demanget magali - turisme a geometrie variable en huautla

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    TOURISME GOMTRIE VARIABLE EN TERRE INDIENNE:L'EXEMPLE DES INDIENS MAZATQUES, OAXACA, MEXIQUEMagali DemangetPresses de Sciences Po | Autrepart

    2007/2 - n42pages 21 38

    ISSN 1278-3986

    Article disponible en ligne l'adresse:

    --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-autrepart-2007-2-page-21.htm

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    Pour citer cet article :

    --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Demanget Magali, Tourisme gomtrie variable en terre indienne: l'exemple des Indiens mazatques, Oaxaca,

    Mexique ,

    Autrepart, 2007/2 n42, p. 21-38. DOI : 10.3917/autr.042.0021

    --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Distribution lectronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po.

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    Tourisme gomtrie variable en terre indienne :

    lexemple des Indiens mazatques, Oaxaca, Mexique

    Magali Demanget*

    Introduction

    Depuis les annes 1980, des travaux parus notamment dans les Annals ofTourism Research 1, se sont employs dfinir le phnomne du tourisme et lacatgorie de touriste. Le tourisme est alors entendu comme une relation interethniqueo se joue la confrontation entre des visiteurs et une population daccueil qui se meten scne leur attention. Alors que D. Mac Cannell [1986] fait tat dune ethnicitreconstruite lattention de spectateurs de lethnicit, des auteurs tels que E. Cohen

    [1979] se sont attachs tablir une classification des touristes selon leur compor-tement. Cependant, le nouveau tournant pris par lanthropologie du tourismedepuis une vingtaine dannes 2, en focalisant son attention sur la diversit despratiques touristiques, a contribu remettre en cause les tentatives de typologierigide des comportements touristiques. Par ailleurs, les analyses ont galementdmontr combien ce phnomne social ne saurait pour autant tre rduit unchange distanci et sens unique. Dans cet article, on sattachera au caractremultiforme du tourisme ethnique au Mexique, en nous appuyant sur lexempledes Indiens mazatques. Le tourisme ethnique est ici entendre au sens large dune

    rencontre entre des visiteurs et un groupe ethnique qui sautodfinit comme tel.Partons tout dabord de langle rgional o, selon la perspective avance par

    Mac Cannell [op. cit., p. 385], se trouvent mises en jeu des images ethniquesqui sont la fois artificielles et dterministes . Parmi les attraits du Mexiquemontrs dans les guides touristiques, la richesse culturelle passe des vestigesarchologiques se conjugue celle, vivante, des Indiens de villages pittoresques,porteurs contemporains de prhistoire. Au fondement de lexotisme mexicain, lesformes de vie indienne y sont souvent perues comme le reflet invers de celles des

    * Ethnologue, Laboratoire danthropologie et de sociologie comparative, Universit de Paris 10 Nanterre [email protected].

    1. Notamment le volume 11 [1984] et le volume 15 [1988] dont on cite des auteurs dans cet article.2. Concernant lmergence dun intrt rcemment affirm de lanthropologie et de la sociologie du

    tourisme, nous renvoyons ici Picard et Michaux [2001].

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    socits occidentales. Encore immergs dans un univers magique sculaire, lesIndiens, selon un sens commun rpandu tant lchelle nationale quinternationale,

    se situeraient plutt du ct de la nature et de la tradition que de celui de la ville etde la modernit [Favre, 1994, p. 81-82 ; Schaffhauser, 2001, p. 152]. Ces projec-tions sur lidentit des Indiens semblent prolonger les distinctions classiques entrevoyageurs et autochtones, entre la modernit propre aux socits des uns face latradition des autres. Plus largement, une telle distinction renvoie la dmarcation drive de ralits socio-conomiques toutefois bien relles entre pays exporta-teurs de touristes et pays exotiques rcepteurs, sparation qui a marqu desanalyses du tourisme comme agent dvastateur des socits locales exotiques [Boutiller et alii, 1978 ; Rossel, 1988]. lchelle nationale mexicaine, ce clivageest aussi lisible dans les approches entre villes mtisses et priphries indiennes, oles Indiens sont souvent prsents comme les victimes dtrangers consommateursde traditions adultres. Le phnomne touristique est alors apprhend au traversdu prisme de la folklorisation entendue comme processus dexpropriation-appropriation-transformation [Barabas et Bartholom 1990, p. 36-37].

    En terres indiennes cependant, un tel processus se trouve dmenti par linven-tion sociale laquelle donne lieu le tourisme. Des hauts lieux de tradition sontvisits par des populations nationales et internationales, lapoge des visites culmi-nant lors dun vnement grande rsonance identitaire, la fte des morts (Fiestade Todos Santos). Les vieilles dfinitions se brouillent : les visiteurs ne sont plusseulement consommateurs, ils viennent voir, mais aussi vivre, partager, treensemble. Les spectateurs deviennent aussi acteurs et la vie collective prend alorsforme de spectacle. Comment dlimiter ici le phnomne touristique, alors que lamultiplicit des rles sociaux fait exploser les limites du thtre de la folklorisation ?Le tourisme apparat en effet comme un change qui est loin dtre unilatral. Pluslargement, comme le remarque J.-D. Urbain [2002, p. 18-19], limage, tropsimpliste, dun monde coup en deux entre les pays pourvoyeurs de touristes-colons et les colonies touristiques rceptrices, ne rend que partiellementcompte de la ralit des changes 3. On peut alors sinterroger, lchelle nationale,

    sur la coupure entre Indiens objets touristiques et touristes non Indiens, coupurequi nest pas sans rappeler celle existant entre coloniss et colonisateurs signale lchelle du monde. Si cet aspect est aussi prendre en compte, il ne peut constituerun principe explicatif dun phnomne complexe, qui ne saurait tre rduit unchange duel et unilatral. Dpasser un tel dualisme revient galement rappelerque la catgorie dIndien est le rsultat dune construction sociale et politique quisest transforme au fil de lhistoire des relations entre minorits et gouvernants 4.

    3. Lauteur rappelle que la France, cinquime pays pourvoyeur de touristes au monde, en est aussi lepremier pays rcepteur. Sans nier pour autant les effets dvastateurs de certains types de tourisme, ce constatne manque pas de briser la caricature dun monde coup en deux par lindustrie touristique [ ibid.].

    4. Au Mexique, comme dans lensemble des pays coloniss, les dynamiques identificatoires entre mino-rits et dominants ont tout dabord impliqu une assignation asymtrique des catgories ethniques (Indiens vs gens de raison ). Dans la perspective indigniste, bien que le terme dethnie ait remplac ds les annes1950 celui de race, les classifications de groupes indiens consistent en des attributions inities selon uneapproche objectiviste qui repose sur un inventaire de traits culturels. prsent, dans un climat de revendications

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    prsent, les nouvelles politiques indignistes, en encouragent la promotion desidentits ethniques par les acteurs locaux, contribuent plus ou moins directement

    la constitution de lethnicit. Une telle promotion a dailleurs pris un tour nouveau,alors que lInstitut National Indigniste (INI) sest trouv remplac depuis 2003 parla Commission Nationale pour le Dveloppement des Peuples Indiens (CONA-DEPI) dont nombre de responsables ont t recruts parmi des intellectuelsindiens 5. Et dans ce thtre de la reprsentation ethnique, le tourisme, aux cts desappareils officiels de promotion culturelle, forme une arne non ngligeable de laconstruction ethnique.

    Afin dlucider la place du tourisme en terre indienne, nous nous attacherons un exemple observ dans ltat de Oaxaca, lune des rgions rputes les plus

    indiennes du Mexique. Huautla de Jimenez dans la Sierra Madre Oriental, est unimportant chef-lieu situ sur les hautes terres des Indiens mazatques 6. Cette villeindienne, devenue clbre partir des annes 1960 la suite dun important vne-ment mdiatique et touristique, est connue comme le haut lieu de la magie et de la chaman Mara Sabina. Mais alors quaujourdhui lvnement touristique estdevenu un phnomne mineur loin de laffluence des annes 1970, les Mazatques,et plus prcisment certains leaders culturels, gnralement instituteurs bilinguesengags dans la production de lidentit ethnique, intgrent cet vnement dans lesrcentes oprations de valorisation patrimoniale [Demanget, 2004a]. Selon toutevraisemblance, la question du tourisme implique de prendre en compte non seule-ment la relation interethnique noue entre autochtones et allochtones, mais aussi lesdynamiques intra-ethniques dune communaut largie, htrogne et partielle-ment dlocalise par les migrations. Appelant plusieurs chelles dobservation,lexemple observ ici nous semble illustrer un aspect du tourisme mexicain souventignor : En effet, dans un pays o les populations indiennes avoisinent les 10 % dela population totale et o le nombre dIndiens est lun des plus importantsdAmrique Latine 7, les sparations classiques entre Indiens visits et touristesnon-Indiens mritent dtre interroges. Le partage entre Indiens et touristes ne

    5.politiques et culturelles, les anthropologues indignistes ne sont plus les seuls exgtes des Indiens : cesderniers se revendiquent comme tels dans leur dialogue avec les appareils officiels, et ils sattachent lesterde contenu les classifications ethniques hrites de la Colonie. L essentialisation des minorits indiennes, laquelle participent les acteurs de ces minorits, a, entre autres, pour enjeu la reconnaissance de leurs droitspolitiques et territoriaux.

    5. Concernant la traduction franaise de la Comisin Nacional para el Desarrollo de los PueblosIndgenas propose ici, nous avons remplac le terme indgena par celui dIndien adopt dans le texte. Enespagnol, le termeIndio est dprciatif et cest majoritairement celui d indgena qui est employ, alors quenfranais indigne est pjorativement connot.

    6. Le territoire mazatque occupe la partie septentrionale de ltat de Oaxaca et quelques localits dusud de ltat de Veracruz. Ce territoire se compose de deux rgions qui se distinguent par des diff-rences climatiques : lune, en dessous de 800 mtres, a sollicit nombre de recherches dune anthropologieapplique et de sauvegarde, lors de la construction du barrage du Rio Papaloapan, pour lequel prs de22 000 Indiens ont t dplacs.

    7. Une telle estimation savre en ralit relative, si lon tient compte du fait que les critres de recense-ment varient selon la dfinition de la catgorie dIndien, forme de classification elle-mme soumise desenjeux politiques qui se sont transforms au fil des orientations des politiques indignistes [Lavaud etLestage, 2005].

    (Suite de la note 4 page 22).

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    correspondrait-il pas la persistance dune approche substantielle des groupesindiens comme entits homognes, approche hrite didentifications coloniales et

    indignistes post-coloniales ?Notre propos consistera contourner toute approche dualiste et unilatrale du

    phnomne touristique et ne pas nous cantonner la seule perspective locale.Nous commencerons dans un premier temps par les changes interethniquesobservs lchelle rgionale. De la scne du festival folklorique la Guelaguetza o les Mazatques, aux cts dautres groupes indiens, affichent les lmentschamaniques, nous passerons aux coulisses du chef-lieu Huautla. Ainsi, dans unsecond temps, nous nous intresserons aux dynamiques locales qui participent indi-rectement des mises en scne citadines, afin de dgager dautres facettes des

    changes touristiques.

    Le spectacle rgional des cultures

    Une rgion indienne dans un pays pluriethnique

    Dans les dpliants touristiques de ltat de Oaxaca, les Indiens sont largementreprsents. On remarque lomniprsence de lide de diversit : des lieux, descouleurs, des traditions, des produits artisanaux et des ethnies. Les photos

    dIndiens aux costumes bigarrs constituent la mtaphore dun Mexique riche encultures, officiellement promulgu comme le pays de la pluralit culturelle 8, imagenationale que le gouvernement mexicain ne manque pas dencourager. Il nestdailleurs pas anodin que la ville de Oaxaca ait t choisie pour la Journemondiale de la diversit culturelle pour le dialogue et le dveloppement 9 orga-nise par lUNESCO en mai 2005. Ltat de Oaxaca est en effet synonyme depluralit ethnique. En tte des quatre tats de la Rpublique Mexicaine qui regrou-pent le plus dIndiens 10, le territoire compte galement, selon les classificationsethnolinguistiques communment admises, prs de 16 groupes ethniques. Il est

    juste titre fait tat de pluralit ingale [Akzin, cit par Bartholom et Barabas,op. cit.]. La rgion, avec plus de la moiti de sa population circonscrite dans deslocalits rurales (moins de 2500 habitants), figure en effet au triste palmars desplus pauvres du Mexique. La renomme touristique de Oaxaca repose sur le pitto-

    8. Dans le cadre du Mexique, les diffrences culturelles des populations indiennes, si elles ont longtempst considres comme des obstacles la constitution dun pays homogne, sont en effet aujourdhui appe-les enrichir une nation officiellement promulgue comme plurielle depuis 1992, avec lamendement delArticle 4 de la Constitution mexicaine.

    9. Lorganisation de cette journe (le 21 mai 2005), en collaboration avec des institutions mexicainesdont le Conseil national pour la culture et les arts, lInstitut national danthropologie et dhistoire et lUniver-sit nationale et avec les autorits mexicaines, fait suite ladoption de la Dclaration Universelle delUNESCO sur la diversit culturelle en novembre 2001.

    10. Il compte selon les derniers recensements, 1 091 502 locuteurs de langue indienne, soit 35,3 %,devanant ainsi ltat du Yucatan (33,5 %) et le Chiapas (26,3 %) [Instituto Nacional de EstadsticaGeografa e Informtica (INEGI) en ligne : Comunicado nm. 106/06, 24 de mayo 2006, Oaxaca de Jurez,OAX. P. 3/6 ; Porcentaje de poblacin hablante de lengua indgena de 5 y ms aos por entidad federa-tiva, 2000 y 2005 ].

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    resque de ses sites et sur une grande richesse du patrimoine culturel, archologique etcolonial. Le terroir de diversit ethnique est avant tout associ aux images dun

    Mexique haut en couleurs, que les lobbies du tourisme dveloppent sur les friches desvestiges archologiques et sur les reprsentations bigarres dIndiens contemporains,supposs tre les tmoins vivants des imposants vestiges, zapotques (Monte Alban)et mixtques (Mitla) pour les plus connus. Les Zapotques et les Mixtques font partiedes illustres anctres prhispaniques aux cts des Mexicas et des Mayas, ce queserait venu renforcer la dcouverte par Alfonso Caso du trsor de la tombe 7 de MonteAlban en 1932, et les explorations de la place centrale du site en 1935 [Barabas etBartolom, op. cit., p. 37]. Ltat de Oaxaca est donc reprsent dans le panthon desIndiens qui appartiennent la haute culture , aidant ainsi la lgitimation de ltatNation par la profondeur de champ historique dune culture indigne. Mais le prestigede ces groupes ethniques ne se fonde pas seulement sur leur faste dantan. Il est aussirenforc par des personnages qui ont particip lHistoire nationale, au travers de leurart (notamment la peinture qui sinscrit dans une antique tradition du commerce de lacouleur : cochenille et indigos) ou de leur perce politique, avec le Prsident de laRpublique Benito Juarez (1806-1872), dascendance zapotque.

    Les Indiens ne sont par ailleurs pas seulement les objets aphones dune identitnationale qui puise sa lgitimit dans des vestiges archologiques. Ils en sont lesacteurs dans le contexte nouveau dun tat promoteur dethnicit, mais aussi pluslargement dans un espace transnational. Avec le rveil indien qui traverse lespays dAmrique Latine, se dveloppent les mobilisations visant une reconnais-sance des droits culturels, et lon assiste une politisation des identits [Gros, 2002,p. 57]. Dans ce climat de revendications la fois politiques et culturelles, ltat deOaxaca fut le premier lgifrer en 1986 sur la protection de la populationindienne 11, annonant les nouvelles dispositions du gouvernement mexicain lgard des minorits indiennes. Depuis 1995, la Constitution Fdrale reconnatles procdures de dsignation lectorales selon les coutumes indiennes. La mise enuvre de cette rforme, si elle conforte les nouvelles dispositions du gouvernementmexicain lgard des minorits indiennes, rsulte du croisement complexe de

    diffrentes logiques dacteurs, acteurs politiques de tous bords, intellectuels etorganisations indiennes [Recondo, 2001, p. 48-54]. Largument culturel tantappel par diffrents acteurs pour lgitimer des stratgies politiques souvent anta-goniques, le tourisme participe ainsi indirectement du jeu politique. Cest ce quelon peut observer lors de certains vnements folkloriques o les ethnies semettent en scne, apparaissant ainsi comme une expression ritualise de la pluri-ethnicit, nouveau vecteur du discours national. En engageant les acteurs dans unspectacle o ils reprsentent ce quils doivent tre en fonction de ce que lon attenddeux, la scne folklorique appartient ce que G. Balandier [1992, p. 22] identifiecomme le spectacle que le pouvoir donne de la nation en action et de lui-mme .Ces vnements o les Indiens sont sollicits pour produire leur culture peuvent

    11. Avec la promulgation en 1986 de la Loi Organique de la Dfense Indigne Ley Orgnica de Procu-radura para la Defensa del Indgena.

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    diffrence [Bayart, 1996, p. 48 et 60] par les communauts locales sert ici linscrip-tion stratgique dans un espace rgional.

    Dans cette perspective, distinguer une ethnicit de fiction laquelle soppose-rait une ethnicit plus vraie ne reviendrait-il pas renforcer des clivages souventpeu opratoires entre authenticit/inauthenticit ; bon/mauvais tourisme ? Au-deldes dcalages existant entre lexhibition et une prtendue homognit ethnique,lethnicit, au mme titre que les racines culturelles desquelles elle tire sa lgiti-mit, ne consiste-t-elle pas avant tout en une construction fluctuante des apparte-nances, dont la labilit ressort dun jeu complexe dinteractions sociales, politiqueset conomiques ? On peut en effet questionner le dcoupage culturel de la Guela-guetza partir dune mosaque ethnique hrite de la colonie qui ne correspond pas

    aux classifications locales. Ds les annes 1965, Julio de la Fuente [1990] adailleurs soulign la relativit dune identit ethnique en observant limportancede lappartenance villageoise chez les Zapotques. En ralit, limage de la diver-sit ici offerte est avant tout la rsultante de jeux politiques entre diffrentes loca-lits, siges de pouvoir lchelle rgionale.

    Lgitimit culturelle dun chef-lieu et reprsentation ethnique

    Ainsi ce ne sont pas des ethnies qui participent la Guelaguetza, mais deschefs-lieux de municipios 13. Tout en se trouvant consacrs comme des hauts lieux

    de reprsentativit ethnique, ces centres ont une certaine emprise politique dans desterritoires indiens hirarchiss. Une telle emprise dcoule des liens entretenus avecla socit mexicaine et ses institutions, regroupant ainsi un certain nombre desymboles de pouvoir, comme ceux du progrs (transports, infrastructure), des appa-reils officiels (les instituteurs et autres fonctionnaires, la hirarchie ecclsiastique,les sections lectorales et les autorits agraires) [Dehouve, 2003]. Cest le cas deHuautla, chef-lieu politique o sige la municipalit (ayuntamiento)et le prsidentmunicipal. Mais aussi haut lieu rgional, o a t implant, ds la cration de lINI(Institut National Indigniste) en 1948, un sous-centre coordinateur charg de lamise en application des politiques indignistes. En plus dtre le pivot depuis lequelsont rpartis les programmes agraires et dducation, Huautla est la base oseffectue une partie de la formation des instituteurs bilingues chargs de lensei-gnement de lespagnol lintrieur des terres. Fief aussi des transactions commer-ciales lies au caf. Important centre religieux enfin, pour tre chef-lieu de diocse,et le lieu dune fte religieuse de renom (la mayordoma du Seigneur des troischutes) qui draine des plerins de lensemble de la rgion.

    Plus largement, la question de la continuit ou de la discontinuit existant entrela mise en scne et la suppose authenticit des cultures semble relever avant toutde la reconnaissance de certains groupes aux anctres prestigieux, tels les Zapotques

    13. Le municipio est la plus petite unit administrative au Mexique. Il diffre de notre commune car ilpeut tre compos de plusieurs villages qui dpendent dun chef-lieu, tel le cas du municipio de Huautla.Huautla de Jimenez se compose dun chef lieu de 8801 habitants, et de 13 villages accessibles par piste. Latotalit du municipio comprend 27206 habitants (selon le recensement de 1995) : [Cuadernos Estadsticos

    Municipal, Huautla de Jimnez, Estado de Oaxaca, edicin 1997, INEGI].

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    ou les Mixtques , par rapport dautres dont lidentit nest pas lgitime par lapesanteur des vestiges archologiques, les institutions du souvenir que sont les

    muses, ou encore par des productions artisanales exemplaires. Do les fictionsethniques , en ralit emprunts dattributs des ethnies voisines qui font auto-rit, afin de rpondre la discrimination positive apparue ces dernires dcen-nies. Concernant la prestation des danseurs mazatques, celle-ci est prsente parune institution culturelle implante localement, la Maison de la Culture MaraSabina . Cette femme mazatque, dcde en 1985, est une chon chine (littrale-ment femme de savoir ou, pour les trangers, chaman ), devenue mondiale-ment clbre dans les annes 1970. Fonde en 1991, la Maison de la Culture estgre par la municipalitdu chef-lieu Huautla, et constitue ainsi un instrument dereprsentation ethnique. lchelle rgionale, les Mazatques, contrairement auxdeux grandes civilisations prhispaniques reconnues nationalement, ont une placebien particulire et surtout rcente dans le temple de la haute culture. Alorsquils ne sont pas reprsents dans les muses rgionaux, les Mazatques exhibentici des lments culturels qui ne correspondent pas un patrimoine matriel.

    Les danseurs mazatques, en plus des grains de caf lancs la vole au public,affichent en effet un accessoire devenu emblmatique du groupe : une touffe dechampignons stylise dans un panier brandi au-dessus du mouvement chaloup dela danse. Lemblme est dupliqu sur les broderies, artisanat local galementdistribu au public, o lon observe des entrelacs de fleurs et des grappes de cham-

    pignons. Alors que le caf renvoie lintroduction dune conomie de march dansla Sierra, cet accessoire reflte des pratiques chamaniques sculaires. Toutefois,voir dans lexhibition dun symbole magico-religieux la rmanence dun lointainhritage serait tomber dans les travers de lapproche substantielle que lon interrogeici. la suite dE. Hobsbawm [1996], nombre dauteurs ont soulign combien larfrence au pass est elle-mme un acte de cration effectu selon une perspectivebien contemporaine. Si lusage dhallucinognes est invoqu par les Mazatquespour signifier une certaine conception du monde, son ostentation est quant elle,bien nouvelle. Elle implique une autre utilisation dun symbole qui est appel, au-

    del de sa destination religieuse, tre support de distinction, et plus prcismentemblme culturel rig comme frontire symbolique du groupe mazatque[Barth, 1976]. Dans ce contexte, lemploi de cette frontire symbolique corres-pond lusage politique via la municipalit de Huautla dune reconnaissancetout dabord impulse par un vnement touristique international qui a marqu lalocalit. Huautla, en centralisant les institutions de promotion culturelle lchelledu territoire ethnique, se trouve tre le lieu partir duquel les acteurs locaux expor-tent les lments quils considrent comme emblmatiques de leur culture.Lagglomration se trouve alors instaure comme le sige dune reprsentationethnique qui conduit reprsenter le groupe comme un ensemble homogne, au

    dtriment des parties qui le constituent. Ainsi, tout Mazatque, ds lors quil setrouve hors du territoire ethnique, se dclare de Huautla pour signifier son apparte-nance ethnique, quand bien mme il nest pas originaire du chef-lieu. Les modesdappartenance, ds lors que lon prend en compte la diversit des situations dinte-raction, nen sont pas moins multiples. De mme, les emblmes emprunts au

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    chamanisme montrs sur les scnes folkloriques mettent en jeu la diversit dusocial, savoir les interprtations divergentes de ces symboles selon les usages

    [Demanget, op. cit., 2004a]. Linvention de la diffrence serait-elle ici assimilable une seule ethnicit de fiction ? Rpondre par laffirmative reviendrait ngliger les dynamiques de rappropriation locale. Quittons les estrades folklori-ques rgionales, pour nous pencher sur cette autre forme de tourisme in situ, o lesrelations touristiques se trouvent instruites dans lintimit communautaire.

    Mises en scne touristiques locales

    Huautla, lieu de modernit dans la Sierra

    Dans les coulisses du spectacle de la capitale, au-del des clivages qui ponc-tuent la relation distancie entre les danseurs indiens et les vastes publics duntourisme dit de masse , la bourgade est lobjet dexcursions plus marginales, enretrait des hauts lieux touristiques. Ces explorations des temps modernes prolon-gent celles des premiers voyageurs hippies venus prs de 40 ans plus tt. Lapriode rvolue de laffluence des annes 1970 a laiss place des visites quischelonnent au long de la priode estivale, saison des pluies et des champi-gnons rituels . Les visiteurs nchappent pas la curiosit des Huautlecos. Cesvisiteurs, quils soient des Mtis mexicains ou des Occidentaux, sont dans tous les

    cas considrs comme trangers, en tant tour tour dsigns comme touriste (turista), gens instruits (gente preparada), ou encore gens clairs (gero ouchjota chikon), qualificatifs qui ont en commun de souligner une sparation toutautant culturelle que sociale. Leur prsence permettra dalimenter les rumeurslocales mais aussi le halo de clbrit cens toujours flotter au-dessus de la bour-gade indienne. Lorsque les Mazatques vantent la renomme de Huautla, ilsninsistent pas tant sur le nombre que sur la varit des origines : Ici, noussommes dans un site international . La diversit que soulignent les autochtonesrenvoie lhtrognit bien relle des populations touristiques. lclectisme

    des origines des visiteurs rpond en effet la varit des motifs qui conduisent labourgade montagneuse : pratiques curatives essentiellement nationales, exprienceschamaniques nationales et internationales, plerinage sur ce haut lieu des annes1970, visite dun lieu indien pittoresque, mais aussi randonne, splologie, etenfin anthropologie. Ces disparits contribuent brouiller les tentatives de classifi-cation des touristes , dautant que les motifs noncs ici se croisent et se recou-pent, et ne sont pas exclusifs les uns des autres. Mais dun point de vue gnral,Huautla figure aujourdhui parmi les hauts lieux des chamans du Mexique 14,un lieu suppos protg des avatars de la mondialisation, source dinspirationmystique et sotrique pour de nombreux ouvrages. Comme le suggre le Guide du

    14. Titre dun ouvrage de Jacobo Grinbeerg-Zylberbaum [Rencontre avec des Chamans du Mexique,1994] dans lequel un chapitre est ddi Maria Sabina. Ce type douvrage (au mme titre que ceux deC. Castaeda) contribue alimenter le tourisme mystique qui visite les hauts lieux mexicains du chamanisme .

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    Routard[ Huautla de Jimenez , p. 202-203], on ne roule pas jusqu Huautla,mais on sy hisse, au prix de plusieurs heures de cahots, de boue, de ruisseaux

    passs gu , longeant des ravins vertigineux , traversant des hameauxmisrables , pour enfin parvenir la bourgade accroche flanc de coteau.Enchantement dun passage qui marque une frontire entre deux mondes. Et pour-tant Huautla est aussi ville de modernit. Ville ouverte sur la socit nationale,insre dans les filets de lconomie internationale via les productions cafires, ouencore, projete sur la toile de la culture mondialise via le tourisme chamanique.

    la priphrie des grands axes touristiques, lagglomration est accroche auxflancs de la Sierra Madre Oriental, dominant du haut de ses 1 600 mtres un amplepaysage karstique. Le chef-lieu administratif et politique depuis lpoque coloniale

    a aujourdhui sous sa tutelle treize agences municipales , petits villages majori-tairement accessibles par la piste. Les profondes dissensions politiques, analysescomme rsultant de lintroduction de lconomie capitaliste venant rompre lqui-libre dune conomie de subsistance [Boege, 1988 ; Neiburg, 1988], ont conduit lclatement de lancien systme bas sur les us et coutumes. Alors que les luttesdintrts secouent la scne politique locale, Huautla a opt pour le systme departis 15. Plus que jamais, il est difficile de projeter sur les Mazatques lidemanant de lInstitut National Indigniste ses dbuts dfinissant la communaut comme ferme, autosuffisante et homogne.

    La croissance de la bourgade depuis 1950 a connu un dveloppement exponen-tiel 16. Si le rapport entre le nombre dIndiens monolingues (langue vernaculaire) etbilingues (mazatque/espagnol) sinverse entre 1960 et 1990 17, on remarquera unerelation similaire non plus dans le temps mais dans lespace, entre le chef-lieu et lesvillages. lchelle du municipio coexistent diffrents temps sociaux reprablesdans lespace. Les localits adjacentes et les zones intermdiaires o lon observeun habitat semi-dispers sont majoritairement peuples de petits producteurs. Enplus du toponyme vernaculaire (Te jao : les douze ), Huautla est aussisurnomm le centre (ni y), et ses habitants les gens du centre (chjota ni y).Espace dintense activit commerciale (ni y signifie galement place du

    march ), le centre est aussi le lieu de confluence entre les petits producteurs,majoritairement de lintrieur des terres, les commerants, les ngociants de caf,les instituteurs, mais aussi les migrants et les touristes. Lagglomration simposealors lchelle de la Sierra Mazatque comme une contre dchanges interculturels.

    15. En 1998, 412 municipios sur 570 optrent pour le systme des us et coutumes, et en 2001, sixnouveaux municipios ont rejoint le systme des us et coutumes.

    16. En 1950, on compte 18 211 habitants, puis 27 206 en 1995. Selon les recensements de lINEGI effec-tus tous les 10 ans : voir Poblacin Indgena de Oaxaca 1895-1990, Consejo Estatal de Poblacin, Oaxaca(1994) ; Cuadernos Estadistico Municipal, Huautla de Jimnez. Estado de Oaxaca, Edicin 1997, Gobiernode Oaxaca, INEGI, Ayuntamiento Constitucional Huautla de Jimnez (1998).

    17. Plus de 14 610 monolingues en 1960 contre 3583 bilingues, et seulement 7 224 monolingues contre13 094 bilingues en 1990. La rapide hispanisation des populations indiennes est le rsultat des politiques enmatire dducation, objectif privilgi du gouvernement ds le dveloppement des politiques indignistesqui suivent la cration de lInstitut National Indigniste en 1948, dont un sous-centre coordinateur est install Huautla en 1951.

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    Emblmes identitaires : du local au global

    Parmi les attributs culturels exposs dans la vitrine folklorique de la Guela-

    guetza, ceux qui relvent du chamanisme sont aussi reprsents dans la ville maza-tque. On y remarque diffrentes figures identitaires qui traduisent larticulation dela localit avec la rgion et la nation. Des emblmes politiques tout dabord. Sur laplace du march sige la statue de Ricardo Flores Magon, natif du municipio maza-tque San Antonio Elosoxitlan, et anarchiste la tte des revendications sociales dela classe proltarienne et artisane lors de la Rvolution mexicaine entre 1910 et1917. Personnage historique associ aux mouvements politiques contestataireslocaux en lien avec les mouvements nozapatistes, cette statue se multiplie sur lesplaces des villages de la sierra. Elle y ctoie leffigie du Prsident indien Benito

    Juarez (1806-1872), symbole identitaire rgional comme on la vu. En plus de cesemblmes politiques, qui expriment un double mouvement de distinction etdunion, des objets dun autre ordre affichent une nette htrodoxie. Les restau-rants, les boutiques de souvenirs ou les htels arborent divers accessoires leffigiedes champignons montrs la Guelaguetza. On observe aussi lexhibition du nomde la chaman Mara Sabina. En plus des nombreux crits locaux 18 et du festivalannuel ddi sa mmoire, le visiteur peut savourer le menu Mara Sabina ,aller la Maison de la Culture Mara Sabina ou encore prendre un taxi MaraSabina .

    Ces nouveaux symboles sont-ils la base dune ethnicit stratgique solli-cite dans des buts exclusivement touristiques [Mac Cannell, 1973] ? En partieoui, si lon considre quils sont devenus les accessoires dsenchants des commer-ants du centre 19. Dans un mme temps, les intellectuels locaux sattachent lesterde contenu ces ustensiles commerciaux dpouills de fondements culturels. Cesmmes symboles sont alors invoqus afin de faire valoir un savoir jusqualorsdprci ou ignor, attribut distinctif de la culture autochtone. On peut sinterrogersur lide du tourisme comme tant lorigine dune ethnicit construite laseule attention des visiteurs. On a de la sorte montr que la rappropriation par lesMazatques de symboles culturels tout dabord rvls par la presse nationale et

    internationale, appartient avant tout un contexte historique local et national,contexte au sein duquel se pose la problmatique des rapports entre ltat mexicainet les populations indiennes, et plus prcisment de la transformation des politiquesindignistes. Mara Sabina se trouve mobilise comme un symbole subversif, aucentre dun processus dethnogense dont les Mazatques sont les acteurs[Demanget, 2004a]. Aujourdhui cependant, alors que lindignisme de participa-tion institue les Indiens comme les propres auteurs de leur dveloppement, la figurede Mara Sabina, sollicite pour reprsenter un glorieux pass prhispanique, faitpartie de valeurs largement partages dans lensemble de la socit mexicaine.

    18. Les crits mazatques surgissent la suite du livre de Estrada [1977]. On compte ainsi ceux deGarca Carrera [1987], Estrada [1996], Garca Carrera et alii [1997].

    19. Le commerce du chamanisme ne saurait cependant tre cantonn aux commerces du centre : ilengage des changes subreptices entre les plus nantis du chef-lieu et les gens humbles des priphries,dtenteurs du savoir chamanique [Demanget 2000 et 2001].

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    Des secteurs de plus en plus vastes de la socit mexicaine combinent cesapproches, o le no-indianisme se rvle la fois porteur de spcificit et cra-

    teur d universaux [Galinier et Molini, 2006]. Huautla figure alors dans unparcours o chaque visiteur se construit sa mythologie personnelle, combine letemazcal, lacupuncture et le chamanisme. Le champignon est teonanacatl ,terme aztque dsignant la chair des Dieux. Il appartient un culte qui aurait mira-culeusement survcu lradication par les Espagnols des pratiques idoltres.Lantiquit de l objet garantit lmotion de lexprience. Les autochtones lontbien compris : La chaman Mara Sabina, conue comme la gardienne dun au-delde lhistoire, affilie au prestige de la civilisation aztque, se trouve systmatique-ment invoque dans le commerce de la tradition et dans les changes entre autoch-tones et touristes [Demanget, 2001, 2004a]. Au cur de la relation entre touristeset autochtones, cette figure se trouve alors en tension entre linscription locale etdiffrentes sphres de reconnaissance, nationales ou internationales, gnrant lafois spcificit et universalit.

    Une fte pour les touristes ? Le festival Mara Sabina

    Lappropriation locale de la clbre chaman montre ici combien la fabrication dela culture , en tant relationnelle, relve de contacts tablis aux franges de lasocit mazatque. Ainsi, durant la priode estivale, temps du tourisme, de la saisondes pluies et des champignons hallucinognes, les Mazatques organisent le festival Mara Sabina avec lappui dinstitutions locales, rgionales et nationales. Lesvisiteurs allochtones alors prsents sont avant tout des gens tte blanche (chjota nga chikon ou geros), terme sollicit pour dsigner tout autant des Mtismexicains que des Occidentaux. Le public du festival, au grand dam de certainsorganisateurs locaux, est moins Huautleco qutranger, avec la participation dejeunes mexicains de la capitale, de dlgus institutionnels appartenant lINI (prsent CONADEPI) et de lIMSS (Institut Mexicain de Scurit Sociale), demembres dassociations de mdecine traditionnelle du Oaxaca, mais aussi degroupes de la nouvelle mexicanit conjuguant nativisme et New Age (tels le MAIS :

    Mancomunidad de la America India Solar). On imagine lclectisme dun tel vne-ment, o cohabitent les thrapeutes locaux (chjota chjine : gens de savoir le plussouvent petits producteurs monolingues), les partenaires institutionnels, la popula-tion locale, les groupes no-indiens et les touristes. Cet vnement, tout localisquil soit, se trouve engag dans les relations instruites la priphrie communau-taire, avec les institutions nationales, des organisations rgionales, et les instrumentsde reprsentativit culturels locaux (municipalit, maison de la culture). Linstaura-tion de Mara Sabina comme frontire ethnique se trouve alors essentiellementporte par des acteurs locaux se situant lintersection de deux cultures les

    instituteurs bilingues, souvent aussi acteurs politiques, et les migrants.

    Au-del du tourisme : la fte des morts

    Certes le festival Mara Sabina illustre une fabrication de soi (de sa culture )avec de lAutre. Mais les artisans dune telle fabrication sont dhabiles bricoleurs,

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    et leur inspiration est loin de sabreuver des seuls regards allochtones. La mise enscne de la culture que lon observe aujourdhui Huautla et dans les autres muni-

    cipios mazatques dpasse largement le cadre de traditions inventes sous limpul-sion de lvnement touristique. leffervescence de la saison des pluies, qui estloccasion du festival Mara Sabina, de la promotion et du commerce de la tradi-tion, rpond un autre vnement : celui de la Fte des morts, clbre dans toutesles communauts indiennes du Mexique. Huautla, des milliers de migrants, rsi-dant dans les grands centres urbains reviennent la Sierra. Certains, qui ny sontpas en situation illgale, font le voyage depuis les tats-Unis. Cest loccasion pourceux qui sont partis depuis plusieurs annes, de renouer avec leur terre dorigine.Comme lcrit H. Nutini [1988, p. 57], Todos Santos est temps de retour au foyer,de souvenir et de clbration de la mort , la campagne et la ville se trouventensemble, la petite communaut devient le centre cosmologique de lexistence .Une rencontre entre ville et campagne aussi lorigine de mises en scne cultu-relles et dun autre genre de tourisme. Les premiers acheteurs des objets touristi-ques reprsentant des lments du chamanisme sont en effet les migrants, Mazatquesdlocaliss qui reviennent rgulirement pour les clbrations dalliances. En tmoi-gnent les chemises brodes de champignons, portes lors de cette occasion par denombreux Mazatques, alors que bien souvent les trangers ddaignent ce folkloreloin de leur qute dmotions authentiques . Cet vnement, en relation avec uneclbration coutumire, peut alors tre envisag dans la perspective dun

    tourisme aux sources ou tourisme aux racines [Bernardi, 1993] sur le modefestif et participatif.

    Durant les sept jours des morts, on assiste une renaissance dun thtre rituel,celui du retour des mes des dfunts (Nd Nima). Les morts sont reprsents pardes jeunes dguiss, Gens du nombril (Cha xoo), et ils errent durant les septnuits de la fte de Todos Santos. Les Cha xoo, sont aussi dnomms Cha jma( Gens obscurs ou gens masqus ). Passant de foyer en foyer, en change deleur danse et de leurs chants en langue vernaculaire, ils reoivent les offrandesddies aux morts sur les autels domestiques : fruits et eau de vie. Leur comporte-

    ment dbrid, au dpart jou, est vite transport par les effets de lalcool. Ces mani-festations spontanes, o lintemprance des gens masqus relve de la normecoutumire, sont par ailleurs lobjet dune thtralisation qui connat depuis lesannes 1980 une nouvelle vitalit. Pendant que les danses se poursuivent dans lanuit, on assiste une multiplication des concours de Gens masqus et lappa-rition dun vritable thtre de la tradition. Dans divers municipios de la Sierra,lglise, les municipalits, les coles, avec lappui conjoint de lINI, mais aussicertaines associations culturelles prives, organisent des concours sur les placespubliques [Demanget, 2004b]. Huautla, sige des plus importantes reprsenta-

    tions, cest nouveau la Maison de la Culture Mara Sabina qui prend en chargeune partie des vnements culturels.

    Alors que diverses communauts indiennes sont visites par les Mexicains desvilles mtisses les plus proches, peu dtrangers sont prsents lors des sept jours desmorts. Hors de la saison des champignons, la cit de la magie perd de son attrait.

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    Mais cet vnement, en troite relation avec cet autre agent daltrit que sont lesmigrants, rejoint une forme de tourisme observe par ailleurs : M.-O. Graud

    [2002] dcrit ainsi chez les Hmong de Guyane Franaise le retour des migrants cita-dins, de mtropole et dailleurs, sur le mode dun retour aux sources de la tradition.Ainsi les protagonistes de la relation touristique, ne sauraient ici tre identifis sousle seul versant dun change entre trangers non-Mazatques et Mazatques.Ltranget lorigine dune production de singularit culturelle nest plus celledes Autres considrs comme trangers.

    Le quotidien des migrants se situe hors de la communaut. Au mme titre queles Mexicains mtis qui affluent dans les villages typiques lors de cette fte, ilsreviennent assister et participer au spectacle de la tradition du chef-lieu. Toute-

    fois, la patrimonialisation ne vise pas ici des trangers : elle conduit rassemblerles Mazatques des centres et les gens humbles (chjota yoma) des priph-ries dans une fte en partie recompose. Fte o toutefois une observation finepermet de dceler les pratiques diffrencies de chacun. Lintrieur des terresrsonne des tambours des Cha xoo errants, alors que la ville contient sur une scnethtrale le jeu des acteurs de la nuit. Fte o certains groupes, pour avoir gagnplusieurs concours ou enregistr leur disque, ont la reconnaissance du public. Odautres, plus spontans, poursuivent leur errance nocturne et anonyme.

    Tourisme interne ou tourisme aux sources, laffluence semble intervenir comme

    un prolongement de l autre tourisme dans ce temps o lusage rituel du Sang duChrist (champignons) est interdit 20 et o les trangers se font rares. Alors que lefestival Mara Sabina reste localis dans le chef-lieu, la houle des tambours desmorts traverse lensemble du territoire. Toutefois, ces deux ftes aux publics diff-rents ne sont pas en tout trangres. Les conceptions no-indiennes que lon avoques imprgnent les nouvelles exgses produites lors des concours de Cha xooorganiss dans les coles. Les interprtations des lves et des instituteurs combinentconceptions vernaculaires et interprtations no-indiennes consonance aztque. Parailleurs, si lon a mis en avant le caractre cosmopolite du festival Mara Sabina, laFte des morts apparat, elle aussi, une autre chelle et pour des raisons diffrentes,comme un rassemblement profondment composite. la diversit des populationsqui se mlent durant ce temps ddi aux morts, sajoutent les diffrentes pratiquesdes Cha xoo entre thtre et errance titubante. Les dguisements dHalloweenctoient des Cha xoo masqus de bois selon la tradition, mais aussi de plastique,travestis des visages du sous-commandant Marcos ou de Ben Laden.

    Conclusion

    Les catgories de touriste et d indien ont en commun dtre les hritires

    des nombreux prjugs issus des socits occidentales qui leur ont donn naissance.

    20. Il nest pas fortuit que le mme terme (Nd santo) soit utilis pour dsigner tour tour les champi-gnons et les mes des dfunts : les champignons aussi Sang du Christ (Njile Kristo) conduisent l me du vivant (sen : son apparence ou enveloppe) vers les images des Saints (Santo) et des morts (Nd nima,Ndsanto). Lusage du Sang du Christ est interdit car les morts sont parmi les vivants [Demanget, op. cit., 2004b].

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    Parmi ces prjugs, les identifications sociales et culturelles externes ontconduit poser des frontires qui ne correspondaient pas toujours aux pratiques et

    aux reprsentations des acteurs. Cest le cas par exemple des tiquettes ethniquesque le colonialisme et lanthropologie ont contribu figer. Mais aussi des clivagesclassiques entre les voyageurs et les socits rceptrices, alors que par ailleurs onobserve un fractionnement des anciennes frontires (tant sociales que concep-tuelles) des communauts indiennes [Dehouve, 2003].

    Le tourisme, envisag du point de vue des relations intra-ethniques dun groupesymboliquement dfini hors de dterminations strictement territoriales, apporte unnouvel clairage la question de lethnicit. Lexemple de Huautla permet demettre en lumire des pratiques qui, au Mexique tout au moins, ont rarement t

    envisages sous cet angle : si lon y observe un mouvement entre centres urbains etbourgades indiennes pittoresques, les Indiens urbains participent de ce dplace-ment, contribuant de la sorte aux rcentes constructions ethniques. Les pratiquestouristiques de chacun se diffrencient toutefois par leurs motifs. Parmi les popula-tions htrognes venues goter lexprience de laltrit, pour les nationaux ilsagit dun vcu de lorigine qui salimente des conceptions no-indiennes, entreenracinement dans un sol originel et projection plantaire sur fond de conceptionsNew Age [Galinier, Molini, op. cit.]. Quant aux migrants, mus par des motivationsidentitaires, leur retour sapparenterait un tourisme aux sources , contribuant rinventer leurs origines en puisant dans les conceptions locales et/ou no-indiennes. Ces observations conduisent brouiller les cadres figs des typologies et faire exploser toute vision monolithique du touriste [Le Menestrel, 2002].

    Selon cette perspective, comment conclure labsence de tourisme dans deslocalits indiennes qui nont pas t lues comme lieu de visite touristique ?Plus ou moins directement, comme en tmoigne la fte de la Guelaguetza, lesIndiens sont appels participer la reprsentation touristique dune rgion. Etplus largement alimenter limage politique dun tat qui se dfinit comme pluri-culturel. Le tourisme, ainsi que le remarque M.-F. Lanfant [1994, p. 434], nest passeulement l o il y a des touristes. En tmoigne par exemple le rle des institutions

    gouvernementales dans les procs de fabrication artisanale, o lon observe unetendance la dissociation entre les artisans indiens et les acheteurs, avec unecentralisation des produits sur les marchs artisanaux [Pietry-Levy, 1991, p. 187].Dans des lieux o rgnent la drliction sociale et labsence de travaux anthropolo-giques, lagent daltrit qui participe de la patrimonialisation est alors constitupar les politiques indignistes [Ariel de Vidas, 1993, 1994]. Dans dautres localits,o la cration artisanale surgit suite linvention dun personnage marginal tellecelle des diables dOcumicho, dans le Michoacan , la production se dveloppe autravers dune interaction entre les artistes locaux et les institutions indignistes

    gouvernementales [Gouy-Gilbert, 1987].Lanalyse du jeu des diffrents acteurs et agents daltrit permet ici dinter-

    roger les nouvelles constructions ethniques, en les confrontant aux dynamiques deterritoires hirarchiss, aux types de relations existant entre les localits et ltat,aux enjeux politiques locaux, rgionaux et nationaux. Lobservation du chef-lieu

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    de Huautla illustre le rle du tourisme dans les nouvelles laborations ethniquespositives et dans les productions culturelles locales. Impliquant divers protago-

    nistes (touristes internationaux, nationaux et intra-ethniques , institutionsdtat, acteurs locaux), le phnomne touristique lorigine de lmergence delemblme Mara Sabina se situe la confluence de problmatiques trsdiverses. Celle des relations tablies entre les groupes ethniques et les appareilsofficiels. Celle dacteurs locaux qui construisent une nouvelle appartenance, denouvelles limites pour baliser les contours de plus en plus flous dune communauthtrogne. Celle aussi de la plurivocit de ces emblmes identitaires au sein decette communaut locale. Celle enfin dune facette de lidentit nationale qui seconstruit autour dune origine qui nest plus uniquement musale. Dans cesconfrontations linterface du local, du national et du global, les discours et lespratiques se croisent autour de projections de ltre Indien qui servent des motifstant identitaires que politiques situs diffrents niveaux de la socit mexicaine.

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