association française des vétérinaires taurins
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Association française des vétérinaires taurins
Avant propos
Quel le qual i té phys ique (pour une fo is , ne par lons pas du mora l ) do i t dép loyer le
toro au premier t iers ?
Passons sur la sor t ie ( le to ro sor t des ch iqueros éblou i e t va lentement
accommoder avant de ret rouver sa v is ion normale, amateurs de por ta gaïo la
respect ! ) , pu is la récept ion à la cape après quelques tours de p is te
d’échauf fement (qu i peuvent révéler bo i ter ie ou inva l id i té ou manque de forces
rédhib i to i res) . Arr ivons au cheval .
Le toro que nous a imons y expr ime sa bravoure. Que se passe - t - i l rée l lement
t rop souvent ? Soi t le toro est « jus te de forces » (soyons pudiques) e t son
maestro le ménage dans la perspect ive du t ro is ième t iers , dans ce cas peu
importe à tous (major i té du publ ic compr is) la pos i t ion de la p ique, la défense
du cheval e t la poussée du toro, i l faut fa i re in f i rmier donc le p iquero va
admin is t rer une p ique peu appuyée et va v i te l ’en lever (sous les
applaudissements) . Le toro n ’aura pas d ’occas ion de montre r quoi que ce so i t
d ’autre, car le d iest ro a dé jà demandé et obtenu le change ment de t iers . La
sa ignée sera min ime, les dégâts causés par la p ique d iscrets . Pour durer , ce
type de toro n ’a pas enduré, e t les ganaderos qui é lèvent ce type de toro pour
ce type de l id ia ne sé lect ionnent p lus sur la force phys ique depuis be l le luret te
!
Deux ième hypothèse, le b icho est présumé sol ide par le maestro, vo i re re tors , i l
va avoi r a lo rs la poss ib i l i té d ’expr imer sa sauvager ie et son ins t inc t o f fens i f
(dont la résul tante est la bravoure) dans une première p ique « normale », pu is
après le qu i te l ibé rateur e t une mise en p lace à d is tance cro issante dans les
su ivantes. Oui mais vo i là , ce toro là auss i va devoi r durer (un t ro is ième t iers
l im i té à une faena d ’a l ignement avant un coup d ’épée n ’est p lus admis comme i l
y a 100 ans) a lors que t ro is c auses d ’épuisement phys ique ou d ’ inapt i tude
provoquées par la p ique le guet tent .
Impact
Un point d ’ impact du fer dé labrant .
Quand le to ro pousse, que le cheval s ’arque boute et que le p iquero use de son
quinta l pour manier la p ique, la profondeur de la t ra jecto i re malgré la cruceta
peut a t te indre 30 cm, vo i re p lus ( i l m’est ar r ivé au desol ladero d ’entrer ma main
puis la moi t ié de l ’avan t bras dans des p la ies) . Si cet te p ique est por tée dans
une zone te l le que l ’épaule, le thorax, les par t ies postér ieure s au garrot , l e
r isque est rée l que la b lessure du chât iment so i t i r révers ib lement inva l idante
donc éth iquement scandaleuse, sans compter que là i l n ’y a p lus de su i te au
combat . Ce r isque n ’ex is te pas pour des p iques p lus antér ieures, so i t dans le
mori l lo (mais un te l to ro s i par ext raord ina i re a r r ive à se révéle r de bandera est
grac ié, les lés ions quel le que so i t leur pos i t ion et l ’ in fect ion de la p la ie à une
profondeur cons idérable donc sans dra inage poss ib le rendent l ’an imal
i r récupérable) .
Le lec teur cur ieux consul tera à ce su jet l ’ excel lent e t éd i f iant ouvrage de nos
confrères va lenc iens publ ié par la Diputac ión de Valenc ia, Suerte de Varas.
Saignée
La sa ignée.
Paradoxalement , l e r isque de choc hémorragique ou d ’hémorragie excess ive
(épuisant le to ro au point qu ’ i l ne peut p lus avancer, vo i re qu ’ i l se couche, aux
deux t iers su ivants) n ’est pas le r isque le p lus important . Le toro est pourvu
d ’une masse de sang importante (8% de son poids v i f ) lu i permet tant de
supporter le cast igo, e t le p lus souven t les p la ies arrêtent de sa igner assez v i te .
Rappelons l ’anc ien (e t contestable dans sa f ina l i té) d ic ton : ¡No hay buena vara
s in sangre hasta la pezuña!
Poussée
L’ef for t de poussée.
Le toro se heurte à un mur, maintenant dressé à rés is ter à la poussée, lourd
(même s i son poids est rég lementa i re , l ’a jout des protect ions et le p iquero
amènent le to ta l à 800 k) sans pr ise pour les cornes (pour p resque tous les
petos modernes) . Le toro (présumé brave) va essayer de soulever ou de
renverser la p ièce montée, e t i l va dépenser une énerg ie cons idérable (vo i r à ce
sujet les ouvrages de Pierre Daulouède). Cet te énerg ie sera d ’au tant p lus
importante que la masse du cheval harnaché et monté sera é levée e t que la
durée de ces ef fo r ts sera longue (un bon batacazo sera moins pénal isan t de ce
fa i t qu ’une p ique in term inable et car ioquée) , e t la fa t igue muscula i re se fera
essent ie l lement sent i r sur l ’avant -main : le toro qu i a b ien et longtemps poussé
va souvent sor t i r du cheval avec un bref f léch issement des antér ieurs avant de
se refa i re (n ’ag i tez pas le mouchoi r ver ts tout de su i te SVP ! ) s i le qu i te est
aéré et ne le force pas à humi l ier e t à se retourner sur de cour tes d is tances.
En Conclusion
Alors que proposer ?
D’abord avant même de songer à la l id ia , i l faudra i t sé lect ionner un toro
endurant e t for t , e t b ien sûr encasté.
En p is te , i l faudra i t que le to ro reçoive des p iques b ien p lacées et sur tout
appl iquées pendant une cour te durée. Tout le monde y sera i t gagnant : le
ganadero (qu i jugera i t mieux de la bravoure de ses pupi l les sur t ro is p iques) , le
publ ic , qu i verra i t le toro veni r de lo in sur p lus ieurs p iques avec émot ion, le
maestro et ses compagnons de car te ls qu i pourra ient o f f r i r p lus ieurs qu i tes
v ibrants . On s ’en approche avec cer ta ines corr idas concours, ou for tu i tement
avec cer ta ines courses pour f igu ras quand les toros sor tent é levés pour êt re
complets (Fuente Ymbro…) ou quand des f igu ras af f rontent un béta i l p lus « dur
» (comme le Cid face aux V ic tor inos) . Bref e t contra i rement aux apparences et
aux pré jugés, la ré forme du premier t iers devra i t sce l ler les re t rouvai l les des
tor is tes et des to rer is tes !
Capuchonage
Quand cet été, je décidais d’aller à San Jose del Valle à "Los
Romerales", chez Fuente Ymbro, je ne savais pas qu’Alfonso – le
meilleur mayoral selon Ricardo Gallardo -, vieille connaissance d’avant
la langue bleue, allait m’initier à la pose des capuchons sur les cornes
de 4 erales .
Depuis les journées des 10 et 11 mai de l’ITACYL à Salamanque, et
l’exposé du vétérinaire F. LIMA, je connaissais la technique
généralement utilisée, ainsi que le
matériel nécessaire : résine de polyester, catalyseur, rouleau
d’epoxy, ruban adhésif, couvercle de protection des pointes, gants de
latex, pinceau, sèche-cheveux.
méthode : tranquillisant avec romifidine, cage de contention avec
protection des yeux, ruban adhésif sur la partie supérieure du piton,
application de la fibre coupée en triangles, + résine de polyester sur la
corne avec la catalyseur, application du bouchon (type pied de chaise)
et ainsi de suite plusieurs couches, séchage au sèche-cheveux et
libération du toro lorsque la résine est sèche. Retrait de la protection
8 jours avant l’embarquement .
Il me semble qu’Alfonso fait plus simple. Une fois l’animal entré dans
le couloir, il lui administre – dans le mouvement – un tranquillisant sur
la croupe, et au bout d’une demi heure, j’ai pu admirer la rapidité et
la dextérité de la mise en place des capuchons :
fixation des cornes à un poteau du couloir, protection des yeux,
protection des mains avec des gants de latex, application au pinceau
de colle sur la corne avec pose de fibre de verre en plaques
rectangulaires, moulage à la main de la pointe à 20-25 cm ; opération
renouvelée 5 à 6 fois ; idem pour l’autre côté ; séchage au soleil. Le
tout en 8-10 minutes. Le toro est relâché au bout de 30 minutes et il
récupère en 1 h environ.
Voilà, l’opération « qui veut gagner des millions » ou « le crime de
lèse- majesté » selon le côté où l’on se trouve, est en place. Je vais
essayer de donner une réponse toute personnelle.
Point de vue de l'éleveur
Point de vue de l’éleveur. Economique :
30% des animaux s’abîmeraient 1 ou 2 cornes, et ce, entre 3 et 4 ans
et cela conduit à l’arreglado – manipulation suspecte – ou à la
boucherie . Donc , il n’y aurait plus d’auto – afeitado et nous aurions
davantage de pitons intègres – au moins 8 jours avant la corrida, et s’il
n’y a pas de manipulation postérieure – De plus, les bagarres
meurtrières, risques inhérents à l’élevage de toros braves, entre
frères de camada, disparaissent pratiquement. Après 3 années de
recul chez Fuente Ymbro, on ne constate pas de changement de
structure de la corne, pas d’humidité pouvant entraîner la présence
de champignons, ou de ramollissement de la structure.
Point de vue de l'aficionado
Point de vue de l’aficionado de verdad, de nous tous.
D’abord, parlons de l’authenticité du campo, et de l’image un peu
triste renvoyée par nos toros aux cornes encapuchonnées. J.C. Roux
dansTOROS dit que cette pratique s’apparente à mettre un voile sur le
visage de la Joconde. Mon confrère R. Maillard, nostalgique dit : adieu
visions éthérées du campo, des cornes nues dans un jeu de lumière et
d’ombre, sous les arbres ou sur un parterre de fleurs violettes.
Du point de vue tauromachique, on peut imaginer que l’on inflige au
toro un afeitado psychologique, celui-ci perdant avec la pose du
préservatif le sens de la distance de son armure, surtout , lors de la
suppression si proche du combat. Et puis, il faut 2 manipulations.
Enfin qu’en sera-t-il du reconocimiento ? Il faudra faire des
photographies des armures. Ce sera peu évident pour les acheteurs ou
les veedores, surtout si les toros sont protéges dés l’âge de 3 ans .
En conclusion
Chacun sans doute s’est fait ou se fera une idée. Je crois quant à moi
qu’il nous faut vivre avec nôtre temps :
admettre les capuchons, si, cela permet de voir des toros limpios ;
faire confiance aux précurseurs « prothésistes » . Il y va de leur
crédibilité, et on connaît les "bons" et les "mauvais".
J’aimerais dire que les 2 corridas les plus complètes que j’ai vues
cette année, sont celles de Fuente Ymbro et de Jandilla à Pampelune –
2 fervents du capuchon, Saragosse délivrant le prix de la corrida la
mieux présentée à Fuente Ymbro le 10 octobre.
Enfin, avec mes collègues de l’AFVT, nous venons d’expertiser les
cornes de la temporada 2007, et on a pu remarquer (restes de résine)
favorablement, celles qui avaient été protégées.
Il faudra nous y faire à ces bichos « astigordos ». Ce ne sera qu’une
question d’habitude, et, à moins d’être un ayatollah, nous trouverons
toujours le campo aussi beau. Mon avis est sans doute personnel, mais
réaliste, car, et c’est mon collègue R. Maillard qui le dit, qui donc
préservera les toros de leur baisse de caste, de leur manque de poder
ou de leur excès de faiblesse et de la fin des deux premiers tiers de la
corrida ?
Vigilants nous devons le rester, mais le romantisme est sûrement d’un
autre siècle. Dommage, mais inéluctable.
Avant propos
A l ’or ig ine , les bander i l les (bâtonnets de bois b lanc ornés de papier c rêpons,
mesurant env i ron 70 cm et terminés par un harpon de 4 cm) éta ient posées une
à une par les matadors lors de courses téméra i res et rap ides dans le but un ique
de montrer leur courage . La pose par pa i re éta i t a lors except ionnel le e t e l le le
resta jusqu’à la f in du premier quart du 18ème s ièc le quand furent ins t i tuées les
règ les de la cor r ida moderne. Mais c ’est avec les deux grands théor ic iens de la
corr ida, Pedro Romero à la f in du 18ème s ièc le et Franc isco Montes au 19ème,
qu’e l les acqui rent leurs le t t res de noblesse puisque non seulement e l les furent
conservées au cours de la l id ia mais leurs poses furent même c lassées et
codi f iées au point d ’en fa i re un des t ro is te rc ios du comba t . Or l ’évo lut ion de la
tauromachie a été te l le depuis cet te époque, e t notamment depuis le début du
s ièc le dern ier , que l ’on peut lég i t imement se poser la quest ion du b ien - fondé du
deuxième t ie rs à l ’heure actuel le .
Car quel é ta i t le but or ig ine l de ce te rc io ? I l ne s ’ag issa i t nu l lement de
d iminuer la force du taureau, mais p lu tôt d ’occuper un temps où on le la issa i t
récupérer de ses rencontres avec les p iques avant son combat f ina l e t sa mise
à mort . Mais de nos jours , la suer te de p icar est rédui te à la por t ion congrue et
la faena de muleta ext rêmement longue. Dès lors , le to ro a - t - i l tou jours besoin
de récupérer e t ses courses après les bander i l leros lu i la isseront -e l les assez de
ressources ensui te ? Autrement d i t , le deux ième t iers est - i l tou jours u t i le ?
La p lupart des av is sont négat i fs , la majo r i té des auteurs émet tant l ’hypothèse
que la pose des bander i l les ne ser t à r ien. Pour André Via rd par exemple, ce
n’est qu ’un temps de récupérat ion qui do i t ê t re t rès bref , avec le moins de
passes poss ib le . Pi re , pour Claude Popel in , le second t iers « ne ser t à r ien
d’autre que de donner au toro les dé fauts qu ’ i l n ’avai t pas… » !
D’autres cependant pensent qu ’ i l s ’ag i t d ’un
in termède pendant leque l le toro « se repose, s ’aère, récupère » après la p ique,
certa ins a l lant même jusqu’à d i re qu ’ i l « reprend courage ». C’est le cas
de Georges Lest ié qui écr i t dans ses Règles et Secre ts de la Cor r ida : «…
l ’homme, découvert , provoque le fauve, l ’év i te de jus tesse, e t de ce fa i t la bête
reprend goût à la lu t te . La p iqûre des harpons, bénigne en vér i té , l ’émoust i l lera,
le s t imulera, tandis que les coups de tê te fa t igueront les musc les de son cou.
Enf in , les charges , les v i revol tes, feront perdre au b icho de sa v i ta l i té , le
prépareront pour le t ro is ième t iers…». Mais c ’es t Jean-Pier re Dar racq qu i se
pose en pr inc ipa l défenseur des bander i l les , e t i l exp l ique sa pos i t ion a ins i : «
…il faut savoi r s i le premier terc io a été correctement exécuté…Le port de la
tê te est - i l correct , mei l l eur ou p i re qu ’avant ? Les pat tes ont -e l les rés is té ? Le
toro n ’a - t - i l pas acquis quelque défaut jusque là inaperçu ? Conservera - t - i l la
v igueur nécessai re pour répondre aux ex igences du terc io f ina l ? Nous le
saurons par la manière dont va se dérouler l ’ép isode des bander i l les . Mais nous
n ’aurons une connaissance re la t ivement exacte de l ’é ta t du taureau que s i le
terc io est correctement e t rap idement mené. . .» . Malgré tout , El T io Pepe prend
bien la précaut ion d ’a jouter que sa théor ie n ’a de sens qu’avec des
bander i l leros habi les , adro i ts , in te l l i gen ts , rap ides, préc is , ce qui , avouons - le ,
n’est pas la major i té de la profess ion…
Et au f ina l , le bénéf ice résul tant du deux ième t iers semble b ien mince par
rapport au r isque de vo i r le taureau apprendre à couper le te rra in , à f rapper de
côté, e t deveni r méf ian t , ce qui se résume en un mot : « se décomposer » .
L'oeil du vétérinaire
Mais dans tout ce qui précède, i l n ’es t prat iquement quest ion que du
comportement du taureau, de son ap t i tude « mora le », p lus rarement de son
apt i tude phys ique. Le vétér ina i re taur in est b ien sûr a f ic ionado et donc
par fa i tement sens ib le aux arguments rapportés c i -dessus, mais i l garde
néanmoins un œi l profess ionnel sur l ’an imal . A - t - i l la même opin ion en
observant son évolut ion au f i l du combat ?
La réponse est par tagée, car la rest r ic t ion avancée
par Jean-Pie rre Darracq res te de mise : tout dépend de la manière dont le
terc io est mené, b ien que les ra isons ne so ien t pas les mêmes puisque e l les
n’ont t ra i t qu ’à la phys io log ie et à la patholog ie.
Regardons ce qui s ’es t passé pendant le premier t iers .
L’animal est sor t i dans l ’arène à a l lure souvent v ive, i l a fa i t quelques tours de
p is te , tê te b ien en l ’a i r , pu is , pet i t à pet i t , i l a m is la tê te dans la cape , e t peu a
peu i l a ba issé la tê te. Sur les dern ières véroniqu es, son muf le touchai t le so l .
Dans le même temps, ses membres, en par t icu l ie r les anté r ieurs , ont é té soumis
à des chocs avec le so l lorsqu’ i l sor ta i t des premières passes, pu is à des
tors ions lorsque, capté par l ’é to f fe , i l se re tournai t v ivement pour y reveni r de
nouveau. Enf in , les chevaux sont entrés et le taureau a voulu pousser,
soulever , renverser son adversa i re , p lus ou moins longtemps, mais tou jours de
manière in tense.
En résumé, le taureau a fourn i sans rép i t d ’abord les mêmes ef for ts qu ’un
spr in ter pu is ceux d ’un hal térophi le , e t ce dans un temps t rès bref . Quel est
alors son état phys ique à la sor t ie des chevaux ?
Au n iveau muscula i re , i l a for tement entamé sa réserve de g lycogène. Après les
t ravaux ef fectués par l ’ INRA en par tenar ia t avec l ’AFV T, nous savons en ef fe t
que les musc les de la major i té des taureaux sont sur tout composés de f ibres
oxydat ives permet tant un ef for t p lus pro longé mais moins in tense et cet te
re la t ive carence en f ib res g lyco ly t iques va obl iger l ’an imal à entamer ses
réserves sauf s ’ i l parv ient à capter su f f isamment d ’oxygène externe pour
conserver ses capac i tés pour la faena de mu leta. Dans le cas cont ra i re , i l
r isque de deveni r rap idement inapte au combat . De p lus, les musc les de ses
membres sont engourd is .
Au n iveau c i rcu lato i re , l ’e f for t produi t contre le peto du cheval provoque une
hyper congest ion, une hyperhémie et une cyanose, au n iveau notamment du
mori l lo , mais auss i de tout l ’avant du taureau. Là encore, l ’apport d ’oxygène est
ind ispensable pour récupérer une par t ie des facul tés motr ices de l ’encolure
déjà d iminuées par les lés ions due à la p ique. Sans cet oxygène, le taureau
présentera de la fa ib lesse et les chutes seront f réquentes.
En conséquence, d ’un point de vue purement phys io log ique, i l es t ind ispensable
que le taureau s ’oxygène après le p remier t iers , e t c ’es t b ien ce qu’avaient dé jà
compr is les auteurs des premiers t ra i tés de tauromachie quand i ls ins t i tuèrent
le terc io de bander i l les . Car s ’ i l es t b ien mené, c 'es t -à -d i re rap ide, avec un
min imum de passes de cape et sans passages à faux, le taureau y court sur de
fa ib les d is tances, tou jours la tê te en l ’a i r e t sans mouvements b rusques.
Au contra i re , s i la brega est d i f f ic i le , s ’ i l faut p lacer e t rep lacer l ’an ima l qu i va
alors charger la cape en baissant à nouveau l ’ encolure, ou s ’ i l a tendance à
couper les terra ins e t donc à produi re des e f for ts muscula i res supplémenta i res
auss i brusques qu’ inut i l es , on obt iendra l ’e f fe t to ta lement inverse de ce que l ’on
cherche.
En conclusion
Et c ’est b ien pourquoi la réponse à la quest ion ne peu t ê t re que par tagée.
L’ idéal sera i t en fa i t que, comme pour la suer te des p iques, le matador a i t la
poss ib i l i té de déc ider , avec l ’accord de la prés idence, du nombre de pai res de
bander i l les qu ’ i l souhai te vo i r pose r . Car la règ le des t ro is pa i res avec quatre
bander i l les ob l igato i res en p lace n ’a pas de sens, tou jours d ’un point de vue
phys io log ique. Un taureau manso, sans charge, à qu i i l fau t d ix passes de cape
pour pouvoi r poser un bâtonnet , sor t i ra phys iquement i napte pour la faena de
muleta s i l ’on veut absolument respecter ce règ lement . Au cont ra i re , un taureau
aux mains d ’un matador -bander i l le ro expert , qu i ne lu i fera donner aucune
passe par un peón mais le fera cour i r de man ière régul ière et sans à -coups,
supportera a l lègrement la pose de t ro is pa i res. La mei l leure preuve en est que
l ’é ta t phys ique des taureaux bander i l lés par El Fandi est souvent excel lent
même après une quat r ième pai re , e t s i la faena qui su i t n ’est malheureusement
pas tou jours du n iveau que l ’on espèrera i t , la faute n ’en incombe pas forcément
à l ’an imal…
En conc lus ion, e t b ien que les ra isons so ien t d i f férentes, l ’ av is du vé tér ina i re
re jo in t ce lu i de l ’a f ic ionado. Si le taureau est normalement bon, e t s i l e terc io
est mené dans les règ les de l ’a r t , la pose des bander i l les est u t i l e au bon
déroulement de la l id ia pu isqu’e l le a idera l ’an imal à conserver des facul tés
phys iques suf f isantes. Dans tous les cas con tra i res, e l le est inut i le e t peut
même être par fo is néfaste. Mais reconnaissons qu’e l l e nous manquera i t
pourtant …
La Cosanguinité
Dans son Dic t ionnai re de la Tauromachie , Marcel ino Ort iz Blanco
déf in i t la consanguin i té comme
« l ’appartenance à une même fami l le e t la possess ion de caractè res
hérédi ta i res vo is ins. Sur cer ta ins an imaux, i l es t nécessai re de recour i r
au cro isement consanguin pour obteni r une race p lus pure et
l ’amél iore r . Les descendants de parents consanguins peuvent ê t re
anormaux s ’ i l ex is te dans la fami l le une anomal ie hérédi ta i re
récess ive».
A lors , la consanguin i té est -e l le souhai tab le ou doi t -e l le ê t re combat tue
chez les toros de l id ia ?
La consanguin i té peu t ê t re déf in ie comme l ’accouplement de
reproducteurs apparentés et se t radui t par l ’augmentat ion de la
probabi l i té d ’homozygot ie quelque so i t la zone du génome cons idérée.
Autrement d i t , l ’accouplement de deux ind iv idus apparentés augmente
les chances que les descendants por tent le même a l lè le sur les 2
chromosomes de la même pai re . Qu elque so i t la rég ion du génome
cons idérée.
L’augmentat ion de la consanguin i té dans une populat ion donnée
présente des ef fe ts à la fo is pos i t i fs e t négat i fs .
Impact positif
Les ef fe ts pos i t i fs (ou favorables) rés ident dans l ’obtent ion d ’une
populat ion de p lus en p lus homogène au f i l des générat ions. A
l ’ex t rême, on peut about i r à des populat ions dans laquel le tous les
ind iv idus sont homozygotes pour tous les gènes (Ex : l igné e pure de
ra t de laborato i re) . En supposant que l ’on connaisse l ’e f fe t d ’un gène
sur l ’express ion d ’une caractér is t ique morphologique ou
comportementa le, on peut a lors assoc ier l ’augmentat ion de la
consanguin i té et reproduct ib i l i té de ce caractère chez tou s les
ind iv idus qui en sont issus. Dans le cas qui nous in téresse – le to ro de
l id ia – et par extens ion à l ’ensemble du patr imoine génét ique,
l ’augmentat ion de la consanguin i té dans un é levage contr ibue à la
sort ie de lo ts p lus homogènes en terme de présen tat ion et de
comportement au campo et en p is te . Quel a f ic ionado n ’a pas rêvé de
voi r sor t i r en p is te 6 toros « b ien dans le type » et au comportement en
p is te «caractér is t ique du fer » !
Impact négatif
Cependant , un degré de consanguin i té é levé es t assoc ié à des ef fe ts
défavorables d i rects et ind i rects .
Effets directs :
Comme on augmente l ’homozygot ie , on augmente la probabi l i té
d ’appar i t ion de tares pour tous les l ieux du génome où on t rouve des
al lè les récess i fs c 'es t -à-d i re dont l ’express ion est l iée au fa i t qu ’un
ind iv idu por tera le même a l lè le du gène sur les deux chromosomes
(homozygote) . Ains i , la f réquence des anomal ies génét iques
récess ives connues augmente for tement . Par a i l leurs , des anomal ies
génét iques non connues peuven t apparaî t re dans la populat ion.
Le deux ième ef fe t d ’une augmentat ion de la consanguin i té est nommé
« dépress ion de consanguin i té » : on entend par là une dégradat ion du
n iveau des per formances pour cer ta ins caractères, notamment ceux
fa ib lement hér i tab les. Par exemple, une augmentat ion de la
consanguin i té est souvent assoc iée à une baisse de la fer t i l i té e t peut
être assoc iée à une mo indre rés is tance aux maladies. D’une manière
généra le, tous les carac tères qui bénéf ic ient de l ’e f fe t d ’hétéros is (ou
v igueur hybr ide) – recherché lorsqu’un ganadero « ra f ra îch i t le sang »
par l ’achat d ’un sementa l en dehors de l ’é levage vo i re de l ’encaste -
sont dégradés par la consanguin i té .
Effets indirects :
L’augmentat ion de la consanguin i té d ’une populat ion condui t à une
per te de b iod ivers i té : en ef fe t , la p rat ique du cro isement consanguin
pr iv i lég ie cer ta ines fami l les ou l ignées au détr iment d ’autres qui
peuvent d isparaî t re . On rédui t a ins i la ta i l le génét ique de la populat ion
sur laquel le on t ravai l le avec deux r isq ues : la per te a léato i re de gènes
(dér ive génét ique) e t une sé lect ion dans une populat ion de p lus en
p lus pet i te qu i peut condui re à terme à un accro issement de
consanguin i té non maî t r i sable.
Aussi , en terme de consanguin i té et comme souvent , « r ien n ’est tout
blanc, r ien n ’est tout no i r » . Si e l le est peut -ê t re ut i le pour f ixer les
caractères d ’un é levage, la consanguin i té do i t ê t re gérée par l ’é leveur
au r isque notamment de vo i r ses ef for ts anéant is par l ’ appar i t ion de
tares af fectant la rentabi l i té de so n é levage.
Réalisation Thomas Thuriès © 2002-2007 - Actualisé le 1 janvier 2007 - [email protected]
Poids réglementaire
La quest ion est complexe…je va is commencer par la not ion de « po ids jus te ».
La première approche est rég lementa i re (mais je me doute qu’ i l ne s ’ag i t pas de
la réponse at tendue), so i t 460 k i los en arène de première catégor ie . Lorsque
les vétér ina i res d ’arènes de première catégor ie espagnole et leurs p rés idents
font un reconoc imiento au campo, i ls essaient de t rouver des repères (muret tes,
arbres, …) qui pu isent leur donner une idée du gabar i t (« tamaño ») des
animaux s tat ionnés à prox imi té , notamment du p lus pet i t e t du p lus gros toro du
lo t pressent i . La marge d ’erreur est grande e t le reconoc imiento au campo ne
dispense pas d ’une pesée aux arènes.
Cet te nécess i té (obsess ion ?) de « fa i re le po ids » a condui t aux dér ives b ien
connues (pour êt re sûr de ne pas se t romper, on ret ient les p lus g ros, les p lus
destar ta lados, les p lus enco rnés auss i dans le même ordre d ’ idées…). I l faut
a jouter comme paramèt re d ’ incer t i tude que cer ta ins to ros perdent p lus ieurs
diza ines de k i los pendant le t ransport ent re la f inca et les a rènes, e t ne les
récupèrent pas tou jours aux corra les. De p lus, malgré le « jus te po ids »
rég lementa i re , le t rapío de te l ou te l b icho peut ê t re ins ign i f iant ou ne pas
correspondre au type de la p laza (ce lu i qu i es t appréc ié de son publ ic ) .
Certa ins b ichos sont a ins i re fusés dans cer ta ines arènes pour reparaî t re
acceptés dans d ’autres arènes de même catégor ie , e t i l suf f i t de comparer les
toros de Madr id et Sév i l le pour vo i r que le po ids n ’est qu ’un paramètre du
choix .
Aff ranchissons -nous du règ lement : que devra i t ê t re le po ids jus te ? De façon
pragmat ique, ce pourra i t ê t re le po ids qui permet au toro d ’endurer les épreuves
phys iques de l ’arène et d ’expr imer au mieux sa caste, bref un poids d ’a th lè te.
On voi t tou t de su i te qu ’en juger est p lus d i f f ic i le que d ’employer une bascule. I l
faudra i t un poids qui garant isse de supporter les ef for ts du premier t iers et ceux
du dern iers : ce ne sont pas les mêmes.
Morphologie de premier ou de dernier tiers ?
Au premier t ie rs , l ’ef for t de poussée « anéant i t » souvent p lus le b icho que la
saignée subie, au dern ier , le b icho, humi l iant donc s ’asphyx iant do i t supporter
de p lus en p lus souvent un grand nombre de passes (en chargeant sur quelques
mètres avant de s ’arrê ter bruta lement ) sans pouvoi r récupérer entre e l les (vo i r
à ce su jet les compléments apportés dans les ouvrages de Pier re Daulouède).
Nous avons tous en tê te l ’exemple de « pet i ts » toros inva l ides (par fo is même
en nov i l lada sans p icadors) ou a contrar io de pet i ts toros p l e ins de gaz (pour
prendre des exemples assez lo in ta ins dans le temps, dans le premier cas de
f igure un cé lèbre lo t d ’Arrauz de Robles à Mont -de-Marsan, e t dans le second le
premier lo t de Conde de Murça combat tu à Céret) . L ’é tude en cours sur le
muscle des toros réa l isée par les vétér ina i res taur ins f rançais et l ’ INRA, pas
plus que les études espagnoles antér ieures, ne montre pas de corré la t ion entre
le po ids, la fa ib lesse et /ou l ’ inva l id i té ( les cor ré la t ions ex is tent p lu tôt avec le
type de f ibres muscula i r es et l ’a l imenta t ion) . Quelque so i t leu r po ids, i l y a des
toros en d i f f icu l té avant ou après l ’épreuve des p iques, e t sans qu’on puisse le
soupçonner au campo ou lors du reconoc imiento .
Les p lus gros toros ne sont pas forcément désavantagés par le paramèt re «
chute » ne sera i t -ce que parce qu’ i ls ne sont pas forcément mobi les ! Les pet i ts
toros peuvent pe iner lo rs du terc io de p iques , l es cavaler ies modernes (mobi les
certes mais mai t r isant l ’arc -boutant à la per fec t ion pour contrer la charge du
toro) é tan t épuisantes e t e l les autor isent un te rc io p lus long que n ’abrègent n i
la chute (poder du toro t rop rédui t ) n i le …qui te du maestro. Le poids du toro
do i t donc êt re assez conséquent pour l ’e f fo r t de poussée ( les pet i ts nov i l los
peuvent fa i re chuter le cava ler ie , mais i l fau t souvent une masse cr i t ique pour
acquér i r assez d ’énerg ie c inét ique pour un batacazo ! ) e t pour la sa ignée (un
toro est pourvu de 8% de son poids v i f en sang, une même saignée est donc
p lus durement ressent ie quand on fa i t 400 k i los p lu t ôt que 500) .
Pour le dern ier t iers , la percuss ion du p i l ier n ’est pas de grand secours pour le
toro. I l va devoi r su ivre le leurre, donc êt re mobi le , e t avec s ty le , donc en
humi l iant .
Pour humi l ier , le type phys ique recherché est « por abajo » , avec une a vant -
main p lus basse que l ’ar r ière -main, même s i ce r ta ins toros a leonados et hauts
humi l ient b ien (par exemple, le to ro de M. Zabal los à la corr ida -concours
d’Ar les en 2005) a lors qu ’à l ’ inverse des toros assez bas humi l ient peu ( les
Part ido de Resina) .
Pour la mobi l i té , i l fau t met t re toutes les chances de son côté en év i tant
essent ie l lement les an imaux t rop gras. Fau te de pouvoi r fa i re comme les
maquignons sur le champ de fo i re , qu i pa lpent les bov ins af in d ’évaluer leur
dépôt gra isseux, i l fau t se contente r d ’ inspecter à d is tance nos b ichos :
l ’absence de gra isse superf lue peut ê t re évaluée par l ’examen de l ’omoplate ( la
scapula do i t se dev iner) , des dern iè res côtes ( le premier ou les deux dern iers
espaces in tercostaux doivent pouvoi r ê t re d is t ingués sa ns excès qui dénotera i t
un état de maigreur e t /ou des antécédents patho log iques) . En f in , la po inte de la
hanche et l ’a t tache de la queue ne doivent pas êt re « noyées ». Cet aspect
osseux et musculeux du toro a souvent d isparu avec l ’a l imentat ion moderne
(vo i r la page sur les bénéf ices du p ienso, qu i « f in i t » b ien le to ro) , mais les
anciens c l ichés (d ’ i l y a un s ièc le ) mont ra ient b ien de nombreux to ros « en
forme ». I l es t par cont re d i f f ic i le de juger l ’avant -main, le fanon e t le morr i l lo
ne sont pas un bon ref le t de l ’é ta t d ’embonpoint / de maigreur mais p lu tôt des
caractères sexuels secondai res (sur la façon de vo i r les toros on consul tera
avec prof i t les ouvrages de AR Montes inos ) . I l vaut mieux s ’é ta lonner l ’œi l dans
un même encaste au départ e t ne pas c omparer d ’ent rée un Cuadr i , un La
quinta et un Miura…
Conclusion
Au b i lan, les s ignes extér ieurs prédic t i fs d ’un poids jus te sont peu nombreux…
i l res te à l ’a f ic ionado cur ieux, pour compléter son jugement après le combat , à
examiner les carcasses au desol l adero (s ’ i l es t access ib le) e t à observer
notamment le dépôt gra isseux sous -cutané et abdominal . Les surpr i ses sont
rares chez les toros i l y a rarement de faux maig res mais souvent de vra is gras.
Un peu d'histoire
En 1796, Pepe Hi l lo éc r i va i t dans sa Tauromaquia : « Le p icador do i t se t rouver
face au te rra in qu ’occupe le taureau et i l do i t p lanter la p ique dans le mor i l lo ,
empêchant a ins i le contact avec le cheval , qu ’ i l gu ide en même temps vers la
gauche af in de la isser le taureau en pos i t ion para l lè le à l ’encol ure du cheval » .
Tous les Règlements Taur ins jusqu’à ce lu i de 1917 compr is ind iquent que le
l ieu où i l faut p iquer est le mor i l lo e t , jusqu’au début du 20ème s ièc le , toute
pique donnée p lus en a rr ière, e t notamment dans la cruz, va la i t à son auteur
une forte amende, vo i re de l ’empr isonnement…
Depuis l ’ in t roduct ion du caparaçon en 1930, l ’emplacement de la p ique n ’est
p lus préc isé dans les Règlements , e t i l a net tement évolué vers l ’ar r ière ,
pourtant sans ra ison log ique.
En ef fe t , le but essent ie l de la p ique, même s ’ i l a quelque peu changé, e t sans
par ler de l ’ in térêt de juger de la force du taureau, reste de lu i fa i re ba isser la
tê te , lu i in terd isant des mouvements t rop brusques, mais en le la issant apte à la
faena de muleta.
Un peu d'anatomie
Comme tout bov idé, le taureau de combat n ’a pas de c lav icu le. Les deux
extrémi tés des membres antér ieurs sont donc re l iées au t ronc uniquement par
des musc les et c ’es t l ’endro i t où ces musc les se réunissent que l ’on appel le la
cruz, emplacement idéal de l ’es tocade, mais pas de la p ique comme nous a l lons
le vo i r…
En avant de la cruz se t rouve le mor i l lo , masse muscula i re qu i cor respond au
bord dorso-supér ieur du cou et qu i va de la nuque à l ’avant des omopla tes. Les
muscles qui le composent sont un i quement des musc les extenseurs du cou ou
é lévateurs de la tê te.
En ar r ière de la cruz, i l n ’y a p lus de musc les sous le cu i r pour protéger la
colonne ver tébra le e t la moel le ép in ière.
Les lésions et leurs conséquences
En avant de la cruz
Dans le mori l lo : Sect ion des musc les t rapèze et rhomboïde cerv icaux.
D’autres musc les re leveurs de la tê te sont s i tués p lus en profondeur. Pour que
la p ique les at te igne ( la profondeur moyenne de la lés ion fa i t tou t de même p lus
de 15 cms…), i l conv ient en fa i t de p iquer dans la par t ie ar r ière du mor i l lo ,
jus te en avant de la cruz. C’est l ’endro i t préconisé de tous temps.
Sur les côtés du mori l lo : les musc les lésés ne sont qu ’accessoi res, a lors
qu ’on r isque en revanche de provoquer des fê lures, vo i re des f ractu res, des
omoplates.
La cruz
Dans la cruz : Les lés ions in téressent des zones osseuses, vascula i res et
nerveuses t rès sens ib les. Le taureau baissera la tê te, mais à cause d ’une
vér i tab le « luxat ion » des musc les qui re l ient les membres anté r ieurs au t ronc,
qu i va également la isser l ’an imal p lus ou moins impotent , b ien que sans
boi ter ie .
Tombée au niveau de la cruz
Ce ne sont p lus les musc les qui seront lésés, mais les car t i lages de
conjugaison des omoplates, provoquant ob l igato i rement de graves boi ter ies .
Après la cruz
En arrière de la cruz : La p ique at te in t la co lonne ver tébra le e t donc la moel le
ép in ière, a l térant la propuls ion et la motr ic i té arr ière .
En arrière et tombée
Per forat ion de la p lèvre et t roubles respi ra to i res.
Conclusion
Pour des ra isons anatomiques, e t en respectan t le but in i t ia lement recherché, i l
conv ient donc de p iquer dans la par t ie arr iè re du mor i l lo .
Un autre ra ison à cet te loca l isat ion est que l ’hémorragie consécut ive y est
moins in tense qu’a i l leu rs , le t rou de pénétrat ion se refermant p lus v i te grâce à
la press ion des p lans muscula i res à cet endro i t t rès développés.
I l conv ient cependant de noter que la per te de sang, compr ise entre 1,5 et 2 ,5
l i t res , est t rès modérée pour un animal de 500 k i los qu i en possède 3 7 l i t res . (A
t i t re de compara ison, ce la correspond proport ionnel lement au vo lume
habi tue l lement pré levé à un donneur de sang.)
Contra i rement à l ’ idée couramment répandue, l ’hémorragie ne met donc pas
l ’ in tégr i té du taureau en danger, e t encore moins sa v ie . E l le permet en
revanche d ’évaluer les dégâts muscula i res.
La Corne
Pour une réponse complète, je va is commencer par rappeler ce qu’est une
corne, comment e l le se forme et comment e l le pousse.
La corne est un ensemble de t issus b ien d i f férents :
- un support osseux (« p rocessus cornual de l ’os f ron ta l ») ,
- une membrane kératogène (qu i é labore la kérat ine) t rès vascular isée et
- l ’é tu i corné, é laboré par la membrane kératogène.
Au campo et en p is te év idemment seul l ’é tu i corné est v is ib le . Seuls le support
osseux et la membrane kératogène sont vascular isés, ce qui s ign i f ie qu ’une
corne ou une pointe qu i sa igne est révéla t r ice d ’une at te in te profonde ( f racture
de la corne, a fe i tado « ext rême »…).
La Croissance
La cro issance de la corne se fa i t de l ’ex t rémi té de la corne vers la base, e t
l ’accro issement en épaisseur se fa i t de façon centr ipète. L ’é tu i corné est en
déf in i t ive un empi lement de cornets emboî tés sur le « moule » que const i tue le
processus cornual . Le support osseux donnant sa forme à la corne, i l es t donc
i l luso i re (a lors qu ’ i l s ’ag i t d ’une prat ique répandue) de penser que la forme des
cornes (ou cornage ou cornemen t ) sera modi f iée après époin tage à l ’âge de
deux ans.
A la na issance, seul un bourgeon de corne est percept ib le au toucher. Le
premier é tu i corné est b ien v is ib le vers deux mois d ’âge.
Pendant la p remière année de v ie , l ’é tu i corné est i r régul ie r , pu is i l s ’ex fo l ie
pour la isser apparaî t re une corne dure et br i l l ante. Dans les deux p remières
années de v ie , la corne s ’or iente la téra lement pu is vers l ’avant en restant dans
un même p lan. Au -delà, la forme de la corne dev ient p lus complexe, les po intes
poussant en dehors de ce p lan. On ne peut donc avoi r une idée « déf in i t i ve » de
la forme des cornes qu’après 36 mois d ’âge.
La corne pousse durant toute la v ie de l ’an imal, à des v i tesses var iab les, pour
les âges auxquels les an imaux sont combat tus dans l ’arè ne : 1 ,2 à 1,5 cm/mois
jusqu’à t ro is ans, 1 cm par mois de 3 à 4 ans, 0 ,7 à 0,8 cm par mois entre 4 et
6 ans. Cec i expl ique qu’une lés ion nature l le ou ar t i f ic ie l le des pointes
dispara isse avec le temps.
Influence de la génétique
Le premier fac teur de var ia t ion de la forme de la corne est d ’ordre génét ique :
les é leveurs le savent b ien qui év i tent (ou devra ient év i ter s ’ i ls dés i rent fa i re
combat t re en première catégor ie espagnole) de mainteni r des l i gnées t rop
longtemps avec des reproducteurs tous brochos ou corn icor tos (ou à l ’ i nverse,
on peut sé lect ionner des animaux de grande envergure comme chez le Conde
de la Corte ou Valverde) . La consanguin i té n ’es t pas en so i un problème, mais
el le f ixera ces caractér is t iques (« pos i t ives » ou « négat ives ») p lus ra p idement .
Influence de l'alimentation
Le second facteur , qu i s ’ in téresse p lus à la qual i té de la corne produi te qu ’à sa
forme, est nu tr i t ionnel . Les cornes des bov ins supportent b ien les a l imentat ions
pauvres (vo i r le développement des cornes des watus is e t zébus par exemple) ,
mais la corne p rodui te lors d ’a l imentat ion t rop r iche (ce l le qu i « p répare » le lo t
re tenu quelque temps avant la course) ou lo rs d ’a l ternance de phases de
sura l imentat ion et de dénutr i t ion (maladies, paras i t isme, carences…) n ’est pas
une corne normale :
- la kérat ine produi te est de mauvaise qual i té ( f r iab le) , e t la po inte des cornes
sera f rag i le ,
- l ’ac idose c l in ique ou subc l in ique due à une a l imentat ion t rop r iche en sucres
solub les et en pro té ines est suscept ib le de provoquer une in f lammat ion de la
membrane kératogène, avec du pru r i t (poussant les an imaux à se f ro t ter les
cornes, donc à léser eux -mêmes les po intes, ce sont les fameux « desgastes
natura les » à ne pas confondre avec l ’a fe i tado).
Conclusion
En déf in i t ive, la forme de cornes est en majeure par t ie condi t ionn ée par le
patr imoine génét ique du toro. La qual i té de la corne produi te peut ê t re
défavorablement in f luencée par l ’a l imenta t ion ou le passé patholog ique des
bichos.
A quoi sert le pienso, a quoi sert un aliment concentré
L’ ob ject i f d ’ un é leveur de taureaux de combat est de produi re un animal qu i
pèse 500 kg à 4 ans : ce la semble re la t ivement fac i le car i l suf f i t d ’assurer une
cro issance régul ière de 328 g par jour , ce qui es t t rès peu par rapport aux races
domest iques, qu i , durant la même pér iode, aura ient un croî t supér ieur au
double et pèsera ient 2 fo is p lus !
Mais produi re un t oro de 500 kg, c ’est p rodui re un vo lume muscula i re avec une
ef f icac i té adaptée aux ef for ts de la l id ia : e f for ts de spr in ter dès sa sor t ie ,
ef for ts de 1ere l igne au cheval , e f for ts d ’endurance à la muleta et ce la dans le
cadre d ’é levages représentat i fs de systèmes extens i fs va lor isant des rég ions
souvent défavor isées.
Les ganader ias de race brave ont une image d ’é levages extens i fs propre aux
races rust iques, c ’est -à -d i re adaptées à de grands parcours , à des ressources
fourragères i r régul iè res, à des condi t ions c l imat iques d i f f ic i les : c ’es t v ra i pour
le t roupeau des mères a l la i tantes et gestantes, c ’est v ra i pour l ’é levage des
jeunes après le sevrage, mais lorsque l ’ob ject i f es t de vendre des nov i l los ou
des toros de 4 ans b ien « présentés », e t qu i seront v is i tés dès l ’h iver par des
acheteurs éventuels , le «p ienso» sera tou jours nécessai re et les toros de la «
camada » devront passer d ’un système extens i f à un système semi - in tens i f
vo i re in tens i f , pour assurer au -delà des besoins d ’entret ien , un développe ment
muscula i re correspondant au « t rap io » ex igé par le publ ic de chaque catégor ie
d’arènes.
A quoi sert le pienso ?
Le « p ienso » ser t a augmenter la concent rat ion énergét ique et p roté in ique de
la ra t ion pour accélérer la cro issance squelet t ique et muscu la i re , e t s ’u t i l ise de
la même manière dans les é levages de bov ins à v iande : en fa i t , i l n ’y a pas de
formules spéc i f iques à la race b rave et les nut r i t ionnis tes spéc ia l isés appl iquent
des normes c lass iques pour bov ins d ’é levage ou d ’engra issement .
Le terme engra issement n ’est pas exagéré et do i t ê t re expl iqué : lo rsqu’un toro
de 4 ans gagne 1 kg de poids, la composi t ion du croî t es t composée de p lus de
50% de gras : la gra isse (sur tout in t ra muscula i re) est une source d ’énerg ie
ind ispensable aux ef for ts du toro, le mét ier du ganadero étan t de gérer les
quant i tés de « p ienso » d is t r ibuées pour ob teni r une cro issance muscula i re
sans excès de gras de couverture, avec des musc les b ien « dess inés », u t i l isant
b ien leurs réserves énergét iques de g lycogène e t d e gra isse.
Un to ro de 4 ans sans « p ienso » ne peut se concevoi r qu ’ avec des pâ tures et
des fourrages d ’excel len te qual i té toute l ’année et toute la v ie de l ’an imal : t rès
peu de ganader ias f rançaises ou espagnoles peuvent o f f r i r ces garant ies de
qual i té fourragère .
Un toro de 4ans sans « p ienso », c ’es t le r isque de présenter un toro avec un
for t développement squelet t ique, maigre, hors du type, avec des r isques de
grande fa ib lesse et par fo is d ’une mobi l i té d i f f ic i l e à contrô ler .
La composition du pienso
Les amidons de céréales, dégradés dans la panse des ruminants en ac ide
propion ique, const i tuent la source pr inc ipa le de g lucose ind ispensable à l ’e f for t
muscula i re .
La p lupart des a l iments concentrés sont const i tués de mélanges de céréales,
complémentés par d ivers tour teaux (so ja) e t gra ines protéagineuses (habas) ,
pour cor r iger le manque de p roté ines des céréales et amener la va leur
théor ique de la formule à p lus ou moins 15% de proté ines.
L’a l iment ser t auss i de support à une complémentat ion minéra le (c alc ium,
phosphore, magnésium) et o l igo v i tamin ique (v i t A, D 3, E, z inc, cu ivre,
sé lén ium, etc) pour assurer une cro issance squelet t ique harmonieuse et
préveni r les carences pré jud ic iab les au métabol i sme muscula i re .
La fabrication du pienso
1 - Fabr icat ion « à la ferme » par l ’é leveur qu i d ispose de céréales, de ce l lu les
de s tockage, d ’un broyeur et d ’une mélangeuse, e t achète à l ’ex té r ieur les
tour teaux et minéraux, consei l lés le p lus souvent par un technic ien spéc ia l isé :
ce type de « p ienso » es t sous forme de fa r ine p lus ou moins f ine.
2 - Al iments « indust r ie ls » sous forme de granulés dont les ca tégor ies
d’ ingrédients sont ment ionnées sur l ’é t iquet te , e t formulées le p lus souvent
avec beaucoup de p rofess ionnal isme par le serv ice nutr i t ion de la soc iété
pr ivée ou coopérat ive.
Ces 10 dern iè res années des progrès impor tants dans la formulat ion des
a l iments toros ont pour or ig ine les connaissances et les techniques ut i l isées
dans les é levages la i t e t v iandes per formants e t on est t rès lo in de l ’u t i l i sat ion
de céréales s imples par fo is mélangées à des vesces (habas) générateurs de
graves problèmes d ’ac idose et de locomot ion.
Les quantités distribués
Un toro de 4 ans consomme env i ron 10 kg de mat ière sèche : pour l ’exemple, 1
kg d ’herbe cont ient 15 à 20% de MS, 1 kg de fo in 85 %, 1 kg de concent ré 88%
.
S i ce toro d ispose de bonnes ressources fourragères, 3 à 5 kg de « p ienso »
doivent permet t re d ’a t te indre les ob ject i fs de présentat ion, la issant la p lace à
une consommat ion de p lus de 5 kg de mat ière sèche de fo in ou pâ ture qui
favor ise une musculature p lus oxydat ive donc p lus rés is tante : c ’ es t la s i tuat ion
la p lus f réquente dans les é levages f rançais .
Dans les cas où la pâture dev ient rare et où le fo in n ’ex is te pas, les toros sont
al lo tés dans des parcs avec de la pa i l le consommée i r régul ièrement e t dans ces
condi t ions la quant i té de « p ienso » peut dépasser les 8kg par jour : le
ganadero doi t a lors gére r au mieux la formulat ion de son a l iment en d iminuant
la proport ion de céréales et en augmentant la proport ion de ce l lu lose, en
incorporant des « équiva lents fourrages » te ls que la luzerne déshydratée, le
son, e tc , e t en a jou tant des addi t i fs pour p réven i r les t roubles d ’ac idose.
Ce type d ’a l imentat ion permet une cro issance p lus rap ide dans les dern iers
mois, mais auss i de rat t raper des toros déf ic ien ts , e t favor ise une musculature
p lus dépendante du g lycogène et p lus fa t igable. De te l les quant i tés de « p ienso
» doivent ê t re d is t r ibuées so i t ind iv iduel lement so i t dans des auges assez
longues pour l imi ter les comportements dominants -dominés.
Les progrés dans la distribution, la formulation
La major i té des é levages per formants la i t e t v iande a adopté la technique de la
ra t ion complète, qu i cons is te à mélanger four rages et concent rés dans une
machine qui hache, qu i mélange e t d is t r ibue un a l iment p lus régul iè rement
ingéré, ruminé e t d igéré tout en d iminuant les charges de main -d’oeuvre : cet te
technique et ce matér ie l s ’ imposent e t s ’ imposeront de p lus en p lus dans les
ganader ias de p lus de 100 mères.
Les t ravaux de recherches INRA-AFVT et leurs conséquences sur la formulat ion
des concentrés : Les études sur les caractér is t iques des f ibres muscula i res ,
sur le métabol isme des musc les des toros pendant la l id ia , e t sur les
corré la t ions avec les s ignes de fa ib lesse , débouchent sur la mise en p lace de
méthodes de préparat ion a l imenta i re que l ’ INRA et l ’ AFVT expér imentent sur
les temporadas 2006-2007.
Conclusion
I l es t t rès d i f f ic i le d ’é lever des toros sans d is t r ibuer le « p ienso » durant la
dern ière année.
Si le système pai l le + p ienso à vo lonté n ’e st pas la mei l leure so lut ion pour
produi re des toros mobi les et rés is tants , beaucoup de progrès ont é té accompl is
ces dern ières années dans la formulat ion des « p iensos », e t les recherches
INRA-AFVT, les co l laborat ions avec des univers i tés vétér ina i res es pagnoles
devra ient encore cont r ibuer à des amél iorat ions .
L’ u t i l isat ion de mélangeuses d is t r ibut r ices amél iorent dans tous les cas les
per formances et l ’économie de la ganader ia et ce la d ’autant p lus que les
ganaderos espagnols font de p lus en p lus appel aux serv ices de nut r i t ionnis tes
compétents qu i gèrent toute l ’a l imentat ion du t roupeau et s i les « vuel tas » et
les « indul tos » se mul t ip l ient dans des ganadér ias qu i , i l ya 10 ans avaient une
réputat ion de fa ib lesse, c ’est en grande par t ie grâce à l ’amél io rat ion, de la
condui te a l imenta i re et à un « p ienso » b ien formulé et b ien ut i l isé : un grand
toro qu i extér io r ise tou tes ses qual i tés de caste, de bravoure et qu i « répète »
in lassablement est avant tout un animal en t rès bonne condi t ion phys ique ! !