IMF tudie rmunre la participation de ces

    responsables ( hauteur dun pourcentage des intrts

    chus), tandis que les autres se contentent de rembourser

    les frais occasionns (dplacements), en sappuyant plus

    largement sur le bnvolat et lattrait des formations qui y

    sont associes.

    Ces lus et ces responsables se retrouvent au sein dautres

    organisations, comme les OP notamment. Ils insistent gale-

    ment sur les apports quils retirent sur un plan personnel desformations reues et des contacts quils nouent avec le

    monde extrieur.

    C. Lenjeu de la formation et des ressources humaines

    Dans un contexte de concurrence accrue pour des comp-

    tences rares, la question des ressources humaines apparat

    dautant plus stratgique Madagascar. Dans les deux types

    dorganisation tudis, le recrutement de salaris comp-

    tents est un enjeu majeur. Des stratgies de dbauchage

    drgulent quelque peu le march et larrive de nouveauxacteurs aux stratgies et objectifs diffrents (Microcred, Aga

    Khan, AccsBanque) entrane de nouveaux risques.

    Dans ces conditions, les rseaux aliments sur des

    logiques de projets ont tendance payer plus et capter une

    certaine ressource, tandis que les rseaux qui sont dans une

    stratgie dinstitutionnalisation auront tendance payer des

    salaires moindres mais valoriser la formation interne et les

    constructions de carrire. Cependant, en cas de difficults

    conjoncturelles, les dpenses de formation sont souvent lespremires tre rduites.

    Les structures mutualistes connaissent une difficult sup-

    plmentaire : la ncessaire formation de leurs lus. Ce

    cot, souvent sous-estim et structurellement rcurrent,

    prend toutefois une valeur de bien public. En effet, ces lus

    forms vont participer et ils y sont encourags lani-

    mation ou la direction dautres structures, dautres orga-

    nisations. Cela pose la question des moyens : cette forma-

    tion se rvle coteuse dans la ralit, les parrainagestant ncessairement limits du fait de leur cot (missions

    rciproques France/Madagascar) et la disponibilit de

    bons acteurs tant par dfinition rare, donc onreuse. Dans

    cette dernire problmatique, il est intressant de noter

    lexprience dICAR et de ses neuf caisses rgionales du

    rseau Crdit agricole, qui se spcialisent dans un appui

    technique prcis, avec une relle stratgie de complmen-

    tarit. Cela pse moins sur leurs propres ressources

    humaines et permet de sappuyer sur des personnes moti-

    ves dans le rseau.

    On voit par l que la formation est un vritable enjeu pour

    la microfinance Madagascar. Elle sinscrit dans le long

    terme et mrite dtre soutenue par un mcanisme national

    appropri favorisant la mise en place et le financement de

    formations professionnelles adaptes aux besoins de la

    microfinance (techniciens et lus).

    D. Des systmes de gestion et un contrle interne qui se

    professionnalisentLes institutions qui interviennent en milieu rural, quel que

    soit leur mode de gouvernance, doivent sappuyer sur un

    corps de procdures solide servant de rfrence pour len-

    semble du personnel. Trois manuels sont en gnral dispo-

    nibles : le manuel de procdures oprationnelles, le manuel

    de procdures comptables et financires et le manuel dau-

    dit interne. Lorsque linstitution intervient en rseaux, il

    apparat ncessaire duniformiser ces procdures en dve-

    loppant la concertation, afin quelles soient bien intgres

    par le personnel ou les membres du rseau. Par ailleurs, ilconvient de veiller leur actualisation rgulire, afin de les

    amliorer sur la base de lexprience et de ne pas les

    considrer comme figes. Les IMF tudies sont toutes

    bien avances dans la mise en place de manuels de pro-

    cdures. Il sagit dsormais de favoriser lappropriation des

    manuels par les agents, notamment loccasion des mises

    jour. Certaines institutions organisent des ateliers de

    concertation qui permettent de faire voluer les procdures,

    partir de discussions en interne. Le processus reste

  • 8/6/2019 valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar (AFD/2008)

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

    25exPostexPost AFD 2008

    nanmoins long, pouvant fragiliser les IMF dans un contex-te de dveloppement de la concurrence o la ractivit est

    essentielle.

    Les IMF en milieu rural Madagascar sont toutes confron-

    tes des difficults de communication et de transmission

    de linformation. Lutilisation de systmes dinformation et de

    gestion (SIG) efficaces devrait permettre de faire face ces

    difficults inhrentes lintervention en milieu recul. Il sagit

    en particulier de limiter les saisies manuelles et, ce faisant,

    les risques derreurs. De nouveaux SIG sont en cours dedploiement dans les quatre IMF tudies. Trois dentre elles

    ont retenu un logiciel dvelopp par une socit locale. La

    dernire a recours un logiciel import avec un appui dis-

    tance qui lui donne satisfaction. travers leur SIG mais aussi

    grce des enqutes auprs des mnages, les CECAM dis-

    posent dune vritable mmoire dorganisation et dune base

    de donnes utilisable pour orienter la stratgie et initier des

    tudes dimpact.

    Pour une bonne gestion, la mise en place dun systme decontrle et dinspection efficace, qui accompagne la dcen-

    tralisation propre lintervention en milieu rural, se rvle

    indispensable. Ainsi, des procdures de contrle doivent tre

    dfinies, sur la base de contrles rguliers contradictoires et

    de contrles inopins. Ces inspections doivent viser res-

    ponsabiliser les bureaux locaux, favoriser la dcentralisa-

    tion et donc lextension gographique des rseaux. Les

    corps dinspection sont une priorit des IMF qui y voient ga-

    lement des viviers pour de futurs responsables opration-

    nels.

    Ces lments permettent de limiter le risque li lloigne-

    ment et la dcentralisation des IMF implantes en milieu

    rural. Se pose nanmoins la question de leur structuration et

    de la mise en commun des moyens.

    Rappelons toutefois que le cot de la mise en place de SIG

    et le cot de linspection correspondent des dpenses que

    toutes les IMF ne sont pas en mesure dassumer.

    E. Les enjeux dune centrale de servicesLe besoin de professionnalisation des rseaux conduit

    ncessairement la question dune structure fatire partir

    dun certain niveau de dveloppement. Si la ncessit tech-

    nique dune telle structure est en rgle gnrale bien admi-

    se, en dpit des rticences sur le transfert de pouvoirs quel-

    le implique, la principale question est celle de son cot et de

    la capacit du rseau le supporter. On constate

    Madagascar que la plupart des rseaux sappuient ou cher-

    chent sappuyer sur une structure fatire dont la mission

    est technique et financire (INTERCECAM pour les CECAM,projet FITIA pour TIAVO).

    Dans ces conditions, il est ncessaire davoir un certain

    volume dactivits pour quilibrer lexistence de telles struc-

    tures si bien que les bailleurs de fonds sont sollicits pour

    couvrir au dmarrage une partie de leurs cots. Les subven-

    tions ainsi accordes par les bailleurs de fonds, qui visent

    lautonomie financire des IMF, sont ncessairement dgres-

    sives. Des tensions apparaissent partir du moment o les

    prestations sont pleinement refactures aux caisses qui enmesurent ds lors le cot vritable. Ainsi, seuls les rseaux

    importants peuvent soffrir une telle structure.

    Pour atteindre la taille critique, la question se pose de crer

    une centrale de services qui ne serait plus ddie une IMF

    particulire mais qui proposerait ses services la carte plu-

    sieurs clients. Ce choix de diversit implique un risque pour

    lIMF qui y a recours, puisque la centrale est susceptible dvo-

    luer vers des crneaux plus rentables, perdant ainsi sa finalit

    originelle20. Cependant, in fine, la contrainte dune structurefatire quilibre financirement demeure essentielle.

    Cette question doit amener une rflexion sur la constitu-

    tion dalliances entre rseaux dinstitutions rgionales de

    microfinance, intervenant la fois en milieu rural dans une

    optique principale de prteur et en milieu urbain comme col-

    lecteur dpargne.

    20 Ce risque peut tre illustr par le cas dune structure de refinancement qui setransformerait en banque classique et renoncerait au refinancement de lIMF

    qui en est lorigine si de meilleures opportunits se prsentaient ailleurs.

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    Srie Evaluation et capitalisation n 13

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    4.6. Une viabilit financire limite dans un contexte de concurrence accrue

    Lintervention des IMF en milieu rural est associe des

    cots de structure importants, lis la fois aux transports et

    lindispensable processus de dcentralisation. De plus, les

    IMF en milieu rural sadressent une cible de population

    dfavorise, donc majoritairement avec des petits crdits

    dont le cot marginal de gestion est de fait important. La

    question de la prennit de lintervention en milieu rural est

    donc pose et ce, dautant plus que la concurrence entre

    rseaux ne cesse de crotre.

    Ds lors, des stratgies de prquation entre zones

    urbaines et zones rurales se mettent en place. Les IMF qui

    taient initialement implantes en milieu rural ouvrent des

    agences en milieu urbain ou priurbain. Un mouvement

    parallle semble galement sesquisser chez les IMF initiale-

    ment cres en milieu urbain et disposant de ressources

    excdentaires, certaines tant tentes par le dveloppement

    dune clientle crdit en milieu rural.

    A.. La viabilit financire limite des IMF en milieu rural

    Pour des interventions dans un milieu rural recul ou

    enclav, selon dautres terminologies qui ne peuvent pas

    sappuyer sur une densit de population de type urbaine, suf-

    fisante pour des interventions moins coteuses et plus ren-

    tables, la structure deviendra viable Madagascar condi-

    tion de pratiquer la dmarche suivante :

    un taux mensuel des crdits octroys de lordre de 4

    4,5 % ; une matrise extrmement rigoureuse des cots de fonc-

    tionnement mais aussi travers une limitation au strict

    ncessaire des investissements dont lamortissement

    peut se rvler coteux, ce qui implique des dispositions

    spcifiques pour les caisses recules et difficiles daccs ;

    une intervention en crdit solidaire, permettant de limiter

    les cots dinformation et de dlguer aux groupes une

    partie du travail des agents de crdit (estimation des

    garanties, collecte individuelle et limitation des recouvre-

    ments qui sont extrmement coteux pour les structures,

    la fois en termes de procdures associes que de cots

    dopportunit dans un contexte de forte demande) ;

    un gros effort sur le recouvrement, avec une bonne impli-

    cation des groupes :

    - utilisation de la pression sociale,

    - adaptation des outils ;

    un cot de la ressource faible et donc une politique de

    subvention des bailleurs de fonds dans un premier tempsqui accompagne une stratgie forte de maintien en milieu

    rural (mais qui ne limpose pas) porte par le conseil

    dadministration de la structure.

    La prennit de la structure est conforte par un rseau

    mutualiste, si tant est que celui-ci bnficie dune vritable

    implication financire de ses membres (souscription de parts

    sociales fixes ou variables, dpts de garantie). Cest gale-

    ment le cas pour des rseaux non mutualistes intervenant en

    crdit de groupe, lorsquun niveau supplmentaire et solidai-re est constitu entre les groupes et lIMF (intergroupes). Ce

    type de rseau permet de scuriser la structure en cas de

    dfaillance ou de disparition dun groupe.

    B. Le dveloppement de la concurrence

    Comme nous lavons vu, les premires IMF sont apparues

    au dbut des annes 1990 dans plusieurs rgions de

    Madagascar, partir de projets soutenus par laide interna-

    tionale et linitiative de diffrents oprateurs. Une phase de

    croissance trs importante a t initie ds le milieu de cettedcennie. Elle sest traduite par la consolidation de ces

    rseaux et leur extension dans des zones rurales non cou-

    vertes ainsi quen priurbain. Une nouvelle phase est en train

    de dmarrer, avec larrive de nouveaux acteurs qui se lan-

    cent directement dans une activit de microfinance, principa-

    lement en milieu urbain, sans passer par un projet de dve-

    loppement et en sappuyant sur de nouvelles techniques de

    commercialisation de leurs produits.

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    valuation dinstitutions de microfinance en milieu rural Madagascar

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    Ces institutions financires ont beau ne pas tre directe-ment concurrentielles sur le secteur de la microfinance en

    milieu rural, cette situation suscite des interrogations.

    En effet, dans la stratgie daccompagnement de leur clien-

    tle, les institutions de microfinance dj installes rehaus-

    sent peu peu les plafonds de crdit. Larrive de nouveaux

    acteurs ayant une stratgie de pntration peut dvelopper

    des phnomnes de captation de leur clientle haute,

    quelles accompagnent souvent depuis de nombreuses

    annes. Le dveloppement de la concurrence est favorable cette clientle dentrepreneurs ruraux qui diversifient pro-

    gressivement leurs activits et accumulent des biens, ce qui

    les rend moins vulnrables aux alas de la production agri-

    cole. La captation de cette clientle rentable et faible risque

    fragilisera cependant les IMF en place en milieu rural, alors

    quelles peinent pour la plupart atteindre lquilibre finan-

    cier.

    Paralllement cette concurrence sur la clientle, on

    observe galement une concurrence sur les ressourceshumaines, qui peut tre trs pnalisante pour les IMF

    implantes en milieu rural qui ont dj du mal recruter et

    affecter du personnel dans certaines zones difficiles.

    Linflation constate des salaires est bien entendu favorable

    aux agents concerns mais peut, l encore, dstabiliser des

    IMF lquilibre financier prcaire et donc les conduire se

    recentrer sur lurbain et le priurbain au dtriment des zones

    rurales enclaves. Des dbauchages de cadres et dagents

    de crdit sont constats. Ils ont un cot important pour les

    institutions qui ont investi dans leur formation.

    On assiste galement une concurrence gographique

    entre rseaux, au moins dans les zones les plus favorables.

    C. Complmentarit des interventions en milieu rural et en

    milieu urbain : vers un systme de prquation ?

    Lun des constats des valuations ralises concerne la

    tendance observe se tourner vers le milieu urbain, jug

    plus rentable et capable dassumer la vi