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r^HfJ A n n é e J u i l l e t 1908.N «
/
Revue Cosmiquea
P a r a i s s a n t l e 5 d e c h a q u e m o i s 0
_ ____________ 6 7 1 5I #
D irecteur : A l A. A Z I Z
Les pensées sont des fo rm ations. L a m o rta lité est tem p o ra ire e t
accidentelle , l ’H o m m e a d ro it à l ’Im m o rta lité in té g ra le .
S O M M A I R E :
I. — Etude pratique des Bases de la Philosophie Cosmique . .II. — La Parole.............................................................................I I I . — C on tem p la tion ..................................................................
I V . — Les visions du Royal Initié. ............................................V . — Autour du H é r o s ................................. ...........................
V I . — L ’Aurisée .............................................................................VII. — Questions.............................................................................
3 8 !
3903944004*5423439
P U B L I C A T I O N S C O S M I Q U E SP A R I S — 6, rue de la Pompe — P A R I S ( X V I e)
1 9 0 8R e p r o d u c t i o n e t t r a d u c t i o n f o r m e l l e m e n t i n t e r d i t e s p o u r t o u s p a y s ,
c o m p r i s l a S u è d e , l a N o r v è g e e t l ’ A m é r i q u e
S o u r c e g a l l i c a . b n f . f r / B i b l i o t h è q u e n a t i o n a l e
A V IS
En fondant la R E V U E C O S M IQ U E , les dépositaires de la T rad ition
on t eu pour but de propager un m ouvem ent propre à am éliorer le triste
état actuel de l ’ humanité. La Ph ilosoph ie Cosm ique prouve en effet que
l ’ hom m e n’est pas condam né à l ’om bre où le p longent la souffrance et la
m ort. Elle m ontre que le défaut de' connaissance et les fausses croyan
ces l ’ont exposé à ces deux maux.
La R E V U E C O S M IQ U E se propose donc :
i ° D e dém ontrer à l ’hom m e psycho-intellectuel quels sont l’ ob )et et te
but véritables de la vie, et jusqu’à quel poin t les capacités humaines peu
ven t être développées ;
2° D e m ontrer à l ’ hom m e psycho-intellectuel qu ’ il est d’O rig in e D iv i
ne ; qu ’ il porte en soi la D iv in ité ; qu 'il a la m ission de la m anifester ;
que, par la vo lon té directe de son divin Form ateur son rô le est d’ utiliser
les forces de la Nature pour transformer l ’état actuel de son entourage,
dans la mesure de sa propre évolution ; qu ’ il a ce d ro it et qu ’ il peut en
évoluer le pouvoir ;
3* D e tirer l’ hom m e co llectif non évolué de l’ état grossier dans lequel
il végète, pour l ’é lever, le spiritualiser et surtout l’ instruire à penser
par lu i-m êm e et l ’am ener à utiliser ses facultés intellectuelles en lui fai
sant com prendre sa propre responsabilité et la part qui lui est assignée
dans le Cosm os de l ’ Etre.
4° D e restituer la T rad ition prim itive aujourd ’hui transformée,
m utilée, perdue, er d’ unir la Science à la T h éo lo g ie sur une base in-
te h î\ u e lle ; de prouver enfin que la m ortalité et la transformation
îétrograde actuel'es sont anormales, accidentelles, et que par son
évolu tion l ’H om m e est capable de recouvrer avec ses anciens droits son
état d ’
IM M O R T A L IT É IN T É G R A L E
J u i l l e t 1908
REVUE C O SM IQ U E
E t u d e p r a t i q u e d e s B a s e s
d e l a P h i l o s o p h i e c o s m i q u e
{Suite}
A insi que les autres traditions orales anciennes, ce lles
des Aryas et des Chaldéens constatent que le triom phe de
l ’hum anité évo lu ée aura lieu grâce au déve loppem en t des
forces ind ividuelles individualisées en e lle ,u n ifiées avec le
m êm e ordre des forces un iverselles : c ’est ainsi que
l ’hom m e sera couronné en son être intégral. C itons quelques
exem ples. « Tou tes choses seront mises sous ses pieds » .
(Les pieds sym bolisent le degré physique).
« A la hauteur des hauteurs chacun d ’ eux m onte en
Z ion » , (c ’est-à-dire dans le degré d ’ être m atérie l).
« Le m orte l se vêtira d’im m orta lité » .
« En m on corps je m anifesterai la lum ière d ’ Indra » .
« A gn i, am i de l ’hom m e, j ’évoqu e ton aide et ta p rotec
tion pour préparer ce corps maintenant sujet à être désin
té g ré ^ deven ir ind issolub le,pour que je puisse longtem ps
m e ré jou ir de la lum ière du soleil et a vo ir le tem ps d ’ é v o
luer à l ’unification avec Indra qui est l ’être de tout ê tre .
En proportion de ta grandeur est m on insign ifiance ; ta
lum ière est la m ienne aussi » .
Un ph ilosophe de Thèbes, qui fut rem arquable par son1908 — 25
382 R E V U E C O SM IQ U E
bonheur radieux e t ina ltérab le, in terrogé sur la raison de
cela, répondit :
« Tou jou rs de plus en plus je m e sens un avec l ’A m ou r,
la V ie , la Lum ière e t la Puissance qui m ’entourent, de
sorte que la source de m on bonheur, dans le repos com m e
dans le travail, est inépuisable. A insi je suis bercé dans la
p lénitude » .
Les Chroniques de Chi m ontrent que la douzièm e p la
nète entoure la terre et tout le systèm e solaire d ’un ce rc le
harm onieux, sym path ique, p le in de repos et protecteur.
Plusieurs astrosophes cosm ophiles du passé enseignè
ren t que l ’en tourage éthéré de l ’ em pire sphérique physi
que tout entier peut être un m ilieu non seu lem ent d ’ har
m onie et de repos, mais encore de sustentation abondante
et inépuisable pour l ’ être in tégra l. La conscience de ce
bienfaisant entourage un iversel et la connaissance que du
déve loppem en t in d iv idu e l dépend l ’aptitude de chacun à
répondre à ces bienfaisantes in fluences, en p rop ortion de
son unification avec elles, est la raison de la fo rm u le de
salutation h iérarch ique : « A to i la p lén itude » .
* *
Le Mouvement
La matière in tégra le , dans toutes ses densités et ses raré
factions, est éternelle . T ou t ce qui est v it ; et la v ie et le
m ouvem en t sont inséparables. L ’im m ensité des m ondes
qui constitue le royaum e sphérique physique fo rm e le plus
dense constituant du vê tem en t extérieur de Ce qui est à
vêtir. De m êm e que l ’ individu est form é d'une m ultitude
de cellu les, form ées e lles-m êm c d’une m ultitude de m o lé
cules com posées, et que le sang soutient par sa circu lation
rapide, de m êm e le Cosm os de l ’ être peut être regardé
com m e une vaste ind iv idua lité cosm ique, v ivan te e t par
conséquent se m ouvant, d’ un m ouvem en t aussi raisonna
b le que celu i de la circu lation du sang.
Dans tout le Cosm os, tou t se meut puisque tout v it . Les
É T U D E P R A T IQ U E & ï
espèces du m ou vem en t sont donc in fin im ent m ultip les et
variées selon les buts à atteindre. La science du m ouve
m ent est appelée m écan ique. Tou te m achine pour bien
fon ction n er a besoin d ’un m écanicien ; d ’autre part les.
capacités d ’un m écanicien sont inutiles sans une m achine
qu 'il puisse d iriger. Les forces m anifestées du m écan icien
cosm ique et le m écanisme cosm ique sont coéterne ls et
capables d’être coégaux. Ce m écanism e, com m e le m éca
nicien était, est et sera. Sa com p lex ité peut troub ler l ’étu
diant de la science du m ouvem en t,s ’il oublie cette variété,,
en apparence in fin ie, des m ouvem ents.
*■+ *
C ’est un oubli fréqu en t que celu i-là , m êm e parm i des
chercheurs libres et sincères. Souvent il est dû à leur man
que de déve loppem en t ind iv iduel.
S'ils étaient conscients de leu r être quaternaire et des
rôles variés que chaque partie est capable de rem p lir, s'ils
développaient leurs M o i nerveux, psychique et mental, ils
comprendraient d'une façon plus complète et plus intime les
lois du vêlement physique — le plus dense — du Cosmos de
Vêtre, parce qu'ils ne sentienteraient pas seulement avec les
sens communs aux animaux et aux hommes, mais avec les
autres sens généralement latents.
T ou t un m onde d 'in fin im en t petits n 'est connu qu ’à
l ’aide du m icroscope. La connaissance de leur existence
m êm e dépend de la perfection de cet instrum ent/
Des objets que la distance rend invisib les sont révé lés
par le té lescope : de la perfec tion de cet instrum ent
dépend la dém onstration de leu r existence.
Ce qu i, dans les conditions norm ales, n ’est pas sen tien -
table pour nos cinq sens, peut être révé lé par une plaque
photograph ique sensible. Ce qui paraissait opaque est tra
versé ou rendu transparent par certains rayons. M ais
quelqu e adm irables que soient ces m oyens m écaniques et
ch im iques venant en aide à nos sens physiques, ils ne peu
384 R E V U E C O SM IQ U E
vent ctre comparés, au point de vue de l'efficacité, au développement des sens nerveux, sans lequel les sens nervo-phy-
siques sont incapables d ’être adéquatem ent perfectionnés.
Ce manque de d éve lopp em en t des sens nerveux assujettit
la science actuelle à des erreurs et des contradictions qui
sont bien faites pour ébran ler la con fiance des profanes
quant à la so lid ité des fondem ents de la science. Jusqu’à
ce que la nature quaternaire de l ’ état physique soit recon
nue pratiquem ent, la science, avec les m eilleures inten-
tions, sera suspecte de don ner raison à l ’ancien dire : « Les
lo is cosm iques sont équilibrées, mais les vôtres sont assu
jetties au déséqu ilib re ». Le résultat de ces contradictions
entre la théorie et la pratique est regrettab le, à cause non
seu lem ent de la confusion et du trouble qu ’elles apportent
dans l ’esprit des étudiants, mais aussi du gaspillage de
fo rce in te llectuelle qu ’occasionnent les disputes et la lutte
d ’idées contraires, souvent toutes erronées, pour la préé
m inence. Le rô le im portant que peut rem p lir l'hom m e
psycho-in te llectuel vis à-vis des hom m es m oins évolués,
rend ce gaspillage de forces spécia lem ent regrettab le pour
tous ceux qui désirent le progrès et le bien être de l ’huma
nité ; et ce sont vra im ent des héros et des pionniers, ceux
qu i sacrifient leur personnalité pour la vraie libre recher
che de la connaissance des lo is cosm iques, et l’utilisation
de cette connaissance pour le bonheur et le bien-être de la
terre et de ses habitants. I l y a quelque temps la circu lation
du sang fut v io lem m en t, passionném ent contestée par des
scientistes m édicaux. I l en sera probab lem ent de m êm e à
l ’ égard des m ouvem ents variés et des lo is de la circu la
tion dans l ’ individualité constituée par les mondes stel
laires. Jusqu’à ce que le m o i in d iv idu e l quaternaire soit
non seulem ent reconnu, mais d éve lopp é , l ’hom m e ne
peut pas faire une étude efficace et com p lète du m oi ste l
la ire intégral. Le déve loppem en t du m oi quaternaire fut
l ’A lpha et l ’Om éga de l ’enseignem ent de M israïm , d e là
Chaldée et de ceux qui leu r furen t affiliés ; l ’illum ination
É T U D E P R A T IQ U E 585
Aryenne eut le m êm e but. Le so le il qui se lè ve dans l ’ est
voyage vers l ’ouest. Déjà les conceptions, les coutumes et
les goûts d 'O rien t ont touché le m onde occ iden ta l ; peut-
être est ce le prélude de choses plus grandes, et le tem ps
n ’est-il pas lo in où les étudiants des forces cosm iques pen
dant qu ’ ils tournent les feu illets du liv re de la science
actuelle, avides de connaissances nouvelles, pourront
trouver du tem ps pour le repos nécessaire à leu r d éve lo p
pem ent ind ividuel, qu i seul peut leur ou vrir la sagesse du
passé, qui est aussi ce lle de l ’aven ir.
Le Temps
Le Tem ps est une concep tion purem ent humaine dont la
cause est la lim ita tion de l ’existence ind iv idu elle in tégra le .
11 n’a aucune réalité cosm ique ; il est acc iden te l,c ’est p ou r
quo i la T rad ition parle de passer à travers le temps jus
qu ’au sans temps, ou en d ’autres m ots à travers le transi
to ire jusqu ’ à l ’éternel.
L ’espace
Si on défin it le term e espace com m e signifiant un v ide,
rien de tel n’existe. Dans l ’ état physique, là où les sens
nervophysiques arriven t à leur lim ite de sentientation, les
sens nerveux entrent en activ ité , et il en est de m êm e à
l ’égard des sens nerveux et des sens psychiques, des sens
psychiques et des sens m entaux, et ainsi de suite à travers
les nombreuses raréfactions de la substance in tégra le —
dont chaque a tom e vit.
Si par l'espace est s ign ifié l ’ Ether, il n’y a aucune raison
pour que deux mots soient em p loyés pour revê tir et trans
m ettre une m êm e idée.
M alheureusem ent, — car le pou vo ir de com m unication
m entale est l ’excep tion et non la règ le — les mots sont le
vêtem en t nécessaire de la pensée ; mais ils sont souvent
des entraves p lu tôt que des aides pour sa com préhension
et, m êm e dans les circonstances les plus favorab les, inadé
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quats. I l est donc désirable que spécialem ent par rapport
à la science ils soient aussi sim ples et aussi peu nom breux
que possible.
La Chim ie
Une im portante discussion s’est é levée , quant à la pos
sib ilité ou à la non possib ilité de transform er les forces en
m atière sensible et pesante.
La Force est Matière : donc, selon une lo i cosm ique,
la fo rce peut sous certaines conditions s’extérioriser de la
m atière plus dense qu ’e lle perm ée et se 'revêtir de m anière
à être d ’une densité suffisante pour être à la portée de la
sentientation norm ale de l ’hom m e et ainsi d ’assumer une
nature et une form e d ifférentes. Toutes les forces qui affec
ten t l ’état physique sont sensibles et pesantes ; l ’apparent
m anque de sensibilité et de poids est dû à l ’im perfec tion
de nos m oyens d ’expérim en ta tion .
*¥ +
On raconte qu ’un alchim iste Chinois d ’autrefois déclara :
« I l y a certaines substances qu i on t la faculté non seule
m ent d ’attirer et d ’ ém ettre, com m e l ’aimant naturel, mais
de changer ce qu ’ elles attirent, de sorte que ce qu ’e lles
a ttiren t et ce qu ’elles ém etten t d iffère essentiellem ent. »
Ces substances quelquefo is appelées substances créatrices
sont de valeur inestim able pour l ’A lch im iste.
L 'Affinité
Partout, dans le m onde de l ’être, si variés et apparem
m ent com plexes que peuven t être ses constituants, la rai
son d ’ être de chaque m olécu le com m e de chaque g ro u p e
m ent de m olécules est le b ien -être du m oi in tégra l dont
e l le fa it partie, qui est son p ropre b ien-être aussi. Pou r
cette raison et pour cet ob je t,il est essentiel que les parties
com posantes donnent chacune à d ’autres parties de l ’ in té
gra lité ce qui leur manque et qu ’e lles sont capables de
É T U D E P R A T IQ U E 3 %
recevo ir, en y donnant reaponsion ; en échange, celles-ci
donnent un équ ivalent. C ette m utuelle récep tion et res-
ponsion est la cause au m oins in term édia ire de l ’attraction
de certains constituants de substances pour certains autres
constituants et vice-versa.
La m anifestation est la raison d ’ être de toutes les forces
m otrices. La satisfaction la suit de près. I l s’ ensuit que
norm alem ent, dans tout le Cosm os de l ’ê tre, chaque indi
v idualité, qu ’e lle soit m olécu la ire ou stella ire, cherche
sans cesse une autre ind iv idu a lité qui est actuellem en t la
plus capable de lu i fou rn ir ce qui lu i m anque (car rien
n’est parfa it en soi-m êm e). Si par quelque raison, te lle que
le d éve lop p em en t de soi, le changem ent de m ilieu ou de
Conditions, l ’ ind ividualité dom inante trou ve quelque ind i
vidualité plus capable de lu i fou rn ir ce qu i lu i m anque,
e lle se sépare plus ou m oins en tièrem ent de la p rem ière
ind ividualité m oins e ffective en faveur de la seconde ind i
v idua lité plus e ffec tive . C e m oyen d’ob ten ir satisfaction
est aussi com préhensib le que naturel, lorsqu ’on se rend
com pte que l ’a tom e ou corps sim ple n ’ existe pas dans ‘le
m onde de l ’être où chaque être est au m oins duel, et que
chaque m olécu le aussi b ien que chaque grou pem en t de
m olécu les est son p ropre cosm os, un cosm os ayant pour
but la préservation de so i-m êm e,et par conséquent, pour
force m otrice, la m anifestation et la satisfaction ; pou r
cette réalisation , e lle a besoin de l ’union en a ffin ité avec
une autre ou d’autres ind iv idualités (r ) .
( i ) C o n s i d é r a t i o n p h i l o s o p h i q u e : L a s u b s t a n c e e t l e s f o r c e s m a n i
f e s t é e s d u « C e q u i e s t à r e v ê t i r » é t a n t c o - é t e r n e l l e s e t c a p a b l e s
d ’ ê t r e c o - é g a l e s , l a s u b s t a n c e d a n s t o u t e s s e s r a r é f a c t i o n s e t d e n s i t é s
c o n s e r v a s a p r o p r e i n d i v i d u a l i t é e t s e s p r o p r e s c a p a c i t é s , e t s e l o n l a
n a t u r e d e s e s c a p a c i t é s c h a q u e i n d i v i d u a l i t é r é p o n d i t a u x f o r c e s d n
p e r m é a t e u r q u i c o r r e s p o n d a i e n t l e m i e u x a v e c s a c o n c e p t i o n d e m a n i - .
f e s t a t i o n e t d e s a t i s f a c t i o n . C e f a i t a u s s i p e u t a i d e r à r é s o u d r e l e p r o
b l è m e d e s c o r p s a y a n t l e s m ê m e s c o m p o s a n t s , m a i s m a n i f e s t a n t d e s
p r o p r i é t é s d i f f é r e n t e s .
388 R E V U E C O SM IQ U E
*¥ *
La Théorie de V Un ité
I l a été fréquem m ent rem arqué que l ’ unité du Cosm os
est contred ite par la science et l'exp érien ce qui a à envisa
ger une lon gu e et d iffic ile série de com plications dans
l'é ta t physique, qui est ici un iquem ent considéré. L 'é tu
diant Psycho-In te llectuel ne doit pas ou b lie r que l'homme
est le suprême évoluteuret qu ’afin de prendre sa place et de
rem p lir ce rô le si im portant, son propre d éve loppem en t
est essentiel. Dans sa cond ition actuelle, l ’hom m e peut
être com paré au m ieux à un m écan icien qui essaie de gu i
der et de d iriger une grande m achine don t il ign ore près,
que en tièrem ent la construction,les capacités et les forces*
P le in e de sign ification et d 'instruction est la Trad ition qui
rela te que lorsque le form ateur de l ’hom m e l ’eut rendu
apte au déve loppem en t actuel du royaum e terrestre, il
con fia à celui-ci sa charge, laissant l ’hom m e continuer
l ’œ uvre que lu i-m êm e s’ était prescrit de faire. La gaffe que
l ’hom m e a faite serait amusante si ses résultats n’ étaient
pas si tristes.
C ette insuffisance dans l ’accom plissem ent de son rôle
n ’est pas seulem ent le résultat de son m anque de déve lop
pem ent ; e lle est occasionnée aussi par l ’habitude de se
p réc ip iter vers une idée ou théorie de laqu elle il paraît
incapable de se détourner ensuite, peut-être parce que,
selon la théorie m oderne de l ’é vo lu tion , son ancêtre fut
de la race des taureaux. C ette incapacité de se détourner
dans sa course est une règ le à laqu elle il y a peu d ’ excep
tions, et la théorie donne un exem ple frappant de l ’habi
tude atavique.
*¥ *
Le m ot atom e in telligem m ent in terprété signifie la plus
petite portion de la m atière sentientahle. Une chose,appa
rem m ent, échappe à l'étudiant, c ’ est que la sentientation
É T U D E P R A T IQ U E 389.
dépend du développement et par conséquent du perfectionnement des sens. D ’où il suit que, pour ceux dont les sens se
d éve lopp en t p rogressivem en t, le soi-disant atom e d 'au
jo u rd ’hui sera la m olécu le de dem ain, que le corps sim
ple du présent sera le corps com posé du proche aven ir ,e t
ainsi de suite, ad infin itum .
3 9 0 R E V U E C O S M IQ U E
L A P A R O L E
Dans l ’antiquité, la parole lu t é le vée au rang de déesse
e t reçut des honneurs d ivins. Si nous considérons que de
tels honneurs ne furent accordés qu ’à ce que les plus évo
lués d ’entre les sages estim aient en être d igne, cela nous
aidera à prouver que la Parole du passé lo in ta in et la parole du présent d iffèren t aussi la rgem en t en qualité qu ’e lles
d iffèrent, selon toute probab ilité, en quantité. En effet, se
lo n la tradition et les proverbes, les paroles fu ren t autre
fo is em p loyées pour vê tir les pensées et non pour les v o i
le r et les d é fo rm er.
Parm i les p roverbes fam iliers citons : « U n hom m e sage
est connu par le petit nom bre de ses paroles. »
« Un m ot pour les sages est suffisant. »
cc La langue est un feu qu i allum e le déséqu ilibre. C om
bien est-il rare qu ’en la m ultitude des paroles il ne se
trou ve pas de l ’excès !
« La parole est d ’argent, mais le silence est d ’or » . Ces
p roverbes sont cités pour m on trer un courant de pensée
p lu tô t que com m e en tièrem en t et sans excep tion dignes
d e con fiance.
Par exem ple, il y a des im béciles qu i parlen t peu et la
taciturn ité est assez fréqu em m en t l ’e ffet d ’une nature d ite
saturnienne [Hélas ! pauvre Saturne).
** *
I l y a de m êm e, le s ilence du repos, le silence du
bonheur : (ce dern ier décrit par la fo rm u le : Un bonheur
trop p ro fond pour les paroles). Il y a le s ilence du m é
L A PA R O LE 391
con ten tem en t sournois et de la s tup id ité . Ce dern ier est
illustré d ’une façon amusante par une h isto ire Ecossaise.
« I l était une fo is un brave hom m e doté de six fils ; i l était
p erp lexe , au sujet de l'a ven ir du cadet que son in te llig en ce
in férieu re rendait inapte à toute profession . F inalem ent,
s ’apercevant que parfo is il s’occupait à ta ille r son nom sur
les m eubles, la pensée lui v in t d ’essayer de le m ettre en
apprentissage chez un m enuisier. Le lendem ain il dit à
son fils : « Ecoute, A rch ie, je vais t’ em m ener fa ire une p ro
m enade en vo itu re à la v il le , ce matin ; car je désire v o ir
un des m eilleu rs menuisiers. O r, i l est une chose dont i l
faut te souvenir : c ’ est de ne pas parler, m êm e si l 'h om m e
te questionne ; je répondra i, et tout ce que tu as à fa ire
■est de sourire et de ne rien dire : car tu es im béc ile , e t, si
tu parles, il le découvrira . »
A leu r a rrivée à l ’a te lier du m enuisier, le brave hom m e
exp liqu a son désir qu ’i l p rît son fils com rpe apprenti.
A p rès quelques m inutes de conversation à ce sujet le m e
nuisier s’adressa au jeu n e hom m e en disant : « A vez-vou s
du goû t pour m on m étier » .
A rch ie regarda son père et ne dit rien . Le m enuisier
continua a im ablem ent : « J’a im e à ce que mes apprentis
s’ intéressent à leur travail et dem eurent avec m oi en bons
term es. Pensez-vous que vous pou vez vous rendre utile
-et heureux avec m oi ? »
M ais A rch ie ne répondit m ot. Le m enuisier se tourna
vers le père en disant : « Pou rqu o i vo tre fils ne répon d -il
p as? Est-il sourd ? » Le père rép liqua par la négative . Le
m en u is ier, in trigué du silence de son apprenti p roposé
continua encore à le questionner, lu i demandant s’i l avait
quelqu e expérience de l ’usage des outils etc ., e tc ., mais
A rch ie ne répondait pas un m ot. Enfin, constatant qu ’il
ne pouvait ob ten ir aucune réponse à ses questions, i l d it
au père : « Vous m e dites que le jeu n e hom m e n ’est pas
sourd, donc c ’est un im béc ile » .
A lo rs A rch ie se tournant vers son père, avec toute la
392 R E V U E CO SM IQ UE
d ign ité de la con viction , pour la prem ière fo is rom pit
le silence et dit : «T u me disais de garder le s ilence,parce
qu e ’ si je parlais l ’hom m e saurait que je suis un im béc ile .
Je n'ai pas dit un m ot, et il m ’a découvert. »«
* #
C om m e à l ’ égard de tant d ’autres choses, il faut beau
coup laisser à la nature et aux circonstances, c ’est-à-d ire
à la nature des paroles et aux circonstances où elles sont
prononcées.
La nature et la position de celu i qui parle d o iven t aussi
être prises en considération . I l y a des individus qui lais
sent tom ber de leurs lèvres de vraies perles de sagesse et
personne ne se soucie de les ramasser ; d ’autres parlent
beaucoup moins sagem ent et ceux qui les entourent écou
tent avec em pressem ent et in térêt. I l y a des babillards
don t la ga ieté est contagieuse et dont les paroles sont re
çues et auxquelles on répond avec allégresse.
D ’ autres babillards ne produisent autour d ’eux que des
bâillem ents mal dissimulés et cependant leurs paroles, si
elles étaient analysées, pourraient con ten ir plus d ’esprit
que celles des prem iers. C ette apparente incongru ité dé
pend en partie de la vo ix et de la phraséologie, mais b ien
davantage de l ’ob je t du discours c ’est à-dire si l ’orateur
parle en vue de plaire à ceux à qu i il parle ou pour sa
propre g lo r ifica tion . Dans la prem ière circonstance, ceux
qui écou ten t sont prédisposés à la sym pathie et à la res-
ponsion envers celu i qui parle : dans la dern ière, ils le
laissent à la jouissance de ce qu ’il prépare pour lu i-m êm e.
Un pas im portant dans l ’art de « la parole » est que
celu i qu i parle év ite tout ce qui, d irectem en t ou ind irec
tem ent, amène la considération (sans m en tion n er la
lou ange) de lu i-m êm e. Le principal art de la paro le , de l ’o
rateur au babillard du côté du feu est la diffusion au lieu de
la concentration ; parce que ceux qui écou ten t le fon t afin
de pou vo ir recevo ir et — à très peu d ’axceptions près —
cessent d ’écouter si on attend d ’ eux qu ’ils donnent. C ’ é
L A PA R O LE m
tait p robab lem ent un é loqu en t parleur, con cen tré sur
so i-m êm e, ce lu i dont il est é c r it : « son audito ire refusa
d ’entendre sa vo ix m algré son é loqu en ce et son charm e
con tre lequ e l les subtils bouchèrent leurs o re illes . » L ’a
vantage de s’oub lier soi-m êm e dans l ’usage de l ’art de la
parole peut être facilem ent prouvé par les observations
suivantes. Le m ot d ’esprit le plus saillant peut être p ro
noncé ; mais si celu i qui le dit rit ou regarde son audi
toire fu rtivem ent ou ou vertem en t en cherchant son appré
ciation , le m ot d’esprit ne rencontre aucune responsion
et est accueilli avec indifférence ; parce que les assistants
sentent que le brillan t m ot d ’esprit fut prononcé pour la
propre gratification de l ’orateur et non pour la leur.
Une règ le im portante, pour ceux qui désirent p laire par
la parole, est de soigneusem ent év iter de parler non seu
lem en t d ’eux-m êm es mais de leurs parents,de leu r m étier,
de leu r m arotte ou d’aucune chose qui mène vers leur per
sonnalité ; au contra ire ceux qui désirent exce lle r dans
l ’art de faire plaisir ou de s’attirer autrui par leu r parole,
devra ien t choisir des sujets qui concernent ceux avec les
quels ils conversen t ou qui concernen t leurs amis, leurs
désirs, leurs occupations et surtout leur m arotte. Si on
considère que la force m otrice de tous les hom m es, jus
q u ’à un certain degré rarem ent atteint de déve loppem en t,
est la manifestation de soi-même, ce fait s’exp lique fac i
lem en t. En ou tre, la vaste m ajorité des gens sont trou
blés, affaiblis, fatigués à un degré dont ils ne se rendent
pas com pte eux-m êm es, parce que le troub le et la fatigue
leur sont devenus si habituels qu ’ils on t cessé de les con
sidérer com m e anormaux. 11 s’ensuit donc qu ’ils sont atti
rés naturellem ent vers ceux qui les récon forten t, les fo r
tifien t et les fon t reposer ; et cette capacité de donner du
récon fort et du repos n ’est possible que pou r ceux qui,
sur le m om en t s’ou b lien t en pensée. Les offrandes à la
déesse P aro le sont coûteuses ; elles nécessitent le désin
téressement, la générosité, l ’abnégation,
394 R E V U E C O SM IQ U E
C O N T E M P L A T I O N
M élancolique et seul, je laisse couler les heures. Elles
sont pleines de rêves calmes, m onotones et grises. M a pen
sée capricieusement vo ltig e ça et là, portée par les ailes du
souvenir : je songe à m on passé, à ma jeunesse, à des êtres
chers qu’ une transition prém aturée a séparés de m oi.
U n e am ère iron ie m onte alors à mes lèvres en pensant
à la faiblesse de notre science, à l ’insuffisance de n o tre
puissance ; nous qu i cro )Tons être si grands, ne sommes-
nous pas de tout petits enfants ignorants et chétifs pour
nous laisser ainsi dom iner par des forces qu i, en dépit d e
nos larmes, nous fon t souffrir en ce que nous avons de
plus doux,de plus beau : L'amitié et l'amour.En effet est-il un spectacle plus affreux que celu i de la
m orta lité fauchant sans pitié ceux que nous aim ons.
A im e r ! n ’est-ce pas là le grand secret de la v ie , n ’est-ce
pas notre plus grande force, notre grand espoir, notre
grand repos. V iv re par l ’amour et pour un am our plus
clair, plus défin i, plus com plet, n’ est-ce pas notre souriante
espérance, notre beau rêve de bonheur.
V iv re ! v iv re toujours ! en illum inant notre in telligence
afin de la rendre plus pénétrante et plus forte ; puis l ’ ennob lir,
la purifier par la spiritualité et par elle ainsi transform ée
atteindre ce pathétisme, cet am our don t la perfection
nous échappe encore, n ’est-ce pas là le plus haut idéal,
n ’est-ce pas là la conception la plus grandiose et la plus
captivante.
Mais n ’est-ce pas aussi le plus décevant des rêves, car le
C O N T E M P L A T IO N 399
plus d iffic ile à réaliser ? N on , gardons notre espoir, car rap
pelons-nous que l ’hom m e a droit à
« VImmortalité intégrale » .
Q u e cette pensée soit donc au fond de nous-m êm es
com m e une lum ière réconfortante, com m e un soleil qui
réchauffe et donne des forces nouvelles.
N ou s ne sommes pas lo in peut-être, de pouvo ir réaliser
ce bel idéal, car si nous som mes encore vaincus par le
« dernier ennem i » nous avons de grandes puissances en
nous, et il suffit que nous sachions nous en servir.
P ou r vaincre, il faut vou lo ir et puis il faut s’un ir. P lus
les hom m es évolueront, plus ils com prendront que leur
in térêt les pousse vers cette union ; plus ils se tendront la.
main, afin d ’opposer une lorce supérieure à leurs ennem is
com m uns : L ’ injustice et la m orta lité .
Q u e ce but soit notre espérance ; par le travail, par le
désir de l ’évo lu tion , avançons de toute notre force vers
cette lum ière dont chaque rayon sera pour nous une
source de paix, de bonheur et de jo ie .
Soyons courageux devant nos faiblesses, luttons contre
elles, et toute v icto ire que nous rem porterons sera u n e
grande conquête, car e lle apportera sur la terre un peu
plus de lum ière, un peu plus de beauté.
« L a v ie est sacrée parce qu ’ elle est le m oyen de l ’in d i
vidualisation de l ’in telligence » .Q ue cette idée est belle et réconfortante ; mais nos in
telligences peuvent-elles encore en com prendre toute la
m agnifique profondeur ?
N on seulement la v ie est be lle en soi, mais de qu elle
sublim e volupté e lle pourrait être im prégnée, si nous
étions plus purs, si nous avions le courage de nous arra
cher à nos petits calculs, à nos petites jouissances, qui
nous retiennent tou jours en bas, le regard éternellem ent
fixé ssr notre petite personne. Si nous concevions len te
m ent, si nous avions la ferm e vo lon té de bien regarder en
nous et autour de nous afin de v o ir si nous pouvons faire
R E V U E C O S M IQ U E396
quelque chose de bien, quelque chose de m ieux, de plus
noble et de plus beau, notre intelligence alors toujours
nourrie ue beautés plus grandes, plus saines évoluerait ra-
dieusem ent en puissance, en grandeur et perm ettrait à
tout notre être des voluptés d ’une finesse et d’ une dou
ceur que nous ignorons actuellem ent.
N ’oublions pas qu ’en évoluant nous nous raffinons, que
nous développons notre sensibilité et qu ’ainsi nous aug
mentons intensém ent nos possibilités de jouissances qui
deviennent plus profondes, plus calmes et plus douces.
Mais l’ évolu tion ne consiste pas à savoir ce que l ’ on d o it
faire, mais bien à le mettre en pratique ; l ’évolu tion n ’est
pas une chose que l ’on peut prendre du bout des doigts.
L ’évo lu tion n ’est pas sim plem ent une connaissance in te l
lectuelle plus ou m oins riche et brillante. N o n , l ’évo lu tion
est une chose plus grande plus com plète, plus grandiose,
l ’ évo lu tion , c’ est la m ontée enthousiaste vers le d iv in .
L ’évo lu tion , c’ est la poussée d ’amour intim e et profond
de tout notre être vers cette lum ière qui brille au fond de
nous-mêmes. C ’est vers ce rayon que nous devons vou
lo ir toujours plus précis et plus net, que doit aller notre
désir. L ’ évolu tion ! L ’évo lu tion ne peut pas être faite du
bout des lèvres, il faut la faire avec tout son être, il faut
la faire jusqu’au sang ! . . .
O h ! pouvoir v iv re , v iv re éternellem ent, afin de pouvo ir
vaincre en soi tout ce qui est obscur et de s’ illum iner de
ce rayon d iv in devenu notre foyer de lum ière. O u vrir
notre in telligence, notre âme à la lum ière d iv ine com m e nous
ouvrons notre fenêtre aux rayons du soleil par un beau
jour de printemps, et cela toujours de façon que chaque
jou r soit un printemps nouveau, qui nous apporte plus de
puissance, plus de beauté.
Q ue c’est bon de penser à cela, car si nous le pensons,
si nous le désirons, nous pourrons aussi le réaliser.
E videm m ent l ’œ uvre est grande, le but est si haut qu ’ il
semble inaccessible, on ose à peine y penser. Puis on s’est
C O N T E M P L A T IO N 397
te llem ent accoutumé aux pires choses, que lorsque l ’ o n
conço it sim plem ent mais hautement on a peur de ses p ro
pres pensées, on a peur de la lum ière, on ne peut en sup
porter l’ éclat te llem ent notre regard s’ est habitué aux té
nèbres de l ’ ignorance.
M ais nous devons avo ir le courage de secouer notre to r
peur et de considérer cette lum ière te lle qu ’elle le m érite.
N ou s ne pouvons pas faire qu ’elle soit ou qu ’elle ne soit
pas, elle est ; nous nous en im prégnons ou nous ne nous
en im prégnons pas, selon notre désir. M ais si nous allons
vers elle nous allons à plus de v ie , plus de force, plus de
bonheur, tandis que si nous la refusons, nous allons aux
ténèbres, à la douleur, à la m ortalité 1
Seulem ent cette lum ière ne peut pas pénétrer en nous
par ses propres forces, il faut que nous l ’aidions, il faut que
nous travaillions avec e lle et que nous travaillions avec cou
rage et persévérance.
Mais nous avons souvent peur de l ’e ffo rt ; on est si bien
■ dans cette som nolence paresseuse, dans ses vieilles habitudes,
avec tout le fatras d ’idées et de préjugés auxquels nos cer
veaux sont accoutumés, qu ’ on est lâche, qu ’ on regarde la
r ive ensoleillée sans oser traverser le fleuve. Et nous con
tinuons à v iv re d ’une façon in férieure par la d ifficulté que
nous avons de concevoir et de vou lo ir énergiquem ent une
lum ière plus grande.
Cependant, si l ’on écoute un peu la vo ix qui parle au
fond de nous-mêmes, alors nous verrons qu ’ en dépit de nos
errem ents, en dépit de nos craintes, nous sentons cette vo ix
nous crier avec force : « O u i, la v ie est sacrée ; ou i ! nous
devons marcher vers plus de bonheur humain, vers plus de
justice, vers plus d ’ amour. »M alheur à celui qui ne sait pas entendre cette vo ix ap
portant la « certitude » . Certitude, ou i, car nous sentons
bien quecette vo ix appelée quelquefois la conscience v ien t de
ce que nous avons de plus pur, de plus lucide et que par
elle nous touchons à la vérité . Q u 'est-e lle cette v o ix ? de1908 — 36
398 R E V U E C O S M IQ U E
la prescience peut être, qu 'im porte, de toute façon, c’ est
une partie d ivine de notre être qui parle et souvent sans que
nous la com prenions encore, e lle nous apporte la lum ière.
M alheur, si nous étouffons cette vo ix , car nous éteignons
alors le flambeau qui nous perm et d ’ éclairer notre route,
et sans lui nous voguerions alors dans la nuit vers le désê-
séquilibre, vers l ’ obscurité.
L e déséquilibre, ne l ’oublions pas, c’est parce qu ’il est en
nous que nous répondons à son appel, que nous tombons
dans ses pièges, que nous n ’arrivons pas à le vaincre. C ’est
parceque nous n ’avons pas le courage de m ettre en action
nos plus belles conceptions. M ais pour cela, il nous faudrait
de la sincérité pour nous juger à notre valeur, du courage
pour la lutte et de la persévérance, ce qui souvent nous
m anque.
N ou s pensons aussi que c ’est un travail au-dessus de
nos forces, une tâche trop pénible pour un résultat que
nous voyons trop lo in , qu ’il est donc inu tile de com
m encer.
C ’est en pensant de cette façon que l ’ on s’ im m obilise,
que l ’on passe sa v ie à proxim ité d ’un bonheur plus grand,
sans jamais l ’atteindre faute de vou lo ir faire un effort.
Q ue faut il donc pour qu ’il y ait plus de justice et
plus de bonheur sur la terre, sim plem ent que chacun
puisse avoir ce à quoi il a droit par ses efforts, par son m é
rite et par son travail. Eh bien que chacun s’ exam ine donc
profondém ent et qu ’il tâche de reconnaître si, en justice,
en vraie justice, il a gagné et par conséquent, s’ il a dro it
réellem ent, à son rang et à son pouvo ir, et s’ il n ’usurpe
pas la place qui revient à un autre, ayant une valeur plus
grande que la sienne; alors s’ il sent qu ’ il a plus qu 'il ne
m érite, qu ’ il restitue le surplus à ceux auxquels il manque
quelque chose.
Evidem m ent, on peut prétendre que cela ne peut pas se
faire, que les homm es n’ auront jamais la d ign ité d ’accom
p lir une aussi belle action ; que l ’égoïsm e de chacun est
C O N T E M P L A T IO N 399
trop grand pour ne pas jou ir de sa position, m êm e quand
il sait qu ’ il ne la doit qu ’à une injustice. Cependant ce
n ’est pas là sim plem ent un beau rêve, c’est un rêve réali
sable et qui se réalisera nécessairement, car là seulem ent
est la possibilité de la véritable évo lu tion , la vraie fratern ité
le réel am our et la réelle h iérarchie qui n’ est autre chose
que chacun à sa place.
I l arrivera un jour où les hom m es seront assez près du
devo ir pour com prendre et faire cela. Ce sera alors le règne
de la justice, l ’ accom plissem ent du désir de Brah-Elohim ,
et la Restitu tion .
A lors les hom m es cesseront de v iv re dans les plaisirs
faux et trompeurs, cesseront de se liv rer entre eux à cette
lutte déprimante pour tous et deviendront au contraire des
êtres de fierté et de fo rce ,d ’une in telligence radieuse de gran
deur et de pureté. Ce seront les im m ortels travailleurs évo
luant en harm onie vers un Idéal toujours plus beau dans
un rayonnem ent de puissance, de lum ière et d’amour.
4 0 0 R E V U E C O S M IQ U E
L E S V I S I O N S D U R O Y A L I N I T I É
{Suite)
Or Aish Ma A l travailla it de tout son pou vo ir, e t tou
jours ses forces s'accroissaient par leur em plo i.
Des tentes d ’A u ram , la radiance de la hauteur de Paran
éta it v is ib le .
Auram fut récon forté , et i l dit à A l A za r : T ou t va b ien
pour m on fils A ish Ma A l.
A l Azar se ré jou it avec Auram . Quant au ro i de M is-
ra ïm il envoya secrètem ent des hom m es de subtilité afin
q u ’ ils trouvassent un m oyen d’affecter A ish Ma A l, fils de
Sintra, et pour lu i o ffrir en son nom des dons princiers.
Mais ils rev in ren t déçus, car ils ne purent par aucun
m oyen p réva lo ir et en trer dans la radiance saphirine.
A p rès que A ish Ma A l eut fo rm é douze habitations con
venables pour les douze émanations qui étaient de sa v ie
passée, et après qu ’elles furen t évoluées, il leur envoya
des co llectrices de m atériaux pour la construction, et les
fit a ller à douze autres hauteurs q u e lle s nom m èrent aussi
Paran, en raison de leu r beauté.
Sintra s’éve illa et appela A ish Ma A l. I l accourut à sa
rencontre, la baisa et la salua, d isan t: «V o u s êtes b ien
venue, ma m ère. Je ne voudrais pas gâter le tem ps de
v o tre repos ; cependant j ’ai besoin de vous ».
Sintra lui baisa au fron t et d it : « Que vou lez-vous m on
fils ? »
Il rép on d it: « Jai suivi v o tre conseil e t tout a bien été
pour m oi et pour les miens : tout ce que j ’ ai touché a
prospéré.
LES V IS IO N S D U R O Y A L IN IT IÉ 401
— Cependant vous n’êtes pas satisfait.
— A cause de cela m êm e je ne suis pas satisfait ; car La
satisfaction v ien t non de l ’acquisition de ce qui est désiré,,
mais de sa poursuite.
Et il ajouta : « V o ic i que ma puissance est très gran de,
de sorte que je puis dem eurer en sûreté en présence de
m es sem blables, vers l ’est e t vers l ’ ouest, vers le nord e t
vers le sud, e t de tous les côtés des hauteurs qu i sont
com m e les douze rayons d ’une roue » .
— Que te fau t-il? La p lastic ité ,l’eau qui tourue la rou e,
n ’en as-tu pas assez ?
— M on désir est d ’a vo ir com m e m ienne une qui so it
com m e m oi-m êm e née d ’hom m e et de fem m e. C ette nuit,
en un rêve , qu e lqu ’un qui ressem blait à A l Azar s’est tenu
debout auprès de m oi et a d it : T on frère Eza a m aintenant
qu inze ans. C ’était ton âge lorsque tu fus ren voyé des
tentes d’Auram . B ientôt je vais a ller lui trou ver une com p a
gne de la maison de H ébra , pour que la race soit pure.
A lo rs Sintra poussa un petit cri de jo ie et d it : « Le tou r
de la roue, le tour de la roue » . Mais A ish M a A l ne com
p rit pas la raison de son allégresse,car il ignora it ce qu ’e lle
avait ré v é lé à Auram tandis qu ’il attachait sa sandale avec
les cordons de sa cordelière . A lo rs e lle dit : « Q u e dis-tu
d o n c ? Prendra i-je pour to i la fille de m on frère pou r
qu ’e lle soit tienne à jam a is? C eci, tu peux le fa ire en
sûreté, car cette nuit m êm e, beaucoup de choses con
cernant la roya le v ie rge de M israïm m e furen t r é v é lé e s » .
Aish Ma A l d it : « En v é r ité , j ’ignorais jusqu ’à m aintenant que ce jeune nénuphar de Misraïm. existât et je
m ’ém erveilla is de ce que mes pensées de la nuit et du jo u r
éta ient tournées vers M israïm » .
Sintra répond it : « Si Eza n ’était pas réservé à une ré
cep trice de la maison de H éb ra ,je ne t’aurais pas à présent
m entionné le roya l nénuphar de M israïm . Veux-tu que
j ’évoqu e ceux qui on t à la fo is le vou lo ir et le pou vo ir d e
nous aider en cette m atière » ?
402 R EVU E C O S M IQ U E
Àish Ma A l voyan t qu ’e lle était troublée dit : « Repose
to i p lu tôt.Àuram ne t'a-t-il pas dit : En ta p lasticité est ta
force ? » .
A ces mots, le trouble disparut des yeux de Sintra. La
nuit Aish Ma Al rêva : I l rêva que com m e il se couchait
sous un grand arbre dont les branches s’étendaient au
dessus des eaux d’un lac aux clairs re fle ts .il voya it au côté
opposé du lac un groupe de nénuphars blancs au m ilieu
desquels il y avait un bouton à dem i ouvert, de sorte que
son centre d ’o r était à peine visib le.
A ish Ma A l alors se reposa, flottan t sur les eaux et
bercé par des ondes qui paraissaient l ’effet de son contact
avec les eaux. Il s’ endorm it, et en som m eil, il rêva que la
plante sur laqu elle se trouvait le bouton à dem i-ouvert se
détachait du groupe de plantes et venait vers lui. A lo rs il
s’ éveilla et se trouva sous le grand arbre, à terre, et il
s’aperçut que c ’était un rêve. Serrant son m anteau autour
de lui, parce qu ’il faisait frais la nuit, il s’endorm it.
I l fu t é v e illé par le son d ’une v o ix qui l ’appela par la
sign ification de son nom , mais non par le son de cette si
gn ification , auquel il était accoutum é : I l ou vrit les yeux,
se releva en s'appuyant sur son coude et dit : (< Q ui m ’ ap
pe lle ? » .
Mais tout était silencieux et à nouveau il se coucha et
s ’ endorm it. Il fu t éve illé par le son d ’un hym ne délecta
ble, et sa pensée fut : « Un ange de lum ière est avec m o i. »
Mais en levan t les yeux il ne v it rien que le lil parsemé
d’ étoiles. A lors il pensa : « Peut- être m on sens de l ’ouïe
est plus d éve loppé que celu i de la vue » . Et il d it à haute
v o ix : « Q ui est ici et pourquoi es-tu venu ? » .
Une vo ix pure et douce répond it : « Je suis A lem a de
M israïm et je suis venue parce que vous me désiriez » .
I l dit : « Que ne peut se lever la lun e,pou r que je puisse
te v o ir ! car ta vo ix est douce ! »
C om m e il parlait, une lum ière claire et im m aculée
tom ba sur la form e vêtue de blanc d ’A lem a ; levan t les
LES V IS IO N S D U R O Y A L IN IT IÉ 403
yeux il v it po in dre au dessus d ’e lle une n o u ve lle é to ile ,
et il appela l ’é to ile N esom em . A lo rs il c o u v r it A lem a
de son m anteau et dit : « Tu es Nesm ah. Sois ma conso
lation » .
Et il l ’aima de toutes ses forces.
Douze lunes après l ’a rr ivée de Nesm ah, Zaira s’aperçu t
qu ’Auram était troub lé, et e lle lu i demanda la cause de
son trouble. 11 répond it : T ro is fois déjà, depuis le départ
d ’Aish Ma A l, il y a eu fam ine dans le pays et m aintenant,
je ne vois pas le m oyen d ’éca ite r cette calam ité. Et les
péuples des pays parmi lesquels nous dem eurons, qui sont
bons pour nous, com m encen t à m urm urer en d isan t:
« C 'est à cause de cet étranger qui n’adore pas nos D ieux
que leur co lère est a llum ée con tre nous » .
Zaita dit : « D is-m oi si tu connais quelque m oyen par
lequ e l je puisse t’aider » .
Auram répondit : « R epose-to i et d evin e pour m oi la
cause de la succession des sécheresses».
A insi Zaira reposa et dans son som m eil : « Ce sont les
mages de M israïm qui évoqu en t con tre nous certa ins
êtres qui retiennent la plu ie et qui rem plissent l ’a ir de
petits insectes qui détru isent le b lé dans les épis, avant
qu ’il soit mûr, et endom m agent les racines des plantes
propres au fourrage » .
A lors Auram fut très anxieux. I l se leva et sortit près de
l ’ entrée de la ten te .A l A za r le rencontra et Auram lui ré
péta les paroles de Zaira ; il ajouta : « Les M ages de M is
raïm me donneront l ’odeur d ’un œ u f pourri pour les
narines du peuple du pays, et ils me chasseront avec mes
troupeaux et tout ce que j ’ai » .
A l A za r répondit : « M aintenant m êm e les gardiens des
troupeaux d ’Aba M alek ont lutté con tre les gardiens de
nos troupeaux et pris possession des puits d ’eaux que tu
as trouvés et utilisés ; et ils cherchent à prendre posses
sion de la fon ta ine scellée dont les eaux sont sacrées » .
O r Aba M alek avait tou jours tém oigné une grande
404 R E V U E C O SM IQ U E
am itié envers Auram depuis le temps qu ’il ava it dressé
ses tentes dans le pays ; et ils avaient pris conseil en
sem ble et échangé des dons. D onc lorsqu ’Auram en ten
dit le rapport d ’A l A za r à propos de la prise des puits par
v io len ce , il envoya un beau cadeau de cham eaux, d'ânes,
de bestiaux et de breb is à A b a M alek, avec une requête
pour qu ’il le rencon trât dans le voisinage du puits s ce llé .
Quand A ba M a lek arriva, il salua Auram com m e au tre
fo is et en réponse à sa question : « Pourquoi les d om esti
ques on t-ils pris possession par v io len ce des puits d ’eaux
qu i sont les m iens » ?
I l répondit : « j e fera i m on enquête à ce sujet et t’a cco r
derai satisfaction ; car cette in justice et ce tort t ’ on t été-
faits sans ma connaissance » .
Auram dit : « Je ne t ’aurais pas dérangé pour cela. M ais
si je m ’ étais tu, tes dom estiques auraient pu lu tte r
pou r la possession du puits dont les eaux sont sacrées » .
Aba M alek dit : « Si tu le veux, viens demain au v o is i
nage du puits don t tu parles à cette heure et am ène avec
to i les plus parfaits de tes jeunes hom m es qui son t dési
reux de trouver des com pagnes avec qui ils puissent fon der
des fam illes. »
Auram le lu i p rom it. A l ’heure prescrite, A u ram a rriva
au voisinage du puits et v in g t et un jeunes hom m es le
suivaient. Dès qu ’ils fu ren t en vue, Aba M alek se hâta à
leu r rencontre et i l d it : « Regarde vers le puits et d is-m oi
ce que tu vo is . »
Au ram répon d it : « Je vo is une m atrone vo ilé e , r ich e
m ent vêtue ; avec e lle , il y a sept belles v ierges vêtues de
blanc, aux ch eveu x dénoués ».
A ba M alek d it : « Si tu le veux, laisse ces v ierges qu i
sont des dorm euses de notre fam ille, choisir parm i les-
jeunes hom m es de ta fam ille , qui sont avec toi,chacune un
com pagnon , et ratifions leur union pour qu ’ eux et leurs-
descendants soient com m e une alliance entre to i et m oi et
en tre tes peuples et m es peuples.
LES V IS IO N S D U R O Y A L IN IT IÉ 405
Les sept v ierges de la m aison d ’Aba M alek choisirent
chacune un com pagnon parm i les jeunes hom m es de la
m aison d’Auram, et ainsi fut étab lie l ’alliance ; les fêtes et
réjouissances durèrent pendant quarante jours et quarante
nuits. Au dern ier jour de la fê te , À b a M alek dit à Auram. :
<f Si je n’avais pas su de ta p rop re bouche qu ’A l A zar
est a llé à la recherche d ’une com pagne pour ton h ér itie r
Eza, parm i ta propre parenté, je t ’aurais d it : Perm ets que
, ma fille un ique soit sienne ; mais au poin t où en sont les
choses, j ’ai fa it ce que je p o u va is .»
Puis Aba M alek appela le ch e f de ses guerriers et tous
ses hom m es avec lu i, et Auram appela le che f de ses gu er
riers et tous ses hom m es avec lu i, pour qu ’ils fussent té
m oins de l ’a lliance de paix qu i éta it entr’ eux ; et avant
q u ’ils se séparassent, chacun d ’eux planta un arbre d on t
les feu illes étaient vertes l ’h iver et l ’ été, de sorte qu ’i l
poussa autour du puits un très grand bosquet. Et A ba M a
lek et Auram parlèrent devant leurs armées et devant leurs
peuples en disant : « N e laissez aucune conception de
D ieux m oins grands nous d iv iser : car, com m e un nous
adorons le Sans F o rm e , l ’E ternel » .
** *
O r il y eut une grande fam ine dans le pays, et Auram dit
à Zaira : « Je voudrais b ien a ller à M israim et étab lir la
paix avec N ep h or si cela se peut. Car je sais que ses m ages
évoqu en t leu r D ieu con tre m oi e t con tre ma m aison, et
con tre tout ce qu i me tém oigne la bonté » .
Zaira d it : * T u as ainsi parlé b ien des fois , cependant tu
n ’y vas pas.»
I l répond it : « C ’est vra i. Je ne veu x pas te laisser dans
ce pays d’ étrangers, et je crains de t’am ener avec m oi au
Palais de N ep h or, de peur que des ennuis ne surgissent à
cause de ta rare beauté. « Z a ir a se tut pendant quelque
tem ps, puis e lle d it : « A ma conception , ma m ère évoqua
les D ieux et les Déesses de son peup le, avec lesquels e lle
406 R E V U E C O S M IQ U E
était en affin ité, e t lo rsqu ’e lle leur eut présenté de riches
offrandes, une Déesse dit : Demande ce que tu veux pour
ta fille , et nous accorderons ta requête » .Ma m ère répondit : a Je sais sûrem ent que mon enfan^
sera d’une rare in te lligen ce et qu ’e lle excellera en puis
sance et en capacités psychiques ; mais je crains que
com m e m oi-m êm e e lle puisse m anquer d ’exce llence en
beauté physique. Ce que je dem ande pour e lle est qu ’e lle
puisse posséder la beauté des quatre plus belles déesses, et
qu ’e lle puisse a vo ir le p ou vo ir de changer un gen re de
beauté pour l ’autre à v o lo n té .
C om m e les Déesses hésitaient, e lle d i t : « Y a-t-il une
chose trop d iffic ile pour les D ieux ? » et e lle m u ltip lia ses
offrandes; enfin sa requête lu i fut accordée, et je mûris à la
ressemblance d ’Isis ; mais j ’ai le d ro it de la changer en
la beauté sévère de M a, deM isra ïm , en la beauté sympa
thique de Lakshmi du pays central, ou en ce lle de la per
fection riche et foncée de M avb l ’im m orte lle . M on désir
est d ’ être toujours avec toi, partout où tu vas, com m e ton
désir est d ’ être avec m oi. A vec ton consentem ent, je chan
gerai ma beauté pour ce lle de Lakshmi. »
Auram répond it tristem ent : « Tu m ’es chère te lle que
tu es ; je ne désire aucun changem ent chez to i. Néanm oins
je ne vois pas d ’autre m oyen pour aussi bien assurer ton
bien-être et celu i de notre peuple et des peuples parm i
lesquels nous séjournons. »
A insi Zaira changea sa majestueuse beauté d’ Isis pour
la tendre et sym pathique beauté de Lakshmi du pays cen
tral, et lorsqu ’e lle rencontra Auram à l ’aube du jou r, il
dit : — « Tu es com m e la sœur cadette de m on fils Eza. » e t Zaira se réjou it de sa jeune beauté, mais toutefois A u
ram fut troublé.
** *
Auram alla à Aba M alek et lui d it sa déterm ination de
v is iter N eph or de M israïm et de s’entendre avec lui. I l
LES V IS IO NS D U R O Y A L IN IT IE 407
ajouta : « Puisses-tu, Aba M alek, être com m e un pèrepour mes peuples, jusqu ’à ce que je rev ienn e en paix. » Et
Aba M alek répondit : « N ’ y a-t il pas une alliance entre
to i et m oi, entre les tiens et les m iens? »
A insi Auram et Zaira voyagèren t ensem ble vers M israïm
et Zaira s’ assit sur l'ânesse b lanche qu i l ’avait portée de
la maison d’H ebra, et Auram ne prit avec lui aucune au
tre chose que sa baguette, car sa pensée é ta it: « Si je
vo ya g e ainsi, seul, N eph or et ses mages d ev in eron t que
je viens parmi eux com m e un sim ple suppliant. »
Lorsqu ’ils furent proches du palais, Auram cacha la ba
guette dans les plis de son vêtem ent, et il conduisit à une
auberge de la cité l ’ânesse blanche surlaquelle était m ontée
Zaira, ses cheveux dénoués en signe de v irg in ité . Car A u
ram lu i avait d it: « Si on te questionne, dis, je te prie, que
tu es ma sœur ; car, en vé r ité , tu es la fille de m on père,
b ien que tu ne le sois pas de ma m ère. Je m ’aperçois que
ta beauté est m erveilleuse et si N ep h or ou les princes de
sa maison entendent parler de toi et d evin en t que tu es
ma jeune fem m e, assurément ils me tueront et te pren
d ron t pour eux. »
Auram dès qu ’ il se fu t reposé, envoya un m essager a
l ’intendant de la maison de N eph or. & Dites au ro i qu’ A u -
ram de H ébra est venu, pour que, si cela se peut, le ro i et
A rch ip rêtre de M israïm puisse con férer avec lui. *
A lo rs N eph or demanda aux Mages : « Auram de H ébra
v ien t-il au m ilieu de sa hiérarch ie vis ib le ou in v is ib le , ou
au m ilieu de ses armées ? »
Et lorsqu ’on lui eut répondu : « II n’est accom pagné que
par une très b e lle v ie rge qui dem eure dans l ’auberge » ,
N ep h or appela les principaux M ages et leur parla de l'a r
r ivée d ’Auram et ils d iren t: « Auram v ien t com m e sup
p liant. en raison de la fam ine. Il craint que les peuples des
pays dans lesquels il dem eure ne s’ é lèven t con tre lu i et ne
le chassent, et ceci avec raison. Car c ’est la quatrièm e fo is
q u ’ il a été regardé com m e la cause de la fam ine depuis le
4 0 8 REVUE COSMIQUE
départ d’Aish Ma Al, qui était de la maison d’Hébra le seigneur de la sustentation physique, comme Eza est le seigneur des sustentations pathétique et spirituelle. Quant à la force intellectuelle elle est, en ordre, leur domaine commun ».
Nephor dit à part à son principal confident : « J’ ignorais qu’Auram eût une sœur ou une fille et ma pensée était : « Il ne veut pas laisser Zaira la rarement douée et belle dans un pays d’étrangers et s’il est obligé de venir vers moi, il l ’amènera ici en secret. »
Le matin suivant, il fit appeler le chef de ceux qui avaient la charge du Palais des dormeuses passives et l ’envoya avec des dons précieux pour Auram ; il lui dit : « La volonté du roi, mon maître, est que la belle vierge qui est avec toi et est sans doute ta sœur ou ta fille, soit l ’hôte de la mère du roi pendant ton séjour à Misraïm : elle sera traitée avec tout honneur, comme une enfant de la maison de Hébra. »
Alors Auram alla dans la chambré de l’auberge où était Zaira, lui transmit le message du roi et ajouta : « Ne m’oublie pas, je te prie, même pendant un moment, car tout ce que j ’ai et tout ce que je suis est à toi ».
Et comme Zaira riait, il dit : « Pourquoi ris-tu ? » Elle répondit : « II me semblait te voir encore une fois remplir la cruche de cristal avec l ’eau du puits sacré et la mettre sur l ’épaule de la mère d’Aish Ma Al et prendre de ta cordelière un cordon avec lequel tu attachas la courroie de sa sandale, et la couvrir de ton manteau. »
Auram soupira lourdement, en répondant : « Ces choses sont du passé lointain, puisque bientôt Al Azar cherchera une épouse pour Eza notre fils. »
Zaira répondit : « Il y a des souvenirs qui disparaissent comme les empreintes des pieds dans les sables ; il y en a d’autres qui sont aussi ineffaçables que ceux du fer ardent de l ’instrument à tatouer. »
Or les paroles de Zaira révélèrent à Auram beaucoup
LES VISIONS DU ROYAL INITIE 4O9
de choses qu’il n’avait pas comprises. Il regarda Zaira avec la sollicitude de l ’amour, et comprenant la profondeur de sa tristesse, il essaya de la réconforter, mais Zaira répondit : « Puis-je oublier les paroles de Sintra au sujet du tour de la roue ? Depuis longtemps la mère de ton premier-né a été éloignée loin de toi et je suis demeurée dans tes tentes. Un temps pourra arriver où je serai loin de toi et où la bannie demeurera dans tes tentes. C’est la force ou la subtilité des mains humaines qui tourne la roue, quoique ces mains puissent être les intermédiaires des forces des soi-disant Dieux. Très puissante est la main hiérarchique de Misraïm. »
Elle embrassa Auram très tendrement, reposant silencieusement dans ses bras, avec sa tête posée sur son cœur ; puis elle se leva et alla au messager du roi qui l ’attendait. Alors Auram dit au chef des messagers du ménage royal : « j ’accompagnerai ma parente au palais du roi. »
Mais l ’autre répondit : « Notre ordre est de conduire ta parente au palais de la reine ; comme tu le sais, aucun homme étranger ne peut en franchir les portes extérieures. * Lorsqu’ils arrivèrent aux portes extérieures, Auram fit ses adieux à Zaira et il lui dit en mentalité : « Assurément tu reviendras à moi. »
Elle répondit en mentalité : « Si, en vérité, ton amour pour moi est indivisé comme l’est le mien pour toi, tu pourras éviter que la roue tourne. »
Elle franchit les portes de bronze du palais de la reine et celles-ci se fermèrent derrière elle. Auram s’attarda auprès des portes jusqu’à l’aube du jour.
Or quand Zaira entra dans le palais elle le trouva orné de grandes splendeurs, brillant de lumière et de fleurs rares : l ’air était chargé de leurs parfums se mêlant à celui des coûteuses gommes aromatiques. Quand les royales et nobles vierges virent qu’elle s’émerveillait de la magnificence du palais elles dirent que le roi l’avait invitée,
REVUE COSMIQUE4> 0
parce que c’était la veille d’une grande fête donnée en l’honneur de la venue de la jeune épousedu fils et héritier du roi Nephonelle était attendue pour la nuit à la porte de l ’est du palais de la reine. Les vierges devaient garder leurs riches habillements, pour qu’au signal de sa venue, elles pussent sortir à sa rencontre avec de la musique, des danses et des chants de joyeuse bienvenue. Or Zaira avait accompagné les messagers du roi dans le simple costume qu’elle portait à leur arrivée. Sa courte tunique qui lui venait aux chevilles était du bleu du myosotis coupée d’une ceinture lâche desoie rose pâle. Ses cheveux blonds et abondants tombaient dénoués sur ses épaules comme un long man - teau et son unique ornement était un collier formé d’un seul rang de perles blanches de prix. Les suivantes lui apportèrent de très coûteux vêtements et ornements d'or et de pierres précieuses, mais elle les refusa en disant : « Que je sorte ou non avec vous à la rencontredel’épouse, c’est à vous de le décider ; mais si je sors avec vous j ’irai telle que je suis, et danserai et chanterai au son de petites cymbales que j ’ai dans ma ceinture, car je suis une fille de Heber et non de Misraim ; je suis des tentes des gardiens de troupeaux et non des palais de rois » .
Alors la noble matrone qui préparait la procession des vierges s’émerveilla de sa beauté et de sa grâce et dit : «Assurément, vous irez avec les royales vierges de Mis- raïm à la rencontre de la nouvelle mariée, si toutefois cela est votre désir. Vous êtes libre ».
Or, comme toutes se regardaient et étaient gaies, subitement les douces notes d’une trompette d’argent résonnèrent; se levant,elles sortirent à la rencontre de l’épouse. On accédait aux portes extérieures du jardin du palais de la reine par une large et majestueuse allée qui était close par une deuxième porte. Quand la procession passa la première porte, les matrones et les vierges qui étaient fiancées s’arrêtèrent, mais les autres vierges passèrent par l ’allée jusqu’à la deuxième porte, avec de la musique,
LES VISION:, DU ROYAL INITIE 41 1
des tambours et des chants de réjouissance. Derrière le tronc d’un arbre gigantesque, le prince royal regardait pour voir la litière dans laquelle sa fiancée, la fille unique du chef du Pays Central, devait passer. Et comme il regardait, la procession des vierges royales et nobles passa. Alors, pendant un moment d’arrêt dans la musique et les chants de Misraïm, s’.éleva une voix claire, mélodieuse, enti'ançante, au doux son des cymbales d’argent qui battaient la mesure au chant des épousailles. Jamais le prince n’avait entendu une voix d’une douceur aussi exquise ; en regardant la vierge avec étonnement, il vit Zaira qui s’avançait d’un mouvement tout rythmique, légère et gracieuse comme une gazelle. À sa vue tout son être tressaillit ; son cœur battit rapidement et une soudaine défaillance l’accabla presque.
11 s’appuya contre l'arbre pour se soutenir. Le bruit aigu des portes de bronze extérieures le fit sortir de sa rêverie, et il vit s’approcher une litière cramoisie et or portée sur les dos de deux Eléphants blancs. Les rideaux de la litière étaient écartés, et il y vit, assise, une figure de taille élancée étroitement voilée dont seulement une main ornée de bijoux était visible: la main était foncée.
À côté de la litière, Zaira sautait et dansait, battant la mesure du chant nuptial de Misraïm avec ses petites cymbales d’argent qu’elle agitait çà et là, au son de délicates clochettes d’argent ornant les cercles qui entouraient ses minces poignets ; et ses mains étaient aussi blanches, que les pétales du lotus sacré qui couronnait la litière. Avec un lourd soupir, le prince se détourna. Comme il poursuivait le sentier à travers lequel la clarté lunaire jetait des ombres de feuilles semblables à des dentelles, il rencontra son compagnon et ami familier qui lui dit : « Pourquoi le visage de mon prince est-il troublé ? ».
Il répondit : « A cause de la beauté séraphique d'une
REVUE COSMIQUE4 1 2
des vierges qui sortaient à la rencontre de la royale vierge du Pays sacré ».
Alors l ’ami, qui aimait le prince qui l ’aimait bien, fut troublé et dit : « Le jour de vos épousailles est proche ; ce serait une chose grave que votre être fût plein de la pensée d’une autre vierge au temps de la conception du premier-né dont pourra dépendre si grandement la destinée de Misraïm et ceci plus spécialement à cause de la sensitivité de la passive du pays central, qui, si le bruit ne ment pas, est d’un ordre élevé.
Le prince répondit : a Ne soyez pas troublé. Là où se trouve mon amour, j ’ai le droit de me trouver aussi. Car au dessus du prince royal est l'homme. Maintenant même je chercherai le roi mon père et je lui dirai : « Mon épou_ se sera la belle vierge aux cymbales d’argent et nulle autre ».
Alors l’ami, dont la sœur était du ménage de la reine, sut que la vierge dont parlait le prince de Misraïm était de la maison de Héber. Après qu’ils se furent promenés pendant quelques secondes en silence, il dit : « N’allez pas, je vous prie, dans la présence du roi votre père que vous pourriez affliger, mais parlez d’abord de cette grave affaire au vénérable premier ministre, et prenez conseil de celui- ci. Car vous n’êtes pas comme un autre, vu que le pays Central est plus puissant que nous et que Misraïm tout entier se réjouit de cette union entre le pays Central et Misraïm à cause du grand bénéfice qui doit en provenir ».
Comme il parlait ainsi, un homme vénérable dont les longs cheveux et la barbe étaient blancs,mais dont la taille droite et les yeux clairs, intelligents, étaient ceux d’un jeune homme, s’approcha. A la vue du vieillard l ’ami s’en alla, de sorte que le prince resta seul avec lui, et il lui dit tout.Avec calme mais avec puissance,il représenta au jeune prince, qu’il avait aimé et dirigé depuis son enfance, le danger que sa préférence pour Zaira pourrait amener, non seulement à cause de son influence sur l ’enfant qui,
LES VISIONS DU ROYAL INITIÉ 4 1 3
selon les prévoyants, devait jouer un rôle si important dans la destinée de Misraim, mais à l’égard du père de sa fiancée s’il apprenait par hasard qu’une autre avait été préférée à la princesse Neborah, qui venait comme une alliance d’union entre Misraim et le pays Central. Grande fut sa surprise lorque le prince répondit doucement î
« Mon maître vénéré m’a enseigné que l ’amour est libre et que la tromperie seule est exécrable. Pense-t-il que celui sur lequel depuis son enfance il a répandu ses soins et son affection puisse être assez vil pour tromper même la plus humble vierge, encore moins une aussi grande et aussi douée que la fille du grand roi du pays Central ? Ma détermination est de ne pas contracter une union qui serait pour elle un suprême sacrifice.
— Et ainsi d’encourir la juste colère de celui qui nousl'a envoyée et de braver le danger de la perte et peut être de la ruine pour votre pays et votre peuple.
— M3 naissance n'a précédé celle de mon frère jumeau que de quelques minutes. Sans la loi du pays, il aurait un droit égal à la puissance suprême si. que les Dieux l’évitent, notre père cessait de vivre en homme sur la terre. En beauté physique comme en forces psychique et mentale, il est au moins mon égal. Mon intention est de renoncer pour lui à mes droits de premier-né et de lui céder avec ce droit la princesse du pays Central. Ainsi tout trouble et tout danger sera évité. Je vous prie, par l ’amour que vous me portez, soyez en cette affaire l ’intermédiaire entre moi et mon père, et obtenez pour moi sa permission de me marier avec la vierge deHeber».
Il répondit : « Ce que je pourrai faire, je le ferai ».Le jour suivant, on annonça que sur l'ordre du roi, le
mariage serait différé de trois jours, et le peuple s’étonna, mais lorsqu’il apprit que c’était en raison d’une vision, il fut satisfait.
Comme Zaira se promenait au crépuscule du soir dans le jardin des lys, elle fut rejointe par la sœur de l ’ami du
190S — Î7
4 1 4 REVUE COSMIQUE
prince qui lui avait dit que Zaira était la sœur d’Âuram. Elles se promenèrent ensemble ; la jeune fille apprit à Zaira la renonciation du prince royal ; le bruit courait déjà qu’il avait fait ce grand sacrifice pour l ’amour d’elle, et que le roi avait consenti, selon l’avis de son principal Mage et en raison d’une ancienne prophétie concernant l’union de Misraim et de Heber. Zaira fut excessivement troublée, ne sachant que faire parce que Auram avait dit : « Dis que tues ma sœur, de peur qu’ils ne me tuent à cause de toi : » Et comme elle méditait sur ces choses, elle entendit mentalement une voix qui disait : « Laksmi, Laksmi qui as daigné t’incarner en l ’honneur de l’union de Misraim et de ton pays central, viens à moi, c’est Neborah qui t’évoque. »
Premièrement les paroles furent pour Zaira sans signification, mais lorsqu’elles furent répétées pour la troisième fois, elle se rappela qu’à l ’aide d’Auram elle avait quitté la forme dans laquelle elle avait été revêtue et pris celle de la belle passive de Chrishna. Sentant un trouble non défini, elle essaya de se cacher dans le surombrement protecteur d’Auram et son trouble s’accrut cent fois davantage quand elle s’aperçut, par la continuation de l’évocation, qu’elle restait visible : ce fut d’un pas léger,binais avec un cœur lourd, qu’elle suivit la direction d’où venait la voix, et qu'elle entra dans la chambre où Neborah l ’attendait ; mais sa pensée était concentrée non sur l ’évocatrice, mais sur cette question ; « Pourquoi l ’aura d’Auram qui est mon voile pour le monde entier, me fait-elle défaut ? »
AUTOUR DU HEROS 415-
A U TO U R DU HÉROS
Celui qui combat pour la liberté harmonieuse, délivre le monde.
Celui-là est le héros.O frères de l'homme, qui avez su comprendre son
héroïsme, soyez-lui amis et attentifs, et comme un levier entre ses mains.
Car il est la puissance de votre vouloir et la réalisation de votre rêve.
Il est la résultante de beaucoup d âmes qui veulent et qui aspirent pour la victoire, fin lui, les âmes sont unies par la logique de son intelligence qui les comprend et les pénètre ; qu’elles s’unissent maintenant autour de lui et qu’elles soient unies entre elles, et qu’elles reconnaissent en lui leur centre, car il est la conscience de leur inconscience et l'inconscience de leur conscience, lit il est venu pour accomplir l’idée.
*A *Libre dans la solitude, l’homme libre est enchaîné parmi
les hommes.Libre dans sa pensée, il est inertié dans son acte.Et pour entraîner vos faiblesses, pourquoi épuiser sa
force ?Mais êtes-vous le meilleur emploi de sa force ?Ainsi vous paralysez l ’action du héros, hommes frères
de son âme et qui voulez sa volonté.Il est pareil au remorqueur qui entraîne les masses
lourdes, mais soyez des nefs bien construites et qui fendent
REVUE COSMIQUE
l ’eau, et soyez aussi attentifs à votre gouvernail, et ramez encore afin d'en aller plus vite.
Car le remorqueur est loin, et la corde tendue.Veillez donc sur votre propre vie, car moins il devra
vous soutenir, plus il pourra vous entraîner.*
* *
Respectez son silence et ne le troublez pas par des paroles vaines, car son silence est l ’instant de la formation.
Car sa parole intérieure est plus féconde que sa parole et son repos plus fécond que son travail.
Ne lui demandez pas de vivre votre vie, ne l’obscurcissez pas de vos sombres présages, car sa science est pleine et débordante.
Car sa force est d’être lui-même jusqu'au fond de l’être.Et vous n’êtes pas pareil à lui.Refermez-vous donc, concentrez-vous, accumulez vos
forces et soyez vous-même. Afin de devenir des hommes libres. Ainsi vous serez comme une roue tournant par elle-même.
Et votre effort sera aussi de l ’héroïsme. Et vous ne vous lasserez point, car la devise du héros est s affranchir.
** *
Effacez donc en vous le souvenir de l ’excès afin d’être un monde nouveau, et que le déséquilibre n’entre point en vous par la vue.
Détournez-vous de Sodome en feu et de Gomorrhe en cendre,
Et soyez devant le héros comme des miroirs purs.Et qu’il s’y mire silencieusement et s’y reconnaisse.Et qu’il lise en vous les symboles nouveaux. Car il doit
former avec des matériaux vierges et sains, et si vous n’êtes purs et renouvelés, que pourra-t-il faire de votre désir ? Il doit bâtir un monde en lui dans le silence.
Soyez-lui le rempart qui le sépare des choses du monde,Et la coque calcaire et blanche qui protège l’éclosion de
AUTOUR DU HÉROS 4 1 7
l ’œuf, porteur d’avenir ! Soyez donc braves, et combattez autour de lui.
** ♦
Ne vous déséquilibrez pas par un vouloir trop hautain, ni par une faiblesse indigne. Mais cherchez votre place et tenez-vous y résolument.
Et avancez sur les degrés de la hiérarchie des libertés.Remplissez exactement votre cercle d’action, et qu’il
remplisse aussi votre âme, et accomplissez seul tout ce que vous pouvez accomplir seul.
Or, vous ne devez rien entreprendre que ce que vous pouvez le mieux réaliser.
Soyez en paix et en équilibre, et dans la chaîne des êtres de bonne volonté envers la vie. Et vous répandrez autour de vous la force et le bonheur, et le héros se réjouira près de vous. Car ce qui réjouit le cœur du héros, ce n’est pas seulement l ’intelligence, r.i la science, mais l’harmonie de la vie.
Et ce qu’il aime, c’est la droiture.*
* *Imitez le héros dans ses moyens, mais gardez votre indi
vidualité.Car les moyens ont été trouvés avec sagesse et ils sont
des moyens de science.Mais l’esprit ne peut être enchaîné et il faut que vous
soyez vous-memes.Recueillez son enseignement et appliquez votre volonté
à ses parolesAfin de les accomplir aussitôt et pour toujours.Car la parole n’est que le signe et l’évocatrice de
l ’action.Et là où la parole est sans l ’action, il n’y a que vide et
fausseté.Obéissez à votre lumière intérieure aussi longtemps que
vous suivez la voie de la charité et le sentier de l’harmonie qui est l’ordre, car alors il y a un prophète en vous.
4 1 8 REVUE COSMIQUE
Ne le laissez pas crier en vain dans le désert.Mais que les peuples innombrables de bonne volonté
pleine accomplissent l’oeuvre en allégresse.*
# *Envoyez vers le héros le jet bienfaisant de votre énergie
harmonieuse,Et soyez-lui un ami et une amie ;Mais ne demandez rien en échange de votre amour,Car son rôle même est de monter, et son être latent est
dirigé plus haut que sa conception actuelle et active.Et que savez-vous si un seul de ses l'egards, ou une
seule de ses paroles, n’équivaut pas à vos longs discours, et à vos longs regards ?
Ne l’attirez pas vers vous ; mais allez vers lui ; car votre personnalité devient facilement un tyran, une entrave de vie et d’ascension.
Renoncez à la pensée de vous unifier avec lui tel que vous êtes, car ce serait en vain.
Mais aspirez à vous unifier avec lui réellement autant qu’idéalement, et que ce vous soit une raison de vous réaliser ainsi.
Que l ’ami ne devienne plus inconsciemment l’ennemi.Et que votre amitié soit intégrale.
¥ *Fortifiez-vous dans votre espérance, car toute force
germe selon la grandeur du but.Croyez en vous qui êtes l’agent, et en l ’œuvre qui est le
but.Croyez en la doctrine de l ’affranchissement et du
progrès, car c’est la doctrine de tous les héros.Que votre foi silencieuse soulève les eaux d’en bas pour
atteindre les eaux d’en haut,Et que votre nuque supporte le fardeau et l'effort afin
que la puissance du héros soit multipliée.Aspirez sans cesse l’énergie invisible afin de vous
vivifier.
AUTOUR DU HÉROS 4 1 9
Et votre aspiration sera comme l’appel d’une énergie plus haute qui formera une atmosphère propre à l ’épanouissement.
Ne vous reposez pas sur un autre du soin de nourrir vos êtres, car nul ne peut le faire ; et craignez le désséchement.
Désaltérez-vous sans cesse à la source d’eau vive afin que votre âme soit joyeuse et que votre corps soit resplendissant.
Et soyez aussi une source désaltérante, et le héros conducteur du degré prochain, pour les âmes qui attendent au-dessous de vous.
*Amenez les intelligences e » foule et soyez leur chef, et
unissez-les, afin que votre héros soit un héros parmi les héros, et un capitaine parmi les capitaines.
Afin que l’idée de sa vie et de votre vie se revête d’un corps collectif, qui le manifeste en puissance.
Soyez comme une machine bien construite et qui utilise toute la force, et ne soyez pas comme une roue décentrée qui absorbe l ’énergie et ne tourne point.
Qu'il n’y ait point en vous, ni autour de vous, le frottement des incompréhensions qui annihile le mouvement.
Mais que toutes vos pensées roulent harmonieusement en vous-mêmes, comme les astres à travers l’éther subtil.
Et que votre Conseil soit, à ceux qui gravitent autour de vous, comme un soleil vivifiant.
Augmentez sans cesse votre connaissance, concevez toujours plus haut.
Car c’est cette intelligence qui unit les âmes en elles et entre elles.
Cherchez à aimer. Ignorez les excès, mais aimez le beau.Approchez-vous de votre héros en pratiquant la science,
et cherchez à travers lui le Soph, d’où vient toute lumière.★
* ¥Et tous, les jeunes filles et femmes, si vous l ’aimez,
que ce soit sans jalousie.
4 2 0 REVUE COSMIQUE
Le flambeau doit briller pour tout le monde et vous ne vous mettrez pas devant lui comme un écran.
Que votre amour soit celui de la compréhension et ainsi digne de la contemplation.
Si donc vous aimez en lui le héros, faites votre regard pur, et votre volonté forte.
Et rayonnez vers lili de la beauté et de la joie, afin qu’il les reçoive et y réponde.
Mais si vous n’aimez en lui que la forme extérieure, alors, en vérité, vous ne l’aimez point ; car vous essayez d’enchaîner son essor.
Que celle qui vit en héroïsme ose venir à lui ; car son vouloir est l ’ascension même.
Elle n’apporte pas le doute et elle n’apporte pas la peur, elle n’apporte pas la division ni l’arrêt. Une avec lui, comme une duelle étoile ils éclaireront le monde avec la lumière de l'harmonie.
** *
Et maintenant, écoutez la voix du héros !L’homme fut formé pour être héroïque, et le sceau de
son aspiration sublime est sur son front élevé.L'homme e6t le héros ! et le héros est le poète ou le
prophète! et tout homme en vérité est un modeleur de forme.
Connaissez-vous donc vous-mêmes, sortez de l ’obscurité et remontez vers la lumière,
Et soyez les poètes de l ’avenir, les annonciateurs de bonnes nouvelles !
Soyez poètes entre les poètes ! prophètes entre les prophètes et héros entre les héros !
Car la voie est ouverte, et la voie est large, et en ordrel’humanité n’est qu’héroïsme I
** +
« Souvenez-vous donc, et assurez-vous.Osez vouloir et marchez vers l’affranchissement.Que les forts aillent en avant.
AUTOUR DU HÉROS 421
Que des faibles naissent les forts.Que des forts naissent les sublimes !Et il y a un rapport entre vous et lui !Entendez-le qui vous annonce : « Mon désir est que
d’homme de demain dépasse l'homme d’aujourd’hui de mille et de dix mille, et que chaque manifestation soit plus glorieuse ! »
** *
* Mais les héros ont passé et vous avez perverti leur discours.
Prêts à déchoir, vous avez pris prétexte de leur enseignement pour déchoir.
Et vous avez dit : « Celui-ci vous est une étoile, et comment l ’atteindrions-nous ? »
Et vous avez souillé d’idolâtrie, l ’origine de son œuvre vivante.
Car la doctrine du sage est comme une tour élevée, d’où l’on découvre l’horizon des avenirs, mais le sage seul a osé monter sur le faîte.
Et quand son âme a dû partir vers les patries lointaines, nul n’a su gravir le sommet de la tour.
Il y avait des lézardes dans les murs, et des marches manquaient.
Et le vertige naissait sous les pas des disciples.Alors, tandis que l’œuvre achevait de s'effondrer, des
hommes hissés sur les premiers degrés comme sur des tréteaux, annoncèrent les vérités mutilées.
Appelons les jeunes hommes et convions-les à monter sur le haut des tours !
On leur apprendrait le dédain du vertige, et la puissance de gravir.
Et ils jetteront des ponts entre les sommets des tours, et des arches inaltérables.
Et sur les piliers majestueux des œuvres anciennes, quelques-uns bâtiront sur la hauteur les jardins de la vie nouvelle.
4 2 2 REVUE COSMIQUE
Et d’autres viendront qui bâtiront des tours hautes, et ce seront des tours sur des tours.
Et ils évolueront les anciennes tours en montagnes, et les jardins deviendront des plaines.
Et ils combleront les vallées d’en bas, et il n’y aura plus de souvenirs de l’abîme.
Et les eaux lourdes ne battront plus le pied de la falaise, et les vagues ne creuseront pas jusque-là,
Mais les eaux profondes et calmes des sources inépuisables afflueront, et la rosée du matin sera abondante.
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L ’AURISÉE[Suite)
— Pourquoi ne pas céder tout de suite,dit le père Jérôme avec impatience, puisque vous n’avez d’autre alternative que d’accepter mes conditions et la liberté ou de les refuser en achevant comme esclave des Arabes quelques tristes années de vie.
Profondément troublée de ces deux perspectives, l'une dangereuse pour son corps et l’autre pour son âme, Donna Ignacio hésitait encore lorsqu’une pensée subite la rasséréna et lui permit enfin de se décider.
Elle se souvenait que bien des années auparavant son mari avait exigé d’elle le serment de violer la promesse qu’elle avait faite à son confesseur de doter une communauté religieuse et que s’étant empressée d’en référer à son guide spirituel, celui-ci avait déchargé sa conscience, en l ’assurant qu’ayant juré dans un cas de force majeure, son serment ne comptait pas, et qu’elle restait libre d’accomplir sa première intention.
— S’il y a jamais eu force majeure,c’est bien aujourd’hui, pensa-t-elle, et elle jura allègrement tout ce que voulut le père Jérôme.
Toutefois lorsque sans défiance il remit le saint ciboire dans son écrin elle eut comme un petit frisson et dut se rassurer mentalement :
— Après tout, qui sait, ce n’est peut-être qu’un peu de mie de pain aglutinée avec un peu de gomme pensa-t-elle. La transubstantiation ainsi que les ordres, le baptême, la
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confirmation ne laissent pas d’empreinte extérieure visible, tout cela est intérieur et invisible.
Ainsi consolée elle reçut les adieux du père Jérôme et sa bénédiction solennelle en songeant :
— C’est ainsi qu’ils bénissent ou maudissent sans savoir ce qu’ils font ; j’ai fait un serment sacré avec l ’intention de le violer,et le serviteur de l ’ Eglise me bénit au nom de Dieu.
Une semaine plus tard la rançon était payée et Donna Ignacio, les yeux bandés, quittait le Nid d’Aigle, emportée dans une litière fermée par le chemin qu’avait parcouru naguère Carolina avec sa corbeille de linge.
Arrivée au château il lui fallut se reposer et regagner des forces avant d'entreprendre le voyage de Madrid où ses affaires l’appelaient, mais entre-temps elle fut atteinte d’une maladie qu'on attribue d’ordinaire malicieusement au seul sexe faible, bien que le sexe fort ne laisse pas d’y être souvent assujetti : la curiosité.
Occupée d’abord à jouir pleinement du sentiment de sa liberté, Donna Ignacio ne tarda pas à reporter sa pensée sur le célèbre En Nser et un vif désir de le connaître l'obséda bientôt jour et nuit. Elle commença par interroger Yamina sur les moyens d'approcher de la résidence d’Abdalla et lorsqu’elle sut que rien n'était plus facile, elle posa mille questions sur l’homme lui-même songeant avec satisfaction que seule avec le père Jérôme et les Aiglons, elle savait son secret. Yamina parla longuement de la haute faveur dont jouissait l’Agha, non seulement auprès de ses coréligionnaires mais parmi les roumis ; elle conta la grande douleur qu’il avait éprouvée en perdant Ayasha.
C’est évidemment un homme très fort et très intelligent, pensa Donna Ignacio ; son dessein doit être de cacher son identité sous le couvert de bonnes actionset d'une vie sans reproches; il sera amusant au plus haut point de se trouver
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en présence du très respectable Abdalla tout en sachant qu’il n’est autre que le renommé En Nser.
Abdalla venait justement de quitter le sous-préfet avec lequel il avait conclu pour un prix dérisoire la vente de la prairie qui était déjà un verger embryonnaire, lorque Djilalli vint lui annoncer qu’une princesse espagnole qui avait été rançonnée par les brigands, demandait à le voir.
— Conduisez-la au grand salon et offrez lui du café et des bonbons dans le service d’or et de porcelaine, dit l ’Agha.
Aussitôt introduite dans une pièce magnifiquement décorée et meublée avec toute la beauté harmonieuse du luxe oriental, Donna Ignacio assise sur un divan bas et moelleux près des fenêtres aux vitraux richement colorés, fut servie, par de belles esclaves drapées d’étoffes souples et chatoyantes. Le café parfumé, les gâteaux, les bonbons exquis lui étaient présentés tour à tour, soit dans les petites tasses sans anses aux délicates ciselures, soit en des coupes d’or sur lesquelles on pouvait lire des versets du Coran.
La grande dame espagnole enveloppée dans la mantille de vieille dentelle noire,fixée dans son opulente chevelure par des diamants de famille d’un prix inestimable, se sen ■ tait en conformité complète avec son entourage et se délectait en buvant à petits coups le café bouillant et en grignotant les friandises délicieuses, au miel et aux amandes.
Au bout d'un certain temps une légère impatience commença à la gagner ; le plaisir d’être dans la citadelle même d’un vrai chef de brigand ne lui suffisait plus. Comme elle s’occupait à noter ses sensations, son âme de chrétienne soumise et timorée, trouva le charme de la nouveauté à ne rencontrer autour d’elle aucun emblème du culte.
Bercée et emmaillottée depuis son enfance dans les pratiques et les dogmes de la religion, cette constatation lui fut comme une joie et une délivrance.
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L’entrée de l’Agha interrompit ses réflexions. C’était un homme distingué et de haute courtoisie tel qu’il sied au descendant d’une race royale. Dès le premier regard qu’ils échangèrent, ils purent juger l’un et l’autre qu’ils étaient entre gens bien élevés.
Donna Ignacio qui croyait pouvoir découvrir le brigand sous l’habit du gentilhomme — tel le loup revêtu de la peau du mouton — fut plutôt désappointée.
Elle avait en face d’elle un homme au beau et triste visage dont la caractéristique était surtout la douceur. Saluant sa visiteuse avec grâce et dignité, Abdalla restait debout attendant qu’elle parlât. Il ne ressentait nulle surprise de sa venue, trouvant cette démarche toute naturelle pour le remercier et au besoin le rembourser de l’argent qu’il avait fourni pour la rançon.
Constatant qu’elle continuait à rester silencieuse il dit :— Permettez-moi, Madame, de vous offrir mes sincères
félicitations pour le danger auquel vous avez échappé si comme le bruit en court vous êtes restée un certain temps prisonnière au nid d’Aigle.
— N'y avez-vous jamais été vous-même.— Jamais.— Voilà un mensonge non nécessité par la force ma
jeure, pensa Donna Ignacio, puis elle ajouta : Ce que vous avez entendu dire n’est que trop vrai ; malheureusement je n’y ai pas vu le célèbre En Nser ; ce plaisir m’était réservé ailleurs.
— Ah ! vous avez pu rencontrer cette merveille que quelques-uns érigent en demi-dieu, d’autres en diable l Quelle espèce d’homme est-ce?
— Il vous ressemble d’une manière si frappante, que vous pourriez ne faire qu’un avec lui.
Les yeux d’Abdalla riaient, sa visiteuse reprit :—• Sa tête est mise à prix pour une forte somme...— Mais comment pouvez-vous dire qu’il me ressemble
si vous ne l ’avez jamais vu ?
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Donna Ignacio ouvrit et ferma son éventail de dentelle et d’ivoire avec le geste gracieux particulier aux Espagnoles et levant vers son hôte des yeux encore très beaux ;
— Pourquoi ne vous dirai-je pas la vérité,dit-elle ? Je sais que vous êtes En Nser le fameux chef des brigands ; les Aiglons me l ’ont révélé et je suis venue poussée par la curiosité. Soyez d’ailleurs sûr que je ne vous trahirai pas et que je garderai un très bon souvenir de la considération que vous m’avez témoignée.
— Tout homme de cœur eût été heureux comme moi de rendre un service temporaire à une dame en détresse.
— Mais je ne suis pas du tout en détresse, s'exclama Donna Ignacio !
— Pas en ce moment assurément, mais j ’imagine que votre position était peu enviable lorsqu’il m’a été possible de vous venir en aide en fournissant votre rançon.
— Je suis abasourdie. Je ne faisais allusion tout à l ’heure qu’aux égards avec lesquels j ’ai été traitée pendant ma •aptivité. Quant à l ’argent de ma rançon c’est le monastère de*** auquel j ’ai rendu service autrefois qui l ’a versé pour me racheter.
Abdalla se pencha négligemment au-dessus d’un pot de muguets dont il huma le parium, puis il interrogea ?
— D’où tenez-vous cela ?— Des Aiglons qui rencontrèrent le père Jérôme au lieu
indiqué portant les deux sacs de louis d'or.— Savez-vous où se trouve actuellement le père J érôme?— Probablement dans son couvent.Abdalla n’insista pas. Il changea le sujet de la conversa
tion connaissant par expérience la prudence du proverbe : « Le silence, c’est la sagesse. »
— Aimez-vous les antiquités ? demanda-t-il.— Follement! avant votre venue, je m’extasiais sur les
précieuses porcelaines anciennes et le merveilleux plateau dans lesquels me fut servi mon café.
— Je suis fort honoré de votre appréciation. Voulez-
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vous me permettre, madame, de vous faire visiter en détail mon humble castel qui est de très haute antiquité et contient des pièces assez rares collectionnées par les générations précédentes?
Après avoir tout vu, tout admiré Donna Ignacio quitta ' le vieux palais mauresque, enchantée. De retour au château d’Indrada, on lui dit qu’un volumineux paquet était arrivé pour elle en son absence ; elle aperçut en effet sur la table de son boudoir un objet carré soigneusement enveloppé d’un épais papier satiné entouré d’un ruban cramoisi. Elle s’imagina alors que ce pouvait bien être une bombe et terrifiée, osait à peine s’avancer vers le mystérieux colis, mais avisant Yamina qui l’avait suivie, elle lui dit négligemment :
— Voulez-vous avoir l’obligeance d’ouvrir ce paquet. A sa grande satisfaction au lieu de la dynamite redoutée, il contenait le magnifique service de porcelaine et le plateau d’or qu’elle avait tant admirés; par une attention plus délicate encore quelques rares bibelots anciens pour lesquels elle avait marqué une affinité spéciale y avaient été joints.
— E11 Nser est véritablement généreux, pensa-t-elle, mais en définitive, ses trésors ne sont que butin et il n’est pas difficile de fa ire des largesses avec le bien d’autrui.
Néanmoins elle écrivit dès le lendemain, exprimant sa reconnaissance à Abdalla ; mais le messager rapporta la lettre et annonça que l’Agha était parti dès le point du jour vers une oasis au Sahara où il faisait en grand l’élevage des chevaux de pur sang.
Un détachement de spahis accompagné de deux hommes avaient suivi sa trace et il savait qu’il était surveillé. A un certain lieu de jonction où une touffe de palmiers poussant auprès d’une petite source, formait une minuscule oasis, deux arabes du désert vêtus de propres et pittoresques haillons, apparurent montés sur un bel étalon qui faisait de son mieux pour les désarçonner. Abdalla assis sur le sable, buvait du lait aigre, lorsque simultanément les deux
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hommes sautèrent du dos nu de l ’étalon, que l’un d’eux maintint par la bride, tandis que l ’autre présentait à l’Agha un écrit arabe, établissant la généalogie superbe de l ’étalon.
— Quel prix en demandez-vous? dit Abdalla.— 2.000 francs. J’aimerais mieux me défaire de mes
quatre femmes, mais je ne trouve pas d’acheteurs et je suis pauvre.
— Bon,Abdalla dressa l ’acte de vente.'— Signez-le dit-il et amenez la bête chez moi demain, je
•vous compterai l ’argent. L’arabe signa le papier et fit au- dessous de sa signature une petite marque.
— Tout bien réfléchi, je préfère que vous me suiviez. Un étalon d’une si belle lignée est chose rare ; vous pourriez trouver une offre meilleure. Ainsi, les hommes du désert et l ’étalon accompagnèrent Abdalla vers la vaste oasis.
La nuit venue, l’étalon qui, s’il avait appartenu à un roumi,eût dormi dans une écurie luxueusement âménagée, mais mal aérée dans laquelle il eût gagné sans doute une bronchite, reposa sans dommage sur la terre nue, attaché à un piquet grossier,mais respirant la brise saine du désert.
Abdalla et le jeune arabe qui lui avait vendu l’étalon causaient ensemble dans une chambre intérieure de la tente et nul ne savait que l ’homme avec lequel s’entretenait l ’Agha était le Caïd Sidi Hamed, alias En Nser.
— Il était nécessaire que je vous visse, Abdalla, dit-il. J’ai reçu de singulières nouvelles du Nid. L’argent que vous avez versé pour la rançon de Donna Ignacio est faux^
— Faux 1 Comment cela se peut-il ? Je l’ai pris dans mon propre trésor dont nul, sauf moi-même, ne connaît l’existence.
— Je ne mets pas votre parole en doute, mais un fait est un fait, Peut-être l ’ex-père Jérome a-t-il trouvé moyen de changer le contenu du sac.
Evidemment le père Jérome a pensé faire un coup gé-1908 — 28
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niai : remplir son escarcelle et appauvrir les aiglons considérés comme les adversaires acharnés de l ’Eglise parce qu’ils brisent le joug de la loi et de la coutume. Le complot est manifeste, Père Jérome ou plutôt Angelo Alano a subtilisé l’argent que vous avez donné pour la rançon et il a mis à sa place de la fausse monnaie. Puis la liberté de la dame obtenue, il a persuadé à celle-ci que sou rachat état l ’œuvre de la communauté à laquelle il appartient, pensant lui faire ainsi non seulement toucher le prix de la rançon, mais lui assurer la reconnaissance de Donna Ignacio, reconnaissance qui se traduirait par de substantielles offrandes. En outre le plan du scélérat qui s’était fait instituer par testament l’héritier légal de son immense fortune, était en même temps de faire consentir Donna Ignacio à vous dénoncer comme étant En Nser.
— Pourquoi donc cette dernière stipulation ? Je n’ai jamais, autant que je sache, offensé un dignitaire de l’Eglise ni fait intervenir la politique contre la sécurité.
— Cet homme a sans doute des raisons de haine personnelle, ou plutôt des raisons de crainte. Quoi qu’il arrive votre famille et la mienne se sont toujours soutenues au cours des âges et nous resterons unis.
Dès qu’Abdalla fut revenu dans son palais, il apprit l ’étonnante nouvelle de la disparition de Donna Ignacio. On supposait qu’elle avait été capturée de nouveau par les aiglons.
L’Agha ne douta pas de la véracité de cette conjecture sachant que les brigands étaient soumis à leurs propres lois, et que n’ayant virtuellement reçu aucune rançon pour le rachat de Donna Ignacio ils n’avaient pas de raison pour lui rendre la liberté.
*¥ ¥
Sur une hauteur dominant d’un côté la mer et de l’autre une majestueuse forêt de cèdres et de chènes-lièges se trouvait un ancien palais Mauresque, dont la majeure partie n’était plus qu’une pittoresque ruine.
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Peu de temps après la conquête, un petit groupe de religieux acheta ce palais dépouillé de sa gloire et habita une aile de l'édifice qui seule avait résisté aux ravages du temps, des boulets et des rongeurs.
Les quatre pères et les douze novices et postulants échoués dans l ’ancien palais des rois d’où émanaient naguère les décrets réglant le sort des nations, le transformèrent peu à peu en un couvent qui gardait une certaine majesté.
La grande salle d’audience changée en oratoire était d’une imposante beauté architecturale. Quant aux pères qui dirigeaient la petite communauté, leur bonne humeur les rendaient populaires parmi les colons et les indigènes. Leur industrie consistait en la fabrication d’une liqueur très appréciée. A l’aide de ressources toujours croissantes, ils achetèrent toutes les propriétés grandes ou petites qu'ils trouvèrent à vendre aux alentours ; ils creusèrent des puits, approfondirent ceux qui existaient déjà, utilisèrent les vastes caves pour emmagasiner de la laine, des peaux, de l’huile et du charbon dont ils s'approvisionnaient largement en temps de baisse et qu’ils revendaient ensuite lorsque les cours montaient.
Les religieux savaient profiter à merveille des circonstances : tandis que les impôts et les règlements légaux qu’ils ne comprenaient pas acculaient le plus souvent les indigènes à vendre leur patrimoine et alors que les colons auxquels des concessions de terrains étaient accordées se voyaient contraints d'emprunter pour mettre le sol en valeur, et commençant ainsi par s’endetter finissaient par la faillite, les habiles religieux trouvaient sans cesse l’occasion de s’enrichir.
Ils possédaient un caveau dont l ’entrée communiquait par un passage souterrain avec l ’oratoire et ce caveau n’était destiné à recevoir ni du blé, ni de la laine.
Le supérieur, homme sage, avait cette théorie que la terre est le plus sûr des placements et que si elle ne rap
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porte pas toujours autant, elle est du moins toujours là quoi qu’il arrive ; il considérait donc qu’une provision d’argent liquide était essentielle pour assurer les achats de terrains dans de bonnes conditions et le fameux caveau était réservé à contenir des pièces d’or. Tout auprès il y en avait un autre aménagé pour recevoir la fausse monnaie dont un spécimen venait d’être trouvé .au nid d’Aigle.
Lorsque dix heures sonnèrent à l’horloge du couvent, saut le prieur souffrant d’une attaque de goutte, les pères étaient réunis autour d’une table où se trouvait également le père Jérome,
— 11 est absolument nécessaire que la noble dame Espagnole prenne le voile dans un couvent de notre ordre, dit un des religieux, c’est pourquoi nous l’avons transportée en un refuge où l’on songera d’autant moins à la chercher que chacun la croira retombée aux mains des brigands.
— Malédiction ! prononça intérieurement le père Jérome Je suis plus fort que Donna Ignacio,mais l ’Eglise est beaucoup plus forte que moi-même et mon héritage me paraît bien compromis, car on permettra certainement à la testatrice de violer son serment pourvu que sa fortune revienne au couvent.
Devant l ’écroulement de ses plans, des ondes et des ondes de pensées amères envahirent l’esprit du père Jérome, tandis que les bons pères de plus en plus gais, continuaient à déguster la fine liqueur qui dans une si large mesure contribuait à leur richesse.
Quant au père Jérome il regardait la vie comme peuvent le faire seulement ceux qui ont été dressés à la dure école de l ’expérience et de la pauvreté et il estimait que l ’argent est le sésame ouvre-toi de toutes'les portes, sauf celle de l’immortalité. Sans renoncer à l’espoir d’obliger sa pénitente à tenir son serment, il cherchait d’autres moyens de s’enrichir pour le cas où son premier plan échouerait,mais
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il avait beau tourner et retourner dans sa tête mille combinaisons, aucune n’assurait la tâche difficile de faire mouvoir avec succès les roues de la fortune ou de tisser en sa faveur les fils d’or du destin.
Onze coups tintaient à l’horloge lorsque sombre et troublé le père Jérome quitta la table sans avoir même goûté au liquide d’une belle couleur ambrée qui remplissait son verre.
— C’est pour moi l'heure de vigile, expliqua-t il.Et les pères de répondre avec onction :— La paix soit avec vous.11 se dirigea vers le petit bois du côté sud du Mo
nastère et gagna la crypte souterraine où se trouvaient les deux caveaux; l ’ayant traversée dans toute sa longueur il parvint jusqu’à un petit espace voûté qui était le lieu de sépulture d’un ancien marabout. Là, après avoir verrouillé la porte, il s’assit sur une dalle au pied de la niche taillée dans le mur épais, et tirant de sa poche un paquet de lettres jaunies par le temps, il se mit en devoir de les examiner avec attention ; elles étaient toutes de l’écriture d’Abdalla et portaient sa signature. Ces documents n’avaient par eux-mêmes aucune autre valeur.
Le père Jérôme avait placé deux grands cierges dans des chandeliers de cuivre jaune finement ciselés et lorsqu’il eut réuni devant lui l ’encrier, la plume et le papier, dont il s’était muni, appuyé en guise de table à la pierre plate de la niche, il travailla attentivement pendant une heure à imiter l ’écriture et la signature de l’Agha. Puis remettant lettres et papiers dans sa poche, il éteignit les cierges et sortit en suivant un passage faiblement éclairé par une petite lucarne dont les contours se distinguaient à peine extérieurement, dissimulés qu’ils étaient par les arbres et les broussailles croissant à environ cinquante centimètres au-dessous et qui s’étendaient au loin en ondulations nombreuses entre la Montagne et la Mer.
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Au moment où le père Jérome passait à proximité de la lucarne, l'horloge du couvent sonnait minuit et le religieux s'étonna de saisir comme un son indistinct de voix d’hommes. Il enleva ses sandales et se juchant adroitement à l’aide des mains sur un petit mur sa tète se trouva juste à niveau avec le trou. Ecoutant avec attention il entendit nettement des propos s’échanger à voix basse et il lui parut même reconnaître un timbre qui lui était familier, mais il lui était impossible de se rappeler où il l’avait entendu.
Ce que disaient les voix était très clair :— C’est bien ici ; voilà la lucarne, mais comment entrer ;
le mur a un mètre cinquante d’épaisseur ; si l’on saute on risque de se rompre les os, ou d’être pris comme un rat dans une souricière.
Le père Jérôme continuait à rester de son mieux accroché au mur d’où ii observait sans être vu, lorsque retentit subitement le cri d’un oiseau de nuit presque immédiatement suivi d’échos en échos à travers la forêt de chants qui ressemblaient à ceux du rossignol.
C’était le signal des Aiglons. Quittant alors son poste avec précaution, le religieux remonta le chemin jusqu’au passage secret puis ayant barré toutes les issues et pris avec lui la clef massive de la porte d’entrée, il entra dans sa cellule et se dévêtit vivement. Un costume d’ouvrier remplaça le froc et la tonsure fut dissimulée sous une perruque d’un brun rougeâtre, cachée ainsi que tout le déguisement entre ses matelas d’alfa. *\insi transformé le père Jérôme gagna le jardin et arriva bientôt à quelques pas des hommes occupés à examiner la lucarne.
Mettant dans ses poches, ses mains qu’ il avait eu la précaution de frotter avec de la terre afin que leur blancheur ne puisse le trahirai sifftotta un air, éveillant ainsi l’attention des deux brigands qui disparurent sous bois en lançant le cri de l’oiseau de nuit.
Le père Jérome répondit par le même cri et rejoignant
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les hommes leur dit : — Vous êtes des aiglons qui cherchez un veau gras farci d'or, mais vous ne savez même pas en quel lieu il se trouve.
— Le savez-vous ?— Certainement. Conduisez-moi au chef de l ’expédition
je ne révélerai à nul autre ce que je sais.— Suivez-nous donc, un seul parmi plusieurs n’est pas
dangereux.Le père Jérôme traversa ainsi, guidé par les Aiglons, la
belle forêt de cèdresmajestueux et de chênes-liège, et dont les troncs dépouillés de leur écorce paraissaient d’un rouge sanglant. Lorsqu’ils furent arrivées près d’un marabout en ruines, l’un de ses conducteurs lui indiqua du doigt un homme assis par terre qu’il put voir vaguement à la clarté de la lune, une cigarette aux dents.
— Pas de chance ? interrogea-t-il laconiquement.— Non. Nous avons bien trouvé le trou indiqué, mais
nous avons eu beau nous concerter, nous n’avons découvert aucun moyen pratique d’entrer. Cet homme que voici prétend en savoir plus que nous,il a demandé à vous parler et nous avons cru bien faire en vous l ’amenant. S’il ne vous inspire pas confiance, nous le pendrons.
— Qu’avez-vous à me dire ?. — Faites retirer tout le monde hors de portée de l’oreille
et je parlerai.— Bien.Resté seul avec le chef, l’homme dit :— Ecoutez Ras Kammel, il y a peu de temps j ’étais votre
hôte ou plutôt votre prisonnier ; j ’appartiens à la communauté que vous avez la pieuse pensée d’aider à garder son vœu de pauvreté. Je suis le père Jérome.
— En effet, je reconnais votre voix,mais quel a été votre but en venant ici ?
— Mon but repose sur ce principe qu’un service en mérite un autre en retour. Si vous êtes de mon avis, je vous indiquerai la cachette.
45$ REVUE COSMIQUE
— Quel service réclamez-vous en échange?— Seulement ceci : que vous consentiez à écrire à une
personne que je vous désignerai pour lui révéler que l ’Agha Abdalla est bien le fameux En Nser et que vous le lui dénoncez à litre de vengeance privée.
— Très volontiers. Rien ne déjoue nos entreprises comme l'entente de nos coreligionnaires avec les autorités établies pour le maintien des idées qu’ils se font de l ’ordre. Mais je ne m’explique pas très bien pourquoi vous en voulez à l’Agha.
— Cela c’est mon affaire ; chacun sait où le bât le blesse. Il y aune chose certaine, le jour même où Abdalla sera arrêté, trouvez-vous en ce lieu-ci et je vous conduis droit au trésor. Prenez ces lettres écrites par Abdalla, elles constituent de véritables charges contre lui : son arrestation sera ainsi toute motivée.
Il tendit le petit paquet à Ras Kammel qui le reçut sansobservation et regagna furtivement sa cellule où ayantrevêtu en hâte sa robe de serge grossière, il s’étendit surle lit étroit et dur et s’endormit aussitôt.
** *
L'unité des Aiglons assurait leur force. Tels les habitants d'Edom, leurs mains étaient contre tous les hommes et celles de tous les hommes étaient contre eux, mais ils formaient un corps véritablement unifié et leur obéissance, leur dévouement à En Nser était sans bornes.
Le fait qu’on eût mis sa tête à prix le leur rendait plus précieux encore, aussi lorsque les soupçons s’égarèrent sur Abdalla, grâce aux lettres adroitement surchargées qui le compromirent auxyeux des autorités,non seulement les Aiglons ne songèrent pas à s’en plaindre, mais ils s’en réjouirent même, les recherches incessantes de tous ceux que tentaient le prix de la trahison, cessant parce moyen.
Pleins de prudence et de zèle ils suivaient avec joie la voie que leur avait ouverte le père Jérome, pour s’empa
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rer du trésor.Un mois plus tard, lorsque les jours moins courts an
nonçaient déjà la venue du printemps, l ’or du caveau était au nid de l ’Aigle, et dans une sombre cellule l ’Agha Ab- dalla, jugé et condamné, attendait l’heure de son exécution.
L'étrange et rapide succession des événements l ’avait plongé dans une sorte de torpeur ; il lui semblait être écrasé sous la chute d'un énorme poids dont il ne pouvait se libérer, mais qu’il supportait sans douleur aiguë.
L’accusation, l ’arrestation, le procès,la sentence s'étaient enchaînés et suivis avec une vitesse si grande, qu’il pouvait à peine se rendre compte de son infortune.
A la veille du jour désigné pour le supplice, la porte de son cachot fut ouverte pour livrer passage à un religieux. Le prisonnier le vit entrer avec indifférence, mais comme il restait debout immobile comme une statue, les bras croisés dans les longues manches de sa robe, l'Agha interrogea d’une voix lointaine :
— Que voulez-vous ?
— Je suis le père Jérome, alias Angelo Alano ; c’est moi qui vous ai accusé, c’est moi qui n’ai eu ni repos ni trêve, jusqu’à ce que vous ayez été condamné à mourir !
Je viens pour me réjouir d’assister au dernier jour de votre vie ; et ce n’est par l’espoir d'aucun gain que j'ai frayé votre route vers une mort honteuse, je n’ai eu qu’une idée,un seul but...
— Et c’est ?— La vengeance,— Je n’ai jamais fait consciemment de mal a nul
homme.
Le père Jérome avança d’un pas sous la lueur de la lampe qui éclairait faiblement la cellule.
—- Et à nulle femme, à nul enfant ? prononça-t-il d’une voix froide et mesurée. Vous restez silencieux ; peut-être
4 3 8 REVUE COSMIQUE
voyez-vous la terre teinte du sang de celui que vous avez tué, parce qu'il osait aimer encore la fiancée que vous lui aviez volée... en l’achetant comme une esclave avec votre or maudit... Peut-être entendez-vous le rire ou les gémissements amers de la malheureuse que vous avez rendue folle... Peut-être écoutez-vous l'écho des paroles d’injures avec lesquelles vous avez chassé de son unique home et de votre présence le fils de la jeune Mauresque autrefois si radieusement belle, Fathma ben Tani ?...
Une pâleur mortelle s'était répandue sur le visage d’Ab- dalla,qui chancelant dut s’appuyer au mur de sa cellule, tandis qu’il disait d'une voix si basse, qu’à peine pouvait- on l’entendre ;
— Qui êtes-vous ? qui êtes-vous ?...— Je suis votre fils et le fils de votre victime... Je suis le
vengeur de ma mère ?*
* ¥Dans une des plus fertiles oasis du grand désert encore
exempt de la marée destructive de la soi-disant civilisation, on célébrait de magnifiques fiançailles: celles de la perle du désert Ayaba Ayama avec En Nser qu’elle avait choisi et au château de qui elle devait venir à la fête de la nouvelle lune, montée sur un jeune dromadaire blanc et parée des voiles et des atours les plus dignes de sa merveilleuse beauté.
Ses compagnes, ses suivantes esclaves et libres, les nombreux chameaux portant sa riche dot, formeraient le cortège imposant accompagnant vers l’époux la jeune fiancée. Depuis que Marna eut donné à En Nser l'occasion d’entrevoir le beau visage de la jeune fille, il n’en pouvait détacher sa pensée ; car tout son cœur avait bondi de joie, non seulement parce qu’elle était belle, mais parce que quelque chose en elle lui rappelait la mère qu’il avait perdue lorsqu’il était tout enfant et qui dans son souvenir constant, s’ idéalisait jusqu’à la perfection.
(A suivre).
QUESTIONS 439
QUESTIONS
i
Dans l'étatpost-mortem est-il normal de conserver l'individualité consciente ou inconsciente ?
— La conservation de l'individualité — ou individualités plus raréfiées — après la dissociation du corps nervo- physique ne dépend que de l ’évolution individuelle intégrale.
La conscience ou l’ inconscience de l’individualité plus raréfiée dépend :
i* de l’habitude de son extériorisation en pleine conscience pendant son association avec le degré d’être nervo- physique. Dans ce cas le repos prolongé d’assimilation à son entourage lai devient inutile, tandis qu’il est indispensable à ceux qui ne sont pas accoutumés à l ’extériorisation.
2' de l’évolution des degrés d’être du désassocié. Si ses degrés nerveux, psychique et mental sont évolués de manière à retenir leur trois individualités, la conscience est en général préservée. Si les degrés d’être psychique et mental seulement sont individualisés il y a généralement une période d’inconscience plus ou moins longue, car le repos d’assimilation aux nouvelles conditions dans lesquelles l’individualité mentale et psychique se trouve, devient nécessaire. L ’expression « nouvelles conditions » est employée à dessein parce que dans l’extériorisation qui a lieu pendant l’existence intégrale, le degré d’ètre
4 4 0 R E V U E C O S M IQ U E
n e rv e u x ag it c o m m e in t e r m é d ia i r e , c o m m e l i e n de co n -
n e x io n en tre les d i f fé re n ts d e g ré s d ’ê t r e (m e n t a l , p s y c h iq u e
e t n e rv o -p h y s iq u e ) . D e l à la g r a n d e im p o r t a n c e du d é v e l o p
p e m e n t n e r v e u x .
I I
— L a p o s s ib ilité de se re c o n n a ître et le s o u v e n ir m u tu e l e n tre m a r i et fem m e s u b s is te n t- i ls d a n s les c irconstances o rd in a ire s , après la d is s o lu tio n d u degré d ’ê tre ne rvo -phys ique ?
— I l est assez d i f f ic i le de d o n n e r u n e ré p o n s e satisfa i
san te à ce tte q u e s t io n au p o in t d e v u e des c irconstances o rd in a ire s !
L ’o b s e r v a t io n e t l ’ e x p é r i e n c e p r o u v e n t q u e les u n io n s
les p lus o rd in a ires son t c e l le s du s im p le d e g r é d ’ ê t re n e r v o -
p h y s iq u e — dans ce cas la d is s o lu t io n d e ce d e g r é d is sou t
n écessa irem en t c e t te u n io n .
D a n s les u n io n s p lus c o m p lè t e s q u i s o n t n o n - s e u l e m e n t
n e r v o - p h y s iq u e m a is n e rv e u s e , p s y c h iq u e e t m e n ta le , la r e
con n a issa n ce e t le s o u v e n ir m u t u e l d é p e n d e n t de l ’ i n d i v i -
d u a l i ta t io n n e rv eu se , p s y c h iq u e e t m e n t a le .
I I I
— Je su is s incèrem ent attachée à m o n m a r i q u i est su rm e né de t r a v a i l l i t t é r a ir e . C o m m e n t p u is - je V a id e r le m ie u x ?
E n lu i d o n n a n t s e lon v o t r e p o u v o i r les m e i l le u r e s c o n d i
t ion s d e t ra n q u i l l i t é n e rv eu se . E n l ’ e n to u ra n t d ’u n e g r a n d e
s y m p a th ie t ra n q u i l le e t o p p o r t u n e et e n lu i é v i ta n t au tan t
q u e v o u s le p o u v e z l ’ u su re q u e cau sen t tous les petits e n
nu is , ch a g r in s e t v e x a t io n s . E n r em p l is sa n t le r ô l e le p lu s
u t i le e t le p lus b e a u d e la f e m m e , d o n n e u s e de r e p o s ,
v e i l la n t à la p a ix du f o y e r .
C e r ô le d e m a n d e q u e lq u e fo is d e l ’ a b n é g a t io n , m a is s’ i l
est d i f f ic i le au d ébu t, i l d e v ie n t par h ab itu d e fa c i le e t
a g r é a b le e t v o u s t r o u v e r e z en lu i -m ê m e u n e d o u c e e t d u ra
b le r é c o m p e n s e .
Q U E S T IO N S 4 4 1
I V
V ous constatez, d a n s V « E tu d e in é d ite de source a n c ie n n e » , que to u t est v iv a n t , et les découvertes récentes, te lle s que la découverte des h a b ita n ts d u c r is ta l sem b len t p ro u v e r la v é r ité de l a p a r t ie s c ie n tif iq u e de la ^Philosophie C osm ique .
V o u le z -v o u s me d ire ce que vous considérez com m e le p r in c ip e d u m o u vem en t ?
— L a v i e u n iv e rs e l le , d o n t l e m o u v e m e n t es t in sépa
rab le .
V
Q u e lle est v o tre conception d 'u n héros ?
C e lu i q u i fa it son d e v o i r .
V I
1 * Q u e lle est la cause de la n e rvo s ité et de ta n t de m a la d ie s nerveuses q u i sem b len t a ffec te r V h u m a n ité de p lu s en p lu s ? 2 *
Q u e l en est le m e il le u r remède ?i ’ L e d é s é q u i l ib r e d e l ’ ê t r e n e r v e u x d o n t la cause est
l ’ excès.
2 ' L ’in fu s io n de fo rc es nécessa ires p o u r le r é ta b l is s e m e n t
d e l ’ é q u i l ib r e .
V I I
‘P u is q u e vous précon isez la v ie de cam pagne et le repos, p o u r q u o i êtes-vous v e n u h a b ite r une v i l le où i l est im p o s s ib le de se reposer ?
P a r c e q u e l e d e v o i r passe a va n t t o u t , m ê m e a v a n t le
b ie n -ê t r e p e r s o n n e l . L e r ep os v i e n t d ’ a i l le u rs d e l ’ i n t é r i e u r
d e l ’ ê t r e . O n p e u t v i v r e dans un to u r b i l l o n e t p o sséd e r le
r ep os e t la t ra n q u i l l i t é , o n p e u t ê t re dans le s i le n ce e t la
s o l i tu d e a u m i l i e u d 'u n e fo u le .
V I I I
D ite s -m o i, je vous p r ie , ce que vous pensez de l 'o p in io n de T o ls to ï rappo rtée d a n s u n jo u r n a l q u o tid ie n sous le t i t r e :
« L 'â m e est p lu s q u 'im m o r te l le » E st-ce v ra im e n t s c ie n tif iq u e ?
4 4 2 R E V U E C O S M IQ U E
R ie n d e ce q u i se base sur des p rob ab i l i té s , su r « si » ,
« je p en se » e t « j e suis c o n va in cu » n e fa it p a r t ie du d o
m a in e d e la sc ience pu re .
L e v é n é ra b le é c r iv a in d ît : « S i nou s n ’ a v io n s pas c o n n u
« u ne v i e p lus r é e l le q u e le r ê v e , n o u s co n s id é re r io n s le
« r ê v e c o m m e la v ra ie v ie , e t n o u s n 'a u r io n s jam a is d o u té
« q u ’ i l fû t la v ra ie v i e . T o u t e n o t r e v i e , d ep u is la n a is
s a n c e ju sq u ’ à la m o r t n ’ est-e lle pas a vec tou s ses r ê v e s ,
« un r ê v e q u e n o u s p re n o n s p o u r la réa l i té ? N e so m rn e s -
« n ou s pas ce r ta in s d e sa réa lité u n iq u e m e n t parce q u e
« n ou s n e co n n a isso n s pas u n e autre v i e q u i so it p lus
« r é e l l e ? N o n s e u le m e n t je l e p ense , m a is je suis c o n v a in c u
« q u e c ’ est la seu le ra ison de ce tte c e r t i tu d e » .
O u i , m a is si n ou s a v o n s c o n n u u n e v i e p lus r é e l l e q u e
les r ê w s , n ou s n ’ a vo n s pas c o n n u u ne v i e p lus r é e l l e q u e
ce tte v i e !
« D e m ê m e q u e n ou s v i v o n s des m i l l ie r s d e rê v e s pen -
« da n t n o t r e v i e te r res tre , ce l le -c i est l ’ une des m i l l i e r s d e
« v ies dans la q u e l le n ou s e n tron s en so rtan t de l ’ au tre v i e
« p lus r é e l le , p lus a u th e n t iq u e et à la q u e l le nou s r e v e n o n s
« après n o t r e m o r t . »
C e c i est u n e s im p le h y p o th è s e , basée su r le B o u d d h is m e
m o d e r n e e t n o n sur la l o g iq u e e t l ’e x p é r ie n c e .
« N o t r e v i e m o d e r n e est l ’un des rêv es d ’u n e autre v ie
« plus r é e l l e et a ins i d e su ite ju s q u ’à l ’ in f in i , ju s q u ’ à l a d e r -
« n iè r e v ie , q u i est la v ie d e D ie u » .
Q u e l D ie u ? L e D ie u du N i r v a n a ?
« L a na issance et l ’ a p p a r i t io n des p r e m iè r e s n o t io n s sur
« le m o n d e p e u v e n t ê tre c o n s id é rée s c o m m e le c o m m e n c e -
« m e n t du s o m m e i l , t o u te la v ie te r res tre c o m m e le s o m -
« m e i l c o m p le t , la m o r t c o m m e le r é v e i l » .
P a r q u e l g e n r e d ’ in t e l l i g e n c e es t- i l p o ss ib le d e c o n s i
d é r e r c o m m e le c o m m e n c e m e n t d ’un s o m m e i l les p r e m iè
res n o t io n s sur le m o n d e q u i n e p e u v e n t ê t r e r a is o n n a b le
m e n t c o n s id é ré e s a u t r e m e n t q u e c o m m e le p r e m ie r r é v e i l
Q U E S T IO N S 4 4 }
à la con na issance ? C o m m e n t se p e u t i l q u e la m o r t s o i t
c o n s id é ré e c o m m e un r é v e i l ?Le r é v e i l à q u o i ?
« L e s o m m e i l p r o f o n d e t sans rêv es est c o m p a ra b le à
« l ’é ta t de d e m i-b es t ia l i t é » .
L ’ o b s e r v a t io n n ou s p r o u v e q u e les a n im a u x r ê v en t .
« P e n d a n t le s o m m e i l l ’ h o m m e est t o u jo u rs é go ïs te . »
I l est in u t i le de d é m o n t r e r q u e p e n d a n t le s o m m e i l sans
r ê v e , le m o i n e r v e u x , p s y c h iq u e ou m en ta l ne s ’ é v e i l l e pas
à la c o n sc ien c e e t il est fac i le d e p r o u v e r q u e « D a n s la v i e
« q u e n ou s co n s id é ro n s c o m m e rée l le , n o t r e l ie n a v e c nos
« s e m b la b le s est d é jà p lus g ran d ; i l y e x is t e u n e appa-
« r en c e de l ’ a m o u r du p ro c h a in » , m a is M . T o l s t o ï a d é
cr it la v i e q u e n ou s c o n s id é ro n s p lus r é e l le c o m m e « un
(( s o m m e i l p r o fo n d » .
« D a n s la v i e , d o n t n ou s so r ton s e t à la q u e l le n o u s r e -
« t o u rn o n s , ce l ien est plus é t ro i t : l ’ a m o u r du p r o c h a in
« n ’ est p lus u n e s im p le a sp ira t io n , m a is une ré a l i té » .C e c i n ’ est s im p le m e n t q u ’ une h y p o th è s e .
v C e t t e fo is , dans ce rê v e , n ou s sen ton s dé jà t o u t c e q u i
« se réa lise ra p eu t -ê t r e dans la n o u v e l l e v ie .
L e s t e rm es nous sentons e t p e u t-ê tre n 'a p p a r t ie n n e n t pas au
m o n d e s c ie n t i f iq u e !
« L a f o r m e c o rp o r e l l e dans la q u e l le n o u s s u rp ren d ic i—
« bas le r é v e i l d e n o t r e c o n sc ien c e » .
N o t r e c o n sc ien c e s’ e v e i l l e d o n c se lon la th é o r ie de l ’ é c r i
v a in , dans le p r o f o n d s o m m e i l d e m i-b es t ia l ?
« L a f o r m e c o rp o r e l l e appara ît c o m m e la l im i t e au l ib r e
« d é v e lo p p e m e n t d e n o t r e e s p r i t . L a m a t iè r e est la l im i t e
« de l ’ esp r it . L a v ra ie v i e c o m m e n c e lo r s q u e ce tte l im i t e est
abso lue . »S e lo n ces assert ions l ’ é v e i l à la co n sc ien ce d e la v ra ie v i e
s ’ e f fe c tu e dans la f o r m e c o rp o r e l l e , m a is la réa l isa t ion d e
c e t te co n sc ien c e n ’ a l ieu q u e lo r s q u e l ’ esp r it est d é g a g é
n o n - s e u le m e n t de la f o r m e c o rp o r e l l e , m a is de la m a t iè r e
in té g ra le .
A v e c la m o d e s t ie e t l ’h u m i l i t é q u i d is t in gu en t les g ra n d s
444 R E V U E C O S M IQ U E
h o m m e s vé r itab les , l ’ é c r iv a in con s ta te q u e : « C e t t e n o t i o n
« r e n f e r m e to u t e la co n n a issa n ce d e la v é r i t é e t d o n n e à
« l ’h o m m e la c o n sc ien c e d e la v i e é t e rn e l le » .L ’ e n s e ig n e m e n t se t e r m in e pa r ces m o t s : « Je n e m ’a
m u s e pas à im a g in e r u n e th é o r i e » . N u l n ’ accuse l ’ é c r iv a in
d e s’ a m u se r à im a g in e r u n e th é o r i e ; m a is u ne t h é o r i e , u n e
c r o y a n c e p e r s o n n e l le s o n t sans v a le u r , q u a n t à la s c ien ce .
« Je c ro is d e to u te m o n â m e en ce q u e je d is » .
C ’ est d é jà b eau cou p .
« J e sens, je sais a v e c c e r t i tu d e q u ’ en m o u r a n t j e sera i
<( h e u re u x , q u e j ’ e n t r e ra i dans u n m o n d e plus ré e l » .
T a n t m i e u x ! M a is la s e n t ie n ta t io n , la c e r t i tu d e e t la
conna issance du v é n é ra b le é c r iv a in s o n t sans a u c u n e v a
l e u r s c ien t i f iq u e p u isq u ’ i l est e n c o r e h e u r e u s e m e n t dans l e
m o n d e des v iv a n ts , dans le s o m m e i l p r o f o n d q u ’ i l c o m
pare à un éta t d e d e m i-b e s t ia l i t é !
Le Gérant M. J. Bucas.
Saint-Arnaud (Cher).— lmp.DANlH:L-CII.VSlBOi\
A I A A Z I ZD i r e c t e u r
6, Rue de la Pompe. Paris (XV7e).
A B O N N E M E N T S : F r a n c e : I O f r s . , E t r a n g e r : 1 9 1 r s . ; L e N u m é r o t f r .
L E S A B O N N E M E N T S P A R T E N T D U l w J A N V I E R P r iè r e d ’ en adresser l e m o n ta n t au t r é s o r ie r M . Jacques B l o t .
P o u r les d e m a n d e s de r e n s e ig n e m e n ts e t q u e s t io n s sur la P h i l o s o p h ie e t le M o u v e m e n t C o s m iq u e , é c r ir e au d ir e c te u r A I A A Z I Z .
Les p e rs o n n e s dés ire u se s d ’a v o i r des e x p l ic a t io n s o ra le s s u r la p h i lo s o p h ie e t le M o u v e m e n t C o s m iq u e s e ro n t reçues to u s les
S a m e d i s M a t in s ; de 10 h e u re s à m id i .
P O U R L E S A B O N N É S : R é u n io n s Cau ser ies . T o u s les L u n d is ;
de 3 heu res à 6 heures .
L E S S I X P R E M I È R E S A N N É E S D E L A R E V U E C O S M I Q U EU n e a n n é e 1 2 f r s . L e s s i x a n n é e s : 6 0 f r s .
L H T f ^ H D I T I O Ï l G O S f l U Q t i a
T r o i s b e a u x v o lu m e s in -8 ° ca rré .
j j | L e D r a m e C o s m iq u e
I I I L e s C h ro n iq u e s d e C h i .
P r i x : 1 fr. 4 0 le v o lu m e .
| L e D r a m e C o s m iq u e
E X P O S É S U R L E M O U V E M E N T C O S M I Q U E
P R I N C I P E S G É N É R A U X D E L A P H I L O S O P H I E C O S M I Q U E