asean et rcep - un autre accord de libre echange trop ambitieux?

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www.lepetitjuriste.fr Le Dossier du Mois en partenariat avec N o 21 Mars 2013 LE NOUVEAU VISAGE DE L’INSTITUTION MATRIMONIALE : LE MARIAGE POUR TOUS p. 7 DROIT CONSTITUTIONNEL Quelles relations aujourd’hui en Hongrie entre Etat de droit et pouvoir pouvoir exĂ©cutif avec la nouvelle Loi fondamentale ? p. 20 DROIT SOCIAL Du nouveau en droit social : l’accord national interprofes- sionnel de janvier 2013. p. 26 CONSEILS DES PROS p. 25 PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE Un point de vue juridique sur la gestion de l’image du joueur de foot anglais depuis son arrivĂ©e au PSG. Pour tout ceux qui se posent des questions sur la vie de leur chargĂ© de TD : 24h dans la vie d’un doctorant.

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Le Dossier du Moisen partenariat avec

No 21

Mars 2013

LE NOUVEAU VISAGE DE L’INSTITUTION MATRIMONIALE :

LE MARIAGE POUR TOUS

p. 7 DROIT CONSTITUTIONNEL

Quelles relations aujourd’hui en Hongrie entre Etat de droit et pouvoir pouvoir exĂ©cutif avec la nouvelle Loi fondamentale ?

p. 20 DROIT SOCIAL

Du nouveau en droit social : l’accord national interprofes-sionnel de janvier 2013.

p. 26 CONSEILS DES PROS

p. 25 PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

Un point de vue juridique sur la gestion de l’image du joueur de foot anglais depuis son arrivĂ©e au PSG.

Pour tout ceux qui se posent des questions sur la vie de leur chargĂ© de TD : 24h dans la vie d’un doctorant.

SOM

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SOM

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EDITO :ChĂšres lectrices, chers lecteurs, Pour le dernier numĂ©ro de l’annĂ©e universitaire nous avons mis en avant les sujets d’actualitĂ© les plus brĂ»lants. L’effervescence suscitĂ©e par la rĂ©forme du mariage mĂ©ritait un dossier du mois Ă  la hauteur. Nous avons relevĂ© le dĂ©fi et vous proposons de connaĂźtre toutes les consĂ©quences juridiques qu’elle entrainera. EvĂšnement majeur du droit social, l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 vous est Ă©galement prĂ©sentĂ© en dĂ©tail.

Enfin, Monsieur le Professeur TerrĂ© nous fait l’immense honneur d’une interview sur la rĂ©forme (espĂ©rĂ©e ?) du droit des obligations.

Bonne lecture.

Geoffrey Gury,RĂ©dacteur en chef

p. 4 p. 16

p. 6 p. 20

p. 23p. 7

p. 24p. 8

p. 25p. 10

p. 26p. 11

p. 28

p. 12, 13

p. 30

p. 14

ACTUALITÉ LPJ DOSSIER DU MOIS

L'INTERVIEW DU MOIS DROIT SOCIAL

DROIT DE L'ENVIRONNEMENTDROIT CONSTITUTIONNEL

DROIT COMPARÉ

DROIT FISCAL

DROIT DES AFFAIRES

DROIT CIVIL

DROIT INTERNATIONAL

CONSEILS DES PROS

DIVERTISSEMENT

PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

BRÈVES

CONCURRENCE

Les sanctions des comportements anticoncurrentiels et leurs limites exposés par Michel Debroux.

Quelles relations aujourd’hui en Hongrie entre Etat de droit et pouvoir pouvoir exĂ©cutif avec la nouvelle Loi fondamentale ?

La reprise Ă  Lyon d’un beau projet amĂ©ricain visant Ă  aider les dĂ©tenus.

Pour contrer toutes les idées reçues sur la fiscalité, enfin un décryptage juridique de taxe à 75%

Guillaume Martin dépeint les liens entre sociologie et droit.

Le professeur François TerrĂ© nous fait l’honneur de rĂ©pondre Ă  nos questions sur les derniĂšres avancĂ©es des rĂ©formes du droit des obligations. (page 13)

Du nouveau en droit social : l’accord national interprofes-sionnel de janvier 2013.

Retour sur le dĂ©bat de l’interdiction du perchorĂ©thylĂšne, un composant chimique utilisĂ© dans les pressings.

La CJUE et la Cour de Cassation clarifient les critĂšres quanti-tatifs de la distribution automobile.

Un point de vue juridique sur la gestion de l’image du joueur de foot anglais depuis son arrivĂ©e au PSG.

Pour tout ceux qui se posent des questions sur la vie de leur chargĂ© de TD : 24h dans la vie d’un doctorant.

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Notre nouveau site internet est un franc succÚs et vous permet de lire et relire vos articles préférés. Il est aussi un moyen pour tout étudiant de nous communiquer

son mĂ©moire de fin d’études. Nous nous proposons de publier l’ensemble des travaux soutenus par une promotion de Master. Pour cela, rien de plus simple, il vous suffit de nous les envoyer directement avec l’accord du responsable de la formation.

GrĂące au systĂšme des Ambassadeurs, rĂ©cemment mis en place, Le Petit Juriste se rapproche toujours plus de vous. Tout Ă©tudiant, association apolitique ou Master soucieux d’as-surer une meilleure distribution du LPJ dans son universitĂ© peut nous contacter pour devenir Ambassadeur. Sa mission consiste Ă  rĂ©ceptionner le journal et Ă  en faire la promotion au sein de l’UniversitĂ©, au besoin, grĂące Ă  des Ă©vĂšnements LPJ. Les Ambassadeurs nous ont dĂ©jĂ  permis d’amĂ©liorer notre prĂ©sence. GrĂące Ă  vous, Le Petit Juriste pourrait bientĂŽt devenir le seul journal juridique Ă©tudiant distribuĂ© dans toutes

les UniversitĂ©s françaises. N’hĂ©sitez donc pas Ă  contacter la rĂ©daction.

Nous vous avions annoncĂ© une surprise, il est temps de vous rĂ©vĂ©ler la crĂ©ation d’une nouvelle revue Ă  destination des Ă©tu-diants : Le Petit Journal de l’Economie. DĂ©clinĂ© sur le mĂȘme modĂšle que Le Petit Juriste, ce journal fait par les Ă©tudiants et pour les Ă©tudiants sera consacrĂ© aux sciences Ă©conomiques et de gestion. Nous vous donnerons bientĂŽt d’avantage d’infor-mations sur ce projet.

L’ensemble de la rĂ©daction tient Ă  vous remercier pour cette nouvelle annĂ©e passĂ©e Ă  vos cĂŽtĂ©s et vous souhaite, Ă  toutes et Ă  tous, un trĂšs bon courage pour cette derniĂšre ligne droite avant les examens.

LA FIN DE L’ANNÉE UNIVERSITAIRE S’ANNONCE DÉJÀ, L’OCCASION DE FAIRE LE BILAN SUR CETTE ANNÉE LPJESQUE PLEINE DE NOUVEAUTÉS

ET DE PROJETS

LPJ - Mars 2013 -

5 - Mars 2013 -

ACTU

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CrĂ©Ă©e en 1961 sous l’impulsion d’associations Ă©tudiantes corporatives apolitiques, asyndicales et aconfession-nelles, l’UNEDESEP - Union Nationale des Etudiants

en Droit, Gestion, AES, Sciences Economiques, Politiques et Sociales -, a pour but d’aider et de reprĂ©senter les Ă©tudiants de ces filiĂšres devant les institutions (ministĂšre de la justice, ministĂšre de l’enseignement supĂ©rieur, Conseil National des Oeuvres Universitaires et Scolaires (CNOUS), Conseil National de l’Enseignement SupĂ©rieur et de la Recherche (CNESER) ...).

FĂ©dĂ©rant une quarantaine d’associations Ă©tudiantes locales, l’UNEDESEP est l’unique association Ă©tudiante nationale qui reprĂ©sente les quelques 360 000 Ă©tudiants en sciences sociales. GrĂące Ă  une centaine d’élus Ă©tudiants locaux implantĂ©s dans une trentaine d’universitĂ©s – parmi lesquelles Paris II, Bordeaux IV, Lyon 3, Dijon, Lille 2, Lyon 2, Montpellier I, Rennes I Nantes –, et d’élus nationaux au CNESER et au CNOUS, l’UNEDESEP a toujours su ĂȘtre force de proposition reconnue et entendue par les instances dĂ©cisionnelles, comme en attestent nos travaux rĂ©cents sur le nouvel arrĂȘtĂ© Licence ou

encore sur la passerelle pour les docteurs au CRFPA.Outre le volet reprĂ©sentation, l’UNEDESEP Ɠuvre au quotidien pour aider les associations Ă©tudiantes Ă  se dĂ©velopper dans les meilleures conditions. A ce titre, plusieurs fois par an, l’UNE-DESEP organise des week-end de formation et de dĂ©bats pour les responsables associatifs et les Ă©lus Ă©tudiants, qui sont l’oc-casion d’échanges et de mutualisation des moyens nĂ©cessaires au dĂ©veloppement d’une association Ă©tudiante. Tous les ans, l’UNEDESEP Ă©dite des guides des mĂ©tiers du droit, distribuĂ©s Ă  70 000 exemplaires aux Ă©tudiants via son rĂ©seau d’associa-tions et accrĂ©ditĂ© par le MinistĂšre de la Justice et le MinistĂšre de l'Economie et des Finances.

Le Petit Juriste, crĂ©Ă© par des Ă©tudiants de Paris II et distribuĂ© exclusivement Ă  Ă©chelle nationale via le rĂ©seau d’associa-tions de l’UNEDESEP, est l’exemple parfait des Ă©changes qui peuvent exister entre nos associations, qui s’entraident pour amĂ©liorer chaque jour un peu plus le quotidien des Ă©tudiants en droit !

Morgane VALLA Président de l'UNEDESEP

LE PETIT JURISTE VOUS PRÉSENTE SON RÉSEAU DE DISTRIBUTION

L’UNEDESEP, la fĂ©dĂ©ration des associations Ă©tudiantes en sciences sociales

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Avocat aux Barreaux de Paris et de Bruxelles, AssociĂ© au Cabinet Hogan Lovells, Directeur d’Etudes Ă  l'Ă©cole de Droit et de Management - Paris II.

Il y a essentiellement trois types de sanctions qui s’attachent aux pratiques anticoncurrentielles : les sanctions civiles, les sanctions pĂ©cuniaires et les sanctions pĂ©nales.

Tout d’abord, les sanctions civiles dĂ©coulent du texte. Elles sont doubles. La premiĂšre sanction civile est celle applicable en matiĂšre d’entente notamment. Elle rĂ©pute inapplicables et illĂ©gaux de droit les accords anticoncurrentiels. Ceux-ci ne peuvent donc pas ĂȘtre mis en Ɠuvre et on ne peut en rĂ©clamer l’exĂ©cution forcĂ©e.

La deuxiĂšme sanction civile rĂ©side dans la rĂ©paration des dom-mages anticoncurrentiels. Il s’agit du domaine du droit civil le plus classique, Ă  savoir la trilogie de l’article 1382 du Code civil qui dispose que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause Ă  autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivĂ© Ă  le rĂ©parer Â».Cette sanction vise Ă  permettre la rĂ©paration pour la victime du dommage qu’elle a subi du fait d’une pratique anti- concurrentielle. A proprement parler, nous sommes davantage dans le champ de la rĂ©paration que dans celui de la sanc-tion. Cependant, la perception qu’en ont les entreprises qui ont commis une pratique anticoncurrentielle est bien entendu la mĂȘme.

Ensuite, il existe les sanctions pĂ©cuniaires, financiĂšres. Il s’agit, en d’autres termes, des amendes. Elles sont imposĂ©es soit par les autoritĂ©s europĂ©ennes, soit par les autoritĂ©s nationales. Elles se cumulent la plupart du temps, le principe non bis in idem ne s’appliquant pas.Elles sont calculĂ©es sur le chiffre d’affaire en relation directe ou indirecte par la pratique. Ainsi, au chiffre d’affaire concernĂ© par l’entente ou l’abus de position dominante est appliquĂ© un pourcentage, auquel sont appliquĂ©s d’autres critĂšres liĂ©s Ă  la durĂ©e de l’entente, Ă  des facteurs soit aggravants soit attĂ©-nuants, Ă  un rĂŽle soit de leader soit de suiveur
 L’application de ces diffĂ©rents critĂšres aboutit Ă  la dĂ©termina-tion d’un montant qui est en augmentation constante. Les auto-ritĂ©s de concurrence ont en effet une politique d’accroissement des sanctions financiĂšres qui sont de plus en plus lourdes. Si beaucoup d’économistes disent qu’elles ne sont pas encore assez importantes, les entreprises, Ă  l’inverse, protestent contre ces sanctions trĂšs Ă©levĂ©es.

La sanction pĂ©nale est quant Ă  elle quasiment inexistante en France. Si elle existe en thĂ©orie, elle est rarement mise en Ɠuvre.

Elle est en revanche trĂšs rĂ©elle dans d’autres systĂšmes juri-diques, tels que les Etats-Unis et l’Angleterre.

Enfin, il existe des sanctions qui ne sont pas rattachables Ă  des catĂ©gories prĂ©cises, qui sont des sanctions « immatĂ©rielles Â» : les sanctions liĂ©es au dommage rĂ©putationnel, Ă  l’image de l’entreprise. Ces sanctions, alimentĂ©es par exemple Ă  des obligations de publication de la dĂ©cision, sont en pratique assez lourdes et dissuasives.

Podcast réalisé et retranscrit par TV DMA, 1Úre Web TV en Management et Droit des Entreprises.

Retrouvez l'ensemble de nos podcasts sur TVDMA.ORG

SANCTION DES ENTENTES ET DES ABUS DE POSITION DOMINANTE

MICHEL DEBROUX

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Depuis le 1er Janvier 2012, la Hongrie s'est dotée d'une nouvelle Loi Fondamentale qui n'a pas manqué de faire parler d'elle. De nombreuses protestations d'ordre politique avaient émergé, et restent toujours d'actualité. D'un point de vue plus strictement juridique, d'autres questionnements méritent une attention toute particuliÚre, à commencer par la question des relations complexes entre Etat de Droit et pouvoir exécutif.

Ces interrogations ont semblé trouver, pour un temps au moins, une oreille attentive et influente avec la Cour Constitutionnelle hongroise, auteur de ce qui a été qua-

lifiĂ© de vĂ©ritable Fronde. Celle-ci, dĂšs 2010, s'est inscrite en vĂ©ritable « canon braquĂ© sur le gouvernement Â», pour paro-dier sans malice l'expression de Charles Eisenmann. Un vĂ©ri-table conflit prĂźt alors forme, qui ne cessa pas malgrĂ© la nomi-nation de nouveaux juges constitutionnels en septembre 2011. Cette lutte dĂ©sormais ouverte entre exĂ©cutif et juge constitu-tionnel a connu, tout rĂ©cemment d'ailleurs, un dĂ©veloppement assez troublant. Une rĂ©forme Ă©lectorale obligeant les Ă©lecteurs Ă  s'inscrire sur une liste Ă©lectorale au plus tard deux semaines avant le scrutin, et qui limitait fortement la campagne Ă©lecto-rale dans le temps avait Ă©tĂ© approuvĂ©e par le Parlement en novembre dernier : coup de thĂ©Ăątre en Hongrie, ce texte forte-ment critiquĂ© par l'opposition de centre-gauche a tout simple-ment Ă©tĂ© jugĂ© contraire Ă  la Constitution le 4 janvier dernier, relançant avec force cet antagonisme. La Cour a jugĂ© que les limitations imposĂ©es Ă  la campagne Ă©lectorale attentaient gra-vement Ă  la libertĂ© d'opinion et de la presse, tandis que l'en-registrement prĂ©coce des Ă©lecteurs Ă©tait de nature Ă  mettre en danger les droits et libertĂ©s de ces derniers.

Il n'est pas difficile de voir là, sans porter de jugement de valeur sur la question, une véritable lutte ouverte entre préé-minence du pouvoir exécutif et défense des libertés fondamen-

tales. Au fond, la vĂ©ritable difficultĂ© rĂ©side ici dans le fait que ce mĂȘme pouvoir exĂ©cutif a Ă©tĂ© gratifiĂ©, dans des conditions dĂ©mocratiques, du pouvoir de rĂ©vision constitutionnelle, qu'il n'a d'ailleurs pas hĂ©sitĂ© Ă  utiliser. Ainsi, la rĂ©cente annonce du gouvernement hongrois de procĂ©der Ă  une nouvelle rĂ©vision de la Constitution de 2012, n'Ă©tonnera guĂšre compte tenu de l'ampleur sans prĂ©cĂ©dent de cette bataille rangĂ©e. Cette modification de la Loi Fondamentale viendra rĂ©duire la libertĂ© de jugement de la Cour Constitutionnelle, puisque celle-ci ne pourra plus se fonder sur des textes Ă  valeur constitutionnelle antĂ©rieurs au 1er Janvier 2012. Pour comparaison, il faut imaginer une rĂ©vision similaire en France : celle-ci revien-drait Ă  interdire au Conseil Constitutionnel de se fonder sur la DĂ©claration des droits de l'Homme et du Citoyen, ou encore au PrĂ©ambule de la Constitution de 1946. De maniĂšre plus radicale encore, aucun jugement antĂ©rieur pris par la Cour ne pourra dĂ©sormais ĂȘtre pris en compte, ce qui revient indi-rectement Ă  limiter les juges constitutionnels hongrois Ă  un pur contrĂŽle de constitutionnalitĂ© vis-Ă -vis du texte brut, sans place pour l'Ă©mergence de principes annexes ou de rĂ©fĂ©rences autres. Un vĂ©ritable « verrouillage Â» assumĂ© du contrĂŽle de constitutionnalitĂ©, en somme.

Quoi que l'on en pense, ces rĂ©centes Ă©volutions mĂ©ritent que l'on s'y attarde. Elles tĂ©moignent d'un vĂ©ritable questionne-ment profond Ă  venir sur la lĂ©gitimitĂ© du juge constitutionnel, et de ses rapports avec le pouvoir exĂ©cutif. Plus gĂ©nĂ©ralement, c'est bien la question des rapports entre Etat de droit et pouvoir exĂ©cutif qui est posĂ©e : a fortiori, dans nos sociĂ©tĂ©s dĂ©mocra-tiques, l'Ă©cho dĂ©sormais lointain de la pensĂ©e tocquevillienne vient nous frapper avec force. La dĂ©mocratie et la libertĂ©, socles de notre vision de l'Etat, semblent souffrir de leurs incompatibilitĂ©s. Cette dialectique puissante n'est pas sans laisser augurer d'authentiques dangers.

Romain SIMMARANO

HONGRIE : LA LOI FONDAMENTALE AU CƒUR

DES ENJEUX POLITIQUES

POUR EN SAVOIR PLUS

‱ Rapport d’information de M. Bernard Piras sĂ©nateur de la DrĂŽme, DĂ©mocratie, Finances, Europe : les dĂ©ficits hongrois, Commission des affaires europĂ©ennes, n° 684, 2011-2012

‱ Claire EstagnasiĂ©, La nouvelle constitution jugĂ©e conservatrice de la Hongrie, un danger pour la dĂ©mocratie ?, lepetitjuriste.fr, 2011.

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Depuis sa fondation en 1992 par les avocats Barry Scheck et Peter Neufeld, «  Innocence Project  » a permis d’innocenter 301 personnes aux Etats-Unis. SĂ©duit par son efficacitĂ©, MaĂźtre Sylvain Cormier, avocat spĂ©cialisĂ© en droit pĂ©nal, a eu l’idĂ©e de mettre en place la premiĂšre antenne d’« Innocence Project France  » Ă  Lyon. Il s’agit, pour les membres du projet, de lutter contre les erreurs judiciaires.

L’objectif d’Innocence Project : lutter contre les erreurs

judiciaires

Le but de cette organisation non gouvernementale est d’aider les dĂ©tenus clamant leur innocence Ă  prouver l’existence d’er-reurs judiciaires en menant des contre-expertises ADN, en rouvrant des dossiers de procĂ©dures afin de rechercher s’il y a eu une nĂ©gligence durant l’enquĂȘte, des contradictions
 Les principales erreurs judiciaires, d’aprĂšs les statistiques d’In-nocence Project, sont tout d’abord les faux tĂ©moignages, les erreurs d’identifications puis les faux aveux. La pluridiscipli-naritĂ© du projet a contribuĂ© Ă  l’efficacitĂ© des actions menĂ©es. En effet, ce sont des experts scientifiques, des policiers, des avocats, des magistrats et des Ă©tudiants qui travaillent ensemble sur ces « cold-cases Â».

Innocence Project France est structurĂ©e sous la forme d’un fonds de dotation dont l’Institut d’Etudes Judiciaires de l’uni-versitĂ© Lyon III est la composante principale. Le Projet a ainsi Ă©tĂ© officiellement lancĂ© le 11 janvier 2013 dans les locaux de l’UniversitĂ©. Il s’agit pour les participants de trouver l’élĂ©ment nouveau qui permettra, conformĂ©ment Ă  l’article 622 du code de procĂ©dure pĂ©nale (CPP), de faire douter de la culpabilitĂ© de la personne et d’obtenir la rĂ©vision du procĂšs.

En France, en matiĂšre de crime, seules huit procĂ©dures de rĂ©visions ont abouti depuis 1945. Parmi les derniĂšres en date, nous pouvons citer l’affaire Marc Machin qui a Ă©tĂ© acquittĂ© le 20 dĂ©cembre 2012 par la Cour d’Assises de Paris. Celui-ci, accusĂ© du meurtre d’une femme en 2001, avait Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  18 ans de rĂ©clusion criminelle. Un tĂ©moin affirmait l’avoir vu sur les lieux du crime, ce qui avait conduit les policiers vers le jeune homme. Marc Machin avait tout d’abord avouĂ© avoir commis les meurtres avant de se rĂ©tracter. Il s’est ainsi avĂ©rĂ© que celui-ci avait fait de faux aveux. Par ailleurs, un autre meurtre avait eu lieu dans des conditions similaires alors que Marc Machin Ă©tait en dĂ©tention provisoire. Ce n’est que sept annĂ©es aprĂšs que le vrai coupable, David Sagno, avouera les deux meurtres.

La distinction entre les procé-dures de révision française et

amĂ©ricaineL’équipe française espĂšre accroĂźtre le nombre d’admission des demandes en rĂ©vision par la commission de rĂ©vision afin que celle-ci saisisse la chambre criminelle qui statuera en tant que

Cour de rĂ©vision. Cette derniĂšre, conformĂ©ment Ă  l’article 625 du CPP, peut rejeter la demande si elle l’estime mal fondĂ©e ou annuler la condamnation prononcĂ©e. Dans cette derniĂšre hypothĂšse, la Cour apprĂ©cie s’il est possible de procĂ©der Ă  de nouveaux dĂ©bats contradictoires, et si c’est le cas, elle renvoie l’affaire devant une juridiction de mĂȘme ordre et de mĂȘme degrĂ© mais autre que celle dont Ă©mane la dĂ©cision annulĂ©e. En cas d’impossibilitĂ© de procĂ©der Ă  de nouveaux dĂ©bats, la Cour statue sur le fond et annule les condamnations qui lui paraissent injustifiĂ©es. Elle dispose Ă©galement de la possibilitĂ© de simplement annuler la condamnation sans renvoi si l’annu-lation ne laisse subsister aucune charge qui puisse ĂȘtre quali-fiĂ©e de crime ou de dĂ©lit.

« THE INNOCENCE PROJECT Â» DÉBARQUE EN FRANCE

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PARÉ Aux Etats-Unis, il existe autant de systĂšmes de rĂ©vision des

condamnations que d’Etats, auxquels il convient d'ajouter le systĂšme fĂ©dĂ©ral. Globalement, ces 51 systĂšmes permettent Ă  une personne dĂ©finitivement condamnĂ©e de soumettre Ă  un juge une requĂȘte en rĂ©examen de sa condamnation (post-conviction relief). Les motifs ouvrant droit Ă  cette demande sont prĂ©cisĂ©ment Ă©numĂ©rĂ©s par la loi fĂ©dĂ©rale ou Ă©tatique : condamnation rĂ©alisĂ©e en violation de la Constitution fĂ©dĂ©rale ou Ă©tatique, existence d’élĂ©ments de preuves matĂ©riels n’ayant pas Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s prĂ©cĂ©demment
 Le panel des motifs invo-cables varient selon les Etats, Ă  l’instar de la procĂ©dure d’accĂšs aux donnĂ©es ADN (motion for DNA testing), plus ou moins contraignante au grĂ© des systĂšmes Ă©tatiques, voire inexistante dans le cas de l’Oklahoma.

La mĂ©thodologie d’Innocence Project

Tout d’abord, les dĂ©tenus s’estimant victime d’une erreur judi-ciaire contactent l’association qui leur envoie un questionnaire dĂ©taillĂ©. Ensuite, l’équipe procĂšde Ă  une analyse approfondie du dossier afin de dĂ©tecter les Ă©lĂ©ments permettant de prouver l’innocence du demandeur. Les Ă©tudiants, encadrĂ©s par des professionnels du droit, reprennent ainsi l’enquĂȘte, rendent visites aux dĂ©tenus, se dĂ©placent sur les scĂšnes de crime.

La mĂ©thodologie d’Innocence Project France diffĂ©rera quelque peu de celle retenue aux Etats-Unis Ă©tant donnĂ© que la procĂ©-dure amĂ©ricaine est de nature accusatoire alors qu’en France, celle-ci est mixte, c’est Ă  dire inquisitoire durant la phase poli-ciĂšre et de l’instruction, et accusatoire lors de la phase de juge-ment. En effet, aux Etats-Unis, le rĂŽle de l’avocat lors de l’en-quĂȘte est prĂ©pondĂ©rant, celui-ci participant grandement au recueil des preuves, Ă  l’interrogation des tĂ©moins. De mĂȘme, en raison du caractĂšre accusatoire de la phase d’enquĂȘte, le rĂŽle des dĂ©tectives privĂ©s est important aux Etats-Unis, alors que celui-ci est quasiment inexistant en France oĂč l’enquĂȘte criminelle est menĂ©e par le juge d’instruction. Il n’est ainsi pas coutume pour l’avocat d’aller interroger le tĂ©moin au risque d’ĂȘtre soupçonnĂ© de subornation de tĂ©moins alors qu’aux Etats-Unis, l’équipe d’Innocence Project a la possibilitĂ© d’in-terroger les tĂ©moins. Un protocole sera sans doute nĂ©cessaire pour l’équipe française.

D’aprĂšs MaĂźtre Sylvain Cormier, les scellĂ©s sont mal conservĂ©s en France, si bien que l’exploitation des traces ADN, par des technologies performantes, sera peut-ĂȘtre difficile, notamment pour les affaires anciennes. Or, aux Etats-Unis, c’est surtout les contre-expertises ADN qui ont permis de disculper un grand nombre de victimes d’erreurs judiciaires. D’ailleurs, de nom-breux Etats adoptent des lois qui organisent la conservation des indices afin de permettre l’exploitation des tests ADN.

L’affaire Amanda Knox fournit un bon exemple de disculpa-tion obtenue grĂące Ă  des techniques scientifiques modernes. Une Ă©tudiante amĂ©ricaine avait Ă©tĂ© condamnĂ©e le 5 dĂ©cembre

2009, avec le petit ami de la victime, pour le meurtre de sa colocataire. Les Ă©quipes d’Innocence Project ont pu avoir accĂšs aux rĂ©sultats d’analyse ADN qui dĂ©montraient que seules deux personnes se trouvaient dans la piĂšce oĂč le crime a Ă©tĂ© commis. De plus, deux autres Ă©lĂ©ments de preuves avaient Ă©tĂ© retenus. Il s’agissait, tout d’abord, d’un couteau de cuisine ne contenant aucune tĂąche de sang, qui avait Ă©tĂ© retenu par les enquĂȘteurs comme Ă©tant l’arme du crime. Ensuite, une partie du soutien-gorge de la victime, contenant une trace d’ADN du jeune homme, avait Ă©tĂ© retrouvĂ©e 46 jours aprĂšs la perquisi-tion initiale. Les enquĂȘteurs en avaient conclu que la victime, son petit ami et Amanda Knox se livraient Ă  des rites sexuels. Selon eux, ce serait au cours de l’un d’entre eux que la victime aurait Ă©tĂ© tuĂ©e. Durant leurs recherches, les Ă©quipes d’Inno-cence Project ont rĂ©alisĂ© que les techniciens ne changeaient pas leurs gants entre leurs prĂ©lĂšvements et ont rĂ©ussi Ă  dĂ©mon-trer un doute quant Ă  la fiabilitĂ© de ces piĂšces. Cette organi-sation a convaincu le juge d’appel de demander une nouvelle expertise du couteau. Il s’est avĂ©rĂ© que ce dernier, du fait de la prĂ©sence de tĂąches d’amidon, avait en rĂ©alitĂ© servi Ă  cuisiner.

Eu Ă©gard Ă  son efficacitĂ© aux Etats Unis, l’équipe d’Inno-cence Project France espĂšre ainsi lutter contre les erreurs judi-ciaires. Toutefois, celle-ci devra s’armer de patience car inno-center une personne condamnĂ©e Ă  tort peut prendre plusieurs annĂ©es.

Nadia ISLAM

POUR EN SAVOIR PLUS

‱ www.innocenceproject.org

‱ www.courdecassation.fr

‱ www.lemonde.fr/societe/article/2012/12/20/acquittement-requis-au-proces-en revision-de-marc-machin

‱ www.lemonde.fr/europe/article/2011/10/03/proces-knox-verdict-attendu-a-perouse-pour-le-meurtre-de-meredith-kercher

‱ Investigations privĂ©es en dĂ©fense: questions de mĂ©thode et difficultĂ©s pratiques, François Saint Pierre, AJ PĂ©nal 2009, page 433,

‱ La justice pĂ©nale aux Etats Unis de Jean CĂ©dras

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Cet impĂŽt a fait couler beaucoup d’encre dans la presse. Malheureusement, au-delĂ  du parti-pris politique, nombreuses sont les analyses erronĂ©es, le dernier mot revenant toujours au droit. Ou plutĂŽt, au Conseil constitutionnel. Dans sa dĂ©cision n°2012-662 du 29 dĂ©cembre 2012, celui-ci Ă©tait amenĂ© Ă  se prononcer sur plusieurs mesures fiscales de la Loi de finances pour 2013, dont la fameuse taxe Ă  75%.

L’article 12 de ladite loi avait pour objet d’insĂ©rer un article 223 sexies A dans le CGI, afin d’instituer Ă  la charge des personnes physiques une contribution excep-

tionnelle sur la fraction de leurs revenus d’activitĂ© profession-nelle excĂ©dant un million d’euros. AjoutĂ© au taux marginal de 45%, Ă  la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de 4 % et aux prĂ©lĂšvements sociaux de 8 % sur les revenus d’acti-vitĂ©, le taux de 18 % aurait abouti Ă  une taxation globale de 75 %.

Pourquoi l’article a-t-il Ă©tĂ© censurĂ© ? Une contribution excep-tionnelle ne pouvait pas traiter diffĂ©remment deux foyers fiscaux qui disposent globalement du mĂȘme niveau de revenu. Le Conseil a donc censurĂ© l’article 12, sans examiner tous les autres griefs, notamment celui tirĂ© de son caractĂšre confis-catoire. Ainsi, le droit a tranchĂ© une question Ă©minemment politique et polĂ©mique, sans se prononcer sur le sujet dĂ©battu dans la presse.

La Constitution rĂ©serve Ă  la loi la dĂ©termination des rĂšgles concernant l’assiette, le taux et les modalitĂ©s de recouvre-ment de l’impĂŽt. Mais il y a deux principes d’égalitĂ© : devant la loi (art 6 DDHC) et devant les charges publiques (article 13). Lorsqu’il ne s’agit pas de la procĂ©dure ou de l’intelligibi-litĂ© mais de la charge mĂȘme de l’impĂŽt, c’est l’article 13 qui prĂ©vaut. L’égalitĂ© suppose une comparaisons entre les bĂ©nĂ©fi-ciaires d’une disposition et ceux qui ne le sont pas.

AprĂšs la dĂ©cision du 20 juillet 19881, on parle de l’auto inter-prĂ©tation par le Conseil de l’autoritĂ© attachĂ©e Ă  ses dĂ©cisions. Pourtant, l’instauration d’une autoritĂ© juridictionnelle attachĂ©e Ă  la dĂ©cision rendue par le Conseil est absente de la volontĂ© des rĂ©dacteurs de la Constitution. DĂ©sormais, le Conseil dĂ©ter-mine lui-mĂȘme avec prĂ©cision quelle autoritĂ© il souhaitait accorder Ă  ses dĂ©cisions et sa jurisprudence ne lui est pas

opposable. D’ailleurs, si l’autoritĂ© est attachĂ©e Ă  la dĂ©cision dans sa totalitĂ©, l’article 1350 du Code civil prĂ©voit Ă  l’inverse que « l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement Â». L’étendue de l’autoritĂ© varie en fait suivant le type de texte.

Le Conseil, lorsqu’il est saisi dans un contrĂŽle a priori, a la facultĂ© d’élargir son examen aux questions manifestes. C’est ainsi que, saisi du texte dans son entier, il doit en tirer toutes les consĂ©quences opportunes. Parfois, le Conseil s’autorise souve-rainement Ă  rĂ©examiner certaines lois dont il n’a pas Ă©tĂ© effec-tivement saisi, c’est l’examen par ricochet. Ceci sert non pas Ă  encadrer l’application d’une disposition mais d’examiner une disposition dĂ©jĂ  entrĂ©e en vigueur.

C’est ainsi que les Sages ont validĂ© la nouvelle tranche mar-ginale Ă  45 % de l'impĂŽt sur le revenu2 mais ont relevĂ© que cette augmentation avait pour consĂ©quence de porter l'imposi-tion marginale des retraites complĂ©mentaires dites « chapeau » Ă  75,04 % pour 2012. Jugeant ce niveau d'imposition excessif au regard de la facultĂ© contributive des contribuables concernĂ©s et, par suite, contraire Ă  l'Ă©galitĂ© devant les charges publiques, il a censurĂ© les dispositions de l'article L 137-11-1 du Code de la sĂ©curitĂ© sociale qui prĂ©voient l'application d’une contribution sociale de 21 % Ă  la fraction des rentes supĂ©rieures Ă  24 000 €, ramenant l’imposition Ă  68,34 %.

Le principe d’égalitĂ© devant les charges publiques en matiĂšre fiscale fait partie des principes gĂ©nĂ©raux du droit. AffirmĂ© par le Conseil d’Etat bien avant la crĂ©ation du Conseil constitu-tionnel, il exige que le mĂȘme rĂ©gime juridique soit appliquĂ© Ă  toutes les personnes qui se trouvent dans des situations identiques, mais ne s’oppose pas Ă  appliquer des disposi-tions diffĂ©rentes Ă  des personnes dans des situations diffĂ©rentes. Ceci n’est en rien obligatoire, juridiquement.

Julien NOUCHI

LA TAXE À 75% CONFISCATOIRE ? PAS SI SIMPLE !

1 n°88-244

2 art. 3 de la loi

Droit des entreprises en difficultĂ© – 5e Ă©dition – Pierre-Michel Le Corre – Collection « MĂ©mentos » - Éditions Dalloz – ISBN 9782247124336 – 232 pages – 18,50 euros

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Par un arrĂȘt du 19 fĂ©vrier 2013 (11-21.763), la Cour de cassation limite la libertĂ© des contractants en matiĂšre de gage des stocks, en retenant une application impĂ©rative du rĂ©gime spĂ©cial prĂ©vu par le Code de commerce lorsque ses conditions sont rĂ©unies.

Le gage fait l’objet de dispositions concurrentes au sein, notamment, du Code civil (articles 2333 et suivants) et du Code de commerce (articles L. 521-1 et suivants). Le

gage de droit commun prĂ©vu au Code civil Ă©tant trĂšs Ă©tendu, il semble possible de constituer un gage des stocks de droit commun. NĂ©anmoins, l’article L. 527-1 du Code de commerce Ă©tablit un rĂ©gime spĂ©cial de gage des stocks, lequel «peut» ĂȘtre contractĂ© Ă  l’occasion de « tout crĂ©dit consenti par un Ă©tablis-sement de crĂ©dit Ă  une personne morale de droit privĂ© ou Ă  une personne physique dans l’exercice de son activitĂ© profes-sionnelle Â». L’articulation entre gage des stocks du Code de commerce et gage de droit commun a fait l’objet d’interroga-tions importantes d’une partie de la doctrine Ă  l’issue de l’or-donnance du 23 mars 2006 ayant rĂ©formĂ© le droit des sĂ»retĂ©s.

Le rĂ©gime dĂ©rogatoire du Code de commerce Ă©tant plus contraignant que le droit commun du gage, et donc moins attractif pour les Ă©tablissements de crĂ©dit (notamment par son formalisme et l’interdiction du pacte commissoire), ces der-niers se sont interrogĂ©s sur la possibilitĂ© de contracter un gage de droit commun alors mĂȘme que les conditions prĂ©vues aux articles L. 527-1 et suivants du Code de commerce seraient rĂ©unies.

La cour d’appel de Paris avait, le 3 mai 2011, admis cette pos-sibilitĂ© en estimant, notamment, que l’utilisation du mot «peut» (« Tout crĂ©dit (
) peut ĂȘtre garanti par un gage sans dĂ©posses-sion des stocks ») confĂ©rait aux parties la facultĂ© de recourir soit au rĂ©gime spĂ©cial, soit au droit commun du gage, ce que l’article 2354 du Code civil n’interdisait pas formellement.

La Cour de cassation, par un arrĂȘt du 19 fĂ©vrier 2013 (11-21.763), casse et annule l’arrĂȘt rendu par la cour d’appel de Paris, au visa des articles 2333 du Code civil et L. 527-1 du Code de commerce. La cassation est particuliĂšrement sĂšche :

« s’agissant d’un gage portant sur des Ă©lĂ©ments visĂ©s Ă  l’article L. 527-3 du code de commerce, les parties, dont l’une est un Ă©tablissement de crĂ©dit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meub le s sans dĂ©possession ». La sanction pour les gages ainsi constituĂ©s est sĂ©vĂšre puisqu’ils semblent, selon nous, devoir ĂȘtre frappĂ©s de nullitĂ© en application des articles L. 527-1, 3° et L. 527-4 du Code de commerce. De nombreux auteurs s’étaient pourtant rĂ©jouis

du parti pris en 2011 par la cour d’appel de Paris1. En effet, si le principe veut que les rĂšgles spĂ©ciales priment les rĂšgles gĂ©nĂ©rales (specialia generalibus derogant), il ne vaut que lorsque le lĂ©gislateur a effectivement souhaitĂ© dĂ©roger au rĂ©gime gĂ©nĂ©ral2. En ce sens, l’interprĂ©tation de l’expression « Tout crĂ©dit (
) peut ĂȘtre garanti par un gage sans dĂ©posses-sion des stocks », et en particulier du mot « peut », est dĂ©licate en l’absence de toute prĂ©cision complĂ©mentaire. La solution de la Cour de cassation conduit Ă  estimer qu’il faut l’entendre non pas comme la facultĂ© de conclure un gage soumis, au choix des parties, au rĂ©gime gĂ©nĂ©ral ou au rĂ©gime spĂ©cial, mais plutĂŽt comme celle de conclure ou non un gage.

En l’absence d’une disposition expresse relative Ă  l’exclusi-vitĂ© du rĂ©gime spĂ©cial, on aurait nĂ©anmoins pu penser que la Cour de cassation ferait une plus grande place au principe de libertĂ© contractuelle. Tel n’est pas le cas, l’arrĂȘt consacrant ici l’exclusivitĂ© d’un rĂ©gime spĂ©cial qui ne brille que par les cri-tiques dont il a fait l’objet1.

On pourrait aussi tenter d’expliquer cette solution par la volontĂ© de protection du cocontractant de l’établissement de crĂ©dit2. En effet, l’article L. 527-2 prohibe le pacte commis-soire dans le cadre du rĂ©gime spĂ©cial. Un auteur a cependant montrĂ© l’utilitĂ© fort limitĂ©e de cette disposition3.

Dans ce cadre, il semble possible que la dĂ©cision ait Ă©tĂ© guidĂ©e par des circonstances d’opportunitĂ©. Des auteurs ont montrĂ© que laisser le choix aux parties soulĂšverait de nouveaux pro-blĂšmes4 et ne serait guĂšre cohĂ©rent avec l’existence mĂȘme d’un rĂ©gime spĂ©cial5. Dans l’attente d’une nouvelle rĂ©forme ?

Raphaël DURAND

EXCLUSIVITÉ DU RÉGIME SPÉCIAL DE GAGE DES STOCKS

POUR EN SAVOIR PLUS

‱ Voir l’article en version longue sur le site du Petit Juriste

‱ Cass.com., 19 fĂ©vrier 2013, n°11-21.763

‱ Articles 2333 et suivants du Code civil ; L. 527-1 et suivants du Code de commerce

‱ Th. de Ravel d'Esclapon, Gage des stocks : exclusivitĂ© du rĂ©gime, Dalloz actualitĂ©, 22 fĂ©vrier 2013

1 Th. de Ravel d'Esclapon, Gage des stocks : exclusivité du régime, Dalloz actualité, 22 février 2013

2 Voir, pour cet argument, P. Crocq, Gage de choses fongibles du code civil ou gage des stocks du code de commerce : le choix

est-il possible ?, RTD Civ. 2011 p. 785

3 Certains y voyant des dispositions « inutiles Â» (S. Prigent, La rĂ©forme du droit des sĂ»retĂ©s : une avancĂ©e sur la voie de la

modernisation, AJDI 2006 p. 346), d’autres un rĂ©gime « aussi superflu qu'anachronique Â» (R. Dammann, La rĂ©forme des

sûretés mobiliÚres : une occasion manquée, D. 2006 p. 1298)

4 Voir R. Dammann, op.cit.

5 P. Crocq, op. cit. : « Outre le fait que l'on se demande bien quelle peut ĂȘtre la justification de cette Ă©trange interdiction (on ne voit pas pourquoi, en effet, les dĂ©biteurs professionnels devraient ici ĂȘtre mieux protĂ©gĂ©s que des non professionnels),

cette interdiction est d'une utilité fort limitée puisqu'en cas de difficultés financiÚres, le constituant pourra bénéficier de

l'application du droit des procédures collectives»

6 Voir, Ă  cet Ă©gard, D. Legeais, Gage sur stocks, RTD Com. 2006 p. 639

7 Th. de Ravel d'Esclapon, op. cit.

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Cet article a été réalisé grùce à une interview que Monsieur le professeur François Terré a bien voulu accorder au Petit juriste.

« Le droit ne domine pas la sociĂ©tĂ©, il l'exprime Â»

Cette citation de Jean Cruet dĂ©peint parfaitement l’origine du droit vu comme un fait social. La sociologie juridique trouve tout son intĂ©rĂȘt dans ce dernier car elle donne un Ă©clairage complĂ©mentaire qui permet de sonder l’état d’esprit de la population pour dĂ©gager une certaine conjoncture (politique, idĂ©ologique, morale). Pour Denys de BĂ©chillon, le droit « est fondamentalement adaptĂ© Ă  un certain Ă©tat actuel, des choses, des problĂšmes, des rapports de force et des idĂ©es1 » ; le droit a une propriĂ©tĂ© « rĂ©flĂ©chissante Â».

Cette matiĂšre s’est dĂ©veloppĂ©e au cours du XXĂšme siĂšcle sous l’influence de certains grands auteurs tel que Max Weber, Jean Carbonnier ou encore Henri Battifol. Elle vise Ă  appliquer la mĂ©thode sociologique d’analyse au phĂ©nomĂšne juridique. Le professeur TerrĂ© prĂ©cise qu’il s’agit de s’intĂ©resser Ă  l’appli-cation des rĂšgles de droit au sein d’un Etat : on est dans une analyse qui vise Ă  considĂ©rer les faits juridiques comme des « choses Â», suivant l’expression de Durkheim.

Concernant ses sources, la sociologie du droit ne saurait s’in-tĂ©resser uniquement Ă  la loi, au sens lĂ©gislatif du terme, car cette derniĂšre ne constitue qu’un exemple parmi l’ensemble des sources du droit. La jurisprudence ou les diffĂ©rents travaux d’interprĂ©tation du droit constituent aussi, par cette approche, des normes juridiques : chaque application d’une rĂšgle de droit participe Ă  l’édification du Droit. D’ailleurs, comme le soulignait le professeur François TerrĂ© dans Le juriste et le politique, tout juriste contribue Ă  la formation du droit que se soit l’étudiant ou encore le juge. En effet, pour le profes-seur, « toutes ces donnĂ©es ne sont pas indiffĂ©rentes Ă  la com-prĂ©hension du phĂ©nomĂšne juridique ne serait-ce que par la transmission du savoir. Â» Les comportements des particuliers sont une donnĂ©es constitutive du droit : la preuve en est avec la coutume qui peut constituer une source du droit mais sous certaines conditions.

Le droit se prĂȘte donc parfaitement Ă  l’observation sociolo-gique puisqu’il extĂ©riorise en raison de sa nature mĂȘme son propre objet d’analyse. Toutefois, comme le souligne Monsieur TerrĂ©, le droit ne se ramĂšne pas toujours Ă  une manifestation d’une pratique car on a Ă©galement le fait juridique et il ne faut jamais oublier que « le droit se nourrit aussi du fait : il y a une combinaison de l’ĂȘtre et du devoir ĂȘtre qui font que le droit, au fond, est toujours quelque chose d’inachevĂ©. Â»

Les mĂ©thodes d’analyse de la sociologie juridique

Les mĂ©thodes d’analyse de la sociologie juridique sont les mĂȘmes que celles employĂ©es par la sociologie gĂ©nĂ©rale. On peut saisir les faits sociaux par le biais d’enquĂȘtes d’opinions, de statistiques, par le biais d’études comparĂ©es


Prenons l’exemple de l’euthanasie. Cette derniĂšre a fait l’objet d’un rapport remis par le professeur Sicard au PrĂ©sident de la RĂ©publique le mardi 18 dĂ©cembre 2012. En analysant cette question sous l’angle sociologique, le professeur François

TerrĂ© invite Ă  s’interroger sur la place de la sanction : ne vaut-il pas mieux maintenir certains barrages quitte Ă  ĂȘtre souple dans l’application des rĂšgles ? La loi actuelle, Ă  savoir la loi Leonetti du 22 avril 2005, serait satisfaisante puisqu’elle assure l’équilibre difficile entre le fait qu’on ne peut donner la mort Ă  quelqu’un et le fait qu’il y ait des situations extrĂȘmes dans lesquelles on devrait permettre aux mĂ©decins de faciliter le dĂ©cĂšs du patient. Il faut donc distinguer, peut ĂȘtre, la rĂšgle de la pratique : la pratique coexiste d’apparence avec une rĂšgle contraignante.

Au final, la sociologie a encore beaucoup Ă  faire en France pour acquĂ©rir son droit de citĂ©. Il suffit pour cela de citer l’exemple de la jurisprudence. En effet, pour beaucoup, la pratique est constituĂ©e de dĂ©cision de justice : une dĂ©cision de justice est liĂ©e Ă  une contestation d’un droit. Or, le droit ne se ramĂšne pas seulement Ă  des procĂšs et, finalement, on connaĂźt trĂšs mal l’ensemble des hypothĂšses oĂč le droit s’applique de maniĂšre spontanĂ©e.

Guillaume Martin

SOCIOLOGIE DU DROIT

1 La valeur anthropologique du droit, ElĂ©ments pour reprendre un problĂšme Ă  l’envers, RTD Civ. 1995 p.835

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Max Weber, 1864 - 1920

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« Les dĂ©bats sur le projet de loi relatif au mariage pour tous tirent Ă  leur fin, il est donc temps de penser au prochain chantier du droit civil auquel le ministĂšre de la Justice va s’atteler Â» (Laurent Neyret), Ă  savoir la rĂ©forme du droit des obligations. Plusieurs projets de rĂ©forme se sont intĂ©ressĂ©s Ă  la modernisation du droit civil français tant au niveau du droit des contrats qu’au niveau de la responsabilitĂ© civile : le projet Catala (2004), le projet de la Chancellerie (2008) et le projet du groupe de travail du Professeur TerrĂ©. Le Petit juriste a profitĂ© de l’occasion pour poser directement quelques questions Ă  Monsieur TerrĂ©.

LPJ- Pourquoi rĂ©former le droit des obligations ?

François TerrĂ© : Le droit des obligations est vĂ©tuste puisque certains textes datent de 1804. Il est donc nĂ©cessaire que la France rattrape les autres pays europĂ©ens qui ont dĂ©jĂ  menĂ© ce type de rĂ©forme. L’influence du droit français en matiĂšre contractuelle a vraiment diminuĂ©. Il faut que le droit français se retrouve de nouveau au rendez-vous des siĂšcles.

LPJ- OĂč en ĂȘtes vous dans vos travaux de rĂ©forme ?

F.T : il faut distinguer trois volets.remise de l’avant projet de rĂ©forme du droit des contrats (1/12/2008)Remise de l’avant projet de rĂ©forme du droit de la responsa-bilitĂ© (mai 2011)Remise de l’avant projet de rĂ©forme du rĂ©gime gĂ©nĂ©ral des obligations (7 janvier 2011)

LPJ – Comment articuler le droit commun des contrats avec le droit spĂ©cial qui est Ă©clatĂ© dans plusieurs codes ?

F.T : Il faut rĂ©cupĂ©rer dans le droit commun des contrats des principes qui ont Ă©tĂ© Ă©parpillĂ©s et qui mĂ©ritent d’y ĂȘtre inclus. Le code civil doit rester le centre nĂ©vralgique du droit des obli-gations : le droit commun des contrats est au centre du phĂ©-nomĂšne contractuel et sa rĂ©forme va impacter le droit des affaires, le droit de l’environnement en passant... Le droit commun des contrats doit vraiment saisir la dimension Ă©co-nomique des rapports contractuels Ă©tant donnĂ© que la distinc-tion ancienne du droit civil et du droit commercial est devenue obsolĂšte.

LPJ - Quel est le sort réservé à la cause ?

F.T : Ce concept rempli trois fonctions principales : acte illi-cite, moralisation de l’acte et l’existence contrepartie. Or, ces trois fonctions ont Ă©tĂ© entendues de maniĂšre diffĂ©rente quant Ă  l’utilisation du concept de cause du fait que la Cour de cas-sation a souvent adoptĂ© des interprĂ©tations flottantes en la matiĂšre. Il est donc temps de « tuer Â» le concept de cause. Tous les autres pays ont supprimĂ© cette notion, la France doit en faire de mĂȘme. NĂ©anmoins, on conserve les trois fonctions de la cause mais pour les dĂ©signer on n’utilisera plus les mĂȘmes vocables. En effet, on parlera de l’ Â« objet de l’obligation Â» quant il s’agira de moraliser l’acte ; on parlera quand il s’agit de la cause illicite du « but du contrat Â» et dans le troisiĂšme cas on ne parlera plus de rien : si l’objet n’a pas une contre-partie l’obligation est nulle.

LPJ â€“ Concernant le droit de la responsabilitĂ© civile, que faut-il retenir de votre projet de rĂ©forme ?

F.T : L’idĂ©e de maintenir le fondement de l’existence de la faute n’est pas contestable. Dans nos propositions, on souhaite abandonner la dĂ©marche initiale consistant Ă  s’interroger sur les Ă©lĂ©ments constitutifs du comportement dĂ©lictueux : choses, autrui... Il faut opĂ©rer une division plus claire entre le prĂ©ju-dice corporel avec les consĂ©quences pouvant ĂȘtre liĂ©s Ă  celui-ci (prix de la douleur, perte d’une chance
) et le dommage matĂ©riel. Ce dernier appelle un amĂ©nagement gĂ©nĂ©ral et notamment avec l’article 1384 du Code civil : c’est avec la vision d’un prĂ©judice matĂ©riel qu’il faut repenser l’ensemble car celui-ci doit ĂȘtre restreint. Il faut rĂ©flĂ©chir non plus Ă  partir du fait gĂ©nĂ©rateur mais Ă  partir du prĂ©judice puisqu’il est nĂ©cessaire de rĂ©duire l’ampleur de la rĂ©paration. Concernant le rĂ©gime des produits dĂ©fectueux, celui-ci restera tel qu’il est actuellement.

Il convient aussi de noter qu’une autre rĂ©forme est en cours de discussion au SĂ©nat : le 28 fĂ©vrier 2013, les sĂ©nateurs devraient aussi se pencher sur la proposition de loi Retailleau destinĂ©e Ă  intĂ©grer le prĂ©judice Ă©cologique dans le Code civil. Affaire Ă  suivre !

ACTUALITÉ SUR LES RÉFORMES DU DROIT DES OBLIGATIONS

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Malgré une forte hétérogénéité des dix Etats Membres en matiÚre de développement (taille de marché, PIB par habitant et dynamique de croissance) et cer-

taines critiques vis-Ă -vis de son mode de fonctionnement souple et inefficace, l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a nĂ©anmoins rĂ©ussi Ă  attirer l’attention de la communautĂ© internationale grĂące Ă  ses perspectives de crois-sance extrĂȘmement attrayantes (le PIB estimĂ© par le FMI Ă  1800 milliards USD en 2010 – soit 70% du PIB français et la croissance estimĂ©e en moyenne Ă  6 % pour les annĂ©es Ă  venir).

A l’heure actuelle, L’ASEAN est en train de nĂ©gocier le cadre du « partenariat Ă©conomique intĂ©gral rĂ©gional Â» (RCEP) qui est un projet de crĂ©ation de la plus importante zone de libre-Ă©change au monde. Il regroupe les dix Etats Membres de l’ASEAN et leurs six partenaires commerciaux, Ă  savoir la Chine, le Japon, la CorĂ©e du Sud, l’Inde, l’Australie et la Nouvelle-ZĂ©lande, formant ainsi un marchĂ© unique de plus de 3 milliards d’habitants et de 19,780 milliards de dollars de PIB (environ 1/3 du PIB mondial). Ce projet couvre huit domaines de nĂ©gociation : commerce de marchandises, commerce de service, investissement, coo-pĂ©ration Ă©conomique et technique, droit de propriĂ©tĂ©, rĂšgle-ment des diffĂ©rends et autres questions. C’est un autre exemple concret d’ALE qui confirme la tendance actuelle du phĂ©nomĂšne de rĂ©gionalisme en expansion. Juridiquement, l’existence de RCEP doit satisfaire aux exi-gences de l’article XXIV du GATT en matiĂšre d’unions doua-niĂšres et de zones de libre-Ă©change. Quant au contenu, il serait prudent pour l’ASEAN de nĂ©gocier le RCEP en restant proche du langage des Accords de l’OMC. Parfois, le renvoi pur et simple aux Accords de l’OMC permettrait d’éviter toute difficultĂ© relative Ă  l’application des dispositions ou Ă  l’interprĂ©tation des termes techniques utilisĂ©s. Au contraire, si l’ASEAN, groupement de pays en dĂ©veloppement (PED), cherche Ă  nĂ©gocier avec ses partenaires commerciaux au-delĂ  des rĂšgles de l’OMC, il risquerait de ne pas pouvoir jouir

pleinement des avantages gĂ©nĂ©rĂ©s par le RCEP. La meilleure solution pour l’ASEAN serait d’avoir un modĂšle unifiĂ© d’ALE pouvant servir de base de nĂ©gociation pour cet ALE et pour les futurs ALEs. L’ASEAN a un pari Ă  gagner : rendre le RCEP attrayant pour les participants et pour les futurs partenaires commerciaux de l’extĂ©rieur. Ainsi, les parties concernĂ©es devront s’accorder mutuellement sur des engagements de libĂ©ralisation plus poussĂ©s que ce qui existe dĂ©jĂ  dans le cadre de diffĂ©rents ALEs pour pouvoir concurrencer avec l’Accord de Partenariat Trans-Pacifique et l’Accord de coopĂ©ration Ă©conomique tri-partie Chine-CorĂ©e du Sud-Japon qui sont Ă©galement en cours de nĂ©gociation. Concernant la facilitation des Ă©changes, par exemple, le seuil de rĂ©duction tarifaire des produits dans le cadre de RCEP devra s’effectuer Ă  au moins 95% aprĂšs la pĂ©riode de tran-sition prĂ©vue. L’approche de concession commune devra ĂȘtre favorisĂ©e pour rendre l’accord clair et facile Ă  comprendre aux utilisateurs, cela en excluant Ă©galement des listes de multiples concessions bilatĂ©rales entre Membres. Ce projet serait une opportunitĂ© pour l’ASEAN d’augmenter son pouvoir de nĂ©gociation afin d’atteindre des rĂ©sultats plus satisfaisants qu’au niveau bilatĂ©ral (Ă  travers les ALEs exis-tants). L’ASEAN pourra en profiter pour affirmer son principe de « centralitĂ© » en exerçant une influence sur les politiques d’ALE de ses partenaires commerciaux et se positionner en tant que « partie Ă©gale Â» des nĂ©gociations. Ainsi, une Ă©quipe de nĂ©gociateurs composĂ©e de juristes ayant une solide connaissance en droit de l’OMC est plus que nĂ©ces-saire, notamment pour s’assurer que le contenu du RCEP ne s’écarte pas dĂ©raisonnablement des Accords de l’OMC et que les obligations trop lourdes soient imposĂ©es aux PED. EspĂ©rons que l’entrĂ©e en vigueur du RCEP entraĂźnera une harmonisa-tion – ou du moins une convergence – de rĂšgles commerciales qui contribuerait Ă  promouvoir un systĂšme commercial juste et Ă©quitable et Ă  remĂ©dier efficacement Ă  la situation d’enchevĂȘ-trement des rĂ©gimes juridiques – le « bol de spaghetti Â» – dans les diffĂ©rents ALEs existants dans la rĂ©gion.

Thitirat WONGKAEW

ASEAN ET RCEP UN AUTRE ACCORD DE LIBRE ÉCHANGE TROP AMBITIEUX ?

Les membres de l'ASEAN

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POUR EN SAVOIR PLUS

‱ L’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a Ă©tĂ© fondĂ©e en 1967 par la DĂ©claration de Bangkok. Il s’agit d’une organisation rĂ©gionale regroupant actuellement dix pays de la rĂ©gion, Ă  savoir la ThaĂŻlande, l’IndonĂ©sie, la Malaisie, les Philippines, le Singapour, le Brunei, le Vietnam, le Laos, le Myanmar et le Cambodge.

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Le Dossier du Moisen partenariat avec

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AprĂšs 110 heures de discussion Ă  l’AssemblĂ©e nationale, le texte sur « le mariage pour tous » devient l’un des plus dĂ©battus de la Ve RĂ©publique. Le projet, portĂ© par la Garde de Sceaux Christiane Taubira, a Ă©tĂ© largement soutenu par le gouvernement et la majoritĂ© des dĂ©putĂ©s : il consiste Ă  permettre aux couples de mĂȘme sexe de se marier et de recourir Ă  l’adoption. Le mariage pour tous modifie donc deux rĂ©gimes piliers du droit de la famille, Ă  savoir le mariage et la filiation.

Le mariage est Ă©tendu aux couples de mĂȘme sexe, le PACS ne rĂ©pondant plus, selon les rĂ©dacteurs du projet, Ă  l’évo-lution de notre sociĂ©tĂ©. Dans un souci d’égalitĂ©, l’accĂšs

au mariage et aux consĂ©quences juridiques qui en dĂ©coulent est alors ouvert Ă  tous.Jusqu’à aujourd’hui, il Ă©tait impossible, d’établir un lien de filiation entre un enfant et le partenaire de son parent, celui-ci n’ayant alors aucun droit relatif Ă  l’enfant.. Par ailleurs, de nombreuses difficultĂ©s sont engendrĂ©es par des situations crĂ©Ă©es Ă  l’étranger. Des couples ne pouvant avoir d’enfants, quelle que soit leur orientation sexuelle, ayant recours Ă  la PMA ou Ă  l’adoption dans un autre pays, sont confrontĂ©s lors de leur retour en France Ă  l’impossibilitĂ© de faire reconnaĂźtre leur lien de parentĂ©. Ainsi, afin de pallier ces difficultĂ©s juridiques, il convient de prĂ©senter les apports de cette rĂ©forme dans les relations entre les Ă©poux, dans leur lien avec leurs enfants et enfin dans leurs rapports envers les tiers.

Les rapports entre les Ă©poux

En l’état actuel du projet, l’adoption de la loi « ouvrant le mariage aux couples de personnes de mĂȘme sexe Â» pourrait se rĂ©sumer, pour ses consĂ©quences dans les rapports entre les Ă©poux, Ă  ce que prĂ©voit l’article 1er du projet1 : un nouvel article sera insĂ©rĂ© et il ouvrira le mariage Ă  tous les couples : « le mariage est contractĂ© par deux personnes de sexe diffĂ©-rent ou de mĂȘme sexe Â»., le projet de loi ne modifie donc pas

le rĂ©gime juridique actuel du mariage2. ainsi que l’étude d’im-pact l’expose clairement. Le rĂ©el changement se situe dans les consĂ©quences juridiques induites par cette modification.L’extension de l’institution du mariage Ă  une nouvelle situation — celle oĂč le couple est formĂ© de personnes du mĂȘme sexe — permet de donner Ă  ces couples l’accĂšs au mĂȘme rĂ©gime juri-dique qu’à ceux de sexes diffĂ©rents.

Dans le cadre du PACS, pour tous les couples les choix d’orga-nisation des rapports Ă©conomiques au sein du couple Ă©taient limitĂ©s, puisque les partenaires ne disposaient que de la sĂ©pa-ration de biens (art. 515-5 du C. civ., rĂ©gime de principe) ou de l’indivision (art. 515-5-1, rĂ©gime subsidiaire au fonction-nement complexe). Les couples homosexuels auront dĂ©sor-

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OIS mais un choix bien plus large : en particulier, le rĂ©gime de la

communautĂ© lĂ©gale (art. 1400 et suivants). Ce rĂ©gime associe alors chaque Ă©poux Ă  l’enrichissement de l’autre, mais les dettes de l’un devront aussi ĂȘtre supportĂ©es par l’autre Ă©poux. Il faut cependant nuancer les effets de cette extension, car l’évolution du PACS a dĂ©jĂ  partiellement rendu applicables certains mĂ©canismes de la communautĂ©, comme celui des rĂ©compenses pour le calcul des crĂ©ances entre partenaires lors de la liquidation du pacte (art. 515-17 in fine) ou celui du maintien du conjoint survivant dans le logement pendant une annĂ©e aprĂšs le dĂ©cĂšs (art. 515-6, al. 3).

En revanche, l’application du rĂ©gime primaire impĂ©ratif amĂ©-liore sensiblement la protection des Ă©poux : le logement de famille, ne peut plus ĂȘtre cĂ©dĂ© par son seul propriĂ©taire (art. 215), la co-titularitĂ© du bail d’habitation est applicable (art. 1751) et les rĂ©gimes de sauvegarde judiciaires (art. 217 et 220-1) offrent des moyens aisĂ©s pour protĂ©ger le mĂ©nage, lorsque l’un des conjoints le met en danger.Les couples de personnes du mĂȘme sexe bĂ©nĂ©ficieront Ă©ga-lement de l’évolution rĂ©cente du statut du conjoint survivant dans la succession du prĂ©dĂ©cĂ©dĂ©. LĂ  oĂč le PACS ne prĂ©voyait aucune disposition d’ordre successoral, ce qui signifiait que les partenaires pouvaient seulement se dĂ©signer mutuellement comme lĂ©gataires, universels ou Ă  titre universels — avec toutes les insuffisances de ce statut, notamment en prĂ©sence d’hĂ©ritiers rĂ©servataires, le mariage donne au contraire, impĂ©-rativement, une vocation successorale au conjoint survivant, dont le contenu varie en fonction des situations (notamment la prĂ©sence d’autres hĂ©ritiers, comme des descendants ou des ascendants). Ainsi, dans les couples homosexuels mariĂ©s, le

conjoint survivant est assurĂ© de recueillir une part, en usu-fruit ou en propriĂ©tĂ©, de la succession du dĂ©funt (art. 756 et suivants). Il convient en revanche de noter que, depuis 2007, l’époux, comme le partenaire pacsĂ©, Ă©tait exonĂ©rĂ© des droits de mutation lors de la succession du conjoint prĂ©dĂ©cĂ©dĂ© (art. 796-0 bis du CGI), donc sur le plan uniquement fiscal, l’ou-verture du mariage aux couples homosexuels n’a aucune incidence.

En matiÚre de droits extrapatrimoniaux, là encore la loi ne bouleverse pas le régime du mariage, mais renforce sensible-ment les droits et devoirs pour chaque membre du couple. Le devoir de fidélité, notamment, absent du PACS, sera pleine-ment applicable (art. 212 C. civ.). Les obligations familiales de

l’article 213, concernant la « direction morale et matĂ©rielle de la famille et « l’éducation des enfants Â», absentes du rĂ©gime du PACS, concerneront Ă  l’avenir les couples de personnes du mĂȘme sexe. En revanche, le devoir de vie commune, qui est l’un des fondementaux du mariage, existait dĂ©jĂ  dans le PACS (art. 515-4 C. civ.), tout comme un devoir d’aide matĂ©rielle, semblable Ă  la contribution aux charges du mariage, et une « assistance Â» surtout morale.Si l’enjeu majeur de la rĂ©forme se situe dans les rapports entre les Ă©poux eux-mĂȘmes, les relations entre les Ă©poux et leurs enfants sont l’objet de modifications consĂ©quentes.3

Rapport entre Ă©poux et enfants4

Le rĂ©gime actuel, qui gouverne les relations entre les Ă©poux et leurs enfants est conservĂ© mais il sera adaptĂ© aux nouvelles situations : l’expression « pĂšre et mĂšre Â», prĂ©sente actuellement dans plus de cinquante articles du Code civil, sera remplacĂ©e par le mot « parents Â». Par ailleurs, la nĂ©cessitĂ© d’un nouveau modĂšle de livret de famille adaptĂ© aux couples mariĂ©s de mĂȘme sexe est affirmĂ©e par l’étude d’impact du projet de loi. S’il a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ© que la rĂ©forme « n’apporte aucune modi-fication aux dispositions relatives Ă  la filiation5 Ă©tablie par l’effet de la loi Â» son effet principal, en matiĂšre d’adoption, est d’ouvrir les dispositions de droit commun aux couples mariĂ©s de mĂȘme sexe. Il en rĂ©sulte que tous les couples jouissent des mĂȘmes droits, tant en matiĂšre d’adoption conjointe que d’adoption de l’enfant d’un des conjoints. Aussi, le Conseil

supĂ©rieur de l’adoption a Ă©tĂ© saisi, en vertu de l’article L. 148-1 du Code de l’action sociale et des familles, afin de donner son avis sur les modifications entreprises par le projet de loi. L’organe n’a pas manquĂ© de rappeler la Â« nĂ©cessitĂ© de transparence et de vĂ©ritĂ© envers l’enfant Â» adoptĂ©.

Il convient de distinguer adoption simple et adoption plĂ©niĂšre. Alors que l’adoption simple d’un enfant du conjoint n’a pas pour effet d’attribuer l’autoritĂ© parentale Ă  l’adoptant, l’adop-tion plĂ©niĂšre confĂšre l’autoritĂ© parentale exclusivement et intĂ©-gralement aux parents adoptifs. Avant la rĂ©forme, alors qu’un des conjoints du couple homosexuel avait pu donner naissance Ă  un enfant, cet enfant n’était rattachĂ© juridiquement qu’à la femme ayant accouchĂ©, cette derniĂšre Ă©tant seule considĂ©rĂ©e comme sa mĂšre. DĂ©sormais, le conjoint de mĂȘme sexe pourra

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OISrecourir Ă  l’adoption simple de l’enfant, alors mĂȘme qu’il n’est

pas son procrĂ©ateur initial. Les rĂšgles de dĂ©volution du nom de famille sont quant Ă  elles modifiĂ©espour tous les couples mariĂ©s, hĂ©tĂ©rosexuels ou homo-sexuels. Le chapitre II du projet de loi constituĂ© des dispositions relatives Ă  l’adoption et au nom de famille, modifie l’article 357 du code civil qui dispose dĂ©sormais qu’en cas d’adop-tion de l’enfant d’un conjoint ou d’une adoption par les deux Ă©poux, c’est via une dĂ©claration conjointe que les adoptants choisiront le nom de l’enfant. En cas d’adoption simple, l’ar-ticle 363 dispose qu’en cas d’adoption par deux Ă©poux, « le nom ajoutĂ© Ă  celui de l'adoptĂ© est, Ă  la demande des adop-tants, celui de l'un d'eux Â». En cas de dĂ©saccord ou d’absence de choix des parents, les noms de chacun d’eux, accolĂ©s dans l’ordre alphabĂ©tique sont retenus.

La question de la procrĂ©ation, si elle semble sensible n’a pas Ă©tĂ© prĂ©cisĂ©ment Ă©tudiĂ©e par cette loi. Ainsi, si la procrĂ©ation

médicalement assistée (PMA) concernant les femmes mariées homosexuelles a été proposée par les amendements des députés écologistes et communistes, elle a été rejetée, mais le débat est toujours ouvert.

Quant aux conventions de mĂšre porteuse, elles sont interdites en droit français, en vertu du principe d’indisponibilitĂ© du corps humain et de l’état des personnes (article 16-1 alinĂ©a 3 C.civ). C’est par un arrĂȘt du 31 mai 1991 que l’AssemblĂ©e plĂ©niĂšre de la Cour de cassation a entĂ©rinĂ© la prohibition de la gestation pour autrui (GPA), suivie par le lĂ©gislateur en 1994 avec l’adoption de l’article 16-7 du Code civil, qui dispose que « toute convention portant sur la procrĂ©ation ou la ges-tation pour le compte d’autrui est nulle». Toutefois, la rĂ©cente publication de la circulaire dite « Taubira Â» visant Ă  faciliter l’acquisition de la nationalitĂ© française pour les enfants nĂ©s Ă  l’étranger par GPA indique une possible modification lĂ©gisla-tive dans ce domaine.

Ainsi, si la rĂ©forme va venir modifier en profondeur les rela-tions entre les Ă©poux, leurs relations avec leurs enfants ; Ă  moindre mesure, les relations entre les tiers et les Ă©poux seront Ă©galement touchĂ©es par la rĂ©forme.

Les rapports entre les Ă©poux et les tiers

Le projet de loi adoptĂ© le 12 fĂ©vrier dernier entraine des modi-fications dans les relations entre couples homosexuels mariĂ©s et tiers, en ce qui concerne les obligations, mais essentielle-ment au regard des droits. Quant aux obligations, peu de changements sont Ă  relever. En effet, les rĂ©formes du PACS avaient conduit, en amont, Ă  harmoniser le rĂ©gime fiscal des partenaires pacsĂ©s sur celui des Ă©poux : la loi « TEPA Â»6 permet aux pacsĂ©s, comme aux Ă©poux, de remplir une dĂ©cla-

ration commune d’impĂŽt sur le revenu; la loi de finance du 29 dĂ©cembre 2010 a confirmĂ© cette Ă©volution Ă©tablissant une stricte concordance entre Ă©poux et partenaires pacsĂ©s pour toutes les rĂšgles relatives Ă  l’impĂŽt sur le revenu7. Aussi, par-tenaires pacsĂ©s et Ă©poux bĂ©nĂ©ficient d’une exonĂ©ration des successions entre eux et d’un abattement en cas de donation8. Au-delĂ  du rĂ©gime fiscal, le Code civil prĂ©voit pour les Ă©poux et les partenaires pacsĂ©s, une obligation solidaire pour les dettes mĂ©nagĂšres9 ; des exceptions identiques Ă  cette obliga-tion, en cas de dĂ©penses manifestement excessives et pour les achats Ă  tempĂ©rament et emprunts, sauf si ces derniers portent sur des sommes nĂ©cessaires aux besoins de la vie courante (ces exceptions ne sont admises, pour le PACS, que depuis la loi du 1er juillet 2010).

Ce n’est finalement que sur l’obligation alimentaire envers les beaux-parents que l’ouverture du mariage aux couples homosexuels aura un impact en matiùre d’obligations vis-à-

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OIS vis des tiers. Alors que les couples homosexuels unis par un

PACS n’ont pas d’obligation alimentaire envers les parents de leur compagne ou compagnon, l’article 206 du Code civil impose aux Ă©poux une obligation alimentaire envers leurs beaux-parents, tant que « l’époux qui produisait l’affinitĂ© et les enfants issus de l’union avec l’autre Ă©poux Â» ne sont pas dĂ©cĂ©dĂ©s.

Du point de vue des droits Ă  l’égard des tiers, en revanche, l’ouverture du mariage aux homosexuels peut modifier plus significativement leur situation. Sans modifier le rĂ©gime actuel, le fait d’autoriser les couples de mĂȘme sexe Ă  se marier leur permettra de bĂ©nĂ©ficier de l’article 1751 du Code civil, qui

instaure une co-titularitĂ© du bail d’habitation entre les Ă©poux. Aussi, au dĂ©cĂšs de l’un des conjoints, l’autre pourra bĂ©nĂ©ficier d’une pension de rĂ©version10, ou d’une allocation veuvage, ce qui est aujourd’hui refusĂ© aux partenaires pacsĂ©s.

A la reconnaissance de ces droits substantiels, viennent s’ajouter des moyens d’assurer la conclusion et la recon-naissance des mariages homosexuels. Alors que l’opposition demandait l’insertion, dans le projet de loi, d’une « clause de conscience Â» permettant aux maires de refuser de conclure ces mariages, l’article 1 bis A du projet propose de rajouter un article 34-1 dans le Code civil, pour rappeler que les offi-ciers d’état civil doivent exercer leurs fonctions sous le contrĂŽle du Procureur de la RĂ©publique : tout refus d’appliquer les lois de la RĂ©publique est rĂ©primĂ© par des sanctions pĂ©nales et administratives, car les agents collaborant Ă  un service public sont soumis Ă  un devoir de stricte neutralitĂ©11. Par ail-leurs, la reconnaissance du mariage homosexuel n’aura pas de consĂ©quences sur les termes des actes d’état civil, et des livrets de famille pour les couples hĂ©tĂ©rosexuels ; ils devraient en revanche ĂȘtre adaptĂ©s pour les couples de mĂȘme sexe12, pour supprimer les distinctions de sexe.

Enfin, des dispositions de droit international privĂ© ont aussi Ă©tĂ© insĂ©rĂ©es13 pour prĂ©voir une dĂ©rogation au principe actuel des rĂšgles de conflit, afin de permettre Ă  deux personnes de mĂȘme sexe de se marier en France, si l’une est française ou rĂ©side en France, alors que la loi nationale de l’autre prohibe le mariage homosexuel. Actuellement, la France n’est pas seule Ă  opĂ©rer une transfor-mation du mariage. Le 5 fĂ©vrier dernier, les dĂ©putĂ©s britan-niques ont, Ă  une trĂšs large majoritĂ©, adoptĂ© une loi donnant accĂšs aux couples de mĂȘme sexe au mariage.

En la matiĂšre, l’harmonisation europĂ©enne semble donc plus que jamais en marche puisque la Grande-Bretagne vient rejoindre les pays autorisant ce type d’union tels que la Belgique, les Pays-Bas, l’Espagne ou encore le Portugal. Si

l’examen prochain du projet de loi par le SĂ©nat, dont la date a Ă©tĂ© fixĂ©e au 4 avril 2013, rapproche inĂ©vitablement la France de ses voisins, le dĂ©bat est toujours vif.

Des discussions houleuses ont montrĂ© Ă  quel point la question divise. L’opposition ne fera sans doute pas l’économie d’un examen de constitutionnalitĂ© de la loi S’il a pu sembler que le Conseil Constitutionnel a avalisĂ© la suppression de la condi-tion d’altĂ©ritĂ© des sexes14, selon certains auteurs, il ne s’agis-sait nullement d’un blanc-seing assurant aux reprĂ©sentants du peuple, une conformitĂ© d’office Ă  la constitution, mais simple-ment une sorte de rappel du domaine de la loi15.

Ces mĂȘmes auteurs affirment que la condition d’altĂ©ritĂ© sexuelle des Ă©poux et le caractĂšre hĂ©tĂ©rosexuĂ© de la filiation figurent parmi les principes fondamentaux reconnus par les lois de la RĂ©publique (PFRLR)16. DĂšs les annĂ©es 1980, l'Ă©minent Doyen Carbonnier, n’excluait pas que certaines dispositions du code civil puisse acquĂ©rir une telle valeur constitution-nelle17. Les PFRLR Ă©voquĂ©s par le prĂ©ambule de la Constitution de 194618 doivent rĂ©pondre Ă  trois conditions cumulatives : Ă©noncer une rĂšgle suffisamment importante et gĂ©nĂ©rale ; se trouver dans une base textuelle Ă©manant d’un rĂ©gime rĂ©publi-cain antĂ©rieur Ă  1946 ; faire l’objet d’une application continue et sans dĂ©rogation jusqu’à cette date. Qu’en penseront les Sages de la rue de Montpensier ?

AnaĂŻs CHARRETEUR, Manel CHIBANE, Anis FAYED, Nathalie JARRY, SĂ©bastien JARRY,

Guillaume MARTIN, Audrey MOST

1 http://www.lemonde.fr/mariage-pour-tous/ : actualité sur la réforme

2 http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPreparation.do;jsessionid=25F572494042337E2AEB44FC1781C9FC.tpdjo17v_3?idDocument=JORFDOLE000026587592&type=contenu&id=2 : projet de loi

3 http://www.assemblee-nationale.fr/14/projets/pl0344-ei.asp : Ă©tude d’impact

4 http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPreparation.do;jsessionid=25F572494042337E2AEB44FC1781C9FC.tpdjo17v_3?idDocument=JORFDOLE000026587592&type=expose : Exposé des motifs

5 http://www.asmp.fr/travaux/avis/2013_mariage_de_meme_sexe.htm : pour aller plus loin, avis des acadĂ©miciens – Remarque 4

6 prĂ©cĂ©dente – Remarque 3

7 Loi n° 2007-1223 du 21 aout 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat

8 Art 7 du Code général des impÎts

9 Art 790 F du Code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts

10 Art. 220 et 515-4 du Code civil

11 Le refus du bĂ©nĂ©fice d’une pension de rĂ©version au partenaire pacsĂ© survivant a, par ailleurs, Ă©tĂ© jugĂ© non contraire au principe constitutionnel d’égalitĂ© de tous devant la loi (C. constit. N° 2011-155 QPC du 29 juillet 2011)

12 CE, 3 mai 1950, Jamet

13 Avis de Mme Marie-Françoise Clergeau au nom de la commission des Affaires sociales, n° 581

14 Article 1er du projet de loi

15 Cons. Const. décision du 28 janvier 2011 n°2010-92 QPC.

16 En ce sens, François-Xavier Bréchot, La constitutionnalité du mariage pour tous en question, in JCP 2012, doctr. 1388.

17 En ce sens, P. Delvolvé, Mariage : un homme, une femme : Le Figaro, 8 novembre 2012 p.17.

18 J. Carbonnier, « Le Code civil Â», in Les Lieux de mĂ©moire, t. II : « La Nation Â», P. Nora dir., Gallimard, 1986

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Le 11 janvier 2013, a Ă©tĂ© signĂ© « l’accord national interprofessionnel pour un nouveau modĂšle Ă©conomique et social au service de la compĂ©titivitĂ© des entreprises et de la sĂ©curisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariĂ©s ». Cet accord propose une sĂ©rie de mesures visant Ă  amĂ©liorer la sĂ©curitĂ© et la flexibilitĂ© de l’emploi.

Cet accord est le fruit des négociations ayant réuni orga-nisations syndicales et patronales au niveau interpro-fessionnel durant trois mois. Il se subdivise en 5 titres.

Cet article a pour but de prĂ©senter les mesures essentielles proposĂ©es par l’accord, et non pas d’en dresser une liste exhaustive.Il faut souligner cependant que les propositions contenues dans l’accord ne sont pas applicables tant qu’elles n’ont pas Ă©tĂ© transposĂ©es dans une loi. Un avant-projet de loi reprenant un certain nombre de mesures Ă©noncĂ©es par l’accord a d’ores et dĂ©jĂ  Ă©tĂ© proposĂ© par le gouvernement le 11 fĂ©vrier 2013, et sera prochainement soumis au Conseil des ministres. Les dĂ©bats parlementaires amĂšneront sans doute Ă©galement Ă  des modifications ou adaptations des mesures proposĂ©es.

LA SÉCURISATION DE L’EMPLOIGĂ©nĂ©ralisation de la couverture

complémentaire des frais de santé

L’accord a pour objectif de permettre Ă  tous les salariĂ©s d’ac-cĂ©der Ă  une complĂ©mentaire santĂ©. A cette fin, les branches professionnelles devront ouvrir les nĂ©gociations avant le 1er avril 2013. A dĂ©faut d’accord de branche signĂ© avant le 1er juillet, les entreprises non couvertes devront Ă  leur tour ouvrir des nĂ©gociations. Si elles n’aboutissent pas Ă  un accord d’en-treprise, les entreprises concernĂ©es devront faire bĂ©nĂ©ficier leurs salariĂ©s, avant le 1er janvier 2016 au plus tard, d’une couverture collective de frais de santĂ©, qui devra couvrir au minimum un « panier de soins » dĂ©fini par l’accord.

Modification du rĂ©gime d’assurance chĂŽmage

Par un systĂšme de droits rechargeables Ă  l’assurance-chĂŽ-mage, les salariĂ©s qui reprendraient un emploi consĂ©cutive-ment Ă  une pĂ©riode de chĂŽmage conserveraient leurs droits aux allocations chĂŽmage non utilisĂ©s. L’accord instaure Ă©galement une majoration de la cotisation d’assurance chĂŽmage pour les CDD, de 7% Ă  4,5% selon la durĂ©e du contrat. Ces taux ne seront cependant pas appli-cables si le CDD aboutit Ă  l’embauche du salariĂ© par un CDI.

Par ailleurs, serait exonĂ©rĂ© de cotisations patronales d’assu-rance chĂŽmage pendant 3 mois (4 mois pour les entreprises de moins de 50 salariĂ©s) le CDI conclu pour l’embauche d’un jeune de moins de 26 ans.

CrĂ©ation d’un compte personnel de formation

Le salariĂ© se verrait dotĂ© d’un quota d’heures de formation, qui lui serait rattachĂ© tout au long de sa vie professionnelle. Ce compte personnel de formation serait intĂ©gralement trans-fĂ©rable d’une entreprise Ă  une autre. Les droits des salariĂ©s Ă  temps plein seraient de 20 heures par an, plafonnĂ©es Ă  120 heures de formation. Des proratas seraient effectuĂ©s pour les salariĂ©s Ă  temps partiel ou employĂ©s en CDD.  

CrĂ©ation d’un droit Ă  une pĂ©riode de mobilitĂ© volontaire sĂ©curisĂ©e

Durant une pĂ©riode dite de mobilitĂ©, le salariĂ© justifiant d’une expĂ©rience d’au moins 2 ans dans une entreprise de 300 sala-riĂ©s et plus peut, avec l’accord de son employeur, dĂ©couvrir un emploi dans une autre entreprise, sans pour autant perdre son emploi d’origine. Est alors signĂ© un avenant au contrat de travail.A l’issue de la pĂ©riode de mobilitĂ©, le salariĂ© fait connaĂźtre Ă  son employeur sa volontĂ© de revenir ou non dans l’entreprise d’origine. A dĂ©faut d’information de l’employeur, le salariĂ© est prĂ©sumĂ© avoir choisi de revenir dans l’entreprise d’origine.S’il choisit de revenir dans celle-ci, il retrouve son emploi ou un emploi similaire, sans avoir Ă  subir de modification dĂ©savan-tageuse de sa rĂ©munĂ©ration, qualification ou classification. S’il ne souhaite pas revenir dans l’entreprise, le contrat de travail est rompu dĂšs que la pĂ©riode de mobilitĂ© prend fin.

Encadrement du travail Ă  temps partiel

L’accord propose l’obligation pour les entreprises d’employer le salariĂ© Ă  temps partiel au minimum 24 heures par semaine. Ne seraient cependant pas concernĂ©s par cette mesure les salariĂ©s des employeurs particuliers, les salariĂ©s ĂągĂ©s de moins de 26 ans et poursuivant leurs Ă©tudes, ou encore les employĂ©s qui en feraient la demande Ă©crite et motivĂ©e.Les salariĂ©s employĂ©s Ă  temps partiel bĂ©nĂ©ficieraient Ă©gale-ment d’une majoration de salaire en cas de dĂ©passement de la durĂ©e de travail prĂ©vue par leur contrat de travail, Ă©gale Ă  10%, si le dĂ©passement est infĂ©rieur au 1/10Ăšme de la durĂ©e de travail prĂ©vue par le contrat, et de 25% au delĂ .

L’ACCORD NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU

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PLUS DE FLEXIBILITÉAccords de maintien dans l’emploi

Ils ne peuvent ĂȘtre conclus que dans les entreprises confrontĂ©es Ă  des difficultĂ©s Ă©conomiques  Ils visent Ă  maintenir l’emploi en autorisant temporairement la sociĂ©tĂ© Ă  moduler les salaires ou la durĂ©e de travail. L’ANI insiste sur le principe de symĂ©trie qui guide ces accords : ainsi, les efforts consentis par les salariĂ©s doivent ĂȘtre proportionnĂ©s aux rĂ©munĂ©ration des dirigeants. Si ces accords de maintien dans l’emploi Ă©corchent la sĂ©cu-ritĂ© juridique des salariĂ©s,  il s’agit ici de prĂ©venir et d’éviter les Plans de Sauvegarde de L’Emploi (PSE). Ces dispositions ne contreviennent pas aux rĂšgles relatives Ă  la modification du contrat de travail puisque le consentement des salariĂ©s demeure indispensable pour appliquer un tel accord.

Recours Ă  l’activitĂ© partielle

L’ANI prĂ©voit la conclusion d’un accord entre ses signataires et l’État afin de nĂ©gocier un nouveau dispositif de temps partiel. Cet accord aura notamment pour but d’unifier et de simplifier le systĂšme actuel. La formation du public concernĂ© par le temps partiel y tient une part plus substantielle. RĂšgles relatives au licenciement de 10 salariĂ©s et plus sur une mĂȘme pĂ©riode de 30 jours dans les entreprises d’au moins 50 salariĂ©s. DĂ©sormais cette procĂ©dure de licenciement ainsi que le contenu du PSE seront dĂ©terminĂ©s soit par accord collectif majoritaire, soit par un document fourni par l’employeur et homologuĂ© par la DIRECCTE. Cette disposition rĂ©sulte de la volontĂ© exprimĂ©e par les employeurs d’assouplir la procĂ©dure de licenciement Ă©conomique notamment en en rĂ©duisant sa durĂ©e et donc son coĂ»t.

Expérimenter le contrat de travail intermittent

L’ANI prĂ©voit l’expĂ©rimentation du contrat de travail intermit-tent au sein d’entreprises de moins de 50 salariĂ©s dans trois secteurs d’activitĂ© (cf annexe de l’accord). Le recours Ă  un tel contrat vise Ă  pourvoir de maniĂšre permanente des emplois connaissant une alternance de pĂ©riodes travaillĂ©es et non tra-vaillĂ©es. Aucune autre prĂ©cision n’est apportĂ©e par l’accord, quid de la durĂ©e de travail minimum ? Existera-t-il un systĂšme d’heures supplĂ©mentaires ou complĂ©mentaires ? Quelles com-pensations ? Plus que de la flexibilitĂ©, ne serait-ce pas ici une forme de contractualisation de la prĂ©caritĂ© ?

Faciliter la conciliation prud’homale

Les parties d’un contentieux portant sur le licenciement pour-ront mettre un terme dĂ©finitif au conflit par le versement de dommages et intĂ©rĂȘts forfaitairement calculĂ©s en fonction de l’anciennetĂ© du salariĂ©. Le but Ă©tant ici d’organiser une dĂ©ju-diciarisation des rapports de travail afin d’apaiser les relations employeurs-salariĂ©s et de faire diminuer les coĂ»ts liĂ©s Ă  une Ă©ventuelle condamnation.

DĂ©lais de prescription

Concernant l’exĂ©cution et la rupture de la relation de travail, le dĂ©lai de prescription est fixĂ© Ă  2 ans et Ă  3 ans pour les demandes portant sur les salaires. Par cette disposition, l’ANI tend Ă  baisser le risque contentieux qui pĂšse sur l’entreprise en matiĂšre sociale et participe donc d’une meilleure sĂ©curitĂ© juridique pour les employeurs.

Avec l’ANI du 11 janvier 2013, les partenaires sociaux affichent la volontĂ© d’instaurer un vĂ©ritable Ă©quilibre entre sĂ©curitĂ© dans l’emploi et flexibilitĂ© des emplois et tente d’y associer les reprĂ©sentants du personnel afin de faire des sala-riĂ©s des citoyens comme les autres Ă  l’intĂ©rieur de leur entre-prise. Au delĂ  de ces nobles prĂ©ceptes, ce texte, issu d’un com-promis, demeure encore flou ; en attendant la transposition...

Béatrice DANIEL, Clémence ZUNINO

POUR EN SAVOIR PLUS

‱ Le texte de l’accord : http://direccte.gouv.fr/IMG/pdf/ANI_securisation_de_l_emploi.pdf

‱ PrĂ©sentation de l'avant-projet de loi relatif Ă  la sĂ©curisation de l'emploi : La Semaine Juridique Social n° 8, 19 FĂ©vrier 2013, act. 87

‱ Vers un nouveau modĂšle de droit du travail ? FrĂ©dĂ©ric GĂ©a, Semaine Sociale Lamy - 20131569

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Le perchlorĂ©thylĂšne, ou tĂ©trachloroĂ©thylĂšne est un composĂ© organique volatil (COV) surtout utilisĂ© dans les pressings, pour le nettoyage Ă  sec de tissus. Son odeur Ăącre est facilement perceptible. Il pollue durablement l’eau et l’air. Figurant sur la liste des cancĂ©rogĂšnes du groupe 2A du CIRC (cancĂ©rigĂšne probable), il peut causer des troubles neurologiques, rĂ©naux et hĂ©patiques. Il est suspectĂ© d’avoir causĂ© le dĂ©cĂšs de plusieurs personnes.

Assez tÎt, les autorités européennes ont pris conscience de la dangerosité des COV et ont entendu réduire leurs émissions en adoptant la directive européenne

1999/13/CE1. Cette directive reste néanmoins insuffisante au regard du réel danger que représente le tétrachloréthylÚne.

En France, le dĂ©bat pour l’interdiction du perchlo s’est ouvert suite Ă  l’appel lancĂ© par les Associations RĂ©seaux Environnement SantĂ© et GĂ©nĂ©rations Futures. C’est le dĂ©but d’une crise sanitaire ponctuĂ©e par de nombreux dĂ©cĂšs : 1994, un enfant rĂ©sidant au-dessus d’un pressing ainsi qu’une femme en 2009. Le responsable est connu : le perchlorĂ©htylĂšne. MalgrĂ© l’urgence de la situation, le gouvernement, soumis aux pressions du lobbying de la blanchisserie, rĂ©agit faiblement.

Les arguments des industriels sont lĂ©gions. En effet, le perchlo-rĂ©thylĂšne (8 200 tonnes utilisĂ©es chaque annĂ©e en France2) apparait comme la substance la plus efficace et la moins cou-teuse d’utilisation. Les blanchisseries, souvent artisanales, ont peu de moyens pour se reconvertir. De plus, les alternatives Ă  cette substance ne sont pas toutes sans risques et ceux-ci ne sont ni connus, ni maitrisĂ©s.

Les mesures adoptĂ©es sont en consĂ©quence faibles : rĂ©duction de l’usage du solvant de 30%, puis le 20 avril 2012, le minis-tĂšre de l’écologie annonce l’interdiction progressive de la substance. Le dĂ©cret du 9 mai 2012 (n°2012-746) prĂ©voyant l’interdiction du perchlorĂ©thylĂšne d’ici 2022 ne vise que les installations contigĂŒes Ă  des locaux occupĂ©s par des tiers. C’est donc 7% des 5 200 machines existantes qui ne sont pas concernĂ©es par ce dĂ©cret. Pourtant, dĂšs 1990, un arrĂȘt du 7 mars3 reconnaissait l’exposition au perchlorĂ©thylĂšne comme pouvant causer un trouble.

Delphine BATHO, ministre de l’environnement, fait d'ailleurs une suggestion Ă  la profession : s'organiser  "pour remplacer les magasins de nettoyage par des points de dĂ©pĂŽt du linge et que le traitement (
) s'effectue (
) en dehors des centres urbains"4. Pourtant, ce sont les salariĂ©s les plus exposĂ©s. Lors de l’ouverture du hublot de la machine, ils peuvent inhaler jusqu’à 1000 ppm entrainant « une action narcotique, avec Ă©briĂ©tĂ© et somnolence Â» prĂ©cise l’INRS5. La prĂ©vention reste limitĂ©e dans ce milieu puisque en 2008, 70% des pressings n’étaient pas aux normes6. Les maladies dĂ©clenchĂ©es par ces salariĂ©s sont reconnues comme maladies professionnelles depuis l’arrĂȘt de la Cour de Cassation du 16 dĂ©cembre 20117.

Il faudra donc attendre 2022 pour l’abandon total de cette substance dans les locaux contigus aux habitations. Si cette action dĂ©cline l’engagement 138A du Grenelle, « nous ne pouvons pas encore attendre 10 ans avant d’interdire dĂ©fi-nitivement le perchloroĂ©thylĂšne, c’est beaucoup trop long »,

dĂ©plore Pascal DENOT, vice-prĂ©sident de l’ADVEPP. Preuve Ă  l’appui, une Ă©tude menĂ©e par le Laboratoire Central de la PrĂ©fecture de Police en 2012 rĂ©vĂšle que 81% des logements analysĂ©s prĂ©sentent des taux 500 fois supĂ©rieurs Ă  la valeur guide de l’air intĂ©rieur de l’OMS.

NĂ©anmoins, la France fait figure de pionniĂšre en matiĂšre d’interdiction du perchlorĂ©thylĂšne avec les Etats-Unis et le Danemark, puisque peu de rĂ©glementations Ă©trangĂšres inter-disent l’utilisation du tĂ©trachlorĂ©thylĂšne dans les installations de nettoyage Ă  sec situĂ©es en bas d’immeuble.

Alexandra DAVASE

LE PERCHLORÉTHYLÈNE FAIT TÂCHE : LE CAS DES PRESSINGS

1 http://www.ineris.fr/

2 http://mili-terre.com/article/

3 Cass Civ. 2e N° de pourvoi : 88-9858.

4 http://www.actu-environnement.com/

5 http://www.sante-et-travail.fr

6 Etude menĂ©e par le ministĂšre de l’environnement.

7 Cass. Civ 2e N° de pourvoi : 10-26075.

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Le 15 janvier dernier1, la Cour de Cassation (la Cour) a repris la solution de la Cour de Justice de l’Union EuropĂ©enne (CJUE)2 clarifiant les critĂšres de sĂ©lection d’un systĂšme de distribution sĂ©lective quantitative.

Les atteintes Ă  la concurrence sont strictement rĂšglemen-tĂ©es, que ce soit Ă  l’échelle europĂ©enne ou nationale. Si les ententes anticoncurrentielles sont prohibĂ©es Ă  titre de

principe (art. 101 et 102 du TraitĂ© sur le fonctionnement de l’Union EuropĂ©enne (TFUE), art. L.420-1 et L.420-2 du Code de commerce (C.com)), elles peuvent toutefois faire l’objet d’une exemption notamment au titre de l’application du rĂšgle-ment d’exemption n°1400/2002 applicable aux accords de distribution de vĂ©hicules automobiles neufs (RĂšglement).

L’affaire Auto 24 contre Jaguar Land Rover France,

ou comment choisir son concessionnaire

AprĂšs rĂ©siliation de son contrat de concession exclusive avec Jaguar Land Rover France (JLR) Ă  PĂ©rigueux, la SARL Auto 24 a pu obtenir des dommages et intĂ©rĂȘts en rĂ©paration du prĂ©-judice subi par le comportement discriminatoire de JLR Ă  son Ă©gard1.

Par la suite, Auto 24 a vu sa can-didature en qualitĂ© de distribu-teur agrĂ©Ă© de la marque rejetĂ©e. Le refus Ă©tait justi f iĂ© par un numerus clausus qui ne prĂ©voyait pas de distributeur Ă  PĂ©rigueux. La mĂȘme annĂ©e, JLR dĂ©cidait pourtant d’ouvrir une reprĂ©sen-tation dans une ville voisine, ce qui a poussĂ© Auto 24 Ă  saisir une nouvelle fois la justice, portant

cette affaire en cassation afin de contester les critĂšres retenus pour rejeter sa candidature.

Le problĂšme posĂ© concernait la dĂ©limitation des critĂšres de sĂ©lection en matiĂšre de distribution sĂ©lective quantitative. En effet, le RĂšglement dĂ©finit ce systĂšme comme un systĂšme dans lequel le fournisseur s’engage Ă  vendre des biens ou des services contractuels qu’à des distributeurs sĂ©lectionnĂ©s sur la base de critĂšres limitant directement leur nombre. Il prĂ©cise que ces critĂšres de sĂ©lection doivent ĂȘtre « dĂ©finis Â» afin d’ĂȘtre valables3. Cependant, rien ne permet de dĂ©terminer claire-ment les exigences relatives Ă  ces critĂšres « dĂ©finis Â». La Cour d’appel4 estime qu’aucune disposition « n’impose au concĂ©-dant de justifier des raisons Ă©conomiques ou autres Ă  l'origine de l'Ă©tablissement de la liste des implantations de ses distri-buteurs » alors qu’Auto 24 fait valoir que « des critĂšres de sĂ©lection quantitatifs prĂ©cis, objectifs, proportionnĂ©s au but

Ă  atteindre et mis en Ɠuvre de façon non discriminatoire Â» doivent ĂȘtre appliquĂ©s. 

Ainsi, la Cour5 a dĂ©cidĂ© de sursoir Ă  statuer et de renvoyer l’interprĂ©tation Ă  titre prĂ©judiciel Ă  la CJUE en les termes sui-vants : « que faut-il entendre par les termes de « critĂšres dĂ©finis » (
) s'agissant d'une distribution sĂ©lective quantitative ? ». Il s’agissait donc de savoir si un constructeur devait ou non jus-tifier par des critĂšres objectifs et non discriminatoires la façon dont il avait procĂ©dĂ© Ă  la rĂ©partition de son rĂ©seau, lorsqu’il choisissait de limiter le nombre de ses distributeurs.

La Cour dans la droite ligne de la jurisprudence européenne

La CJUE Ă©nonce qu’il suffit que ces « critĂšres dĂ©finis Â» prĂ©-sentent un contenu prĂ©cis et vĂ©rifiable. La Cour reprend la solution de la CJUE et ajoute que – contrai-rement aux critĂšres dans un systĂšme de distribution sĂ©lective qualitative – il n’est pas « nĂ©cessaire que ces critĂšres soient objectivement justifiĂ©s et appliquĂ©s de façon uniforme et non diffĂ©renciĂ©e Ă  l’égard de tout candidat Ă  l’agrĂ©ment Â». Ainsi, dans un systĂšme de distribution sĂ©lective quantitative, le constructeur (JLR en l’espĂšce) n’est pas contraint de justi-fier des raisons qui ont orientĂ©es son choix, il lui suffit d’avoir arrĂȘtĂ© des critĂšres prĂ©cis qu’il n’a pas besoin de publier afin de bĂ©nĂ©ficier de l'exemption.

Vers plus de sĂ©curitĂ© juridique Au-delĂ  de la solution d’espĂšce (fin du litige entre Auto 24 et JLR), l’arrĂȘt constitue un revirement de jurisprudence : aupa-ravant, la Cour imposait des critĂšres de sĂ©lection objectifs6, et permet de mettre fin au conflit doctrinal qui opposait les par-tisans d’un contrĂŽle du caractĂšre objectif des critĂšres quanti-tatifs d’un systĂšme de distribution sĂ©lective quantitative aux dĂ©fenseurs de la libertĂ© de fixation de ces critĂšres.

AnaĂŻs Ytto EL ADEL

DISTRIBUTION AUTOMOBILE : UN FOURNISSEUR PEUT FIXER

UN NUMERUS CLAUSUS QUI N’A PAS À ÊTRE JUSTIFIÉ

1 Cass. Com 15 janvier 2013, n°10-12734

2 CJUE, 14 juin 2012, aff. C-158/11

3 Tribunal de commerce de Versailles, 28 octobre 2006

4 Article 1, 1 f)

5 CA Paris, 2 décembre 2009, n°08-06680

6 Cass.Com 29 mars 2011, n°10-12734

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1 Cass soc 20 octobre 2010 n°09-70.966

2 Françoise CHAPTAL (AFP) – 5 fĂ©vr. 2013

3 CE 22 juin 2011 , n°319240.

L'arrivée de David Beckham au sein du PSG attise la curio-sité de tous les amateurs de football mais également des juristes! En effet, les contrats passés avec le club parisien

lui permettront d'Ă©chapper en grande partie Ă  l'impĂŽt fran-çais, et la majeure partie de ses gains proviendra de l'exploi-tation de son image.Le PSG, par le biais de contrats d'image, compte exploiter au mieux la notoriĂ©tĂ© du joueur de 37 ans afin d'assurer la pro-motion de ses sponsors et de ses propres activitĂ©s commer-ciales, sportives et de communication. Afin d'optimiser les contrats d'image et rendre attractif sa venue dans la capitale, le club a tout intĂ©rĂȘt Ă  recourir Ă  des montages contractuels

Quels contrats d'image?Si l'utilisation de l'image par le club est rĂ©tribuĂ©e sous forme de salaires, elle sera assujettie au rĂ©gime gĂ©nĂ©ral , en revanche si le sportif apporte son image en dehors de son contrat de travail il en sera dispensĂ©.PremiĂšre hypothĂšse: l'exploitation par le club ou ''Rent a star system'', le joueur cĂšde Ă  une sociĂ©tĂ©, domiciliĂ©e hors de France, le droit d'exploiter son nom et son image. Cette sociĂ©tĂ© transmet au club la facultĂ© de les utiliser pour toute action pro-motionnelle en contrepartie du versement d’une redevance soustraite aux charges. Dans le cas de Beckham, sa sociĂ©tĂ© Footwork Productions basĂ©e Ă  Londres, a pour seule activitĂ© de gĂ©rer la "licence Beckham". Mais ce montage n'est pas

sans risque car les redevances sont versĂ©es par le club ou une filiale, donc l'employeur du sportif, et encourt donc une requa-lification en salaire par le jeu de l'article 155 a du CGI. De nombreux arrĂȘts ont alimentĂ© la jurisprudence sur ce dispositif, cependant sa compatibilitĂ© avec le droit europĂ©en a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© posĂ©e et il semblerait aller Ă  l'encontre du traitĂ©.

HypothÚse plus sécurisée, l'exploitation de l'image par les partenaires du club: afin que l'exploitation de l'image du sportif ne se rattache pas au contrat de travail, les rede-vances seraient versées par les sponsors à la société gérant l'image. Ainsi le club n'intervient pas dans l'opération, mais ces contrats doivent traduire des relations purement commer-ciales, prestations d'image concrÚtes1,et non une volonté dis-simulée d'échapper exclusivement aux charges patronales...

Pour Maßtre Didier Poulmaire ,avocat spécialisé dans la gestion de l'image des sportifs, les revenus tirés de la stricte exploitation du droit à l'image individuel n'étant pas assu-jettis aux charges sociales, il parait en effet probable qu'un tel accord existe entre les deux parties. En tout cas, cela pourrait donner à l'administration fiscale l'envie d'aller voir notamment lorsque la rémunération de l'exploitation de l'image est signi-ficative par rapport au salaire2.

L'optimisation juridiqueRappelons que l'administration fiscale sait requalifier opportu-nĂ©ment les gains des sportifs Ă©trangers en France, ainsi ceux perçus lors de tournoi dans l'hexagone par le tennisman Boris Becker ont Ă©tĂ© qualifiĂ©s de salaires. La justification est perti-nente mais opĂšre une ouverture aux multiples consĂ©quences, l’administration considĂšre que le sportif professionnel qui par-ticipe Ă  un spectacle sportif a l'identitĂ© d'un artiste du spectacle auquel est applicable la prĂ©somption de salariat3.

Solution efficace, le recours au droit des marques: Le pilote automobile Jacques Villeneuve a enregistré en 2000 la photo de son visage comme marque de commerce à l'international. Le dépÎt et l'enregistrement de l'image du footballeur en tant que marque de commerce permettent d'en concéder l'exploi-tation par l'intermédiaire de la société gérant son image. La rémunération peut alors prendre la forme d'une redevance de

licence de marques, et ainsi la protection de l'image relĂšve de son rĂ©gime protecteur. Le problĂšme majeur rĂ©side dans l'Ă©volution physique du footballeur, risque d'instabilitĂ© de la marque, mais on peut le rĂ©soudre en abordant les Ă©lĂ©ments spĂ©cifiques d'un personnage sportif, image de marque que certains auteurs qualifient d’Ɠuvre de l'esprit originale. Droit d'auteur? Droits voisins? La prestation de Beckham, dans le stade et en dehors, relĂšverait-elle du rĂ©gime juridique des mannequins ou des artistes du spectacle? La problĂ©matique de la patrimonialisation de l'image des sportifs est toujours dĂ©ter-minante de la qualification.

Vincent PAQUOT

BECKHAM-PSG : OPTIMISER L'EXPLOITATION DE L'IMAGE DES

STARS DU FOOTBALL

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Lundi, 8 heures 10 minutes, faculté de droit. Le doctorant court, cartable sous le bras gauche, manuel sous le droit. Les couloirs résonnent. Il arrive enfin dans sa salle de TD,

s’installe lourdement et, un rictus au coin des lĂšvres, annonce narquois qu’il a corrigĂ© les copies. VoilĂ  le « vrai travail Â» du doctorant au yeux des profanes, ces petits ĂȘtres qui n’ont pas encore saisi le rĂŽle capital qu’il joue dans la rĂ©volution que vit sa matiĂšre (tous les juristes savent bien que le droit n’évolue pas, il se rĂ©volutionne Ă  coups de lois ou dĂ©cisions de la CJUE). Il se voit comme un Marat du droit des procĂ©dures collectives, un « mentalist Â» du droit de la nĂ©gociation collective, perçant Ă  jour les secrets de ces monstruositĂ©s catĂ©gorielles, un CĂ©line du droit public Ă©conomique, juriste de la rupture. Et pour en arriver lĂ , il lui a fallu de l’endurance, du style, beaucoup de chance et, bien sĂ»r du courage.

Il a du commencer par apprendre Ă  subir les interrogations des profanes: « Que fais-tu ? – Une thĂšse. – Ah, mais tu tra-vailles sinon ? Â». A cette Ă©ternelle question, le doctorant, ne rĂ©pond souvent que par une moue certes dubitative mais pour-tant tellement expressive. OUI, le doctorant travaille, il bĂ»che, il planche, il charbonne, il sue, il pleure, il saigne, il crie, il pleure, il s’extasie, il mange Macdo trois fois par semaine, devant son ordinateur posĂ© sur son bureau dont on a oubliĂ© la couleur, bref il vie. Le travail du thĂ©sard est un travail de fourmi, de patience, de digestion intellectuelle. Le doctorant, travaille Ă  la VĂ©ritĂ©, mĂȘme si elle n’embrasse que celle de l’ac-tivitĂ© des autoritĂ©s administratives dans le dĂ©partement de la Creuse entre 1793 et 1795. Le thĂ©sard s’échine, s’escrime Ă  percer les secrets des longues et sinueuses circonvolutions du Droit. Sous la direction bien sĂ»r de son directeur de thĂšse, dont il nous faut ici dĂ©peindre les traits.

Le directeur de thĂšse est un peu le pĂšre spirituel du thĂ©sard, celui dont il doit apprendre la façon de se mouvoir comme un grand dans le monde des adultes. Il n’est pas faux d’affirmer que jusqu’à sa soutenance, et parfois au delĂ , le thĂ©sard est

la chose de son directeur. Il joue avec lui, comme Dieu joue avec les Ă©toiles. Il prĂ©side Ă  son sommeil et aux variations de son poids, comme le soleil prĂ©side au jour et la lune Ă  la nuit. Qu’il ne reste qu’un mois pour lui rendre son plan, et le doc-torant entre en phase de transe, que le Patron s’absente une semaine pour un colloque Ă  la RĂ©union, et il peut enfin pro-fiter de la derniĂšre saison de Desperates Housewives, qu’il verra bien Ă©videmment en replay au « labo Â». Et pourtant, il marquera de son empreinte le reste de sa vie, Ă  commencer par ses chances de « qualif Â» (ou de « calife Â», selon l’ambi-tion du doctorant). Heureusement, bien souvent, les directeurs de thĂšse sont conscients de l’importance de leur rĂŽle et de la responsabilitĂ© qu’ils endossent. Il reste qu’il est impossible de rĂ©pondre Ă  l’éternelle question : est-ce le doctorant qui choisit son directeur ou l’inverse ? (le rapport Ă  la poule et l’Ɠuf est

plus qu’évident !) : Une fois n’est pas coutume, la rĂ©ponse peut-ĂȘtre se trouve sur TF1 : le choix du directeur de thĂšse, c’est un peu The Voice : il est impĂ©ratif qu’un rapport particulier se crĂ©e entre le jeune padawan et le maĂźtre Yoda en robe rouge.

Mais en rĂ©alitĂ©, parler DU doctorant est une erreur grossiĂšre. Il faut bien reconnaĂźtre, cependant, que seuls les initiĂ©s peuvent saisir les subtilitĂ©s des arcanes universitaires. Il faut dĂ©jĂ  dis-tinguer les doctorants CIFRE des doctorants contractuels. Les premiers ont choisi la voie mixte, celle de l’universitĂ© et de l’entreprise ou de l’administration. Le CIFRE jongle entre les logiques du savoir et ceux de la rentabilitĂ©. Sa spĂ©cificitĂ© est qu’il passe une partie de la semaine, gĂ©nĂ©ralement 3 jours, dans une structure professionnelle, le plus souvent Ă  exercer une tĂąche de juriste dans son domaine de spĂ©cialitĂ©. Le reste du temps, il le consacre Ă  rĂ©soudre une question Ă©minemment pratique toute entourĂ©e d’un halo de gris : la jurisprudence n’est pas figĂ©e, les impacts du droit nouveau ont parfois un goĂ»t de banane, parfois de cerise, et les entreprises sont prĂȘtes Ă  investir, avec de trĂšs larges subventions de l’Etat, pour la rĂ©solution du problĂšme. Le thĂ©sard CIFRE peut soit proposer un

UNE VIE DE DOCTORANT

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S sujet Ă  une entreprise, soit accepter de traiter celui qui leur fait office d’épine dans le pied. La plupart du temps, le « Cifrien Â» se destine soit Ă  une carriĂšre de juriste, soit Ă  celle d’avocat, car comme toutes les thĂšses (dont le rĂ©gime est unique), les thĂšses CIFRE donnent un accĂšs direct aux Ă©coles d’avocat, ou encore, dans une moindre mesure, l’ENM. L’avantage de la CIFRE : un salaire intĂ©ressant (qui ne peut ĂȘtre infĂ©rieur Ă  24000 euros brut par an), l’assurance d’acquĂ©rir une exper-tise dans un domaine spĂ©cifique, et une expĂ©rience profession-nelle tout au long de sa thĂšse.

De ceux lĂ , certains doctorants contractuels diront qu’ils ne devraient pas avoir le titre de docteurs, ou alors d’un autre doctorat. Ils sont les gardiens de la Loi, les dĂ©fenseurs de la doctrine, les ayatollahs de l’Ordre universitaire. Les docto-rants contractuels ont reçu l’onction professorale sur la foi de leur rapport de prĂ©sentation. Ils ont subi l’épreuve du feu, c’est Ă  dire celui d’affronter le jury de sĂ©lection. En effet, les contrats doctoraux, depuis 2009, ne sont attribuĂ©s qu’au compte goutte. Les doctorants sont rĂ©munĂ©rĂ©s par l’Etat, via l’UniversitĂ© de rattachement, ce qui les met Ă  l’abri du besoin et leur permet de se concentrer uniquement sur leur « disser-tation Â». En fonction des rĂ©gimes (il en existe deux) les doc-torants contractuels perçoivent entre 1400 et 1700 euros net/mois, selon qu’ils assurent ou non des activitĂ©s annexes. Souvent, les doctorants contractuels sont chargĂ©s d’enseigne-ments en TD, ce qui leur permet d’adopter un certain recul sur leurs matiĂšres et de se prĂ©parer au mieux Ă  la « qualif â€˜ Â» et Ă  « l’agrĂ©g’ Â». Car bien souvent, le doctorant contractuel se destine Ă  une carriĂšre d’enseignant-chercheur, comme si, moule Ă  son rocher, il avait dĂ©cidĂ© de ne jamais franchir en sens inverse les portes qui se refer-maient devant sa maman, en maternelle. Pour y parvenir, il devra soit ĂȘtre qualifiĂ© aux fonctions de maĂźtre de confĂ©rences, soit passer le redou-table concours de l’agrĂ©gation des facultĂ©s de droit, concours dont l’épreuve reine dure, comme au Mans, 24 heures.

Restent enfin tous les autres doctorants, les damnĂ©s de la terre universitaire, ceux qui subissent le manque de perspective des politiques de la Recherche depuis des dĂ©cennies : ceux qui sont « simplement Â» doctorants, soit qu’ils n’ont pas Ă©tĂ© admis au club des contractuels (pour des raisons qui sont parfois bien Ă©loignĂ©es de la qualitĂ© de leur dossier), soit qu’ils ont Ă©tĂ© rejetĂ©s de la caste des Cifriens, soit enfin qu’ils ne l’aient pas voulu ou pas pu. Ils exercent leur art dans la plus strict intimitĂ©, dans la chaleur tropicale (ou la fraicheur polaire selon les Ă©poques) des BU, dans le confort discutable de leurs siĂšges, qui, parfois, leur ont des bontĂ©s et cĂšdent au creux de leurs reins. Si, malgrĂ© tout, ils ont un peu de chance, ils sont aussi chargĂ©s de TD, sous l’envieux rĂ©gime du vacataire : 30 Ă  40 euros de l’heure. De fait, un loyer se

compte en heures de cours et non en monnaie sonnante et trĂ©-buchante. Nombreux sont ceux qui (vĂ©naux qu’ils sont !) ont prĂ©fĂ©rĂ© se soumettre aux insistances de leur estomac qu’aux dĂ©lices des saveurs de la VĂ©ritĂ© et du Savoir, nombreux sont ceux qui peinent Ă  terminer leur thĂšse ou qui l’abandonnent en cours de route. L’exercice de recherche est trop exigeant pour que l’on puisse conseiller aux Ă©ventuels intĂ©ressĂ©s de s’y jeter sans filet de protection, sans CIFRE ou sans contrat doctoral ou tout autre arrangement qui leur permette de s’y consacrer entiĂšrement.

A ceux lĂ  nous voulons dire, en guide de conclusion, que le travail de thĂšse n’est pas une sinĂ©cure. Il nĂ©cessite de la rigueur, un certain degrĂ© d’exigence et, pour certains, une longue thĂ©rapie. Les effets du travail de thĂšse sur la psychĂ© sont encore mal connus, et il est Ă  ce titre remarquable qu’aucun thĂ©sard ne se soit emparĂ© de la question
 Le thĂ©sard vie au rythme de sa thĂšse : le matin, au rĂ©veil, excitĂ© comme la derniĂšre des pucelles, le midi plein du doute du pĂ©cheur, et le soir abattu comme un cheval en Roumanie. Mais enfin, puisqu’aprĂšs avoir travaillĂ© sans relĂąche de midi Ă  minuit, il doit bien toucher son salaire, il jouira d’un plaisir si particu-lier, celui d’avoir compris et d’avoir dĂ©veloppĂ© une pensĂ© ori-ginale, bref, celui du trouveur.

Sheba DEHLI

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ESDROIT DE LA CONCURRENCE

RĂ©vision des lignes directrices relatives au

contrÎle des concentrations : l'Autorité de la concurrence

lance une consultation publique

 Le 22 fĂ©vrier 2013, l'AutoritĂ© de la concurrence a lancĂ© une consultation publique sur le projet de rĂ©vision de ses lignes directrices ouverte pour deux mois. Cette consultation a pour but de recueillir les observations des personnes intĂ©ressĂ©es par le projet rĂ©visĂ©. Le projet s'inspire de l'expĂ©rience acquise par l'AutoritĂ© depuis la publi-cation des lignes le 16 dĂ©cembre 2009. La pratique a dĂ©montrĂ© les bĂ©nĂ©fices d'une procĂ©dure souple et rapide, et l'importance de la phase informelle de prĂ©-notification.  Le projet prĂ©cise les conditions d'Ă©ligi-bilitĂ© Ă  une procĂ©dure d'examen sim-plifiĂ© et son analyse en matiĂšre de dĂ©fi-nition des marchĂ©s pertinents ainsi qu'en matiĂšre d'engagements et d'injonctions. Concernant les engagements, l'AutoritĂ©

s'est fixĂ©e comme but de "faciliter, sĂ©cu-riser et homogĂ©nĂ©iser la pratique des entreprises Ă  l'occasion" de cette phase. Ainsi, elle s'inspire de la pratique com-munautaire et propose deux modĂšles-types dans les hypothĂšses de cession d'actifs et de contrat de mandat. Ces modĂšles s'adressent aux parties concer-nĂ©es lorsqu'elles envisagent de prendre des remĂšdes structurels, et pourront ĂȘtre adaptĂ©s, au cas par cas.

DROIT CONSTITUTIONNELRenouvellement du tiers de membres du Conseil

Constitutionnel En application de l’article 56 de la Constitution et de l’ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel a Ă©tĂ© procĂ©dĂ© ce mardi 12 fĂ©vrier au renouvellement du tiers des membres du Conseil constitutionnel. Un renouvellement tout Ă  fait inĂ©dit – si l’on en croit les commentateurs – puisque pour la premiĂšre fois dans l’his-

toire de la justice constitutionnelle fran-çaise, trois femmes en sont l’objet. La premiĂšre d’entre elles, Mme Claire Bazy-Malaurie, jusque-lĂ  PrĂ©sidente de chambre Ă  la Cour des comptes, avait en rĂ©alitĂ© dĂ©jĂ  fait son entrĂ©e rue de Montpensier le 31 aoĂ»t 2010 suite au dĂ©cĂšs de M. Jean-Louis Pezant. Ayant occupĂ© cette fonction pendant moins de trois ans, l’article 12 de l’ordonnance prĂ©citĂ©e autorisait son renouvellement, ce que fit le PrĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale M. Claude Bartolone. Le PrĂ©sident de la RĂ©publique a de son cĂŽtĂ© proposĂ© la nomination de Mme Nicole Maestracci, PrĂ©sidente de la Cour d’appel de Rouen en remplace-ment de M. Pierre Steinmetz, tandis que le PrĂ©sident du SĂ©nat M. Jean-Pierre Bel a choisi Mme Nicole Belloubet, Professeur des Univers i tĂ©s pour remplacer Mme Jacqueline Guillenchmidt. Comme garde-fou, la rĂ©vision constitu-tionnelle de 2008 avait introduit Ă  l’ar-ticle 56 l’audition des candidats devant la « commission per-manente compĂ©tente de l’assemblĂ©e concernĂ©e », auditions qui ont donnĂ© lieu ce mercredi 20 fĂ©vrier Ă 

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ESla validation des choix effectués par les autorités de saisine. Les nouveaux élus entreront en fonction dans la semaine du 11 mars 2013.

DROIT ADMINISTRATIF

Mesure de police et débit de boissons

Le Conseil d’Etat a Ă©tĂ© saisi par le Tribunal administratif de Poitiers pour avis, en application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, afin de se prononcer sur la nature des arrĂȘtĂ©s prĂ©fectoraux ordonnant la ferme-ture de dĂ©bits de boissons sur le fonde-ment du code de la santĂ© publique. Par avis contentieux en date du 18 janvier 2013, les juges du Palais Royal ont rĂ©pondu que les arrĂȘtĂ©s tendant Ă  la fer-meture de dĂ©bit de boissons « ont toujours pour objet de prĂ©venir la continuation ou le retour de dĂ©sordres liĂ©s au fonctionne-ment de l’établissement, indĂ©pendamment de toute responsabilitĂ© de l’exploitant Â». De par sa finalitĂ©, l’arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral est

qualifiĂ© de mesure de police susceptible de faire l’objet d’un recours devant le seul juge de l’excĂšs de pouvoir.

DROIT ADMINISTRATIF

Une voie de fait

Il appartient traditionnellement au juge judiciaire le soin de mettre fin Ă  une voie de fait commise par l’administration (CE, 18 octobre 1989, Mme B. ). DĂ©sormais le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s peut, sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice admi-nistrative, enjoindre Ă  l’administration de la faire cesser (CE, 12 mai 2010, M. Alberigo). Une compĂ©tence que le Conseil d’Etat a rĂ©cemment Ă©tendu au juge des rĂ©fĂ©rĂ©s de l’article L. 521-2 du code de justice (CE, 23 janvier 2013, Commune de Chirongui).

DROIT

ADMINISTRATIFContentieux des Ă©trangers

Le Conseil d’Etat a Ă©tĂ© saisi par la Cour administrative d’appel de Nantes pour avis, en application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice admi-nistrative, sur la question de savoir si dĂ©ci-sion implicite de rejet Ă  une demande de titre de sĂ©jour formulĂ©e par un Ă©tranger rĂ©sultant du silence gardĂ© par le prĂ©fet Ă  l’expiration d’un dĂ©lai de quatre mois peut servir de base lĂ©gale Ă  une dĂ©cision portant obligation de quitter le territoire prise sur le fondement de l'article L. 511-1 de ce code. Le Conseil d’Etat estime que depuis l’entrĂ©e en vigueur de la loi 16 juin 2011 relative Ă  l'entrĂ©e et au sĂ©jour des Ă©trangers en France et au droit d'asile l’autoritĂ© administrative peut dĂ©sormais « prononcer une obligation de quitter le territoire français lorsque le silence gardĂ© pendant quatre mois sur une demande de dĂ©livrance ou de renouvellement d’un titre de sĂ©jour a fait naĂźtre une dĂ©cision impli-cite de rejet, sans qu’il lui soit impĂ©ratif d’opposer au prĂ©alable un refus explicite de titre de sĂ©jour Â».

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Citation du mois : « Le droit est le souverain du monde Â», HonorĂ© Gabriel, Comte de Mirabeau.

Film du mois : LA FAILLE

RĂ©alisĂ© par : Gregory HoblitActeurs Principaux : Ryan Gosling, Anthony Hopkins, David Strathairn

Synopsis : Face Ă  l’infidĂ©litĂ© de sa femme, Ted Crawford dĂ©cide de commettre le crime parfait en tentant de la tuer. Le jeune et ambitieux procureur adjoint de Los Angeles, Willy Beachum, se charge de cette derniĂšre affaire avant de rejoindre un prestigieux cabinet d’avocats. Une vĂ©ritable confrontation va naĂźtre entre Ted qui dĂ©cide de se dĂ©fendre seul et Willy qui souhaite finir par un dernier coup d’éclat devant l’aider Ă  rejoindre son futur poste. Ceci se passant sous l’égide de la manipulation, de l’ambition et surtout oĂč la dĂ©faite est nĂ©cessaire des deux cĂŽtĂ©s afin d’as-souvir les dĂ©sirs du vainqueur. Chacun possĂšde un point faible. Sauront-ils trouver la faille chez l’autre pour le faire tomber ?

InterĂȘt : En plein cƓur du systĂšme judiciaire AmĂ©ricain oĂč la course Ă  la gloire est lancĂ©e, plaidoiries, et procĂ©dures vont se confronter sur fond de manipulation.

Bon plan du mois :Cyberlibris – BibliothĂšque NumĂ©rique territoriale.

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●Directeur de la publication : Adrien CHALTIEL

RĂ©dacteur en chef : Geoffrey GURY – Lauranne PARIResponsable internet : Etienne FICHAUX

Maquettiste - Communication : Paul MAILLARD - Alexandre DECHOSALResponsable partenariats : Antoine BOUZANQUET – Damir BEZDROB

Responsable distribution : Alexis DEBORDEDĂ©pĂŽt lĂ©gal : Novembre 2008

Le Petit Juriste – Association culturelle loi 1901●

FAIT PAR LES ÉTUDIANTS POUR LES ÉTUDIANTS●

Avec la participation de l’ensemble des membres du Petit Juriste et de ses rĂ©dacteurs.Remerciements particuliers : François TerrĂ©, AnaĂŻs Charreteur, correctrice de choc, le MBA de Paris II, le pĂŽle 1 de TVDMA pour ses superbes retranscriptions, Anicette Massanga, le site www.carrieres-juridiques.com, l’UNEDESEP et l’imprimerie Evoluprint et toute l'Ă©quipe SimplĂ©bo.

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ADMISSIONS - Inscrivez vous ! Dossier d’inscription tĂ©lĂ©chargeable sur le site www.ecolehead.fr.Dates de concours : 24 mars, 13 avril ou 15 mai.

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