asean et rcep - un autre accord de libre echange trop ambitieux?
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Le Dossier du Moisen partenariat avec
No 21
Mars 2013
LE NOUVEAU VISAGE DE LâINSTITUTION MATRIMONIALE :
LE MARIAGE POUR TOUS
p. 7 DROIT CONSTITUTIONNEL
Quelles relations aujourdâhui en Hongrie entre Etat de droit et pouvoir pouvoir exĂ©cutif avec la nouvelle Loi fondamentale ?
p. 20 DROIT SOCIAL
Du nouveau en droit social : lâaccord national interprofes-sionnel de janvier 2013.
p. 26 CONSEILS DES PROS
p. 25 PROPRIĂTĂ INTELLECTUELLE
Un point de vue juridique sur la gestion de lâimage du joueur de foot anglais depuis son arrivĂ©e au PSG.
Pour tout ceux qui se posent des questions sur la vie de leur chargĂ© de TD : 24h dans la vie dâun doctorant.
SOM
MA
IRE
EDITO :ChĂšres lectrices, chers lecteurs, Pour le dernier numĂ©ro de lâannĂ©e universitaire nous avons mis en avant les sujets dâactualitĂ© les plus brĂ»lants. Lâeffervescence suscitĂ©e par la rĂ©forme du mariage mĂ©ritait un dossier du mois Ă la hauteur. Nous avons relevĂ© le dĂ©fi et vous proposons de connaĂźtre toutes les consĂ©quences juridiques quâelle entrainera. EvĂšnement majeur du droit social, lâaccord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 vous est Ă©galement prĂ©sentĂ© en dĂ©tail.
Enfin, Monsieur le Professeur TerrĂ© nous fait lâimmense honneur dâune interview sur la rĂ©forme (espĂ©rĂ©e ?) du droit des obligations.
Bonne lecture.
Geoffrey Gury,RĂ©dacteur en chef
p. 4 p. 16
p. 6 p. 20
p. 23p. 7
p. 24p. 8
p. 25p. 10
p. 26p. 11
p. 28
p. 12, 13
p. 30
p. 14
ACTUALITĂ LPJ DOSSIER DU MOIS
L'INTERVIEW DU MOIS DROIT SOCIAL
DROIT DE L'ENVIRONNEMENTDROIT CONSTITUTIONNEL
DROIT COMPARĂ
DROIT FISCAL
DROIT DES AFFAIRES
DROIT CIVIL
DROIT INTERNATIONAL
CONSEILS DES PROS
DIVERTISSEMENT
PROPRIĂTĂ INTELLECTUELLE
BRĂVES
CONCURRENCE
Les sanctions des comportements anticoncurrentiels et leurs limites exposés par Michel Debroux.
Quelles relations aujourdâhui en Hongrie entre Etat de droit et pouvoir pouvoir exĂ©cutif avec la nouvelle Loi fondamentale ?
La reprise Ă Lyon dâun beau projet amĂ©ricain visant Ă aider les dĂ©tenus.
Pour contrer toutes les idées reçues sur la fiscalité, enfin un décryptage juridique de taxe à 75%
Guillaume Martin dépeint les liens entre sociologie et droit.
Le professeur François TerrĂ© nous fait lâhonneur de rĂ©pondre Ă nos questions sur les derniĂšres avancĂ©es des rĂ©formes du droit des obligations. (page 13)
Du nouveau en droit social : lâaccord national interprofes-sionnel de janvier 2013.
Retour sur le dĂ©bat de lâinterdiction du perchorĂ©thylĂšne, un composant chimique utilisĂ© dans les pressings.
La CJUE et la Cour de Cassation clarifient les critĂšres quanti-tatifs de la distribution automobile.
Un point de vue juridique sur la gestion de lâimage du joueur de foot anglais depuis son arrivĂ©e au PSG.
Pour tout ceux qui se posent des questions sur la vie de leur chargĂ© de TD : 24h dans la vie dâun doctorant.
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Notre nouveau site internet est un franc succÚs et vous permet de lire et relire vos articles préférés. Il est aussi un moyen pour tout étudiant de nous communiquer
son mĂ©moire de fin dâĂ©tudes. Nous nous proposons de publier lâensemble des travaux soutenus par une promotion de Master. Pour cela, rien de plus simple, il vous suffit de nous les envoyer directement avec lâaccord du responsable de la formation.
GrĂące au systĂšme des Ambassadeurs, rĂ©cemment mis en place, Le Petit Juriste se rapproche toujours plus de vous. Tout Ă©tudiant, association apolitique ou Master soucieux dâas-surer une meilleure distribution du LPJ dans son universitĂ© peut nous contacter pour devenir Ambassadeur. Sa mission consiste Ă rĂ©ceptionner le journal et Ă en faire la promotion au sein de lâUniversitĂ©, au besoin, grĂące Ă des Ă©vĂšnements LPJ. Les Ambassadeurs nous ont dĂ©jĂ permis dâamĂ©liorer notre prĂ©sence. GrĂące Ă vous, Le Petit Juriste pourrait bientĂŽt devenir le seul journal juridique Ă©tudiant distribuĂ© dans toutes
les UniversitĂ©s françaises. NâhĂ©sitez donc pas Ă contacter la rĂ©daction.
Nous vous avions annoncĂ© une surprise, il est temps de vous rĂ©vĂ©ler la crĂ©ation dâune nouvelle revue Ă destination des Ă©tu-diants : Le Petit Journal de lâEconomie. DĂ©clinĂ© sur le mĂȘme modĂšle que Le Petit Juriste, ce journal fait par les Ă©tudiants et pour les Ă©tudiants sera consacrĂ© aux sciences Ă©conomiques et de gestion. Nous vous donnerons bientĂŽt dâavantage dâinfor-mations sur ce projet.
Lâensemble de la rĂ©daction tient Ă vous remercier pour cette nouvelle annĂ©e passĂ©e Ă vos cĂŽtĂ©s et vous souhaite, Ă toutes et Ă tous, un trĂšs bon courage pour cette derniĂšre ligne droite avant les examens.
LA FIN DE LâANNĂE UNIVERSITAIRE SâANNONCE DĂJĂ, LâOCCASION DE FAIRE LE BILAN SUR CETTE ANNĂE LPJESQUE PLEINE DE NOUVEAUTĂS
ET DE PROJETS
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ACTU
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CrĂ©Ă©e en 1961 sous lâimpulsion dâassociations Ă©tudiantes corporatives apolitiques, asyndicales et aconfession-nelles, lâUNEDESEP - Union Nationale des Etudiants
en Droit, Gestion, AES, Sciences Economiques, Politiques et Sociales -, a pour but dâaider et de reprĂ©senter les Ă©tudiants de ces filiĂšres devant les institutions (ministĂšre de la justice, ministĂšre de lâenseignement supĂ©rieur, Conseil National des Oeuvres Universitaires et Scolaires (CNOUS), Conseil National de lâEnseignement SupĂ©rieur et de la Recherche (CNESER) ...).
FĂ©dĂ©rant une quarantaine dâassociations Ă©tudiantes locales, lâUNEDESEP est lâunique association Ă©tudiante nationale qui reprĂ©sente les quelques 360 000 Ă©tudiants en sciences sociales. GrĂące Ă une centaine dâĂ©lus Ă©tudiants locaux implantĂ©s dans une trentaine dâuniversitĂ©s â parmi lesquelles Paris II, Bordeaux IV, Lyon 3, Dijon, Lille 2, Lyon 2, Montpellier I, Rennes I Nantes â, et dâĂ©lus nationaux au CNESER et au CNOUS, lâUNEDESEP a toujours su ĂȘtre force de proposition reconnue et entendue par les instances dĂ©cisionnelles, comme en attestent nos travaux rĂ©cents sur le nouvel arrĂȘtĂ© Licence ou
encore sur la passerelle pour les docteurs au CRFPA.Outre le volet reprĂ©sentation, lâUNEDESEP Ćuvre au quotidien pour aider les associations Ă©tudiantes Ă se dĂ©velopper dans les meilleures conditions. A ce titre, plusieurs fois par an, lâUNE-DESEP organise des week-end de formation et de dĂ©bats pour les responsables associatifs et les Ă©lus Ă©tudiants, qui sont lâoc-casion dâĂ©changes et de mutualisation des moyens nĂ©cessaires au dĂ©veloppement dâune association Ă©tudiante. Tous les ans, lâUNEDESEP Ă©dite des guides des mĂ©tiers du droit, distribuĂ©s Ă 70 000 exemplaires aux Ă©tudiants via son rĂ©seau dâassocia-tions et accrĂ©ditĂ© par le MinistĂšre de la Justice et le MinistĂšre de l'Economie et des Finances.
Le Petit Juriste, crĂ©Ă© par des Ă©tudiants de Paris II et distribuĂ© exclusivement Ă Ă©chelle nationale via le rĂ©seau dâassocia-tions de lâUNEDESEP, est lâexemple parfait des Ă©changes qui peuvent exister entre nos associations, qui sâentraident pour amĂ©liorer chaque jour un peu plus le quotidien des Ă©tudiants en droit !
Morgane VALLA Président de l'UNEDESEP
LE PETIT JURISTE VOUS PRĂSENTE SON RĂSEAU DE DISTRIBUTION
LâUNEDESEP, la fĂ©dĂ©ration des associations Ă©tudiantes en sciences sociales
LPJ - Mars 2013 -
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L'IN
TERV
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DU
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Avocat aux Barreaux de Paris et de Bruxelles, AssociĂ© au Cabinet Hogan Lovells, Directeur dâEtudes Ă l'Ă©cole de Droit et de Management - Paris II.
Il y a essentiellement trois types de sanctions qui sâattachent aux pratiques anticoncurrentielles : les sanctions civiles, les sanctions pĂ©cuniaires et les sanctions pĂ©nales.
Tout dâabord, les sanctions civiles dĂ©coulent du texte. Elles sont doubles. La premiĂšre sanction civile est celle applicable en matiĂšre dâentente notamment. Elle rĂ©pute inapplicables et illĂ©gaux de droit les accords anticoncurrentiels. Ceux-ci ne peuvent donc pas ĂȘtre mis en Ćuvre et on ne peut en rĂ©clamer lâexĂ©cution forcĂ©e.
La deuxiĂšme sanction civile rĂ©side dans la rĂ©paration des dom-mages anticoncurrentiels. Il sâagit du domaine du droit civil le plus classique, Ă savoir la trilogie de lâarticle 1382 du Code civil qui dispose que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause Ă autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivĂ© Ă le rĂ©parer ».Cette sanction vise Ă permettre la rĂ©paration pour la victime du dommage quâelle a subi du fait dâune pratique anti- concurrentielle. A proprement parler, nous sommes davantage dans le champ de la rĂ©paration que dans celui de la sanc-tion. Cependant, la perception quâen ont les entreprises qui ont commis une pratique anticoncurrentielle est bien entendu la mĂȘme.
Ensuite, il existe les sanctions pĂ©cuniaires, financiĂšres. Il sâagit, en dâautres termes, des amendes. Elles sont imposĂ©es soit par les autoritĂ©s europĂ©ennes, soit par les autoritĂ©s nationales. Elles se cumulent la plupart du temps, le principe non bis in idem ne sâappliquant pas.Elles sont calculĂ©es sur le chiffre dâaffaire en relation directe ou indirecte par la pratique. Ainsi, au chiffre dâaffaire concernĂ© par lâentente ou lâabus de position dominante est appliquĂ© un pourcentage, auquel sont appliquĂ©s dâautres critĂšres liĂ©s Ă la durĂ©e de lâentente, Ă des facteurs soit aggravants soit attĂ©-nuants, Ă un rĂŽle soit de leader soit de suiveur⊠Lâapplication de ces diffĂ©rents critĂšres aboutit Ă la dĂ©termina-tion dâun montant qui est en augmentation constante. Les auto-ritĂ©s de concurrence ont en effet une politique dâaccroissement des sanctions financiĂšres qui sont de plus en plus lourdes. Si beaucoup dâĂ©conomistes disent quâelles ne sont pas encore assez importantes, les entreprises, Ă lâinverse, protestent contre ces sanctions trĂšs Ă©levĂ©es.
La sanction pĂ©nale est quant Ă elle quasiment inexistante en France. Si elle existe en thĂ©orie, elle est rarement mise en Ćuvre.
Elle est en revanche trĂšs rĂ©elle dans dâautres systĂšmes juri-diques, tels que les Etats-Unis et lâAngleterre.
Enfin, il existe des sanctions qui ne sont pas rattachables Ă des catĂ©gories prĂ©cises, qui sont des sanctions « immatĂ©rielles » : les sanctions liĂ©es au dommage rĂ©putationnel, Ă lâimage de lâentreprise. Ces sanctions, alimentĂ©es par exemple Ă des obligations de publication de la dĂ©cision, sont en pratique assez lourdes et dissuasives.
Podcast réalisé et retranscrit par TV DMA, 1Úre Web TV en Management et Droit des Entreprises.
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SANCTION DES ENTENTES ET DES ABUS DE POSITION DOMINANTE
MICHEL DEBROUX
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Depuis le 1er Janvier 2012, la Hongrie s'est dotée d'une nouvelle Loi Fondamentale qui n'a pas manqué de faire parler d'elle. De nombreuses protestations d'ordre politique avaient émergé, et restent toujours d'actualité. D'un point de vue plus strictement juridique, d'autres questionnements méritent une attention toute particuliÚre, à commencer par la question des relations complexes entre Etat de Droit et pouvoir exécutif.
Ces interrogations ont semblé trouver, pour un temps au moins, une oreille attentive et influente avec la Cour Constitutionnelle hongroise, auteur de ce qui a été qua-
lifié de véritable Fronde. Celle-ci, dÚs 2010, s'est inscrite en véritable « canon braqué sur le gouvernement », pour paro-dier sans malice l'expression de Charles Eisenmann. Un véri-table conflit prßt alors forme, qui ne cessa pas malgré la nomi-nation de nouveaux juges constitutionnels en septembre 2011. Cette lutte désormais ouverte entre exécutif et juge constitu-tionnel a connu, tout récemment d'ailleurs, un développement assez troublant. Une réforme électorale obligeant les électeurs à s'inscrire sur une liste électorale au plus tard deux semaines avant le scrutin, et qui limitait fortement la campagne électo-rale dans le temps avait été approuvée par le Parlement en novembre dernier : coup de théùtre en Hongrie, ce texte forte-ment critiqué par l'opposition de centre-gauche a tout simple-ment été jugé contraire à la Constitution le 4 janvier dernier, relançant avec force cet antagonisme. La Cour a jugé que les limitations imposées à la campagne électorale attentaient gra-vement à la liberté d'opinion et de la presse, tandis que l'en-registrement précoce des électeurs était de nature à mettre en danger les droits et libertés de ces derniers.
Il n'est pas difficile de voir là , sans porter de jugement de valeur sur la question, une véritable lutte ouverte entre préé-minence du pouvoir exécutif et défense des libertés fondamen-
tales. Au fond, la vĂ©ritable difficultĂ© rĂ©side ici dans le fait que ce mĂȘme pouvoir exĂ©cutif a Ă©tĂ© gratifiĂ©, dans des conditions dĂ©mocratiques, du pouvoir de rĂ©vision constitutionnelle, qu'il n'a d'ailleurs pas hĂ©sitĂ© Ă utiliser. Ainsi, la rĂ©cente annonce du gouvernement hongrois de procĂ©der Ă une nouvelle rĂ©vision de la Constitution de 2012, n'Ă©tonnera guĂšre compte tenu de l'ampleur sans prĂ©cĂ©dent de cette bataille rangĂ©e. Cette modification de la Loi Fondamentale viendra rĂ©duire la libertĂ© de jugement de la Cour Constitutionnelle, puisque celle-ci ne pourra plus se fonder sur des textes Ă valeur constitutionnelle antĂ©rieurs au 1er Janvier 2012. Pour comparaison, il faut imaginer une rĂ©vision similaire en France : celle-ci revien-drait Ă interdire au Conseil Constitutionnel de se fonder sur la DĂ©claration des droits de l'Homme et du Citoyen, ou encore au PrĂ©ambule de la Constitution de 1946. De maniĂšre plus radicale encore, aucun jugement antĂ©rieur pris par la Cour ne pourra dĂ©sormais ĂȘtre pris en compte, ce qui revient indi-rectement Ă limiter les juges constitutionnels hongrois Ă un pur contrĂŽle de constitutionnalitĂ© vis-Ă -vis du texte brut, sans place pour l'Ă©mergence de principes annexes ou de rĂ©fĂ©rences autres. Un vĂ©ritable « verrouillage » assumĂ© du contrĂŽle de constitutionnalitĂ©, en somme.
Quoi que l'on en pense, ces récentes évolutions méritent que l'on s'y attarde. Elles témoignent d'un véritable questionne-ment profond à venir sur la légitimité du juge constitutionnel, et de ses rapports avec le pouvoir exécutif. Plus généralement, c'est bien la question des rapports entre Etat de droit et pouvoir exécutif qui est posée : a fortiori, dans nos sociétés démocra-tiques, l'écho désormais lointain de la pensée tocquevillienne vient nous frapper avec force. La démocratie et la liberté, socles de notre vision de l'Etat, semblent souffrir de leurs incompatibilités. Cette dialectique puissante n'est pas sans laisser augurer d'authentiques dangers.
Romain SIMMARANO
HONGRIE : LA LOI FONDAMENTALE AU CĆUR
DES ENJEUX POLITIQUES
POUR EN SAVOIR PLUS
âą Rapport dâinformation de M. Bernard Piras sĂ©nateur de la DrĂŽme, DĂ©mocratie, Finances, Europe : les dĂ©ficits hongrois, Commission des affaires europĂ©ennes, n° 684, 2011-2012
⹠Claire Estagnasié, La nouvelle constitution jugée conservatrice de la Hongrie, un danger pour la démocratie ?, lepetitjuriste.fr, 2011.
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Depuis sa fondation en 1992 par les avocats Barry Scheck et Peter Neufeld, « Innocence Project » a permis dâinnocenter 301 personnes aux Etats-Unis. SĂ©duit par son efficacitĂ©, MaĂźtre Sylvain Cormier, avocat spĂ©cialisĂ© en droit pĂ©nal, a eu lâidĂ©e de mettre en place la premiĂšre antenne dâ« Innocence Project France » Ă Lyon. Il sâagit, pour les membres du projet, de lutter contre les erreurs judiciaires.
Lâobjectif dâInnocence Project : lutter contre les erreurs
judiciaires
Le but de cette organisation non gouvernementale est dâaider les dĂ©tenus clamant leur innocence Ă prouver lâexistence dâer-reurs judiciaires en menant des contre-expertises ADN, en rouvrant des dossiers de procĂ©dures afin de rechercher sâil y a eu une nĂ©gligence durant lâenquĂȘte, des contradictions⊠Les principales erreurs judiciaires, dâaprĂšs les statistiques dâIn-nocence Project, sont tout dâabord les faux tĂ©moignages, les erreurs dâidentifications puis les faux aveux. La pluridiscipli-naritĂ© du projet a contribuĂ© Ă lâefficacitĂ© des actions menĂ©es. En effet, ce sont des experts scientifiques, des policiers, des avocats, des magistrats et des Ă©tudiants qui travaillent ensemble sur ces « cold-cases ».
Innocence Project France est structurĂ©e sous la forme dâun fonds de dotation dont lâInstitut dâEtudes Judiciaires de lâuni-versitĂ© Lyon III est la composante principale. Le Projet a ainsi Ă©tĂ© officiellement lancĂ© le 11 janvier 2013 dans les locaux de lâUniversitĂ©. Il sâagit pour les participants de trouver lâĂ©lĂ©ment nouveau qui permettra, conformĂ©ment Ă lâarticle 622 du code de procĂ©dure pĂ©nale (CPP), de faire douter de la culpabilitĂ© de la personne et dâobtenir la rĂ©vision du procĂšs.
En France, en matiĂšre de crime, seules huit procĂ©dures de rĂ©visions ont abouti depuis 1945. Parmi les derniĂšres en date, nous pouvons citer lâaffaire Marc Machin qui a Ă©tĂ© acquittĂ© le 20 dĂ©cembre 2012 par la Cour dâAssises de Paris. Celui-ci, accusĂ© du meurtre dâune femme en 2001, avait Ă©tĂ© condamnĂ© Ă 18 ans de rĂ©clusion criminelle. Un tĂ©moin affirmait lâavoir vu sur les lieux du crime, ce qui avait conduit les policiers vers le jeune homme. Marc Machin avait tout dâabord avouĂ© avoir commis les meurtres avant de se rĂ©tracter. Il sâest ainsi avĂ©rĂ© que celui-ci avait fait de faux aveux. Par ailleurs, un autre meurtre avait eu lieu dans des conditions similaires alors que Marc Machin Ă©tait en dĂ©tention provisoire. Ce nâest que sept annĂ©es aprĂšs que le vrai coupable, David Sagno, avouera les deux meurtres.
La distinction entre les procé-dures de révision française et
amĂ©ricaineLâĂ©quipe française espĂšre accroĂźtre le nombre dâadmission des demandes en rĂ©vision par la commission de rĂ©vision afin que celle-ci saisisse la chambre criminelle qui statuera en tant que
Cour de rĂ©vision. Cette derniĂšre, conformĂ©ment Ă lâarticle 625 du CPP, peut rejeter la demande si elle lâestime mal fondĂ©e ou annuler la condamnation prononcĂ©e. Dans cette derniĂšre hypothĂšse, la Cour apprĂ©cie sâil est possible de procĂ©der Ă de nouveaux dĂ©bats contradictoires, et si câest le cas, elle renvoie lâaffaire devant une juridiction de mĂȘme ordre et de mĂȘme degrĂ© mais autre que celle dont Ă©mane la dĂ©cision annulĂ©e. En cas dâimpossibilitĂ© de procĂ©der Ă de nouveaux dĂ©bats, la Cour statue sur le fond et annule les condamnations qui lui paraissent injustifiĂ©es. Elle dispose Ă©galement de la possibilitĂ© de simplement annuler la condamnation sans renvoi si lâannu-lation ne laisse subsister aucune charge qui puisse ĂȘtre quali-fiĂ©e de crime ou de dĂ©lit.
« THE INNOCENCE PROJECT » DĂBARQUE EN FRANCE
8 - n°21 -
LPJ - Mars 2013 -
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PARà Aux Etats-Unis, il existe autant de systÚmes de révision des
condamnations que dâEtats, auxquels il convient d'ajouter le systĂšme fĂ©dĂ©ral. Globalement, ces 51 systĂšmes permettent Ă une personne dĂ©finitivement condamnĂ©e de soumettre Ă un juge une requĂȘte en rĂ©examen de sa condamnation (post-conviction relief). Les motifs ouvrant droit Ă cette demande sont prĂ©cisĂ©ment Ă©numĂ©rĂ©s par la loi fĂ©dĂ©rale ou Ă©tatique : condamnation rĂ©alisĂ©e en violation de la Constitution fĂ©dĂ©rale ou Ă©tatique, existence dâĂ©lĂ©ments de preuves matĂ©riels nâayant pas Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s prĂ©cĂ©demment⊠Le panel des motifs invo-cables varient selon les Etats, Ă lâinstar de la procĂ©dure dâaccĂšs aux donnĂ©es ADN (motion for DNA testing), plus ou moins contraignante au grĂ© des systĂšmes Ă©tatiques, voire inexistante dans le cas de lâOklahoma.
La mĂ©thodologie dâInnocence Project
Tout dâabord, les dĂ©tenus sâestimant victime dâune erreur judi-ciaire contactent lâassociation qui leur envoie un questionnaire dĂ©taillĂ©. Ensuite, lâĂ©quipe procĂšde Ă une analyse approfondie du dossier afin de dĂ©tecter les Ă©lĂ©ments permettant de prouver lâinnocence du demandeur. Les Ă©tudiants, encadrĂ©s par des professionnels du droit, reprennent ainsi lâenquĂȘte, rendent visites aux dĂ©tenus, se dĂ©placent sur les scĂšnes de crime.
La mĂ©thodologie dâInnocence Project France diffĂ©rera quelque peu de celle retenue aux Etats-Unis Ă©tant donnĂ© que la procĂ©-dure amĂ©ricaine est de nature accusatoire alors quâen France, celle-ci est mixte, câest Ă dire inquisitoire durant la phase poli-ciĂšre et de lâinstruction, et accusatoire lors de la phase de juge-ment. En effet, aux Etats-Unis, le rĂŽle de lâavocat lors de lâen-quĂȘte est prĂ©pondĂ©rant, celui-ci participant grandement au recueil des preuves, Ă lâinterrogation des tĂ©moins. De mĂȘme, en raison du caractĂšre accusatoire de la phase dâenquĂȘte, le rĂŽle des dĂ©tectives privĂ©s est important aux Etats-Unis, alors que celui-ci est quasiment inexistant en France oĂč lâenquĂȘte criminelle est menĂ©e par le juge dâinstruction. Il nâest ainsi pas coutume pour lâavocat dâaller interroger le tĂ©moin au risque dâĂȘtre soupçonnĂ© de subornation de tĂ©moins alors quâaux Etats-Unis, lâĂ©quipe dâInnocence Project a la possibilitĂ© dâin-terroger les tĂ©moins. Un protocole sera sans doute nĂ©cessaire pour lâĂ©quipe française.
DâaprĂšs MaĂźtre Sylvain Cormier, les scellĂ©s sont mal conservĂ©s en France, si bien que lâexploitation des traces ADN, par des technologies performantes, sera peut-ĂȘtre difficile, notamment pour les affaires anciennes. Or, aux Etats-Unis, câest surtout les contre-expertises ADN qui ont permis de disculper un grand nombre de victimes dâerreurs judiciaires. Dâailleurs, de nom-breux Etats adoptent des lois qui organisent la conservation des indices afin de permettre lâexploitation des tests ADN.
Lâaffaire Amanda Knox fournit un bon exemple de disculpa-tion obtenue grĂące Ă des techniques scientifiques modernes. Une Ă©tudiante amĂ©ricaine avait Ă©tĂ© condamnĂ©e le 5 dĂ©cembre
2009, avec le petit ami de la victime, pour le meurtre de sa colocataire. Les Ă©quipes dâInnocence Project ont pu avoir accĂšs aux rĂ©sultats dâanalyse ADN qui dĂ©montraient que seules deux personnes se trouvaient dans la piĂšce oĂč le crime a Ă©tĂ© commis. De plus, deux autres Ă©lĂ©ments de preuves avaient Ă©tĂ© retenus. Il sâagissait, tout dâabord, dâun couteau de cuisine ne contenant aucune tĂąche de sang, qui avait Ă©tĂ© retenu par les enquĂȘteurs comme Ă©tant lâarme du crime. Ensuite, une partie du soutien-gorge de la victime, contenant une trace dâADN du jeune homme, avait Ă©tĂ© retrouvĂ©e 46 jours aprĂšs la perquisi-tion initiale. Les enquĂȘteurs en avaient conclu que la victime, son petit ami et Amanda Knox se livraient Ă des rites sexuels. Selon eux, ce serait au cours de lâun dâentre eux que la victime aurait Ă©tĂ© tuĂ©e. Durant leurs recherches, les Ă©quipes dâInno-cence Project ont rĂ©alisĂ© que les techniciens ne changeaient pas leurs gants entre leurs prĂ©lĂšvements et ont rĂ©ussi Ă dĂ©mon-trer un doute quant Ă la fiabilitĂ© de ces piĂšces. Cette organi-sation a convaincu le juge dâappel de demander une nouvelle expertise du couteau. Il sâest avĂ©rĂ© que ce dernier, du fait de la prĂ©sence de tĂąches dâamidon, avait en rĂ©alitĂ© servi Ă cuisiner.
Eu Ă©gard Ă son efficacitĂ© aux Etats Unis, lâĂ©quipe dâInno-cence Project France espĂšre ainsi lutter contre les erreurs judi-ciaires. Toutefois, celle-ci devra sâarmer de patience car inno-center une personne condamnĂ©e Ă tort peut prendre plusieurs annĂ©es.
Nadia ISLAM
POUR EN SAVOIR PLUS
âą www.innocenceproject.org
âą www.courdecassation.fr
âą www.lemonde.fr/societe/article/2012/12/20/acquittement-requis-au-proces-en revision-de-marc-machin
âą www.lemonde.fr/europe/article/2011/10/03/proces-knox-verdict-attendu-a-perouse-pour-le-meurtre-de-meredith-kercher
⹠Investigations privées en défense: questions de méthode et difficultés pratiques, François Saint Pierre, AJ Pénal 2009, page 433,
⹠La justice pénale aux Etats Unis de Jean Cédras
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Cet impĂŽt a fait couler beaucoup dâencre dans la presse. Malheureusement, au-delĂ du parti-pris politique, nombreuses sont les analyses erronĂ©es, le dernier mot revenant toujours au droit. Ou plutĂŽt, au Conseil constitutionnel. Dans sa dĂ©cision n°2012-662 du 29 dĂ©cembre 2012, celui-ci Ă©tait amenĂ© Ă se prononcer sur plusieurs mesures fiscales de la Loi de finances pour 2013, dont la fameuse taxe Ă 75%.
Lâarticle 12 de ladite loi avait pour objet dâinsĂ©rer un article 223 sexies A dans le CGI, afin dâinstituer Ă la charge des personnes physiques une contribution excep-
tionnelle sur la fraction de leurs revenus dâactivitĂ© profession-nelle excĂ©dant un million dâeuros. AjoutĂ© au taux marginal de 45%, Ă la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de 4 % et aux prĂ©lĂšvements sociaux de 8 % sur les revenus dâacti-vitĂ©, le taux de 18 % aurait abouti Ă une taxation globale de 75 %.
Pourquoi lâarticle a-t-il Ă©tĂ© censurĂ© ? Une contribution excep-tionnelle ne pouvait pas traiter diffĂ©remment deux foyers fiscaux qui disposent globalement du mĂȘme niveau de revenu. Le Conseil a donc censurĂ© lâarticle 12, sans examiner tous les autres griefs, notamment celui tirĂ© de son caractĂšre confis-catoire. Ainsi, le droit a tranchĂ© une question Ă©minemment politique et polĂ©mique, sans se prononcer sur le sujet dĂ©battu dans la presse.
La Constitution rĂ©serve Ă la loi la dĂ©termination des rĂšgles concernant lâassiette, le taux et les modalitĂ©s de recouvre-ment de lâimpĂŽt. Mais il y a deux principes dâĂ©galitĂ© : devant la loi (art 6 DDHC) et devant les charges publiques (article 13). Lorsquâil ne sâagit pas de la procĂ©dure ou de lâintelligibi-litĂ© mais de la charge mĂȘme de lâimpĂŽt, câest lâarticle 13 qui prĂ©vaut. LâĂ©galitĂ© suppose une comparaisons entre les bĂ©nĂ©fi-ciaires dâune disposition et ceux qui ne le sont pas.
AprĂšs la dĂ©cision du 20 juillet 19881, on parle de lâauto inter-prĂ©tation par le Conseil de lâautoritĂ© attachĂ©e Ă ses dĂ©cisions. Pourtant, lâinstauration dâune autoritĂ© juridictionnelle attachĂ©e Ă la dĂ©cision rendue par le Conseil est absente de la volontĂ© des rĂ©dacteurs de la Constitution. DĂ©sormais, le Conseil dĂ©ter-mine lui-mĂȘme avec prĂ©cision quelle autoritĂ© il souhaitait accorder Ă ses dĂ©cisions et sa jurisprudence ne lui est pas
opposable. Dâailleurs, si lâautoritĂ© est attachĂ©e Ă la dĂ©cision dans sa totalitĂ©, lâarticle 1350 du Code civil prĂ©voit Ă lâinverse que « lâautoritĂ© de la chose jugĂ©e nâa lieu quâĂ lâĂ©gard de ce qui a fait lâobjet du jugement ». LâĂ©tendue de lâautoritĂ© varie en fait suivant le type de texte.
Le Conseil, lorsquâil est saisi dans un contrĂŽle a priori, a la facultĂ© dâĂ©largir son examen aux questions manifestes. Câest ainsi que, saisi du texte dans son entier, il doit en tirer toutes les consĂ©quences opportunes. Parfois, le Conseil sâautorise souve-rainement Ă rĂ©examiner certaines lois dont il nâa pas Ă©tĂ© effec-tivement saisi, câest lâexamen par ricochet. Ceci sert non pas Ă encadrer lâapplication dâune disposition mais dâexaminer une disposition dĂ©jĂ entrĂ©e en vigueur.
Câest ainsi que les Sages ont validĂ© la nouvelle tranche mar-ginale Ă 45 % de l'impĂŽt sur le revenu2 mais ont relevĂ© que cette augmentation avait pour consĂ©quence de porter l'imposi-tion marginale des retraites complĂ©mentaires dites « chapeau » Ă 75,04 % pour 2012. Jugeant ce niveau d'imposition excessif au regard de la facultĂ© contributive des contribuables concernĂ©s et, par suite, contraire Ă l'Ă©galitĂ© devant les charges publiques, il a censurĂ© les dispositions de l'article L 137-11-1 du Code de la sĂ©curitĂ© sociale qui prĂ©voient l'application dâune contribution sociale de 21 % Ă la fraction des rentes supĂ©rieures Ă 24 000 âŹ, ramenant lâimposition Ă 68,34 %.
Le principe dâĂ©galitĂ© devant les charges publiques en matiĂšre fiscale fait partie des principes gĂ©nĂ©raux du droit. AffirmĂ© par le Conseil dâEtat bien avant la crĂ©ation du Conseil constitu-tionnel, il exige que le mĂȘme rĂ©gime juridique soit appliquĂ© Ă toutes les personnes qui se trouvent dans des situations identiques, mais ne sâoppose pas Ă appliquer des disposi-tions diffĂ©rentes Ă des personnes dans des situations diffĂ©rentes. Ceci nâest en rien obligatoire, juridiquement.
Julien NOUCHI
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1 n°88-244
2 art. 3 de la loi
Droit des entreprises en difficultĂ© â 5e Ă©dition â Pierre-Michel Le Corre â Collection « MĂ©mentos » - Ăditions Dalloz â ISBN 9782247124336 â 232 pages â 18,50 euros
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Par un arrĂȘt du 19 fĂ©vrier 2013 (11-21.763), la Cour de cassation limite la libertĂ© des contractants en matiĂšre de gage des stocks, en retenant une application impĂ©rative du rĂ©gime spĂ©cial prĂ©vu par le Code de commerce lorsque ses conditions sont rĂ©unies.
Le gage fait lâobjet de dispositions concurrentes au sein, notamment, du Code civil (articles 2333 et suivants) et du Code de commerce (articles L. 521-1 et suivants). Le
gage de droit commun prĂ©vu au Code civil Ă©tant trĂšs Ă©tendu, il semble possible de constituer un gage des stocks de droit commun. NĂ©anmoins, lâarticle L. 527-1 du Code de commerce Ă©tablit un rĂ©gime spĂ©cial de gage des stocks, lequel «peut» ĂȘtre contractĂ© Ă lâoccasion de « tout crĂ©dit consenti par un Ă©tablis-sement de crĂ©dit Ă une personne morale de droit privĂ© ou Ă une personne physique dans lâexercice de son activitĂ© profes-sionnelle ». Lâarticulation entre gage des stocks du Code de commerce et gage de droit commun a fait lâobjet dâinterroga-tions importantes dâune partie de la doctrine Ă lâissue de lâor-donnance du 23 mars 2006 ayant rĂ©formĂ© le droit des sĂ»retĂ©s.
Le rĂ©gime dĂ©rogatoire du Code de commerce Ă©tant plus contraignant que le droit commun du gage, et donc moins attractif pour les Ă©tablissements de crĂ©dit (notamment par son formalisme et lâinterdiction du pacte commissoire), ces der-niers se sont interrogĂ©s sur la possibilitĂ© de contracter un gage de droit commun alors mĂȘme que les conditions prĂ©vues aux articles L. 527-1 et suivants du Code de commerce seraient rĂ©unies.
La cour dâappel de Paris avait, le 3 mai 2011, admis cette pos-sibilitĂ© en estimant, notamment, que lâutilisation du mot «peut» (« Tout crĂ©dit (âŠ) peut ĂȘtre garanti par un gage sans dĂ©posses-sion des stocks ») confĂ©rait aux parties la facultĂ© de recourir soit au rĂ©gime spĂ©cial, soit au droit commun du gage, ce que lâarticle 2354 du Code civil nâinterdisait pas formellement.
La Cour de cassation, par un arrĂȘt du 19 fĂ©vrier 2013 (11-21.763), casse et annule lâarrĂȘt rendu par la cour dâappel de Paris, au visa des articles 2333 du Code civil et L. 527-1 du Code de commerce. La cassation est particuliĂšrement sĂšche :
« sâagissant dâun gage portant sur des Ă©lĂ©ments visĂ©s Ă lâarticle L. 527-3 du code de commerce, les parties, dont lâune est un Ă©tablissement de crĂ©dit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meub le s sans dĂ©possession ». La sanction pour les gages ainsi constituĂ©s est sĂ©vĂšre puisquâils semblent, selon nous, devoir ĂȘtre frappĂ©s de nullitĂ© en application des articles L. 527-1, 3° et L. 527-4 du Code de commerce. De nombreux auteurs sâĂ©taient pourtant rĂ©jouis
du parti pris en 2011 par la cour dâappel de Paris1. En effet, si le principe veut que les rĂšgles spĂ©ciales priment les rĂšgles gĂ©nĂ©rales (specialia generalibus derogant), il ne vaut que lorsque le lĂ©gislateur a effectivement souhaitĂ© dĂ©roger au rĂ©gime gĂ©nĂ©ral2. En ce sens, lâinterprĂ©tation de lâexpression « Tout crĂ©dit (âŠ) peut ĂȘtre garanti par un gage sans dĂ©posses-sion des stocks », et en particulier du mot « peut », est dĂ©licate en lâabsence de toute prĂ©cision complĂ©mentaire. La solution de la Cour de cassation conduit Ă estimer quâil faut lâentendre non pas comme la facultĂ© de conclure un gage soumis, au choix des parties, au rĂ©gime gĂ©nĂ©ral ou au rĂ©gime spĂ©cial, mais plutĂŽt comme celle de conclure ou non un gage.
En lâabsence dâune disposition expresse relative Ă lâexclusi-vitĂ© du rĂ©gime spĂ©cial, on aurait nĂ©anmoins pu penser que la Cour de cassation ferait une plus grande place au principe de libertĂ© contractuelle. Tel nâest pas le cas, lâarrĂȘt consacrant ici lâexclusivitĂ© dâun rĂ©gime spĂ©cial qui ne brille que par les cri-tiques dont il a fait lâobjet1.
On pourrait aussi tenter dâexpliquer cette solution par la volontĂ© de protection du cocontractant de lâĂ©tablissement de crĂ©dit2. En effet, lâarticle L. 527-2 prohibe le pacte commis-soire dans le cadre du rĂ©gime spĂ©cial. Un auteur a cependant montrĂ© lâutilitĂ© fort limitĂ©e de cette disposition3.
Dans ce cadre, il semble possible que la dĂ©cision ait Ă©tĂ© guidĂ©e par des circonstances dâopportunitĂ©. Des auteurs ont montrĂ© que laisser le choix aux parties soulĂšverait de nouveaux pro-blĂšmes4 et ne serait guĂšre cohĂ©rent avec lâexistence mĂȘme dâun rĂ©gime spĂ©cial5. Dans lâattente dâune nouvelle rĂ©forme ?
Raphaël DURAND
EXCLUSIVITĂ DU RĂGIME SPĂCIAL DE GAGE DES STOCKS
POUR EN SAVOIR PLUS
âą Voir lâarticle en version longue sur le site du Petit Juriste
⹠Cass.com., 19 février 2013, n°11-21.763
âą Articles 2333 et suivants du Code civil ; L. 527-1 et suivants du Code de commerce
⹠Th. de Ravel d'Esclapon, Gage des stocks : exclusivité du régime, Dalloz actualité, 22 février 2013
1 Th. de Ravel d'Esclapon, Gage des stocks : exclusivité du régime, Dalloz actualité, 22 février 2013
2 Voir, pour cet argument, P. Crocq, Gage de choses fongibles du code civil ou gage des stocks du code de commerce : le choix
est-il possible ?, RTD Civ. 2011 p. 785
3 Certains y voyant des dispositions « inutiles » (S. Prigent, La réforme du droit des sûretés : une avancée sur la voie de la
modernisation, AJDI 2006 p. 346), dâautres un rĂ©gime « aussi superflu qu'anachronique » (R. Dammann, La rĂ©forme des
sûretés mobiliÚres : une occasion manquée, D. 2006 p. 1298)
4 Voir R. Dammann, op.cit.
5 P. Crocq, op. cit. : « Outre le fait que l'on se demande bien quelle peut ĂȘtre la justification de cette Ă©trange interdiction (on ne voit pas pourquoi, en effet, les dĂ©biteurs professionnels devraient ici ĂȘtre mieux protĂ©gĂ©s que des non professionnels),
cette interdiction est d'une utilité fort limitée puisqu'en cas de difficultés financiÚres, le constituant pourra bénéficier de
l'application du droit des procédures collectives»
6 Voir, Ă cet Ă©gard, D. Legeais, Gage sur stocks, RTD Com. 2006 p. 639
7 Th. de Ravel d'Esclapon, op. cit.
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Cet article a été réalisé grùce à une interview que Monsieur le professeur François Terré a bien voulu accorder au Petit juriste.
« Le droit ne domine pas la société, il l'exprime »
Cette citation de Jean Cruet dĂ©peint parfaitement lâorigine du droit vu comme un fait social. La sociologie juridique trouve tout son intĂ©rĂȘt dans ce dernier car elle donne un Ă©clairage complĂ©mentaire qui permet de sonder lâĂ©tat dâesprit de la population pour dĂ©gager une certaine conjoncture (politique, idĂ©ologique, morale). Pour Denys de BĂ©chillon, le droit « est fondamentalement adaptĂ© Ă un certain Ă©tat actuel, des choses, des problĂšmes, des rapports de force et des idĂ©es1 » ; le droit a une propriĂ©tĂ© « rĂ©flĂ©chissante ».
Cette matiĂšre sâest dĂ©veloppĂ©e au cours du XXĂšme siĂšcle sous lâinfluence de certains grands auteurs tel que Max Weber, Jean Carbonnier ou encore Henri Battifol. Elle vise Ă appliquer la mĂ©thode sociologique dâanalyse au phĂ©nomĂšne juridique. Le professeur TerrĂ© prĂ©cise quâil sâagit de sâintĂ©resser Ă lâappli-cation des rĂšgles de droit au sein dâun Etat : on est dans une analyse qui vise Ă considĂ©rer les faits juridiques comme des « choses », suivant lâexpression de Durkheim.
Concernant ses sources, la sociologie du droit ne saurait sâin-tĂ©resser uniquement Ă la loi, au sens lĂ©gislatif du terme, car cette derniĂšre ne constitue quâun exemple parmi lâensemble des sources du droit. La jurisprudence ou les diffĂ©rents travaux dâinterprĂ©tation du droit constituent aussi, par cette approche, des normes juridiques : chaque application dâune rĂšgle de droit participe Ă lâĂ©dification du Droit. Dâailleurs, comme le soulignait le professeur François TerrĂ© dans Le juriste et le politique, tout juriste contribue Ă la formation du droit que se soit lâĂ©tudiant ou encore le juge. En effet, pour le profes-seur, « toutes ces donnĂ©es ne sont pas indiffĂ©rentes Ă la com-prĂ©hension du phĂ©nomĂšne juridique ne serait-ce que par la transmission du savoir. » Les comportements des particuliers sont une donnĂ©es constitutive du droit : la preuve en est avec la coutume qui peut constituer une source du droit mais sous certaines conditions.
Le droit se prĂȘte donc parfaitement Ă lâobservation sociolo-gique puisquâil extĂ©riorise en raison de sa nature mĂȘme son propre objet dâanalyse. Toutefois, comme le souligne Monsieur TerrĂ©, le droit ne se ramĂšne pas toujours Ă une manifestation dâune pratique car on a Ă©galement le fait juridique et il ne faut jamais oublier que « le droit se nourrit aussi du fait : il y a une combinaison de lâĂȘtre et du devoir ĂȘtre qui font que le droit, au fond, est toujours quelque chose dâinachevĂ©. »
Les mĂ©thodes dâanalyse de la sociologie juridique
Les mĂ©thodes dâanalyse de la sociologie juridique sont les mĂȘmes que celles employĂ©es par la sociologie gĂ©nĂ©rale. On peut saisir les faits sociaux par le biais dâenquĂȘtes dâopinions, de statistiques, par le biais dâĂ©tudes comparĂ©esâŠ
Prenons lâexemple de lâeuthanasie. Cette derniĂšre a fait lâobjet dâun rapport remis par le professeur Sicard au PrĂ©sident de la RĂ©publique le mardi 18 dĂ©cembre 2012. En analysant cette question sous lâangle sociologique, le professeur François
TerrĂ© invite Ă sâinterroger sur la place de la sanction : ne vaut-il pas mieux maintenir certains barrages quitte Ă ĂȘtre souple dans lâapplication des rĂšgles ? La loi actuelle, Ă savoir la loi Leonetti du 22 avril 2005, serait satisfaisante puisquâelle assure lâĂ©quilibre difficile entre le fait quâon ne peut donner la mort Ă quelquâun et le fait quâil y ait des situations extrĂȘmes dans lesquelles on devrait permettre aux mĂ©decins de faciliter le dĂ©cĂšs du patient. Il faut donc distinguer, peut ĂȘtre, la rĂšgle de la pratique : la pratique coexiste dâapparence avec une rĂšgle contraignante.
Au final, la sociologie a encore beaucoup Ă faire en France pour acquĂ©rir son droit de citĂ©. Il suffit pour cela de citer lâexemple de la jurisprudence. En effet, pour beaucoup, la pratique est constituĂ©e de dĂ©cision de justice : une dĂ©cision de justice est liĂ©e Ă une contestation dâun droit. Or, le droit ne se ramĂšne pas seulement Ă des procĂšs et, finalement, on connaĂźt trĂšs mal lâensemble des hypothĂšses oĂč le droit sâapplique de maniĂšre spontanĂ©e.
Guillaume Martin
SOCIOLOGIE DU DROIT
1 La valeur anthropologique du droit, ElĂ©ments pour reprendre un problĂšme Ă lâenvers, RTD Civ. 1995 p.835
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Max Weber, 1864 - 1920
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« Les dĂ©bats sur le projet de loi relatif au mariage pour tous tirent Ă leur fin, il est donc temps de penser au prochain chantier du droit civil auquel le ministĂšre de la Justice va sâatteler » (Laurent Neyret), Ă savoir la rĂ©forme du droit des obligations. Plusieurs projets de rĂ©forme se sont intĂ©ressĂ©s Ă la modernisation du droit civil français tant au niveau du droit des contrats quâau niveau de la responsabilitĂ© civile : le projet Catala (2004), le projet de la Chancellerie (2008) et le projet du groupe de travail du Professeur TerrĂ©. Le Petit juriste a profitĂ© de lâoccasion pour poser directement quelques questions Ă Monsieur TerrĂ©.
LPJ- Pourquoi réformer le droit des obligations ?
François TerrĂ© : Le droit des obligations est vĂ©tuste puisque certains textes datent de 1804. Il est donc nĂ©cessaire que la France rattrape les autres pays europĂ©ens qui ont dĂ©jĂ menĂ© ce type de rĂ©forme. Lâinfluence du droit français en matiĂšre contractuelle a vraiment diminuĂ©. Il faut que le droit français se retrouve de nouveau au rendez-vous des siĂšcles.
LPJ- OĂč en ĂȘtes vous dans vos travaux de rĂ©forme ?
F.T : il faut distinguer trois volets.remise de lâavant projet de rĂ©forme du droit des contrats (1/12/2008)Remise de lâavant projet de rĂ©forme du droit de la responsa-bilitĂ© (mai 2011)Remise de lâavant projet de rĂ©forme du rĂ©gime gĂ©nĂ©ral des obligations (7 janvier 2011)
LPJ â Comment articuler le droit commun des contrats avec le droit spĂ©cial qui est Ă©clatĂ© dans plusieurs codes ?
F.T : Il faut rĂ©cupĂ©rer dans le droit commun des contrats des principes qui ont Ă©tĂ© Ă©parpillĂ©s et qui mĂ©ritent dây ĂȘtre inclus. Le code civil doit rester le centre nĂ©vralgique du droit des obli-gations : le droit commun des contrats est au centre du phĂ©-nomĂšne contractuel et sa rĂ©forme va impacter le droit des affaires, le droit de lâenvironnement en passant... Le droit commun des contrats doit vraiment saisir la dimension Ă©co-nomique des rapports contractuels Ă©tant donnĂ© que la distinc-tion ancienne du droit civil et du droit commercial est devenue obsolĂšte.
LPJ - Quel est le sort réservé à la cause ?
F.T : Ce concept rempli trois fonctions principales : acte illi-cite, moralisation de lâacte et lâexistence contrepartie. Or, ces trois fonctions ont Ă©tĂ© entendues de maniĂšre diffĂ©rente quant Ă lâutilisation du concept de cause du fait que la Cour de cas-sation a souvent adoptĂ© des interprĂ©tations flottantes en la matiĂšre. Il est donc temps de « tuer » le concept de cause. Tous les autres pays ont supprimĂ© cette notion, la France doit en faire de mĂȘme. NĂ©anmoins, on conserve les trois fonctions de la cause mais pour les dĂ©signer on nâutilisera plus les mĂȘmes vocables. En effet, on parlera de lâ « objet de lâobligation » quant il sâagira de moraliser lâacte ; on parlera quand il sâagit de la cause illicite du « but du contrat » et dans le troisiĂšme cas on ne parlera plus de rien : si lâobjet nâa pas une contre-partie lâobligation est nulle.
LPJ â Concernant le droit de la responsabilitĂ© civile, que faut-il retenir de votre projet de rĂ©forme ?
F.T : LâidĂ©e de maintenir le fondement de lâexistence de la faute nâest pas contestable. Dans nos propositions, on souhaite abandonner la dĂ©marche initiale consistant Ă sâinterroger sur les Ă©lĂ©ments constitutifs du comportement dĂ©lictueux : choses, autrui... Il faut opĂ©rer une division plus claire entre le prĂ©ju-dice corporel avec les consĂ©quences pouvant ĂȘtre liĂ©s Ă celui-ci (prix de la douleur, perte dâune chanceâŠ) et le dommage matĂ©riel. Ce dernier appelle un amĂ©nagement gĂ©nĂ©ral et notamment avec lâarticle 1384 du Code civil : câest avec la vision dâun prĂ©judice matĂ©riel quâil faut repenser lâensemble car celui-ci doit ĂȘtre restreint. Il faut rĂ©flĂ©chir non plus Ă partir du fait gĂ©nĂ©rateur mais Ă partir du prĂ©judice puisquâil est nĂ©cessaire de rĂ©duire lâampleur de la rĂ©paration. Concernant le rĂ©gime des produits dĂ©fectueux, celui-ci restera tel quâil est actuellement.
Il convient aussi de noter quâune autre rĂ©forme est en cours de discussion au SĂ©nat : le 28 fĂ©vrier 2013, les sĂ©nateurs devraient aussi se pencher sur la proposition de loi Retailleau destinĂ©e Ă intĂ©grer le prĂ©judice Ă©cologique dans le Code civil. Affaire Ă suivre !
ACTUALITĂ SUR LES RĂFORMES DU DROIT DES OBLIGATIONS
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Malgré une forte hétérogénéité des dix Etats Membres en matiÚre de développement (taille de marché, PIB par habitant et dynamique de croissance) et cer-
taines critiques vis-Ă -vis de son mode de fonctionnement souple et inefficace, lâAssociation des Nations de lâAsie du Sud-Est (ASEAN) a nĂ©anmoins rĂ©ussi Ă attirer lâattention de la communautĂ© internationale grĂące Ă ses perspectives de crois-sance extrĂȘmement attrayantes (le PIB estimĂ© par le FMI Ă 1800 milliards USD en 2010 â soit 70% du PIB français et la croissance estimĂ©e en moyenne Ă 6 % pour les annĂ©es Ă venir).
A lâheure actuelle, LâASEAN est en train de nĂ©gocier le cadre du « partenariat Ă©conomique intĂ©gral rĂ©gional » (RCEP) qui est un projet de crĂ©ation de la plus importante zone de libre-Ă©change au monde. Il regroupe les dix Etats Membres de lâASEAN et leurs six partenaires commerciaux, Ă savoir la Chine, le Japon, la CorĂ©e du Sud, lâInde, lâAustralie et la Nouvelle-ZĂ©lande, formant ainsi un marchĂ© unique de plus de 3 milliards dâhabitants et de 19,780 milliards de dollars de PIB (environ 1/3 du PIB mondial). Ce projet couvre huit domaines de nĂ©gociation : commerce de marchandises, commerce de service, investissement, coo-pĂ©ration Ă©conomique et technique, droit de propriĂ©tĂ©, rĂšgle-ment des diffĂ©rends et autres questions. Câest un autre exemple concret dâALE qui confirme la tendance actuelle du phĂ©nomĂšne de rĂ©gionalisme en expansion. Juridiquement, lâexistence de RCEP doit satisfaire aux exi-gences de lâarticle XXIV du GATT en matiĂšre dâunions doua-niĂšres et de zones de libre-Ă©change. Quant au contenu, il serait prudent pour lâASEAN de nĂ©gocier le RCEP en restant proche du langage des Accords de lâOMC. Parfois, le renvoi pur et simple aux Accords de lâOMC permettrait dâĂ©viter toute difficultĂ© relative Ă lâapplication des dispositions ou Ă lâinterprĂ©tation des termes techniques utilisĂ©s. Au contraire, si lâASEAN, groupement de pays en dĂ©veloppement (PED), cherche Ă nĂ©gocier avec ses partenaires commerciaux au-delĂ des rĂšgles de lâOMC, il risquerait de ne pas pouvoir jouir
pleinement des avantages gĂ©nĂ©rĂ©s par le RCEP. La meilleure solution pour lâASEAN serait dâavoir un modĂšle unifiĂ© dâALE pouvant servir de base de nĂ©gociation pour cet ALE et pour les futurs ALEs. LâASEAN a un pari Ă gagner : rendre le RCEP attrayant pour les participants et pour les futurs partenaires commerciaux de lâextĂ©rieur. Ainsi, les parties concernĂ©es devront sâaccorder mutuellement sur des engagements de libĂ©ralisation plus poussĂ©s que ce qui existe dĂ©jĂ dans le cadre de diffĂ©rents ALEs pour pouvoir concurrencer avec lâAccord de Partenariat Trans-Pacifique et lâAccord de coopĂ©ration Ă©conomique tri-partie Chine-CorĂ©e du Sud-Japon qui sont Ă©galement en cours de nĂ©gociation. Concernant la facilitation des Ă©changes, par exemple, le seuil de rĂ©duction tarifaire des produits dans le cadre de RCEP devra sâeffectuer Ă au moins 95% aprĂšs la pĂ©riode de tran-sition prĂ©vue. Lâapproche de concession commune devra ĂȘtre favorisĂ©e pour rendre lâaccord clair et facile Ă comprendre aux utilisateurs, cela en excluant Ă©galement des listes de multiples concessions bilatĂ©rales entre Membres. Ce projet serait une opportunitĂ© pour lâASEAN dâaugmenter son pouvoir de nĂ©gociation afin dâatteindre des rĂ©sultats plus satisfaisants quâau niveau bilatĂ©ral (Ă travers les ALEs exis-tants). LâASEAN pourra en profiter pour affirmer son principe de « centralitĂ© » en exerçant une influence sur les politiques dâALE de ses partenaires commerciaux et se positionner en tant que « partie Ă©gale » des nĂ©gociations. Ainsi, une Ă©quipe de nĂ©gociateurs composĂ©e de juristes ayant une solide connaissance en droit de lâOMC est plus que nĂ©ces-saire, notamment pour sâassurer que le contenu du RCEP ne sâĂ©carte pas dĂ©raisonnablement des Accords de lâOMC et que les obligations trop lourdes soient imposĂ©es aux PED. EspĂ©rons que lâentrĂ©e en vigueur du RCEP entraĂźnera une harmonisa-tion â ou du moins une convergence â de rĂšgles commerciales qui contribuerait Ă promouvoir un systĂšme commercial juste et Ă©quitable et Ă remĂ©dier efficacement Ă la situation dâenchevĂȘ-trement des rĂ©gimes juridiques â le « bol de spaghetti » â dans les diffĂ©rents ALEs existants dans la rĂ©gion.
Thitirat WONGKAEW
ASEAN ET RCEP UN AUTRE ACCORD DE LIBRE ĂCHANGE TROP AMBITIEUX ?
Les membres de l'ASEAN
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POUR EN SAVOIR PLUS
âą LâAssociation des Nations de lâAsie du Sud-Est (ASEAN) a Ă©tĂ© fondĂ©e en 1967 par la DĂ©claration de Bangkok. Il sâagit dâune organisation rĂ©gionale regroupant actuellement dix pays de la rĂ©gion, Ă savoir la ThaĂŻlande, lâIndonĂ©sie, la Malaisie, les Philippines, le Singapour, le Brunei, le Vietnam, le Laos, le Myanmar et le Cambodge.
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Le Dossier du Moisen partenariat avec
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AprĂšs 110 heures de discussion Ă lâAssemblĂ©e nationale, le texte sur « le mariage pour tous » devient lâun des plus dĂ©battus de la Ve RĂ©publique. Le projet, portĂ© par la Garde de Sceaux Christiane Taubira, a Ă©tĂ© largement soutenu par le gouvernement et la majoritĂ© des dĂ©putĂ©s : il consiste Ă permettre aux couples de mĂȘme sexe de se marier et de recourir Ă lâadoption. Le mariage pour tous modifie donc deux rĂ©gimes piliers du droit de la famille, Ă savoir le mariage et la filiation.
Le mariage est Ă©tendu aux couples de mĂȘme sexe, le PACS ne rĂ©pondant plus, selon les rĂ©dacteurs du projet, Ă lâĂ©vo-lution de notre sociĂ©tĂ©. Dans un souci dâĂ©galitĂ©, lâaccĂšs
au mariage et aux consĂ©quences juridiques qui en dĂ©coulent est alors ouvert Ă tous.JusquâĂ aujourdâhui, il Ă©tait impossible, dâĂ©tablir un lien de filiation entre un enfant et le partenaire de son parent, celui-ci nâayant alors aucun droit relatif Ă lâenfant.. Par ailleurs, de nombreuses difficultĂ©s sont engendrĂ©es par des situations crĂ©Ă©es Ă lâĂ©tranger. Des couples ne pouvant avoir dâenfants, quelle que soit leur orientation sexuelle, ayant recours Ă la PMA ou Ă lâadoption dans un autre pays, sont confrontĂ©s lors de leur retour en France Ă lâimpossibilitĂ© de faire reconnaĂźtre leur lien de parentĂ©. Ainsi, afin de pallier ces difficultĂ©s juridiques, il convient de prĂ©senter les apports de cette rĂ©forme dans les relations entre les Ă©poux, dans leur lien avec leurs enfants et enfin dans leurs rapports envers les tiers.
Les rapports entre les Ă©poux
En lâĂ©tat actuel du projet, lâadoption de la loi « ouvrant le mariage aux couples de personnes de mĂȘme sexe » pourrait se rĂ©sumer, pour ses consĂ©quences dans les rapports entre les Ă©poux, Ă ce que prĂ©voit lâarticle 1er du projet1 : un nouvel article sera insĂ©rĂ© et il ouvrira le mariage Ă tous les couples : « le mariage est contractĂ© par deux personnes de sexe diffĂ©-rent ou de mĂȘme sexe »., le projet de loi ne modifie donc pas
le rĂ©gime juridique actuel du mariage2. ainsi que lâĂ©tude dâim-pact lâexpose clairement. Le rĂ©el changement se situe dans les consĂ©quences juridiques induites par cette modification.Lâextension de lâinstitution du mariage Ă une nouvelle situation â celle oĂč le couple est formĂ© de personnes du mĂȘme sexe â permet de donner Ă ces couples lâaccĂšs au mĂȘme rĂ©gime juri-dique quâĂ ceux de sexes diffĂ©rents.
Dans le cadre du PACS, pour tous les couples les choix dâorga-nisation des rapports Ă©conomiques au sein du couple Ă©taient limitĂ©s, puisque les partenaires ne disposaient que de la sĂ©pa-ration de biens (art. 515-5 du C. civ., rĂ©gime de principe) ou de lâindivision (art. 515-5-1, rĂ©gime subsidiaire au fonction-nement complexe). Les couples homosexuels auront dĂ©sor-
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OIS mais un choix bien plus large : en particulier, le régime de la
communautĂ© lĂ©gale (art. 1400 et suivants). Ce rĂ©gime associe alors chaque Ă©poux Ă lâenrichissement de lâautre, mais les dettes de lâun devront aussi ĂȘtre supportĂ©es par lâautre Ă©poux. Il faut cependant nuancer les effets de cette extension, car lâĂ©volution du PACS a dĂ©jĂ partiellement rendu applicables certains mĂ©canismes de la communautĂ©, comme celui des rĂ©compenses pour le calcul des crĂ©ances entre partenaires lors de la liquidation du pacte (art. 515-17 in fine) ou celui du maintien du conjoint survivant dans le logement pendant une annĂ©e aprĂšs le dĂ©cĂšs (art. 515-6, al. 3).
En revanche, lâapplication du rĂ©gime primaire impĂ©ratif amĂ©-liore sensiblement la protection des Ă©poux : le logement de famille, ne peut plus ĂȘtre cĂ©dĂ© par son seul propriĂ©taire (art. 215), la co-titularitĂ© du bail dâhabitation est applicable (art. 1751) et les rĂ©gimes de sauvegarde judiciaires (art. 217 et 220-1) offrent des moyens aisĂ©s pour protĂ©ger le mĂ©nage, lorsque lâun des conjoints le met en danger.Les couples de personnes du mĂȘme sexe bĂ©nĂ©ficieront Ă©ga-lement de lâĂ©volution rĂ©cente du statut du conjoint survivant dans la succession du prĂ©dĂ©cĂ©dĂ©. LĂ oĂč le PACS ne prĂ©voyait aucune disposition dâordre successoral, ce qui signifiait que les partenaires pouvaient seulement se dĂ©signer mutuellement comme lĂ©gataires, universels ou Ă titre universels â avec toutes les insuffisances de ce statut, notamment en prĂ©sence dâhĂ©ritiers rĂ©servataires, le mariage donne au contraire, impĂ©-rativement, une vocation successorale au conjoint survivant, dont le contenu varie en fonction des situations (notamment la prĂ©sence dâautres hĂ©ritiers, comme des descendants ou des ascendants). Ainsi, dans les couples homosexuels mariĂ©s, le
conjoint survivant est assurĂ© de recueillir une part, en usu-fruit ou en propriĂ©tĂ©, de la succession du dĂ©funt (art. 756 et suivants). Il convient en revanche de noter que, depuis 2007, lâĂ©poux, comme le partenaire pacsĂ©, Ă©tait exonĂ©rĂ© des droits de mutation lors de la succession du conjoint prĂ©dĂ©cĂ©dĂ© (art. 796-0 bis du CGI), donc sur le plan uniquement fiscal, lâou-verture du mariage aux couples homosexuels nâa aucune incidence.
En matiÚre de droits extrapatrimoniaux, là encore la loi ne bouleverse pas le régime du mariage, mais renforce sensible-ment les droits et devoirs pour chaque membre du couple. Le devoir de fidélité, notamment, absent du PACS, sera pleine-ment applicable (art. 212 C. civ.). Les obligations familiales de
lâarticle 213, concernant la « direction morale et matĂ©rielle de la famille et « lâĂ©ducation des enfants », absentes du rĂ©gime du PACS, concerneront Ă lâavenir les couples de personnes du mĂȘme sexe. En revanche, le devoir de vie commune, qui est lâun des fondementaux du mariage, existait dĂ©jĂ dans le PACS (art. 515-4 C. civ.), tout comme un devoir dâaide matĂ©rielle, semblable Ă la contribution aux charges du mariage, et une « assistance » surtout morale.Si lâenjeu majeur de la rĂ©forme se situe dans les rapports entre les Ă©poux eux-mĂȘmes, les relations entre les Ă©poux et leurs enfants sont lâobjet de modifications consĂ©quentes.3
Rapport entre Ă©poux et enfants4
Le rĂ©gime actuel, qui gouverne les relations entre les Ă©poux et leurs enfants est conservĂ© mais il sera adaptĂ© aux nouvelles situations : lâexpression « pĂšre et mĂšre », prĂ©sente actuellement dans plus de cinquante articles du Code civil, sera remplacĂ©e par le mot « parents ». Par ailleurs, la nĂ©cessitĂ© dâun nouveau modĂšle de livret de famille adaptĂ© aux couples mariĂ©s de mĂȘme sexe est affirmĂ©e par lâĂ©tude dâimpact du projet de loi. Sâil a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ© que la rĂ©forme « nâapporte aucune modi-fication aux dispositions relatives Ă la filiation5 Ă©tablie par lâeffet de la loi » son effet principal, en matiĂšre dâadoption, est dâouvrir les dispositions de droit commun aux couples mariĂ©s de mĂȘme sexe. Il en rĂ©sulte que tous les couples jouissent des mĂȘmes droits, tant en matiĂšre dâadoption conjointe que dâadoption de lâenfant dâun des conjoints. Aussi, le Conseil
supĂ©rieur de lâadoption a Ă©tĂ© saisi, en vertu de lâarticle L. 148-1 du Code de lâaction sociale et des familles, afin de donner son avis sur les modifications entreprises par le projet de loi. Lâorgane nâa pas manquĂ© de rappeler la « nĂ©cessitĂ© de transparence et de vĂ©ritĂ© envers lâenfant » adoptĂ©.
Il convient de distinguer adoption simple et adoption plĂ©niĂšre. Alors que lâadoption simple dâun enfant du conjoint nâa pas pour effet dâattribuer lâautoritĂ© parentale Ă lâadoptant, lâadop-tion plĂ©niĂšre confĂšre lâautoritĂ© parentale exclusivement et intĂ©-gralement aux parents adoptifs. Avant la rĂ©forme, alors quâun des conjoints du couple homosexuel avait pu donner naissance Ă un enfant, cet enfant nâĂ©tait rattachĂ© juridiquement quâĂ la femme ayant accouchĂ©, cette derniĂšre Ă©tant seule considĂ©rĂ©e comme sa mĂšre. DĂ©sormais, le conjoint de mĂȘme sexe pourra
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Le Dossier du Moisen partenariat avec
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pas son procrĂ©ateur initial. Les rĂšgles de dĂ©volution du nom de famille sont quant Ă elles modifiĂ©espour tous les couples mariĂ©s, hĂ©tĂ©rosexuels ou homo-sexuels. Le chapitre II du projet de loi constituĂ© des dispositions relatives Ă lâadoption et au nom de famille, modifie lâarticle 357 du code civil qui dispose dĂ©sormais quâen cas dâadop-tion de lâenfant dâun conjoint ou dâune adoption par les deux Ă©poux, câest via une dĂ©claration conjointe que les adoptants choisiront le nom de lâenfant. En cas dâadoption simple, lâar-ticle 363 dispose quâen cas dâadoption par deux Ă©poux, « le nom ajoutĂ© Ă celui de l'adoptĂ© est, Ă la demande des adop-tants, celui de l'un d'eux ». En cas de dĂ©saccord ou dâabsence de choix des parents, les noms de chacun dâeux, accolĂ©s dans lâordre alphabĂ©tique sont retenus.
La question de la procrĂ©ation, si elle semble sensible nâa pas Ă©tĂ© prĂ©cisĂ©ment Ă©tudiĂ©e par cette loi. Ainsi, si la procrĂ©ation
médicalement assistée (PMA) concernant les femmes mariées homosexuelles a été proposée par les amendements des députés écologistes et communistes, elle a été rejetée, mais le débat est toujours ouvert.
Quant aux conventions de mĂšre porteuse, elles sont interdites en droit français, en vertu du principe dâindisponibilitĂ© du corps humain et de lâĂ©tat des personnes (article 16-1 alinĂ©a 3 C.civ). Câest par un arrĂȘt du 31 mai 1991 que lâAssemblĂ©e plĂ©niĂšre de la Cour de cassation a entĂ©rinĂ© la prohibition de la gestation pour autrui (GPA), suivie par le lĂ©gislateur en 1994 avec lâadoption de lâarticle 16-7 du Code civil, qui dispose que « toute convention portant sur la procrĂ©ation ou la ges-tation pour le compte dâautrui est nulle». Toutefois, la rĂ©cente publication de la circulaire dite « Taubira » visant Ă faciliter lâacquisition de la nationalitĂ© française pour les enfants nĂ©s Ă lâĂ©tranger par GPA indique une possible modification lĂ©gisla-tive dans ce domaine.
Ainsi, si la réforme va venir modifier en profondeur les rela-tions entre les époux, leurs relations avec leurs enfants ; à moindre mesure, les relations entre les tiers et les époux seront également touchées par la réforme.
Les rapports entre les Ă©poux et les tiers
Le projet de loi adopté le 12 février dernier entraine des modi-fications dans les relations entre couples homosexuels mariés et tiers, en ce qui concerne les obligations, mais essentielle-ment au regard des droits. Quant aux obligations, peu de changements sont à relever. En effet, les réformes du PACS avaient conduit, en amont, à harmoniser le régime fiscal des partenaires pacsés sur celui des époux : la loi « TEPA »6 permet aux pacsés, comme aux époux, de remplir une décla-
ration commune dâimpĂŽt sur le revenu; la loi de finance du 29 dĂ©cembre 2010 a confirmĂ© cette Ă©volution Ă©tablissant une stricte concordance entre Ă©poux et partenaires pacsĂ©s pour toutes les rĂšgles relatives Ă lâimpĂŽt sur le revenu7. Aussi, par-tenaires pacsĂ©s et Ă©poux bĂ©nĂ©ficient dâune exonĂ©ration des successions entre eux et dâun abattement en cas de donation8. Au-delĂ du rĂ©gime fiscal, le Code civil prĂ©voit pour les Ă©poux et les partenaires pacsĂ©s, une obligation solidaire pour les dettes mĂ©nagĂšres9 ; des exceptions identiques Ă cette obliga-tion, en cas de dĂ©penses manifestement excessives et pour les achats Ă tempĂ©rament et emprunts, sauf si ces derniers portent sur des sommes nĂ©cessaires aux besoins de la vie courante (ces exceptions ne sont admises, pour le PACS, que depuis la loi du 1er juillet 2010).
Ce nâest finalement que sur lâobligation alimentaire envers les beaux-parents que lâouverture du mariage aux couples homosexuels aura un impact en matiĂšre dâobligations vis-Ă -
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OIS vis des tiers. Alors que les couples homosexuels unis par un
PACS nâont pas dâobligation alimentaire envers les parents de leur compagne ou compagnon, lâarticle 206 du Code civil impose aux Ă©poux une obligation alimentaire envers leurs beaux-parents, tant que « lâĂ©poux qui produisait lâaffinitĂ© et les enfants issus de lâunion avec lâautre Ă©poux » ne sont pas dĂ©cĂ©dĂ©s.
Du point de vue des droits Ă lâĂ©gard des tiers, en revanche, lâouverture du mariage aux homosexuels peut modifier plus significativement leur situation. Sans modifier le rĂ©gime actuel, le fait dâautoriser les couples de mĂȘme sexe Ă se marier leur permettra de bĂ©nĂ©ficier de lâarticle 1751 du Code civil, qui
instaure une co-titularitĂ© du bail dâhabitation entre les Ă©poux. Aussi, au dĂ©cĂšs de lâun des conjoints, lâautre pourra bĂ©nĂ©ficier dâune pension de rĂ©version10, ou dâune allocation veuvage, ce qui est aujourdâhui refusĂ© aux partenaires pacsĂ©s.
A la reconnaissance de ces droits substantiels, viennent sâajouter des moyens dâassurer la conclusion et la recon-naissance des mariages homosexuels. Alors que lâopposition demandait lâinsertion, dans le projet de loi, dâune « clause de conscience » permettant aux maires de refuser de conclure ces mariages, lâarticle 1 bis A du projet propose de rajouter un article 34-1 dans le Code civil, pour rappeler que les offi-ciers dâĂ©tat civil doivent exercer leurs fonctions sous le contrĂŽle du Procureur de la RĂ©publique : tout refus dâappliquer les lois de la RĂ©publique est rĂ©primĂ© par des sanctions pĂ©nales et administratives, car les agents collaborant Ă un service public sont soumis Ă un devoir de stricte neutralitĂ©11. Par ail-leurs, la reconnaissance du mariage homosexuel nâaura pas de consĂ©quences sur les termes des actes dâĂ©tat civil, et des livrets de famille pour les couples hĂ©tĂ©rosexuels ; ils devraient en revanche ĂȘtre adaptĂ©s pour les couples de mĂȘme sexe12, pour supprimer les distinctions de sexe.
Enfin, des dispositions de droit international privĂ© ont aussi Ă©tĂ© insĂ©rĂ©es13 pour prĂ©voir une dĂ©rogation au principe actuel des rĂšgles de conflit, afin de permettre Ă deux personnes de mĂȘme sexe de se marier en France, si lâune est française ou rĂ©side en France, alors que la loi nationale de lâautre prohibe le mariage homosexuel. Actuellement, la France nâest pas seule Ă opĂ©rer une transfor-mation du mariage. Le 5 fĂ©vrier dernier, les dĂ©putĂ©s britan-niques ont, Ă une trĂšs large majoritĂ©, adoptĂ© une loi donnant accĂšs aux couples de mĂȘme sexe au mariage.
En la matiĂšre, lâharmonisation europĂ©enne semble donc plus que jamais en marche puisque la Grande-Bretagne vient rejoindre les pays autorisant ce type dâunion tels que la Belgique, les Pays-Bas, lâEspagne ou encore le Portugal. Si
lâexamen prochain du projet de loi par le SĂ©nat, dont la date a Ă©tĂ© fixĂ©e au 4 avril 2013, rapproche inĂ©vitablement la France de ses voisins, le dĂ©bat est toujours vif.
Des discussions houleuses ont montrĂ© Ă quel point la question divise. Lâopposition ne fera sans doute pas lâĂ©conomie dâun examen de constitutionnalitĂ© de la loi Sâil a pu sembler que le Conseil Constitutionnel a avalisĂ© la suppression de la condi-tion dâaltĂ©ritĂ© des sexes14, selon certains auteurs, il ne sâagis-sait nullement dâun blanc-seing assurant aux reprĂ©sentants du peuple, une conformitĂ© dâoffice Ă la constitution, mais simple-ment une sorte de rappel du domaine de la loi15.
Ces mĂȘmes auteurs affirment que la condition dâaltĂ©ritĂ© sexuelle des Ă©poux et le caractĂšre hĂ©tĂ©rosexuĂ© de la filiation figurent parmi les principes fondamentaux reconnus par les lois de la RĂ©publique (PFRLR)16. DĂšs les annĂ©es 1980, l'Ă©minent Doyen Carbonnier, nâexcluait pas que certaines dispositions du code civil puisse acquĂ©rir une telle valeur constitution-nelle17. Les PFRLR Ă©voquĂ©s par le prĂ©ambule de la Constitution de 194618 doivent rĂ©pondre Ă trois conditions cumulatives : Ă©noncer une rĂšgle suffisamment importante et gĂ©nĂ©rale ; se trouver dans une base textuelle Ă©manant dâun rĂ©gime rĂ©publi-cain antĂ©rieur Ă 1946 ; faire lâobjet dâune application continue et sans dĂ©rogation jusquâĂ cette date. Quâen penseront les Sages de la rue de Montpensier ?
AnaĂŻs CHARRETEUR, Manel CHIBANE, Anis FAYED, Nathalie JARRY, SĂ©bastien JARRY,
Guillaume MARTIN, Audrey MOST
1 http://www.lemonde.fr/mariage-pour-tous/ : actualité sur la réforme
2 http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPreparation.do;jsessionid=25F572494042337E2AEB44FC1781C9FC.tpdjo17v_3?idDocument=JORFDOLE000026587592&type=contenu&id=2 : projet de loi
3 http://www.assemblee-nationale.fr/14/projets/pl0344-ei.asp : Ă©tude dâimpact
4 http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPreparation.do;jsessionid=25F572494042337E2AEB44FC1781C9FC.tpdjo17v_3?idDocument=JORFDOLE000026587592&type=expose : Exposé des motifs
5 http://www.asmp.fr/travaux/avis/2013_mariage_de_meme_sexe.htm : pour aller plus loin, avis des acadĂ©miciens â Remarque 4
6 prĂ©cĂ©dente â Remarque 3
7 Loi n° 2007-1223 du 21 aout 2007 en faveur du travail, de lâemploi et du pouvoir dâachat
8 Art 7 du Code général des impÎts
9 Art 790 F du Code général des impÎts
10 Art. 220 et 515-4 du Code civil
11 Le refus du bĂ©nĂ©fice dâune pension de rĂ©version au partenaire pacsĂ© survivant a, par ailleurs, Ă©tĂ© jugĂ© non contraire au principe constitutionnel dâĂ©galitĂ© de tous devant la loi (C. constit. N° 2011-155 QPC du 29 juillet 2011)
12 CE, 3 mai 1950, Jamet
13 Avis de Mme Marie-Françoise Clergeau au nom de la commission des Affaires sociales, n° 581
14 Article 1er du projet de loi
15 Cons. Const. décision du 28 janvier 2011 n°2010-92 QPC.
16 En ce sens, François-Xavier Bréchot, La constitutionnalité du mariage pour tous en question, in JCP 2012, doctr. 1388.
17 En ce sens, P. Delvolvé, Mariage : un homme, une femme : Le Figaro, 8 novembre 2012 p.17.
18 J. Carbonnier, « Le Code civil », in Les Lieux de mémoire, t. II : « La Nation », P. Nora dir., Gallimard, 1986
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Le 11 janvier 2013, a Ă©tĂ© signĂ© « lâaccord national interprofessionnel pour un nouveau modĂšle Ă©conomique et social au service de la compĂ©titivitĂ© des entreprises et de la sĂ©curisation de lâemploi et des parcours professionnels des salariĂ©s ». Cet accord propose une sĂ©rie de mesures visant Ă amĂ©liorer la sĂ©curitĂ© et la flexibilitĂ© de lâemploi.
Cet accord est le fruit des négociations ayant réuni orga-nisations syndicales et patronales au niveau interpro-fessionnel durant trois mois. Il se subdivise en 5 titres.
Cet article a pour but de prĂ©senter les mesures essentielles proposĂ©es par lâaccord, et non pas dâen dresser une liste exhaustive.Il faut souligner cependant que les propositions contenues dans lâaccord ne sont pas applicables tant quâelles nâont pas Ă©tĂ© transposĂ©es dans une loi. Un avant-projet de loi reprenant un certain nombre de mesures Ă©noncĂ©es par lâaccord a dâores et dĂ©jĂ Ă©tĂ© proposĂ© par le gouvernement le 11 fĂ©vrier 2013, et sera prochainement soumis au Conseil des ministres. Les dĂ©bats parlementaires amĂšneront sans doute Ă©galement Ă des modifications ou adaptations des mesures proposĂ©es.
LA SĂCURISATION DE LâEMPLOIGĂ©nĂ©ralisation de la couverture
complémentaire des frais de santé
Lâaccord a pour objectif de permettre Ă tous les salariĂ©s dâac-cĂ©der Ă une complĂ©mentaire santĂ©. A cette fin, les branches professionnelles devront ouvrir les nĂ©gociations avant le 1er avril 2013. A dĂ©faut dâaccord de branche signĂ© avant le 1er juillet, les entreprises non couvertes devront Ă leur tour ouvrir des nĂ©gociations. Si elles nâaboutissent pas Ă un accord dâen-treprise, les entreprises concernĂ©es devront faire bĂ©nĂ©ficier leurs salariĂ©s, avant le 1er janvier 2016 au plus tard, dâune couverture collective de frais de santĂ©, qui devra couvrir au minimum un « panier de soins » dĂ©fini par lâaccord.
Modification du rĂ©gime dâassurance chĂŽmage
Par un systĂšme de droits rechargeables Ă lâassurance-chĂŽ-mage, les salariĂ©s qui reprendraient un emploi consĂ©cutive-ment Ă une pĂ©riode de chĂŽmage conserveraient leurs droits aux allocations chĂŽmage non utilisĂ©s. Lâaccord instaure Ă©galement une majoration de la cotisation dâassurance chĂŽmage pour les CDD, de 7% Ă 4,5% selon la durĂ©e du contrat. Ces taux ne seront cependant pas appli-cables si le CDD aboutit Ă lâembauche du salariĂ© par un CDI.
Par ailleurs, serait exonĂ©rĂ© de cotisations patronales dâassu-rance chĂŽmage pendant 3 mois (4 mois pour les entreprises de moins de 50 salariĂ©s) le CDI conclu pour lâembauche dâun jeune de moins de 26 ans.
CrĂ©ation dâun compte personnel de formation
Le salariĂ© se verrait dotĂ© dâun quota dâheures de formation, qui lui serait rattachĂ© tout au long de sa vie professionnelle. Ce compte personnel de formation serait intĂ©gralement trans-fĂ©rable dâune entreprise Ă une autre. Les droits des salariĂ©s Ă temps plein seraient de 20 heures par an, plafonnĂ©es Ă 120 heures de formation. Des proratas seraient effectuĂ©s pour les salariĂ©s Ă temps partiel ou employĂ©s en CDD.
CrĂ©ation dâun droit Ă une pĂ©riode de mobilitĂ© volontaire sĂ©curisĂ©e
Durant une pĂ©riode dite de mobilitĂ©, le salariĂ© justifiant dâune expĂ©rience dâau moins 2 ans dans une entreprise de 300 sala-riĂ©s et plus peut, avec lâaccord de son employeur, dĂ©couvrir un emploi dans une autre entreprise, sans pour autant perdre son emploi dâorigine. Est alors signĂ© un avenant au contrat de travail.A lâissue de la pĂ©riode de mobilitĂ©, le salariĂ© fait connaĂźtre Ă son employeur sa volontĂ© de revenir ou non dans lâentreprise dâorigine. A dĂ©faut dâinformation de lâemployeur, le salariĂ© est prĂ©sumĂ© avoir choisi de revenir dans lâentreprise dâorigine.Sâil choisit de revenir dans celle-ci, il retrouve son emploi ou un emploi similaire, sans avoir Ă subir de modification dĂ©savan-tageuse de sa rĂ©munĂ©ration, qualification ou classification. Sâil ne souhaite pas revenir dans lâentreprise, le contrat de travail est rompu dĂšs que la pĂ©riode de mobilitĂ© prend fin.
Encadrement du travail Ă temps partiel
Lâaccord propose lâobligation pour les entreprises dâemployer le salariĂ© Ă temps partiel au minimum 24 heures par semaine. Ne seraient cependant pas concernĂ©s par cette mesure les salariĂ©s des employeurs particuliers, les salariĂ©s ĂągĂ©s de moins de 26 ans et poursuivant leurs Ă©tudes, ou encore les employĂ©s qui en feraient la demande Ă©crite et motivĂ©e.Les salariĂ©s employĂ©s Ă temps partiel bĂ©nĂ©ficieraient Ă©gale-ment dâune majoration de salaire en cas de dĂ©passement de la durĂ©e de travail prĂ©vue par leur contrat de travail, Ă©gale Ă 10%, si le dĂ©passement est infĂ©rieur au 1/10Ăšme de la durĂ©e de travail prĂ©vue par le contrat, et de 25% au delĂ .
LâACCORD NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU
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PLUS DE FLEXIBILITĂAccords de maintien dans lâemploi
Ils ne peuvent ĂȘtre conclus que dans les entreprises confrontĂ©es Ă des difficultĂ©s Ă©conomiques Ils visent Ă maintenir lâemploi en autorisant temporairement la sociĂ©tĂ© Ă moduler les salaires ou la durĂ©e de travail. LâANI insiste sur le principe de symĂ©trie qui guide ces accords : ainsi, les efforts consentis par les salariĂ©s doivent ĂȘtre proportionnĂ©s aux rĂ©munĂ©ration des dirigeants. Si ces accords de maintien dans lâemploi Ă©corchent la sĂ©cu-ritĂ© juridique des salariĂ©s, il sâagit ici de prĂ©venir et dâĂ©viter les Plans de Sauvegarde de LâEmploi (PSE). Ces dispositions ne contreviennent pas aux rĂšgles relatives Ă la modification du contrat de travail puisque le consentement des salariĂ©s demeure indispensable pour appliquer un tel accord.
Recours Ă lâactivitĂ© partielle
LâANI prĂ©voit la conclusion dâun accord entre ses signataires et lâĂtat afin de nĂ©gocier un nouveau dispositif de temps partiel. Cet accord aura notamment pour but dâunifier et de simplifier le systĂšme actuel. La formation du public concernĂ© par le temps partiel y tient une part plus substantielle. RĂšgles relatives au licenciement de 10 salariĂ©s et plus sur une mĂȘme pĂ©riode de 30 jours dans les entreprises dâau moins 50 salariĂ©s. DĂ©sormais cette procĂ©dure de licenciement ainsi que le contenu du PSE seront dĂ©terminĂ©s soit par accord collectif majoritaire, soit par un document fourni par lâemployeur et homologuĂ© par la DIRECCTE. Cette disposition rĂ©sulte de la volontĂ© exprimĂ©e par les employeurs dâassouplir la procĂ©dure de licenciement Ă©conomique notamment en en rĂ©duisant sa durĂ©e et donc son coĂ»t.
Expérimenter le contrat de travail intermittent
LâANI prĂ©voit lâexpĂ©rimentation du contrat de travail intermit-tent au sein dâentreprises de moins de 50 salariĂ©s dans trois secteurs dâactivitĂ© (cf annexe de lâaccord). Le recours Ă un tel contrat vise Ă pourvoir de maniĂšre permanente des emplois connaissant une alternance de pĂ©riodes travaillĂ©es et non tra-vaillĂ©es. Aucune autre prĂ©cision nâest apportĂ©e par lâaccord, quid de la durĂ©e de travail minimum ? Existera-t-il un systĂšme dâheures supplĂ©mentaires ou complĂ©mentaires ? Quelles com-pensations ? Plus que de la flexibilitĂ©, ne serait-ce pas ici une forme de contractualisation de la prĂ©caritĂ© ?
Faciliter la conciliation prudâhomale
Les parties dâun contentieux portant sur le licenciement pour-ront mettre un terme dĂ©finitif au conflit par le versement de dommages et intĂ©rĂȘts forfaitairement calculĂ©s en fonction de lâanciennetĂ© du salariĂ©. Le but Ă©tant ici dâorganiser une dĂ©ju-diciarisation des rapports de travail afin dâapaiser les relations employeurs-salariĂ©s et de faire diminuer les coĂ»ts liĂ©s Ă une Ă©ventuelle condamnation.
DĂ©lais de prescription
Concernant lâexĂ©cution et la rupture de la relation de travail, le dĂ©lai de prescription est fixĂ© Ă 2 ans et Ă 3 ans pour les demandes portant sur les salaires. Par cette disposition, lâANI tend Ă baisser le risque contentieux qui pĂšse sur lâentreprise en matiĂšre sociale et participe donc dâune meilleure sĂ©curitĂ© juridique pour les employeurs.
Avec lâANI du 11 janvier 2013, les partenaires sociaux affichent la volontĂ© dâinstaurer un vĂ©ritable Ă©quilibre entre sĂ©curitĂ© dans lâemploi et flexibilitĂ© des emplois et tente dây associer les reprĂ©sentants du personnel afin de faire des sala-riĂ©s des citoyens comme les autres Ă lâintĂ©rieur de leur entre-prise. Au delĂ de ces nobles prĂ©ceptes, ce texte, issu dâun com-promis, demeure encore flou ; en attendant la transposition...
Béatrice DANIEL, Clémence ZUNINO
POUR EN SAVOIR PLUS
âą Le texte de lâaccord : http://direccte.gouv.fr/IMG/pdf/ANI_securisation_de_l_emploi.pdf
⹠Présentation de l'avant-projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi : La Semaine Juridique Social n° 8, 19 Février 2013, act. 87
⹠Vers un nouveau modÚle de droit du travail ? Frédéric Géa, Semaine Sociale Lamy - 20131569
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Le perchlorĂ©thylĂšne, ou tĂ©trachloroĂ©thylĂšne est un composĂ© organique volatil (COV) surtout utilisĂ© dans les pressings, pour le nettoyage Ă sec de tissus. Son odeur Ăącre est facilement perceptible. Il pollue durablement lâeau et lâair. Figurant sur la liste des cancĂ©rogĂšnes du groupe 2A du CIRC (cancĂ©rigĂšne probable), il peut causer des troubles neurologiques, rĂ©naux et hĂ©patiques. Il est suspectĂ© dâavoir causĂ© le dĂ©cĂšs de plusieurs personnes.
Assez tÎt, les autorités européennes ont pris conscience de la dangerosité des COV et ont entendu réduire leurs émissions en adoptant la directive européenne
1999/13/CE1. Cette directive reste néanmoins insuffisante au regard du réel danger que représente le tétrachloréthylÚne.
En France, le dĂ©bat pour lâinterdiction du perchlo sâest ouvert suite Ă lâappel lancĂ© par les Associations RĂ©seaux Environnement SantĂ© et GĂ©nĂ©rations Futures. Câest le dĂ©but dâune crise sanitaire ponctuĂ©e par de nombreux dĂ©cĂšs : 1994, un enfant rĂ©sidant au-dessus dâun pressing ainsi quâune femme en 2009. Le responsable est connu : le perchlorĂ©htylĂšne. MalgrĂ© lâurgence de la situation, le gouvernement, soumis aux pressions du lobbying de la blanchisserie, rĂ©agit faiblement.
Les arguments des industriels sont lĂ©gions. En effet, le perchlo-rĂ©thylĂšne (8 200 tonnes utilisĂ©es chaque annĂ©e en France2) apparait comme la substance la plus efficace et la moins cou-teuse dâutilisation. Les blanchisseries, souvent artisanales, ont peu de moyens pour se reconvertir. De plus, les alternatives Ă cette substance ne sont pas toutes sans risques et ceux-ci ne sont ni connus, ni maitrisĂ©s.
Les mesures adoptĂ©es sont en consĂ©quence faibles : rĂ©duction de lâusage du solvant de 30%, puis le 20 avril 2012, le minis-tĂšre de lâĂ©cologie annonce lâinterdiction progressive de la substance. Le dĂ©cret du 9 mai 2012 (n°2012-746) prĂ©voyant lâinterdiction du perchlorĂ©thylĂšne dâici 2022 ne vise que les installations contigĂŒes Ă des locaux occupĂ©s par des tiers. Câest donc 7% des 5 200 machines existantes qui ne sont pas concernĂ©es par ce dĂ©cret. Pourtant, dĂšs 1990, un arrĂȘt du 7 mars3 reconnaissait lâexposition au perchlorĂ©thylĂšne comme pouvant causer un trouble.
Delphine BATHO, ministre de lâenvironnement, fait d'ailleurs une suggestion Ă la profession : s'organiser "pour remplacer les magasins de nettoyage par des points de dĂ©pĂŽt du linge et que le traitement (âŠ) s'effectue (âŠ) en dehors des centres urbains"4. Pourtant, ce sont les salariĂ©s les plus exposĂ©s. Lors de lâouverture du hublot de la machine, ils peuvent inhaler jusquâĂ 1000 ppm entrainant « une action narcotique, avec Ă©briĂ©tĂ© et somnolence » prĂ©cise lâINRS5. La prĂ©vention reste limitĂ©e dans ce milieu puisque en 2008, 70% des pressings nâĂ©taient pas aux normes6. Les maladies dĂ©clenchĂ©es par ces salariĂ©s sont reconnues comme maladies professionnelles depuis lâarrĂȘt de la Cour de Cassation du 16 dĂ©cembre 20117.
Il faudra donc attendre 2022 pour lâabandon total de cette substance dans les locaux contigus aux habitations. Si cette action dĂ©cline lâengagement 138A du Grenelle, « nous ne pouvons pas encore attendre 10 ans avant dâinterdire dĂ©fi-nitivement le perchloroĂ©thylĂšne, câest beaucoup trop long »,
dĂ©plore Pascal DENOT, vice-prĂ©sident de lâADVEPP. Preuve Ă lâappui, une Ă©tude menĂ©e par le Laboratoire Central de la PrĂ©fecture de Police en 2012 rĂ©vĂšle que 81% des logements analysĂ©s prĂ©sentent des taux 500 fois supĂ©rieurs Ă la valeur guide de lâair intĂ©rieur de lâOMS.
NĂ©anmoins, la France fait figure de pionniĂšre en matiĂšre dâinterdiction du perchlorĂ©thylĂšne avec les Etats-Unis et le Danemark, puisque peu de rĂ©glementations Ă©trangĂšres inter-disent lâutilisation du tĂ©trachlorĂ©thylĂšne dans les installations de nettoyage Ă sec situĂ©es en bas dâimmeuble.
Alexandra DAVASE
LE PERCHLORĂTHYLĂNE FAIT TĂCHE : LE CAS DES PRESSINGS
1 http://www.ineris.fr/
2 http://mili-terre.com/article/
3 Cass Civ. 2e N° de pourvoi : 88-9858.
4 http://www.actu-environnement.com/
5 http://www.sante-et-travail.fr
6 Etude menĂ©e par le ministĂšre de lâenvironnement.
7 Cass. Civ 2e N° de pourvoi : 10-26075.
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Le 15 janvier dernier1, la Cour de Cassation (la Cour) a repris la solution de la Cour de Justice de lâUnion EuropĂ©enne (CJUE)2 clarifiant les critĂšres de sĂ©lection dâun systĂšme de distribution sĂ©lective quantitative.
Les atteintes Ă la concurrence sont strictement rĂšglemen-tĂ©es, que ce soit Ă lâĂ©chelle europĂ©enne ou nationale. Si les ententes anticoncurrentielles sont prohibĂ©es Ă titre de
principe (art. 101 et 102 du TraitĂ© sur le fonctionnement de lâUnion EuropĂ©enne (TFUE), art. L.420-1 et L.420-2 du Code de commerce (C.com)), elles peuvent toutefois faire lâobjet dâune exemption notamment au titre de lâapplication du rĂšgle-ment dâexemption n°1400/2002 applicable aux accords de distribution de vĂ©hicules automobiles neufs (RĂšglement).
Lâaffaire Auto 24 contre Jaguar Land Rover France,
ou comment choisir son concessionnaire
AprĂšs rĂ©siliation de son contrat de concession exclusive avec Jaguar Land Rover France (JLR) Ă PĂ©rigueux, la SARL Auto 24 a pu obtenir des dommages et intĂ©rĂȘts en rĂ©paration du prĂ©-judice subi par le comportement discriminatoire de JLR Ă son Ă©gard1.
Par la suite, Auto 24 a vu sa can-didature en qualitĂ© de distribu-teur agrĂ©Ă© de la marque rejetĂ©e. Le refus Ă©tait justi f iĂ© par un numerus clausus qui ne prĂ©voyait pas de distributeur Ă PĂ©rigueux. La mĂȘme annĂ©e, JLR dĂ©cidait pourtant dâouvrir une reprĂ©sen-tation dans une ville voisine, ce qui a poussĂ© Auto 24 Ă saisir une nouvelle fois la justice, portant
cette affaire en cassation afin de contester les critĂšres retenus pour rejeter sa candidature.
Le problĂšme posĂ© concernait la dĂ©limitation des critĂšres de sĂ©lection en matiĂšre de distribution sĂ©lective quantitative. En effet, le RĂšglement dĂ©finit ce systĂšme comme un systĂšme dans lequel le fournisseur sâengage Ă vendre des biens ou des services contractuels quâĂ des distributeurs sĂ©lectionnĂ©s sur la base de critĂšres limitant directement leur nombre. Il prĂ©cise que ces critĂšres de sĂ©lection doivent ĂȘtre « dĂ©finis » afin dâĂȘtre valables3. Cependant, rien ne permet de dĂ©terminer claire-ment les exigences relatives Ă ces critĂšres « dĂ©finis ». La Cour dâappel4 estime quâaucune disposition « nâimpose au concĂ©-dant de justifier des raisons Ă©conomiques ou autres Ă l'origine de l'Ă©tablissement de la liste des implantations de ses distri-buteurs » alors quâAuto 24 fait valoir que « des critĂšres de sĂ©lection quantitatifs prĂ©cis, objectifs, proportionnĂ©s au but
Ă atteindre et mis en Ćuvre de façon non discriminatoire » doivent ĂȘtre appliquĂ©s.
Ainsi, la Cour5 a dĂ©cidĂ© de sursoir Ă statuer et de renvoyer lâinterprĂ©tation Ă titre prĂ©judiciel Ă la CJUE en les termes sui-vants : « que faut-il entendre par les termes de « critĂšres dĂ©finis » (âŠ) s'agissant d'une distribution sĂ©lective quantitative ? ». Il sâagissait donc de savoir si un constructeur devait ou non jus-tifier par des critĂšres objectifs et non discriminatoires la façon dont il avait procĂ©dĂ© Ă la rĂ©partition de son rĂ©seau, lorsquâil choisissait de limiter le nombre de ses distributeurs.
La Cour dans la droite ligne de la jurisprudence européenne
La CJUE Ă©nonce quâil suffit que ces « critĂšres dĂ©finis » prĂ©-sentent un contenu prĂ©cis et vĂ©rifiable. La Cour reprend la solution de la CJUE et ajoute que â contrai-rement aux critĂšres dans un systĂšme de distribution sĂ©lective qualitative â il nâest pas « nĂ©cessaire que ces critĂšres soient objectivement justifiĂ©s et appliquĂ©s de façon uniforme et non diffĂ©renciĂ©e Ă lâĂ©gard de tout candidat Ă lâagrĂ©ment ». Ainsi, dans un systĂšme de distribution sĂ©lective quantitative, le constructeur (JLR en lâespĂšce) nâest pas contraint de justi-fier des raisons qui ont orientĂ©es son choix, il lui suffit dâavoir arrĂȘtĂ© des critĂšres prĂ©cis quâil nâa pas besoin de publier afin de bĂ©nĂ©ficier de l'exemption.
Vers plus de sĂ©curitĂ© juridique Au-delĂ de la solution dâespĂšce (fin du litige entre Auto 24 et JLR), lâarrĂȘt constitue un revirement de jurisprudence : aupa-ravant, la Cour imposait des critĂšres de sĂ©lection objectifs6, et permet de mettre fin au conflit doctrinal qui opposait les par-tisans dâun contrĂŽle du caractĂšre objectif des critĂšres quanti-tatifs dâun systĂšme de distribution sĂ©lective quantitative aux dĂ©fenseurs de la libertĂ© de fixation de ces critĂšres.
AnaĂŻs Ytto EL ADEL
DISTRIBUTION AUTOMOBILE : UN FOURNISSEUR PEUT FIXER
UN NUMERUS CLAUSUS QUI NâA PAS Ă ĂTRE JUSTIFIĂ
1 Cass. Com 15 janvier 2013, n°10-12734
2 CJUE, 14 juin 2012, aff. C-158/11
3 Tribunal de commerce de Versailles, 28 octobre 2006
4 Article 1, 1 f)
5 CA Paris, 2 décembre 2009, n°08-06680
6 Cass.Com 29 mars 2011, n°10-12734
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1 Cass soc 20 octobre 2010 n°09-70.966
2 Françoise CHAPTAL (AFP) â 5 fĂ©vr. 2013
3 CE 22 juin 2011 , n°319240.
L'arrivée de David Beckham au sein du PSG attise la curio-sité de tous les amateurs de football mais également des juristes! En effet, les contrats passés avec le club parisien
lui permettront d'Ă©chapper en grande partie Ă l'impĂŽt fran-çais, et la majeure partie de ses gains proviendra de l'exploi-tation de son image.Le PSG, par le biais de contrats d'image, compte exploiter au mieux la notoriĂ©tĂ© du joueur de 37 ans afin d'assurer la pro-motion de ses sponsors et de ses propres activitĂ©s commer-ciales, sportives et de communication. Afin d'optimiser les contrats d'image et rendre attractif sa venue dans la capitale, le club a tout intĂ©rĂȘt Ă recourir Ă des montages contractuels
Quels contrats d'image?Si l'utilisation de l'image par le club est rĂ©tribuĂ©e sous forme de salaires, elle sera assujettie au rĂ©gime gĂ©nĂ©ral , en revanche si le sportif apporte son image en dehors de son contrat de travail il en sera dispensĂ©.PremiĂšre hypothĂšse: l'exploitation par le club ou ''Rent a star system'', le joueur cĂšde Ă une sociĂ©tĂ©, domiciliĂ©e hors de France, le droit d'exploiter son nom et son image. Cette sociĂ©tĂ© transmet au club la facultĂ© de les utiliser pour toute action pro-motionnelle en contrepartie du versement dâune redevance soustraite aux charges. Dans le cas de Beckham, sa sociĂ©tĂ© Footwork Productions basĂ©e Ă Londres, a pour seule activitĂ© de gĂ©rer la "licence Beckham". Mais ce montage n'est pas
sans risque car les redevances sont versĂ©es par le club ou une filiale, donc l'employeur du sportif, et encourt donc une requa-lification en salaire par le jeu de l'article 155 a du CGI. De nombreux arrĂȘts ont alimentĂ© la jurisprudence sur ce dispositif, cependant sa compatibilitĂ© avec le droit europĂ©en a dĂ©jĂ Ă©tĂ© posĂ©e et il semblerait aller Ă l'encontre du traitĂ©.
HypothÚse plus sécurisée, l'exploitation de l'image par les partenaires du club: afin que l'exploitation de l'image du sportif ne se rattache pas au contrat de travail, les rede-vances seraient versées par les sponsors à la société gérant l'image. Ainsi le club n'intervient pas dans l'opération, mais ces contrats doivent traduire des relations purement commer-ciales, prestations d'image concrÚtes1,et non une volonté dis-simulée d'échapper exclusivement aux charges patronales...
Pour Maßtre Didier Poulmaire ,avocat spécialisé dans la gestion de l'image des sportifs, les revenus tirés de la stricte exploitation du droit à l'image individuel n'étant pas assu-jettis aux charges sociales, il parait en effet probable qu'un tel accord existe entre les deux parties. En tout cas, cela pourrait donner à l'administration fiscale l'envie d'aller voir notamment lorsque la rémunération de l'exploitation de l'image est signi-ficative par rapport au salaire2.
L'optimisation juridiqueRappelons que l'administration fiscale sait requalifier opportu-nĂ©ment les gains des sportifs Ă©trangers en France, ainsi ceux perçus lors de tournoi dans l'hexagone par le tennisman Boris Becker ont Ă©tĂ© qualifiĂ©s de salaires. La justification est perti-nente mais opĂšre une ouverture aux multiples consĂ©quences, lâadministration considĂšre que le sportif professionnel qui par-ticipe Ă un spectacle sportif a l'identitĂ© d'un artiste du spectacle auquel est applicable la prĂ©somption de salariat3.
Solution efficace, le recours au droit des marques: Le pilote automobile Jacques Villeneuve a enregistré en 2000 la photo de son visage comme marque de commerce à l'international. Le dépÎt et l'enregistrement de l'image du footballeur en tant que marque de commerce permettent d'en concéder l'exploi-tation par l'intermédiaire de la société gérant son image. La rémunération peut alors prendre la forme d'une redevance de
licence de marques, et ainsi la protection de l'image relĂšve de son rĂ©gime protecteur. Le problĂšme majeur rĂ©side dans l'Ă©volution physique du footballeur, risque d'instabilitĂ© de la marque, mais on peut le rĂ©soudre en abordant les Ă©lĂ©ments spĂ©cifiques d'un personnage sportif, image de marque que certains auteurs qualifient dâĆuvre de l'esprit originale. Droit d'auteur? Droits voisins? La prestation de Beckham, dans le stade et en dehors, relĂšverait-elle du rĂ©gime juridique des mannequins ou des artistes du spectacle? La problĂ©matique de la patrimonialisation de l'image des sportifs est toujours dĂ©ter-minante de la qualification.
Vincent PAQUOT
BECKHAM-PSG : OPTIMISER L'EXPLOITATION DE L'IMAGE DES
STARS DU FOOTBALL
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Lundi, 8 heures 10 minutes, faculté de droit. Le doctorant court, cartable sous le bras gauche, manuel sous le droit. Les couloirs résonnent. Il arrive enfin dans sa salle de TD,
sâinstalle lourdement et, un rictus au coin des lĂšvres, annonce narquois quâil a corrigĂ© les copies. VoilĂ le « vrai travail » du doctorant au yeux des profanes, ces petits ĂȘtres qui nâont pas encore saisi le rĂŽle capital quâil joue dans la rĂ©volution que vit sa matiĂšre (tous les juristes savent bien que le droit nâĂ©volue pas, il se rĂ©volutionne Ă coups de lois ou dĂ©cisions de la CJUE). Il se voit comme un Marat du droit des procĂ©dures collectives, un « mentalist » du droit de la nĂ©gociation collective, perçant Ă jour les secrets de ces monstruositĂ©s catĂ©gorielles, un CĂ©line du droit public Ă©conomique, juriste de la rupture. Et pour en arriver lĂ , il lui a fallu de lâendurance, du style, beaucoup de chance et, bien sĂ»r du courage.
Il a du commencer par apprendre Ă subir les interrogations des profanes: « Que fais-tu ? â Une thĂšse. â Ah, mais tu tra-vailles sinon ? ». A cette Ă©ternelle question, le doctorant, ne rĂ©pond souvent que par une moue certes dubitative mais pour-tant tellement expressive. OUI, le doctorant travaille, il bĂ»che, il planche, il charbonne, il sue, il pleure, il saigne, il crie, il pleure, il sâextasie, il mange Macdo trois fois par semaine, devant son ordinateur posĂ© sur son bureau dont on a oubliĂ© la couleur, bref il vie. Le travail du thĂ©sard est un travail de fourmi, de patience, de digestion intellectuelle. Le doctorant, travaille Ă la VĂ©ritĂ©, mĂȘme si elle nâembrasse que celle de lâac-tivitĂ© des autoritĂ©s administratives dans le dĂ©partement de la Creuse entre 1793 et 1795. Le thĂ©sard sâĂ©chine, sâescrime Ă percer les secrets des longues et sinueuses circonvolutions du Droit. Sous la direction bien sĂ»r de son directeur de thĂšse, dont il nous faut ici dĂ©peindre les traits.
Le directeur de thĂšse est un peu le pĂšre spirituel du thĂ©sard, celui dont il doit apprendre la façon de se mouvoir comme un grand dans le monde des adultes. Il nâest pas faux dâaffirmer que jusquâĂ sa soutenance, et parfois au delĂ , le thĂ©sard est
la chose de son directeur. Il joue avec lui, comme Dieu joue avec les Ă©toiles. Il prĂ©side Ă son sommeil et aux variations de son poids, comme le soleil prĂ©side au jour et la lune Ă la nuit. Quâil ne reste quâun mois pour lui rendre son plan, et le doc-torant entre en phase de transe, que le Patron sâabsente une semaine pour un colloque Ă la RĂ©union, et il peut enfin pro-fiter de la derniĂšre saison de Desperates Housewives, quâil verra bien Ă©videmment en replay au « labo ». Et pourtant, il marquera de son empreinte le reste de sa vie, Ă commencer par ses chances de « qualif » (ou de « calife », selon lâambi-tion du doctorant). Heureusement, bien souvent, les directeurs de thĂšse sont conscients de lâimportance de leur rĂŽle et de la responsabilitĂ© quâils endossent. Il reste quâil est impossible de rĂ©pondre Ă lâĂ©ternelle question : est-ce le doctorant qui choisit son directeur ou lâinverse ? (le rapport Ă la poule et lâĆuf est
plus quâĂ©vident !) : Une fois nâest pas coutume, la rĂ©ponse peut-ĂȘtre se trouve sur TF1 : le choix du directeur de thĂšse, câest un peu The Voice : il est impĂ©ratif quâun rapport particulier se crĂ©e entre le jeune padawan et le maĂźtre Yoda en robe rouge.
Mais en rĂ©alitĂ©, parler DU doctorant est une erreur grossiĂšre. Il faut bien reconnaĂźtre, cependant, que seuls les initiĂ©s peuvent saisir les subtilitĂ©s des arcanes universitaires. Il faut dĂ©jĂ dis-tinguer les doctorants CIFRE des doctorants contractuels. Les premiers ont choisi la voie mixte, celle de lâuniversitĂ© et de lâentreprise ou de lâadministration. Le CIFRE jongle entre les logiques du savoir et ceux de la rentabilitĂ©. Sa spĂ©cificitĂ© est quâil passe une partie de la semaine, gĂ©nĂ©ralement 3 jours, dans une structure professionnelle, le plus souvent Ă exercer une tĂąche de juriste dans son domaine de spĂ©cialitĂ©. Le reste du temps, il le consacre Ă rĂ©soudre une question Ă©minemment pratique toute entourĂ©e dâun halo de gris : la jurisprudence nâest pas figĂ©e, les impacts du droit nouveau ont parfois un goĂ»t de banane, parfois de cerise, et les entreprises sont prĂȘtes Ă investir, avec de trĂšs larges subventions de lâEtat, pour la rĂ©solution du problĂšme. Le thĂ©sard CIFRE peut soit proposer un
UNE VIE DE DOCTORANT
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S sujet Ă une entreprise, soit accepter de traiter celui qui leur fait office dâĂ©pine dans le pied. La plupart du temps, le « Cifrien » se destine soit Ă une carriĂšre de juriste, soit Ă celle dâavocat, car comme toutes les thĂšses (dont le rĂ©gime est unique), les thĂšses CIFRE donnent un accĂšs direct aux Ă©coles dâavocat, ou encore, dans une moindre mesure, lâENM. Lâavantage de la CIFRE : un salaire intĂ©ressant (qui ne peut ĂȘtre infĂ©rieur Ă 24000 euros brut par an), lâassurance dâacquĂ©rir une exper-tise dans un domaine spĂ©cifique, et une expĂ©rience profession-nelle tout au long de sa thĂšse.
De ceux lĂ , certains doctorants contractuels diront quâils ne devraient pas avoir le titre de docteurs, ou alors dâun autre doctorat. Ils sont les gardiens de la Loi, les dĂ©fenseurs de la doctrine, les ayatollahs de lâOrdre universitaire. Les docto-rants contractuels ont reçu lâonction professorale sur la foi de leur rapport de prĂ©sentation. Ils ont subi lâĂ©preuve du feu, câest Ă dire celui dâaffronter le jury de sĂ©lection. En effet, les contrats doctoraux, depuis 2009, ne sont attribuĂ©s quâau compte goutte. Les doctorants sont rĂ©munĂ©rĂ©s par lâEtat, via lâUniversitĂ© de rattachement, ce qui les met Ă lâabri du besoin et leur permet de se concentrer uniquement sur leur « disser-tation ». En fonction des rĂ©gimes (il en existe deux) les doc-torants contractuels perçoivent entre 1400 et 1700 euros net/mois, selon quâils assurent ou non des activitĂ©s annexes. Souvent, les doctorants contractuels sont chargĂ©s dâenseigne-ments en TD, ce qui leur permet dâadopter un certain recul sur leurs matiĂšres et de se prĂ©parer au mieux Ă la « qualif â » et à « lâagrĂ©gâ ». Car bien souvent, le doctorant contractuel se destine Ă une carriĂšre dâenseignant-chercheur, comme si, moule Ă son rocher, il avait dĂ©cidĂ© de ne jamais franchir en sens inverse les portes qui se refer-maient devant sa maman, en maternelle. Pour y parvenir, il devra soit ĂȘtre qualifiĂ© aux fonctions de maĂźtre de confĂ©rences, soit passer le redou-table concours de lâagrĂ©gation des facultĂ©s de droit, concours dont lâĂ©preuve reine dure, comme au Mans, 24 heures.
Restent enfin tous les autres doctorants, les damnĂ©s de la terre universitaire, ceux qui subissent le manque de perspective des politiques de la Recherche depuis des dĂ©cennies : ceux qui sont « simplement » doctorants, soit quâils nâont pas Ă©tĂ© admis au club des contractuels (pour des raisons qui sont parfois bien Ă©loignĂ©es de la qualitĂ© de leur dossier), soit quâils ont Ă©tĂ© rejetĂ©s de la caste des Cifriens, soit enfin quâils ne lâaient pas voulu ou pas pu. Ils exercent leur art dans la plus strict intimitĂ©, dans la chaleur tropicale (ou la fraicheur polaire selon les Ă©poques) des BU, dans le confort discutable de leurs siĂšges, qui, parfois, leur ont des bontĂ©s et cĂšdent au creux de leurs reins. Si, malgrĂ© tout, ils ont un peu de chance, ils sont aussi chargĂ©s de TD, sous lâenvieux rĂ©gime du vacataire : 30 Ă 40 euros de lâheure. De fait, un loyer se
compte en heures de cours et non en monnaie sonnante et trĂ©-buchante. Nombreux sont ceux qui (vĂ©naux quâils sont !) ont prĂ©fĂ©rĂ© se soumettre aux insistances de leur estomac quâaux dĂ©lices des saveurs de la VĂ©ritĂ© et du Savoir, nombreux sont ceux qui peinent Ă terminer leur thĂšse ou qui lâabandonnent en cours de route. Lâexercice de recherche est trop exigeant pour que lâon puisse conseiller aux Ă©ventuels intĂ©ressĂ©s de sây jeter sans filet de protection, sans CIFRE ou sans contrat doctoral ou tout autre arrangement qui leur permette de sây consacrer entiĂšrement.
A ceux lĂ nous voulons dire, en guide de conclusion, que le travail de thĂšse nâest pas une sinĂ©cure. Il nĂ©cessite de la rigueur, un certain degrĂ© dâexigence et, pour certains, une longue thĂ©rapie. Les effets du travail de thĂšse sur la psychĂ© sont encore mal connus, et il est Ă ce titre remarquable quâaucun thĂ©sard ne se soit emparĂ© de la question⊠Le thĂ©sard vie au rythme de sa thĂšse : le matin, au rĂ©veil, excitĂ© comme la derniĂšre des pucelles, le midi plein du doute du pĂ©cheur, et le soir abattu comme un cheval en Roumanie. Mais enfin, puisquâaprĂšs avoir travaillĂ© sans relĂąche de midi Ă minuit, il doit bien toucher son salaire, il jouira dâun plaisir si particu-lier, celui dâavoir compris et dâavoir dĂ©veloppĂ© une pensĂ© ori-ginale, bref, celui du trouveur.
Sheba DEHLI
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ESDROIT DE LA CONCURRENCE
RĂ©vision des lignes directrices relatives au
contrÎle des concentrations : l'Autorité de la concurrence
lance une consultation publique
Le 22 février 2013, l'Autorité de la concurrence a lancé une consultation publique sur le projet de révision de ses lignes directrices ouverte pour deux mois. Cette consultation a pour but de recueillir les observations des personnes intéressées par le projet révisé. Le projet s'inspire de l'expérience acquise par l'Autorité depuis la publi-cation des lignes le 16 décembre 2009. La pratique a démontré les bénéfices d'une procédure souple et rapide, et l'importance de la phase informelle de pré-notification. Le projet précise les conditions d'éligi-bilité à une procédure d'examen sim-plifié et son analyse en matiÚre de défi-nition des marchés pertinents ainsi qu'en matiÚre d'engagements et d'injonctions. Concernant les engagements, l'Autorité
s'est fixĂ©e comme but de "faciliter, sĂ©cu-riser et homogĂ©nĂ©iser la pratique des entreprises Ă l'occasion" de cette phase. Ainsi, elle s'inspire de la pratique com-munautaire et propose deux modĂšles-types dans les hypothĂšses de cession d'actifs et de contrat de mandat. Ces modĂšles s'adressent aux parties concer-nĂ©es lorsqu'elles envisagent de prendre des remĂšdes structurels, et pourront ĂȘtre adaptĂ©s, au cas par cas.
DROIT CONSTITUTIONNELRenouvellement du tiers de membres du Conseil
Constitutionnel En application de lâarticle 56 de la Constitution et de lâordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel a Ă©tĂ© procĂ©dĂ© ce mardi 12 fĂ©vrier au renouvellement du tiers des membres du Conseil constitutionnel. Un renouvellement tout Ă fait inĂ©dit â si lâon en croit les commentateurs â puisque pour la premiĂšre fois dans lâhis-
toire de la justice constitutionnelle fran-çaise, trois femmes en sont lâobjet. La premiĂšre dâentre elles, Mme Claire Bazy-Malaurie, jusque-lĂ PrĂ©sidente de chambre Ă la Cour des comptes, avait en rĂ©alitĂ© dĂ©jĂ fait son entrĂ©e rue de Montpensier le 31 aoĂ»t 2010 suite au dĂ©cĂšs de M. Jean-Louis Pezant. Ayant occupĂ© cette fonction pendant moins de trois ans, lâarticle 12 de lâordonnance prĂ©citĂ©e autorisait son renouvellement, ce que fit le PrĂ©sident de lâAssemblĂ©e nationale M. Claude Bartolone. Le PrĂ©sident de la RĂ©publique a de son cĂŽtĂ© proposĂ© la nomination de Mme Nicole Maestracci, PrĂ©sidente de la Cour dâappel de Rouen en remplace-ment de M. Pierre Steinmetz, tandis que le PrĂ©sident du SĂ©nat M. Jean-Pierre Bel a choisi Mme Nicole Belloubet, Professeur des Univers i tĂ©s pour remplacer Mme Jacqueline Guillenchmidt. Comme garde-fou, la rĂ©vision constitu-tionnelle de 2008 avait introduit Ă lâar-ticle 56 lâaudition des candidats devant la « commission per-manente compĂ©tente de lâassemblĂ©e concernĂ©e », auditions qui ont donnĂ© lieu ce mercredi 20 fĂ©vrier Ă
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ESla validation des choix effectués par les autorités de saisine. Les nouveaux élus entreront en fonction dans la semaine du 11 mars 2013.
DROIT ADMINISTRATIF
Mesure de police et débit de boissons
Le Conseil dâEtat a Ă©tĂ© saisi par le Tribunal administratif de Poitiers pour avis, en application des dispositions de lâarticle L. 113-1 du code de justice administrative, afin de se prononcer sur la nature des arrĂȘtĂ©s prĂ©fectoraux ordonnant la ferme-ture de dĂ©bits de boissons sur le fonde-ment du code de la santĂ© publique. Par avis contentieux en date du 18 janvier 2013, les juges du Palais Royal ont rĂ©pondu que les arrĂȘtĂ©s tendant Ă la fer-meture de dĂ©bit de boissons « ont toujours pour objet de prĂ©venir la continuation ou le retour de dĂ©sordres liĂ©s au fonctionne-ment de lâĂ©tablissement, indĂ©pendamment de toute responsabilitĂ© de lâexploitant ». De par sa finalitĂ©, lâarrĂȘtĂ© prĂ©fectoral est
qualifiĂ© de mesure de police susceptible de faire lâobjet dâun recours devant le seul juge de lâexcĂšs de pouvoir.
DROIT ADMINISTRATIF
Une voie de fait
Il appartient traditionnellement au juge judiciaire le soin de mettre fin Ă une voie de fait commise par lâadministration (CE, 18 octobre 1989, Mme B. ). DĂ©sormais le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s peut, sur le fondement de lâarticle L. 521-3 du code de justice admi-nistrative, enjoindre Ă lâadministration de la faire cesser (CE, 12 mai 2010, M. Alberigo). Une compĂ©tence que le Conseil dâEtat a rĂ©cemment Ă©tendu au juge des rĂ©fĂ©rĂ©s de lâarticle L. 521-2 du code de justice (CE, 23 janvier 2013, Commune de Chirongui).
DROIT
ADMINISTRATIFContentieux des Ă©trangers
Le Conseil dâEtat a Ă©tĂ© saisi par la Cour administrative dâappel de Nantes pour avis, en application des dispositions de lâarticle L. 113-1 du code de justice admi-nistrative, sur la question de savoir si dĂ©ci-sion implicite de rejet Ă une demande de titre de sĂ©jour formulĂ©e par un Ă©tranger rĂ©sultant du silence gardĂ© par le prĂ©fet Ă lâexpiration dâun dĂ©lai de quatre mois peut servir de base lĂ©gale Ă une dĂ©cision portant obligation de quitter le territoire prise sur le fondement de l'article L. 511-1 de ce code. Le Conseil dâEtat estime que depuis lâentrĂ©e en vigueur de la loi 16 juin 2011 relative Ă l'entrĂ©e et au sĂ©jour des Ă©trangers en France et au droit d'asile lâautoritĂ© administrative peut dĂ©sormais « prononcer une obligation de quitter le territoire français lorsque le silence gardĂ© pendant quatre mois sur une demande de dĂ©livrance ou de renouvellement dâun titre de sĂ©jour a fait naĂźtre une dĂ©cision impli-cite de rejet, sans quâil lui soit impĂ©ratif dâopposer au prĂ©alable un refus explicite de titre de sĂ©jour ».
LPJ - Mars 2013 -
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Citation du mois : « Le droit est le souverain du monde », Honoré Gabriel, Comte de Mirabeau.
Film du mois : LA FAILLE
Réalisé par : Gregory HoblitActeurs Principaux : Ryan Gosling, Anthony Hopkins, David Strathairn
Synopsis : Face Ă lâinfidĂ©litĂ© de sa femme, Ted Crawford dĂ©cide de commettre le crime parfait en tentant de la tuer. Le jeune et ambitieux procureur adjoint de Los Angeles, Willy Beachum, se charge de cette derniĂšre affaire avant de rejoindre un prestigieux cabinet dâavocats. Une vĂ©ritable confrontation va naĂźtre entre Ted qui dĂ©cide de se dĂ©fendre seul et Willy qui souhaite finir par un dernier coup dâĂ©clat devant lâaider Ă rejoindre son futur poste. Ceci se passant sous lâĂ©gide de la manipulation, de lâambition et surtout oĂč la dĂ©faite est nĂ©cessaire des deux cĂŽtĂ©s afin dâas-souvir les dĂ©sirs du vainqueur. Chacun possĂšde un point faible. Sauront-ils trouver la faille chez lâautre pour le faire tomber ?
InterĂȘt : En plein cĆur du systĂšme judiciaire AmĂ©ricain oĂč la course Ă la gloire est lancĂ©e, plaidoiries, et procĂ©dures vont se confronter sur fond de manipulation.
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Maquettiste - Communication : Paul MAILLARD - Alexandre DECHOSALResponsable partenariats : Antoine BOUZANQUET â Damir BEZDROB
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