atelier: prise en charge des patients psychotiques...
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ATELIER: prise en charge des patients psychotiques violents
Frédéric Millaud, psychiatre Jean-Luc Dubreucq, psychiatre
Institut Philippe-Pinel
19 avril 2017, Lausanne
Thèmes abordés
L’évaluation du risque
Les cadres légaux
Les principes généraux des traitements
La mise en place d’un milieu thérapeutique
Le rôle de la CETM dans le traitement
Le cas particulier des crimes intrafamiliaux
La sortie de l’hôpital et le suivi externe
Le traitement des patients psychotiques dans un hôpital de psychiatrie légale
• Les composantes légales:
- commission d’examen des troubles
mentaux
- ordonnance de traitement contre le gré
- garde en établissement
- mesures de protection
- détention carcérale
Le traitement des patients psychotiques dans un hôpital de psychiatrie légale
• Les éléments évaluatifs:
– Évaluation de la pathologie
– Évaluation du risque
– Évaluation des progrès en traitement
– Évaluation du niveau de soins requis et articulation avec le réseau hospitalier (hiérarchisation des soins)
Le traitement des patients psychotiques dans un hôpital de psychiatrie légale
• La prise en charge thérapeutique: – Pharmacothérapie – Psychoéducation – Psychothérapie – Interventions familiales – Thérapie de milieu – Interventions spécifiques: gestion de la colère, groupes
toxicomanie, art-thérapie, ergothérapie, école, ateliers, groupes de socialisation, groupes de réinsertion et estime de soi etc…
– Travail d’équipe
Le traitement des patients psychotiques dans un hôpital de psychiatrie légale
• Des points importants:
La stabilité de l’état mental vs pathologies
réfractaires
L’alliance thérapeutique, la transparence et les enjeux de liberté (médecin traitant et médecin « expert »)
Les autocritiques et les deuils (maladie et risque de rechute, délit et conséquences…)
L’utilisation thérapeutique des contraintes légales
Le traitement des patients psychotiques dans un hôpital de psychiatrie légale
• La durée de séjour
• Les traitements externes
• Les réitérations homicides
Plan de la présentation
• Types d’actes violents
• Facteurs de risque tirés des données de la littérature
Facteurs de risques de violence
• Du malade psychotique
• Axée envers les autres
• (notion d’hétéroagressivité)
Les facteurs démographiques
• Âge
– Jeunes (moins de 30 ou 40 ans)
• Sexe
– Maladie mentale augmente le risque de violence exercée par les femmes
• État matrimonial
– Célibataire
• Statut socio-économique
Éléments de l’histoire personnelle
• Exposition à un environnement familial perturbé
– Modèles violents
– Mauvais traitements
• Antécédent délictuel
• Valeurs de la personne
Éléments de l’histoire personnelle
• Antécédents de violence
– Type de manifestation
– Cible
– Conséquences pour la victime
– Lieu de la manifestation violente
– Le temps d’élaboration
– Accessibilité à la victime et à des armes
Facteurs d’intoxication par l’alcool et les drogues
• Facteur le plus important dans la population générale
• Alcool
• Cannabis
• Cocaïne
• Ecstasy
• PCP
Facteurs liés à l’état mental
• Les symptômes – Délires
– Hallucinations impérieuses (qui donnent des ordres)
– Idées de violence
– Idées suicidaires ou homicides
– Désorganisation de la pensée
– Modification par rapport aux symptômes habituels
Facteurs liés à l’état mental
• L’accès au contenu psychique
– Grande prudence si le patient est réticent à livrer le contenu de ses pensées
• Grande aide de la famille à cet égard
• Être à l’affût des contradictions
• L’évaluateur doit poser des questions précises et directes sur les idées de violence
• Le diagnostic
Les facteurs neuropsychologiques
• Les capacités cognitives
• L’impulsivité
• Permet de préciser la dangerosité
• Permet des pistes d’intervention
L’autocritique
• Au moment de l’évaluation on observe
– Déni total ou partiel de la violence
• Déni = facteur de risque
• Autocritique évaluée vis-à-vis de:
– Violence antérieure
– Existence d’une maladie mentale
– Violence ultérieure
L’observance pharmacologique
• Nécessaire à la stabilité de l’état mental
• Grande importance que le patient comprenne bien ce qu’il prend
• Discussion à propos des effets secondaires
Alliance thérapeutique
• Corrélation positive entre alliance thérapeutique et résultat thérapeutique
• Notion de « pseudo-alliance thérapeutique »
Mise en place d’un cadre thérapeutique
• L’évaluation, partie intégrante du traitement
• Autocritique et alliance thérapeutique
Mise en place d’un cadre thérapeutique
• Outils institutionnels hospitaliers:
Equipes multidisciplinaires
Approche bio psycho sociale
Contacts avec les familles, l’entourage
Consultation auprès d’un collègue
Mise en place d’un cadre thérapeutique
• Outils juridiques:
Garde en établissement
Ordonnance de traitement contre le gré
« judiciarisation » et T.A.Q.
Probation avec mesures de soins
Mise en place d’un cadre thérapeutique
• Pensée juridique vs clinique
• Les droits de l’individu vs la société
• L’imperfection du jugement humain et l’incapacité de prédire l’avenir
La prévention
• Prévention primaire
Accessibilité aux soins et ressources suffisantes
Formation continue ( milieu de la santé, de la justice, de la police …)
Information au public, directe ou par le biais des médias
La prévention
• Prévention secondaire
Maintien d’un traitement au long cours
Collaboration patient/ équipes de soin/ famille/ ressources intermédiaires et communautaires/ justice/ police
Que peut faire l’entourage?
• Ne pas nier sa peur
• Ne pas nier le risque lorsqu’il existe
• Identifier les signes précurseurs de maladie et de violence. Repérer les discordances entre discours et comportements
• Ne pas rester seul avec le problème. demander de l’aide
Que peut faire l’entourage?
• En cas de demande d’hospitalisation, insister pour donner l’information sur les éléments de dangerosité et de maladie observés au personnel en place ( infirmière, médecin).
Que peut faire le patient?
• Ne pas nier sa peur
• Ne pas nier le risque de violence
• Ne pas rester isolé
• Demander de l’aide
• Collaborer le mieux possible aux traitements
Cinq concepts clés (Gunderson, 1983)
1. Contenir
2. Soutenir
3. Structurer
4. Socialiser
5. Comprendre
1. Contenir
Contrôle comportemental
Forces destructrices
Mentalisation difficile
Rendre assimilable ce qui ne l’était pas
4. Socialiser
Développer des capacités
Être confronté à des frustrations
Apprivoiser le monde extérieur
5. Comprendre
Accepter les symptômes
Se soustraire de leur effet
Aller au-delà des symptômes
Résister aux attaques
Cinq moyens utilisés
1) Médiations relationnelles
2) Vie de groupe
3) Activités
4) Entretiens
5) Travail d’équipe
1) Médiations relationnelles
• Vécu partagé
• Travail de médiation
• Assimilation
• Accommodation
• Adaptation
• Pare-excitation
• Contenant
• Miroir
• Arrêt d’agir
• Expérience émotionnelle correctrice
2) Vie de groupe
⋟ Collaboration
⋟ Communication réciproque
⋟ Esprit d’entraide
⋟ Difficultés d’écoute
⋟ Incompréhension
3) Activités
⋟ Occasions de se réaliser
⋟ Peu menaçantes
⋟ Activations émotionnelles et relationnelles
⋟ Reprise de l’individuation
⋟ Banalité du quotidien
⋟ Tuteurs de développement
4) Entretiens
⋟ Différentes formes
⋟ Réalité partagée
⋟ Accompagnement verbal • Dans l’immédiat
• Spontané
• Besoins individuels et du groupe
⋟ Complémentarité
5) Travail d’équipe
⋟ Se distancier
⋟ Peur
⋟ Tuteurs de fixation
• Loi d’homéostasie
• Loi d’homologie
⋟ Collaborer
⋟ Coordination
Pertinence
• Conception biopsychosociale
• Maladie: modèle vulnérabilité-stress
• Traitement: modèle de la gestion du stress
Pertinence (suite)
• Efficacité thérapeutique • Efficacity of a self-esteem module in the
empowerment of individuals with schizophrenia, Lecomte T et al., (1999) Journal of Nervous and Mental Disease.
• Soteria Berne: An innovative milieu therapeutic approach to acute schizophrenia based on the concept of affect-logic, Ciompi L., Hoffman H. (2004).
World Psychiatry
Pertinence (suite)
• Action globale de la thérapie de milieu
• Figures d’attachement
• Développement identitaire
• Expériences émotionnelles correctrices
• Capacité de contenir et de métaboliser
Conclusion
• Double fonction
⇒ intégration et maintien
⇒ thérapie complémentaire
• Sens identitaire
• Pensée clinique
la CETM le point de vue d’un clinicien
les acteurs
Les commissaires
Le patient
Le médecin traitant / expert, l’équipe de soins
L’hôpital
Les avocats (patient, couronne, hôpital)
Le contre expert
Les familles et amis, voire le public
Les journalistes
la CETM le point de vue d’un clinicien
mise en contexte
Bref rappel sur l’Institut Philippe-Pinel
Ma pratique
Pour simplifier la présentation:
exclusion des cas d’inaptitude
situations qui nécessitent un traitement intra-hospitalier
la CETM le point de vue d’un clinicien
le travail avant l’audience
Les enjeux :
• l’évaluation du risque
• l’alliance thérapeutique
• la mise en place du traitement
• la relation avec les éventuelles victimes et l’entourage
la CETM le point de vue d’un clinicien
le travail avant l’audience
Les moyens:
• le travail multidisciplinaire
• les outils d’évaluation
• la transparence
• l’identification d’objectifs communs
• le soutien et la prise en compte de l’entourage et des victimes
la CETM le point de vue d’un clinicien
le rapport psychiatrique
Rigoureux, précis
Inclut une section spécifique sur le risque de violence
Inclut une recommandation qui doit être argumentée et s’appuie de façon logique sur les éléments cliniques avancés
Doit tenter de répondre aux 2 questions du tribunal: le danger pour autrui et les perspectives de réinsertion sociale
la CETM le point de vue d’un clinicien
le rapport psychiatrique: multifonctions
Document d’expertise
• lu par le patient • lu par l’avocat du patient • lu par l’avocat de la couronne • lu éventuellement par la famille
la CETM le point de vue d’un clinicien
le rapport psychiatrique: multifonctions
Document médical (utile à des collègues et aux équipes multi)
Document qui peut impliquer d’autres professionnels (ex: HCR 20, évaluations psycho, neuro psy…)
Document thérapeutique
la CETM le point de vue d’un clinicien
le témoignage: acmé des conflits éthiques
Médecin expert et médecin traitant: un conflit de rôle; le psychiatre agent de contrôle social ? Jusqu’où ? le respect comme valeur fondamentale.
Représentant du patient et le plus souvent de l’institution (mandat attribué à l’hôpital). Divergence rare mais possible.
La recherche du bien pour le patient, l’entourage, la société et le respect de l’autonomie: des conflits possibles entre le légal et le clinique.
la CETM le point de vue d’un clinicien
la gestion des conditions de liberté
Encore un exercice d’équilibre pour tous:
Assurer un contrôle « raisonnable » sur le patient et l’institution et respecter un processus thérapeutique bénéfique pour le patient et applicable par l’institution.
Déléguer certains pouvoirs mais fournir un cadre.
Assumer certaines décisions qui aident le clinicien dans la relation thérapeutique.
la CETM le point de vue d’un clinicien le rôle thérapeutique de la CETM
Le rôle de structuration symbolique du tribunal:
rôle de tiers dans la dyade thérapeutique, rôle
de contenant psychique, pôle de réalité,
explicitation des interdits…
La préservation du sentiment de justice chez
tous par des mécanismes d’appel.
la CETM le point de vue d’un clinicien:
un système parfait ?
Il limite l’arbitraire.
Il a fait ses preuves pour le bénéfice des patients et de la société. Très peu de récidives et encore moins de réitérations délictuelles.
Il inspire particulièrement nos cousins d’outre mer (cliniciens et juristes).
Il permet d’assurer des soins à long terme à une population fragile et stigmatisée.
la CETM le point de vue d’un clinicien:
un système parfait ?
• Absence de formalisme des audiences bénéfique sur le plan clinique.
• Difficile de faire mieux dans une société
démocratique face à des situations très complexes.
• La loi C14 est-elle cliniquement nécessaire ? Non Peut-elle être néfaste ? Rendez vous cet après midi
Institut Philippe-Pinel de Montréal
Centre hospitalier à sécurité maximale - 290 lits Unité de traitement D-1 - 21 lits - Patients psychotiques violents - Spécificité: violence intra-familiale - Jugement de non responsabilité criminelle - Équipe multidisciplinaire
Violence psychotique homicide
• Événement rare
• Maladie mentale sévère non traitée augmente le risque
• Victimes en majorité dans l’entourage familial
• Parents principales cibles
Étude parricides (N=30)
• Victimes: mère = père
• Violence excessive (~20%)
• Sémiologie : délire de persécution, de contrôle, hallucinations auditives impérieuses
• Victime = persécuteur identifié chez près de la moitié
Étude parricides (N=30)
7/30 victimes de violence physique par victime durant l’enfance
20/30 sujets vivaient avec la victime -11 étaient retournés dans les mois précédents
Repères thérapeutiques
Phases d’évolution en traitement :
déni
acceptation progressive: délit, maladie
prise de conscience et intégration des
séquelles relationnelles
- Durée moyenne de séjour : ~3 ans
Réaménagement post délictuel des relations familiales
- Comment composer avec les conséquences de son geste?
- Deuils multiples
- Réaction la plus habituelle du patient : l’acceptation de la mise à distance, sous quelque forme que ce soit
Réaménagement post délictuel des relations familiales
La famille
Réactions premières: sidération, colère, rejet, culpabilité, peur, etc.
Interventions premières: prise de contact, répondre aux questions, les rassurer de leurs réactions et de la prise en charge
Réaménagement post délictuel des relations familiales
La famille : pendant l’hospitalisation
• Les aider à trouver la distance qui leur convient
• Leur suggérer une aide extérieure
• Assurer entièrement la prise en charge du patient
Réaménagement post délictuel des relations familiales
Réinsertion sociale
− Moment de vérité pour patient et famille
− Période des ajustements et des aménagements relationnels à plus long terme
Réaménagement post délictuel des relations familiales
Quelques chiffres 5 ans après le délit (N=27 car 3 parricides doubles)
Parent :
- Cessation de cohabitation : 100%
- Coupure totale : 7%
- Contacts occasionnels : 50%
- Contacts fréquents : 43%
(reçoit à domicile : 14%)
Réaménagement post délictuel des relations familiales
Quelques chiffres 5 ans après le délit
Fratrie :
- Coupure totale : 67%
- Contacts occasionnels : 63%
- Contacts fréquents : 4%
Dissension au sein de la fratrie: 29%
Lorsque parricide double et violence excessive: plus de ruptures et de restrictions
Réaménagement post délictuel des relations familiales
Évolution à long terme ( 5ans et plus)
- Peu de changements
- Support entre patients parricides
- Aucun suicide
- Suivi long terme
Facteurs de risque et
facteurs de protection de
comportements violents à la
sortie d’une hospitalisation :
point de vue clinique
Le processus décisionnel de sortie de l’hôpital s’appuie sur plusieurs éléments :
• l’évaluation et la prise en compte des antécédents
• l’évaluation et l’observation des éléments cliniques durant l’hospitalisation
• l’évaluation du potentiel clinique du patient - atteinte partielle ou totale des objectifs de traitement
• ressources et types de contexte environnemental possible après l’hospitalisation
Évaluation des antécédents de maladie et de violence
• Nombre d’épisodes de maladie et de gestes violents
• Gravité • Fréquence • Courbe évolutive • Récidive de gestes graves • Liens entre maladie et violence • Capacité de demander de l’aide • Autres facteurs associés à la violence
– toxiques – éducationnels – maladies physiques, altérations cérébrales – éléments antisociaux (adhésion à une culture déviante)
Évaluer :
• Capacité de demande d’aide et de mentalisation
• Niveau de reconnaissance
• Degré de souffrance
• Considération d’autrui
• Observance au traitement
• Observance des règles sociales et des conditions légales
• Degré d’alliance thérapeutique : «témoignage» du patient et perception de l’équipe
• Qualité des contacts avec l’extérieur
Durant l’hospitalisation (suite)
• mise en place d’outils thérapeutiques les plus adaptés
possibles
• évaluer l’atteinte des objectifs de traitement en fonction de
la capacité maximale du patient
• degré de fonctionnement antérieur
• évolution de la maladie
• absence de progrès ou régression
• identification et réduction des stresseurs (facteur de
protection)
Facteurs de protection
• mandat légal
• entourage et encadrement quotidien
• réduction des stresseurs
• suivi médico-psychosocial plus étroit et
modulable
• hospitalisations préventives
• équipe de traitement bien formée