l'accession de l'algérie à l'organisation mondiale du commerce: problèmes et...

31
L’accession de l’Algérie à l’Organisation Mondiale du Commerce: Problèmes et perspectives. Par Prof. Mohammed Abdelwahab Bekhechi 1 I- Remarques introductives 1. Depuis le début du processus, long et complexe, des reformes économiques entreprises dès la fin des années quatre vingt, l’Algérie a fait d’énormes progrès dans le processus de transition d’une économie largement dominée par les capitaux publics et les monopoles d’Etat vers une économie de marché les capitaux privés joueront un rôle moteur dans le développement. Mais ce processus est loin d’être consommé ne serait-ce que parce que l’économie algérienne reste dominée par le pétrole et le gaz au sein desquels les capitaux prives nationaux sont quasiment absents 2 . Dans ce contexte, l’accession à l’OMC a été perçue par les gouvernants algériens comme un objectif stratégique depuis le début des reformes. Et cela l’est d’autant plus aujourd’hui que l’Algérie a entamé les procédures de privatisation de larges secteurs de son économie et d’ouverture du capital de nombreuses entreprises publiques aux capitaux privés à travers une reforme en profondeur des secteurs des mines, de l’énergie, des hydrocarbures, des finances et des télécommunications, ce qui aura certainement un effet considérable d’entraînement vers l’économie de marché. Au niveau international la finalisation des négociations ave l’Union Européenne en vue d’un accord d’association et la constitution d’un espace économique maghrébin sont certainement deux exercices complémentaires à la négociation en vue de l’accession à l’OMC. 2. Cet objectif stratégique que le gouvernement algérien poursuit prend en compte le fait que le système commercial multilatéral a vocation à s’étendre à tous les pays du monde sans exception, et que l’accession à l’OMC devient un impératif économique et politique incontournable. Pour l’Algérie comme pour l’ensemble des Etats, la question n’est pas de participer ou pas à l’OMC 1 Ancien professeur de droit à et Vice-Recteur de l’université d’Oran (Algérie). Actuellement Senior Counsel auprès du département juridique de la Banque Mondiale (Washington, USA). Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que l’auteur et ne sauraient être attribuées aux institutions qui l’emploient ou l’ont employé. L’auteur remercie Monsieur Ali Habour, Président de la Chambre Nationale du Commerce et de l’Industrie algérienne (CACI) et Chami Mohammed, Directeur Général de la CACI pour les informations qu’ils ont bien voulu lui fournir pour entamer l’écriture de cet article. 2 Les capitaux étrangers sont importants dans le secteur des hydrocarbures et sont appelés à se développer dans le futur. Ils sont pour l’instant soumis à un régime juridique particulier et ils se réalisent dans le cadre de partenariat avec la société d’Etat Sonatrach. Il faut aussi noter que le financement de l’économie algérienne est tributaire des banques appartenant à l’État. Ces banques publiques restent largement dominantes malgré l’existence d’un secteur bancaire privé que la loi 90-14 sur la monnaie et le crédit du 14 avril 1990 a rendu possible.

Upload: independent

Post on 20-Jan-2023

0 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

L’accession de l’Algérie à l’Organisation Mondiale du Commerce:

Problèmes et perspectives.

Par

Prof. Mohammed Abdelwahab Bekhechi1 I- Remarques introductives

1. Depuis le début du processus, long et complexe, des reformes économiques entreprises dès la fin des années quatre vingt, l’Algérie a fait d’énormes progrès dans le processus de transition d’une économie largement dominée par les capitaux publics et les monopoles d’Etat vers une économie de marché où les capitaux privés joueront un rôle moteur dans le développement. Mais ce processus est loin d’être consommé ne serait-ce que parce que l’économie algérienne reste dominée par le pétrole et le gaz au sein desquels les capitaux prives nationaux sont quasiment absents2. Dans ce contexte, l’accession à l’OMC a été perçue par les gouvernants algériens comme un objectif stratégique depuis le début des reformes. Et cela l’est d’autant plus aujourd’hui que l’Algérie a entamé les procédures de privatisation de larges secteurs de son économie et d’ouverture du capital de nombreuses entreprises publiques aux capitaux privés à travers une reforme en profondeur des secteurs des mines, de l’énergie, des hydrocarbures, des finances et des télécommunications, ce qui aura certainement un effet considérable d’entraînement vers l’économie de marché. Au niveau international la finalisation des négociations ave l’Union Européenne en vue d’un accord d’association et la constitution d’un espace économique maghrébin sont certainement deux exercices complémentaires à la négociation en vue de l’accession à l’OMC.

2. Cet objectif stratégique que le gouvernement algérien poursuit prend en

compte le fait que le système commercial multilatéral a vocation à s’étendre à tous les pays du monde sans exception, et que l’accession à l’OMC devient un impératif économique et politique incontournable. Pour l’Algérie comme pour l’ensemble des Etats, la question n’est pas de participer ou pas à l’OMC

1 Ancien professeur de droit à et Vice-Recteur de l’université d’Oran (Algérie). Actuellement Senior

Counsel auprès du département juridique de la Banque Mondiale (Washington, USA). Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que l’auteur et ne sauraient être attribuées aux institutions qui l’emploient ou l’ont employé. L’auteur remercie Monsieur Ali Habour, Président de la Chambre Nationale du Commerce et de l’ Industrie algérienne (CACI) et Chami Mohammed, Directeur Général de la CACI pour les informations qu’ ils ont bien voulu lui fournir pour entamer l’écriture de cet article.

2 Les capitaux étrangers sont importants dans le secteur des hydrocarbures et sont appelés à se développer dans le futur. Ils sont pour l’ instant soumis à un régime juridique particulier et ils se réalisent dans le cadre de partenariat avec la société d’Etat Sonatrach. Il faut aussi noter que le financement de l’économie algérienne est tributaire des banques appartenant à l’État. Ces banques publiques restent largement dominantes malgré l’ existence d’un secteur bancaire privé que la loi 90-14 sur la monnaie et le crédit du 14 avril 1990 a rendu possible.

mais bien plutôt celle de savoir à quelles conditions participer pour titrer le meilleur bénéfice possible de la globalisation de l’économie mondiale. C’est à cette question que doit répondre la négociation en vue de l’accession à l’OMC. Cette négociation est un exercice très long et très complexe. Sa complexité est la conséquence de plusieurs éléments complémentaires. Ces éléments se conjuguent pour rendre le processus d’accession de nouveaux membres long, complexe et difficile3. Ils concernent: (i) les questions à résoudre et les difficultés de conjoncture ou institutionnelles que tout pays en développement postulant à l’accession doit affronter durant les négociations, au cours de la procédure elle même, les pays candidats doivent résoudre de nombreuses questions de contenu et de substances qui peuvent constituer autant obstacles pour l’accession4. (ii) la faiblesse des moyens administratifs et techniques de l’OMC qui n’a pas les ressources pour mener de front le travail relatif à plusieurs négociations, et (iii) la volonté des pays membres de l’OMC de bien contrôler le mécanisme de négociation. La conséquence en est que les négociations en vue de l’accession à l’OMC prennent du temps et nécessitent une longue et minutieuse préparation qui souvent prend des allures de frustration pour ceux qui veulent voir leur pays s’engager plus vite et plus radicalement dans la libre compétition commerciale5, notamment lorsqu’ils en perçoivent clairement les bénéfices6.

3 Il va sans dire que l’absence de l’Algérie des grandes discussions techniques et juridiques sur le

commerce international au niveau des instances internationales a eu pour conséquence le peu d’ intérêt des professionnels, agents publics et autres universitaires pour les détails précis du régime du commerce international tel qu’ il découle des accords de l’OMC. Les publications algériennes sur ces questions sont trop générales et restent marquées par la thèse et les concepts politiques de l’opposition Nord-Sud développés durant les décennies précédentes. Ces publications ne reflètent pas ou très peu l’état actuel du débat qui est de plus en plus concentré sur des questions techniques et économiques. Certes le débat politique n’est pas absent lorsqu’ il s’agit de l’OMC et de son rôle dans la mise en œuvre de « la globalisation » économique du monde : voir la « résistance » et l’ opposition à la mondialisation qu’opposent les mouvements écologistes, anti-globalisation et autres en Occident ; Cf. Tlemçani, Rachid, L’OMC et le nouvel ordre mondial, in le quotidien algérien « Le matin » du 9 avril 2001, voir page web http:\\www.lematin-dz.com/09042001/jour/depot.htm

4 Pour résoudre de telles questions les gouvernements peuvent avoir besoin de recourir à leurs parlements respectifs, à la consultation de partenaires sociaux (associations professionnelles, patronat ou syndicats) ou internationaux (Etats avec lesquels le pays concerné entretient des relations économiques et commerciales importantes). De telles consultations elles-mêmes sont souvent longues et complexes.

5 Pour paradoxal que cela puisse paraître, l ’élite algérienne est très partagée sur l’urgence de l’ adhésion à l’OMC. Il y a une forte pression de la part de ceux qui estiment que l’Algérie, pays quasi-mono exportateur (gaz et pétrole) n’a pas trop d’ intérêt a ouvrir son commerce international au risque d’en perdre la maîtrise et de ne pas pouvoir protéger son industrie naissante. D’une manière générale, le secteur privé national ne semble pas avoir confiance dans ses propres capacité à affronter la concurrence étrangère dans le secteur des industries de transformation.

6 C’est le cas des pays qui aspirent à l’adhésion au sein de l’OMC sans exception : cf. le cas de la République Populaire de Chine qui négocie son accession depuis plus de douze années, du Vietnam, de la Jordanie et de certains pays issus de l’ancienne URSS et l’ ancienne Yougoslavie. Dans le cas de l’Algérie, on ne peut affirmer que l’ intérêt de l’accession soit bien perçu par tous les partenaires sociaux de manière uniforme, cf. notes 3 et 5 ci-dessus et notes 20 et 25 ci-dessous.

3. Juridiquement l’accession à l’OMC est régie principalement, et de manière très laconique, par l’article XII de l’Accord de Marrakech du 15 Avril 1994 dont l’alinéa 2 stipule que « la Conférence ministérielle approuvera l’accord concernant les modalités d’accession à une majorité des deux tiers des membres de l’OMC ». Comme on le constate, cette disposition est loin d’entre ou de fournir un modèle de précision. Il y est déclaré que la Conférence va approuver les « les modalités d’accession » qui seront définies par un accord entre le candidat à l’accession et les membres de l’OMC. Mais le contenu de ces modalités d’accession qui sont au cœur de cette disposition n’est pas précisé. D’autres dispositions de l’Accord de Marrakech traitent d’aspects particuliers concernant la procédure d’accession : il s’agit notamment des articles IX7, XIII8 et XVI9. Il faut mentionner qu’à l’exception d’une dizaine de pays qui n’étaient pas partie au GATT10, avant l’entrée en vigueur des accords relatifs à l’OMC le 1er janvier 1995, et qui ont complété les formalités d’accession, nombreux sont les gouvernements qui continuent à mener les procédures de négociations en vue de leur accession au sein de l’OMC avec patience et diligence.

4. La patience et la diligence sont nécessaires dans le processus de

négociations car l’OMC a un mandat très large qui couvre tous les aspects du commerce international sans exception. Contrairement au GATT qui se focalisait principalement à résoudre les questions tarifaires et douanières, la complexité de l’accession à l’OMC vient du fait que les négociations doivent permettre de clarifier les régimes juridiques de nombreux problèmes qui affectent le commerce international tel que les subventions aux productions agricoles et industrielles, le régime de la propriété intellectuelle, le commerce des services, les échanges concernant des produits industriels spécifiques, et des questions de la protection de l’environnement, le régime des investissements entre autres. Ce sont les Annexes à l’Accord de Marrakech qui fixent la liste des accords multilatéraux sur le commerce et les arrangements institutionnels importants auxquels les membres doivent souscrire11. La grande innovation de l’OMC consiste dans le fait que les

7 L’article IX traite de la « prise de décision » au sein de l’OMC. 8 L’article XIII traite de l’hypothèse de non-application de l’ accord de Marrakech et les Accords

commerciaux qui lui sont annexés (Annexe I et II) entre un Etat membre et un autre au moment où il devient partie

9 L’article XVI est relatif aux « dispositions diverses » et prévoit qu’un candidat à l’accession ne peut pas faire de réserve à l’Accord de Marrakech, et que toute réserve à un accord commercial multilatérale ne pourra être formulée que si une telle possibilité est prévue par un tel accord.

10 L’Algérie avait avant même la création de l’OMC fait une demande d’adhésion au GATT(Cf. plus loin nos développement sur le processus de négociations). Cela aurait été plus aisé car alors l’Algérie aurait bénéficié du régime plutôt favorable fait aux pays en développement à travers l’article XVIII des accords du GATT de 1947. L’accession à l’OMC ne prévoit pas de régime dérogatoire en faveur de pays tels que l’Algérie qui si elle accède à l’OMC sera de droit soumis aux mêmes règles commerciales que tous les autres membres de l’OMC quel que soit leur niveau de développement.

11 Il s’agit de : (a) l’Annexe 1 qui comprend : (i) une Annexe I A sur les Accords multilatéraux sur le commerce des marchandises au nombre de treize, (ii) une Annexe I B relative à l’Accord général sur le commerce des services et Annexes, (ii i) une Annexe I C relative à l’ Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce ; (b) l’Annexe 2

Etats sont liés par l’ensemble des accords et qu’ils ne peuvent pas choisir ceux des accords qui les arrangent ou faire des réserves unilatérales les excluant du champ d’application de certaines normes. La seule exception est constituée par les accords commerciaux plurilatéraux relatifs au commerce des aéronefs civils, aux règles des marchés publics, aux produits laitiers et a la viande bovine.

5. Il est dès lors facile de comprendre qu’il n’y a pas un pays qui n’ait des

questions sensibles à affronter dans ce cadre surtout que l’on doit garder à l’esprit qu’il doit, en plus, veiller à les résoudre à la satisfaction de ses propres administrés avant de négocier son entrée au sein de l’OMC. Mais, les membres actuels de l’OMC qui étudient l’accession de nouveaux membres attachent une très grande importance aux réponses que le postulant a l’accession apportera a ces questions là. En maîtrisant et en contrôlant la procédure et les conditions d’accès, les membres actuels de l’OMC entendent obtenir des engagements toujours plus importants de la part de nouveaux candidats souvent beaucoup plus qu’ils n’ont en demandé aux membres actuels ou qu’ils n’ont en consenti eux-mêmes12. Pour la plupart des pays en développement, ces engagements concernent des questions importantes telles que le commerce des produits manufacturés, l’agriculture, le régime de la propriété intellectuelle, les privatisations, la gestion des marchés publics, les subventions à l’industrie et les questions liées à la période de transition pendant laquelle le pays candidat à l’accession doit mettre en place progressivement le cadre juridique de la libéralisation totale de ses échanges

II- Le processus d’accession de l’Algérie à l’OMC 6. Le négociations entre l’Algérie et le GATT13 ont commencé dès 198714, mais

ce n’est que bien après, en 1994 et la conclusion d’un Programme d’Ajustement Structurel (PAS) avec le Fonds Monétaire International (FMI) que les négociations ont commencé sur la substance. Il faut rappeler que la

relative au Mémorandum sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, (c) l’Annexe 3 sur le mécanisme d’examen des politiques commerciales, et (d) l’Annexe 4 sur les accords commerciaux plurilatéraux. Il faut y ajouter l’engagement relatif au mécanisme de règlement des différends et celui concernant le mécanisme de revue des politiques commerciales.

12 Il est acquis que la libéralisation totale du commerce est la solution ultime poursuivie par les pays demandant à accéder à l’OMC, mais les moyens et les étapes pour y aboutir peuvent être discutés par chaque pays en fonction de ses propres capacités et stratégie dans le cadre d’un accord de libéralisation accepté par l’OMC.

13 Il faut ici noter que les relations entre l’Algérie et le GATT remontent à la période coloniale quand l’accord original a été négocié en 1947 par le gouvernement français au nom de l’Algérie (Cf. UN. GATT, Vol. 3 Schedule XI. NY 1947). L’accord du GATT s’appliquait encore à l’Algérie de facto après l’ indépendance.

14 La première demande d’accession au GATT formulée par l’Algérie a été formellement reçue au Secrétariat du GATT le 3 juin 1987 (cf. doc. L/6182). Dès le 17 juin 1987, le Secrétariat du GATT a établi un groupe de travail pour étudier les conditions et modalités d’accession de l’Algérie au GATT (Cf. doc. C/M /211 du 17 juin 1987).

lenteur mise à commencer les négociations étaient dues à la dégradation de l’environnement économique et politique de l’Algérie au début de la décennie précédente. Cette dégradation avait amené les gouvernements qui se sont succédés entre 1992 et 1997 à établir des restrictions au commerce et aux paiements qui ne présageaient pas d’un accueil favorable au sein de l’OMC. En effet, pendant cette période, des mesures restrictives avaient été introduites, de larges gammes de produits avaient été interdits à l’importation ou soumis à des tarifs très élevés et un Comité ministériel avait été institué pour affecter les ressources financières disponibles aux importations dites « essentielles » ou « prioritaires »15. Ce comité fonctionnera jusqu’à Avril 1994. Des subventions implicites ou explicites ont été introduites ou augmentées16. A partir de 1994, le gouvernement a annoncé une politique de libéralisation dans le cadre du PAS qui comprenait entre autre une reforme de grande envergure du système commerciale et une libéralisation du commerce extérieur.

En plus de son caractère stratégique, l’accession de l’Algérie à l’OMC

revêt un caractère critique et particulier du fait de la dépendance de l’économie algérienne des exportations d’hydrocarbures (pétrole et gaz naturel) vers les USA et l’Europe occidentale, et de la dépendance de tout son commerce extérieur vis-à-vis d’une petite poignée de pays européens et des Etats-Unis. Depuis juin 199617, le gouvernement algérien a déposé un premier mémorandum sur le régime juridique du commerce extérieur. Les premières réponses au questionnaire de l’OMC ont été fournies par l’Algérie le 14 juillet 199718. Un mémorandum plus détaille devrait être soumis durant l’année 2001. La discussion sur le fonds continuera jusqu’à la conclusion des formalités de ratification des instruments juridiques de l’adhésion et le début des différentes phases de négociations multilatérales et bilatérales avec les pays membres de l’OMC. Mais avant d’en arriver là, les progrès de la négociation en vue de l’adhésion peuvent dépendre aussi bien d’un problème spécifique concernant l’Algérie que de problèmes plus larges qui

15 Les restrictions frappaient quatre listes de produits: (i) une liste d’une quinzaine de denrées

alimentaires dont l’ importation était interdite, (ii) une vingtaine de produits pour lesquels l’ importateur devait signer un cahier des charges préparé par le ministère du commerce, (iii) cent sept produits manufacturés dont l’ importation était temporairement limitée pour protéger la production nationale, et (iv) une liste de produits que l’ importateur ne pouvait importer qu’en en finançant l’ importation avec des moyens personnels de paiement convertibles sans appel à financement bancaire auprès des banques nationales. Après Avril 1994, les restrictions ne frappaient plus que : (i) les produits interdits a l’ importation pour des raisons de sécurité ou des raisons religieuses, (iii) les produits de première nécessité (dix en tout dans le secteur alimentaire) dont certains sont subventionnés, et (iv) les produits dont l’ importation est provisoirement suspendue dont le nombre a été ramené à quatre vingt cinq. La suspension provisoire d’ importation devait être re-examinée en Janvier 1995. Cf. aussi note 47 ci-dessous.

16 Le système de subvention en vigueur en Algérie a coûté par exemple 5,8% du PIB en 1993 et concernait les produits alimentaires et l’ énergie notamment. Cf. aussi note 47 ci-dessous.

17 Cf. Mémorandum du 11 juillet 1996 Doc. WT/ACC/DZA/1 18 Cf. OMC Doc. WT/ACC/DZA/2 du 14 juil let 1997, Doc. WT/ACC/DZA/4 du 10 février 1999

(WT/ACC/DZA/13/Add. 1 et 2), ainsi que WT/ACC/4 Agricultural data du 30 janvier 1998 (WT/ACC/SPEC/DZA/2) et 4 février 1998 (WT/ACC/SPEC/DZA/1)

intéressent d’autres pays déjà membres de l’OMC. De l’information disponible, il ne semble pas que l’Algérie essaie de gagner les Etats membres de l’OMC19 à sa candidature en dehors des discussions formelles de la fourniture d’informations générales ou spécifiques que le secrétariat de l’OMC lui réclame dans le cadre de l’étude de sa candidature. De même et comparativement à d’autres pays, le gouvernement algérien ne semble pas avoir dévolu des ressources suffisantes à la mise en œuvre d’une politique de consultation suivie et régulière avec les partenaires sociaux à l’intérieur du pays qui continuent à percevoir l’accession à l’OMC comme une menace sur leurs intérêts corporatistes ou professionnels20.

III- Le traitement de la demande d’accession par l’OMC 7. Pour mener à bien le processus de négociation en vue de l’OMC met en

place un groupe de travail spécifique pour étudier les conditions d’accession de tout nouveau postulant. L’attribution essentielle de ce groupe de travail consiste à clarifier tous les aspects juridiques et institutionnels ainsi que la pratique en matière de commerce international de l’Etat postulant à l’accession. Le groupe de travail propose aussi les conditions de l’accession du nouveau membre. A cette fin, L’OMC a institué un groupe de travail, conformément à sa procédure interne, pour étudier les conditions d’accession de l’Algérie21. Les pays membres du groupe de travail statuent sur l’accession d’un nouveau pays par un consensus. Cependant la pratique révèle que ce consensus est d’abord celui obtenu entre les membres les plus importants du groupe de travail qui examine la candidature d’un pays. En effet, il est considéré que si le protocole d’accession était approuvé par une simple majorité d’États membres de l’OMC contre la volonté d’importants membres on aboutirait à une véritable dilution du régime du commerce international du fait de la possibilité reconnue à un État membre de ne pas appliquer une ou des dispositions particulières des accords sur le commerce international à un pays candidat à l’accession en vertu de l’article XIII de l’accord de l’OMC. La nécessité d’arriver à un tel consensus a contribuer à accentuer la lenteur de la procédure d’accession mentionnée plus haut22. En

19 Il semblerait cependant qu’une assistance technique lui soit octroyé par la France et les Etats-Unis

qui auraient financé des missions d’experts pour aider l’Algérie à formuler ses réponses au questionnaire de l’OMC.

20 Il est un fait aussi que ces partenaires sociaux, notamment les syndicats, associations professionnelles et organisations patronales, n’ont pas investi de ressources dans l’étude et la compréhension des conséquences précises de l’accession de l’Algérie à l’OMC. Leurs craintes restent trop vagues et générales et exprimées lors de réunions avec le gouvernement. L’autre aspect est l’absence d’une étude globale, par exemple sous l’égide du Conseil Economique et Social algérien, sur tous les aspects de l’accession de l’Algérie à l’OMC.

21 Cf. note 13 ci-dessus. 22 A ce jour, il n’y a pas une définition précise d’un minimum de conditions et de critères applicables

objectivement à tout candidat à l’accession qui puissent satisfaire à la fois les intérêts légitimes des pays déjà membres de l’OMC et de ceux qui sont candidats à l’accession. Pour le suivi de la procédure d’accession à l’OMC, le gouvernement algérien a institué un dispositif visant à “ réunir les conditions de mise en synergie et en cohérence des activités de l’ensemble des institutions concernées en rapport avec le processus, par la mise en place, de

pratique le président du groupe de travail peut convoquer les membres du groupe pour évaluer les réponses de l’Algérie soit à la demande d’un de ses membres ou de l’Algérie. En général, tout groupe de travail relatif a l’accession d’un nouveau membre se réunit au moins deux à quatre fois par an23. L’Algérie continue de discuter avec le groupe de travail de l’OMC chargé de l’étude de son accession. Dans ce groupe de travail, les États-Unis et l’Union européenne sont représentés, ce qui leur permet de s’assurer que le postulant se pliera aux règles du libre commerce dans des conditions de substance et de temps qu’ils agréent24.

8. Comme tout candidat à l’accession, l’Algérie a reçu de l’OMC une liste de

questions auxquelles elle doit répondre y compris en proposant des reformes à mettre en œuvre pour harmoniser son droit et sa pratique du commerce international avec les règles et procédures de l’OMC25. Sur cette base un

différents niveaux de décisions et de concertation." Un comité gouvernemental, placé sous l’autorité du chef du gouvernement, sera chargé d’arrêter la stratégie de négociation et de superviser sa conduite, alors qu’une unité centrale de coordination sous l’autorité du ministre du Commerce, sera, elle, chargée de la coordination de l’action des différents intervenants et de proposer le calendrier et les mesures de mise en conformité de la législation algérienne avec les règles de l’OMC. Des unités ministérielles seront quant à elles chargées d’élaborer les stratégies sectorielles en rapport avec le processus d’accession et d’ initier les actions sectorielles de concertation et de sensibilisation nécessaires à une bonne évaluation des enjeux sous-jacents à cette négociation. Par la mise en place de cette organisation, le gouvernement vise, à instaurer les règles de transparence et de rigueur nécessaires à la bonne conduite des grandes négociations internationales qui détermineront les modalités d’ insertion de l’Algérie dans les nouveaux mécanismes de l’économie mondiale.” Cf. El Moudjahid du 15 juillet 2001 (http:\\208.230.138.212/ )

23 En pratique, l’Etat postulant à l’accession peut aussi entamer des discussions avec les différents Etats membres de l’OMC, y compris les unions régionales telles l’UE, pour négocier son ticket d’entre au sein de l’OMC. Ces négociations peuvent se faire sous l’égide du groupe de travail ou séparément. L’Algérie est aussi en train de négocier un accord avec l’Union Européenne.

24 La description de la procédure est définie dans le document : WT/ACC/7 of March 10, 1999. Il peut être obtenu sur Internet au site de l’OMC à http://www.wto.org

25 Dans une récente intervention publique, le Ministre algérien du commerce, en charge du dossier de l’adhésion de avait déclaré que les "Les véritables négociations [commenceront] en février 2002". L’ interprétation de sa déclaration a été faite par la presse comme signifiant : « les véritables négociations c’est-à-dire sur les tarifs et les services débuteront en février 2002 avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC).». « L’Algérie reprendra langue avec cette institution gendarme du commerce mondial en septembre prochain (2001). Jusqu’à l’année dernière, après la présentation à l’OMC du mémorandum qui consigne les règles et principes du système commercial du pays, l’Algérie s’était livrée à un jeu de questions-réponses avec ses principaux partenaires, essentiellement les États-Unis et l’Union européenne, qui ont demandé plus de précisions…. Le ministère du Commerce, ……, a organisé ces derniers mois une action de sensibilisation auprès des opérateurs et des autres acteurs économiques et sociaux, en vue de leur adhésion au processus de négociations. La voie semble être ouverte aujourd’hui pour l’amorce de discussions avec cette institution internationale, dont le cœur reste les négociations sur les tarifs et le volet services. Le parcours ne sera pas aussi court et aussi facile qu’on l’ imagine, d’autant que des dizaines de candidats se bousculent au portillon de l’OMC. À présent, une chose semble sûre : l’Algérie semble sur le point de conclure un accord d’association et de libre-échange avec l’Union européenne avant son adhésion à l’OMC. Quelle en sera l’ implication sur les cycles de

calendrier précis doit être préparé pour la mise en œuvre de ces changements et reformes. Ce calendrier doit être accepté par les deux parties. Dans un tel calendrier, des reformes et changements peuvent être recommandés avant l’accession du postulant à l’OMC et d’autres pourraient se faire après son accession dans la mesure où elles ont un impact moindre sur le commerce international. Une telle obligation pourrait s’énoncer ainsi : le nouvel Etat membre s’engage à mettre en œuvre les accords de l’OMC dans son ordre juridique intérieur dés son accession à l’exception des mesures spécifiques dont la mise en œuvre est soumise à un calendrier défini dans l’acte d’adhésion. Cela permet d’obliger juridiquement l’Etat nouvellement admis à l’OMC à mettre en œuvre les règles applicables de l’OMC à son commerce internationale et d’harmoniser sa législation interne avec elles.

9. Cet exercice de mise à niveau du cadre juridique interne n’est pas un simple

exercice théorique consistant à écrire des lois et règlement dont la seule lettre serait en harmonie avec les règles et normes de l’OMC. En effet, de nombreux pays une fois devenus membres de l’OMC continuent à utiliser des règles contradictoires pour maintenir des situations de protection voire de rentes inacceptables au regard des accords de l’OMC ou a demander des exemptions pour ne pas suivre certaines règles applicables au commerce international sous les accords de l’OMC26. C’est pour cela que la définition d’un tel calendrier et des conditions de sa mise en œuvre constitue une partie très sensible et dans la négociation. Le cas de l’Algérie n’échappe pas à cette remarque et il semble bien que le gouvernement hésite a donner des dates précises et des critères pour la définition et la mise en œuvre de son calendrier. On comprend cette attitude lorsque l’on évalue le travail qui reste a accomplir pour mettre le cadre juridique et institutionnel algérien en harmonie avec tous les accords de l’OMC.

10. En effet, les accords commerciaux multilatéraux assument implicitement que

les membres de l’OMC sont tous des pays à économie de marché dont les agents ne sont conditionnés que par des éléments économiques. C’est la conséquence que l’on peut tirer de l’article XVII l’accord du GATT de 1994 qui stipule que les entreprises publiques, ainsi que les entreprises disposant de privilèges spéciaux doivent être notifiées à l’OMC et doivent être gérés conformément aux règles commerciales. L’Algérie fait partie des pays où la privatisation des entreprises publiques n’a pas beaucoup avancé et où l’accès, l’importation et la distribution de nombreux produits essentiels relèvent juridiquement, ou matériellement, d’entreprises publiques seulement. C’est le cas par exemple des produits énergétiques, de certaines matières premières ou de produits stratégiques (minéraux tels que l’or par exemple).

discussions de l’ an prochain, dont l’enjeu reste l’adéquation entre le démantèlement tarifaire, un visa pour l’ accès aux marchés extérieurs et les nécessités d’une protection transitoire de la production locale ». cf. le quotidien algérien Liberté, du 29 Juillet 2002 in http//www.liberte-algerie.com

26 Cf. Rapport sur les activités de l’OMC, années 1999 et 2000 in http://www.wto.org et

http://docsonline.wto.org/GEN_vewerwindow.asp?D:\DD…\M56.DOC.HTM&skip=24000

11. Deux grandes questions dominent les négociations en vue de l’accession.

Tout d’abord, il y a l’engagement des pays candidats à appliquer complètement les règles obligatoires de l’OMC. Cela implique la revue de l’ensemble de la législation du pays candidat pour déterminer sa cohérence et son harmonie avec les accords régissant le commerce international adoptés par l’OMC. Cette revue doit pouvoir aboutir à la définition des changements et révisions nécessaires à apporter au régime juridique national applicable au commerce international. L’État postulant à l’accession doit s’engager à apporter ces changements et à les appliquer. Ceci paraît simple a priori, mais en pratique cela soulève souvent de grandes difficultés. En effet, si les règles relatives aux impositions douanières, à la valeur en douane, aux droits divers sont faciles à résoudre, il n’en va pas de même pour de nombreuses règles de l’OMC qui donnent lieu à interprétations diverses. Ainsi, le fait que tout membre de l’OMC soit réputé être régi par les règles du marché ne signifie pas obligatoirement quelque chose en matière de privatisation ou de limitation des investissements publics dans l’économie. Ensuite, la négociation tourne autour de la question de l’accès des membres de l’OMC au marché du pays candidat à l’accession et réciproquement. Les États postulant à l’accès à l’OMC sont tenus de respecter certaines règles de politique commerciale telles que celles relatives aux droits douaniers sur les marchandises, les subventions aux produits agricoles, la propriété intellectuelle, les règlements applicables au commerce des services déjà en vigueur entre les États membres de l’OMC27 et ainsi de suite.

12. D’une manière générale les négociations en vue de l’accession de l’Algérie à

l’OMC vont susciter de nombreuses questions d’ordre économique, politique et juridique qui feront l’objet d’une attention particulière des membres actuels de l’OMC avant la conclusion d’un protocole d’accession. Les plus importantes parmi ces questions touchent aux points suivants : (i) règles, principes et normes du commerce international des biens et leur application, y compris la transparence du régime du commerce extérieur de l’Algérie et l’abolition des règles discriminatoires entre opérateurs, (ii) libéralisation du commerce des services, (iii) règles de protection de la propriété intellectuelle, (iv) accès au marche et barrières commerciales douanières et non-douanières, (v) application des bénéfices du statut de pas en développement, (vi) mise en œuvre et application des clauses de sauvegarde, (vii) régime du commerce dans le secteur de l’agriculture, (viii) appartenance de l’Algérie a des groupements économiques régionaux. Parmi toutes ces questions qui sont aussi importantes les unes que les autres, nous allons nous focaliser sur celles qui visiblement vont constituer le cœur des négociations et fournir la matière des conditions de l’accession de l’Algérie à l’OMC. Les accords de l’OMC constituent un ensemble de règles et de principes gouvernant le commerce des biens et des services, les mesures relatives aux

27 Les engagements sur le respect des règles et principes en vigueur entre États membres seront décrits

dans le rapport relatif à l’accession de l’État postulant. Ce rapport comprend un tableau des engagements de l’État postulant à l’ accession. Le Conseil de l’OMC décidera de cette admission à une majorité de deux tiers de ses membres. Cf. par exemple le rapport sur l’accession de la Bulgarie sur le site Internet de l’OMC in http:\\www.wto.org cité plus haut.

investissements et qui affectent le commerce et pour protéger la propriété intellectuelle.

IV- Les conditions de l’accession à l’OMC

1. Les conditions liées au commerce des marchandises 13. Ces règles et principes s’appliquent à tous les membres de l’OMC et l’Algérie

y sera soumise dès que son accession sera acceptée. La libéralisation du commerce international des marchandises de toutes sortes est un objectif en soi. C’est là un aspect de la négociation qui est complexe car il mettra en évidence les engagements du pays à accepter les règles d’une concurrence internationale impitoyable pour les plus faibles et son désir de développer ceux des secteurs de production de biens où il considère avoir un avantage comparatif. Les questions qui seront les plus cruciales sous cette rubrique concernent : (i) la non-discrimination entre les opérateurs économiques et les pays membres, (ii) la transparences dans les transactions commerciales, (iii) les questions des droits de douane, (iv) le commerce des produits des technologies de l’information, (v) l’évaluation en douane, (vi) les règles d’origine, (vii) les licences d’importation, (viii) l’accès aux marchés, (ix) les règles spécifiques applicables au commerce des vêtements et textiles, ainsi que (x) la question de l’agriculture et du commerce des produits agricoles. Nous allons exposer quelques unes de ces questions qui certainement font partie du menu des négociations en vue de l’accession de l’Algérie à l’OMC.

14. Les pays postulant à l’accession s’engagent à ne pas établir les tarifs

douaniers au-delà de certains seuils maximums. D’une manière générale ils devront s’engager aussi à réduire les niveaux des droits douaniers sur une période qui ne doit pas excéder sept ans à partir de leur accession à l’OMC. Les négociations porteront sur une moyenne des droits imposés sur les produits importés, la répartition de ces droits sur les différentes catégories de produits importés, et le nombre de tarifs douaniers pour lesquels les droits ne sont pas obligatoirement respectés28. Il faut noter ici que de nombreux pays en développement, y compris parmi les membres de l’OMC, continuent d’imposer un tarif supérieur et souvent de loin au niveau demandé par les pays membres29. On peut noter dans cette perspective que le gouvernement algérien semble vouloir précéder la conclusion des négociations en procédant à des réductions importantes des droits de douanes à l’entrée sur son territoire de nombreux produits industriels et autres matériels et

28 Il faut noter qu’à ce jour, l’attitude des pays membres de l’OMC a été de demander aux pays

postulant à l’accession, notamment les plus grands d’entre eux comme la R.P de Chine d’établir un niveau de droits de douanes qui ne saurait excéder en moyenne 10%. Il va de soi que les pays postulant à l’ accession ont tous ou du moins pour le plus grand nombre demandé un niveau moyen de droits supérieur à ce niveau de 10%. La R.P de Chine a offert un niveau moyen de 18% en 1998 et ce niveau atteindrait 10% en 2005.

29 Voir notes 27 et 28 ci-dessus. Ce niveau, souvent contesté par les économistes comme artificiellement fixé et non-objectif est de 10%. Cf. Finger, J.M, Ingco, M.D et Reincke, U, The Uruguay Round. Statistics on Tariff Concessions Given and Received. World Bank. Washington DC, 1966

marchandises relevant des secteurs de l’éducation ou de la santé. C’est le sens qu’il faut donner aux dispositions de la loi de finances complémentaire pour 200130, mais aussi à la préparation d’un projet d’ordonnance sur cet objet31. Dans le domaine du commerce des produits des technologies de l’information qui a fait l’objet d’une Déclaration ministérielle acceptée par cinquante cinq pays membres de l’OMC en 1996 à Singapour, il a été décidé de ramener le taux des droits de douane à zéro dans un avenir proche. L’Algérie n’aura guère de difficulté à s’en accommoder du fait du niveau très bas des droits sur les ordinateurs et autres matériels et instruments scientifiques décidé par le gouvernement pour promouvoir l’accès aux technologies modernes de communication et la recherche scientifique.

15. Cette question de la réduction des droits de douane est plus complexe qu’il

n’en paraît de prime abord. Car en plus de la concurrence pour leurs industries, souvent naissantes, les pays postulant à l’accession n’ont pas une administration douanière et fiscale très performante, ni un système fiscal bien établi. Comme les opérations d’import-export sont plus facile à saisir et soumettre à taxation, elles contribuent souvent pour une bonne part aux revenus de l’Etat ce qui milite en faveur du maintien des impositions douanières pour une période de temps assez longue avant que l'économie ne se modernise entièrement et que la fiscalité interne n’atteigne ses performances optima. De plus il a été souvent remarqué que la négociation pour l’accession se focalisent trop sur les tarifs moyens alors qu’elles devraient plutôt se concentrer sur leurs échelles, les exemptions accordées aux importateurs et la transparence des transactions douanières et commerciales. Diminuer les tarifs sur les produits finis peut limiter les efforts d’industrialisation des pays les plus faibles, par contre une diminution des tarifs sur les produits intermédiaires et les matières premières pourrait jouer en faveur d’une industrialisation rapide.

16. Les experts du commerce international ont insisté sur l’idée que la réforme

du commerce international d’un Etat doit d’abord se concentrer sur la réduction des tarifs les plus élevés pour réduire les déséquilibres, mais il reste entendu que cela pourrait avoir peu d’effet sur l’ensemble du tarif car il existe très peu de biens soumis à de très hauts tarifs douaniers. Mais il faut ici relever que cette question soulève une autre qui concerne le taux de recouvrement des droits de douanes. En effet, il a été observé que le taux de collecte des droits de douane sur les biens importés peut ne pas être très élevés dans de nombreux pays du fait de la porosité du système douanier et

30 Cf. les quotidiens algériens des 2-13 juil let 2001 El Moudjahid sur le site http:\\208.230.138.212/ ;

El Watan à http:\\www.elwatan.com; Liberté à http:\\www.liberté-algerie.com et Le Quotidien sur le site http:\\www.lequotidien-oran.com. Voir aussi les protestations des 130diteurs algériens devant la suppression des taxes à l’ importation des livres scolaires et universitaires in http://www.elwatan.com/journal/html/2001/08/01/actualite.htm

31 Cf. série d’articles dans El Watan du 23 Août 2001 sur certains aspects de l’ adhésion de l’Algérie à l’OMC, in http://www.elwatan.com/journal/html/2001/08/23/sup_html.htm et aussi Liberté qui écrit que le Gouvernement prépare un « projet d’ordonnance relative à la réforme tarifaire qui s’ inscrit dans le cadre des négociations sur l’accord d’association avec l’UE et de l’adhésion à l’OMC », Cf. http://www.liberte-algerie.com/aout2001/25/actualite.htm.

de l’existence de nombreuses exemptions32. C’est pour cela que l’effort de réforme devrait être porté sur la transparence du régime douanier et des exemptions fiscales qu‘il comporte, ainsi que l’application générale des tarifs douaniers plutôt que sur des modifications des taux qui souvent peuvent ne rien signifier33, ni ajouter à l’effort de développement et de promotion des investissements34.

17. Un autre aspect est celui de la « valeur en douane » ou évaluation en douane

qui a fait l’objet d’une disposition de l’accord de l’OMC qui est prévoit l’application de l’article VII du GATT. L’accord sur l’évaluation en douane trouve son origine dans le Tokyo Round et est entrée en vigueur le 1er janvier 1995. Il vise à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douanes arbitraires ou fictives pour assurer une certaine prévisibilité des droits dus par les importateurs. L’Algérie devra établir des règles conformes à celles définies dans cet accord et informer un comité de l’évaluation, en douane établi au sein de l’OMC, de toutes modifications en la matière. Une telle démarche mettra fin à la pratique largement contestée de « la valeur administrée » largement pratiquée par les services des douanes algériennes ces dernières années pour des motifs aussi différents que la limitation quantitative des importations ou la protection de la production nationale. Cette pratique avait été utilisée en même temps que d’autres méthodes de limitation et de restriction des échanges telles l’octroi de licences d’importation dont le régime fait l’objet de règles que les membres de l’OMC doivent suivre. En accédant, un Etat s’engage à simplifier ses procédures d’octroi de licences d’ importation, d’en assurer la transparence et de les administrer de manière neutre et non-discriminatoire.

18. Le débat et la négociation devront comme on le voit s’élargir aux problèmes

des obstacles non-tarifaires qui par eux-mêmes constituent un aspect important de la pratique contemporaine du commerce international des biens. Les mesures non tarifaires incluent non seulement les restrictions quantitatives mais aussi toutes sortes de mesures qui ont le potentiel de limiter l’accès de biens étrangers sur le territoire d’un pays donné. Ces mesures peuvent être de nature phytosanitaires, environnementales, découler de l’application de la valeur en douane, les méthodes d’inspection des importations, les règles d’origine, les licences et autorisations d’importation, et l’application de standards industriels de production ou de conditionnement et ainsi de suite. Toutes ces mesures peuvent avoir pour conséquence de restreindre l’importation de biens et limiter la liberté du

32 C’est le cas en Algérie pour les exemptions accordées dans le cadre de la promotion des

investissements (Décret-loi 93-1 du 5 octobre 1993 relatif à la promotion des investissements, in J.O 1993 N. 64), à des matières premières importées en vue de leur utilisation comme inputs dans des produits finis destinés à l’exportation (dans le cadre des opérations dites du remboursement de la « dette russe » par exemple) ou des exemptions sur l’ importation de véhicules pour certaines catégories de citoyens tels les anciens combattants et résidents à l’étranger. Il semble bien que ce régime d’exemption et de privilège fiscal a fini par créer des distorsions et des rentes inacceptables que le gouvernement est décidé à supprimer dans le cadre d’un nouveau régime des investissements.

33 Cf. ci-dessous note 39. 34 Cf. ci-dessous chapitre sur le commerce et les investissements.

commerce international. Les restriction quantitatives sont interdites juridiquement sauf sous des conditions précises dans le cadre de l’article XI du GATT de 1994. Les autres mesures non-tarifaires sont soumises à des règles multilatérales précises sur le commerce des biens35 et cela implique que les négociations en vue de l’accession à l’OMC doivent les traiter dans le cadre d’une comparaison des règles juridiques nationales applicables et celles de l’OMC. dans de nombreux pays des restrictions non-tarifaires contradictoires avec celles de l’OMC existent et se développent. Elles sont le fruit de visions protectionnistes encore vivaces dans de nombreux pays36. L’une des questions que l’Algérie aura à résoudre est celle de la réciprocité dans l’imposition de barrières non-tarifaires qui pourraient limiter ses propres efforts de développement et de promotion de ses exportations. Dans ce domaine l’urgence consiste à établir une liste acceptable de barrières non-tarifaires qui pourraient recevoir l’assentiment des membres de l’OMC qui seront amenés à se prononcer sur l’accession de l’Algérie et à surveiller celles des mesures existantes chez les autres membres de l’OMC afin de permettre aux opérateurs algériens de se placer dans le cadre d’une compétition transparente37.

19. Certains pays ont trouvé dans l’article XII du GATT une base pour imposer

des restrictions quantitatives à l’importation de certains biens en période de crise budgétaire ou financier. Mais cela ne peut se faire que de manière limitée dans le temps et bien comprise de la part de tous les partenaires. Certains pays par exemple continuent d’avoir des systèmes de licence ou d’autorisation d’importation qui sont en contradiction avec les termes de l’Accord de l’OMC et justifient cela par des besoins de contrôle qualitatif de leurs importations. Durant les négociations, la période pendant laquelle l’ Etat postulant doit mettre sa législation en harmonie avec les règles de l’OMC concernant les mesures non-tarifaires. En pratique, les membres de l’OMC ont accepté qu’un pays accède à l’organisation en s’engageant à mettre en harmonie sa législation au jour de l’entrée en vigueur de l’Accord de l’OMC à son égard. Le nouveau pays abolira toutes les mesures non-tarifaires découlant de sa législation au jour de son accession formelle à l’OMC38. Mais l’acte d’accession pourra mentionner que l’abolition de telles mesures fera l’objet d’un calendrier précis. Récemment, les membres de l’OMC ont demandé que l’Etat postulant harmonise sa législation avec les règles de l’OMC avant même que le Conseil ne vote sur l’accession de cet Etat: c’est le cas de la R.P. de Chine qui a bien exprimé le principe qu’elle ne pouvait ce faire. L’Algérie a entamé une opération de libéralisation importante de ce point de vue pour limiter le rôle et l’usage des barrières non-tarifaires qui continuent d’exister mais de manière larvée et surtout difficile à identifier.

35 Annexe 1A de l’Accord sur L’OMC 36 L’Algérie n’y échappe pas malgré de réelles efforts de libéraliser le commerce international depuis

une dizaine d’années. 37 Ibidem note 31 ci-dessus article sur « les barrières non tarifaires gênent les exportateurs » in

http://www.elwatan.com/journal/html/2001/08/23/sup_html.htm 38 Cela pourrait être regardé comme un véritable bénéfice pour cet Etat qui sera ainsi amené à

moderniser son système commercial et les administrations qui le gèrent (douane, chambre de commerce, finances, etc.…)

20. Comme on le voit de l’exposé de certaines des questions importantes

couvertes par les accord sur le commerce des biens et marchandises, l’agenda peut être lourd et délicat. Cependant, il paraît faisable et utile de se focaliser, pendant les négociations sur l’accession, sur quelques points sur lesquels l’Algérie devrait s’engager clairement: (i) la nécessité de fixer ses tarifs douaniers à un niveau comparable à ceux des pays en développement déjà membres de l’OMC, (ii) l’engagement de réduire les déséquilibres dus à sa politique commerciale, notamment les grands écarts de tarifs douaniers et l’absence de transparence dans l’application des tarifs et les exemptions accordées aux opérateurs économiques, (iii) une meilleure collecte des droits douaniers dont les plus élevés seront réduits pour mieux harmoniser les tarifs et arriver à terme à leur simplification et (iv) les conditions de la mise à niveau de sa législation et réglementation relatives aux mesures considérées comme des obstacles non-tarifaires. Dans ce cadre les mesures sanitaires et phytosanitaires en vigueur pour assurer la sécurité des produits alimentaires, la santé des consommateurs et des animaux, ainsi que la préservation de l’environnement doivent faire l’objet d’une harmonisation avec l’accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (Accord dit SPS). Cet accord, faut-il le souligner, exige une évaluation pertinente selon des normes internationales pour légaliser de telles mesures. Il va de soi qu’une telle stratégie rencontrera beaucoup de résistance de la part des opérateurs qui bénéficient de l’absence de transparence dans l’application des tarifs actuels et de tous ceux qui bénéficiaient de régimes privilégiés d’importation39.

2. Les conditions liées au commerce des produits

agricoles 21. C’est là comme on le sait une nouveauté par rapport au GATT, car

l’agriculture entre dans le système commercial multilatéral. Les engagements des Etats membres de l’OMC dans le secteur agricole sont de trois ordres : (i) les restrictions quantitatives doivent être remplacées par des droits douaniers qui devront par la suite être réduits, (ii) les subventions nationales à l’agriculture qui ont un impact sur le commerce international des produits concernés doivent être réduites avant de disparaître40, et (iii) les subventions à l’exportation doivent aussi faire l’objet de réduction avant de disparaître. Il faut ici noter que les subventions ne sont pas interdites juridiquement de la même manière que celles qui affectent les produits manufacturés41. En ce qui concerne les restrictions quantitatives, les pays postulant à l’accession

39 Sans aucun doute cela affectera le régime de l’ importation sans droits de douane d’ inputs destinés à

l’ investissement dans le cadre du décret 93-12 qui donne de véritables privilèges fiscaux qui ne sont pas toujours de nature a favoriser l’ investissement et le développement. Cf. M.A. Bekhechi, L’ investissement et le droit : réflexion sur le nouveau « code » algérien . Décret 93-12, in Droit et Pratique du Commerce International (DPCI) 1993, Tome 20, N. 1 pages 133-162

40 Cela s’applique essentiellement aux céréales comme on le sait. Mais les subventions à l’agriculture sont de plus en plus diversifiées et une attention particulière leur est accordée ; Cf. note 47 ci-dessus.

41 Cf. Agreement on Subsidies and Countervailing Measures.

sont libres de proposer des tarifs avec un objectif de temps pour les réduire. Conjugués ensemble, tarifs et objectifs de temps doivent permettre de remplacer les restrictions quantitatives. Cependant les subventions à la production doivent faire l’objet d’un calcul précis42 pour chaque produit agricole recevant de telles subventions avec ce que cela implique de difficultés techniques pour rassembler les données et choisir les périodes pendant lesquelles sont calculées ces subventions. Ce sont ces difficultés qui ont poussé les parties à l’Accord sur l’agriculture à obliger les Etats membres de l’OMC à restreindre les subventions43 nationales entre 5% à 10% de la valeur à la production44. Ce niveau de subvention est comme on le voit très bas. Dans la réalité des pays industrialisés déjà membres de l’OMC accordent beaucoup plus de subventions à leurs producteurs agricoles et pourraient se retrouver en position d’exiger plus de la part de pays en développement postulant à l’accès à l’OMC45. Il n’y a juridiquement aucune base à demander la disparition des subventions à l’exportation mais seulement leur réduction et transparence tel que cela découle de l’Accord sur l’agriculture46. Les pays postulant à l’accession doivent accepter la réduction négociée des subventions à la production et à l’exportation. Dans le cas de l’Algérie, dont l’agriculture est appelée à bénéficier d’un soutien plus important des pouvoirs publics pour répondre aux besoins croissants de la société et de l’économie, la négociation devrait se focaliser sur les questions des subventions à la production, notamment pour l’agriculture saharienne dont l’un des objectifs est de promouvoir l’exportation de produits agricoles. Mais les questions liées aux subventions à la production de céréales et/ou de produits laitiers dont l’Algérie importe des quantités très importantes doivent probablement faire l’objet d’une attention particulière47.

3. Les conditions concernant le commerce des services

22. l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) représente une

première étape vers la libéralisation du commerce international des

42 Aggregate Measurement of Support(AMS) défini dans l’Annexe 3 de l’Accord sur l’agriculture. 43 Cf. Article 6.4 de l’Accord sur l’agriculture 44 5% pour un pays industrialisé et 10% pour un pays en développement. 45 Il faut noter par exemple que l’Union européenne n’accorde pas un accès libre aux produits agricoles

des pays méditerranéens dans le cadre des accords de libre-échange. L’Egypte a par exemple clairement exprimé son insatisfaction face à cette pratique qui limite l’accès au marché européen à ses produits les plus compétitifs, Cf. Oxford Analytica Brief, 4 July 2001, Egypt : EU Association Agreement.

46 Afin de permettre une négociation plus rapide de l’accession de nouveaux membres, les membres actuels de l’OMC devraient faire preuve de flexibilité en ce qui concerne le calcul des subventions accordées par les pays postulant à l’accession à leur agriculture.

47 Cf. http://www.liberte-algerie.com/aout2001/25/actualite.htm. Cet article reporte que « l’État a relevé le niveau de soutien actuel équivalent de 2 500DA/ha/an à 3 500 DA/ha/an, soit une hausse de 40 %. » aux agriculteurs. Les pouvoirs publics contribueront, en outre, à hauteur de 10 % du montant de la facture hors taxe pour les autres activités économiques. Ce dispositif, qui s’étalera du 1er juil let au 31 décembre prochain, nécessitera une enveloppe de 500 millions de DA auxquels s’ajouteront 260 millions de DA pour financer le soutien à l’agriculture. …….

services48. Cet accord définit les principes et modalités du commerce des services au niveau international49, les obligations générales des Etats parties50 et décrit les mesures qui sont sujettes aux engagements de l’Etat en matière d’accès au marché des services ainsi que les exceptions à l’accord51. C’est sur la base de cet accord que les Etats doivent s ‘engager et accepter des obligations spécifiques dans le secteur des services. Tout d’abord, ils doivent s’engager a favoriser les mouvements de personnes et de capitaux pour les paiements à l’étranger, préciser leurs engagements sur la libéralisation de secteurs spécifiques dans le commerce de services et les exceptions à la clause de la nation la plus favorisée. Pendant les négociations en vue de l’accession, l’Algérie fera une offre en matière d’accès à son marché des services. Il est clair que quelle que soit le contenu de cet offre, les Etats membres de l’OMC essaieront d’obtenir une libéralisation importante dans les secteurs des banques, des assurances et des télécommunications. Il s’agira pour l’Algérie de bien définir ceux des secteurs des services qui seront ouverts et ceux qui continueront de faire l’objet de protection. Va-t-elle faire une offre d’ouvrir les secteurs du tourisme, du transport aérien, de l’éducation, de la construction, distribution, environnement, santé qui sont ouverts à la négociation entre les autres membres de l’OMC52. Le tourisme et le transport aérien ont fait récemment et continuent de faire l’objet de discussions entre membres de l’OMC au sein du Conseil du commerce de services53.

23. Il faut ici noter que tout pays en développement postulant à l’accession à

l’OMC doit se monter vigilant pour bien définir ses intérêts et en assurer une protection au moins temporaire avant le régime de l’accord sur le commerce des services ne s’applique à lui totalement. Cet accord définit les quatre modes de fourniture de services au niveau international, les obligations générales des Etats membres de l’OMC (transparence et non-discrimination, application du droit de manière égalitaire, conditions pour l’intégration économique régional, clause de la nation la plus favorisée), les mesures qui

48 Pendant les négociations commerciales multilatérales du cycle de l’ Uruguay, onze secteurs larges

de services ont été identifies et ouverts à la négociation entre les membres du GATT : affaires (business), transport, construction, finance, tourisme, communications, distribution, éducation, environnement, santé et loisirs.

49 Services originaires d’un pays membre de l’OMC vers un autre pays membre, services dans le territoire d’un pays membre en faveur des consommateurs locaux ou d’autres pays membres de l’OMC, par un prestataire de service d’un pays membre à travers la présence de ses représentants sur le territoire d’un autre pays membre (Article I paragraphe 2 de l’Accord)

50 Existence de clause de la nation la plus favorisée dans les relations entres Etats, règle de transparence, respect du droit dans les pays, existence d’accord d’ intégration économique régionale etc.…

51 Parmi les exceptions, il y a celles liées à l’existence d’accords commerciaux incluant une clause de la nation la plus favorisée, les compensations et subventions, les règles des marchés publics, les restrictions dues à la balance des paiements ou les questions liées à la sécurité et à la défense nationale.

52 UNCTAD and the World Bank, Liberalizing International Transactions in Services : A Handbook, United Nations, N.Y and Geneva, 1994

53 Cf. doc. OMC S/C/M/41, S/C/M/41 à 43, 46, 48 et 50 et sur le transport aérien S/C/M/49 et S/C/M/51.

sont sujettes aux obligations des Etats en matière d’accès au marché54 et les exceptions que les Etats peuvent faire valoir pour ne pas appliquer l’accord sur le commerce des services55. C’est pour cela que les Etats postulants à l’accession doivent : (i) s’engager sur les mesures générales d’abord, (ii) les engagements relatifs aux secteurs particuliers des services qui peuvent être différenciés selon les différents modes de prestation de services et enfin les exceptions dues à la mise en œuvre de la clause de la nation la plus favorisée.

24. Il va de soi que comme tous les pays en développement dont l’économie était

« centralement » planifiée et gérée par l’administration publique, l’Algérie avait un secteur des services qui était faible spécialement dans les secteurs des finances et du soutien aux entreprises (marketing, communication, management, assurances, grande distribution etc.…) qui sont vitaux dans une économie de marché. Les prestataires de services existant étaient et sont encore pour nombre d’entre eux surtout des entités publiques qui disposaient de quasi-monopoles voire de véritables monopoles, ce qui rend l’ouverture de ces services à l’investissement international très sensible et provoque des résistances souvent fortes. L’ouverture au capital privé national n’est pas en soi suffisante, car souvent elle peut amener à remplacer un monopole public par un quasi-monopole privé ou par des situations oligopolistiques complexes56. Il va de soi que l’Etat peut proposer des solutions qui graduellement permettront l’ouverture du commerce de services à l’investissement international57. Mais en fait et pour l’instant ce sont les secteurs des services financiers et des télécommunications qui sont le plus visés par l’OMC comme objectifs de la libéralisation recherchée dans le secteur des services. Ceci parce que les pays membres de l’OMC ont négocié entre eux de nouvelles concessions dans ces deux secteurs depuis la conclusion de l’Uruguay Round58. De ce point de vue l’exclusion d’une partie de ces secteurs de la libéralisation semble inacceptable parce que la fourniture de services y est indivisible techniquement ainsi que pour des questions d’économie d’échelle. Demander par exemple a un prestataire de service dans les télécommunications ou les finances de n’opérer que dans une région d’un pays peut s’avérer difficile a accepter car il serait mis dans une situation désavantageuse économiquement et aussi parce que cela poserait un problème juridique vis à vis du principe de l’unicité du territoire

54 C’est le cas par exemple de la limitation du nombre d’opérateurs pouvant accéder au marché, le

types d’entités juridiques pouvant accéder au marché etc.… 55 subventions, défense nationale, restrictions liées à la balance des paiements notamment. 56 Ceci est particulièrement vrai dans le secteur de la grande distribution et de l’ importation de produits

alimentaires ou l’ancien monopole d’Etat sur quelques produits sensibles est remplacé par deux ou trois importateurs par produits qui n’ont pas réussi a créer les conditions d’une vraie concurrence favorable au consommateur

57 Certains pays ont par exemple clairement signifié que l’ ouverture du commerce de service pourrait être limité au début à des formules de « joint-venture » entre entités nationales et étrangères, que la distribution de biens ne saurait être ouverte aux capitaux étrangers dans les petites villes, ou que certains secteurs ne seront ouverts que selon un calendrier et des modalités précises.

58 Cf. note 45 ci-dessus.

douanier d’un pays. Cela peut surgir si on imagine qu’une collectivité locale puisse s’opposer à la présence d’un prestataire de service sur son territoire si la loi du pays l’y autorise59, ou si une corporation professionnelle peut soumettre la présence de prestataires de services étrangers a des restrictions sans possibilité pour l’Etat d’y intervenir. C’est pour cela que l’accord sur le commerce de services prévoit que chaque membre devra faire tout son possible et prendre toutes les mesures raisonnables pour s’assurer que les collectivités locales et les organes corporatistes indépendants respectent les obligations souscrits vis-à-vis de l’OMC60. C’est pour cela qu’il est sage que le gouvernement qui postule à l’accession au sein de l’OMC s’assure que les obligations auxquelles il souscrit sont celles qu’il peut exécuter par lui même ou faire exécuter par d’autres personnes morales ou physiques de droit public ou de droit privé sans problèmes juridiques majeurs.

25. Cependant, pendant même le processus de négociations en vue de

l’accession à l’ OMC, l’Algérie a pris des décisions importantes dans différents aspects du commerce des services. Il faut, par exemple, mentionner que le secteur des télécommunications a connu en Algérie des développements qui vont dans le sens des dispositions de l’OMC et que les autorités ont affiché une claire volonté de libéraliser davantage le secteur des finances qui est déjà ouvert à l’initiative privée et aux investissements étrangers depuis la loi 90-14 sur la monnaie et le crédit et qui continue de faire l’objet d’ouvertures supplémentaires. Nul doute que l’adoption d’un plan précis de privatisation des banques publiques pourrait être le signal le plus fort d’une libéralisation totale du secteur financier. Dans les assurances, la re-assurance reste encore sous le contrôle des capitaux publics et l’initiative privée n’y est pas encore admise, mais cela semble bien aussi un intermède entre la structure totalement publique du secteur des assurances d’il y a quelques années et la libéralisation totale du secteur des assurances. L’annonce par l’Algérie de la signature d’un accord avec les Etats-Unis sur la liberté de navigation aérienne est un indice d’une plus grande libéralisation du ciel algérien. Il en va de même des appels constants aux investisseurs étrangers dans le domaine du tourisme qui n’ont pas fait l’objet de réponses positives plus du fait de la situation politique que du contexte juridique algérien. Dans ses réponses aux questions du groupe de travail de l’OMC qui traite de sa demande d’adhésion, l’Algérie devra faire une proposition claire concernant ceux des secteurs de services qui seront ouverts sans restriction à la compétition et à la concurrence et ceux qui feront l’objet d’un calendrier précis d’ouverture progressive. L’article XIX.2 de l’AGCS autorise le principe de la libéralisation progressive du commerce des services et donnera ainsi à l’Algérie la possibilité de rester dans le cadre de sa politique d’ouverture progressive de ceux des secteurs des services qui méritent d’être renforces avant leur ouverture a la concurrence.

59 Ceci n’est pas le cas en Algérie. 60 Article 1 para. 3(a) de l’accord sur le commerce des services.

4. Les conditions liées à la protection des

droits de la propriété intellectuelle 26. L’accord de l’OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui

touchent au commerce (ADPIC) est fondé sur le principe que la valeur des biens et services dans le commerce international est liée au savoir-faire et à la créativité qui y sont associés. L’ADPIC établit des règles de base pour la protection de tels savoir-faire et créativité dans les domaines suivants : droits d’auteurs et droit connexes, marque de fabrique ou de commerce, indications géographiques, dessins et modèles industriels, brevets, schémas de configuration de circuits intégrés et renseignements non divulgués. L’ADPIC établit aussi les règles sur le respect de la propriété intellectuelle et les règlements des différends qui s’y rapportent. L’ADPIC oblige les membres de l’OMC à mettre en œuvre un certain nombre de procédures pour l’application et la mise en œuvre effective de mesure de protection des droits de la propriété. Il continue et renforce en quelque sorte le cadre juridique déjà mis en place par les conventions de Berne, de Paris, de Rome et le traité sur la propriété intellectuelle concernant les circuits intégrés négociés dans le cadre de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI)61.

27. La mise en œuvre de l’ADPIC rencontre de très nombreux problèmes,

notamment dans les anciens pays socialistes d’Europe de l’Est et en développement pour différentes raisons, mais dont l’essentiel réside dans le fait que la propriété intellectuelle n’y est pas toujours perçue comme relevant de la sphère du droit privé et donc soumise aux règles du commerce dans le cadre d’une protection juridique appropriée. C’est pour cette raison qu’une période de transition est accordée aux Etats en développement et en transition pour notifier aux membres de l’OMC leur législation et systèmes relatifs à la mise en œuvre de la protection de la propriété intellectuelle. Tous les pays y compris les moins avancés devraient avoir procéder à une telle notification au 1er janvier 2006. Pour établir le calendrier de cette période de transition, un questionnaire spécifique comprenant cent vingt questions est remis à l’Etat postulant à l’accession qui devra y répondre de manière satisfaisante pour les membres de l’OMC62.

28. L’Algérie, comme de nombreux pays en transition et en développement,

rencontrera des difficultés ordinaires inhérentes à l’établissement d’un cadre juridique complet et cohérent couvrant tous les aspects de la propriété

61 Cf. site Internet http://www.wipo.org/ 62 De nombreux pays en développement membres de l’OMC continuent de revendiquer des périodes de

transition plus longues et une assistance technique et matérielle plus importante pour pouvoir honorer toutes leurs obligations en matière de protection des droits de propriété intellectuelle sous l’ADPIC. Des pays comme l’Egypte, le Pakistan, la Malaisie, l ’ Inde, le Honduras interviennent régulièrement sur ce thème. Certains pays voulaient même réouvrir la discussion sur le contenu de certains aspects de l’ADPIC tels que la protection additionnelle des indications géographiques qui ne concernent que les vins et les spiritueux. Cf. http://docsonline.wto.org/GEN_viewerwindow.asp?D:/DD.../M56.DOC.HTM&Skip=24000

intellectuelle telle que prévu par l’OMC. L’Algérie est partie à la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 188663, à la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle du 20 mars 188364, ainsi qu’au traité de Washington de 197065 sur la coopération en matière de brevets. Sa participation future au traité sur le droit des brevets adopté par une conférence diplomatique réunie à Genève les 11 mai-2juin 2000 sera certainement un autre élément de son adhésion au concept de protection de la propriété intellectuelle que l’OMC est en train de promouvoir66. En plus de sa participation à certains traités, conventions et accords internationaux, l’Algérie dispose aussi d’une législation interne sur la propriété intellectuelle et d’institutions nationales chargées d’en assurer la mise en œuvre. Mais nul doute que les défis de la mise à niveau avec les exigences de l’OMC sont très importants et nécessiteront des reformes et la mise en place d’une capacité de mise en œuvre et d’application plus forte.

29. Il faut cependant noter que l’Algérie n’est pas partie à de nombreux accords

internationaux concernant les mécanismes techniques de la protection de la propriété intellectuelle. C’est le cas : (i) de l’Arrangement de Madrid sur l’enregistrement international des marques ainsi que de son protocole et règlement d’exécution, (ii) de l’Arrangement de la Haye concernant le dépôt international des dessins et modèles industriels (1934-1979), (iii) du traité de Budapest sur la reconnaissance internationale du dépôt des micro-organismes aux fins de procédure en matière de brevet et du règlement d’exécution qui l’accompagne, ainsi que (iv) l’Arrangement de Lisbonne concernant la protection d’origine et leur enregistrement international ainsi que son règlement d’exécution. En plus de cela, les évolutions technologiques récentes ont fait que l’Algérie comme de nombreux autres pays en développement est confrontée au phénomène de reproduction illégale de logiciels et autres enregistrements sonores et visuels (films, jeux vidéo phoniques etc.). La mise en œuvre de la législation et des normes de protection des droits est rendue difficile par suite de la faiblesse institutionnelle des organes et administrations chargés d’une telle protection. Dans cette perspective, il est quasiment certain, que les Etats membres de l’OMC vont profiter des négociations en vue de l’accession pour demander à l’Algérie de renforcer son cadre légal et institutionnel pour la protection de la propriété intellectuelle, et les pays avec lesquels l’Algérie réalise l’essentiel de son commerce international essaieront de négocier une meilleure

63 Adhésion le 18 Avril 1998. La Convention a été complétée en 1896 ( Paris), 1908 (Berlin), 1914

(Berne), et révisée en 1928 (Rome), 1948 (Bruxelles), 1967 (Stockholm) et 1971 (Paris) et enfin modifié le 28 septembre 1979.

64 Ratification le 1er Mars 1966. La Convention a été révisée en 1900 (Bruxelles), 1911 (Washington), 1925 (La Haye), 1934 (Lisbonne), 1967 (Stockholm) et modifiée le 2 Octobre 1979.

65 Adhésion depuis le 8 Mars 2000. Le traité de 1970 a été modifié en 1979 et en 1984. 66 Il faut noter que l’accord de l’OMC sur les questions de droit de la propriété intellectuelle (ADPIC)

impose d’autres obligations qui ne sont pas couvertes par les deux conventions de Paris et de Berne.

protection des droits lié à la propriété intellectuelle dans les accords commerciaux bilatéraux67.

30. Dans ce cadre, il faut mentionner que l’Organisation Mondiale de la Propriété

Intellectuelle (OMPI)68 est fortement engagée dans l’assistance technique pour aider les pays désireux d’accéder à l’OMC à mettre leur droit en adéquation et en harmonisation avec les normes internationales applicables y compris l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)69. Mais ce travail d’harmonisation serait insuffisant sans mécanisme efficace de mise en œuvre et d’application des normes ainsi adoptées. C’est cette capacité d’application et de mise en œuvre qui fera l’objet de l’attention des Etats membres, notamment développés lorsqu’ils seront en train d’évaluer la demande d’accession d’un nouveau membre. Le débat est très difficile sur ces questions surtout lorsque les pays postulant à l’accession considère que certains droits de propriété intellectuelle ne peuvent être protégé complètement s’ils s’appliquent à des technologies et des savoirs cruciaux pour leur développement ou la santé de leurs populations70. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre l’article 66.2 de l’ADPI qui prévoit que les pays les plus avancés membres de l’OMC offriront des incitations aux entreprises et institutions sur leur territoire pour promouvoir et encourager les transferts de technologie vers les pays les moins avancés membres pour leur permettre de se doter d’une base technologique solide et viable.

31. Cependant l’engagement juridique clair de tout pays postulant à l’accession

de combattre les auteurs de violation des droits de propriété intellectuelle semble bien être une des conditions sine qua non des négociations en vue de l’accession71. Le questionnaire relatifs aux droits de la propriété intellectuelle que le postulant à l’accession doit remplir est long et détaillé et concerne cent vingt deux aspects couvrant : les obligations générales, les droits d’auteurs et droits voisins ou similaires, les droits de marque, les

67 Certains pays comme les Etats-Unis se sont donnés une législation interne pour contrôler les

performances de leurs partenaires commerciaux en matière de protection des droits de propriété intellectuelle. En cas de violation ou de non respect des lois en la matière les Etats unis peuvent prendre des sanctions allant de la suspension de toute aide économique ou de suspension de bénéfices commerciaux, Cf. US Omnibus Trade and Competitiveness Act of 1998, Spécial 301 qui dresse une liste dite des « Priority Foreign Countries » qui sont régulièrement suivis.

68 L’OMPI et l’OMC ont signé un accord de coopération qui est entré en vigueur le 1er janvier 1996 pour promouvoir la protection de la propriété intellectuelle.

69 TRIPs en anglais 70 C’est là un aspect relativement ancien du débat sur la pertinence d’une protection absolue des droits

liés à la protection intellectuelle. Mais il a pris récemment une grande ampleur, notamment dans le cadre du « combat » juridique mené par l’Afrique du Sud contre certains laboratoires pharmaceutiques concernant la production de médicaments contre le SIDA sous leur forme générique. C’est là un exemple parfait du problème de la protection de la propriété intellectuelle dans le monde contemporain.

71 Il faut ici noter que l ‘ADPIC donne la possibilité, sous le droit national, d’util iser un droit intellectuel par les tiers sans consentement de son titulaire dans des circonstances précises, notamment pour des usages non-commerciaux (Cf. Article 30 de l’Accord).

indications géographiques, les dessins industriels, les patentes, les designs des circuits intégrés, les conditions de mise en œuvre, de protection et d’application du droit de la propriété intellectuelle. En répondant à ce questionnaire l’Algérie devra répondre à certaines obligations qui seront contractées vis-à-vis des autres membres de l’OMC et de cette dernière dont la mission est d’en vérifier l’application dans le cadre du commerce internationale.

5. Les conditions liées à la mise en œuvre de l’Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce (MIC)

32. Cet Accord MIC concerne les mesures commerciales prises dans le cadre

des politiques d’investissement et qui peuvent avoir un effet prohibitif sur le commerce des biens. L’investissement direct est en pleine expansion et il est devenu un important moyen de développement du commerce de marchandises. En effet, l’investissement direct a été utilisé comme un moyen de contourner les barrières tarifaires et autres au commerce des marchandises et des services. C’est par exemple connu que de grandes sociétés industrielles investissent dans des usines d’assemblages de leurs produits et marchandises dans des pays qui établissent des barrières à l’accès de leur marché72. Mais les pays qui bénéficient de tels investissements imposent souvent des conditions quant à l’utilisation de leurs matières premières et autres inputs industriels existants et aussi l’exporter d’une partie de la production réalisé par l’investisseur pour limiter l’effet négatif potentiel de l’investissement étranger sur leurs propres productions nationales. C’est là une question qui pour l’heure peut paraître toute théorique en Algérie car il faut noter, qu’à l’exception du secteur des hydrocarbures soumis à une réglementation particulière, l’Algérie n’est pas encore considérée comme un pays attractif pour les investissements directs étrangers73 même si le régime de tels investissements demeure l’un des plus libéraux au monde. C’est là une question sensible qui a été soulevée régulièrement depuis 1986 au sein du GATT74 et qui a connu des développements importants depuis. La liste des questions qui s’y réfèrent s’étendent de celles concernant la définition et contenu des conditions locales, à celles relatives à l’exportation des biens produits par l’investisseur, l’usage des matériaux locaux, les transferts de technologies, les restrictions

72 C’est l ’hypothèse classique des producteurs d’automobiles ou de produits électroniques japonais qui

ont investi massivement aux Etats-Unis et dans des pays européens pour contourner les restrictions douanières établies par ces pays contre les voitures et divers équipements électroniques.

73 Cf. article du journal El Watan du 22 Août 2001 sous le titre : « Investissements étrangers : résultats mitigés » in http://www.elwatan.com/journal/html/2001/08/22/sup_html.htm qui analyse les raisons de la faiblesse des investissements européens en Algérie. En 1996, les investissements européens dans la zone méditerranée se sont repartis ainsi : 45% sont allés vers la Turquie et Israël, 28% vers l’Egypte, 11,8% vers le Maroc, et 7,13% vers la Tunisie. L’Algérie quant à elle n’en a reçu que 0,14%.

74 P.B Christy, Negotiating Investment in the GATT : A Call for Functionalism, 12 Michigan Journal of International Law, 1991, 743-798

aux échanges et autres conditions de la participation locale à l’investissement. Comme on le voit cela s’étend au-delà des questions strictement commerciales qui relèvent de la juridiction de l’OMC75. L’Accord MIC a limité dans son article II les mesures à celles qui sont de nature strictement relatives au commerce de marchandises et de telles mesures devraient avoir un effet négatif et restrictif sur le commerce des biens telles que définies par les articles III et XI du GATT. Une liste illustrative, quoique non-limitative, de telles mesures est annexée à l’Accord MIC. Les Etats Unis restent cependant convaincus que les mesures autres que celles définies dans l’article II de l’Accord MIC doivent être traitées pour ne pas entraver le commerce notamment celles relatives aux transferts de technologies et de participation locale dans l’investissement. C’est là un débat qui est loin d’être terminé.

33. Par rapport au cadre juridique algérien relatif aux investissements directs

étrangers, il semble bien que l’Accord MIC ne posera pas trop de problèmes. L’un des principes de base de l’Accord MIC est celui du traitement national en faveur des investissements étrangers. De ce point de vue, la loi 90-14 relative à la monnaie et au crédit avait avant l’adoption du « code » des investissements introduit explicitement le principe de non-discrimination entre investisseurs. Ce principe a été confirmé par le dispositif juridique applicable aux investissements dans le décret-loi 93-1276. Les lois et règlements élabores pour attirer, maintenir et développer les investissements étrangers doivent respecter ce principe de base en même temps que les dispositions visant à interdire les mesures commerciales restrictives découlant du régime des investissements. Dans de nombreux pays, le droit des investissements prévoit que tout investisseur étranger doit donner la préférence à la main d’œuvre locale, aux matières premières locales ou aux services locaux77. Un bilan du droit algérien, c’est à dire de toutes les dispositions légales et réglementaires78 auxquelles doit se soumettre l’investisseur étranger en matière d’administration de son activité, d’approvisionnement en technologies, biens et services doit être fait pour permettre une mise a niveau qui permette d’éviter des contentieux que l’accession pourrait faire naître. En effet, aux termes de l’Accord MIC les membres bénéficient d’une période de

75 K.E Maskus and D.R Eby, Developing New Rules and Disciplines on Trade-Related Investment

Measures, in R.M Stein, (ed), The Multilateral Trading System, Harvester Wheatsheaf, N.Y 1993, 449-469

76 Cf. Note 32 ci-dessus. Mais pour paradoxal que cela puisse paraître, le régime des investissements est plus protecteurs des capitaux étrangers que des capitaux nationaux algériens. Si une telle discrimination en faveur des investissements étrangers continuent elle pourrait donner lieu à l’apparition du « syndrome chinois » qui fait que les capitaux nationaux chinois quittent le pays d’abord avant d’y revenir sous la forme d’ investissements étrangers pour bénéficier de tous les privilèges et droits reconnus à ces derniers.

77 Cf. c‘est le cas des lois chinoises : Sino-Foreign Joint Equity Ventures Law de 1979 et le Sole Foreign-Owned Enterprises Law de 1986 qui comprennent quelques unes de ces mesures restrictives, mais toutes ces mesures ne tombent pas automatiquement sous les dispositions du GATT

78 Il ne s’agit pas du « code » des investissements seulement, mais aussi et surtout des lois relatives au droit commercial, au droit fiscal, au droit de l’ environnement, au droit foncier, aux règlements douaniers et sanitaires sur les importations et exportations etc.

transition de cinq ans pour éliminer les MIC notifiés. Cette période de transition pourra être prorogée par le Conseil du commerce des marchandises à la demande du pays membre en développement qui pourra démontrer qu’il a des difficultés à mettre en adéquation sa législation avec les règles de l’Accord MIC. Des pays membres de l’OMC tels que la Thaïlande, le Mexique, le Pakistan, ou la Malaisie ont déjà soumis de telles demandes.

V- Statut des pays en développement et

mise en œuvre des accords de l’OMC 34. Les accords de l’OMC contiennent en eux-mêmes l’idée que leur mise en

œuvre à l’égard des pays en développement peut se révéler difficile et complexe. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne la libéralisation du commerce extérieur. C’est pour cela que les pays sont autorisés à prendre des mesures de sauvegarde dans le cadre de l’OMC, notamment lorsque l’importation d’un produit peut causer une menace ou un dommage grave à des activités de production nationale directement concurrents. Avant le cycle de l’Uruguay, la possibilité d’adopter des mesures de sauvegarde existait dans le cadre de l’article XIX du GATT de 1947 mais était peu utilisée. Il y a aussi l’hypothèse la plus connue est celle des problèmes de balance des paiements qui peuvent amener l’Etat a prendre des mesures protectionnistes sous l’article XII de l’accord GATT de 1994, ou de celui du versement de subventions à l’agriculture locale qui peuvent aller jusqu’à 10% du montant total de la production au lieu de 5% prévu sous l’article VI.4 (a)(ii)(b) de l’accord sur l’agriculture. Il est aussi prévu des périodes plus longues pour la mise a niveau du cadre juridique et réglementaire avec les obligations contractées sous les différents accords de l’OMC : article XV de l’accord sur l’agriculture, article X de l’accord sur le commerce des services. En plus, en 1979 les membres du GATT avaient adopté à Tokyo une décision autorisant les pays industrialisés à accorder aux pays en développement un traitement spécial et différencié en ce qui concerne les préférences tarifaires sous le système généralise de préférences, des mesures non tarifaires, et les accords régionaux de commerce qui normalement sont sous le régime de l’article XXIV du GATT de 199479.

35. Mais ces dispositions soulèvent un problème d’éligibilité des Etats

susceptibles de recevoir un traitement favorable. En fait, il n’existe pas de critère de définition de l’Etat en développement pouvant bénéficier de tels traitements favorables. Les Etats membres de l’OMC sont libres de reconnaître la qualité d’Etat en développement et d’octroyer les préférences qui en découlent. Les Etats Unis reconnaissent cette qualité à des Etats qui bénéficient du système généralisé de préférence, l’Union Européenne quant à elle considère tout pays membre du groupe des « 77 » comme éligible au bénéfice du système généralisé de préférence, et accepte que l’Etat s’auto déclare éligible à d’autres avantages sous les accords de l’OMC. L’accord de l’OMC sur les sauvegardes, entré en vigueur le 1er janvier 1995 marque une innovation en interdisant aux membres de l’organisation de prendre des mesures d’autolimitation des exportations, d’arrangement de

79 Cet article XXIV oblige les Etats à libéraliser tout leur commerce au sein des zones de libre échange

et des unions douanières dans une période de temps limitée.

commercialisation ordonnée ou toute autre mesure de protection similaire. Mais parallèlement, l’accord prévoit une procédure et des règles sur l’adoption et l’application de mesures de sauvegarde.

36. Pendant les négociations en vue de l’accession à l’OMC, les Etats veulent

faire valoir leur condition d’Etat en développement pour bénéficier des avantages et bénéfices des articles XII et XVIII du GATT de 1994. La Chine essaye de la faire sans succès à ce jour. Le seul avantage cependant qui reste attrayant et important reste celui de l’allongement de la période de transition avant la mise en adéquation du cadre juridique et réglementaire de l’Etat nouveau membre de l’OMC et donc de la libéralisation totale du régime de son commerce. De nos jours, peu d’économistes seraient en mesure de défendre les idées qui étaient derrière l’adoption des articles XII et XVIII du GATT . En effet, il semble très difficile de défendre le principe que les restrictions au commerce extérieur sont des instruments importants pour les questions de balance des paiements, de même qu’il est difficile de croire que les subventions ou l’augmentation des droits de douane constituent des instruments efficaces de politique de développement industriel. Il est de moins en moins de pays qui insistent pour obtenir de telles dérogations et qui préfèrent insister sur la longueur de la période de transition pour se mettre a niveau au niveau législatif et réglementaire d’une manière générale même si cela est plus complexe. En effet la capacité juridique et administrative limitée de produire les instruments juridiques divers que nécessite la mise en œuvre harmonieuse de l’ensemble des accords de l’OMC. La revendication d’une période de transition prolongée paraît légitime même si les Etats membres tendent a restreindre le bénéfice d’une telle clause car pour les postulants et nouveaux membres la période de mise en œuvre est calculée à partir de la date de l’ entrée en vigueur des l’accord de l’OMC et non de la date de leur accession. C’est là une pratique établie qui s’appliquera à tout nouveau postulant, et les périodes de transition devront faire l’objet d’une négociation qui donnera lieu a des dispositions précises dans le protocole d’accession. Les pays en développement peuvent aussi notifier leur volonté de continuer à bénéficier des avantages des arrangements commerciaux préférentiels régionaux entre eux, même si ces derniers semblent ne pas être complètement en harmonie avec la doctrine de l’OMC qui n’accepte qu’à contre cœur l’existence de tels arrangements qui peuvent paraître comme discriminatoires.

VI- Les effets de l’accession à l’OMC

37. L’accession l’OMC est un engagement international qui a des implications très importantes sur de nombreux aspects de la politique commerciale et de développement des pays. Des pays qui ont entrepris des reformes importantes doivent prendre en compte l’existence des règles et normes du commerce international développées par l’OMC et qui doivent être traduite dans leur propre système juridique national. Le besoin de transparence et de mise en œuvre effective des normes de l’OMC sont de nature à favoriser l’émergence de l’Etat de droit et d’un système judiciaire performant. Bien sûr il y a la faible capacité des Etats à mettre en œuvre les reformes nécessaires, mais par delà cette question de la capacité administrative et institutionnelle, l’Etat qui veut accéder et bénéficier des accords de l’OMC

doit faire en sorte que sa politique commerciale et d’investissement soit transparente et constamment se mettre au niveau des exigences de la réglementation du commerce international telles qu’elles découlent des accords de l’OMC et des accords bilatéraux qu’il aura librement négocié avec ses partenaires. Cela certainement se traduira par de nombreux bénéfices dont les plus importants seront les suivants.

38. Il y a tout d’abord une amélioration dans l’accès aux marches étrangers pour

les produits exportables du nouveau pays membres. Le nouveau membre se verra reconnaître la clause de la nation la plus favorisée par les membres de l’OMC et cela a titre général et permanent. Cela représentera pour le nouveau membre un avantage indéniable même si certains Etats membres de l’OMC donnent les avantages de la clause de la nation la plus favorisée a des pays en développement avant même leur accession a l’OMC. L’accession signifiera le passage d’un régime marqué par l’unilatéralisme et le pouvoir discrétionnaire de l’Etat, que les Etats puissants manipulent, à un régime réglementé avec la possibilité de recourir a un mécanisme transparent de règlement des différents au sein de l’OMC. L’Uruguay Round a sensiblement amélioré les conditions dans lesquelles les produits industriels des pays en développement notamment les textiles et les produits d’habillement, les produits faisant appel à une main d’œuvre intensive ainsi que les produits agricoles. Il est important que les pays en développement qui mettent en place ou reforment leur politique d’industrialisation aient la certitude juridique de pouvoir accéder aux marchés des pays industrialisés et des autres pays membres de l’OMC.

39. Il y aura ensuite l’obligation pour le nouveau membre de l’OMC de réduire et

d’éliminer les traitements discriminatoires en faveur de certains secteurs de l’économie nationale et d’uniformiser son régime juridique et douanier. Cela concerne surtout les mesures tarifaires et non-tarifaires qui affectent dans un sens ou l’autre un secteur déterminé de l’économie nationale80. Le nouveau membre aussi affirmera l’unité du régime juridique et douanier applicable à toutes les activités sur toute l’étendue de son territoire national81.

80 La grande spécificité de l’Algérie est qu’elle n’est pas productrice de bien exportable en quantité

telle qu’elle pourrait avoir a faire face a la mise en œuvre de mesures de sauvegarde prises par des Etats importateurs comme c’est le cas des pays asiatiques producteurs de textiles, chaussures ou jouets. Par conséquent a moins d’un développement rapide et important dans les domaines des industries manufacturières, l’Algérie risque surtout d’être un pays ouvert aux importations de biens de consommation de toutes sortes et que c’est elle qui sera dans la position de mettre en œuvre les mesures de sauvegarde pour éventuellement protéger quelques industries naissantes. L’Algérie disposant d’une main d’œuvre abondante et relativement bien formée ne peut ne pas continuer à encourager des investissements dans les industries manufacturières qui nécessiteront des mesures de protection adéquates au moins durant leurs premières années de développement.

81 Il faut mentionner ici l ’existence en droit algérien de régimes de défiscalisation importants qui entraînent des déséquilibres entre acteurs économiques et entre citoyens et des distorsions dans le régime fiscal (cf. note 32 ci-dessus). Le quotidien Liberté du 29 juillet 2001 rapporte que les « Exonérations et autres avantages fiscaux » entraînent : « Un manque à gagner de 4 500 milliards de centimes » par an à cause « des dizaines de milliers de véhicules particuliers sont importés au titre de l’ investissement….. ». Il en conclut que « La défiscalisation pour relancer l’activité économique et l’ investissement ne présente pas uniquement des aspects

L’accession à l’OMC permet aussi de réconcilier les obligations assumées en vertu des accords d’intégration régional avec les normes universelles du commerce. Dans notre cas , L’Algérie qui est membre de l’Union du Maghreb Arabe (UMA) devra se mettre au niveau de ses partenaires qui sont

positifs. En effet, le Trésor public a subi un manque à gagner de 4 500 milliards de centimes en l’an 2000, du fait des avantages fiscaux. Telle est la conclusion des travaux d’audit et d’expertise, communiquée lors d’une conférence de presse, organisée à l’ initiative de la Douane, sur les dispositions fiscales douanières contenues dans la loi de finances complémentaire (LFC) pour 2001. Précisément, la douane devait collecter 113,32 milliards de DA au cours l’exercice précédent au titre de la TVA, droits, douane et autres taxes. Le Trésor n’en a récupéré que 67,80 milliards de DA, en raison des multiples avantages fiscaux accordés notamment en matière d’ investissement. Cette situation est à l’origine en partie de la faiblesse des recettes fiscales ordinaires. La défiscalisation ne s’est pas accompagnée dans tous les cas du lancement de projets d’ investissement. Puisque dans le portefeuille des investissements APSI, seulement 10%, selon un officiel, sont en cours de réalisation. En un mot, de tels opérateurs ont bénéficié d’avantages fiscaux sans pour autant créer des emplois, créer de la richesse. En particulier, "l’Algérie a importé, en l’an 2000, 90 000 véhicules particuliers, dont 60 000 par les concessionnaires, des dizaines de milliers de voitures de tourisme importées ont bénéficié d’avantages fiscaux" (au titre de l’ investissement APSI), a confié un responsable de la douane, en marge de la conférence de presse. Des contrôles a posteriori sont effectués pour déterminer si ces avantages ont été octroyés de façon il légale. Mais jusqu’à présent, un silence entoure l’étendue des détournements au titre des avantages APSI. "Même s’ il y a détournement, i l y aura revente des équipements au profit d’autres opérateurs qui vont créer de la richesse", a tenté de minimiser un responsable douanier. Un directeur central de cette institution finira par reconnaître qu’ il y a là un préjudice fiscal, un manque à gagner au détriment du trésor public…..[Cependant] la loi de finance complémentaire (LFC) pour 2001……prévoit un réaménagement des droits de douane : le taux de 45% de droits de douane est remplacé par un taux de 40%. Ainsi, toutes les marchandises qui étaient soumises au taux maximal de 45% sont désormais taxées à 40%. La LFC 2001 prévoit de ramener les taux de droits de douane (DA) de quatre à trois taux et ce, à partir de janvier 2002. "Il s’agit là, ……, d’une mesure de simplification et de rationalisation de la structure tarifaire, objectif fondamental de la réforme tarifaire de 2002". Les droits de douane comprendront trois taux en fonction du degré d’ouvraison : un taux réduit applicable sur les matières premières ainsi que les produits de première nécessité (céréales, médicament…). Un taux intermédiaire qui frappera les demi-produits (semi-finis) appelés à subir un complément d’ouvraison ou de main-d’œuvre, un taux maximal qui va toucher les autres produits finis destinés à la consommation finale. Quant aux biens d’équipements productifs, ils seront taxés au taux le plus réduit. La LFC 2001 supprime la valeur administrée. À la place, un droit additionnel provisoire (DAP) est institué pour protéger de façon transitoire la production locale. La douane a retenu 443 produits dans la liste des valeurs administrées pouvant être frappées de DAP. Cette taxe sera démantelée progressivement sur une période de cinq années : 60% en 2001, 48% en 2002, 36% en 2003, 24% en 2004, 12% en 2005, 0% en janvier 2006. La taxe spécifique additionnelle (TSA) est elle aussi supprimée. Elle se transforme en une taxe intérieure de consommation (TIC). Cependant, seulement une vingtaine de produits sur les 246 biens assujettis à la TSA sont retenus, constituant l’ essentiel des recouvrements budgétaires au titre de l’ ex-TSA (café, friperie et véhicule de plus de 10 CV). …….Quant à l’exonération des livres scolaires et universitaires, la douane tient à se démarquer. "Il faut signaler que l’exonération portée par le projet de loi de finances ne visait que la Foire internationale du livre. L’avantage fiscal a été élargi au niveau du Parlement à tous les livres scolaires et universitaires. L’application d’une telle décision risque de poser d’énormes problèmes pratiques. Tout d’abord, elle vient créer une sorte de situation non concurrentielle vis-à-vis des éditeurs locaux. Ensuite, elle ouvre un champ d’ interprétation. Qu’entend-on par livre scolaire et universitaire ? Qui va apprécier ces notions, dont les contours ne sont pas définis."

déjà membres de l’OMC. L’accession à l’OMC permettra aux pays membres de l’UMA qui seront aussi au sein de l’OMC de faire valoir leurs droits et bénéfices au niveau régional et ne pas les perdre a cause de la libéralisation générale de leur commerce en vertu des accords de l »OMC. Cependant, il faut noter ici que les pays de l ‘UMA devront se concerter au préalable et évaluer le potentiel de bénéfices que leur procure leur appartenance à l’UMA et développer la même approche vis à vis de l’OMC. L’Etat dont l’accession à l’OMC est adoptée doit appliquer les règles de l’OMC à travers sa législation nationale au fur et à mesure en fonction des engagements qu’il a contracté. Cela a un avantage essentiel de pouvoir faire progresser les reformes en vue de la mise en place d’une économie de marché en bousculant les résistances à de telles reformes au niveau national.

40. La description formelle des techniques juridiques relatives à l’ensemble de

ces matières fait ressortir que le droit positif algérien a connu une évolution extrêmement rapide depuis l’adoption de la loi n° 90–10 du 14 avril 1990 relative à la monnaie et le crédit. Qu’il s’agisse du droit des sociétés, de l’organisation, du fonctionnement et de l’activité des établissements financiers et de crédit, des règles gouvernant le marché financier ou celles régissant la protection du consommateurs ce sont des dizaines de textes à caractère législatif ou réglementaire qui sont entrés en vigueur depuis le début des reformes économiques. L’effort de codification entrepris par le législateur et le gouvernement algérien a essayé de tenir compte de l’état du droit des affaires dans le monde et notamment dans les pays où l’économie de marché est bien établie. Mais, ce faisant le gouvernement ne pouvait échapper à certaines limitations parmi lesquelles les plus importantes sont : (i) celles qui découlent de la nécessité de tenir compte de l’environnement national qui n’est pas encore libéré de l’emprise des idées de l’Etat interventionniste, (ii) celles plus techniques du décalage existant entre le contenu des textes et leur application et (iii) celles qui imposeront au gouvernement algérien de s’adapter à un commerce sans discrimination avec tous les membres de l’OMC en leur accordant le traitement de la nation la plus favorisée82.

41. Il y a enfin toutes les questions « transversales » liées aux normes sociales,

environnementales, aux droits de l’homme et d’une manière générale à la gouvernance que les négociations pour l’accession à l’OMC ne peuvent ignorer. Les négociateurs algériens doivent se convaincre que le développement du commerce international joue un rôle de plus en plus important en matière de promotion et de protection des normes du droit social, de l’environnement et des droits de l’homme. Les engagements internationaux en vue de libéraliser et d’intensifier les échanges commerciaux poursuivent aussi des objectifs de développement social et de meilleure gestion de l’environnement de mieux en mieux définis et perçus par les opinions publiques et les Etats. Les campagnes des organisations non-gouvernementales contre l’intensification du commerce international qu’elles tiennent pour responsable de la dégradation continue de l’environnement est

82 Bien sûr il y a les exceptions « autorisées » par l’OMC, par exemple les accords régionaux de libre-

échange, l’ application de mesures restrictives à l’encontre des produits en provenance d’un pays si ces produits participent à un commerce inéquitable etc.…

un indice important de cet aspect. L’Algérie pourrait se voir demander de développer davantage son cadre juridique et institutionnelle pour la protection de l’environnement. Ainsi ses produits exportables pourraient être soumis à une analyse rigoureuse des conditions de leur production et conditionnement pour voir s’ils sont conformes aux normes de protection de l’environnement et du développement durable. Les normes sociales et de protection des travailleurs, y compris le droit de former librement des syndicats et associations, seront certainement des points de frictions importants dans les négociations commerciales. Bien sûr l’usage de sanctions commerciales contre les pays qui ne respectent pas les normes sociales et/ou environnementales ne sont pas faciles a mettre en œuvre et tiennent en général compte de très nombreux facteurs politiques, stratégiques et de conjoncture83.

VII- En guise de conclusion 42. Les négociations en vue de l’accession à l’OMC sont en train de fournir à

l’Etat algérien un excellent moyen de penser à des reformes économiques profondes qui lui permettront de sortir du cercle vicieux de la dépendance vis à vis des exportations de pétrole et de gaz. Bien sur, la situation de pays mono-exportateur, mais disposant de ressources financières suffisantes pour couvrir ses importations a pu fournir l’illusion d’un confort dans l’arène commerciale internationale. Mais cette illusion est conjoncturelle et disparaît chaque fois que les prix du pétrole et du gaz sont bas. Mais ce confort financier donnait aussi la possibilité à l’Etat d’être un acteur influent du commerce extérieur lui permettant de choisir les fournisseurs essentiels, de fixer les conditions et d’établir les règles sans toujours tenir compte du seul intérêt économique. Cela n’a pas permis de faire de l’Algérie le pays développé et puissant84 que ses dirigeant croyaient être en train de bâtir. Pays riche en pétrole et en gaz naturel, proche de l’un des pôles économiques les plus puissants du monde85, riche d’un potentiel humain formé et compétitif, l’Algérie devrait s’ouvrir au dialogue et se mettre a l’écoute de ses partenaires les plus significatifs pour utiliser son accession à l’OMC comme une étape importante dans la mise en œuvre de sa stratégie de développement.

43. Du point de vue pratique, le Gouvernement algérien devrait continuer de

manière méthodique et soutenue à (i) accélérer les reformes économiques pour se mettre en harmonie avec les exigences de l’accession à l’OMC, avec des évaluations constantes du chemin qui reste a parcourir et une définition

83 Voir par exemple les Etats-Unis dont la loi de 1974 lie l’ octroi de la clause de la nation la plus

favorisée au respect des droits de l’homme et au libre droit d’émigrer mais dont le Président a demander en 1994 au Congres d’accepter une exception dans le cas de la Chine. Cf. Trade Act 1974. Pub Law 93-618 Titre IV, Sect. 602 qui visait les anciens pays communistes et continue de viser la Chine et le Vietnam.

84 L’ illusion de construire « La Prusse du Maghreb » pour les uns, « le Japon de la méditerranée » pour les autres a fait long feu.

85 L’Union Européenne, les autres étant le NAFTA (Canada-Etats-Unis- Mexique) qui est en train de s’étendre à l’amerique latine et l ’ASEAN

de celles des reformes qu’il importe de mettre en œuvre rapidement ; les membres actuels de l’OMC en seront réconfortés et accorderont plus de confiance au gouvernement pour la réalisation du calendrier des reformes qui devront être négociées ; (ii) continuer a moderniser le système juridique algérien et à le mettre en harmonie avec les exigences des transactions commerciales modernes et de l’OMC, y compris les questions de propriété intellectuelle, de commerce électronique, de commerce de services et communications ; (iii) l’Algérie doit insister sur son statut de pays en développement et demander l’octroi et le maintien des bénéfices qui en découlent même si ces bénéfices ne sont pas mis en œuvre du fait de la structure de son économie. Cela pourrait être le cas des subventions à l’exportation de certains produits agricoles ; (iv) l’Algérie devrait entamer une reforme complète de son tarif douanier et obtenir le bénéfice de le situer au niveau de la moyenne appliquée par les autres pays en développement membres de l’OMC ; (v) il serait important de multiplier les activités de dissémination de la documentation relative à l’OMC et de former correctement les agents de l’Etat et des entreprises qui sont en charge de la réglementation, direction, mise en œuvre et suivi du commerce international de l’Algérie86 ; et enfin (vi) le gouvernement devrait poursuivre les reformes politiques pour permettre une meilleure participation de la société civile a l’élaboration des décisions relatives aux aspects du commerce international qui relèvent des débats de société (environnement, normes sociales, droit du travail, etc.). Il n’est plus contesté que le développement durable est aussi une affaire de respect de la règle de droit et de liberté d’expression pour limiter et combattre la corruption et permettre aux opérateurs économiques de prendre leur décisions en toute liberté sur la base d’informations crédibles et contrôlées. A ce jour l’histoire n’a pas encore fourni l’exemple d’un pays qui se serait développé en évitant la corruption et les crises sans adopter un système de gouvernement soumis au seul règne de la règle de droit.

44. Une fois au sein de l’OMC, l’Etat algérien ne pourra plus utiliser de mesures

discriminatoires à l’encontre d’un pays ou d’un groupe de pays que si ces derniers ne respectent pas leurs obligations sous les accords commerciaux de l’OMC. A l’issue de la période de transition et de mise à niveau du système juridique algérien, le traitement national sera accordé aux produits, biens et services étrangers qui pénètrent le marché national. Cela signifie la promotion d’une saine concurrence qui devrait bénéficier à l’économie nationale pour peu que ses avantages comparatifs soient utilisés judicieusement. Cela permettra de mettre fin à la tentation facile de maintenir l’Algérie dans la situation d’un pays importateur de biens et services de

86 Il est utile de signaler ici qu’un observatoire du commerce extérieur avait été établi il y a quelques

années avec pour mission de fournir au gouvernement et aux opérateurs économiques un lieu de documentation, d’ information et de support. Le ministère du commerce, actuellement en charge de la préparation de l’accès de l’Algérie à l’OMC pourrait gérer l’aspect « politique » de l’accession, mais le suivi technique, documentaire de formation etc.…pourrait être plus efficacement transféré à une institution autonome du type observatoire du commerce extérieur ci-dessus mentionne avec des aménagements juridiques et institutionnels appropriés.

toutes sortes contre l’exportation des seuls pétrole et gaz qui eux ne souffrent guère de concurrence à l’étranger87.

87 Le chemin est encore long certes, mais il semble que le débat est bien entamé pour y arriver. cf. El

Watan du 16 Août 2001, article consacré aux exportations hors hydrocarbures. http::\\www.elwatan.com