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1 Les technologies de la société de l’information (TIC/SIG) au service de l’aménagement et du développement des territoires en Afrique de l’ouest Philippe Vidal Françoise Desbordes

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Les technologies de la société de l’information (TIC/SIG) au service de l’aménagement et du développement des territoires

en Afrique de l’ouest

Philippe Vidal Françoise Desbordes

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Cet ouvrage repositionne le contenu d’une série de cours qui ont été dispensés pendant trois années aux étudiants du DESS « Aménagement, Décentralisation et Développement Territorial » de l’ENEA, par Philippe Vidal pour la partie TIC et Françoise Desbordes pour la partie SIG et cartographie, interventions financées par PROSENSUP (projet d’appui à l’enseignement supérieur professionnalisé au Sénégal) dans le cadre de la mise en place de ce nouveau DESS. Les technologies du numérique (TIC/SIG) sont envisagées ici sous un angle d’approche particulier, celui de l’aménagement et du développement des territoires. Réunir dans un même ouvrage ces deux volets est une démarche qui s’appuie sur l’observation des évolutions en cours. On constate en effet un besoin toujours plus grand de travailler à la fois avec les SIG pour bénéficier d’un accès structuré à l’information territorialisée et avec les TIC car leur transversalité permet tout à la fois de traiter des questions de développement économiques, social et citoyen. Cet ouvrage se présente donc sous la forme de deux grandes parties. La première, la plus volumineuse, concerne les TIC. Elle met l’accent sur la nécessaire mobilisation des acteurs publics locaux africains pour répondre aux nouveaux défis de la généralisation des TIC sur leur territoire. Elle soulève les enjeux fondamentaux pour l’économie et le social en termes d’équipements, de contenus et d’usages. La seconde porte sur les SIG. Elle défend l’idée que l’accès structuré à l’information territorialisée devient primordial pour l’aide à la prise de décision. Les « système d’intelligence territorial » viennent en appui des collectivités pour réaliser des diagnostics, imaginer des scénarios, définir des politiques. Les techniques d’information graphique et géographique permettent de transmettre cette connaissance et de se donner un moyen d’engager un travail collaboratif. Les technologies du numérique se mettent, dans ce cas, au service de l’observation dynamique des territoires. Cet ouvrage met en évidence la nécessité pour des professionnels de l’aménagement du territoire d’acquérir une connaissance de ces technologies, qui leur permette d’évaluer les facteurs contextuels qui en conditionnent l’usage et de définir le rôle qu’ils entendent jouer dans leur adoption de pour les mettre au service de leur politique.

INTRODUCTION GENERALE

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Les pouvoirs publics locaux face à la société de l’information

Quelles perspectives africaines?

SOMMAIRE

INTRODUCTION

1– LES COLLECTIVITES LOCALES FACE A LA SOCIETE DE L’INFORMATION 1.1 Le rapport TIC territoires : quelques repères 1.2 Quelques pistes pour construire une stratégie territoriale TIC 1.3 Quel(s) rôle(s) pour les pouvoirs publics ? 2– L’INFRASTRUCTURE ET L’EQUIPEMENT : DES SOLUTIONS ADAPTEES A L’AFRIQUE 2.1 Doter les territoires d’infrastructures de télécommunications à haut débit : quels enjeux ? 2.2 Petit glossaire technique 2.3 Quelles problématiques africaines ? 2.4 Quel(s) rôle(s) pour les pouvoirs publics ? 3– L’ACCES COLLECTIF AUX TIC, LIEUX D’APPROPRIATION ET DE FORMATION 3.1 L’accès collectif : pour une appropriation citoyenne de la société de l’information 3.2 Cybercafés et espaces publics numériques en Afrique, quelles spécificités? 3.3 Quel(s) rôle(s) pour les pouvoirs publics ? 4– ACCEDER OUI, MAIS A QUOI ? DE L’IMPORTANCE DES SITES WEB COMMUNAUX 4.1 Des contenus territoriaux sur les nouveaux supports numériques 4.2 Un contenu adapté aux problématiques africaines 4.3 Quel(s) rôle(s) pour les pouvoirs publics ? 5– STRUCTURER UNE ECONOMIE DES TIC A L’ECHELLE DES TERRITOIRES 5.1 L’économie des TIC, une réalité aussi africaine 5.2 Le rôle des pouvoirs public : Apporter une réponse concrète aux besoins des PME/PMI et aux commerçants

CONCLUSION

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Introduction

Isolement économique, exclusion sociale, désengagement civique... les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) ne suffiront pas à elles seules à provoquer une inversion des phénomènes. Mais les TIC peuvent être considérées comme des leviers de développement. Leur caractère transversal, leur souplesse d’utilisation autorisent ce raisonnement. Reste aux pouvoirs publics la responsabilité d’insuffler la dynamique quand elle manque, de soutenir les initiatives, souvent nombreuses, engagées par la société civile quand les énergies sont là, et de favoriser les conditions de mise en place d’une e-économie à l’échelle des territoires. En caricaturant un peu, il existe deux grandes façons, pour l’acteur public local, de concevoir son investissement en matière de TIC : • Soit il procède au coup par coup, inaugurant un cybercentre ici, favorisant le développement d’une zone économique (incubateur) dédiée aux TIC là, bref, faisant finalement l’économie d’une stratégie cohérente et globale à l’échelle de son territoire;

• Soit il engage les conditions d’une politique globale, ne focalisant pas sur le seul aspect infrastructurel, économique, social, éducationnel ou administratif mais essayant d’avancer sur tous ces chantiers en simultané.

Cette partie se donne pour ambition de brosser quelques dimensions essentielles de l’investissement des pouvoirs publics locaux en la matière. Il n’est pas dans nos objectifs de donner une quelconque leçon de chose, ne serait-ce que parce que ce travail n’est pas le produit de techniciens des collectivités mais bien celui d’un enseignant-chercheur d’une université et d’un laboratoire de recherche français (U. du Havre -CIRTAI). Simplement, que les exemples servant de support à ce travail soient issus de France, du Sénégal, du Mexique, du Brésil ou d’ailleurs dans le monde, ils illustrent des manières de faire qui ont pour dénominateur commun une réflexion en amont de la part des acteurs publics locaux et des techniciens territoriaux. Cette partie n’est donc pas - ni de façon explicite ni de façon implicite— un catalogue de bonnes pratiques (best practices) mais bien des observations destinées à éclairer un certain nombre d’options privilégiées çà et là dans le monde. A charge ensuite pour les lecteurs de tirer les enseignements de ce manuel qui s’adresse aux étudiants, aux élus et chefs de projets TIC au sein des collectivités locales et de façon plus générale à tous ceux qui ont des responsabilités dans l’aménagement de leur territoire.

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Pourquoi pressent-on la nécessité d’une réponse publique adaptée aux besoins africains ? Simplement parce que nous considérons que l’innovation technique et sociale est avant tout une innovation territoriale. Nous prenons donc le parti d’une nécessaire adaptation des stratégies publiques aux contextes territoriaux directement concernés. En définitive, l’idée consiste à considérer qu’il peut y avoir une société de l’information à l’africaine, à la sénégalaise, etc., et qu’il appartient aux acteurs publics locaux de faciliter son émergence. Nous considérons même que cette posture est la seule façon de se prémunir du danger du dogmatisme techniciste souvent à l’origine de stratégies inefficaces. Ce travail s’organise autour de cinq grands chapitres :

• Le premier situe le rôle et la responsabilité de l’acteur public local dans la mise en place d’une stratégie TIC

• Le deuxième aborde la question infrastructurelle et les différentes options qui s’offrent aux choix des décideurs

• Le troisième porte sur la question de l’accès collectifs aux TIC comme lieux d’appropriation et de formation

• Le quatrième met l’accent sur l’importance de la production de contenus sur les sites web communaux

• Le cinquième concerne la problématique de la structuration d’une économie des TIC à l’échelle des territoires

Chacun des chapitres comporte des éléments de cadrage nécessaires à la compréhension des problématiques ainsi que des illustrations (photographies et figures) issus de cas concrets. Ils sont ponctués par un entretien avec un expert du champ considéré (universitaires, chefs d’entreprises, techniciens territoriaux, etc.)

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1- Les collectivités locales face à la société de l’information

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OBJECTIF � Société de l’information et Territoires : poser les bases d’une réflexion

1.1 Le rapport TIC et territoire : quelques repères

La société de l’information : un projet politique avant tout La société de l’information est une idée, un concept donnant lieu à de nombreuses réflexions scientifiques, mais aussi et avant tout politiques. Largement accompagnée par les gouvernements , ce sont les États-unis qui ont en premier développé des politiques incitatives en matière de société de l’information (National Information Infrastructure) visant à fournir les moyens techniques favorisant l’appropriation des TIC par l’ensemble du corps économique et social du pays. La Commission Européenne a elle aussi très rapidement réagi ainsi que la totalité des gouvernements des pays de la planète au Nord comme au Sud. L’expression « société de l’information » correspondrait à la fois à une rupture avec un autre modèle de société qui pourrait par exemple être celui de la société de post-consommation et à l’invention d’un autre modèle qui serait dominé par la circulation de l’information grâce à des médias électroniques toujours plus performants. La société de l’information est également une réalité économique (la nouvelle économie, la net économie, l’économie du savoir) et sociétale (on parle de démocratie électronique, d’intelligence collective) qui tend à concerner la majeure partie de la planète. Les domaines de l’éducation, de la formation, de la culture, ou encore l’organisation du travail enregistrent une insertion toujours plus grande des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) dans chacun des secteurs. Le plan d’action africain vient d’ailleurs d’être prononcé et annonce une prise de responsabilité encore plus grande dans la mise en œuvre de politiques volontaristes, proposant un cadre d’action global aux États, mais invitant également les collectivités à s’inscrire dans une logique de participation active à cette société de l’information

Les TIC : un secteur dominé par la technique L’acronyme TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) renvoie à un ensemble de technologies numériques transmises par des supports de plus en plus innovants et mobiles. En 2003, l’OCDE regroupait les TIC en trois familles : • L’informatique (équipements, services et logiciels) • Les télécommunications (équipements et services) • L’électronique (composants, électronique professionnelle, électronique grand public). Les TIC permettent de créer des données informationnelles, de les traiter, de les transporter et de les stocker sur différents dispositifs. Cette information joue désormais un rôle crucial dans le fonctionnement des organisations, qu’elles soient publiques, privées ou associatives.

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Les pouvoirs publics face à la société de l’information Que l’on se réfère aux TIC ou que l’on évoque la notion de « société de l’information », ce qui apparaît très clairement dans l’esprit des pouvoirs publics, c’est la question de leur responsabilité dans la mise en place d’une action volontariste sur leur territoire. Ceci est vrai même si le domaine est marqué, faute d’évaluation convaincante, davantage par des espérances que par des certitudes. Deux types de considérations sont alors généralement privilégiées : • Soit les TIC sont perçues d’un point de vue strictement structurel, au même titre que les routes, le rail, les réseaux d’eau (…). On les considère alors comme des atouts additionnels pour le territoire.

• Soit les TIC sont envisagées de façon plus globale au sein d’un projet de territoire. Les préoccupations des acteurs publics se posent alors davantage en termes d’expression locale/régionale de la société de l’information. Dans les deux cas la question peut s’envisager en termes de recomposition territoriale.

1.2 Quel(s) rôle(s) pour les pouvoirs publics

Le rapport TIC/Territoire : entre excellence économique et solidarité territoriale Les TIC dans leurs rapports aux territoires sont traversées simultanément par deux idées centrales qui s’articulent autour du couple paradoxal concentration/redistribution. Assez tôt, s’est aménagée une dialectique complexe où les TIC ont été considérées, d’une part, comme un moyen d’augmenter la concentration des capitaux, des moyens et des hommes dans et autour des grandes métropoles - donc renforcer leur pouvoir économique - et d’autre part, un autre argumentaire où les TIC contribuaient à redynamiser les zones les plus reculées. Ce jeu dialectique un peu paradoxal marie à la fois recherche de l’excellence économique et exigence d’une solidarité territoriale. État et collectivités territoriales développent dès lors des stratégies conditionnées par le double souci d’équité territoriale et de performance économique.

La société en réseaux : attention aux mythes simplificateurs ! Les réseaux de télécommunication s’inscrivent dans l’espace géographique, ils maillent le territoire. Avec eux, émergent les mythes simplificateurs sur l’organisation et l’aménagement du territoire parmi lesquels ceux de la transparence et de l’homogénéité spatiale. Contrairement aux autres réseaux, les réseaux de télécommunications ne « marquent » pas le paysage ce qui contribue à créer le mythe de la neutralité spatiale. Par analogie, découle le mythe de la déterritorialisation des échanges, né de l’instantanéité des relations dans des espaces sans distance. Pierre Lévy parle ainsi d’une économie de la déterritorialisation ou de la virtualisation caractéristique du cas de la finance. De la déterritorialisation naît un autre mythe simplificateur : celui de la reterritorialisation ou la restructuration spatiale par les technologies de l’information.

Recompositions territoriales et TIC Dans un environnement institutionnel décentralisé ou en voie de décentralisation, se posent notamment des enjeux de recompositions territoriales. L’État voit son rôle se redéfinir, de même que les collectivités locales. On pense de plus en plus en termes de gouvernance territoriale, avec des coopérations plus fortes entre collectivités d’un même pays et avec des collectivités d’autres pays (coopération décentralisée). Lorsqu’on croise ce constat avec les enjeux annoncés par les TIC, on sent bien la nécessité de la formalisation d’un savoir-faire au sein des exécutifs territoriaux en termes techniques, organisationnels et prospectifs.

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Les TIC à l’échelle locale, une compétence en cours de négociation : de l’importance d’un « chef de file » Il est clair que les démarches innovantes reposant sur les TIC mettent volontiers en avant la figure de l’élu, toujours à la recherche de ressources politiques nouvelles. De par leur transversalité, leur propension à s’articuler à un secteur bien déterminé, les TIC ne peuvent être considérées comme un « bloc de compétences » revenant à un acteur en particulier. Il n’y a finalement pour l’acteur public local ni obligation ni interdiction de s’investir dans ce type d’action. La reconnaissance de l’acteur ne passe donc pas par une attribution a priori par l’État mais par la capacité de chacun à développer et porter des actions en la matière. Les TIC deviennent de fait une « compétence » en cours de négociation avec finalement quatre grandes motivations pour les élus : • D’abord, une réelle conviction de la nécessité d’engager une action volontariste sur le territoire administré.

• Ensuite, tirer le meilleur parti des opportunités de financement nationaux et supra nationaux qui se présentent à eux,

• Également, décliner une vision particulière de l’investissement de la collectivité dans une société de l’information souvent annoncée comme globalisante

• Enfin, bénéficier des retombées en terme d’image et de marketing territorial qui accompagnent systématiquement ce type d’initiative.

Éviter l’écueil du « Prêt-à-penser » Dans un monde souvent qualifié de global, les technologies du numérique ne sont pas seulement les vecteurs d’une uniformisation planétaire. Elles permettent aussi l’expression de dynamiques territoriales spécifiques et représentent, en définitive, une opportunité pour rompre de manière originale avec les formes classiques d’isolement et d’exclusion. Des modèles alternatifs de développement social et économique voient le jour à différents endroits de la planète. Dans cette perspective, il est important de ne pas tomber dans l’écueil du prêt à penser, mais au contraire de réfléchir aux solutions que les TIC peuvent apporter face à des besoins clairement identifiés.

« C’est comme si vous possédiez le monde », Publinet de Tunis,2004 « Branchez vous vivez la Cyber culture le monde est à portée de votre souris » Cyber café de Dakar 2004. Deux exemples de discours alimentant ce mythe de la déterritorialisation. Crédit photo:Philippe Vidal 2004.

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Un schéma présentant les outils, les méthodes et les axes d’interventions d’une agence (ARTESI) dont la mission est d’accompagner les collectivités locales d’Île-de-France dans leur politique TIC (source : Artesi 2006)

1.3 Quelques pistes pour construire une stratégie territoriale en matière de TIC

Tendre vers une stratégie globale de territoire numérique La société de l’information est l’affaire de tous et de chacun. Elle n’est pas une mais plurielle. Les territoires de proximité se doivent de s’organiser pour mettre en place des politiques cohérentes et s’inscrivent finalement dans une stratégie globale de territoire numérique. Une stratégie globale de territoire numérique se structure autour d’un acteur public référent qui joue le rôle de fédérateur auprès d’autres acteurs du territoire (publics et privés). L’acteur public de référence se place en situation de pilotage, c’est lui qui initie un programme d’actions et se donne les moyens de le mener à bien. Pour ce faire, il se doit d’internaliser la compétence TIC au sein d’une structure dédiée plutôt que de faire appel à des experts extérieurs qui n’apporteront que des réponses ponctuelles à des préoccupations qui engagent pourtant la collectivité sur plusieurs années.

Internaliser la compétence TIC au sein de la collectivité territoriale Que ce soit sous la forme d’une agence, ou d’une cellule spécialisée au sein d’un organisme déjà existant, il est essentiel de pouvoir en interne gérer un dossier TIC qui est par définition transversal. C’est pour cette raison qu’il devient nécessaire pour une collectivité de disposer d’une structure clairement identifiée et de se doter de compétences et d’un savoir-faire en la matière.

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Mettre en place une stratégie TIC dans un contexte décentralisé : une approche transversale Dans un contexte décentralisé, il importe de considérer la stratégie TIC des collectivités de façon globale et transversale et non pas de façon sectorielle. De fait, ce vers quoi il faut tendre, c’est un projet qui resitue l’ensemble des composantes de la vie sociale et économique au cœur d’une stratégie de territoire numérique. Dans ce cas de figure, les TIC sont à considérer comme des leviers de développement, en particulier dans le champ des compétences attribuées aux collectivités. Cette approche transversale doit pouvoir prendre sa place au sein d’un triptyque : • Services et contenus • Usages et appropriation • Infrastructures et équipements.

Quel mode opératoire privilégier pour mettre en place une politique de développement local articulée sur les TIC? Parler de mode opératoire conduit forcément vers une impasse. Il n’existe pas de recette toute faite susceptible d’être reproduite en tout point ou en tout lieu d’un territoire. Entre le rural et l’urbain, entre les Suds et les Nords, selon le contexte institutionnel prévalant, selon les moyens dont les acteurs territoriaux disposent, les situations peuvent être assez spécifiques et amener des réponses singulières. Pour cette raison, nous présentons ici non pas des solutions mais simplement quelques options privilégiées par un certain nombre d’acteurs territoriaux dans un contexte décentralisé. En effet dans ce type de fonctionnement institutionnel, au sein duquel se fait ressentir le besoin de contourner un certain nombre de lourdeurs et de rigidité de l’État central, les pouvoirs publics ont de plus en plus besoin de se doter de leurs propres outils pour prendre en compte des besoins spécifiques, liés aux particularismes territoriaux. Ces structures ont pour missions essentielles : • de mobiliser une communauté d’acteurs et de décideurs ; • d’élaborer une vision commune autour d’un diagnostic partagé ; • de produire un programme d’actions qui puisse articuler interventions publiques et privées; • de mettre en place des observatoires d’analyse d’une situation en temps réel; • de réfléchir aux outils d’évaluations ex-ante et ex-post.

Cette structure dédiée apparaît indispensable car elle permet de porter une vision véritable de l’investissement de la collectivité et d’éviter des politiques au coup par coup. Le nécessaire investissement de l’élu Dans la très grande majorité des actions de référence engagées en matière de TIC, les élus tiennent un rôle prépondérant. L’idée consistant à considérer qu’il « ne faut pas rester au bord de l’autoroute technologique » n’est pas opératoire. Elle ne suffit évidemment pas à mobiliser les énergies de la municipalité ni à bâtir une stratégie globale et cohérente pour son territoire. Pour cela, une dimension apparaît incontournable : le nécessaire investissement de l’élu qui est celui qui doit impulser une vision particulière de l’investissement de la commune en matière de TIC.

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1. Pour vous, qu’est ce que la société de l’information ? Y.L. : De mon point de vue, il y a deux façons possibles de répondre à cette question. La première façon est de la considérer en tant qu’utilisateur/citoyen/habitant. Il s’agit d’une société où l’utilisateur lambda peut accéder en ligne à toute information et service et est également acteur dans la mesure où il est capable de s’exprimer en ligne. La seconde façon de considérer la société de l’information, c’est en tant que responsable d’une structure : il convient alors de prendre conscience que toute information ou donnée créée circule, et que cette circulation a pour conséquence majeure de compléter l’information initiale et de l’enrichir en fonction des besoins spécifiques des structures qu'elle traverse. C'est le cas des échanges EDI dans le domaine commercial et ce sera le cas de l'administration électronique. Dans ce dernier cas, ARTESI Ile-de-France a un rôle à jouer dans les échanges à l’échelle de la Région Ile-de-France. 2. Pouvez-vous présenter votre structure ? Y.L. : Notre mission à ARTESI c’est d’aider les collectivités territoriales de la Région Ile-de-France à entrer dans cette société de l’information émergente. Dans ce cadre là, il y a deux grands items. Le premier est la sensibilisation des élus et des décideurs sur les enjeux de cette société de l’information. Le second, c’est au-delà de la sensibilisation, aider les collectivités dans leur action. Pour celà on a développé une méthodologie en trois temps : - Identification et analyse de toutes les initiatives intéressantes en la matière, - Réflexion et structuration en vue de modéliser et définir des méthodologies applicables par tous, - Diffusion de cette méthode et des bonnes pratiques qui puissent être réappropriée par tous les acteurs publics de la région Nous avons mis au point cette méthodologie en trois temps pour le domaine du web public communal, on est maintenant en train de la développer sur les espaces publics numériques et le web touristique régional. 3. Dans le domaine de l’e-administration, peut-il y avoir une synthèse entre l’État et les collectivités territoriales ? Y.L. : C’est en effet la grande difficulté mais non seulement vis-à-vis de l’État, mais aussi entre les administrations infra-nationales. D’un côté il y a des services nationaux (les impôts, etc.) et d’un autre coté il y a les services de proximité (gestion de la petite enfance, etc. ) et tout cela fait l’administration électronique. L’administration électronique centrale elle est relativement simple à mettre en place dans la mesure où elle touche un ou deux ministères. C’est en gros une application à développer par administration. C’est centralisé. En ce qui concerne l’autre extrémité : les téléservices de proximité, la mise en œuvre des applications dépend de chaque collectivité locale. Le problème pour une structure comme la nôtre c’est de faire en sorte que l’ensemble des collectivités locales soient à peu près sur la même longueur d’onde. En effet, l’enjeu c’est finalement d’offrir à tous les citoyens un même niveau de services. En fait, la vrai difficulté est de parvenir à la connexion de tous les téléservices qui mobilisent l’intervention des différentes niveaux territoriaux : communaux, départementaux, régionaux, national.

Cinq questions à … Yannick Landais Directeur Artesi Ile-de-France

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Webographie

Bibliographie

4. Comment éviter l’écueil du prêt à penser idéologique ? Y.L. : Pour cela, nous avons estimé nécessaire de produire un cadre de réflexion susceptible d’être approprié par tous. Si on prend l’exemple des portails internet des collectivités, l’objectif est de faire en sorte que toutes les collectivités disposent d’un site dynamique et évolutif capable de supporter les téléservices. Au lieu de dire voilà "la solution", on a défini avec les acteurs les fonctionnalités minimum d’un site : (diffusion de l’information, développement de l’interactivité avec le citoyen, mise en place des services en lignes). On a réalisé ensuite un cahier des charges type et on a qualifié les prestataires privés (qui font des sites web) quand ceux-ci répondait au cahier des charges. Il ne faut pas imposer une solution technique a priori mais plutôt définir un cadre méthodologique qui permette à chacun de rentrer dans une démarche de qualité. 5. Pour finir, peut-il y avoir une société de l’information de proximité? Y.L. : J’aurais tendance à dire qu’on travaille à ARTESI Ile-de-France pour développer une société de l’information de proximité. Tous les services proposés par les collectivités aux citoyens, ce sont des informations de proximité. Mais nous ne sommes pas encore parvenus à relever le défi de l’e démocratie qui sera un signal fort de la réalisation de cette société de l’information de proximité. Il s’agira de tendre vers une implication plus forte des citoyens dans les décisions locales. C’est l’enjeu à terme mais ce sera difficile car personne n’est vraiment préparé à cela et surtout pas les politiques.

Cheneau-Loquay A. (Dir) Mondialisation et technologie de la communication en Afrique, juillet 2004, Éditions Karthala Cheneau-Loquay A. (Dir) , Enjeux des technologies de la communication en Afrique, 2000, Éditions Karthala Diop Momar-Coumba (dir), Le Sénégal à l'heure de l'information, 2003, Éditions Karthala Vidal Philippe, La Région face à la société de l’information, Le cas de Midi-Pyrénées et de Poitou-Charentes, Thèse de Géographie et aménagement, Université de Toulouse le Mirail. Décembre 2002.

L’observatoire des politiques des TIC en Afrique : http://afrique.droits.apc.org/index.shtml Observatoire des systèmes d’informations, des réseaux et des inforoutes au Sénégal : http://www.osiris.sn AFRICA’NTI:observatoire de l'insertion et de l'impact des technologies de l'information et de la communication en Afrique. http://www.africanti.org/ IAFRIC : Développement Internet NTIC en Afrique http://www.iafric.net/ Fête de l’Internet en Afrique : http://www.f-i-a.org/ TOGUNET : Réseau d’échange et de partage de connaissances des utilisateurs TIC pour le développement au Mali http://www.mali-ntic.com/ BURKINA NTIC le site portail des TIC pour le développement au Burkina http://www.burkina-ntic.org/index.php3 CIPACO : Centre sur les politiques internationales des TIC Afrique du Centre et de l’ouest http://www.cipaco.org Agence Mondiale de Solidarité Numérique http://www.entreprendre.grandlyon.com/Agence_Mondiale_de_Solidarite_Numerique.797.0.html Fonds Mondial de solidarité numérique http://www.dsf-fsn.org/fr/15c-fr.htm ANAIS : Advisory Network for African Information Strategies http://www.anais.org AEDEV : Association e-Developpement, Internet au service du développement durable http://www.aedev.org

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Rôle de l’acteur public local

Les problématiques

Éléments clés - Chapitre 1

Quelques rappels

• Société de l’information : Il n’existe pas une seule définition de la société de l’information (lire les réponses à la première question de chaque interview). Cette expression renvoie à des réalités complexes mais aussi à des mythes trompeurs qu’il s’agit de combattre.

• Prêt-à-penser : Écueil à éviter absolument ! Considérer qu’il existe une recette toute prête conditionnant l’investissement des acteurs publics en matière de TIC conduit à une impasse. Lutter contre le Prêt-à-penser, c’est se doter de ses propres outils de réflexions pour construire une stratégie TIC adaptée aux contextes locaux.

• Les TIC : une compétence en cours de négociation : Au-delà d’une approche strictement technique de l’objet, les TIC sont une compétence en cours de négociation. Dans un environnement institutionnel décentralisé, la transversalité des TIC amène potentiellement tous les acteurs à intervenir sur ce domaine. Pourtant, on sent bien la nécessité d’un chef de file sur ce dossier. L’expérience a montré que se dégagent souvent des leaders naturels de par leur capacité à maîtriser techniquement, mais aussi en terme d’ingénierie et d’expertise, un dossier aussi complexe.

• Territoire numérique : C’est un territoire clairement circonscrit au sein duquel on met en œuvre une stratégie globale de développement numérique intégrant l’ensemble des préoccupations inhérentes à la collectivité (environnement, santé, éducation, économie, culture, etc.).

• Avoir une vision de son investissement dans la société de l’information : L’acteur public local a trop souvent tendance à reproduire sur son territoire ce qui semble bien fonctionner ailleurs. Il se doit de réfléchir à l’apport des TIC dans son projet de territoire en faisant montre de sa capacité à agir de manière prospective.

• Se doter d’outils et de compétences permettant de concrétiser cette vision : Se doter d’une vision ne sert à rien si cette dernière n’est pas empreinte d’un certain pragmatisme. La collectivité doit absolument avoir le souci de l’opérationnalité en développant une démarche programmatique clairement établie, sur la base des besoins du territoire.

• Un rôle de stratège : La collectivité essaie de développer une stratégie cohérente et partagée au sein de son territoire

• Un rôle de fédérateur : La collectivité doit fédérer toutes les énergies présentes sur le territoire autour de sa stratégie

• Un rôle de maître d’œuvre : La collectivité doit se doter d’outils et de compétences permettant de porter sa stratégie.

• Un rôle d’observatoire : Observer la qualité de l’accès, de l’équipement, de la qualité des services rendus et de la diffusion des usages sur son territoire garantit un suivi et une évaluation en temps réel de sa politique TIC.

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La prééminence de la question infrastructurelle La question de l’équipement a toujours été prééminente dans l’esprit des responsables publics. Et pour cause : sans connexion, il est impossible d’accéder aux contenus qui sont diffusés sur les réseaux. Désormais, où que l’on soit, les infrastructures de télécommunications à haut débit sont de plus en plus considérées par les acteurs territoriaux comme relevant du service d’intérêt général. C’est particulièrement le cas en France, mais c’est également le cas dans la plupart des pays développant des politiques incitatives en matière de société de l’information. On part du principe que les zones d’habitat les plus populaires comme les plus huppées ainsi que les secteurs de l’activité économique doivent pouvoir bénéficier d’une couverture réseau adaptée aux besoins de chacun. Les acteurs publics, surtout l’État en Afrique de l’Ouest, essaient de veiller à la présence sur leur territoire de ces infrastructures. • Il s’agit d’une part de faciliter et d’ordonnancer les conditions du marché des télécoms quand celui-ci est massivement et naturellement présent, ce qui concerne surtout les grandes villes les plus peuplées et les plus riches où l’opérateur télécom sont certains de pouvoir rentabiliser les investissements consentis.

• Il s’agit d’autre part d’impulser une politique volontariste et originale dans des territoires a priori marginaux ou pour les zones géographiques ne disposant pas d’attraits majeurs (faibles densités…) pour le secteur privé.

2– Infrastructures et équipements : des solutions adaptées à l’Afrique

Le mythe des effets structurants ou le dogmatisme techniciste

C’est une des croyances qui a longtemps perturbé la lecture des enjeux de l’introduction des TIC dans les sociétés. Les acteurs publics ont souvent focalisés leur attention sur l’infrastructure pensant qu’automatiquement sa seule présence allait entraîner du développement. Or il est important d’éviter de tomber dans deux écueils possibles : • Nier l’importance de la question infrastructurelle dans la société de l’information serait naïf. Les données numériques ont besoin d’infrastructures pour circuler, pour être échangées.

• Faire reposer la question du développement des territoires sur la seule existence de réseaux techniques s’appuyant sur les technologies du numérique l’est tout autant.

2.1 Doter les territoires d’infrastructures de télécommunications à haut débit

OBJECTIF � Apporter quelques éléments de connaissance sur la problématique de l’accès au haut

débit et aux équipements en Afrique.

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2.2 Petit glossaire technique

Les réseaux filaires La fibre optique : La connexion directe par fibre optique est rare. Elle concerne surtout les grandes entreprise, les universités et les centres de recherches et offre plusieurs Gigabits par seconde. Le plus souvent le réseau de fibre optique constitue les épines dorsales (backbones) des pays. L’ADSL : (Asymetric Digital Subscriber Line) offre une vitesse de plusieurs mégabits par seconde. Cette technologie permet de transformer une ligne téléphonique ordinaire existant (analogique) en ligne de transmission de données numériques à haut débit L’ADSL permet à l’abonné de disposer sur une même ligne, en simultané, de son service de téléphonie traditionnelle et de l'Internet forfaitaire à haut débit. Dans beaucoup de pays, le réseau filaire est de trop mauvaise qualité pour permettre le déploiement de services ADSL.

Plusieurs possibilités permettent de se « brancher » aux réseaux. Ici un cybercafé de Puebla (Mexique)

Crédit photo:Philippe Vidal 2005

Des solutions technologiques en évolution permanente RTC, ADSL, RTE, WIFI, VSAT…, il existe aujourd’hui toute une panoplie de technologies permettant d’accéder à haut débit aux réseaux mondiaux. Certains systèmes sont bien sûr plus performants que d’autres. Une offre de débit trop limité interdit certains usages très gourmands en bande passante. Devant cette diversité de l’offre les choix des acteurs doivent être faits de telle sorte qu’ils soient les plus pertinents au regard des besoins exprimés par les futurs usagers. Aujourd’hui, en Europe, la solution XDSL est celle qui semble offrir le meilleur compromis coût/débit. En Afrique, le « sans fil » apparaît comme une solution à la faiblesse des infrastructures filaires de base.

La présence des réseaux techniques sont une des conditions nécessaires au développement, mais certainement pas suffisante. Sans croire au pouvoir magique des TIC dans leur capacité de changement, il faut donc reconnaître aujourd’hui l’importance du secteur dans le développement des territoires.

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Autres termes importants Bande passante : désigne la capacité de transmission d'une liaison, la quantité d'informations en bits/s qui peut être transmise simultanément. On parle généralement de haut débit à partir d'1 ou 2 Megabit/s. Backbone : Il est nécessaire de disposer de backbone (cœur de réseau) pouvant permettre de développer des points d’accès au niveau local. Il correspond à l'ensemble des supports de transmission et de commutation à partir du commutateur d'abonné. Adresse I.P. : Adresse identifiant un équipement raccordé au réseau Internet.

Les réseaux sans fils Le WIFI : (Wireless Fidelity) Il permet de créer un réseau sans fil entre différents équipements informatiques avec des débits allant jusqu'à 54 Mbps. Le wifi est une technologie de réseau informatique sans fil mise en place pour fonctionner en réseau interne Certains FAI fournissent l'accès des zones: gares, aéroports, hôtels, trains, villes..., avec des réseaux Wi-Fi. Ces points d'accès sont des hot spots. Le WIFI permet d’irriguer une commune par exemple en plaçant des bornes sur des points hauts ou sur des édifices (immeubles, etc.) Le WIMAX : (Worldwide Interoperability for Microwave Access). Il fonctionne comme le WIFI mais offre des performances nettement supérieures. Il est moins voué à la connexion individuelle qu’à l’interconnexion entre différents hot spots. Le bluetooth : Le Bluetooth permet d'obtenir des débits de l'ordre de 1 Mbps. Il est une technologie de réseau personnel sans fil d'une faible portée (quelques mètres) permettant de relier des appareils entre eux sans liaison filaire. Le GSM : Le Global System for Mobile Communications (GSM) est une norme de transmission radio-numérique de seconde génération pour la téléphonie mobile LE GPRS : General Packet radio service 3G : système mobile de troisième génération. Ces réseaux permettront d'accéder à une large gamme de services nouveaux, au premier rang desquels un accès rapide à Internet grâce à l'introduction progressive dans les réseaux mobiles de la technologie de communtation par paquets L’UMTS : système de télécommunications mobiles universelles ; dénomination de la norme retenue en Europe pour les systèmes de radiocommunications mobiles de troisième génération, qui permettront d'offrir une large gamme de services, intégrant la voix, les données et les images. VSAT : Very Small Aperture Terminal : Station terrestre réceptrice et émettrice à très petite ouverture d'antenne. Le diamètre de l'antenne ne dépasse pas 2,4 m. Très utilisé en Afrique (cf figure à droite)

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La connexion satellitaire, une piste prometteuse? A court terme, la solution associant satellites et WIFI permet de pallier les faiblesses des réseaux filaires sur le continent. Elle permet d’atteindre des zones peu denses où l’infrastructure filaire fait défaut. A long terme, cela pose au moins trois problèmes : • Cela ne permet pas d’améliorer l’accès au téléphone filaire de masse, et donc de développer l’accès à l’ADSL,

• Cela menace l'indépendance du pays, les satellites étant contrôlés le plus souvent par les pays du Nord,

• Dans les grandes villes, la solution sans-fil revient comparativement plus chère que le filaire puisque le coût de chaque abonné ne baisse pas avec leur nombre.

Le haut-débit en Afrique de l’Ouest : Le rôle prédominant de l’État Une des spécificités de la problématique de l’équipement des territoires en infrastructures de télécommunications haut-débit en Afrique de l’ouest est que ce domaine est largement conditionné par le rôle de l’État. En effet, « le système technique d'Internet est structurellement marqué par son fonctionnement à plusieurs échelles et par la capacité qu’à l’État - en tant qu'acteur majeur de ce système - à établir le lien entre ces échelles » (Bernard 2003).

2.3 Quelles problématiques africaines?

Le GPS : Global Positionning System: Système de localisation par satellite permettant de situer un utilisateur sur une carte. Réseau de télécommunication : désigne un réseau actif véhiculant des services de téléphonie, de transmission de données numériques. Infrastructure de télécommunication : renvoie davantage à la seule présence d’équipements (en particulier de la fibre optique non activée souvent désignée sous l’expression « fibre noire ») en attente d’une éventuelle exploitation par des opérateurs. Fournisseur d'accès à Internet (FAI ou provider) : service commercial qui permet d'accéder à Internet par le biais d'un abonnement.

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Les accès collectifs versus l’accès individuel ? Quelle que soit la technologie permettant l’accès à Internet et aux réseaux mondiaux, il est une constante dans les pays d’Afrique de l’ouest : la problématique de l’accès est avant tout une problématique collective. Le nombre de télécentres, ou de cybercafés est, en tout cas dans les grandes villes assez remarquable. Cette prime à l’accès collectif s’explique en particulier par la faiblesse de l’accès individuel à internet et au téléphone. Les foyers sont assez peu connectés, notamment via la technologie ADSL précisément en raison de la piètre qualité du réseau téléphonique. Se satisfaire de cette situation n’est toutefois pas suffisant. Cette alternative de l’accès collectif ne doit pas être considérée comme une spécificité africaine. Lorsque les africains ont la possibilité d’avoir un accès individuel aux réseaux de télécommunications, il ne s’en privent pas. Il n’y a qu’à constater l’importante progression de l’équipement des africains en téléphonie mobile malgré le grand nombre de télécentres.

L’accès individuel aux réseaux de télécommunication en Afrique passe beaucoup aujourd’hui par le téléphone portable. Crédit photo:Philippe Vidal 2006

Tableau rappelant la forte croissance de la téléphonie mobile en Afrique. Source ITU 2003

Une télédensité encore largement insuffisante Le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (NEPAD) a inscrit parmi ses priorités les plus importantes l’objectif de « Construire et améliorer les infrastructures, y compris les Technologies de l'Information et de la Communication (TIC), l'Énergie, les Transports, l'Eau, l'assainissement ». En 2001, l’objectif était de doubler la densité des lignes téléphoniques pour passer de 1 ligne à 2 lignes pour 100 habitants. Au regard du tableau suivant, certains pays semblent avoir atteint cet objectif (Sénégal). D’autres par contre accusent un plus grand retard. Dans les deux cas il apparaît nécessaire d’engager des actions volontaristes pour doter les territoires de l’accès au haut débit et améliorer la télédensité.

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Connaître et cartographier l’état des réseaux dans les territoires La connaissance de l’état des technologies disponibles sur son territoire est un préalable indispensable. Elle peut permettre par exemple à nombre de professionnels ou même d’habitants de pouvoir choisir en connaissance de cause le lieu où il vont pouvoir développer leur activité ou élire domicile. Cela permet également de pointer les manques afin de justifier par exemple la mise en place d’une stratégie infrastructurelle sur son territoire. Cette cartographie peut ensuite être mise à la disposition (sur un site web communal par exemple) des habitants, des entreprises et naturellement des décideurs. Cette cartographie doit porter su les réseaux filaires bien sûr mais aussi sur les dispositions en matière satellitaire, très répandu en Afrique.

Être en veille sur la mise en place d’un cadre concurrentiel en matière de télécommunications : se doter de compétences juridiques dans le domaine Il apparaît aujourd’hui qu’il n’existe pas encore de cadre concurrentiel clair en matière de télécommunications en Afrique. Actuellement, l’Afrique s’est résolument orientée vers la coopération entre agences nationales de régulation en vue d’harmoniser les politiques réglementaires, ce qui devrait prendre un certain nombre d’années. Il est capital que les collectivités locales soient particulièrement à l’écoute des évolutions afin de pouvoir engager éventuellement des actions structurantes tout en respectant la législation.

2.4 Quels rôles pour les pouvoirs publics ?

Connaître et anticiper les besoins des habitants, des organismes publics et des entreprises de la collectivité Même si l’accès n’est pas généralisé à l’ensemble des acteurs, il importe de faire un repérage quantitatif et qualitatif de la demande. Ce repérage ne saurait être réalisé sans méthode. Celle qui pourrait être privilégiée serait de repérer les besoins vis-à-vis : • Du milieu éducatif local, • Des entreprises locales, en particuliers les entreprises et micro entreprises traditionnelles, • Des foyers, • Des techniciens et des élus de la collectivité locale,

Ces quelques chiffres permettent de mesurer la progression lente du taux de connexions aux réseaux de télécommunication en Afrique. Mais malgré ces progrès, la télédensité est encore largement insuffisante Source CSDPTT-2005

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Favoriser l’accès collectif à la société de l’information En plus du souci de permettre l’accès individuel aux réseaux de télécommunications haut débit, la collectivité peut aussi se mobiliser pour favoriser la mise en place d’un réseau d’espaces publics numériques complémentaires aux cybercafés déjà existants. Cette question d’accessibilité, qui renvoie à la notion de service public universel est un élément fort de la

Mettre en œuvre un agenda local de gouvernance électronique en tirant le meilleur bénéfice des sources de financement pour le développement de projets de coopération décentralisée Conformément aux conclusions issues des conférences régionale Africaine Préparatoire du 2ème Sommet Mondial des villes et des Pouvoirs Locaux sur la Société de l’Information (Bilbao 2005), il est important de connaître les différentes sources de financement possibles, en particulier en sollicitant l’appui de « l’Agence mondiale de Solidarité Numérique ». Cette dernière est un outil opérationnel au service des acteurs de la société de l’information (collectivités locales, entreprises ou d’institutions). Le Fonds Mondial de solidarité numérique est son instrument financier.

• Des hôpitaux et des équipements sanitaires, • Des cybercafés, • Des associations, • Etc. Ce travail de repérage des besoins, outre le fait de permettre de s’appuyer sur des éléments objectifs pour justifier le déploiement d’une action infrastructurelle d’envergure sur le territoire local, permet aussi de remplir le rôle de campagne de sensibilisation aux TIC auprès de l’ensemble de la population. Il permet en outre de développer une démarche qui privilégie le traitement de zones stratégiques.

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1. Pour vous, qu’est ce que la société de l’information ? A.C.L.. : C’est une perspective, le terme même renferme une vertu prescriptive. Celle d’un monde où les activités humaines se réorganiseraient en fonction de la disponibilité de l’information. C’est une conception du monde qui traduit la vision dominante d’une société post-industrielle où l’information et le savoir deviennent les forces motrices de la croissance à la place du travail et du capital. Cette société devrait accroître la qualité de la vie, stimuler la participation politique, promouvoir la cohésion sociale et l’égalité ce qui exprime la pérennité d’une vision linéaire du progrès qui continue à faire comme si le « rattrapage » était possible, comme si les TIC étaient le sésame pour le « bienheureux développement » et la participation à la mondialisation. L’expression sous-entend une certaine dématérialisation. Donc, c’est aussi un slogan et c’est assez largement un leurre parce qu’il faudra toujours de la production, de la matérialité. On ne s’habille pas avec du savoir, on ne mange pas du savoir. On oublie trop vite la matérialité de la vie humaine. Pour autant, il est incontestable que la production des biens et des services fait de plus en plus appel à des échanges de données numérisées. Mais en fait, toutes les sociétés sont des sociétés de l’information, depuis toujours. 2. Quels sont les principaux obstacles à une plus grande pénétration des TIC en Afrique de l’ouest? A.C.L.. : Les obstacles sont de tous ordres ; - matériels, l'insuffisance des connexions internationales et leur inégale répartition, - géographique, - économiques, leur coût, - politiques, le peu d'intérêt de certains Etats pour la promotion des TIC, - sociaux, la faiblesse des niveaux de vie, - culturels, l'analphabétisme etc.. Et pourtant les TIC suscitent un grand intérêt et quand l'accès est possible quelque part, les usages se créent. Mais il y a un obstacle qui demeure, c’est précisément celui de l’accès, problème considéré au Nord comme négligeable alors que cette question est loin d’être résolue en Afrique. En ce qui concerne la connectivité à l’international, il existe une fibre optique le long de la côte ouest jusqu’au Cap mais pas encore jusqu’à la côte Est. Bien sûr la question évolue, rien n’est figé et des projets se dessinent. La plupart des liaisons intérieures se font encore par satellites. Mais la question du dernier kilomètre est fondamentale, c'est-à-dire la connexion effective à l’usager et la pénurie de lignes téléphoniques se fait sentir. Même si les infrastructures existent, encore faut-il que le coût d’accès soit abordable pour les États, ce qui n’est pas tout à fait le cas. Sat3 est utilisé à 10% de ses possibilités. D’autre part, même quand on est connecté, le coût de liaison vers les opérateurs de backbone est beaucoup plus élevé en Afrique que dans d'autres continents puisque le trafic étant faible, les opérateurs publics ou privés africains ont rarement la possibilité de passer des accords de peering (partenariat) qui diminuent les coûts sur les grandes routes de l'information. numérique des territoires. D'autre part, la rareté des points d'échange à l'échelle du continent ainsi que l'habitude d'utiliser des serveurs du nord et des adresses sur yahoo ou hotmail obligent à faire passer tout le trafic par les pays occidentaux. Cet état de fait pénalise aujourd'hui l'usage du haut débit qui implique que les noeuds de connexion soient proches des utilisateurs. Comme partout, en Afrique il faut penser en terme d'aménagement 3. Alors justement, les technologies sans fil représentent-elles une alternative crédible à ce déficit infrastructurel? A.C.L.. :C'est une question controversée. La réussite inattendue de la téléphonie mobile montre la voie selon l’UIT (Union internationale des télécommunications). Le téléphone mobile c’est « l’avenir radieux » pour l'accès universel alors que la téléphonie fixe n’a pas d’avenir selon elle . Le téléphone mobile se porte bien en Afrique mais les services Internet sans fil posent problèmes car les fréquences sont saturées, c’est le cas de Kinshasa où Internet est sans fil à 80%. Tandis qu’on peut tirer autant de câble qu’on veut, les fréquences sont limitées. Pour développer Internet le câble reste important pour le volume de données et la qualité de service. On constate une croissance d’Internet surtout dans les pays africains où il existe un bon réseau filaire ( Sénégal, Ghana, Kenya).

Cinq questions à … Annie Chéneau-Loquay Directrice de Recherches Cnrs-Bordeaux CEAN, Directrice African’ti—Gdri

Net’sud

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Webographie

TWINOMUGISHA A., ALUOCH S., The VSAT Buyer’s guide, a guide for selecting, procuring and implementing VSAT technologies for developping countries. Version en ligne : http://ictinafrica.com/vsat/ BERNARD E. , Le déploiement des infrastructures Internet en Afrique de l'Ouest, Thèse de Géographie, Montpellier III Paul Valéry, Décembre 2003 CHENEAU-LOQUAY A., Les territoires de la téléphonie mobile en Afrique, Netcom, 2001, vol. 15 n° ½, pp. 1-11

Africacomputing : ONG oeuvrant pour l’appropriation des TIC en Afrique, en particulier du point de vue technique (maintenance des réseaux, linux, etc.). http://www.africacomputing.org Observatoire de l’accès Haut débit en Afrique http://africa.grenouille.com/ AfricWifi- Communauté africaine Wireless http://wifi.tu5ex.org/ CSDPTT : Coopération solidarité développement aux PTT http://www.csdptt.org/ AISI : Document d’information de l’initiative de la Société de l’Information en Afrique http://www.uneca.org/fr/eca_programmes/it_for_development/publications/AISIBriefingPaperNo1FR.pdf

Bibliographie

4. La puissance publique a t-elle les moyens des ambitions qu’elle affiche dans la plupart des programmes nationaux ? A.C.L.. : Sans volonté politique, sans État, le développement des usages n'est soumis qu'au bon vouloir du secteur privé et le résultat est bien souvent l'anarchie comme à Kinshasa, où il fallait en 2004 plusieurs téléphones car il n'y avait pas d'accord entres les opérateurs pour l'interconnexion. L'expérience montre qu'on ne peut pas se passer du rôle d'impulsion, des gestion, de chef d'orchestre en quelque sorte qui est celui d'un État pour que s'implantent les infrastructures et les accès, conditions du développement des usages. L'instance de régulation des télécommunication si elle existe et fonctionne, le fait en relation avec les pouvoirs publics qui peuvent soit accompagner le mouvement soit le freiner. On pense au coût beaucoup trop élevé de la bande passante liée à la fibre optique Sat3. La culture du monopole d'État sur les télécommunications dans certains pays est un handicap. On présente aujourd'hui (NEPAD, SMSI) le partenariat public/privé comme la panacée. Le secteur privé demande des politiques d'accompagnement pour permettre l'investissement dans les zones considérées comme les moins rentables ; c'est à l'État d'arbitrer. Les programmes pour développer une administration électronique peuvent être efficaces. Les compétences, le sens du service public, la volonté d'agir au sein de la puissance publique peuvent faire plus que des moyens financiers importants mais mal employés. 5. On évoque souvent l’existence d’une fracture numérique Nord/Sud. Les écarts d’appropriation et de moyens ne sont-ils pas au moins aussi spectaculaires à l’intérieur des Suds et les inégalités devant l’accès à ces outils de communication sont-elles pas avant tout à l’intérieur d’un même pays? A.C.L.. : Bien sûr, les contrastes sont considérables entre les pays et au sein des pays. Dans les hyper centres bien équipés des villes primatiales, les élites sont mieux reliées et plus proches de leurs homologues des pays du Nord que des habitants des villages dépourvus de toute infrastructure. L'hétérogénéité des territoires des Suds, leur caractère lacunaire avec des oasis de modernité au milieu d'océans de pénurie est un trait fondamental. Le territoire ne fonctionne pas comme un tout organique, l'absence d'une interconnexion entre les réseaux matériels (eau, électricité, routes télecom) est un lourd handicap et les TIC malgré leur caractère plus immatériel ne résoudront pas ce problème de fonds. Même si la téléphonie mobile permet des accès dans des zones jusqu'alors dépourvues, et donc des usages nouveaux, les problèmes d'organisation demeurent. Dans la plupart des pays d'Afrique, toutes les infrastructures au sol (eau, électricité, téléphone) fonctionnent mal en raison de la défaillance d’une bonne gestion : il faut du personnel, des travaux de génie civil, donc des cartes, des corps de métier différents qui coopèrent, (pour éviter que d'autres travaux ne détruisent accidentellement le réseau) et aussi une certaine stabilité et citoyenneté (les réseaux filaires sont vulnérables, par exemple aux voleurs de cuivre, métal relativement cher, on installe des branchements pirates, les panneaux solaires disparaissent). Rendre les TIC compatibles avec l'économie informelle résume bien les données du problème en Afrique.

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Rôle de l’acteur public local

Les problématiques

Éléments clés - Chapitre 2

Mots repères

• Haut débit : La définition du haut débit est toute relative. En général, on parle de haut débit lorsque le débit est supérieur à 2 Mbps. Les technologies d'accès haut débit sont le câble, le satellite, l’ADSL, le WIFI, le WIMAX...

• télédensité: La télédensité se mesure pour le nombre de lignes par 100 habitants. C’est le critère qui permet d’évaluer le taux de connexions des habitants d’un pays, d’une région, d’une ville.

• Agence mondiale de solidarité numérique : L'Agence aide les collectivités à formuler et à mettre en œuvre leur politique locale en matière de TIC. Elle appuie le montage de partenariats publics-privés évalue les projets et conseille les partenaires engagés dans une politique volontariste de territoire numérique, en particulier dans les pays les moins avancés.

• Faire en sorte que son territoire puisse accéder aux réseaux haut débit : C’est une problématique centrale qui doit s’inscrire au cœur de la politique TIC de la collectivité. Pour y parvenir, l’un des moyens est d’arriver à faire financer son projet auprès du Fonds mondial de solidarité numérique ou de profiter de l’appui des ONG oeuvrant pour la réduction de la « fracture numérique ».

• Parvenir à équiper son territoire d’un réseau d’espaces publics numériques : Un autre des éléments importants, c’est de favoriser la présence d’espaces publics numériques permettant un accès collectif au réseau Internet. Pour cela, les cybercafés peuvent être aussi suppléés par des dispositifs publics où sont dispensées des formations aux nouveaux médias.

• Un rôle de veille juridique et de connaissance du contexte règlementaire : Il est important de bien connaître dans un environnement juridique aussi volatile.

• Un rôle de connaissance de l’existant : en établissant une cartographie de l’état des réseaux sur le territoire, tant sur les questions filaires que satellitaires

• Un rôle de formalisation des besoins : en faisant un travail de récolte des attentes et des besoins auprès des différentes communautés existantes sur le territoires (entreprises, milieu éducatif, etc.). Ce travail a aussi une mission de sensibilisation.

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3– L’ACCES COLLECTIF AUX TIC, LIEUX D’APPROPRIATION

ET DE FORMATION

Les accès collectifs à Internet : des outils d’aménagement du territoire La question de l’accès public représente pour l’acteur public local, un enjeu en terme d’aménagement du territoire et de participation active à la « société de l’information ». Deux types d’accès collectif à Internet et aux nouveaux outils de communication se sont développés en Afrique : • les cybercafés, issus d’une initiative privée, les usages sont libres et les utilisateurs ne recherchent pas une formation particulière aux nouveaux outils.

• les espaces publics numériques mis en place par l’acteur public. Les usages sont davantage encadrés et ces lieux correspondent davantage à des espaces de formation.

Dans les deux cas, ces dispositifs permettent aux habitants de s’approprier les TIC et leur distribution dans le territoire sont des éléments forts de structuration et de son aménagement numérique. Pour cette raison, les plates-formes publiques d’accès à Internet représentent pour nombre d’acteurs publics, l’outil de base d’une politique de promotion et de pénétration des TIC sur l’ensemble d’un territoire. C’est un des outils de lutte contre la formation d’un « fossé numérique » entre les populations d’un même territoire.

OBJECTIFS � Comprendre les enjeux autour de l’accès collectif aux nouveaux réseaux de

communication

3.1 L’accès collectif : pour une appropriation citoyenne de la société de l’information

Les accès à Internet, un service urbain devenu presque banal aujourd’hui. Ici, parmi d’autres annonces, une affiche désignant la proximité d’un cybercafé de Veracruz (Mexique) Crédit photo:Philippe Vidal 2005

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Qu’est ce qu’un espace public multimédia ? A minima, c’est un lieu public permettant l’accès au réseau Internet et aux différents outils logiciels existants. Si l’autonomie doit rester la règle, ces lieux doivent également prévoir un accompagnement pour sensibiliser, former, informer, bref offrir une assistance humaine suffisamment compétente pour faciliter l’appropriation de ces outils par les usagers. Trois dimensions nous semblent devoir figurer absolument : • Un lieu public accessible au plus grand nombre • Les usages individuels sont globalement libres à quelques exceptions près • un accompagnement humain susceptible de pouvoir répondre aux questions ou aux difficultés des usagers

Les Espaces Multimédia : marqueurs territoriaux et activateurs sociaux de la Société de l’information Dans cette société de « l’immatériel », les espaces publics multimédia sont sans aucun doute un symbole fort qualifiant les villes, départements ou régions qui en sont munies, du sceau de la modernité. Au delà du symbole et du caractère signalétique de ces dispositifs, les Espaces Multimédia représentent au même titre que les salles de théâtre, de cinéma, que les salles de concert ou que les enceintes sportives, un lieu de convivialité où se rencontrent les habitants d’un territoire, où se crée du lien social au travers de pratiques partagées autour de l’Internet. Certes, certaines classes d’âge, certains types de population fréquentent plus que d’autres ces nouveaux lieux de socialité urbaine (ou rurale). Toutefois, les études montrent que ce sont des lieux rassembleurs, fédérateurs et globalement très appréciés des habitants. Dans ce contexte, les Espaces Multimédia sont donc de puissants activateurs sociaux. Aux territoires imaginaires de la culture virtuelle, les Espaces Multimédia offrent sans aucun doute une alternative séduisante. Ils permettent, au-delà de leur application première qui repose sur l’utilisation de l’outil informatique relié ou non au réseau Internet, la rencontre avec ses voisins, des relations de proximité avec des personnes qui ne se seraient pas forcément rencontrées dans d’autres conditions.

3.2 Cybercafés et espaces publics numérique en Afrique, quelles spécificités?

Les usages dominants des cybercafés en Afrique : les sites de chat et de rencontres Il suffit d’aller dans n’importe quel cybercafé de Dakar ou d’une autre capitale africaine, de cliquer sur la barre d’adresse, pour découvrir systématiquement la présence de sites de rencontres, de chat (MSN en particulier) et de courriers électroniques (yahoo, hotmail, etc…).

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3.3 Quels rôles pour les pouvoirs publics? Mettre en place un réseau d’espace public numérique complémentaire aux cybercafés L’une des solutions pour les collectivités est de permettre la cohabitation entre des cybercafés privés et des lieux publics de formation aux TIC. Opposer les cybercafés, très nombreux en Afrique, reposant sur un modèle économique tout à fait pertinent et les espaces publics numériques mis en place par la puissance publique serait une erreur. Il n’y a pas de concurrence entre ces deux modèles mais bien une relation de complémentarité.

De plus en plus, les Cybercafés sont équipés de webcams tant les usages renvoyant à la rencontre de l’autre sont dominants. Ainsi que le rappelle Baba Wame, auteur d’une thèse en Sciences de l’information et de la communication intitulée « Internet au Cameroun : les usages et les usagers. Essai sur l’adoption des technologies de l’information et de la communication dans un pays en voie de développement », 80% des internautes se connectant depuis les cybercafés sont en ligne pour le chat et le mail. Les deux tiers sont des femmes, dont 10 à 15% sont analphabètes. Elles utilisent le Net essentiellement pour aller sur les sites de rencontres à la recherche d’un conjoint numérique et ont entre 18 et 34 ans. Cette tendance peut parfois effrayer les familles. Disons le clairement : les cybercafés ne sont pas des lieux de formations aux TIC, mais bien plus des lieux de rencontre où cohabitent une grande proportion d’usagers en quête de « partenaires numériques » ou de maintien du lien avec des migrants vers les pays du nord, quelques « toubabs » qui continuent d’échanger pour des raisons professionnelles ou familiales avec l’Europe et des étudiants ayant des besoins spécifiques et circonstanciés.

Les espaces publics numériques : pour des usages « nobles » Cette tendance lourde constatée dans la plupart des cybercafés africains doit-elle être considérée comme une dérive ou un danger pour les valeurs habituellement promues dans les sociétés africaines ? Il apparaît difficile de répondre à cette question. Quoi qu’il en soit, le besoin de formation aux TIC est une évidence. Ce qui est également remarquable, c’est la faible compétence technique et informatique des employés dans les cybercafés. Il résulte de ce constat la nécessité de promouvoir sinon un modèle public type d’espace multimédia, en tout cas une action volontariste axée très largement sur la formation à ces nouveaux outils. Au moins trois avantages à la mise en place d’une stratégie publique apparaissent : • D’abord, dans ces espaces, il est plus facile de contrôler les usages en faisant par exemple signer une charte d’utilisation permettant le respect des traditions du pays

• Ensuite, il peut y avoir une forme d’éducation à ces nouveaux outils et surtout vis-à-vis des contenus qui y circulent

• Enfin, et c’est le point principal, la formation à ces nouveaux outils par un personnel compétent est seule garante d’une appropriation raisonnée des TIC

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Les lieux de formation aux TIC sont nombreux. Ici, au Centre National d’information Jeunesse/Ministère de la Jeunesse du Sénégal , un gendarme et une jeune couturière échangent leur savoir-faire (courrier électronique), en attendant le formateur. Crédit photo:Philippe Vidal. Dakar Février 2006

De l’urgence d’aller vers les publics les plus vulnérables. Qui sont les publics les plus vulnérables? En Europe, cette question renvoie le plus souvent à l’accueil des personnes handicapées physiques ou atteintes par un certain nombre de déficiences intellectuelles. Pour elles, il est clair que l’apparition des TIC dans leur quotidien a constitué une véritable révolution. Le traitement de texte a par exemple permis d’augmenter leur capacité à communiquer par une écriture plus facile. En Afrique, les publics les plus vulnérables, ce sont surtout les pauvres, les femmes, et les analphabètes. Ainsi que le rappelle un ouvrage sur la fracture numérique de genre en Afrique : « Au bénin, au Burkina Faso, au Cameroun, au Mali, en Mauritanie et au Sénégal, les femmes ont globalement un tiers de chance en moins que les hommes de bénéficier des avantages africains de la société de l’information ». Des actions spécifiques engagées en direction des femmes semblent donc urgentes à mener.

Offrir à toute personne un accès à une formation minimale aux fonctionnalités de l’internet Les espaces publics numériques pourraient offrir à toute personne un accès à une formation minimale aux fonctionnalités de l’Internet : e-mail, www, listes de diffusions, forums de discussions …

Cibler des publics particuliers : les entreprises et micro entreprises Mettre à disposition des entreprises des formations aux technologies de l’information et des procédures d’accompagnement personnalisées à l’intérieur des espaces publics multimédias.

Promouvoir le logiciel libre Mettre à disposition des entreprises des formations aux technologies de l’information et des procédures d’accompagnement personnalisées à l’intérieur des espaces publics multimédias.

Pour résumer: • aux cybercafés reviennent finalement des usages libres et réguliers à un tarif n’excédant

généralement pas 500 FCFA pour une heure; • aux lieux d’accès publics à Internet revient la mission de former les populations aux TIC et

de les prémunir contre les éventuels dangers.

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1. Pour vous, qu’est ce que la société de l’information ? C.P. : La societé de l'information se caracterise par de nouveaux modèles de partage de l'information rendus possibles par la grande vitesse et favorisant l'intelligence collective. Les échanges sont plus directs, plus libres et plus justes. Les transformations sont en cours et ne portent pas seulement à l’echelle du global. La question de l'appropriation locale des outils, celle de la production d'identités, notamment en matière d’audiovisuel, est essentielle. 2. Pouvez-vous nous présenter l'initiative Points de Culture /culture numérique? C.P. : Il y a finalement trois types de préoccupations renvoyant à l’objectif d'inclusion numérique. Elles peuvent même être considérées de façon successive, la dernière ne pouvant exister sans la première. D’abord, l’objectif est de permettre au plus grand nombre d’accéder au réseau Internet. Ensuite, il s’agit de généraliser la diffusion du logiciel libre qui permet la création de solutions plus autonomes et durables. Enfin, il faut encourager la création de l’information locale, il faut promouvoir les identités et les cultures en les diffusant au travers du réseau Internet. Les Points de Culture qui sont des lieux de production de la culture locale ont précisemment comme objectif (entre autre) la promotion de la culture. Avec la Culture Numérique, les communautés enregistrent leur propre image, proposent leur propre regard sur ce qu’ils sont. C’est ce que nous appellons le "do-in antropologique". Par exemple, les indiens sont entraînés à utiliser un caméscope, à faire des scénarios à se présenter eux-mêmes. Le tout est diffusé sur le web à la planète entière. 3. En quoi est-ce important de promouvoir sur le réseau Internet des contenus de la culture brésilienne ? C.P : La Culture Numérique Brésilienne se développe à mesure que l'interactivité progresse. C’est cette interaction qui permet de lutter contre un système isolationiste, où seules les élites dominantes se rencontreraient. Elle permet aussi de faire émerger de nouveaux débats publics. Il est important de faire circuler sur le web des éléments de la culture brésilienne, d’en montrer la diversité parce que cela permet de montrer l’existence d’autres modèles culturel dans le monde. Cela permet aussi de repenser les canaux de distribution des biens culturels et d’offrir au public d’autres produits que ceux généralement protégés sous des licences. Cette diversité de produits culturels peut trouver par les TIC des canaux de diffusion autres que ceux des majors. Pour cette raison, il est essentiel de promouvoir la question de l’universalisation de l’accès et c’est “Le Politique” qui doit être le moteur de cette dynamique. L’accès à Internet est un droit fondamental, l’un des enjeux du 21e siècle. 4. Le partenariat entre gouvernement central et acteurs publics locaux est-il facile à tisser ? C.P. : Oui, parce que cette relation est établie ou proposée, dans la majorité des cas, par la société civile (des associations, des ONG, des groupes de travail etc.). Il s'agit surtout d'un projet où l'individu est certes un utilisateur mais également un sujet politique actif. Il fait partie de l'enjeu social et le transforme, en ajoutant sa propre connaissance, sa contribution à une construction collective et encore incomplete.

Cinq questions à …Claudio Prado

Responsable des politiques numériques au Ministère de la Culture du Brésil

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C’est l’usager qui donne du sens à l’action. Le gouvernement n’est là que pour rendre ces initiatives encore plus performantes, pour les appuyer et les renforcer. L’objectif est bien de permettre aux communautés locales de faire du projet quelque chose qui va se suffire à lui-même, au delà de l’appui du gouvernement. 5. Quels sont les avantages de l’utilisation du logiciel libre pour les communautés locales ? C.P. : Le logiciel libre n'est pas une nouvelle utopie, c'est une réalité concrète et inexorable. C'est aussi la révèlation qu'il est possible de construire un autre monde, fait par nous-mêmes, d'avoir la liberté d'accès à l'information et la liberté d'expression. En plus, c'est un élément essentiel pour nous permettre de continuer à vaincre les enjeux du développement. L'innovation et la création technologique ne sont pas un bien privé, ils ne peuvent donc être controlés par des intérêts corporatives, car aujourd'hui nous nous rendons compte qu'ils font partie du patrimonie mondial culturel. L'objectif principal est d'établir une nouvelle relation entre technique et culture, où l'humain n'a plus besoin de dominer les objets techniques comme des esclaves, mais il a une relation de chef d'orchestre, où il peut explorer les indéterminations d'usage pas prévues avant sa concrétisation, dont la rationalité sociale se voit remplie de son importance par rapport au progrès tecnique et aussi social. Le logiciel libre concrétise bien cet espoir, car l'objet technique le plus évolué n'est plus celui le plus autonome par rapport l'intervention humaine, mais il est évolué parce qu'il s'adapte bien aux nouveaux désirs, et peut développer des nouvelles fonctions quand et comme il le faut.

Webographie

Bibliographie DIA Maty : Accès au grand public des espaces numériques scolaires au Sénégal, DESS en Sciences de l’information et de la Communication, sous la direction de C..Jeunesse, Université de Paris X Nanterre Septembre 2005. ENDA, OSIRIS, ART, Fracture Numérique de genre en Afrique francophone, Une inquiétante réalité, Etudes et Recherches, N°244, ENDA éditions, Dakar 2005 Gueye Cheikh " Enjeux et rôles des NTIC dans les mutations urbaines : le cas de Touba : Document préparé pour le projet de l'UNSRID" Les nouvelles technologies de l'information et de la communication et le développement social au Sénégal "mai2002. SYLLA Ibrahima : Approche géographique de l’appropriation des NTIC par les populations : l’exemple des télécentres et des cybercafés dans le quartier Ouagou Niayes à Dakar. NDIAYE Birame : Le système d’information populaire : outil de participation citoyenne, 2004, Mémoire DESS/ADT/ENEA

Quiedeville R., : Guide des prestataires des logiciels libres, 2004 http://www.support-libre.com Enda Cyberpop : Dynamique populaire et NTIC http://cyberpop.enda.sn Digital Freedom Initiative : Renforcement des capacités des télécentres et cybercentres au Sénégal http://www.dfi.sn United Nations Information and Communication Technologies Task Force http://www.unicttaskforce.org/index.html

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Rôle de l’acteur public local

Les problématiques

Éléments clés - Chapitre 3

Mots repères

• Accès collectifs à Internet : Les accès collectifs à internet peuvent se présenter sous la forme de cybercafés issus d’une dynamique privée ou d’espaces publics émanant d’une initiative publique. Dans les deux cas, ce sont des outils qui permettent aux habitants et usagers occasionnels d’accéder à Internet, à un coût généralement proche de 500 FCFA/heure..

• Usages : La notion d’usage renvoie aux différentes façons, pour un utilisateur, de s’approprier les nouveaux outils de communication électronique. Dans les cybercafés, certains usages dominent (chat, mail) tandis que les dispositifs émanant d’une initiative publique induisent souvent des usages renvoyant à la formation à certains logiciels ou à certaines pratiques (accompagnement dans les recherches documentaires, etc.)

• Les accès collectifs à internet, des dispositifs au service de l’aménagement numérique du territoire : Faire en sorte que le territoire soit doté de cybercafés et d’espaces publics numériques, c’est s’inscrire dans une politique d’aménagement numérique du territoire et lutter contre la fracture numérique entre les populations les mieux éduquées et les plus riches et celles qui ont besoin d’être accompagnées dans leur découverte de ces nouveaux outils.

• Favoriser une appropriation citoyenne de la société de l’information : Cette appropriation citoyenne de la société de l’information passe par une action de sensibilisation forte des risques d’un usage non maîtrisé de ces nouveaux outils (pornographie, prostitution, etc.) et des potentialités qu’ils recèlent ou permettent. Elle passe aussi par la mise en place de programmes faisant de l’usager un producteur d’informations locales.

• Considérer la présence de lieux publics d’accès à internet comme nécessaire : pour pouvoir dispenser des formations et fournir un accompagnement souvent lacunaire dans les cybercafés.

• Former au nouveaux outils : En priorité, il s’agit de former les jeunes, puis des communautés spécifiques selon les besoins locaux (les femmes vis-à-vis du micro crédit par exemple, les chefs d’entreprises, les responsables d’organismes publicx, etc.)

• Promouvoir les logiciels libres : La promotion du logiciel libre dans les espaces publics numérique présente un double intérêt. D’abord, ce sont des logiciels libres de droit donc gratuits, ensuite, ils évoluent en fonction des besoins et de la créativité de chacun.

• Encourager la production des contenus territoriaux : Afin que les usagers de ces lieux publics soient non seulement consommateurs, mais aussi producteurs de contenus sur les nouveaux médias.

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4– Accéder oui, mais à quoi? De l’importance des sites web communaux

4.1 Des contenus territoriaux sur les nouveaux supports numériques

La nécessité de produire des contenus de proximité Pendant un temps déconsidérée lorsqu’on évoquait le « cyberespace », la question territoriale occupe aujourd’hui une place importante, en particulier lorsqu’il s’agit de réfléchir au type de contenus susceptible de rencontrer l’intérêt des publics. La question s’envisage désormais essentiellement en termes de contenus de proximité. Le temps où il était question de réaliser un site vitrine, miroir souvent déformé d’une réalité parfois fantasmée n’est plus. Place désormais au site « transactionnel ».

Les sites web communaux selon ARTESI Artesi considère qu’il y a grosso modo cinq types de site web communal. Le premier, le plus pauvre en information correspond au « site vitrine ». Le second, assez proche du précédent est le « site vitrine enrichi ». Ces deux cas de figures se limitent au stade promotionnel et sont évidement à proscrire. Le troisième type est le « site dynamique d’information et d’actualité ». Il informe et renseigne sur les évènements, les dimensions les plus attendues de la commune. Le quatrième type est le « site interactif et coopératif ». Il permet d’échanger et de collaborer entre administrateurs et administrés. La cinquième type est le « portail local citoyen ». Il facilite les démarches administratives et offre aux citoyens toutes une panoplie de services régulièrement mis à

Une montée en charge progressive Il s’avère important de ne pas brûler les étapes. Il est essentiel de procéder de façon progressive, de s’inscrire dans un processus évolutif (à partir de la troisième étape). Le site va connaître une montée en charge régulière qui va peu à peu intégrer tous les aspects du projet. Il faudra ainsi choisir : • Une solution technique • Une solution organisationnelle

OBJECTIF � Comprendre les enjeux derrière la création d’un Web public local

A PROSCRIRE ABSOLUMENT Réaliser un site vitrine promotionnel qui n’intègre aucun service à la population

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Les contenus territoriaux, quel intérêt? Une stratégie territoriale en matière de TIC se limite rarement au seul équipement des territoires administrés en infrastructures de télécommunication haut débit. Fournir des contenus territoriaux, c'est-à-dire proposer au travers d’un site web, des informations en prise directe avec les territoires, répond aujourd’hui à de vrais besoins : • Le besoin d’information en direction des citoyens • Le besoin d’information en direction des personnes désirant s’installer dans une commune • Le besoin de faire se rencontrer les acteurs économiques • La valorisation et le rayonnement des collectivités sur les nouveaux médias numériques

Pourquoi un site web « communal » ? Une question peut faire débat : quel est le niveau territorial le plus pertinent pour offrir à la population des contenus publics territoriaux de qualité ? Plusieurs choix peuvent être privilégiés : • Le niveau régional • Le niveau communal • Le niveau communauté rurale Le niveau communal est celui qui offre le meilleur compromis car : • il possède la capacité financière et organisationnelle pour constituer une équipe structurée en charge du dossier TIC

• il représente pour la population l’échelon d’appartenance le plus naturel, le plus évident. Toutefois un site web public peut dans certains cas de figure se constituer en associant plusieurs petits villages (groupement de communes). Cela permet de mutualiser les moyens quand ceux –ci ne sont pas suffisants et de créer de vraies solidarités entre les habitants de villages proches, qui partagent souvent les mêmes problématiques sociales et économiques.

Site web municipal ou site web communal ? L’une des dimensions observables sur les sites web publics africains est cette tendance assez récurrente qui consiste à mettre en scène le pouvoir municipal et son action. Ce type d’approche peut être considérée comme contre-productive dans la mesure où ce qui est recherché dans ce cas est moins une offre de services à la population de la commune que l’autopromotion du pouvoir municipal. Pour cette raison, c’est davantage en terme de « site web communal » qu’il est bon de raisonner. Ceci n’exclut pas toutefois qu’une présentation des élus, de leur domaine de responsabilité soit nécessaire pour identifier clairement qui est en charge de quoi sur la commune.

Vers une e administration de proximité La question de l’administration électronique est toujours plus d’actualité. Lancée en Europe, à l’origine par les États, l’e administration (la dématérialisation des procédures administratives) devient une préoccupation de nombre de villes soucieuses de développer des services administratifs en ligne concernant directement le quotidien des habitants. Peu à peu, les services développés répondent à une logique d’offre personnalisée en fonction des besoins et des attentes des populations. Les procédures administratives en ligne, la qualité des services offerts, la capacité qu’ont les collectivités à s’inscrire en complémentarité de l’État sont les préoccupations majeures des collectivités en matière d’administration électronique.

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Au-delà des sites web Communaux, La technologie 3G au service de l’information locale ? Si les sites web représentent aujourd’hui la meilleure opportunité pour délivrer à la population des contenus territoriaux, d’autres supports comme les téléphones mobiles de 3e génération peuvent être une alternative convaincante pour accéder à ce type d’information. De par leur caractéristiques techniques et outre les prestations classiques, ces dispositifs permettent d’avoir accès à des services selon le lieu où se trouve l’utilisateur à un moment précis. On parle pour les désigner de « services géolocalisés ». On peut imaginer, de fait tout l’intérêt qu’une société locale peut tirer de ce potentiel. Les services géolocalisés font intervenir trois types d’acteurs : • les usagers eux –mêmes, qui peuvent être des individus mais aussi des professionnels ayant besoin d’informations en temps réels (l’expérience de Manobi, évoquée dans le chapitre V, est de ce point de vue un remarquable exemple d’exploitation du potentiel 3 G),

• Les prestataires techniques, à savoir les opérateurs propriétaires du réseau et de la carte SIM nécessaire à la connexion d’un mobile à son réseau, les éditeurs de logiciels permettant de calculer l’information de localisation afin de la transmettre à une plate-forme de services

• L’« infomédiaire » qui développe la plate-forme mettant en œuvre des technologies de localisation auprès des différents opérateurs nationaux.

Zoom sur une expérimentation : l’expérience de la ville de Rennes. Désormais, les acteurs publics et privés testent en Europe le potentiel de la technologie 3 G. A Nantes ou Rennes, la municipalité a encouragé une expérimentation visant à permettre aux habitants dotés de téléphones mobiles de 3e génération de produire eux-mêmes des contenus territoriaux, sous la forme de petits films obtenus depuis leur téléphone.

A Rennes, l’équipe municipale très engagée dans ce projet souhaite faire remonter « la parole des citoyens à partir de leur lieu de vie ». Ces films, une fois réalisés, sont des témoignages à un moment donné d’une situation locale. Ils sont consultables 2 heures après leur fabrication, sur le site web de la ville, consultable ou encore d’un téléphone mobile de 3e génération. Cette expérience peut paraître de prime abord anecdotique. Pourtant, elle met au jour une double tendance. • D’une part, elle illustre la nécessité ou le besoin toujours plus grand de disposer de contenus territoriaux originaux et récents.

• D’autre part, elle confirme un phénomène déjà largement perceptible dans d’autres démarches municipales (Parthenay ville numérisée par exemple lors de sa phase I) ou l’usager—citoyen est invité à être co-concepteur de l’information locale.

Tout l’enjeu pour les collectivités réside désormais dans la structuration et l’organisation de ces contenus.

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4.2 Un contenu adapté aux problématiques africaines

La logique des « focus group » testée auprès des acteurs publics locaux Réfléchir au type de contenus pertinent pour produire une réponse adaptée aux besoins africains est nécessaire. Pendant plusieurs séances, les étudiants du DESS ATEGU à l’ENEA (promotions 3 et 4) qui sont pour une très grande majorité des responsables territoriaux et des élus en formation continue ont réfléchi par petits groupes à la réalisation d’un site web communal dans une commune sénégalaise. Ces réflexions que nous avons encadrées ont donné lieu à des résultats nous permettant finalement d’identifier le type de besoins spécifiques qui apparaît sur le territoire sénégalais. Ce sont ces résultats qui servent de support à cette partie sur les contenus territoriaux des sites web communaux.

Des thèmes au centre des problématiques communales africaines • L’information sur les productions agro-hydro-sylvo-pastorales (diversifications/catégorisation des productions, gestion des calendriers culturaux, gestion des calendriers des transhumances, gestion des eaux).

• L’information sur la commercialisation des produits agricoles, pastoraux et artisanaux (localisation des marchés hebdomadaires « loumas » et internationaux, comme Diaobé dans le sud du Sénégal, demandeurs de produits agro-pastoraux.).

• L’information sur l’environnement et la gestion des ressources naturelles. Cette question est sensible dans la plupart des villes africaines. Au Sénégal, en 1996 le transfert de compétences opéré de l'État central vers les collectivités locales portent sur neuf domaines dont l'environnement et la gestion des ressources naturelles. C’est en particulier sur ce domaine que le recours aux systèmes d’information géographique (SIG) s’avère pertinent. Le site web communal est un média permettant de diffuser ce type d’information.

Outre le choix d’une plate-forme technique, un site web communal peut choisir de développer des contenus et des services internet non seulement en accès libre à destination de différents publics, mais aussi en accès restreints pour les élus, chargés de mission et les différents conseils de quartiers et associations intervenant dans la gestion de la collectivité. Dans cette perspective, c’est d’un intranet municipal qu’il faut parler. Réalisation : Philippe Vidal, Février 2006

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Quelques étapes préalables à la création d’un web public local La décision de création d’un site web ne doit pas correspondre a des motivations de type normatives. Avoir un site web pour « faire comme tout le monde » conduit inévitablement vers une impasse. La construction d’un site web communal doit être précédée d’une réflexion les caractéristiques et les capacités de la collectivité et surtout sur les besoins de ses administrés. Ainsi que le propose l’agence ARTESI, les questions qu’il s’agit de se poser en amont sont donc de différente nature : • De nature historique : la collectivité a-t-elle déjà une culture de la communication ? Par culture de la communication, il s’agit de lister l’ensemble des documents édités par la mairie : journal communal; brochures, service d’information et de communication… Toutefois, le passage de supports traditionnels au support numérique (site web) ne peut s’effectuer qu’en prenant en considération les différences de potentialités.

• De nature technique : Quelles sont les ressources de la collectivités en matière technique ? Quel est l’état des réseaux, de l’équipement informatique au sein même de la collectivité ? Quelle en est la maîtrise de la part de ceux qui travaillent au sein de cette collectivité?

• De nature organisationnelle : La collectivité est-elle en mesure de gérer le projet dans ses différents aspects? Il s’agit entre autre chose d’avoir la capacité de mettre à jour les informations du site web, de produire des services publics en ligne, de répondre aux messages électroniques qui seront envoyés par les administrés ce qui impose notamment de repenser l’organisation interne de l’administration. En définitive, réaliser un site web communal impose comme condition préalable que les services qui composent cette collectivité soient favorables à un rapprochement avec l’administré.

• De nature territoriale : Quels sont les sites existants sur la collectivité? Il importe de connaître l’existence et le contenu des sites web locaux, en particuliers ceux qui, de type associatif, en appelle à la participation des citoyens. Les sites web des entreprises locales sont également particulièrement importants.

4.3 Le rôle des pouvoir publics : favoriser la mise en oeuvre d’un Internet public local

• L’information sur l’environnement et la gestion des ressources naturelles. Cette question est sensible dans la plupart des villes africaines. Au Sénégal, en 1996 le transfert de compétences opéré de l'État central vers les collectivités locales portent sur neuf domaines dont l'environnement et la gestion des ressources naturelles. C’est en particulier sur ce domaine que le recours aux systèmes d’information géographique (SIG) s’avère pertinent. Le site web communal est un média permettant de diffuser ce type d’information.

• L’information sur l’éducation et la santé. Éducation préscolaire—case des tout-petits, protection contre les MST/VIHSIDA, santé maternelle et infantile, hygiène publique…

• L’information sur l’organisation administrative locale dans le cadre de la décentralisation. Il s’agit de rappeler les conditions d’exécution et de traduction locale des lois de décentralisation,. Au-delà des principes, il s’agit de dire qui fait quoi vis-à-vis des missions qu’assument désormais les collectivités locales.

• L’information relative à la culture, au tourisme à la jeunesse et aux sports. • L’information sur les infrastructures de transport et de télécommunications

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Ce sont ceux qui promeuvent, finalement, le dynamisme économique du territoire.

Exemple de travail préalable à la réalisation d’un site web communal Après avoir identifié les thèmes autour desquels il s’agira de structurer l’offre de services en lignes, il est important de connaître le public cible auquel on souhaite s’adresser. Sur le graphique, apparaît, sans ordre de priorité, trois familles spécifiques : • 1er famille : Les émigrants, les gens de passage, les touristes, les anciens habitants • 2ème famille : Les citoyens, les associations, les groupes culturels • 3ème famille : Les entreprises, le secteur économique Ces trois familles peuvent représenter le socle de « l’espace grand public », c'est-à-dire un espace où chacun pourra accéder sans contrainte spécifique aux informations délivrées sur le site. En plus de cet espace « grand public », apparaît une quatrième famille à « accès restreint » via un Intranet réservé aux responsables des démarches engagées pour ou au nom de la collectivité, il s’agit : • Des élus, • Des chargés d’études et des techniciens des collectivités • Des conseils de quartier, • Des associations communales Quel que soit le type de public auquel on souhaite s’adresser, il est capital avant de développer l’offre de contenus de prendre le pouls des attentes et de la demande sociale et d’assurer un suivi de l’appropriation de cette offre grâce notamment à la présence d’un « observatoire des usages ». L’offre de contenus pourrait se structurer en croisant le potentiel des TIC à celui des SIG afin d’enrichir le contenu du web public territorial par la création d’un Système d’Information

Schéma présentant une possible structuration d’u site web communal en Afrique. Réalisé par Philippe Vidal

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1. Pour vous, qu’est ce que la société de l’information ? E.E. : C’est un ensemble de politiques publiques qui répondent à un certain nombre d’enjeux liés à des contextes précis. Dans les années 50, les politiques publiques que l’on peut considérer comme les ancêtres de nos contemporaines politiques publiques sur « la société de l’information » ont pour objet de répondre pour l’essentiel à la crise urbaine. Dans les années 70, c’est la question de la modernisation des infrastructures qui se pose. Dans les années 80, c’est la libéralisation des marchés et la privatisation des services publics. De plus en plus, on s’aperçoit que parmi les enjeux actuels, il y a la globalisation et le développement durable. L’expression « société de l’information » renvoie à des politiques publiques qui sont sensées répondre à ces enjeux en organisation la diffusion des TIC dans la société. Au niveau de la crise urbaine, on leur attribue le pouvoir de régulation et de réorganisation de la ville. Pour ce qui concerne l’équipement, c’est la modernisation des société qui en jeu, c’est en fait l’avènement de la question des usagers. A un moment donné il y a eu un consensus autour de cette expression « société de l’information ». Elle s’est ensuite institutionnalisée par la tenue des deux sommets onusiens (Genève 2003 et Tunis 2005). 1. Quels services doit rendre un site web municipal ? E.E. : Il y a différent types de web municipaux qui sont plus ou moins impliquants pour les collectivités. Il y a par ailleurs différentes générations de sites web. L’esthétique mais aussi certaines fonctionnalités évoluent suivant les modes. Les moins ambitieux sont ce qu’on appelle les sites vitrines qui sont pour l’essentiel destinés à la promotion des élus locaux. Les plus ambitieux nécessitent une profonde réorganisation des services de la collectivité. Ce sont aussi des outils de régénération de la vie démocratique. Il s’agit donc de services public de proximité dans les domaines de la santé, de l’administration, de l’éducation, etc. 3. 10 ans après l’apparition des premiers sites web municipaux en France, avez-vous observé de profondes évolutions? E.E. : La réponse est oui. Le levier de cette évolution c’est la transition de la plupart des sites web communaux vers l’eadministration. Par ailleurs dans le cadre du label ville internet on constate une réelle évolution qualitative de ces sites. Pour autant, il serait intéressant de reconsidérer la question de l’expression démocratique et de la demande sociale qui n’est pas forcément en phase avec l’offre technique. 4. Compte tenu du faible taux de pénétration de l’Internet en Afrique, comment faire en sorte que les citoyens puissent tout de même accéder à cette information? E.E. : Il est selon moi beaucoup plus important qu’ils produisent de l’information avant même d’y accéder. 5. Est-ce que le retard africain en matière de développement des usages de l’internet est quelque chose de grave, de rédhibitoire ? E.E. : Il y a pas si longtemps on considérait que la France était un pays très en retard en la matière, c’est moins vrai maintenant, mais le délai n’est pas si grave si l’on arrive in fine à produire son modèle. Il y a des pays où l’industrie cinématographique n’existe plus et on ne consomme plus que du cinéma hollywoodien. A l’inverse, des pays ont su protéger leur cinéma y compris les pays du sud, le plus bel exemple étant Bollywood.

Cinq questions à … Emmanuel Eveno Professeur de Géographie- UTM-GRESOC,Président du Label Ville Internet

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Webographie

Bibliographie

ARTESI : Agence Régionale des Technologies de l’information en Île de France http://www.artesi-idf.com @netville : Le centre de ressource et d’échanges pour le développement des territoires numériques en Île-de-France http://www.anetville.com CREATIF : Accès public et appropriation citoyenne des technologies de l’information http://www.creatif-public.net RENUPI : Repères numériques de Picardie http://www.renupi.org Gouvernement du Sénégal : Mise en ligne du site web sénégalais des démarches administratives http://www.demarches.gouv.sn Association CRESP : Centre de ressources pour l’Émergence Sociale Participative http://www.siup.sn FAMAFRIQUE : Un développement durable pour les femmes d’Afrique francophone http://www.famafrique.org

BERTACCHINI Yann., « Le rôle & l'observation de l'information & des processus de communication dans l'élaboration du projet territorial, » Habilitation à Diriger des Recherches,Université du Sud Toulon-Var, Laboratoire Le Pont, Sciences de l'Information & Communication, 2003. FALL MAMADOU : « Les sites web communaux au Sénégal :Une offre publique en cours de constitution », DESS ATEGU, ENEA, sous la direction de Philippe Vidal, Février 2006 CAZENEUVE PHILIPPE : « L’accessibilité pour tous aux TIC : Comment toucher les publics les plus éloignés? », Réseau CREATIF, février 2005 RENUPI : Internet public pour ma collectivité, pour mes administrés, Janvier 2005 NDIAYE MAME BIRAME, Le Système d’Information Populaire : outil de participation citoyenne?; DESS ATEGU, ENEA, sous la direction de Latyr DIOUF, Février 2004

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Rôle de l’acteur public local

Les problématiques

Éléments clés - Chapitre 4

Mots repères

• Web public territorial : C’est un site web réalisé par les collectivités territoriales. La qualité des contenus et des services rendus dans le cadre de ce site dépendent étroitement de la capacité des collectivité à se doter de modalités d’animation et de valorisation du site auprès des administrés et des différents publics concernés par cette offre publique.

• Site vitrine : C’est un site où ne sont délivrées que des informations basiques sur le territoire. Il promeut souvent le pouvoir politique et n’offre que peu de services à la population. Sans véritable besoin de mise à jour, ce type de site est, de fait, particulièrement statique et n’assure à la commune qu’une simple présence sur Internet.

• Site transactionnel : Provenant du commerce électronique où il y a la possibilité d’effectuer des transactions marchande en ligne, la notion de site transactionnel peut également s’appliquer au web public territorial en développant une offre de téléservices locaux. C’est, selon Artesi, le stade le plus avancé d’un site web territorial.

• Situer le site Web de la ville au sein d’une stratégie globale de territoire numérique : Une stratégie de territoire numérique ne se limite pas à la réalisation d’un site web. Celui-ci en fait partie intégrante. Il est donc important de considérer ce chantier comme une des missions parmi toutes celles qui peuvent supporter une stratégie globale de territoire numérique.

• Faire « vivre » le site : Un site web territorial doit être en évolution permanente. Il doit être un reflet de la commune et rendre des services à des besoins d’information classiques mais aussi à des besoins plus circonstanciels. Pour cette raison, une mise à jour régulière des rubriques, ainsi qu’un suivi précis de ses usages via un observatoire sont impératifs.

• Un rôle décisionnel dans le choix la plate-forme technique du site web : Il s’agit de considérer les différentes techniques disponibles et faire un choix en fonction de l’ambition et les missions que l‘on veut remplir au travers de la plate-forme.

• Un rôle de réflexion sur le contenu : La collectivité se doit de réfléchir aux contenus en fonction des besoins spécifiques auxquels le site doit répondre. Ceci passe naturellement par une phase d’enquêtes préalables auprès des différents publics.

• Un rôle d’incitateur à la démocratie participative: La collectivité essaie de fédérer toutes les énergies présentes sur le territoire autour d’une stratégie cohérente et partagée

• Un rôle de producteur et de capteur d’une information régulière : La mise à jour des sites web communaux est nécessaire. Elle est conditionnée par la production et la récolte d’informations nouvelles auprès de l’ensemble de la société civile du territoire.

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L’économie des TIC L’économie des TIC peut se regrouper en deux grandes familles : • Les producteurs de technologies : transistors, circuits intégrés, microprocesseurs et mémoires, ainsi que des biens et services qui en découlent immédiatement : ordinateurs, automates, logiciels, etc.

• L’ensemble des activités qui incorporent ces technologies : télécoms, aéronautique, automobile, transport aérien, audiovisuel, systèmes d’information etc et des activités économiques utilisatrices ces technologies : commerce, production industrielle, etc.

Pour reprendre les propos de l’économiste Alain Rallet, l’économie numérique présente donc deux aspects. Le premier concerne la production des TIC (équipements et services), le second leur utilisation dans l'ensemble des activités. Le premier aspect saisit les TIC comme output et le second comme input. Ce qui est certain, c’est l’importance des TIC et de leurs effets sur les entreprises traditionnelles dans la mesure où les potentialités de ces TIC modifient grandement les conditions d’exercice des métiers traditionnels et ouvrent de nouvelles perspectives de travail.

5– Structurer une économie des TIC à l’échelle des territoires

OBJECTIFS � Cibler le rôle de l’acteur public local/régional dans l’accompagnement des entreprises

traditionnelles et celles de la nouvelle économie vers la société de l’information

5.1 L’économie des TIC, une réalité aussi africaine

Le lancement du Cybervillage à l’entrée de Dakar par le gouvernement Wade en 2002 se donnait pour ambition de recevoir, les entreprises majeures intervenant dans les Nouvelles Technologies. En attendant, derrière la palissade, cet immense espace fait surtout la joie des apprentis footballeurs. Crédit photo : Philippe Vidal février 2005.

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Une économie qui s’exprime de différentes façons, qui est dominée par le Nord, mais qui est de plus en plus présente dans le Sud. Quand on évoque la question de l’économie des TIC, des items tels que « technopoles », « technoparc » « commerce électronique », « industrie de l’informatique », « centres d’appel », etc., sont souvent mentionnés. Si les localisations industrielles de l’industrie électronique concernent surtout les pays développés (le plus bel exemple étant la zone de Palo Alto et la Silicon Valley en Californie), de nombreux exemples dans le Sud (Bangalore en Inde, Manobi au Sénégal, les centres d’appels dans de nombreux pays du sud,etc.) prouvent que l’économie des TIC revêt un caractère global et concerne donc très fortement le Sud. Ceci est d’autant plus vrai que cette économie s’exprime également et obligatoirement à l’échelle des territoires. En effet, il existe désormais toute une série d’activités économiques de proximité articulée sur les TIC. Il s’agit de la distribution, des services divers à la clientèle, de la maintenance, etc… Dès lors, l’acteur public a également un rôle important d’accompagnement et de cette économie à l’échelle de son territoire.

L économie des TIC est présente de bien des façons sur les territoires. Ici de jeunes vendeurs ambulants spécialisés dans la vente de cartes et de puces téléphoniques négocient le prix de leur marchandise avec un passant, place de l’indépendance à Dakar. Crédit photo:Philippe Vidal février

Nombre de centres d’appels d’entreprises françaises sont situées en Afrique. Ici la capture d’écran d’un centre d’appels (Center Value) situé au Sénégal (http://www.centervalue.net février 2006)

L’e-économie sur internet Si l’économie des TIC renvoie à des dynamiques territoriales spécifiques, l’é-economie de l’internet fait plutôt référence à l’e-business, c'est-à-dire à des échanges commerciaux qui se produisent dans le cyberespace via des portails ou des intranets sécurisés. Dans cette perspective, trois principaux types d’échanges commerciaux sont à connaître: • Le B2B : Business to Business, désigne les relations économiques entres entreprises • Le B2C : Business to Consumers désigne les relations économiques entre entreprises et consommateurs. En Afrique, ce type de relations marchandes existe avec mbolo.com.

• Le C2C : Consumers to Consumers désigne les échanges commerciaux entre consommateurs via des plate-forme internet de type ebay ou encheres.com.

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Sensibiliser les entreprises à la culture Internet Une des missions qui parait devoir se placer au premier rang des priorités porte sur un travail de sensibilisation auprès des entreprises, en particulier les plus petites, aux enjeux de l’introduction des TIC tant en terme de commerce que de gestion. • Internet peut être envisagé dans ses aspects fonctionnels. La question consiste à savoir comment cela fonctionne, comment se connecter, à quel coût, comment créer un site web fonctionnel , etc. Ceci relève finalement d’une mission de formation dans des centres de ressources dédiés.

• Il faut aussi envisager les aspects stratégiques, savoir quels sont les marchés, quels sont les clients potentiels, comment communiquer avec eux par Internet, etc.

5.2 Le rôle des pouvoirs publics : apporter une réponse concrète aux besoins des PME/PMI et aux commerçants

L’action des pouvoirs publics dans le domaine de l’économie des TIC est essentiellement une mission d’accompagnement ou d’interface entre les différents acteurs privés. L’objectif consiste le plus souvent à valoriser la richesse et la diversité de l’offre locale en la matière, et apporter des réponses claires aux questionnements des acteurs privés. Cinq principales démarches peuvent être engagées par les organismes public auprès des entreprises: • Les actions de sensibilisation • Les actions d’accompagnement • Les actions de création ou de développement des entreprises liées aux TIC • Les actions de mise en réseau entre professionnels • Les actions portant sur la dématérialisation des marchés publics

L’entreprise MANOBI n’a évidemment pas besoin d’être sensibilisée aux TIC. Manobi, grâce à ces services, permet aux professionnel du secteur rural et de l’agro industrie d ’ a m é l i o r e r l e u r performance. Encore faut-il que ces entreprises traditionnelles soient effectivement sensibilisées à l’apport des TIC dans leur activité… (ht tp: / /www.manobi.sn mars 2006)

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Favoriser la dématérialisation des marchés publics La dématérialisation des marchés publics est une des actions dans lesquelles les collectivités s’engagent. Concrètement ,cela consiste à mettre sur le portail internet des collectivités locales les différents appels d’offres des marchés publics. Prenant connaissance des différentes offres par le biais de l’internet, les entreprises peuvent également poser leur candidature de façon électronique en vue de participer aux différentes propositions d’appels d’offres.

La mêlée numérique, une association qui a pour vocation de contribuer au développement de l'économie numérique en région Midi-Pyrénées. Initialement soutenue par des financements publics, cette démarche est aujourd’hui largement financée par des partenaires privés. (http://www.meleenumerique.com, mars 2006)

La mêlée numérique a quatre objectifs : • Sensibiliser à l’usage des TIC

• F a v o r i s e r l e développement de la filière TIC

• Contribuer au soutien de l’innovation

• Informer sur l’actualité des TIC

Pour y parvenir quatre actions coexistent : • O r g a n i s a t i o n d’évènements

• Édition d’une lettre d’information

• Action de communication

Mettre en avant le potentiel de l’offre Multimédia (annuaire, étude, observatoire…) Une autre démarche consiste aussi à mettre en avant l’offre multimédia locale. Une des possibilités consiste à l’élaboration d’un répertoire régional des entreprises du multimédia. Ceci permettra aux entreprises identifiées une meilleure lisibilité et une notoriété plus importante à l’échelle régionale.

Mettre en relation les professionnels du secteur de l’économie des TIC Une autre des actions consiste à connaître et à faire connaître les entreprises déjà engagées dans le domaine du multimédia. Cela consiste concrètement à l’organisation de manifestations régulières rassemblant les acteurs du monde de l’Internet afin d’encourager les contacts et les échanges d’expériences. Il s’agit aussi de trouver des éventuels investisseurs publics ou privés. Ainsi, ce type de réunion peut favoriser l’émergence d’un réseau de professionnels dans le domaine des TIC, dynamiser la filière multimédia et participer à sa structuration. L’intérêt est en définitive de favoriser l’éclosion de nouvelles formes d’entreprises mais aussi de sensibiliser les entreprises traditionnelles à la « net économie ».

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Cinq questions à … Daniel Annerose Président Directeur Général de MANOBI

1. Pour vous, qu’est ce que la société de l’information ? D.A.. : J'ai un peu de mal à élaborer autour de ce terme de "la société de l'information". Je vois le droit à l'information comme un droit fondamental de chaque citoyen. Chaque société soucieuse du bien-être de tous ses citoyens a donc le devoir de faire en sorte que ce droit fondamental soit garanti. Elle doit pour cela répondre à des enjeux techniques s'agissant des canaux à déployer pour que l'information circule efficacement, des questions opérationnelles et de régulation pour que les modèles économiques appliqués à une circulation large de l'information soient justes pour que chacun puisse y accéder, des questions de contenus adaptés pour que les utilisateurs trouvent des éléments d'information répondant à leurs besoins locaux autant qu'à leur besoin d'intégrer des espaces régionaux et internationaux. Les entreprises privées et publiques, les collectivités locales, les institutions nationales répondant efficacement à ces enjeux et questions constituent des briques de cette probable "société de l'information" et lorsque qu'il y aura beaucoup plus de citoyens évoluant dans les espaces délimités par ces briques que de citoyens placés dans les espaces vides non connectés, inaccessibles ou sans contenus adaptés, peut-être alors que cette "société de l'information" commencera à devenir quelque chose de tangible. 2. En quoi Manobi est-elle une initiative typiquement africaine ? D.A.. : Nous sommes six fondateurs, trois sénégalais et trois français. Nous avons lancé notre projet avec la vision de déployer des services exploitant les TIC pour répondre aux besoins de développement économique et social des pays en développement et notamment en Afrique. Notre premier service était destiné aux agriculteurs sénégalais auxquels nous avons permis de consulter sur leur téléphone mobile les prix et les arrivages de leurs produits agricoles. Ce service et tous les autres que nous avons commercialisé par la suite ont tous trouvé leur origine dans une analyse des besoins locaux et dans une exploitation des technologies pour que les usages de ces services se fassent le plus simplement par chacun quel que soit son niveau d'équipement, ses moyens économiques ou son niveau d'alphabétisation. Cela pose des questions complexes que nous essayons de traiter le plus efficacement en interne pour que nos services soient le plus facilement appropriables. Si nous sommes aujourd'hui africains par la géographie de la commercialisation de nos services et aussi par les sources d'inspiration de nos services, je pense que nous sommes surtout un opérateur de service global pour lequel l’utilisateur est donc au centre de sa stratégie. 3. Manobi est une « succes story » africaine en matière de TIC, est-ce l’arbre qui cache la forêt ou au contraire est-ce annonciateur d’autres initiatives originales? D.A.. : Nous avons certes acquis une visibilité intéressante mais il nous reste encore à faire pour atteindre la taille critique nécessaire pour justifier le qualificatif de "success story" que vous nous attribuez gentiment. Nous avons montré qu'il est possible d'innover sur ce continent, ce qui ne doit pas surprendre ceux qui le connaissent en profondeur. D'autres initiatives au Sénégal, au Bénin, au Kenya, au Ghana, en Afrique Sud, au Maghreb et dans nombreux autres pays d'Afrique ont prouvé l'existence de la capacité d'innovation du continent. La question fondamentale est que faire pour que ces initiatives apparaissent plus dans les écrans des radars économiques internationaux? Pour cela et comme partout ailleurs il faut des fonds et des investisseurs pour soutenir naturellement de telles initiatives et les aider à atteindre la taille économique requise pour qu'elles puissent non seulement se déployer plus rapidement en Afrique, mais aussi aborder les marchés occidentaux. Une entreprise européenne ayant réalisé ce que nous avons réalisé en Afrique aurait depuis longtemps levé des fonds pour

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accompagner son développement. Or, nous sommes toujours à la recherche des moyens adéquats nous permettant de nous déployer efficacement dans la sous-région. Il y a bien d'autres initiatives originales qui viendront de l'Afrique, il faut maintenant espérer que l'environnement de l'investissement en Afrique arrive à se développer et à se structurer, bref accompagner celles-ci afin qu'elles ne demeurent pas simplement au stade de l'originalité, mais qu'elles grandissent et deviennent des entreprises profitables et donc attractives. 4. L’initiative Manobi a-t-elle reçu des aides publiques au Sénégal ? D.A.. : Nous avons toujours bénéficié d'un à priori favorable des services publics sénégalais. L'exemple de Manobi est souvent cité par les autorités du pays. Ceci est bien, mais comme je le disais précédemment, il faut beaucoup plus dans chaque pays pour encourager et accompagner les "champions locaux" afin d'en faire des entreprises de référence internationale. 5. Selon vous les acteurs publics ont-ils une responsabilité pour favoriser le développement de l’e-économie ? D.A.. : Absolument. Prenez l'exemple de l'Afrique du Sud. Ce que fait ce pays pour encourager les initiatives et les entreprises locales est remarquable et constitue une référence dont de nombreux pays africains pourraient s'inspirer. Tous les appels d'offres publics en Afrique du Sud évaluent les réponses sur le degré de participation des entreprises locales et leur contribution à développer de l'emploi localement. Ici au Sénégal, un pays que nous connaissons, bien de telles dispositions pourraient aussi être prises et mises en oeuvre simplement. Je donne aussi un autre exemple opposé, il nous est arrivé de proposer à une institution un service innovant et unique. Et bien, parce que celle-ci mobilise un fonds apporté par la Banque Mondiale, elle va être obligée de lancer un appel d'offre public auquel naturellement répondront tous les "spécialistes de réponse aux appels d'offre". L'idée innovante, qui constitue souvent le seul capital de la jeune entreprise ou du porteur de projet, devient ainsi publique et souvent ce n'est pas au porteur de cette idée que l'exécution de ce projet sera finalement confié. Il faut donc que les acteurs publics apprennent à stimuler l'innovation mais aussi la protéger, parce qu'elle a de la valeur et qu'elle est potentiellement génératrice de ressources nouvelles et de développement social.

Webographie

Bibliographie

MANOBI : http://www.manobi.sn La Mêlée numérique: l’Association fédératrice des acteurs de l’économie numérique en Midi-Pyrénées http://www.meleenumerique.com MBOLO L’Afrique sur Internet : Portail EMEA Europe Afrique Maghreb http://www.mbolo.com

IRIS, Politiques locales et nouvelles technologies, IRIS Initiatives Régionales, Innovations et stratégies, Chap .1 Développement économique local, rédigé par Marc Sahraoui, mai 2004 Rallet A. , L’économie numérique. 2002. www.jm.u-psud.fr/~adisrob/alma/econum.pdf Hislaire L., Lajoie T., Les marchés publics dématérialisés, collection « guide juridique », 2004

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Rôle de l’acteur public local

Les problématiques

Éléments clés - Chapitre 5

Mots repères

• Économie des TIC : Économie de la production des TIC (équipements et services) et de leur utilisation dans l'ensemble des activités d’un territoire.

• E-Économie de l’Internet : Concerne à la fois les entreprises qui vendent leur produits ou leurs services sur le net et les consommateurs qui les achètent ou vendent eux-mêmes sur des sites dédiés. Potentiellement, c’est un marché global. On parle de e-commerce en B2B, B2C, ou C2C.

• Sensibiliser les entreprises locales aux TIC : C’est une des problématiques centrales. La difficulté consiste à faire comprendre aux entreprises traditionnelles tout l’intérêt qu’elles pourraient tirer de l’inscription de leur activité dans une logique de e-business pour rationaliser ou optimiser leurs différentes démarches.

• Structurer une filière multimédia à l’échelle de son territoire : Cette démarche de structuration ne peut partir que de l’existant. Une fois ce travail de repérage réalisé, il s’agit en particulier de s’appuyer sur le levier de la commande publique pour valoriser les acteurs économiques du territoire qui développent ou s’appuient fortement sur une démarche TIC. .

• Un rôle de sensibilisation : des entreprises traditionnelles aux TIC • Un rôle d’accompagnement : de l’action des entreprises désireuses de s’inscrire dans une logique TIC

• Un rôle de mise en réseau : des entreprises spécialisées TIC • Un rôle de valorisation : des acteurs économiques TIC à l’échelle régionale • Un rôle de veille technologique et stratégique : sur les dimensions principales qui intéressent développant leurs activités en s’appuyant sur les TIC

• Un rôle de dématérialisation des marchés publics : en numérisant et en publiant les appels d’offres sur les sites web communaux ou régionaux et en permettant la soumission de réponses à appel d’offre directement sur Internet.

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Alors que l’Afrique vient de publier son plan d’action sur la société de l’information (African Regional Action Plan on the knowlege Economy : a framework for action) à l’image du programme e-Europe pour le vieux continent, il apparaît clairement une prise de conscience de tous les acteurs publics sur la nécessité d’engager une action volontariste et coordonnée en matière de société de l’information. Les collectivités locales ne sont évidemment pas en reste. Ce manuel se donnait pour objectif d’apporter quelques repères aux collectivités désireuses de s’investir dans une stratégie globale de territoire numérique. Chacun des cinq chapitres brossent les grandes dimensions structurantes de cette stratégie. Les bibliographies présentées à la fin de ces chapitres, mais surtout les webographies permettent de prolonger et d’approfondir les réflexions. Bien que non exhaustives, elles témoignent également de la richesse des initiatives existantes en Afrique en matière de politique TIC. Tout ceci permet finalement de conclure cette partie en étant très optimiste sur la capacité et la volonté des acteurs territoriaux africains à s’inscrire de façon active au sein d’une société de l’information, certes mondiale, mais qui s’exprime aussi de plus en plus en référence à la proximité.

Conclusion

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Techniques d’Information Graphique outils d’aide à l’aménagement

et au développement des territoires

Les TIG sont ici décrites dans leurs principes et abordées par le biais des usages que les acteurs publics peuvent choisir d’en faire comme outil d’aide à un processus d’aménagement. Cette approche est destinée à un public de non spécialistes de ces techniques qui souhaite, dans le cadre de sa participation à l’aménagement et au développement du territoire, se donner une compréhension des usages possibles et des conditions de leur utilisation. Au Sénégal, comme d’autres pays de la sous région, pays où l’on voit peu de cartes, où il est difficile d’accéder aux cartes même s’il en existe, du fait de leur dispersion ou de la caducité des informations surtout en milieu urbain, les nouvelles technologies de l’information géographique combinant géomatique, SIG et Internet ouvrent des perspectives larges d’expérimentations et d’applications dans le domaine de la participation des différents niveaux d’acteurs à la gestion territoriale en particulier dans le domaine urbain. Partant du postulat que les acteurs du développement d’un territoire ne peuvent se passer d’une connaissance partagée de ce territoire à différentes échelles, nous pensons que ces nouvelles méthodes et outils de gestion de l’information et en particulier de l’information à référence spatiale peuvent concourir à des prises de décision plus consensuelles.

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SOMMAIRE

1 - LES TIG OUTIL D’AIDE AU DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL • Question de vocabulaire • Quelques grands enjeux 2 - LES SYSTEMES D’INFORMATION GEOGRAPHIQUE • Un concept de base • Un terme, de multiples acceptations • Des applications multiples • L’organisation des données en couches • L’enregistrement des données dans le système • Travailler avec l’information stockée • Restitution des données, communication de l’information • Ressources web sur les logiciels 3 - CRÉER ET DEVELOPPER UN SYSTEME D’INFORMATION GEOGRAPHIQUE • Quel rôle pour les SIG dans le champ de l’aménagement et du développement des territoires ? • Définir son projet SIG • Prendre en compte un contexte 4 - LES UTILISATIONS DU SYSTÈME D’INFORMATION TERRITORIAL • Le partage de l’information • Le diagnostic territorial aide à la décision

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1 - Les TIG outil d’aide au développement territorial

OBJECTIFS � Des questions de vocabulaire � Positionner quelques grands enjeux

Les Techniques d’information géographiques, aussi dénommées techniques géomatiques recouvrent un ensemble vaste, des techniques classiques des SIG, des bases de données, de la cartographie automatisée ou numérique, aux techniques de mise à disposition de cartographie sur le Web, voire même les techniques légères de constitution d’information géolocalisée grâce aux récepteurs GPS (global positioning system). L’objectif de ces techniques est la mise à disposition de l’information localisée et cartographiée à un public élargi aux non professionnels du traitement de cette information. Les références de plus en plus nombreuses aux démarches territoriales participatives, au Nord comme au Sud, dans le cadre des politiques de décentralisation ont conduit les acteurs de l’aménagement et du développement territorial à miser sur les capacités de ces techniques. D’autre part l’évolution des modes de gouvernance implique une évolution dans la conception même des politiques : on passe de politiques sectorielles à des politiques territorialisées, basées sur des logiques de projets de territoires impliquant une connaissance précise et globale de ces territoires.

1.1 Question de vocabulaire

1.2 Quelques grands enjeux

On peut s’interroger sur l’efficience de ces outils de gestion de l’information dans la démarche d’aménagement du territoire, aménagement qui recouvre différentes échelles, du projet régional à la gestion urbaine. Cette démarche vise à l’organisation cohérente de projets, d’équipements, de politiques sur un espace déterminé. Dans les démarches participatives, intégrer les logiques des différents acteurs se révèle indispensable à la construction du projet dans une optique de sa prise en compte effective par les différents acteurs et de régulation des conflits qu’il fait naître. Comment intégrer dans un processus participatif la dimension territoriale apportée par les acteurs ?

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À quelles conditions les nouveaux outils de gestion de l’information, cartomatique, SIG et mise à disposition sur Internet peuvent ils y concourir ? Quel choix dans la panoplie des outils disponibles permet d’apporter une réponse à un besoin explicité ? Comment adapter la réponse aux contextes locaux et aux ressources mobilisables à un temps donné ? Cette partie du manuel souhaite apporter des élèments de réponse à ces questions et ainsi aider le lecteur à se forger sa propre opinion et à construire sa propre démarche.

Sur le web, une annonce pour l’ouverture d’une plateforme d’information géographique grand public.

Un exemple de série d’informations statistiques cartographiées en libre accès sur le site de l’Institut Atlantique

Bibliographie PORNON H. - 2000 - Systèmes d'information géographique, pouvoir et organisations : Géomatique et stratégies d'acteurs - L'Harmattan (Hors Collection). ROCHE S. - 1999 - Enjeux de l'appropriation sociale des technologies de l'information géographique pour l'aménagement territorial. Etudes de cas en France et au Québec - Presses Universitaires du Septentrion Lille. ROCHE S. - 2000 - Les enjeux sociaux des systèmes d'information géographique : le cas de la France et du Québec - L'Harmattan; (Géographie Sociale). MIRALLES A. - 2004 - Mise en place de systèmes d'information à références spatiales (SIRS) - Actes du Vème Séminaire - Montpellier, 13-14 Nov. 2003 - Cemagref Revues.

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2 - Les Systèmes d’Information Géographique

OBJECTIFS � Les questions de vocabulaire : que recouvre la terminologie ? � Comprendre les principes de la technologie SIG pour être en mesure d’évaluer ses

apports et contraintes dans un projet de système d’information sur le territoire.

Un historique rapide : Si les premières représentations de l’espace précédent l’écriture, la cartographie « thématique » apparue dès le XVI ième siècle a connu un essor avec le développement des logiciels de cartographie automatique dès 1960. Les années 70 ont vu le développement des premiers SIG, favorisé par l’évolution simultanée des techniques informatiques et des théories géographiques dans un contexte de prise de conscience des problèmes environnementaux et de croissance des besoins de gestion raisonnée et pluridisciplinaire des connaissances sur les ressources. On mettra l’accent sur ce besoin de confronter des informations issues de plusieurs domaines ou de cartes multiples dans le but de créer une connaissance nouvelle. Ce qui était difficilement réalisé par la superposition de calques devient, avec le développement de la technologie, un des points fort des SIG.

2.1 Un concept de base

Quelles sont les caractéristiques de ces systèmes d’information ? Ce sont des systèmes de gestion de bases de données (SGBD) conçus pour traiter des données spatiales -objets géométriques représentant la réalité terrain, repérés dans un système de coordonnées- et leurs données attributaires -données caractérisant ces objets de différents points de vue thématiques, statistiques par exemple–. Comme tout SGBD ils disposent d’un langage d’interrogation qui sert à formuler des requêtes portant à la fois sur les objets spatiaux et leurs données attributaires. Ils permettent une mise à jour simultanée des deux types d’information. Ils possèdent aussi un module de traitement cartographique de l’information extraite. Ces trois composantes d’un SIG nous serviront de trame de développement pour la suite.

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Le SIG a aussi été défini comme « ensemble de processus exécutés sur des données brutes et permettant de produire des informations utiles pour la prise de décision », ce qui s’applique à de nombreux domaines : le marketing pour les banques, les assurances, le commerce, la logistique pour les transporteurs, la gestion des réseaux pour les sociétés de télécommunication ou de distribution d’énergie, la gestion des territoires pour les villes et les administrations, la gestion des ressources environnementales. Dans le domaine de l’aménagement et de la gestion du territoire qui est notre objet, les sigles se sont multipliés : SIRS Système d'Information à Référence Spatiale, SIT Système d'Information du Territoire, BDU Base de Données Urbaines, SIU : Système d'Information Urbain, SIE : Système d'Information de l'Environnement.

2.2 Un terme, de multiples acceptations

2.3 Des applications multiples, un objectif commun

La terminologie SIG recouvre plusieurs définitions : • des logiciels, SIG généralistes bureautiques, SIG généralistes de gestion, SIG métiers. Ce sont des logiciels commercialisés par des sociétés, sachant qu’il n’existe pas encore de logiciel SIG libre (open source) comparable à ceux-ci.

• un système informatique enveloppant des matériels, logiciels, processus de collecte et de gestion des données, méthodes d’analyse et technique d’affichage des données à référence spatiale afin de résoudre des problèmes complexes d’aménagement et de gestion.

• une équipe ou un service • Regroupement de compétences plurielles qui permet de mettre en place et d’animer un réseau de producteurs de données afin d’enrichir et de maintenir à jour le système, un réseau d’utilisateurs, souvent identique au précédent et des compétences en analyse du territoire indispensables à la valorisation de l’ensemble.

Globalement ces systèmes sont basés sur une technologie SIG et ils permettent de répondre à cinq grands types de questionnement : Où sont les objets ? (localisation, inventaire) Quoi en un lieu ? (coexistence en un lieu d’objets divers) Selon quelle organisation ? (relations spatiales entre les objets) A quel temps ? (restitution des évolutions) Si ...alors ? (construction de scénarios).

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2.4 L’organisation des données en couches • Dans un SIG les données géographiques sont organisées en couches -on trouvera aussi les termes de plan d’information, layer-. Chaque couche décrit des objets géographiques de même nature et représente un thème. On aura par exemple une couche pour le réseau hydrographique, ue couche pour les infrastructures routières, une couche sur l’occupation du sol, une couche de limites administratives …. • Ces données géographiques sont géoréférencées, ce qui signifie que chaque point de la base est identifiable en longitude et en latitude selon un type de projection choisi pour l’ensemble du système. C’est ce qui permet de « caler » les couches pour que leur superposition affiche une représentation acceptable du territoire. C’est ce qui permet de répondre notamment à la question « quoi en un lieu ? ». • Les données associées à ces objets graphiques, données qui apportent une information quantitative ou qualitative sur ces objets géographiques, sont structurées dans la base de données du logiciel.

Le SIG est donc une représentation modélisée de la réalité observée. Une démarche de transposition du réel est effectuée pour la rendre exploitable par ces outils informatiques. Il est dès lors évident que l’objectif fixé au SIG, les attentes de ses utilisateurs vont conditionner la manière de décrire la réalité, donc les choix de constitution de l’information.

Pour en savoir plus : des cours ou des présentations sont accessibles sur Internet. http://www.fao.org/sd/frdirect/gis/EIgis000.htm http://www.unites.uqam.ca/dgeo/geo7530/st_tab.htm

Modéliser la réalité observée Organiser sa représentation en couches

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2.5 L’enregistrement des données dans le système Cette modélisation en couches de la réalité peut être représentée sous deux formes : • En mode raster, la réalité est représentée par un quadrillage régulier de cellules (pixels), une valeur est affectée à chaque cellule ; c’est typiquement le mode des images satellite ou des photos aériennes.

• En mode vectoriel, la réalité est décomposée en points, lignes, polygones et volumes ; le point est sans dimension, on connaît sa localisation, la ligne, a une dimension (la longueur), elle est composée de points ayant les mêmes attributs, le polygone, a deux dimensions (surface), il doit être fermé, le volume, a trois dimensions (3D), il ajoute la hauteur à la surface. A chaque point correspond un couple de coordonnées (x,y), auquel est ajouté une coordonnée z pour les objets 3D. Dans la terminologie SIG on emploie aussi les termes de sommet, de nœud et d'arc .

Le mode vectoriel requiert moins de place en mémoire, conserve une bonne définition quelle que soit l’échelle de visualisation et offre la possibilité de représenter des attributs multiples alors que les images ne contiennent pas de données d’attribut sur les entités qu’elles présentent. Les images au format raster servent donc souvent de fond aux vues ou cartes produites, les données spatiales sur lesquelles on effectue des traitements étant dessinées sur celles-ci. Les données d’attribut, si elles sont trop nombreuses pour être enregistrées dans le système seront stockées dans une base de données (SGBD) externe au SIG Les données sont représentées sous la forme de tables utilisant certains champs comme « lien ». Leur mobilisation sera effectuée en fonction des besoins par des opérations de « liaison », « mise en relation » avec le SIG ; il importe alors que ce champ « lien » soit strictement identique au champ identifiant les les objets vectoriels du SIG.

2.6 Travailler avec l’information stockée Le fonctionnement du SIG par couches que l’on peut ajouter successivement, combiner, permet une approche de type hypothético déductive, une démarche d’analyse spatiale qui se construit étape par étape : la facilité d’exploration permet d’enchaîner observation, description, analyse, explication, et ainsi incite l’utilisateur à un raisonnement spatial. Créer une ressource Le premier intérêt d’un SIG est bien de constituer une ressource par stockage d’une information cohérente et harmonisée, collectée une fois pour toute, afin de la rendre mobilisable à la demande et partageable. Les logiciels SIG permettent cette manipulation des données, leur correction (échelles, niveau de détail, concordance des unités spatiales, conventions de représentation…). Interroger en fonction d’une problématique Le deuxième intérêt est de permettre une interrogation spécifique des informations : rechercher toutes les informations sur une zone particulière, rechercher tous les objets vérifiant

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une condition (quels sont les quartiers de densité supérieure à x habitants au km2 ?), rechercher selon une proximité (quels sont les équipements publics dans une zone de 200 mètres de part et d’autre de cette voirie ou autour de la mairie ?). Les logiciels SIG offrent la possibilité de formuler des requêtes basées sur une sélection graphique à l’écran ou sur l’écriture d’une formule booléenne ou mathématique. La résolution des questions de proximité se fait par des algorithmes de calcul de « buffer » ou « zone tampon », transparents pour l’utilisateur. Créer une information nouvelle L’utilisation d’un SIG permet aussi de créer des données nouvelles par regroupement ou agrégation de données d’un niveau spatial détaillé à un niveau spatial plus englobant ; on pourra par exemple définir et faire évoluer des zonages, et observer l’évolution des valeurs de variables recalculées pour chaque zone. Ces opérations peuvent être réalisées graphiquement ou par calcul. La fonctionnalité permettant le croisement des données est à ce titre particulièrement intéressante. Croiser des couches d’information de thèmes différents permet, au-delà de la simple superposition visuelle que l’on pouvait obtenir avec des calques, de créer de nouveaux découpages de l’espace qualifiés par les informations des deux thèmes. On crée souvent ainsi une typologie des espaces ( par exemple espaces de constructions nouvelles soumis au risque d’inondation), voire une donnée nouvelle (aptitude des territoires au développement d’une culture particulière).

Construction d’une démarche d’analyse spatiale Cet ensemble de fonctionnalités permettent à l’utilisateur de progresser pas à pas dans sa compréhension de l’organisation d’un territoire, dans son appréhension des différentes logiques à l’œuvre, d’autant plus aisément que chaque requête sur les données peut être cartographiée, c'est-à-dire qu’on peut en visualiser les arrangements sur le territoire.

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2.7 Restitution des données, communication de l’information Le processus d’utilisation de la technologie SIG peut être décomposé en trois phases : •Acquisition et stockage de l’information : Nous venons d’évoquer les capacités de stockage de données hétérogènes et l’importance de la définition de l’objectif de l’outil ; nous reviendrons donc par la suite sur la phase d’acquisition. •Traitement des données selon les cinq grands types d’interrogation. •Restitution de l’information : Elle va de la simple restitution des données stockées à la visualisation d’une information construite par les opérations de traitement : sélections, calculs, croisements.

Produire des cartes L’utilisation d’un SIG débouche le plus souvent sur une production cartographique, que celle-ci soit consultée à l’écran ou éditée sur papier ; la production de graphiques ou de tableaux d’extraction de données permet de diversifier la présentation de l’information, d’en faciliter la compréhension par des utilisateurs diversement acculturés à la lecture cartographique.

Communiquer l’information La restitution de l’information ne peut être séparée de la communication de l’information à des tiers afin qu’ils puissent s’en saisir, l’appréhender, la comprendre. Communiquer nécessite de faire des choix sur le message à transmettre en fonction du public visé. La carte qui peut servir de base de discussion et d’analyse entre pairs n’est pas la même que celle qui transmettra le résultat d’une analyse à un public plus large, qui servira à mettre en évidence des territoires d’enjeux, à hiérarchiser des facteurs ; la restitution finale pourra même passer par la réalisation d’un schéma cartographique. Le respect des règles de sémiologie graphique demeure un impératif quel que soit le rendu, la carte est un objet qui doit pouvoir s’appréhender visuellement et qui obéit à des règles de lecture établies. De ce fait très souvent ces opérations de mise en forme seront retraitées à l’extérieur du logiciel SIG avec des logiciels de dessin assisté par ordinateur (DAO).

Visualisation à l’écran Document de cartographie statistique et graphique associé

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Le réseau Internet offre une opportunité de communiquer l’information cartographiée, de la mettre à disposition d’un public large, concerné par l’aménagement de son territoire. Ce domaine (Web Mapping) est actuellement en pleine expansion. Les éditeurs de SIG proposent tous des outils logiciels permettant de visualiser les données issues de leurs systèmes. Parallèlement le développement en plein essor de solutions et de ressources « libres » ( open source ), permet de publier cette information en disposant de fonctionnalités proches de celles des SIG, mais accessibles à un public familiarisé à la consultation sur internet : navigation dans la carte (déplacements,zoom), interrogation simple (valeur d’un attribut pour un objet géographique pointé sur la carte), gestion de l’affichage des couches (par cases à cocher), requêtes thématiques préparamétrées, voire même mise à jour de l’information.

Schéma de synthèse de l’occupation du sol de la commune de Thiaroye

Visualisation sur Internet, développée à partir de logiciels libres (open source), d’une vue crée sur un SIG,

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2.8 Ressources web sur les logiciels

Les logiciels, SIG généralistes bureautiques, SIG généralistes de gestion, SIG métiers, sont aujourd’hui très nombreux sur le marché, cherchant à conquérir les services publics, comme les entreprises. Les sites de sociétés commercialisant ces logiciels offrent souvent des pages intéressantes de liens vers des projets intégrant les SIG. La société ESRI http://www.esrifrance.fr/ commercialise différents produits, dont Arcinfo et Arcview. Sur le site américain il est possible d’accéder à divers programmes développés par cette société http://www.esri.com/industries.html La société ACXIOM (ex Claritas) http://w3.claritas.fr/france/SIG commercialise Mapinfo en France. La société Intergraph http://www.intergraph.fr/ commercialise Geo Media Pro. La société Geo Concept http://geoconcept.com/fr commercialise les produits du même nom. La société Clark Labs http://www.clarklabs.org commercialise IDRISI un système orienté vers l’analyse d’images .

Dans le domaine du logiciel libre –suivant la philosophie GNU qui autorise la copie, la diffusion du logiciel et la modification du code source- GRASS - Geographic Resources Analysis Support System http://grass.itc.it/ est un SIG généraliste complet. Son développement est actuellement poursuivi par une équipe internationale. GRASS a été doté d'une interface graphique qui en facilite l’accès, toutefois Il s’adresse encore à des utilisateurs ayant quelques connaissances des commandes UNIX pour la manipulation des données.

C’est dans le domaine de la visualisation sur Internet que les ressources sont importantes. L’état actuel de possibilités de développement du Web mapping est présenté dans un article de la revue en ligne M@ppemonde http://mappemonde.mgm.fr/num8/internet/int05401.html

On peut s’inscrire et participer à des forums de discussion comme http://www.forumsig.org/ Ce site a pour objet de proposer l'aide et les ressources nécessaires à l'utilisation des logiciels dans le domaine des Systèmes d'Information Géographique (S.I.G.); Le site de « GeoRezo » http://georezo.net/ « est une porte d'entrée pour vous aider à répondre à toutes vos interrogations, au travers de forums thématiques, techniques, ... ou à rechercher des informations sur l'actualité de la géomatique, l'emploi, les entreprises du secteur, une référence bibliographique. »

Repères bibliographiques DENÈGRE J. SALGÉ.F - 2003 - Les Systèmes d'information géographique - PUF Que sais-je? - Paris. BORDIN P. - 2002 - SIG (Concepts, outils et données) - Hermès. BEGUIN M., PUMAIN D. - 2003 - La représentation des données géographiques : statistique et cartographie - Armand Colin (Cursus). SIG la lettre, revue, parution mensuelle, www.sig-la-lettre.com

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SI les SIG sont devenus cet outil incantatoire dans la panoplie des technologies offertes aux aménageurs c’est en partie parce qu’ils réunissent des fonctionnalités complémentaires concourant aux différentes étapes de la réalisation d’un processus : Des fonctionnalités de « base de données » permettant,

d’une part, le stockage d’une information validée et sa mise à jour, éléments d’un processus de capitalisation des données recueillies ou créées,

d’autre part l’interrogation de données d’origines diverses que l’on peut croiser afin d’en asseoir la validité et qui ouvre le champs de l’échange de connaissances voire de travail en concertation.

Des fonctionnalités de représentation cartographique permettant, d’une part une analyse visuelle des superpositions, des disjonctions, des barrières entre

phénomènes, la constitution d’une connaissance partagée grâce à cette analyse pouvant déboucher sur un travail coopératif,

d’autre part la mise à disposition d’une information construite, la communication entre partenaires, la communication avec l’utilisateur final.

L’observation des expériences et des projets de collectivités locales ou d’administrations incluant un système d’information géographique montre que « le SIG » ne peut pas répondre globalement à un ensemble de besoins mal définis, mais que c’est plutôt une aventure collective qui se construit pas à pas, en réponse à un besoin formalisé, dans un objectif bien précisé.

3 - Créer et développer un Système d’Information Géographique

OBJECTIFS � Construire un projet d’observation d’un territoire autour d’un SIG : mettre l’accent sur

quelques éléments à prendre en compte

L’aménagement du territoire entendu comme visant à l’organisation cohérente de projets, d’équipements, de politiques sur un espace déterminé recouvre différentes échelles, de la conception d’un projet prospectif de territoire à la gestion urbaine. Dans toutes ces démarches, intégrer les logiques des différents acteurs par la prise en compte de leurs données et de leur compréhension de ces données, pour en analyser les complémentarités ou les oppositions, observer les tendances d’évolutions spatiales, se révèle indispensable à la mise en place de régulations et à la réduction des conflits. Les actions de développement d’un territoire, pour qu’elles soient réellement prises en compte

Quel rôle pour les SIG dans le champ de l’aménagement et du développement des territoires ?

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par les différents acteurs qui y participent ne peuvent se passer d’une connaissance partagée de ce territoire, d’une transmission de cette connaissance, qui passe par le biais d’une cartographie. • D’une part les fonctionnalités cartographiques offertes par les SIG semblent un outil puissant d’aide à l’analyse d’un territoire, à son diagnostic, par inventaire, localisation, suivi des évolutions, mise en évidence des tendances et représentation de visions prospectives

• D’autre part la communication et la mise disposition de cette information à un public non initié, citoyens, acteurs de la société civile, voire élus, que les outils actuels rendent de plus en plus facile techniquement, est un enjeu de taille si on souhaite une participation publique à la gestion du développement territorial.

Définir son projet SIG

Une échelle de territoire à prendre en compte La détermination de la zone d’étude liée à la problématique est une étape qui va conditionner la recherche des données géographiques à rassembler. Cette problématique influe sur le niveau spatial auquel on veut travailler. Si l’on se réfère à quelques exemples de SIG de la sous région, travailler sur la gestion urbaine concertée d’une ville comme Thiès (http:hydram.epfl.ch/sites_projets/IMAP.htm) ou sur un système d’information et d’analyse des pêches de la Mauritanie à la Guinée (http://www.fao.org/fi/statist/fisoft/fisat/fias/generalites.htm) ou sur le diagnostic de la situation environnementale dans les régions d’accueil des réfugiés en Guinée (http://guinee-hcr.cirad.fr/index.htm et http://www.bondy.ird.fr/carto/refugies/) n’implique pas les même besoins en terme de précision des références spatiales.

Un outil à adapter à un champ de compétence et d’action, à un projet Même si les techniques d’acquisition des données et les champs thématiques observés peuvent partiellement se recouper, dans le cas de la gestion urbaine à Thiès par exemple, l’accent sera mis sur la mise en commun et l’harmonisation de données possédées par les différents acteurs, (état, services déconcentrés, autorités décentralisées) mais également par les représentants des quartiers, des villages voisins et des principales associations de la société civile et sur la clarté de l’interface utilisateur qui doit être accessible et performant pour un public varié. Dans le cas du suivi environnemental autour des camps de réfugiés—analyse des dangers pour les ressources et de leurs conséquences sur ces populations et les populations locales, pollution des eaux, déforestation, surpâturage– l’accent sera mis sur l’emploi de méthodes cumulatives d’inventaire associant relevés de terrain, interprétation d’images aériennes ou satellitaires, qui permettra de constituer l’ensemble de données nécessaires à la compréhension des relations entre les composantes des milieux bio physiques et ces populations regroupées dans l’urgence. L’objectif pour les pêches est de renforcer la coordination dans un souci de meilleure exploitation d’une ressource par la mise en commun à l’échelle de la sous région, de données partielles sur les niveaux d'exploitation actuels et les rôles des différents types de pêches.

Prendre la décision de créer et développer un SIG pour une collectivité territoriale, une communauté de travail, une organisation de la société civile est indissociable d’une réflexion approfondie sur son objectif, le contexte dans lequel elle pourra le développer, les moyens dont elle dispose pour le créer. Réussir son SIG c’est savoir se doter d’un outil spécifique qui peut apporter des solutions à des besoins clairement identifiés.

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Se fixer des objectifs clairs par étape Une fois l’ambition du projet décrite clairement, sa décomposition en étapes bien délimitées s’avère indispensable à la définition d’une stratégie capable d’obtenir l’adhésion d’un service ou de l’équipe à qui va revenir la tache de construire effectivement le SIG, tout particulièrement dans des conditions d’accès difficile aux données géographiques ou statistiques. Le SIG, basé sur la mise en commun, l’échange d’information ne peut vivre dans la durée que s’il est basé sur un réseau de partenaires ayant un intérêt à cet échange, d’autant plus que le l’aménagement et le développement du territoire se font à la jonction de nombreux domaines. La constitution de ce réseau qui idéalement pourrait être la première étape se joue en fait tout au long de la mise en route du SIG, l’adhésion définitive d’un partenaire passant par l’intérêt qu’il trouve en retour au traitement de ses données.

Recenser les besoins exprimés par les partenaires et utilisateurs Prendre en compte la palette des besoins des utilisateurs pressentis -qui vont attendre du SIG qu’il fournisse une réponse aux questions qu’ils se posent -, des partenaires fournisseurs de données -qui attendent une valeur ajoutée en retour de cette fourniture-, des responsables de la mise en place informatique concoure à la réussite du partenariat et influe sur la définition des restitutions à prévoir, et la nature des données à acquérir.

Définir les données nécessaires et leur mode d’acquisition Le niveau de précision des données découle de l’ensemble des besoins retenus. On pourra alors définir les données disponibles ou à acquérir en interne et les données externes à rechercher. Les données spatiales et les fonds de carte L’absence ou l’inadaptation du fond de carte est souvent mise en avant pour justifier l’impossibilité à cartographier. Nous avons vu que le SIG est un système capable de gérer des objets géométriques représentant la réalité terrain (points, lignes, polygones) Les images au format raster ne peuvent pas être traitées directement dans le SIG. Ils permettent cependant l’affichage de ces’images, qu’elles soient des photos aériennes, des cartes topologiques scannées ou des images satellitales. Elles serviront souvent de fonds de plan, d’habillage pour la visualisation. Le traitement des images satellitaires, destiné à mettre en évidence de l’information thématique (type d’occupation du sol par exemple) se fait dans un logiciel spécifique de traitement d’images (domaine de la télédétection). La manipulation de cette information thématique dans le cadre du SIG passe par une opération de numérisation, manuelle ou automatisée, qui consiste à créer des polygones, des lignes et des points auxquels on pourra attribuer ces valeurs thématiques comme données attributaires. La plupart des logiciels proposent des outils simples de numérisation.

De la photo aérienne au plan vectorisé dans le SIG, la numérisation

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Sur un fond de carte raster, numérisation des polygones des quartiers et de zones d’activités industrielles, numérisation de points de référence de projets, exemple du système d’information de Thiès (ref. supra)

Les données attributaires Ce sont les données qui caractérisent les objets géométriques - région, îlot d’habitation, parcelle, rue, point d’eau …- en leur affectant par exemple, un numéro d’identification, un type, un nom, une qualité, des données statistiques applicables à cet objet . Ces données peuvent être crées pas à pas au cours de la numérisation ou importées à partir d’un fichier statistique crée dans un tableur ou une base de données.

C’est souvent ces données que l’on doit rechercher à l’extérieur. Leur précision géographique –îlot, quartier, commune, région, est définie par les objectifs du projet et doit correspondre à la précision du fond géographique. Il est important à ce stade de définir comment ces données seront mises à jour, méthode, opérateur, engagements réciproques-, et donc de privilégier les données pour lesquelles ces prévisions de mise à jour sont réalistes.

Source FAO-GIS www.fao.org/geonetwork/

Cette opération de numérisation bien que souvent longue et fastidieuse ou onéreuse permet de dépasser ce problème de l’absence de fond de carte.

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Prendre en compte un contexte

S’interroger sur la durée de vie du projet Un système d’information territorial –ensemble de données collectées dans le SIG, réseau de partenaires et de compétences en analyse- relève du temps long. Au-delà du temps nécessaire à la constitution du réseau de partenaires, à l’accumulation des données, le développement de compétences partagées en analyse du territoire demande un temps de pratique en commun, un temps d’acculturation au point de vue sectoriel de chaque participant. La réalisation d’un projet isolé à très court thème peut néanmoins exiger une cartographie de l’information que les logiciels de cartomatique et de dessin vectoriel peuvent permettre de résoudre ; un logiciel bureautique SIG peut aussi être utilisé comme simple outil de cartographie.

Une spécificité du travail au Sénégal comme dans beaucoup de pays en voie de développement résulte des difficultés d'accès aux fonds de carte et aux données nécessitant de définir une réelle stratégie de constitution de l’information.

Nous venons d’aborder la façon dont les objets de référence spatiale pouvaient être créés à partir d’images. La fiabilité des données affectées à ces unités spatiales doit être évaluée. Cette question est d’autant plus cruciale que l’on s’intéresse à des niveaux fins. Ainsi qu’en est-il des comptages de population effectués au niveau de quartiers urbains alors que les limites de ces quartiers ne sont pas fixées et qu’on souhaite représenter des évolutions ? Un danger de l’utilisation sans précaution de données peu fiables dans un SIG est de conférer rapidement une légitimité aux informations produites du fait qu’elles le sont avec un appareillage sophistiqué auquel est associée la notion de rigueur et que leur cartographie en fixe l’image.

Créer et mettre à jour des données par des relevés de terrain Dans notre domaine d'application, la technologie GPS est utilisée pour localiser des objets sur le terrain par leurs coordonnées par relevé de leurs position. Ces relevés sont déchargés sur un ordinateur dans le système de coordonnées utilisé pour le SIG et visualisés directement afin de constituer une nouvelle couche d’information ou de mettre à jour des couches existantes. On peut ainsi actualiser un réseau routier, relever ou actualiser la localisation d’équipements ou de bâtiments, le contour de nouvelles zones d’urbanisation. Il est alors possible de calculer la surface utilisée par ces extensions urbaines. Cette information pourra ensuite être associée avec des données démographiques collectées par enquête afin de calculer la densité de la population ou la surface disponible pour chaque famille. La représentation cartographique de ces informations et de leur évolution permet d’assurer un suivi des tendances de l’étalement urbain, voire une approche prévisionnelle des équipements et services à prévoir.

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Cartographier en dehors du SIG ? Le développement des logiciels de cartographie automatisée a précédé celui des SIG et dans le domaine de la cartographie statistique ils offrent plus de possibilités que les modules d’analyse thématique des SIG bureautique courants car ils sont programmés dans cet objectif. On peut donc envisager leur utilisation quand un lot important de données statistiques est à traiter. Cette utilisation peut se faire sur des fonds de carte vectoriels et des données extraits de SIG et importés dans le logiciel ou à partir de fonds créés pour cet usage. Ils constituent aussi une ressource, dans une phase de démarrage d’un projet SIG, permettant de produire rapidement des représentations cartographiques de données, utiles à la constitution du réseau de partenaires. Le travail préalable de vectorisation d’un fond de carte pourra éventuellement être réintroduit et calé dans le SIG. La sauvegarde et la gestion des fichiers de données et des fichiers de fonds relèvent uniquement de la bonne organisation de l’utilisateur. Signalons un logiciel libre de cartographie statistique SCAP-J sur le site www.univ-tlse2/geoprdc/scap/java/ et un logiciel en téléchargement gratuit Philcarto et Xphil sur le site http://philgeo.club.fr/Index.html. Les logiciels de dessin assisté par ordinateur (DAO) qui permettent de travailler avec de l’information raster ou vectorielle, dont nous avons signalé l’intérêt pour la production de schémas cartographiques de synthèse peuvent aussi être utilisés pour la production isolée d’une carte de présentation ou de localisation, à partir d’extraction d’un SIG ou sur un support de carte scannée. affichée en fond et redessinée ou habillée en mode vectoriel..

Si il existe des spécificités entre pays elles résident plus dans le stock de données disponibles, dans le niveau d’acculturation à la carte géodésique, dans la perception culturelle des territoires des groupes d’acteurs voire dans les modalités de mise en œuvre dans le cadre de la gestion territoriale participative que dans la méthodologie de constitution d’un dispositif d’information géographique.

Estimer les investissements Les logiciels : les logiciels libres peuvent être copiés, redistribués, leur code source est modifiable. Ils demandent néanmoins un apprentissage lourd pour leur manipulation ou de faire appel à des sociétés de développement pour en améliorer l’interface. Pour le moment ils restent en deçà des possibilités offertes par les logiciels commerciaux. Les données : les données dispersées dans les services peuvent être mises à disposition pour le SIG, mais conçues pour répondre aux besoins de leur producteur, leur intégration nécessitera souvent un travail de nettoyage et de validation non négligeable. Il ne faut pas sous estimer le coût des enquêtes à réaliser pour mettre à jour des données statistiques ou mettre en place une collecte d’information auprès de la société civile. Les photos aériennes et les données satellitaires ont un coût d’achat auquel il faut ajouter, pour celles-ci, les coûts de traitement qui demandent un savoir faire et des outils performants nécessitant de faire appel à des sociétés spécialisées. Il existe de nombreuses données images ou géographiques téléchargeables et exploitables dans un SIG –essentiellement américaines, canadiennes, australiennes– mais peu concernant la sous région. Les opérations de numérisation à partir d’images, suivant le niveau de précision attendues constituent aussi un investissement. Les matériels : une configuration de base doit pouvoir réunir au minimum un ordinateur, une unité de stockage, un scanner, un GPS, une imprimante couleur, un accès à Internet. La formation des personnels dans un domaine en constante évolution est à estimer.

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4 - Les utilisations du système d’information territorial

OBJECTIFS � En conclusion, résumer quelques apports de l’utilisation d’un SIG

Les TIG, cet ensemble de techniques dont nous venons de décrire les fonctionnalités et les implications ne constituent qu’un « outil » à la disposition des aménageurs et des acteurs du développement. Selon qu’ils seront techniciens, décideurs, représentants de la société civile voire simple citoyen, l’utilisation qu’il décideront d’en faire ne sera à l’évidence pas la même. Il serait fastidieux d’essayer de lister les grands types d’utilisation envisageables. Les quelques repères fournis devraient permettre de naviguer sur le net à la découverte d’applications, tant il est vrai que ce domaine est encore un domaine d’expérimentation tant au Nord qu’au Sud et que ces outils novateurs, dans les usages qui en sont expérimentés, se heurtent à la résistance des organisations du travail préexistantes, de pratiques héritées de politiques plus sectorielles que territoriales qui ont structuré des savoir-faire et des mentalités. Dans le cadre français de la décentralisation et des dernières lois d’aménagement du territoire, les collectivités locales en mesurent bien les apports positifs pour tout ce qui relève de la gestion des services techniques et elles développent pas à pas leurs systèmes. Cette évolution s’appuie sur une tradition solide de constitution de données statistiques et sur une culture de la carte des techniciens de l’aménagement. Si elles pressentent aujourd’hui les potentialités offertes dans le domaine de la construction collective d’un projet de territoire à échelle supérieure, les développements ont encore souvent un caractère expérimental. Au Sénégal dans le cadre de la décentralisation qui a transféré des compétences d’aménagement aux collectivités territoriales, les incitations à la participation de la société civile mettent la nécessité de la concertation au premier plan. Dans un contexte de rareté des données s’ouvre une voie spécifique d’utilisation de ces technologies, plus interactive, qui mobilise plus directement les connaissances de la société civile. On ne peut pas évacuer, néanmoins, la question de quelle représentation de l’espace géographique est véhiculée par la cartographie, et quel intérêt offre t’elle pour des citoyens dont la référence principale n’est peut être pas la référence géodésique.

4.1 Le partage de l’information Partager l’information spatiale Si les fonctionnalités cartographiques offertes par les SIG sont un outil puissant, pour les « initiés », d’aide à l’analyse d’un territoire, à son diagnostic, par inventaire, localisation, suivi des évolutions, mise en évidence des tendances et représentation de visions prospectives, la communication et la mise disposition de cette information à un public non initié, est un enjeu de taille si on souhaite une participation publique à la gestion du développement territorial.

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Partager l’information entre services partenaires d’un SIG et introduire de la rigueur Les techniques de SIG ont renforcé la nécessité de rigueur dans la description de l’information, rigueur qui avait déjà été introduite par l’informatisation des bases de données ; les possibilités offertes de superposition d’informations de provenances diverses mettent bien en évidence les incohérences de ces informations obligeant par contre coup à chercher une « explication » à ces incohérences donc à préciser le domaine de validité des données fournies par chacun. Pour être analysée de façon croisée, les données statistiques doivent se référer à des découpages spatiaux identiques ou combinables, ce qui n’est pas sans nécessiter un suivi précis dans le cas de pays où ces découpages sont en pleine évolution

Cette rigueur imposée par la localisation en référence à un système de coordonnées géodésiques peut être perçue comme un frein à la réalisation de cartes qui puissent permettre à chacun ou à chaque groupe de dessiner son espace.

Partager l’information spatiale dans sa production et progresser vers un consensus Les habitants ont une connaissance fine des localisations et des usages de leur territoire, alors que leur inventaire cartographique n’existe pas et serait nécessaire dans un cadre de gestion urbaine. Des outils comme le GPS permettent d’alléger cette contrainte. Le fond peut se résumer à quelques éléments servant à planter le décor, à se repérer, à s’orienter (une ligne de cote, un lac, un sommet, un carrefour…). Les localisations des seuls objets qui ont strictement à voir avec le problème traité sont effectuées au GPS, laissant au concepteur le choix de l’expression graphique du lien unissant ces lieux. On peut ainsi mettre rapidement en place des inventaires, figurer des regroupements d’objets définissant des zonages de vie, des zonages de chalandise, des aires de déplacement….On peut ainsi envisager la participation citoyenne à l’enrichissement d’une base commune d’informations de référence, stabilisée et validée. L’application semble évidente pour la gestion des services de proximité –suivi et nettoyage des aires de regroupement des ordures, signalement des problèmes de voirie ou de réseau ... Ce type de schéma cartographique n’a pas attendu le développement des techniques de SIG ou même de cartomatique pour exister mais les outils techniques actuels facilitent sa réalisation et permettent son intégration rapide dans un dispositif plus complexe.

4.2 Le diagnostic territorial aide à la décision Le SIG n’est qu’un maillon dans la chaîne de décision. Il ne se pose pas la question de départ et ne donne pas la réponse finale. Il permet d’établir un diagnostic, la décision finale est réservée aux décideurs, aux élus pour les collectivités. Le diagnostic territorial doit permettre de mettre en commun les représentations et connaissances de chacun sur le territoire, définir des territoires d’enjeu, présenter des choix possibles. Dans son élaboration il est donc nécessaire, après la phase d’inventaire et d’analyse descriptive la plus exhaustive possible de passer à une phase tactique, de hiérarchisation des éléments, de synthèses utilisables dans un processus d’aide à la décision. Cette phase passe par le dialogue et la négociation, aidée par l’utilisation d’outils de présentation et d’animation permettant d’expliquer aux interlocuteurs les tendances lourdes, les contraintes, les coups partis et les lieux sur lesquels l’action reste envisageable.

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Résumé de l’ouvrage Cet ouvrage associe deux volets qui, jusqu’ici, étaient abordés le plus souvent de façon indépendante. Le premier intitulé « Les pouvoirs publics locaux face à la société de l’information, quelles perspectives africaines ? » aborde les grandes questions qui se posent aux exécutifs locaux dès lors qu’ils souhaitent s’investir dans une stratégie volontariste en matière de Techniques d’Information et de Communication (TIC). Le second concerne la question des Systèmes d’Information Géographique (SIG) envisagés comme des outils se mettant au service de la gestion des territoires et de l’aide à la décision. Dans un cas comme dans l’autre, ce sont les technologies du numérique qu’il s’agit de considérer en évitant tout cloisonnement et surtout en ne les percevant pas comme une finalité mais bien comme des leviers du développement territorial. Cet ouvrage s’adresse prioritairement aux futurs chargés de mission TIC/SIG au sein des administrations publiques décentralisées.

Françoise Desbordes est ingénieur d’études CNRS, membre du laboratoire de recherche CIRUS, équipe Centre Interdisciplinaire d’Études Urbaines, elle développe des travaux sur l’observation des changements des territoires et l’utilisation des SIG comme outils d’aide à la prise de décision en aménagement. Elle a assuré la responsabilité de plusieurs projets sur ce thème en collaboration avec des collectivités locales. Ces compétences en diagnostic territorial l’amènent à intervenir sur des missions d’expertise et de formation auprès des services déconcentrés de l’Etat. Elle a participé aux recherches du laboratoire sur le développement local et les NTIC dans les petites villes. Elle est chargée de cours à l’Université de Toulouse-le Mirail, en Master IUP « Aménagement et développement territorial » et en Master professionnel « Villes, habitat et politiques d’aménagement. Elle est intervenue durant trois ans dans le DESS « Aménagement, Décentralisation et Développement territorial de l’ENEA de Dakar dans le module « SIG, aide à l’aménagement du territoire ». Courriel : [email protected]

Philippe Vidal est Maître de conférences en Géographie et Aménagement à l’université du Havre et membre de l’unité CNRS IDEES/CIRTAI. Il est également Directeur associé de la revue NETCOM (Networks and communication studies) qui publie depuis 1987 une série de travaux sur la relation Technologies de l’Information et de la Communication et territoires. Auteur en 2002 d’une thèse intitulée « La Région face à la société de l’information », sa principale clef d’entrée porte sur la capacité des exécutifs locaux à intégrer la question des TIC dans leurs stratégies de développement économique et social. Ayant multiplié les expériences de recherches sur le territoire européen, l’auteur travaille également sur la problématique de l’appropriation des TIC en Afrique de l’ouest. Il intervient depuis trois années au sein du DESS ATEGU de l’ENEA (Dakar-Sénégal) au titre du module « TIC et recomposition territoriale ». Il a également co-organisé un colloque international tenu à Dakar (UTM-ENEA) en 2005 intitulé « Technologies de l’information et de la communication (TIC) et développement territorial » et a dirigé plusieurs travaux d’étudiants africains en la matière. Il est également membre du GDRI NETSUD et participe à la dynamique eatlas. Courriel : [email protected]

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