papyri - volume 4 - où va le monde? réfections sur la nature et l'avenir du monde moderne

10
Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό τόμος 4, 2015 Papyri - Scientific Journal volume 4, 2015 Où va le monde? Réfections sur la nature et l'avenir du monde moderne GΕORGΕ CONTOGΕORGIS, Professeur de Science Politique, ancien recteur de l'Université Panteion. Hellas Email: [email protected] Θεσσαλονίκη 2015 Thessaloniki 2015 ISSN:2241-5106

Upload: independent

Post on 21-Nov-2023

0 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό τόμος 4, 2015 Papyri - Scientific Journal volume 4, 2015

Où va le monde? Réfections sur la nature et l'avenir du monde moderne GΕORGΕ CONTOGΕORGIS, Professeur de Science Politique, ancien recteur de l'Université Panteion. Hellas Email: [email protected]

Θεσσαλονίκη 2015 – Thessaloniki 2015 ISSN:2241-5106

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

157 ISSN: 2241‐5106 

Oùvalemonde?Réfectionssurlanature

Etl'avenirdumondemoderne

GΕORGΕCONTOGΕORGIS

1 Laréponseàlaquestiondesavoircequeseral’avenirdumondeactuelprésuppose,

premièrement, l’existenced’unegnoséologieglobale,d’unsystèmedeconnaissancequidéfi‐nisse les phénomènes et établisse une typologie de leur développement évolutif, indépen‐damment de toute conjoncture. Et deuxièmement, dans ce cadre, cela présuppose aussi laconnaissancedelanatureetdustaded’évolutiondenotreépoque.

Pourcequiestdupremierpoint,jeconstated’embléequelamodernitéesttotalementdépourvue d’une gnoséologie qui mettrait en évidence la biologie du phénomène social.D’ailleurs,ils’estavéréqueceuxquiontentreprisdanslepassédeformulerune«philosophiedel’histoire»,selonlenomdonnéàcetteentreprise,ontéchouédansleursapprochesetquepourcela,leursprévisionsontétédémenties.

Enréalité,sinouscherchonsuneréponseàlaquestiondesavoiroùvalemonde,jenecroispasquequiconquepuisseaffirmertrouverquelquepartquelqu’un,parmilespenseursdelamodernité oumêmedel’Antiquité ,quisoitsusceptibledenouséclairersurcetteques‐tion.

Àcetteremarquevients’ajouterl’absencedelasecondeconditionquenousavonspo‐sée,àsavoirquenotreépoquen’estpasinscritedansunstadeévolutif.Onconsidèrequ’ellecommence à la Renaissance et se termine au temps présent. Le présent estmis en valeurcommeétantsupérieuraupasséàtoutpointdevue,etcommeétantlestadefinal,ausensoùle futurne laissepasseprofiler lamoindreperspectived’unemutationdumondeversuneépoquedifférentedupointdevuetypologique.C’estainsiquelaproblématiquedutraitementdesquestionsdelaviesocialeestlimitéeaucontextedusystèmesocio‐économique,politiqueetaxiologiquequenousvivonsactuellement.Systèmequi,endernièreanalyse,estceluiquiadébutéà laRenaissance,aétémisenformepar lesLumièresets’est fixéaucoursde lapé‐riodesuivantejusqu’ànosjours.

Cependant,onpeutsedemandersileschosessontvraimentainsi:sil’humanité,aprèss’être débarrassée de la féodalité, en est finalement venue directement à l’époque del’achèvement anthropocentriqueet, par extension, a atteint les limitesde sonévolution.Oubiens’il s’estpasséquelquechosed’autre,quiexplique justement la raisonpour laquelle lamodernitéestdémuniedesinstrumentsgnoséologiquesquiluipermettraientdeconcevoirlanaturesocialedel’homme,deconceptualiserlesphénomènesetdedresserunetypologiedel’évolution.

2 Jem’empressededéclarerdès ledépartque je suisd’avisque lemondedenotreépoquen’estpascapabledeconstituerunegnoséologiecrédibledel’hommesocialparceque,dupointdevueanthropocentrique,ellevitenfaitunstadeprimairedesonévolution. Jenevousparleraipasdelarelationfondamentalequiexisteentre l’évolutionanthropocentriqueetlescapacitéscognitivesdel’homme.Jemecontenteraideformulercertaineshypothèsesde

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

158 ISSN: 2241‐5106 

travailqui tirent leurproblématiquedeceque j’appelle lagnoséologiecosmosystémiqueetquiconcernentlaquestiondesavoircequeseral’avenir.

S’interrogersur l’avenirdumondeactuelprésupposeque l’ons’accordesur laphasequ’ilestentraindetraverser.Surcepoint,toutlemondeconvientquenousvivonsactuelle‐mentlaphasedeladémocratielaplusexemplairequelemondeaitjamaisconnueetqueparconséquent, si la démocratie ne nous plaît pas la démocratie représentative, participative,indirecteou,autrementdit,lesystèmeparlementaire ,l’alternativequinousresteestlephé‐nomèneautoritaire.Pourtant,unetelleaffirmationnes’interrogepassurlarelationquiexisteentresociétéetpolitique ouéconomie .Etparconséquent,ellenevoitpasqu’aussibiendansleparlementarismequedansl’autoritarisme,lesystèmesocio‐économiqueetlesystèmepoli‐tique sont structurés en termes de propriété/pouvoir et que cette propriété ou ce pouvoirsontdistinctsde la société.Dans ledomainepolitique, le systèmeest incarnéen termesdepropriétéparl’État.Dansledomaineéconomique,ledilemmeestdesavoirsiceseraleparti‐culieroul’Étatquiposséderaenpropriétélesystème.Danslesdeuxcas,lasociétéoccupeuneplacedeparticulier,elleneparticipepascommepartenaireà laconstitutionetau fonction‐nementdusystème.C’estpourquoielleestappeléeoubienàpasseruncontratdetravailetàcéderenfaitsalibertéaupropriétairedusystèmeéconomique,oubienàjouerunrôlerudi‐mentaired’arbitredanslechoixdupersonnelpolitiquequiencadreral’État/système.

Danscecadre, ladémocratieestdéfinied’après sa fonctionde légitimationducorpsélectoral etdupluralismepartisan.Dansunautre sens, le systèmeactuel est conçucommeirréfutablement démocratique, mais ses politiques peuvent varier. S’il réserve ses biens àquelques‐uns,ellessontoligarchiques,s’illesaccordeauplusgrandnombre,ellessontdémo‐cratiques.Lapossibilitédeladémocratiedeproduiredespolitiquesoligarchiquesestconsi‐déréecommeallantdesoi,puisqueleursélaborationssontinhérentesauxrapportsdeforce.Desrapportsdeforcequirelèventdeladynamiqueextra‐institutionnelledelarelationentreceuxquipossèdentlapropriétédusystème économiqueetpolitique ,d’unepart,etlasociétéprivéedescitoyens,d’autrepart.Danscecadre,lasociétépeutsemettreengrève,manifesterpourfairepressionsurlepropriétairedusystème,maiselleneparticipepasàlaprocéduredeprisededécisions.

3 Autrementdit,laquestiondeladémocratien’estpasévaluéeauregarddesafinaliténidelanaturedelapolitéia letermedéfinitlesystèmesociopolitiqueetpolitiqueautotal .Quelleestlafinalitédeladémocratieetquelleestlanaturedelapolitéiaquiestappeléeàréa‐lisercettefinalité?C’estlalibertéglobale,quisedistingue,selonleschampsqu’ellecouvre,enliberté individuelle, liberté socio‐économiqueet libertépolitique.Quantà la liberté, elle estdéfinie irréfutablement comme autonomie, comme la possibilité de l’individu des’autodéterminerdansledomainedelaviepersonnelle,socio‐économiqueetpolitique.

Onsedemanderadoncsilerégimepolitiqueactuelcultivelalibertéglobale.Ilestma‐nifeste que non. La penséemoderne se vantemême, dans la lignée de Benjamin Constant,d’avoirchoisilalibertéindividuellecontrelalibertécollective/politique,parcequecetteder‐nièreest inférieureà lapremièreetqu’il est clairqu’elle l’annule.Certainsautrespenseursprétendent qu’actuellement, l’individu jouit de la liberté globale. Sauf que la liberté indivi‐duelle est définie comme autonomie et que la liberté sociale et politique est assimilée ausimpledroit hétéronomique .Cespenseursoublientdoncqueledroitn’équivautpasàlali‐berté, parce qu’il nemènepas à l’autonomie. Il délimite simplement le champde la libertéindividuelle etlaprotègelàoùl’individun’estpaslibre parexempledansledomaineéco‐nomiqueetpolitique .

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

159 ISSN: 2241‐5106 

Cetteconclusiondevientclairesil’onexaminelapolitéiadeladémocratie.Nousavonsditqueladémocratie commetoutautresystèmepolitique n’estpasunefinensoi.Ladémo‐cratieestlemoyenderéaliserlalibertéglobale.Ils’ensuitqu’entantquepolitéia,ladémocra‐tie n’est pas compatible avec la constitution du système en termes de propriété, oumêmesimplemententermesdepouvoir.L’individunepeutpasêtrelibresiquelqu’undécidepourlui.Carcela supprime leprincipede l’autonomie.Plusprécisément, ilne sepeutpasque lesystèmepolitiqueappartienneà l’Étatetque lasociétésoitpolitiquement libre.End'autrestermes,l’appartenancedusystèmepolitiqueàlasociétéestuneconditionsinequanondeladémocratie.Danscecas,lasociétédescitoyensestconstituéepolitiquement,elledevientuneinstitutiondurégimepolitique–aulieud’êtreleparticulierqu’elleestactuellement–etelleassume l’exercicede la compétencepolitiqueglobale.Ces remarques signalent ladifférencefondamentalequ’ilyaentredémocratieetanarchie,celle‐ciétantclasséedanslesprojetspo‐litiquesdel’époqueprimaire,pré‐démocratique.

Unautremalentendudirectementliéaussiàlaperceptiondenotreépoqueetdufuturconcernel’identificationquiestfaiteentredémocratieetreprésentation.Ils’agitenprincipede deux systèmes politiques différents, qui ne peuvent coexister dans lamême politéia. Lepoint commun de la démocratie et de la représentation est que la société des citoyens estconstituéeendémos.Maisalorsquedansladémocratie,ledémosassumelacompétencepoli‐tiqueuniverselle,danslareprésentation,ilestlimitéauxseulescompétencesquiconviennentàlaqualitédemandant.Entantquemandant,ledémosdéfinit lecadredespolitiquesgéné‐rales,exerceuncontrôleenattribuantdesresponsabilités,défèreenjustice,révoqueleper‐sonnelpolitique.Aucontraire, le systèmepolitiqueactuel réserveaupersonnelpolitique lasouverainetépolitique,c’est‐à‐direlesqualitésàlafoisdemandantetdemandataire.Laso‐ciétéestunparticulieret,entantquecorpsélectoral,elle légitimesimplement lepersonnelpolitiqueaupouvoir, sur lemodede l’arbitrage.Lepersonnelpolitiquedécidecequiestdel’intérêtdelasociété,cequiseraunepolitiquenationaleouautre.Lasociétépeutmanifestersonoppositiondemanièrenoninstitutionnelle,c’est‐à‐diredanslarue,maisenaucuncasellenepeutobligerlepersonnelpolitiqueàseconformeràsavolonté.Ilressortdecesquelquesélémentsquelesystèmepolitiqueactuelnecontientaucundesélémentsdeladémocratie,nimêmedelareprésentation.

Dupointdevue typologique, il s’agit littéralementd’unemonarchie élective avecunsolidefondementoligarchique.Danscesystème,lalibertéindividuelleasaplace,maispaslalibertésocialeetpolitique.Ilesttotalementfallacieuxd’objecter,commeonlefaitd’habitude,queladémocratieathéniennequia inspiréleconceptn’estpaspossibledenosjoursetquec’estpourcetteraisonqu’elleestclasséecommeprémoderne.Effectivement,l’enjeun’estpasdereveniràladémocratieathénienne,quiaillustrélamiseenœuvreduprojetdémocratiqueà la petite échelle de la cité: l’enjeu est de puiser en elle le principe démocratique et del’appliqueraudomainedelagrandeéchellecosmosystémique,àl'Étatnation.

Pourparlerplussimplement,bienquel’humanitémodernesoitentréedansunephaseunique,celledelagrandeéchellecosmosystémique,elleestabuséeparsessuccèstechnolo‐giques essentiellement, et ne réalise pas que sa biologie anthropocentrique correspond àpeine à la période primaire de son évolution. Plus précisément, cette phrase est statocen‐triqueetnonœcuménique,c’estlaphaseproto‐oligarchiqueetnonlaphasereprésentativeoulaphasedémocratique.Cetteremarquenousamèneàconclurequenotreépoqueneseclassepasà l’èrede l’achèvementanthropocentrique,maisàcellede lasimpleconstructionproto‐anthropocentrique.Celledudébutetnondelafindelacosmohistoireanthropocentrique.Elle

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

160 ISSN: 2241‐5106 

sesitueloin,nonseulementdelaphasepost‐statocentriqueouœcuménique,maismêmedel’achèvementanthropocentriquedanslecontextedustatocentrisme.

Ils’ensuitquesil’époquedelamodernitén’avaitpasétéleprolongement,etdoncunephasedelapériodeanthropocentriquehellénique,celledelapetiteéchellecosmosystémique,etsiellen’avaitpasétédecefaitabreuvéeintellectuellementdelalittératurehellénique,ilneseraitmêmepasquestiond’elleaujourd’hui.Lesystèmepolitiqueseraitappeléautrement,demanièredescriptive,maispasdémocratie.

Onpeut toutefoissedemandersi l’entreprisederétablissementducontenudescon‐ceptsliésàladéfinitiondesphénomènessociauxsertàquelquechose,endehorsdelacuriosi‐téscientifique.D’autantplusquepersonnedenos joursnemanifestepour ladémocratienimêmepourlareprésentationetquelemondeentier,etlascienceaupremierchef,estanimédelacertitudedevivreladémocratielaplusauthentiquequel’histoireaitjamaisconnue.

4. Il est évidentque laquestionde l’avenir, etdonc celledu rétablissementdes con‐cepts,neseposeraientpasavectantd’acuitésinousnoustrouvionsdanslapériodequiapré‐cédélesannées1980.Ques’est‐ildoncpassépetitàpetitavantcettepériodeetquelsboule‐versements,finalement,sesontproduitsdepuis?

Tout lemondes’accordeàpenserquenotreépoquevitdeschangements inéditsquiprécisentleconceptdecrise.Unecrisequi,ilfautlesouligner,neconcernepasl’intérieurdelaphaseàlaquellelemondeanthropocentriquemoderneestarrivéaveclaRenaissance,maissondépassement,lepassageàuneautreépoque.

LaphasequenousavonstraverséedepuislaRenaissancejusqu’auxannées1980s’estprincipalementintéressée,commenousl’avonsvu,àconstruirelesparamètresdelasociétéanthropocentriquesur labaseaxiologique fondamentalede la liberté individuelleetdecer‐tainsdroitssocio‐politiques.Cettelibertéetlesdroitsnetouchaientpasàlapropriétédusys‐tème économiqueetpolitique et,parextension,àsastructure.Ilsuffisait,parexemple,quelesystèmepolitique ou,autrementdit,lepouvoirpolitique soitpossédépardesforcespoli‐tiquesamiesafinqu’ellesoriententleschosesdansl’intérêtdescouchessociales‐lesdéten‐teurs du travail ou de la propriété du système ‐ qui avaient été érigées en dérivés del’économiemonétaire.

Danscecadre,ilétaitnaturelquel’intérêtdel’hommesocialseconcentresurlesrap‐portsdeforcenoninstitutionnelsquiémanaientdeschampsdelasociété,del’économieetdelapolitique.Surleterraindelapolitique,lesrapportsdeforcesesontconcentréssurlepro‐cessusélectoral,puisquec’estde luiquedevaitsortir lepossesseurde lasouverainetépoli‐tique,c’est‐à‐diredel’ensembledusystèmepolitique,quiincarnaitl’État.

Ainsi l’idéologie libéraleou l’idéologiesocialistesedifférenciaient‐ellesquantà leursréférencessociales.Maiselless’accordaientsurl’essentiel,àsavoirquelesystèmeappartientnaturellementetentièrementàuneforcedistinctedelasociétédescitoyens oudeceuxquicontribuentautravail .C’estpourquoionaccusad’exploitationlabaseanthropocentriquedel’économie, le capitalmonétaire le capitalisme , et non la propriété sur le système écono‐miqueetpolitique.Lesangverséaucoursduxxesiècleconcernaitl’enjeudesavoirsilesys‐tèmeéconomiqueseraitpossédéprincipalementparleparticulierouparl’État,etnonlefaitdesavoirsilasociété ousesagents participeraientàsonadministration.

Celaexpliquepourquoileconceptdeparticipationpolitiqueestdéfinisousl’angledutroupeau/delamasseinformelle,oudelastatistiquedel’engagementcommepartisansdesmembres de la société envers ses mentors. Ou pourquoi le système politique est abordécomme équivalent tautologique de l’État, ce qui suggère que la pensée des «modernes»n’envisagemêmepasautitred’hypothèsedetravaill’éventualitéquecesdeuxconceptssoient

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

161 ISSN: 2241‐5106 

distinctsetquelesystèmepolitiquesoitattribuéàlasociétédescitoyens.Laparticipationpo‐litiqueserésumeàunefonctionbornéeàl’exerciced’unepressionoud’uneinfluencesurlesagentsdusystème.Elleneconcernepaslefaitquelasociétédescitoyenspuisses’inscriredemanièreorganiquecommeinstitutiondusystèmepolitique.

Lefaitquelasciencesocialesecontentededécrirelesphénomènesdesonépoque,etcelaenutilisantuneterminologie tiréeducosmosystèmehelléniquemaissansenretenir lecontenu,expliquelaconfusion,voireledéficitquel’onconstatedansl’ensembledel’arsenalconceptuel. Je cite à titre indicatif la confusion entre phénomène politique et pouvoir poli‐tique, entre liberté et droit, entre État et système politique, ou l’approche univoque del’égalité,dutravail,dustatocentrisme,oul’absencedeconceptsfondamentauxetdoncdecon‐ception de phénomènes tels que la société des citoyens, l’œcoumène, la cosmopolis/le cos‐moÉtat,etc.

Néanmoins,lesrapportsdeforcequisesontélaborésdanslecadredelaconstructionproto‐anthropocentriqueontdonnédesfruits.Ilsontmenéàl’adoptiondesfondementsd’unanthropocentrisme primaire, tels que « l’État de droit » l’objectivation du droit et del’administration de la justice et « l’État‐providence » le soutien social à la liberté del’individu ,lasoumissiondutravailàunrégimededroitpublic desortequelalibertéindivi‐duellenesoitpasatteinte ,ainsiqu’àuncertainniveauderedistributionduproduitsocialquisatisfaisaitlarevendicationd’unminimumdeprospéritédelapartdesmembresdelasociété.

5.Cependant,onconstatequedepuislesannées1980,cesrapportsdeforcesontcom‐plètementbouleversésetquecequiaétéconquispendantdeuxsièclesaétérévoquéentrèspeudetemps.

Que s’est‐il passé exactement? À l’époque de la transition du despotisme àl’anthropocentrisme,quis’achèveaucoursdela2èmemoitiédu20èmesiècle,l’essentieldeladynamique socio‐économique et politique se développait au sein de l’État. Par conséquent,dansuncontexteoùlesrapportsdeforcepermettaientd’obtenirdescompromisquiétaientjugésprofitablesà lasociété.Maisaufildutemps,dèsavant lesannées1960etdemanièreévidente à partir des années 1980, des paramètres fondamentaux tels que l’économie et lacommunicationontacquis leurautonomieparrapportaupérimètredel’État,politiquementsouverain,et sedéveloppentdemanièrehorizontaleauniveaude l’ensembleducosmosys‐tèmeanthropocentriquequi,entretemps,aprévalusurl’ensembledelaplanète.Cedévelop‐pement s’accompagnede changements radicauxqui touchent à la quintessencedes déten‐teursdelapropriétééconomique,àlamobilitéducapitaletdutravail,auxfonctionsdusys‐tèmede communication, etc., des changementsquiontpoureffetdebouleverser complète‐ment les rapports de force au détriment de la société. La classe bourgeoise, naguère forceproductiveauseindel’État,estdevenuefondamentalementfinancière etcommerçante ,touten revendiquant une place d’associé concurrentiel de l’État dans le système international.Cettenouvelleplaceluipermetdedictersavolontéausystèmepolitiquedel’État,d’exigerdelaclassepolitiquequesonintérêt,aulieudeceluidelasociété,soitprisencomptedanslebutdelapolitiqueLadoublesouverainetéquel’Étatdelamodernitérevendiquaitpourlui‐même‐faceà«l’autre»Étatetfaceàlasociété‐aétéabolie,puisquesasouverainetéextérieureaétésensiblementréduitedufaitdelamobilitéhorizontaledes«marchés»etdusystèmetechno‐logiquedecommunication,etquesasouverainetéintérieureaétéenfaitpriseenotage.

Ainsileconceptde«mondialisation»désigne‐t‐ilquelquechosedetrèsdifférentdeceque l’on croit actuellement: le développement du cosmosystème anthropocentrique surl’ensembledelaplanèteet,dumêmecoup,l’autonomisationdesparamètresdel’économieetdelacommunicationparrapportàl’État/systèmeetleurdéveloppementdansl’ensembledu

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

162 ISSN: 2241‐5106 

cosmosystèmeanthropocentrique.Ceconceptdéterminel’achèvementdelatransitionproto‐anthropocentriquedel’hommesocialauniveaudelagrandeéchellecosmosystémiqueetan‐nonce le début de son entréedans la période suivante, qui servirade pont vers, enfin, sonachèvementanthropocentrique.Cependant,ils’agitd’unepériodequis’inscritdansl’époquestatocentriqueducosmosystèmeanthropocentriqueetnondanssaphasesuivante, laphasepost‐statocentrique/œcuménique.

6.Laquestionessentielleestdesavoirsilebouleversementdesrapportsdeforceentresociétédescitoyensetdétenteursdelapropriétédel’économieetdelapolitiqueestdûàlatoute‐puissancedesmarchésouàd’autresraisons.Monapprocheestquelatoute‐puissancedesmarchésn’estpasoriginelle/n’estqu’undérivé.Ellerésultedufaitque,alorsquedespa‐ramètresfondamentauxducosmosystèmeanthropocentriquetelsque l’économieet lacom‐municationontatteint leur«âgemûr»etsesont transportésdans le futur, lessociétéssontrestéesenferméesdansdesstéréotypesaxiologiques,descertitudesidéologiquesetdesinsti‐tutionsquidatentdel’époquedelatransitiondelaféodalitéàl’âgeproto‐anthropocentrique.

Cetteréalitécontradictoire,quel’onconstatedansdespériodesdetransitiond’ordretypologique, soulève une question majeure: l’ancien l’équilibre entre société et économiepeut‐ilêtrerétablisansqu’ilyaitréajustementdelarelationentresociétéetpropriétééco‐nomique,etnotammententresociétéetsystèmepolitique?Sûrementpas.

Alors,quefaut‐ilfaire?Certainsproposentla«mondialisation»desmouvements;mais,commecelaad’ailleursétédémontré,elleaavortéparcequ’ellereposesurl’ancienrégime.D’autresinvoquent«l’émancipation»dessociétéslocales;maiscelamèneparnatureàladis‐persion,aumorcellementduprocessuspolitiqueet,demanièreconnexe,à l’affaiblissementdelasociétédescitoyens.Deplus,cepointdevuenégligelefaitquenotreépoqueanthropo‐centrique a laissé derrière elle la petite échelle cosmosystémique et s’est reconstituée à lagrandeéchellecosmosystémique.Cequisignifiequeleretouràl’institutionpolitiquedesso‐ciétés sur la base de la petite échelle est tout simplement une régression. Enfin, nombreuxsontceuxquiavancentleprojetd’une«gouvernancemondiale»;maisenréalité,celafavoriseun gouvernement de facto des groupesd’intérêts et, en fait, des détenteurs de la propriétééconomique, conjointement aux pouvoirs politiques des États. Ce point de vue ne proposemanifestementpaslaconstructiond’uncosmo‐Étatquiposeraitsurdesbasesréglementairesl’économie cosmosystémique dans son ensemble et la communication. Et c’est naturelpuisque, commenous l’avonsvu, laphaseque traversenotreépoqueabordeàpeine lapé‐riodedustatocentrismeprimaire:autrementdit,elleestloindelaphasepost‐statocentriquede l’œcoumènequiplace le systèmepolitiqueauniveaud’un cosmosystèmeetnon simple‐mentsurleterraindel’État.C’estpourquoilechoixdela«gouvernance»accentueraitencoredavantagel’impuissancepolitiquedessociétéspuisquelepouvoirpolitiqueseraitencorepluséloignéd’elles.

Parconséquent,lasolutiondoitêtrerecherchéedanslecontextestatocentrique,c’est‐à‐direàl’intérieurdel’Étatetenliaisonaveclaproblématiqued’uneplusgrandeémancipa‐tiondelasociété,sousl’angledelaliberté.Jepenseàlaperspectivedel’institutionnalisationpolitiquede la sociétédes citoyenset,parextension,à la simulation représentativedu sys‐tèmepolitique.Celaentraînelatransformationdelasociétéeninstitutionpolitiquedurable,desortequesavolontésoitpriseencomptedemanièreeffectivedansleprocessusdeprisededécisions;soninstallationdanslesystèmepolitiqueentantquepartenaire,aulieudesonmaintiendanslerégimedeparticulier;lepositionnementdel’individunonpasfaceàlacol‐lectivitéqu’exprimedemanièreunivoqueledétenteurdupouvoirpolitique,maisàl’intérieurdelacollectivité.

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

163 ISSN: 2241‐5106 

Souscetangle,leconceptderéférendumestappréciécommeétantuneinstitutionquiseclasseaustadepré‐représentatifet s’inscritdans la typologieoligarchique.Eneffet, ilneprésagepaslamutationreprésentativedusystèmepolitique,puisqu’ilnemodifiepaslastruc‐turede la relationentresociétéetpolitiqueetn’instituepas la sociétédescitoyenscommeinstitutiondurable,quotidienne,dusystème.

Cetteinstitutionnalisationpolitiquedelasociétédescitoyensseraédifiéedanslefuturauniveaude la technologie.C’est làque le systèmepolitique seconstitueraet fonctionneraquandviendral’heuredelareprésentationet,ensuite,deladémocratie.

Onpeutsedemandersi,danslesconditionsprésentes‐àsupposerquelelégislateuroulasociétéquisoulèveralaquestionexiste‐lesystèmepolitiquepourraitsimulerlarepré‐sentation.Laréponseestassurémentaffirmative,encesensquenouspouvonsorganiseruneconsultation permanente et recueillir la volonté sociale par le moyen des sondages.L’instauration du «démos des sondages», de la délibération «démoscopique» de la société,nouspermet de connaître la volonté de la société des citoyensdemanière très précise. Endernièreanalyse,l’objectifn’estpaslamanière rassemblerlasociétésuruneplace ,maislaconsultationetlarécolte,d’unecertainefaçon,delavolontésociale.

Lavaleurdecette idéenerésidepastantdanssamiseenœuvrequedans lesobjec‐tionsqu’ellesuscitechezceuxquil’entendent.Ilestmanifestequelalogiqueoligarchiquese‐lon laquelle le collectif est abordé, un collectif dont nous sommes pourtant membres, re‐poussetoute idéedereconsidérationduconceptdepeuplesous l’anglede lasociétédesci‐toyens.Ilestévidentquelesystèmeaxiologiquedenotreépoquenecontientpasleprojetre‐présentatifniceluideladémocratie.C’estpourquoi,commejel’aidit,personnenemanifestepourlesrevendiquer.

7.Cetteconsidérationmontreque laproblématiquedupassageà laphaseanthropo‐centriquesuivante,cellequiremettralasociétésurledevantdelascènepolitiqueàlaplacedes«marchés»,concerneuneperspectiveàmoyenterme.Dansl’avenirimmédiat,lessociétéstenterontdes expériencesdans l’axede ladéontologiede la politique et de laprotestation,avecpourenjeu l’alternancedespartisaupouvoir.Celle‐ciseraassurémentmarquéepar lerejetdesactesdupartiaupouvoiretnonparuneidéologiequelconque.Ilfaudraunboulever‐sementimportantdel’acquissocialdanslespaysquisontàlatêtedudeveniranthropocen‐triquepourquesoientcrééeslesconditionsd’uneharmonisationduprojetdessociétésavecl’avenirdel’évolution.Lechangementdeparadigmepolitique,pourlessociétés,s’inscritdansun processus très lent qui suit les évolutions. Il suffit de songer combien il est difficile deprendreconsciencedel’évidence:quelecontenudesdécisionspolitiquesseraitfondamenta‐lementdifférentsilasociétédescitoyensdevait,auminimum,consentiràcelles‐ci.

Entoutétatdecause,laproblématiquedel’évolutionanthropocentriquedanslecadredelapériodestatocentriqueenseignequelessociétésrecherchentl’incorporationinstitution‐nelledeplusenplusgrandedanslapolitéia,enmêmetempsqueledéveloppementcosmosys‐témiquedeplusenplusimportantdelapropriétééconomique.Etcelaparcequecetteincor‐porationestlaconditionsinequanon,dupointdevuesémiologique,dumaintiend’unéqui‐libreentresociétéetéconomie,quigarantiraoumêmeélargiral’acquisdelalibertéetdelaprospéritédelasociétédescitoyens.Cen’estqu’endépassantlestatocentrismeetparlepas‐sageàlaphasedel’œcoumène,c’est‐à‐direparlareconstitutioncosmosystémiquedusystèmepolitique,quecetenjeuseraposésurd’autresbases.Cetteperspectivemacroscopiquedude‐venirévolutifdenotreépoqueconfirmeprécisémentladynamiquedelatransitionquis’ouvreàl’horizon:lepassagedelamonarchieélective,avecsonfondementoligarchiquesolide,dans

Πάπυροι - Επιστημονικό Περιοδικό Papyri - Scientific Journalτόμος 4, 2015 www.academy.edu.gr

volume 4, [email protected]

Oùvalemonde?RéfectionssurlanatureEtl'avenirdumondemoderne

164 ISSN: 2241‐5106 

laquellel’humanitévit,sousformedepenséeuniqueetsouslenomde«démocratie»,àlare‐présentationet,enperspective,àladémocratietoutcourt.

Cependant,mêmesi,àmonavis,cetteévolutionestinéluctableàlongterme,ilseposeunequestiond’unautreordre: les sociétésdenotreépoqueattendront‐ellesque les condi‐tionsmûrissentpourprendreenmainleurdestin,cequisignifieéventuellementqu’ellesse‐rontamenéesàunemisèredetypeinsurrectionnel,oubienmobiliseront‐ellelapartiecogni‐tivedeleurcerveaupourprécipiterlesévénements?Car,silesstadesdelabiologieanthropo‐centriquesontclairementprédéfinis,nouspouvonsnéanmoinssupposerquel’installationdel’hommeactueldansl’environnementintelligentquedictentlesexigencesdelagrandeéchellecosmosystémique peut entraîner, sous certaines conditions, une réduction du temps de latransition.Etdecefait,minimiserlesconséquencesdubouleversementdesrapportsdeforce.

Toutefois,cettehypothèsepasse,commenousl’avonsdéjàsuggéré,parunerévolutiondans le domaine des concepts. Même si l’homme moderne imbu des certitudes de notreépoque trouve cela paradoxal, il faudra inévitablement rétablir le contenudes concepts, desorte qu’ils traduisent les phénomènes sociaux dans la lignée de l’expérience cosmosysté‐miquequilesafaitnaîtreetlesaléguésaumondemoderne.Jemeréfèreàlagénéalogiehel‐léniquedesconcepts,c’est‐à‐direaucosmosystèmeanthropocentriqueàpetiteéchelle.Souscetangle, lareprésentationet ladémocratienesontpasdespolitéiasprémodernes.Simple‐ment,leurtempsrelèvedufuturdenotreépoque,etc’estpourquoiellessontincompatiblesavec laphasequecelle‐ci traverse.Sinotreépoqueaconquis lagrandeéchellecosmosysté‐mique,dupointdevuedel’évolutionanthropocentriqueellevitàpeinelestadedunouveau‐né.

Jecrainsfort,également,quel’intelligentsianesoitpasprêteàselancerdanscetteen‐treprise.D’ailleurs,ilestbienconnuqu’ellesuitlesévénementsetlesdécritensimpleobser‐vateur.Cetteconstatationexpliquel’absenced’unegnoséologieglobalequinesecontenteraitpasdepromouvoirleprésentcommeparadigmearchétype,maisconsacreraitunsystèmedeconceptsetunetypologieévolutivedufaitsocialcompatibleavecsa«biologie».

Quoiqu’ilensoit,jepensequel’avenirimmédiatferaremonteràlasurfacelanécessitéd’unnouveau«contrat social»qui annulera la constitutiondu systèmesocio‐économiqueetpolitiqueen termesdepropriétédistinctedemanièreunivoque.Un contratquiprendraenconsidération le fait que la simple liberté individuelle et les droits socio‐politiques quil’accompagnent,quienfermentl’hommesocialdanslestatutdeparticulier,laissentlechamplibreaupropriétairedusystèmededéciderenpremieretendernierressortdesondestin.Larencontredel’hommesocialavecla libertésocialeet lalibertépolitique,c’est‐à‐direaveclareprésentationet,au‐delà,ladémocratie,estprécisémentdestinéeàêtrelaconditionnéces‐sairedesondésengagementdupasséetdesonpassageau futur.Unpassagequin’annoncepaslafindelapropriété,commeonpourraitlepenser,maislefaitquelasociétédescitoyensrécupérerapartiellementoutotalementlapropriétédifférenciéesurlesystèmequilaconduit,elle‐même ou sesmembres, à passer des contrats de renonciation à la liberté. Ce passageprometcependantl’harmonisationdel’économieavecl’intérêt,voirelavolontédelasociété.

Souscetangle,lesdécenniesàvenirserontextrêmementintéressantesaussipourlespenseurs,quiserontappelésàélaborerdenouveauxinstrumentsgnoséologiquessusceptiblesdedécrire lesphénomènes,envoyantaumausoléede l’histoire lamarque idéologiquede lasciencemiseaupointparlesLumières.