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ANALYSE CINÉMATIQUE DE LA PERFORMANCE DE L'AXEL ET DU DOUBLE AXEL CHEZ DES PATINEUSES ARTISTIQUES DE NIVEAUX NOVICE ET EXPERT
Mémoire présenté
à la Faculté des études supérieures de l'université Laval
pour l'obtention du grade de maître ès sciences (M-Sc.)
Département de médecine sociale et préventive FACULTE DE MÉDECINE
UNIVERSITÉ LAVAL QUEBEC
AVRIL 2000
O Geneviève Gagnon 2000
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Le double axel est un élément technique clé dans la progression des jeunes patineuses
artistiques. il est possible que la comparaison de la performance de patineuses novices et
expertes nous indique les éléments déterminants de la réussite de ce saut. Une analyse
comparative novice-expert a donc été réalisée afin de comparer les paramètres cinématiques
des patineuses des deux groupes expérimentaux (novice n=6, expert n 4 ) . Un axe1 et trois
double axels ont été conservés pour fin d'analyse. Les résultats montrent une augmentation
significative de la vélocité verticale à l'appel. de la vélocité horizontale en début de phase
d'appel, du temps d'envol, du déplacement vertical du CM pendant la phase d'envol et de la
longueur du saut pour le groupe expert comparativement au groupe novice. Ces résultats
suggèrent que l'au,mentation de la vitesse d'approche et de la vélocité verticale à l'appel peut
avoir un impact positif sur la réussite du double axel.
AVANT-PROPOS
J'aimerais avant tout remercier Normand Teasdale, mon directeur de maîtrise, pour sa grande disponibilité et pour m'avoir offert moyens techniques et conseils judicieux pour mener à bien ce projet.
Merci aux examinateurs de ce mémoire, Normand Teasdale, Pierre Lagassé et Olivier Martin. pour leur collaboration et leur soutien technique et théorique. L'expertise que vous avez développée à l'intérieur de vos champs d'intérêt respectifs a contribué à parfaire ce document.
Un gros merci aux entraîneurs et patineuses qui ont accepté de participer à cette étude. Votre collaboration fut un pilier essentiel dans la concrétisation de ce projet. De plus, ce fut un plaisir de vous rencontrer et de travailler avec vous.
Il est également essentiel que je souligne l'aide inconditionnelle apportée par les gens sympathiques qui travaillent à l'entretien des patinoires du PEPS. Merci pour les nombreux coups de main que vous m'avez donnés.
Enfin, toute ma gratitude va à Martin Simoneau, mon très précieux collaborateur, supporter et confident. Je te remercie pour ta collaboration sur le plan technique lors de la collecte et du traitement des données. Sache que, tout au long de la réalisation de ce projet, ta présence, ton aide et tes encouragements furent grandement appréciés.
Merci à Pétro-Canada pour m'avoir supporté dans mes études et dans la réalisation de ce projet en me décernant la Bourse du Flambeau Olympique.
. =SU ME ..................................................................................................................................... i
. . AVANT-PROPOS ..................................................................................................................... II
... TABLE DES MAT~ÈRES ....................................................................................................... III
LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX ................................................................... iv
CHAPITRE I INTRODUCTION GÉNÉRALE ................................................................... 1
........................................................................ CHAPITRE II RECENSION DES ÉCRITS 2
2.1 Description générale du double axe1 et de ses phases .............................................................. 2
2.1. I Pitase de préparation ............................................................................................................ 3 2.1.2 Pltase d'appel ......................................................................................................................... 4 2.1.3 Pitase d 'envol ........................................................................................................................ 7 2.1.4 Phase de récepriori ...................... .. ...................................................................................... 8
2.2 Principes biomécaniques impliqués dans l'exécution du double axet ...................................... 1 0
2.2.1 Priricipes biomécaniqries impliqués dans l'ex écrr~iorz de saiits ............................................ 10 2.2.2 Principes biomécaniqries impliqtiés dans ïexéc~itiorr de rorations ..................................... -20
3.1 Description des sujets .................................................................................................................. 23
3.2 Equipernent .................................................................................................................................. 24
3.3 Acqrtisition et traitement des données ......................................................................................... 24
3.4 Variables dépendantes ................................................................................................................ -25
3.4.1 Pirase d'appel ....................................................................................................................... 25 3.4.2 Pltase d 'en vol ...................................................................................................................... - 2 7
3.5 A nalyses statistiques ................................................................................................................ -28
CHAPITRE IV RÉSULTATS ............................................................................................. 29
4.2 Phase d'appel ............................................................................................................................ 29
4.2 Phase d'envol ............................................................................................................................ 33
CHAPITRE V DISCUSSION .............................................................................................. 38
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................. 43
LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX
Figure 1. Trajectoire du double arel à vol d'oiseau. Adapté du Niveau II f 7 Technique ACPA. ..................................................................................................................... ,
Figrire 2. Séqrience de mouvements d'une patineuse experte en fonction des - * dtfferentes phases du double crrel. .......................................................................................... 3
Figrtre 3. Roration du patin sur la carre d'appel pendant la glisse, la transition er le pivot. Adapré de Alberr et Miller (1996) ......................................................................... 5
Figrrre 3. Vue de face (A) et à vol d'oiseau (B) de la position du centre de masse par rapport à la base de support. ........................................................................................... 6
Figrrre 5. Paranrèrres biornécariiques régis par la loi des projectiles au cours des phases d'exécrrtion de 1 'arel. Adapté de Sens-ay (1988) ............................................. 1 1
Figirre 6. Troisième loi de Ne~c*toiz (actiordréacriori) au rriomenr de l'appel d ~ i dorrble axe1 ....................................................................................................................... 13
Figrrre 7. Modèle tliéoriq~re expliquant les paramètres reliés à la iiairte~rr du saut lors de l 'exécutiori du saut de valse en patinage artistique, ............................................ 19
Tableair 1. Caractéristiques des sujets ayant participé à cette étude e-rprinrées par 1 . la moyenne er 1 ecan-rype ................................................................................................... 23
Figure 8. Vélocité verticale du centre de masse porrr le sirirple et le double nrel de patinerrses novices et expertes. ................ ..... .............................................................. 30
Figirre 9. Augle de flexion de la hanche à l'appel de l'are1 et du double axel C . pow les deux groupes expenmentaux.. ......... ... .................................................................... 3 2
Figrrre 10. Déplacement vertical du centre de masse de patineuses novices et expertes pendant la phase d'envol du simple et du double uxel. ......................................... 34
Figrrrc I I . Temps d'envol pendant 1 'exécution du simple et du double are1 C - pow les deux groupes expenmentaux ................................................................................... 36
.. Tableau 2. Résitltats moyens et écart-types pour routes les variables analysées. ........................ ... .3 7
Figrire 12. Corrélation entre la vélocité verticale du centre de masse à l'appel et le temps d'envol pour les deux groupes de patineuses. ................................................. 39
Figrtre 13. Corrélation enrre la longueur du saut et la vélocité horizontale du ................. cenrre de masse a l'appel du double axe1 pour les deux groupes de patineuses. 41
CHAPITRE 1
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Le patinage artistique a, au cours des dernières décennies, connu un essor sans cesse
grandissant. Le niveau technique requis pour arriver à rejoindre les têtes de fiIe aux niveaux
provincial, national et international est non seulement très exigeant mais aussi faut-il que les
patineuses y parviennent de plus en plus jeunes. Celles-ci doivent ainsi réussir à combiner une
technique parfaite, des qualités physiques importantes (force-vitesse, endurance, etc.), à une
force mentale, une agilité et une grâce exemplaires. Les demandes sont donc très importantes
pour ces jeunes filles en croissance.
L'élément technique dont il est question dans cette étude est le double axel. Ce saut est
très complexe en ce sens qu'il nécessite d'effectuer une rotation de 900 degrés, c'est-à-dire 2
1 / 2 rotations dans les airs. II est en fait le saut charnière entre les doubles et les triples sauts.
Sa réussite est également synonyme de succès dans certaines catégories de compétition et
souvent nécessaire dans un programme court, où une chute amène des déductions
automatiques importantes. Cependant, la période d'acquisition de ce saut est souvent longue
et comporte un risque de chutes éminent. Le but de cette étude est alors de vérifier, par la
comparaison de paramètres biomécaniques pour des patineuses de deux groupes d'expertise
différente, les critères qui pourraient déterminer la performance du double axel. Une
meilleure connaissance de ces paramètres pourrait permettre de réduire la durée de la période
d'acquisition de ce saut.
RECENSION DES ÉCRITS
Cette revue de littérature aura un double objectif. D'abord, de définir et de décrire les
différentes phases du double axel. Ensuite, de mentionner et d'expliquer brièvement les
différents paramètres biomécaniques étudiés dans des taches comprenant des sauts odet
rotations (patinage artistique et différentes disciplines connexes telles la gymnastique. le saut
en hauteur et en longueur).
2.1 Description générale du double axel et de ses phases
Le double axe1 est un saut qui implique un appel sur la carre extérieure avant d'un pied,
deux rotations et demi (900 degrés) dans les airs et finalement une réception sur la carre
extérieure amère de la jambe opposée. La rotation est exécutée dans le même sens que les
carres d'appel et de réception (Figures 1 et 2).
2 1 / 2 rotations
1 - 1 I I
Préparation Carre d'appel Envol Carre de réception
Figure 1. Trajectoire du double axel à vol d'oiseau. Adapté du Niveau iIi Technique ACPA
A. Préparation
1 isse)
E. Phase d'appel
(Pivot)
(Transition)
F . plta.& d'en vol
(Position de rotation)
C . Phase d'appel
(Glisse)
G . Phase d'envol
(Préparation de
réception)
D. Phase d'appel
(Transition)
H . Phase de réception
(Position de réception)
Figure 2. Séquence de mouvements d'une patineuse experte en fonction des
différentes phases du double axel.
2. I . 1 Phase de préparation
La préparation la plus couramment utilisée comprend d'abord l'exécution de croisés
arrières dans le même sens que la courbe d'appel (Figure 1) pour à la fois atteindre une vitesse
horizontale "optimale" et définir la trajectoire désirée (cercle d'un rayon précis) pour l'amorce
du saut. Ensuite, on observe une glisse sur la jambe opposée à la jambe d'appel (Figure 2A).
À la fin de la position de plisse sur la jambe de préparation. les bras sont habituellement
regroupés et placés parallèlement à la jambe libre (Figure 2A). Le pied libre s'ouvre à environ
90 degrés par rapport au pied traceur (Gailhaguet, 199 l ) , de façon à former un «Ln par rapport
au pied traceur (Manuel Niveau III Technique ACPA), pour préparer la transition entre cette
position et la prise de carre pour l'appel (Figure 2 B). Cette transition comporte un
changement de carre de la jambe de préparation (de la carre extérieure arrière à la carre
intérieure arrière), un abaissement du centre de gravité (allègement), suivi d'une période de
double support (Manuel Niveau KI technique ACPA). La carre d'appel commence à angle
droit par rapport à la carre de préparation (Figure 1) (Gaihaguet, 1991; Manuel Niveau III
technique ACPA). Pendant la transition, les membres supérieurs sont en position neutre près
des hanches (Manuel Niveau III technique A.C.P.A.) ou demeurent en position groupée
(Figure 2B).
2.1.2 Phase d'appel
Afin d'éviter la confusion, veuillez noter qu'une distinction sera faite entre la «phase
d'appel), qui comprend trois étapes (glisse, transition et pivot), la «carre d'appel» qui
représente la courbe tracée par la lame sur la glace et «l'appel» proprement dit qui représente
le dernier moment où la pointe de la lame de la jambe d'appel est en contact avec la glace.
Cette phase débute lorsque la jambe de préparation quitte la glace (simple support sur
la jambe d'appel) et se termine au dernier moment de contact entre la pointe de la lame de
jambe d'appel et la surface glacée (Figure 2 C, D, E). Albert et Miller ( 19%) ont rapporté que
la durée moyenne de la phase d'appel était de 0,55s chez les hommes et 0,57s chez les femmes
lors de l'exécution de simples et doubles axels. Ces valeurs n'étaient pas significativement
différentes et n'ont pas varié avec le nombre de rotations. Les patineurs participants à cette
étude travaillaient à réussir ou étaient capables de réussir le double axel. Toutefois, les auteurs
ne tenaient pas compte di: niveau d'expertise dans leurs analyses. Ces mêmes chercheurs ont
retrouvé des patrons moteurs stéréotypés et ont subdivisé cette phase en trois parties distinctes:
la glisse, la transition et le pivot.
Glisse Transition Pivot
Figure 3. Rotation du patin sur la carre d'appel pendant la glisse, la transition et le
pivot. Adapté de Albert et Miller (1996)
Glisse
Selon Albert et Miller (i996), la vélocité horizontale est constante lors de la glisse
(Figure 2C et 3). Au début, le bassin est orienté presque parallèlement à la lame de la jambe
d'appel. le côté libre étant maintenu vers l'arrière. De plus, un mouvement d'élan amère
(extension) des segments libres est présent au début de cette partie et subit par la suite un
changement de direction (flexion des épaules et de la hanche libre). Ii est à noter que les
segments libres se doivent d'être fléchis (Manuel Niveau iII technique ÂCPA) afin de
minimiser Ie moment d'inertie et par le fait même d'augmenter la vitesse de déplacement des
membres par rapport à leur axe de rotation respectif. Gailhaguet ( 1 99 I ) recommande
également de fléchir la jambe libre mais suggère de garder les bras en extension lors de l'élan
arrière. À mesure que la glisse progresse. l'inclinaison du corps de la patineuse à l'intérieur de
Ia courbe devient plus prononcée (Figure 4). Cette inclinaison a pour effet d'augmenter la
force centripète afin de combattre la force centrifuge qui tend à tirer la patineuse vers
l'extérieur de la courbe (Cam, 1997). Un second effet de l'inclinaison est de diminuer le rayon
de la courbe et de favoriser une augmentation du moment angulaire (Petkevich, 1988).
Trace de la posï,tion CM
Trace de la position du pied (cane d'appel)
Figure 4. Vue de face (A) et à vol d'oiseau (B) d e la position du centre
de masse par rapport à la base de support pendant la phase d'appel.
Transition
L'amorce de la transition dans la phase d'appel (Figure 2 D) se fait lorsque la vélocité
verticale du centre de gravité devient positive. Selon Albert et Miller (1996), cette période
débutait en moyenne 0,29s I 0 , 0 3 s avant le moment de l'appel pour les simples et doubles
axels des hommes et 0,27s I 0 , 0 7 s et 0,25s + 0'07s respectivement pour les simples et les
doubles axels des femmes. Ces différences n'étaient pas significatives. Durant cette période,
débute l'extension du genou d e la jambe d'appel. Selon les observations de ces mêmes
chercheurs, l'extension ne s e fait pas de façon continue mais est plutôt interrompue, soit par
une période où l'angle du genou était constant ou par une légère fiexion du genou. Les bras
continuent leur mouvement de balancier vers l'avant bien que la rotation des épaules autour de
l'axe longitudinal soit minimisée. La position de la hanche de la jambe libre rejoint alors celle
des épaules pour adopter une position perpendiculaire à la carre d'appel. La tête est maintenue
droite, le regard porté à l'horizontale (Gailhaguet, 1991). Albert et Miller (1 996)
ont observé une diminution de la vélocité horizontale pendant cette période qui était
significativement plus importante pour les doubles que pour les simples axels, ce qui
corrobore les résultats antérieurs de King et al. (1994) et d'Aleshinsky (1987). Finalement, la
transition se termine lorsque le point de contact entre la glace et la lame commence à se
déplacer du centre de la lame vers la pointe, créant un effet de roulement (Figure 3). Ce
roulement crée une diminution du rayon de la carre d'appel et amorce un mouvement de
rotation sur la glace (Manuel Niveau III technique ACPA).
Pivot
Le pivot est le dernier stade de la phase d'appel. Celui-ci commence au début du
déplacement du point de contact entre la lame et la glace vers la pointe (roulement) et se
termine au dernier moment de contact entre la pointe de la jambe d'appel et la glace (Figure
2E et 3). Le patineur exécute une flexion plantaire de la cheville ce qui a pour effet de
graduellement soulever la partie arrière de la lame et de créer une rotation autour de I'axe
longitudinal qui passe par le centre de gravité et la pointe de la lame (Albert et Miller, 1996).
Ce roulement sur la pointe crée un freinage et permet le transfert de la vélocité horizontale en
vélocité verticale. Au dernier moment, il se produit un roulement latéral de l'extérieur du pied
vers l'articulation du gros orteil (Manuel Niveau III technique ACPA). De plus, pendant le
pivot, l'extension du genou et de la cheville (plantiflexion) se poursuivent jusqu'à être
comptètes et sont accompagnées d'un mouvement vers le haut des bras et de la jambe libre
tangentiel à la carre d'appel (Gailhaguet 199 1).
2.1.3 Phase d'envol
L'envol correspond 5 la période pendant laquelle la patineuse n'est plus en contact avec
la glace et exécute des rotations selon I'axe longitudinal du corps. Au tout début de cette
phase, un transfert de I'axe de rotation est observé. La ligne de projection du centre de gravité
passe donc de la jambe d'appel à la jambe de réception. De plus. dans le double axel, les bras
sont groupés près de la cage thoracique et la jambe d'appel est ramenée et croisée sur la jambe
Iibre (position de rotation (Figure 2 F)). Cette position change la distribution de la masse par
rapport à l'axe de rotation et permet de diminuer le moment d'inertie et d'augmenter la vitesse
de rotation (Cam, 1997). Cette position est conservée jusqu'à l'approche de la fin de la
rotation. À ce moment. les bras et la jambe libre s'éloignent par rapport à I'axe de rotation
dans le but d'augmenter le moment d'inertie et le haut du corps se prépare à contrer la force
centrifuge présente à la réception par un mouvement de torsion dans le sens inverse à la
rotation (Figure 2G). Sans cette étape, la rotation se poursuivrait et amènerait la ligne de
projection du centre de gravité à l'extérieur de la courbe et incidemment en dehors de la base
de support.
2.1.4 Phase de réception
La réception débute lorsque la patineuse reprend contact avec la glace et se poursuit
jusqu'à la fin du maintien de la position de réception (Figure 2H). Cette dernière phase ne
peut être réussie que si la ligne de projection du centre de masse de la patineuse se trouve à
l'intérieur de la base de support. Cette dernière est très restreinte car la ligne de projection du
centre de masse doit être à l'intérieur de la partie avant de la lame afin d'utiliser la friction
supplémentaire fournie par l'insertion de la pointe dans la glace pour contrôler la position du
centre de masse par rapport à la base de support. Lorsque la ligne de projection du centre de
masse se trouve dans la partie arrière de la lame, la friction est moindre et Ie patin glisse vers
l'avant ce qui entraîne un déplacement soudain de la base de support vers l'avant et une chute
vers l'arrière. De plus, lors de la réception, la vitesse de rotation acquise pendant Ia phase
d'envol se doit d'être contrôlée et dissipée. Le centre de masse a tendance à poursuivre sa
course et à sortir à I'extérieur de la courbe de réception.
Lorsque l'alignement du centre de masse avec la base de support est adéquat, une
flexion séquentielle (distales à proximales) des articulations de la jambe de réception (cheville,
genou et hanche) est effectuée pour dissiper les forces de contact subies Ion de l'impact
(Gervais, 1997; Manuel Niveau Ill Technique ACPA). Cette force de contact est en fait une
impulsion qui est le produit de la force et du temps. Accroître le temps a donc pour effet de
diminuer la force. Alors, l'augmentation de l'étendue de mouvement de chacune de ces
articulations permet d'accroître le temps de mouvement pendant la phase de réception pour
ainsi diminuer la force de contact (Gervais, 1997; Manuel Niveau III Technique ACPA). De
plus. une flexion plus importante des articulations de la jambe de réception a également pour
effet d'abaisser le centre de masse et de favoriser la stabilité pendant la réception au sol.
La force moyenne absorbée par un athlète à la réception de sauts en patinage artistique
se situe entre 3 et 9 fois le poids du corps et est plus importante lorsque le nombre de rotations
augmente (Lockwood, 1995). Cette chercheure explique ces différences par une position du
centre de masse plus basse au moment de la réception et donc une période restreinte pour
distribuer la force de contact lorsque le nombre de rotations est plus important. Toutefois, la
hauteur du saut ne fut pas mesurée dans cette étude et serait probablement un facteur à ne pas
négliger dans l'explication de l'augmentation des forces de contact à la réception. Ces
résultats corroborent tout de même ceux de Panzer (1987) et Panzer et al. (1988) qui ont
observé des valeurs maximales de forces de contact 6,7 fois plus importantes pour un double
par rapport à un simple salto amère en gymnastique. La valeur maximale que ces derniers ont
enregistrée pour un double salto amère suite à un enchaînement de mouvements (tctmbliq)
était de 14.4 fois le poids de corps.
Enfin, un mouvement vers l'arrière de la jambe libre (extension) ainsi qu'un
déploiement des bras accompagnent la flexion de la jambe de réception dans le but d'adopter
la position de réception (Figure 2H), laquelle est maintenue jusqu'à l'amorce du mouvement
suivant.
2.2 Prirzcipes biomécaniques impliqués dans l'exécution du double axe!
Le but à atteindre lors de I'exécution du double axe1 est de réussir à compléter le
nombre de rotations souhaitées dans les airs pour ensuite exécuter la réception sur un pied et
maintenir la position de réception jusqu'au moment d'entreprendre le mouvement suivant.
Alors, les principes biomécaniques qui gouvernent plus spécifiquement I'exécution de sauts
ainsi que l'initialisation et le contrôle de mouvements avec rotations seront élaborés dans les
paragraphes subséquents.
3.2.1 Principes biomécaniques impliqués dans I'exécution de sauts
Lors de la phase d'envol, la trajectoire du centre de masse de la patineuse (axe sagittal)
obéit aux principes de la loi des projectiles. Ainsi, les patineurs doivent tenter de manipuler et
de contrôler cette trajectoire de façon à optimiser à la fois ta hauteur, la distance et le temps
d'envol nécessaires pour amver à compléter le nombre de rotations et la réception avec succès.
Plusieurs facteurs influencent la trajectoire du centre de masse pendant l'envol.
Certains de ces facteurs sont externes et ne peuvent pas être modifiés par l'athlète. D'une part,
la gravité produit une force qui attire toute particule d'un corps vers le centre de la Terre.
Ainsi, la force gravitationnelle de la Terre tend à produire une accélération de tout corps
d'approximativement 9'8 1 m/s2 vers le centre de celle-ci, ce qui a pour effet de combattre
l'élévation de tout corps projeté dans les airs et de le ramener vers le sol. Conséquemment, si
l'on considère que la résistance de l'air est négligeable, ia trajectoire du centre de masse a la
forme d'une parabole inverse telle que représentée dans la figure suivante (Figure 5).
I Distance ' I I I I
Phase d'appel Envol Réception
Figure 5. Paramètres biomécaniques régis par la foi des projectiles au cours des
phases d'exécution de I'axel. Adapté de Serway (1988)
La longueur du saut, la hauteur maximale du saut ainsi que le temps d'envol dépendent
de la combinaison de certains facteurs dont I'angIe d'envol (e), la vélocité résultante du centre
de masse à l'appel ( d s ) , et la hauteur du centre de masse à l'appel (cm). Selon la loi des
projectiles, il est possible de calculer mathématiquement l'angle d'envol (O), la hauteur
maximale du centre de masse (Hm) ainsi que la distance horizontale parcourue pendant
l'envol (D) à l'aide des formules suivantes :
- vo2 sin ' 8, K l a x -
28
y,' sin 28, D =
g
Les paragraphes suivants expliqueront comment ces facteurs peuvent modifier de façon
importante la forme de la trajectoire.
Anole d'envol
L'angle d'envol et la forme de la trajectoire peuvent être modifiés en changeant les
proportions des vélocités horizontale et verticale. Il peut donc y avoir soit prédominance de
hauteur, de distance ou un équilibre entre les deux. En patinage artistique, la hauteur est d'une
importance capitale car elle a une incidence sur le temps d'envol nécessaire pour terminer la
rotation. La distance entre l'appel et la réception est également primordiale pour accomplir
une réception qui comporte une glisse. Théoriquement, un angle d'envol d'environ 45 degrés
permettrait d'atteindre une distance maximale. Toutefois, les athlètes qui pratiquent le saut en
Iongueur. qui ont comme principal objectif de maximiser la distance, réduisent leur angle
d'envol à environ 20 à 22 degrés dans le but de ne pas compromettre la vélocité horizontale
(Carr, 1997). L'angle d'envol recommandé dans le Manuel Niveau III technique ACPA est de
45 degrés.
En patinage artistique, King et al. ( 1 994) ont suggéré que l'angle d'envol devient plus
prononcé lorsque le nombre de rotations augmente. Ainsi, chez 5 patineurs élite, l'angle
d'envoi est passé de 32 degrés pour le simple, à 36 degrés pour le double et à 43 degrés pour le
triple axel. Comme ces patineurs ont conservé une hauteur de saut assez similaire malgré
l'ajout de rotations, les auteurs attribuent cette différence ii une diminution de la vélocité
résultante due à un freinage plus important sur la carre d'appel. Cette phase de freinage
(skidding) semble significativement plus importante pour le double que pour le simple axel.
D'autres chercheurs ont trouvé des résultats similaires. (Aleshinsky, 1987; Albert et Miller,
1996; King 1997).
Vélocité horizontale
Comme la vélocité horizontale a une incidence sur la vélocité résultante, elle peut
également modifier l'angle d'envol. Albert et Miller (1996) ont remarqué une différence
significative entre la vitesse horizontale atteinte au préalable (phase de préparation) entre les
hommes et les femmes, les femmes diminuant leur vitesse de préparation pour le double axe1
et les hommes conservant une vitesse d'approche similaire pour le simple et le double axel.
Ces auteurs ont analysé la phase d'appel plus en profondeur en la divisant en trois parties
distinctes qui ont été décrites précédemment (glisse, transition et pivot). Ainsi, lors de la
glisse, ils ont observé que la vélocité horizontale demeurait relativement constante et qu'une
relation positive existait entre la vitesse atteinte et le niveau d'expertise. Lors de la transition,
ils ont remarqué que la vélocité horizontale avait tendance à décroître autour du moment où la
vélocité verticale devenait positive. Une décélération notable était enregistrée même lorsque
la courbe de départ n e présentait pas de freinage (skidding). Le freinage semblait coïncider
avec le moment où le pied libre passait près du pied d'appel. Enfin, durant le pivot, la vélocité
horizontale continuait de décroître. À I'appel. la vélocité horizontale était donc
considérablement réduite et ce de façon plus importante pour le double axel que pour le
simple. Cette diminution de la vélocité horizontale à I'appel augmentait l'angle d'envol et
avait également un effet sur la distance parcourue pendant la phase d'envol. En effet, King et
al. ( 1994) ont constaté que la longueur moyenne de saut des triples axels diminuait de 15% par
rapport à celle des doubles axels et de 28% par rapport à la longueur des simples axels.
Cette diminution de la vélocité horizontale du centre de masse à l'appel est aussi
associée à la projection du centre de masse vers l'avant à I'appel. Une diminution de la
véloci té horizontale ainsi que de l'amplitude du mouvement vers l'avant des bras et de la jambe
Iibre à I'appel contribuent a diminuer la projection du centre de masse et par le fait même
l'angle d'envol. Cette diminution de l'amplitude articulaire des segments libres a été notée par
plusieurs auteurs. En effet, les résuttats de King et al. (1 994) montrent une diminution de
l'angle de flexion de la hanche libre à I'appel de 79, à 68 et à 59 degrés respectivement pour le
simple, double et triple axel. Aussi, Abert et Miller (1996) ont mesuré la distance séparant les
chevilles au moment de I'appel et ont également noté une diminution moyenne de 1 1 cm chez
les hommes et de 9 cm chez les femmes pour le double par rapport au simple axel. Enfin,
Aleshinsky (1 990) et Albert et Miller (1 996) ont remarqué une orientation plus verticale du
corps à I'appel du double axe1 comparativement à l'appel du simple axel, ce qui témoigne donc
de la diminution de la projection du centre de masse vers l'avant à l'appel et de l'augmentation
de l'angle d'envol conséquentes à l'ajout de rotations.
Vélocité verticale
Une augmentation de la vélocité verticale du centre de masse à l'appel a pour
conséquence d'accroître la hauteur maximale du centre de masse pendant l'envol, la distance
parcoume entre l'appel et la réception et par conséquent, le temps d'envol. Comme dans cette
tâche le but est de réussir à accomplir plusieurs rotations dans les airs, il est essentiel de
maximiser cette vélocité verticale à l'appel.
Plusieurs facteurs ont une influence sur la vélocité verticale à l'appel. Premièrement,
en patinage artistique, l'athlète, tel un projectile, est propulsé dans les airs par une force
musculaire appliquée contre la surface glacée. Cette force comprend deux composantes soit
l'amplitude et la direction. Elle suit par ailleurs la troisième loi de Newton (loi de
I'action/réaction) q u i concerne l'interaction entre deux corps : toute force d'action d'un corps
sur un second corps entraîne une force de réaction de même amplitude et de direction opposée
sur le premier corps. Ainsi, la force d'action appliquée par la patineuse contre la glace lors de
l'extension des articulations (hanche, genou et cheville) de la jambe d'appel entraîne une force
de réaction de la glace qui est de force égale et de direction opposée et qui propulse la
patineuse dans les airs (Figure 6) .
Action Y 1 Réaction
Figure 6. Troisième loi de Newton (actiodréaction) au moment
de l'appel 'du double axe1
Générer une force de plus grande amplitude a donc pour effet d'accroître la force de
réaction de la glace et d'augmenter la vélocité verticale, Selon les résultats de Podoisky et al.
( 1990). les muscles extenseurs du genou et abducteurs de l'épaule seraient les plus importants
pour augmenter la hauteur du simple et du double axel. L'amplitude de la force peut être
maximisée en faisant I'extension complète de toutes les articulations de la jambe d'appel. De
plus, l'ordre d'intervention des articulations doit être séquentiel (de proximal à distal), soit en
premier lieu la hanche, ensuite le genou et finalement la cheville.
L'impulsion (1) (qui est égale au changement de quantité de mouvement). produit de la
masse (m) et du changement de vélocité verticale (v,), est également reliée à la période de
temps (t) pendant laquelle la force (F) est appliquée.
Théoriquement. augmenter l'amplitude de la force etjou le temps d'application de cette
force devrait avoir pour effet d'augmenter l'impulsion lors de l'appel. Toutefois, plusieurs
auteurs ont montré que l'application d'une grande force sur une très courte période de temps
est la méthode la plus efficace pour produire une impulsion maximale. En patinage de \!ilesse,
Alexander ( 1990) a montré qu'une extension du genou plus rapide pendant la poussée avait
pour effet de produire une impulsion plus importante qu'une extension plus lente. Lon d'une
étude sur le saut de valse en patinage artistique, McPherson (1 984) a observé que les patineurs
qui exécutaient l'extension des articulations de la jambe d'appel plus rapidement avaient une
impulsion verticale plus importante. Knoll et Hildebraiid (1 992)' qui ont élaboré des lignes
directrices à partir de l'analyse de 1 3 patineurs experts exécutant le triple axel, soulignent
l'importance d'un appel explosif, c'est-à-dire un appel où la force est maximisée à l'intérieur
d'une courte période de temps. Enfin, selon le Manuel Niveau IV Tâche Biomécanique de
I'ACPA, les patineurs devraient tenter d'exécuter l'appel des sauts de façon explosive pour
maximiser la vélocité verticale.
Toujours dans le but de maximiser la vélocité verticale, l'angle de flexion maximal du
genou sur la carre d'appel est également un facteur à considérer. Biomécaniquement, le fait
d'augmenter le bras de levier (distance perpendiculaire entre le point d'application de la force
et la ligne d'action de celle-ci) permet de produire un moment de force plus important.
Toutefois, dû à la structure de la jambe et aux angles d'insertion des muscles de celle-ci, un
angle d'environ 125 degrés serait recommandé (Cm, 1997). D'autre part, les athlètes qui
pratiquent le saut en hauteur fléchissent le genou d'appel entre 135 et 140 degrés lors du pas
d'impulsion (Carr, 1997). Ces athlètes essaient alors de tirer profit d'un plus grand temps
d'application de la force en plaçant le pied d'appel devant la position du centre de masse
(inclinaison vers l'arrière) avant de produire l'extension de la jambe d'appel de façon
explosive. Cette technique serait très efficace pour augmenter la véloci té verticale et
conséquemment la hauteur du saut. Cette stratégie serait également utilisée par les joueurs de
volley-ball et de basket-ball lors de I'exécution de sauts.
Un autre facteur permet d'augmenter I'impulsion à l'appel, donc la vélocité verticale :
le mouvement des segments libres. Pour être efficace, ce mouvement doit être effectué en
synergie avec le mouvement d'extension de la jambe d'appel. II doit ainsi respecter le rythme
d'extension de la jambe d'appel et être fait de façon explosive (Manuel Niveau IIi Technique
ACPA; Knoll et Hildebrand, 1992; Petkevich, 1988; McPherson, 1983; Fassi, 198 1 ). Une
flexion du genou de la jambe libre permet de diminuer l'inertie et d'exécuter un déplacement
plus rapide de celle-ci. La jambe libre doit donc être fléchie lorsqu'elle assiste la jambe
d'appel à l'envol. Ensuite, l'étendue de mouvement des articulations de la hanche libre et des
épaules a une incidence sur l'efficacité du mouvement. Ainsi, un mouvement plus ample de
ces articulations (extension au début de la phase d'appel et flexion par la suite) permettra
d'augmenter de façon importante la vélocité verticale. Toutefois, une grande amplitude des
segments libres à l'appel demande une force importante des muscles adducteurs pour réussir à
contrer la force centrifuge et parvenir rapidement à la position de rotation (Aleshinsky, 1986).
Pour cette raison, les patineurs ont tendance à réduire l'amplitude articulaire et par le fait
même une partie de la contribution des segments libres à la vélocité verticale lorsqu'il s'agit
d7au,menter le nombre de rotations pendant la phase d'envol.
Plus spécifiquement, selon Lees et Banon (1996) le mouvement des bras peut apporter
une contribution maximale de i 3% au pic de quantité de mouvement vertical maximal. Lors
de l'exécution de I'axel, le mouvement d'élan arrière des bras suit souvent la forme d'un
demi-cercle vers le bas et l'arrière pour ensuite emprunter le tracé inverse (vers le bas et
l'avant) en direction de la trajectoire désirée pour l'appel, c'est-à-dire selon la tangente de la
courbe d'appel. Toutefois, une autre technique est parfois employée. On parle alors d'un
mouvement el1 iptique des bras (Petkevich, 1988). Ces derniers suivront alon un parcours
horizontal (rotation externe des épaules) dans leur course vers l'arrière pour ensuite revenir
vers l'avant selon une trajectoire en demi cercle vers le bas tout comme la méthode
conventionnelle. Pendant la phase d'envol, la trajectoire du centre de masse ne peut être
modifiée après l'appel. Toutefois, en ramenant brusquement les bras vers le bas sur la cage
thoracique immédiatement après l'appel (pour prendre la position de rotation) il serait possible
d'abaisser la position du centre de masse à l'intérieur du corps et de prolonger quelque peu la
phase d'envol (Niveau N Tâche # 10 Biomécanique, 1994).
Tel que cité précédemment, l'augmentation de l'impulsion a pour effet de changer la
quantité de mouvement (p). Cette dernière peut être modifiée soit en changeant la masse (m)
ou la vélocité (v).
Comme la masse d'un individu est la même du début à ia fin de la tâche, i l est
nécessaire d'augmenter la vélocité pour créer un changement dans la quantité de mouvement.
On modifie cette vélocité en augmentant l'impulsion. Nous pouvons donc dire que
l'augmentation de l'impulsion entraîne forcément un changement dans la quantité de
mouvement.
De plus, comme dans les airs aucune force (sauf la gravité e t la résistance de l'air) ne
peut être exercée sur le corps, il est impossible de modifier la quantité de mouvement (loi de
conservation de la quantité de mouvement). il est donc primordial que tous les facteurs qui
servent à augmenter l'impulsion soient mis en action pendant que la patineuse est en contact
avec la glace. il est à noter que, pendant l'envol, même si la quantité de mouvement totale ne
peut être modifiée, il peut tout de même y avoir changement des contributions des différents
segments à cette quantité de mouvement.
Hauteur du centre de masse à I 'ap~el
La hauteur du centre de masse à l'appel peut également influencer la trajectoire du
centre de masse pendant l'envol. Ainsi, plus le centre de masse est élevé lors de l'appel, plus
la hauteur du saut est importante (Manuel Niveau III Technique ACPA). La hauteur maximale
atteinte, selon la loi des projectiles, fait référence au déplacement vertical d u centre de masse
pendant l'envol. Ce dernier représente alors la différence entre la hauteur maximale du centre
de masse pendant l'envol et la hauteur du centre de masse au moment de l'appel. McPherson
( 1983) a observé une corrélation entre la hauteur du saut et le déplacement vertical du centre
de masse pendant l'envol. Cette même chercheure a élaboré un modèle théorique (Figure 7)
afin de mettre en relation les différents facteurs qui influencent la hauteur du saut.
Hauteur du saut
Figure 7. Modèle théorique expliquant les paramètres reliés à la hauteur du saut
lors de l'exécution du saut de valse en patinage artistique.
Hauteur CM appel Déplacement V CM envol
f
Morphologie Position du du corps corps à l'appel
Vélocité verticale
Extension de la Action des segments Impulsion I
Masse jambe d'appel 1 i bres
Force Durée de
2.2.2 Principes biomécaniques impliqués dans l'exécution de rotations
Moment an.o;ulaire
Le mouvement angulaire est un mouvement qui se produit à une certaine distance d'un
axe de rotation donné. Le moment angulaire (Ma) est une mesure de la quantité de
mouvement angulaire. Celui-ci est le produit du moment d'inertie (I) et de la vélocité
angulaire (a).
Comme la réussite du double axe1 nécessite deux rotations et demi entre l'appel et la
réception (en moins d'une seconde), il est possible d'affirmer que les principes du moment
angulaire sont inhérents à celle-ci. Un moment angulaire est produit soit par I'appl ication
d'une force qui agit à une certaine distance de l'axe de rotation (excentrée) ou encore par le
transfert du moment angulaire d'une partie du corps au corps entier ou l'inverse. Le double
axe1 fait appel à ces deux principes et à un autre facteur susceptible de modifier le moment
angulaire : la rotation créée à l'aide de la lame et de l'inclinaison du corps sur la carre d'appel.
Premièrement, pendant le pivot et parfois lors de la fin de la transition de la phase
d'appel, les segments libres exercent une force excentrée autour de l'axe de rotation qui passe
au travers du centre de masse jusqu'à la lame de la jambe d'appel. Ce mouvement contribue à
augmenter le moment angulaire et est effectué lorsque la patineuse est en contact avec la
glace. Pendant la phase d'appel, la rotation du corps autour de I'axe longitudinal doit toutefois
survenir à la fin de la poussée verticale car un déclenchement anticipé de la rotation pourrait
nuire à l'atteinte d'une hauteur de saut maximale et à produire une rotation excessive du haut
du corps (GaiIhaguet, 199 1 ). Pour comger ce problème, il est important que le mouvement de
la jambe libre ait une trajectoire en demi-cercle vers le bas et passe tout près de la jambe
d'appel. Un mouvement symétrique des deux bras (soit en demi-cercle vers le bas ou
elliptique). participant à I'impulsion selon la trajectoire tangente à la carre d'appel, est
également d'une importance capitale pour ne pas intensifier la rotation précoce au détriment
de la production de vélocité verticale.
D'autre part, à l'appel de I'axel, il est possible d'augmenter la quantité de mouvement
angulaire en transférant le moment angulaire d'une partie du corps au corps entier. Pour être
efficace, le transfert de moment angulaire doit suivre trois principes. Premièrement. le
moment angulaire doit être acquis au sol. Deuxièmement, le transfert doit être effectué dans la
même direction que le moment angulaire des segments en rotation. Troisièmement, les
segments en rotation doivent s'arrêter brusquement au moment du transfert (Manuel Niveau
IV Tâche # 10 Biomécanique. 1994).
Ainsi, le balancement de la jambe libre et des bras vers le haut et autour de l'axe de
rotation à la fin de la phase d'appel crée un moment angulaire. Le mouvement de ces
segments est brusquement arrêté au moment de l'appel ce qui permet un transfert du moment
angulaire des membres au corps en entier. Le transfert est bien sûr effectué dans la même
direction que le moment angulaire initial et doit être effectué lorsque l'extension progressive
des articulations de la jambe d'appel est maximale. (Niveau III Technique ACPA; Niveau IV
Tache # 10 Biomécanique, 1994).
De plus, il est important de tenir compte de la carre d'appel en soi. Le rayon de celle-
ci diminue au moment où la position du centre de masse de la patineuse se dirige vers la
pointe de la lame (roulement vers Ia pointe) lors de l'extension des articulations de la jambe
d'appel. Cet effet est dû à la forme légèrement courbée de la lame ainsi qu'à l'inclinaison du
corps vers le centre du cercle formé par la carre d'appel. Le degré d'inclinaison du corps a
pour effet de réguler l'apport de ce facteur au moment angulaire résultant (Petkevich, 1988).
Accroître le degré d'inclinaison vers l'intérieur de la carre d'appel a donc pour effet
d'augmenter l'amplitude du bras de force et d'amplifier la rotation (Niveau IV, Tâche # 10
Biomécanique).
Moment d'inertie et vélocité anmilaire
La loi de la conservation du moment angulaire stipule que la quantité de mouvement
angulaire d'un corps est constante lorsque l'athlète n'a pas d'appui dans les airs. Ainsi, il est
impossible de modifier le moment angulaire lors de la phase d'envol. Tel que mentionné
précédemment, le moment angulaire est le produit du moment d'inertie et de la vélocité
angulaire. Alors, toute modification du moment d'inertie (résistance au changement de vitesse
autour d'un axe) pendant la phase d'envol entraîne un changement de la vélocité angulaire.
Ainsi. lorsque les segments libres se rapprochent de I'axe longitudinal du corps pendant la
phase d'envol. i l en résulte une diminution du moment d'inertie qui a pour conséquence
d'accroître la vélocité angulaire sans toutefois modifier la quantité de mouvement angulaire.
Un bon alignement de la position du bassin par rapport à la tête a également pour effet de
diminuer le moment d'inertie (Niveau N, Tâche #10 Biomécanique, 1994). L'effet contraire
est produit lors de la préparation pour la réception où les bras et la jambe libre s'éloignent de
I'axe de rotation afin de diminuer la vélocité angulaire.
Plus le nombre de rotations à compléter pendant la phase d'envol augmente, plus la
vélocité angulaire doit être importante. Le moment d'inertie devrait donc être réduit lorsqu'il
s'agit d'ajouter des rotations pendant 13 phase d'envol. Lors de leur étude, Arnold et Miller
( 1996) ont effectivement observé une diminution significative du moment d'inertie entre le
simple (2.9 kg Sm') et le double axe1 (2,s kg am'). Ces moments d'inertie sont comparables
aux valeurs observées par Aleshinsky et al. (1987). De plus, King et al. (1994) ont constaté
une augmentation de la vélocité angulaire maximale entre les simples (2'9 rotk), les doubles
(4,3 roih) et les triples axels (4,9 rotk). Cette diminution du moment d'inertie a également
tendance à apparaître plus tôt lorsque les patineurs ont à compléter plus d'une rotation. En
effet, King et al. (1944) ont remarqué que lorsque le nombre de rotations à compléter était plus
important, les patineurs se plaçaient en position de rotation plus tôt et maintenaient celle-ci
plus longtemps. Aleshinsky (1986) a reporté que les patineurs avaient une position plus
«fermée» au moment de l'appel lorsque ceux-ci exécutaient des sauts doubles par rapport aux
sauts simples.
CHAPITRE III
3.1 Description des sujets
Quinze patineuses âgées de 1 1 à 19 ans et de niveaux de compétition de pré-novice à
junior ont participé à cette étude. Celles-ci étaient assignées à un groupe selon leur niveau
d'expertise. Le groupe expert était formé de patineuses qui réussissaient le double axel de
façon constante (environ 4/5 fois) tandis que le groupe novice était constitué de patineuses qui
pratiquaient le double axel depuis un minimum de trois mois sans toutefois l'avoir réussi.
Toutes les patineuses réussissaient Ie simple axel avec succès. Douze des quatorze patineuses
exécutaient les rotations dans le sens anti-horaire, donc effectuaient l'appel sur la jambe
gauche. Le tableau qui suit montre les caractéristiques moyennes des deux groupes de sujets.
Nombre Âge Poids (kg) Taille (m)
Groupe Novice 6 14.35 + 1.65 48.02 1 5.59 1 -55 + 0.07 Groupe Expert 8 14.99 f 2.23 5 1.74 + 7.52 1.57 f 0.06
Tableau 1. Caractéristiques des sujets ayant participé à
cette étude exprimées par la moyenne et l'écart-type.
En premier lieu, une zone de saut était établie selon la trajectoire et l'espace nécessaire
à l'exécution des sauts pour chacune des patineuses. Cinq caméras vidéo étaient disposées
autour de cette zone et servaient à enregistrer le mouvement. Une structure à 12 points non
coplanaires a été utilisée afin de calibrer I'espace. L'analyse cinématique des sauts a été
réalisée à l'aide du système d'analyse du mouvement en trois dimensions APAS (Ariel
Performance Analysis System). Seize marqueurs réfléchissants étaient placés sur le centre de
rotation des articulations suivantes : poignets, coudes, épaules, hanches, genoux, malléoles
externes ainsi que sur les deux extrémités de chacun des patins (talon et bout du pied). Une
lumière était allumée brièvement pendant la phase de préparation pour permettre de
synchroniser les images des différentes caméras.
3.3 A cquisitiort et traitement des données
Les patineuses bénéficiaient de périodes d'échauffement hors glace et sur glace avant
Ie début de l'expérimentation. Elles devaient ensuite exécuter quelques sauts afin de délimiter
la zone de saut. Les caméras étaient positionnées et la calibration de l'espace était réalisée en
fonction de cette zone. Pour chacune des patineuses, 5 axels et 8 doubles axels ont été
enregistrés. Un axel et 3 doubles axels ont été conservés pour chacun des sujets selon la
qualité de la pise de vue et de l'exécution technique du saut. La réussite du saut signifiait que
la rotation était complète et que la réception était réussie sans nécessiter l'appui
supplémentaire des segments libres (pied Iibre ou mains). Tous les sujets ont réussi le simple
axel. En ce qui concerne le double axel, tous les sauts des patineuses novices avaient une
rotation insuffisante, ce qui entraînait parfois des chutes. Les doubles axels sélectionnés pour
le groupe expert étaient tous réussis selon les critères énoncés précédemment. Les images
vidéo des cinq caméras ont été synchronisées et les positions des différents marqueurs ont été
digitalisées manuellement à une fréquence de 30 imageslsecondes. Un algori thme
mathématique (Direct Linear Transfomation) a été utilisé afin de transformer les positions des
marqueurs en 3 dimensions (100 Hz). Les positions des marqueurs ont en grande majorîté été
filtrées à l'aide d'un filtre digital ayant une fréquence de coupure de 7 Hz. Approximative-
ment 15% des marqueurs ont toutefois nécessité I'utilisation d'un filtre digital de 4, 5 ou 6 Hz
afin d'atténuer le bruit présent dans le signal. Finalement. un kinogramme à 1 1 segments a été
construit à partir de la cinématique des différents marqueurs.
3.4 Variables dépendantes
Les variables dépendantes utilisées dans cette étude ont été choisies selon leur capacité
ri mesurer objectivement la cinématique de sauts en patinage artistique. Tel que mentionné
lors de la recension des écrits. ces variables ont été utilisées par d'autres auteurs ce qui
permettra de comparer les résultats de cette étude à ceux cités dans la littérature. Les variables
sélectionnées sont définies selon les phases du saut dans te texte qui suit. Les phases sont
subdivisées afin de préciser le moment d'apparition de chacune des variables.
3.4.1 Phase d'appel
Pelidarzr 10 glisse :
Vélocité horizontale au début de la phase de glisse -
Vélocité horizontale du centre de masse au début de la période de simple support sur la carre
d'appel (phase de glisse).
Angle de flexion du genou
Angle minimal compris entre le tibia et la cuisse sur la carre d'appel.
Hauteur minimale relative du centre de masse
Hauteur minimale du centre de masse atteinte pendant la phase d'appel exprimée en pourcentage de la taille.
Arr moment de l'appel (pivot) :
Vélocité verticale à l'anrxl
Vélocité verticale du centre de masse au moment de l'appel.
Vélocité horizontale à l'amel
Vélocité horizontale du centre de masse au moment de l'appel.
Angle d'envol
L'angle d'envol (0) à l'appel est calculé à partir de l'équation suivante où v, représente la
vélocité verticale et v,, la vélocité horizontale :
Angle - d e flexion d e la hanche
Angle compris entre la cuisse et le tronc au moment de l'appel.
Distance entre les chevilles
Distance séparant les chevilles au moment de l'appel.
Entre le débrtr er la firz de la phase d'appel :
Vélocité horizonta1e différentielle
Différence entre la vélocité horizontale au début de la phase de glisse et la vélocité horizontale
à l'appel.
Lonmeur de la carre d'apml
Sommation des déplacements scalaires de la position du marqueur au bout du pied d'appel
pendant la phase d'appel du début de la période de simple support jusqu'au demier moment de
contact avant la phase d'envol.
Durée de la phase d'arme1
Durée de la phase d'appel (t,) débutant à l'amorce de la période de simple support (t,) et se
poursuivant jusqu'au demier contact entre la lame et la glace à l'appel fb).
3.4.2 Phase d'envol
Perrdarit la première moitié de la phase d'envol :
Temm de fermeture des segments libres
Différence entre le temps où la distance entre les chevilles est minimale pendant la phase
d'envol et le temps à l'appel.
À In liarttelrr maximale du centre de masse :
Déplacement vertical du centre de masse
Différence entre la position verticale maximale du centre de masse pendant l'envol et la
position verticale du centre de masse à l'appel.
Hauteur maximale relative du centre de masse
Hauteur maximale du centre de masse atteinte pendant la phase d'envol exprimée en
pourcentage de la taille.
Eurre le début er la fin de la phase d'envol :
Longueur du saut
Distance horizontale séparant le dernier point de contact à l'appel du premier point de contact
à la réception.
Temps d'envol
Durée de Iri phase d'envol (t), c'est-à-dire la période séparant l'appel (b) de la réception (tf).
Vélocité an~ulaire moyenne
Ratio entre le nombre de degrés complétés et le temps d'envol. Le résultat est présenté en
rotations/seconde.
3.5 A nalyses statistiques
Afin d'identifier les différences significatives entre les résultats des deux groupes
expérimentaux pour le simple et pour le double axel, des analyses de variance 2 x 2 (Groupe :
expert - novice x Nombre de rotations : simple axel - double axel) furent réalisées. Un seuil
de 0.05 était utilisé afin de déterminer s'il y avait des différences significatives. Les résultats
de ces analyses seront expliqués en détail dans le prochain chapitre. 11 sera également possible
de consulter les valeurs moyennes et écart-types des variables dépendantes par le biais du
Tableau 2.
CHAPITRE IV
Les résultats moyens pour les variables étudiées sont élaborés dans le Tableau 2 et sont
exprimés selon le groupe expérimental et le nombre de rotations complétées pendant la phase
d'envol (simple ou double axel). Les résultats de l'analyse de variance (ANOVA) sont
élaborés dans les prochains paragraphes.
4.1 Phase d'appel
Perzcictrzt la glisse :
La vélocité horizontale au début de la période de glisse (phase d'appel) augmente avec
le niveau d'expertise (pd.01). Celle-ci est donc plus importante pour les patineuses expertes
(4.64 mis pour le simple et 4.39 m/s pour le double) que pour les patineuses novices (3.88 mis
pour le simple et 3.35 m/s pour le double). D'autre part, la vélocité horizontale en début de
glisse diminue lorsque le nombre de rotations est plus important (p4.01) et ce de façon deux
fois plus marquée chez les patineuses novices (diminution de 0.53 m/s) par rapport aux
patineuses expertes (diminution de 0.25 d s ) .
Les valeurs observées en ce qui concerne l'angle de flexion du genou ainsi que la
hauteur minimale relative du centre de masse étaient très similaires autant entre le simple et le
double qu'entre les différents niveaux d'expertise. Aucune différence significative ne fut
obsewée pour ces deux variables.
Au rnorrrent de l'appel :
Comme le montre la figure 8, la vélocité verticaie augmente de façon significative avec
le niveau d'expertise (p4.O 1 ) ainsi qu'avec l'augmentation du nombre de rotations (peO.0 1).
Celle-ci est, en moyenne, de 0.38 m/s supérieure pour les patineuses expertes comparative-
ment aux patineuses novices. De plus, les résultats montrent qu'elle augmente pour le double
me1 par rapport au simple d'en moyenne 0.12 m/s pour les patineuses du groupe novice et
0.13 rnls pour celles du groupe expert.
Simple Double
Groupe Novice
* Simple
Groupe Expert
Double
Figure 8. Vélocité verticale du centre de masse pour le simple
et le double axe1 de patineuses novices et expertes.
La vélocité horizontale au moment de l'appel est significativement atténuée pour le
double axei par rapport au simple (p<0.001). Ainsi, une diminution moyenne de 0'57 rn/s a
été observée entre le double et le simple axe1 pour les patineuses novices comparativement à
0,35 d s pour les patineuses expertes. Albert et Miller (1996) ainsi que King et al. (1994) ont
également observé une diminution de la vélocité horizontale pour le double par rapport au
simple axel. De plus, malgré que cette différence ne soit pas significative, les patineuses
novices avaient une vélocité horizontale moyenne moins importante que les patineuses
expertes. soit de 2.44 rn/s par rapport à 3 .O6 m/s.
Les résultats montrent une augmentation significative de l'angle d'envol pour te double
comparativement au simple axe1 (p4.001). Celui-ci au,omente pour le double par rapport au
simple de 9.03" pour les patineuses novices et de 3-56" pour les patineuses expertes. Les
résultats du groupe expert corroborent ceux de King et al. (1994) qui ont observé une
augmentation moyenne de 4" pour le double axel par rapport au simple chez des patineurs
experts. On remarque également que cette augmentation de I'angle d'envol est deux fois plus
importante pour les patineuses du groupe novice que pour celles du groupe expert. Lorsque
l'on compare sur la base du niveau d'expertise, l'angle d'envol des patineuses novices était
moins important que les patineuses expertes lors des axels (- 1'3 1 O) et plus prononcé lors des
doubles asels (4,16"). Cette augmentation de l'angle d'envol peut être due à la diminution de
la vélocité horizontale notée au début de la phase d'appel.
L'angle de flexion de la hanche ne comportait aucun effet simple, toutefois,
l'interaction Groupe x Nombre de rotations était significative (p<0.05). La figure 9 montre
u n e stratégie différente adoptée par les patineuses des deux groupes. Ainsi, à l'appel du
double axel, les patineuses novices réduisaient de 9.65" l'angle de flexion de la hanche tandis
que les patineuses expertes l'augmentaient de 2" par rapport au simple axel. Bien que les
effets simples ne soient pas significatifs, cette figure montre que l'écart présent entre les
valeurs des deux groupes pour le simple (12.84") est considérablement réduit lors du double
axel (1.19").
Simple Double
Figure 9. Angle de flexion de la hanche à l'appel de l'axe1 et du double axe1
pour Ies deux groupes expérimentaux.
La distance maximale séparant les chevilles au moment de l'appel ne montrait aucun
effet significatif. Les patineuses novices ont conservé une distance moyenne identique (0,52
m) malgré l'ajout de rotation. Cependant, on observe une diminution non significative de 0,08
m entre la distance maximale comprise entre les chevilles au moment de l'appel pour le
double par rapport au simple axe1 chez les patineuses du groupe expert.
Enrre le début et la f in de la phase d'appel
La vélocité horizontale différentielle moyenne était plus importante chez Ies patineuses
expertes (1'46 d s ) que chez les patineuses novices ( l , l8 d s ) . De plus. elle augmentait
légèrement lorsque les patineuses passaient du simple au double axe1 (1.29 rn/s et 1,35 m/s
respectivement). Ces valeurs ne présentaient néanmoins aucune différence significative.
Cette variable donne une indication par rapport au freinage effectué pendant la transition et le
pivot.
Une augmentation significative était présente pour la longueur de la carre d'appel en
fonction du niveau d'expertise (pc0.01). Celle-ci mesurait en moyenne 1.5 1 m pour les
patineuses novices et 2.46 m pour les patineuses expertes. Cette différence pourrait
probablement avoir un lien avec le fait que les patineuses du groupe expert ont une vélocité
horizontale lors de la glisse plus importante que celles du groupe novice. Une diminution
moyenne de la longueur de la carre d'appel était également présente entre le simple et le
double mais non significative.
La durée de la phase d'appel n'était pas significativement différente entre le simple et
le double axel. Cependant, les résultats montrent une augmentation significative de la durée
de la phase d'appel (p<0.05) en fonction du niveau d'expertise. Les patineuses expertes
avaient en moyenne une phase d'appel plus longue que les patineuses novices (0.58 s et 0.48 s
respectivement).
4.2 Phase d'envol
Perzdarzt la première moitié de la phase d'envol :
Le temps de fermeture des segments libres diminuait significativement (p<O.OOI) pour
le double comparativement au simple axel. Les patineuses des deux groupes expérimentaux
étaient donc placées en position de rotation en moyenne 0.05 s plus tôt pour le double par
rapport au simple axel. Les patineuses novices avaient tendance à fermer les segments libres
0.02 s plus tôt que les patineuses expertes peu importe le nombre de rotations mais cette
différence n'était pas significative.
À in izauteur maximale du centre de masse :
Les deux variables qui témoignaient de la hauteur du saut (déplacement vertical du
centre de masse pendant la phase d'envol (~~0.001) et hauteur maximale relative du centre de
masse ( ~ ~ 0 . 0 5 ) ) étaient significativement plus importantes pour les patineuses expertes que
pour les patineuses novices. La Figure 10 illustre l'augmentation du déplacement du centre de
masse pendant la phase d'envol des simples et des doubles axels des patineuses expertes par
rapport aux novices. Plus spécifiquement, les patineuses expertes ont un déplacement vertical
moyen plus important que les patineuses novices (24% plus important). De plus, on remarque
que, pour chacun des groupes, l'amplitude du déplacement vertical du centre de masse varie
très peu entre le simple et le double axel.
Simple Double Groupe Novicc
* Simple
--
Double Groupe Experl
Figure 10. Déplacement vertical du centre de masse de patineuses novices
et expertes pendant la phase d'envol du simple et du double axel.
Pour ce qui est de la hauteur maximale relative du centre de masse, les valeurs moyennes
correspondaient à 8 2 8 de la taille pour les patineuses expertes par rapport à 74% pour les
patineuses novices. Pour le déplacement vertical du centre de masse ainsi que la hauteur
maximale relative du centre de masse, aucune différence significative ne fut observée entre le
simple et le double axel.
Entre le début et la f in de la phase d'envol :
La longueur du saut comportait à la fois un effet Groupe (p4.05) et un effet Nombre
de rotations (pc0.001). La longueur moyenne des sauts des patineuses expertes était donc de
0.43 rn plus importante que celle des patineuses novices. Ces résultats corroborent ceux de
King ( 1997) qui a observé une différence de 0.44 m entre la longueur moyenne des sauts d'un
groupe de patineurs experts par rapport à celle d'un groupe de novices. D'autre part, il y avait
diminution de la longueur du saut lorsque le nombre de rotations à compléter était pIus
important. Cette diminution était notamment 2 fois plus importante pour les novices
(diminution moyenne de 0.23 m) que pour les experts (diminution moyenne de 0.12 m).
En ce qui concerne te temps d'envol, des effets simples Groupe (pcO.0 1 ) et Nombre de
rotations (pc0.01) ont été observés. Ainsi, comme le montre la Figure 1 1 , le temps d'envol
augmente de façon significative lorsque le nombre de rotations et le niveau d'expertise sont
plus importants. La valeur moyenne du temps d'envol des patineuses du groupe novice ne
correspondait qu'à 85% de celle du groupe expert. D'autre part, le temps d'envol moyen pour
le « double axe1 >> des patineuses du groupe novice (0.49 s) était inférieur à celui du << simple
axe1 » du groupe expert (0.53 s). King (1997) a également remarqué une a~~penta t ion du
temps d'envol en fonction du nombre de rotations et du niveau d'expertise.
$ Simple
Double Simple Double
Groupe Novice Groupe Expert
Figure 1 1. Temps d'envol pendant l'exécution du simple et du double
axel pour Ies deux groupes expérimentaux.
En ce qui concerne la vélocité angulaire moyenne lors de la phase d'envol, elle
augmente significativement avec l'ajout de rotations (pc0.001). Les patineuses novices ont
une a~~mentation moyenne de 0.87 rot/s et les patineuses expertes de 1.63 rot/s entre le simple
et le double axel. Cette différence importante est expliquée par l'interaction Groupe x
Nombre de rotations (p<0.001). Ainsi, les patineuses expertes ont une vitesse de rotation
moyenne plus Iente lors du simple (réduction de 0.49 rotls) et plus rapide lors du double axel
(augmentation de 0.27 rot/s) comparativement aux patineuses novices.
Phase d'appel
Vh début glisse (mis) 4
Flexion mzm gencu ( O )
Hauteur min rel CM (% taille) 4
Vv 2 l'appel ( d s ) * 9
Vh appel ( d s ) 4
AngIe d'envol ( O ) 4
FIcxion max hanche i I'appcl ( O ) t Distance chevilles à I'appcl (m) Vh glisse-Vh appel ( d s )
Longueur carre d'appel (rn) *
Durée phase d'appel (s) *
Phase d'en vol
Temps fermeture segments (s) 4
DépIacement V CM envol (m) t
Hauteur max CM (% taille) -.i
Lon,nucur saut (m) * 4
Tenips d'envol (s) - 4
Groupe Novice Groupe Expert Simple Double Simple Double
Vélocitb angulaire moyenne (rads) t 3.35 f: 0.36 4.22 $I 0.28 2.86 2 0.16
effet simpie Groupe significatif p d O S + effet simple Nbre rotations significative pc0.05 t interaction Groupe-Nbre rotations significative p4.05
Tableau 2. Résultats moyens et écart-types pour toutes les variables analysées.
CHAPITRE V
DISCUSSION
L' application de principes biomécaniques à l'analyse de tâches sportives fournit des
informations aux entraîneurs et aux athlètes qui permettent d'optimiser et de parfaire
l'efficacité, la précision et la constance de la technique pour éventuellement mener à un niveau
de performance supérieur. Certains auteurs ont tenté d'appliquer ces principes à différentes
activités qui impliquent des sauts telles que le patinage artistique (Chapitre 2). Ces études ont
ainsi contribué à fournir des informations sur la cinématique du mouvement permettant
d'améliorer et de raffiner les techniques enseignées aux athlètes. Si l'on considère la
complexité des éléments pratiqués ainsi que le haut risque de blessures en patinage artistique.
il est d'une importance capitale que tout entraîneur reconnaisse le potentiel d'un tel outil et en
applique les principes afin de parfaire la technique de ses athlètes.
Or, tel qu'exposé lors de la recension des écrits, les variables analysées dans cette
étude sont en interaction constante. Ainsi, la modification d'un ou plusieurs paramètres
biomécaniques peut engendrer des conséquences bénéfiques ou néfastes selon le but recherché
lors de la tâche. Lors de l'exécution de sauts en patinage artistique, le but à atteindre est
d'effectuer une réception en équilibre sur un seul pied après s'être élancé dans les airs et avoir
complété un nombre de révolutions donné. Comme le simple axel est réussi par toutes les
patineuses dans cette étude, la discussion sera principalement orientée vers les différences
entre les résultats du double axel.
Après avoir observé que toutes les patineuses du groupe novice avaient un déficit de
rotation entre 90" et 270" par rapport aux 900" nécessaires à la réussite du double axel, il est
possible d'assumer qu'un problème important à surmonter en phase d'acquisition du double
axe1 serait la capacité à compléter le nombre de rotations requis. Comme la vélocité angulaire
n'était pas significativement différente entre les groupes. le temps d'envol est par conséquent
I 'aspect limitatif qui fait que la grande majorité des patineuses novices participant à cette étude
ne peuvent arriver à compléter le nombre de rotations désiré.
La vélocité verticale est donc un facteur à considérer pour réussir à compléter la
rotation car elle influence à la fois la hauteur du saut, la longueur du saut et le temps d'envol.
La figure 12 illustre la relation étroite entre la vélocité verticale et le temps d'envol
(correlation r=0.90) pour l'ensemble des patineuses de cette étude.
2.7 r
Temps d'envol (s)
Figure 12. Corrélation entre la vélocité verticale du centre de masse
à l'appel et le temps d'envol pour les deux groupes de patineuses.
Lorsque les groupes expérimentaux étaient comparés, des différences significatives ont
effectivement été observées non seulement pour la vélocité verticale à l'appel. mais également
pour la hauteur du saut, la longueur du saut et le temps d'envol. Ces différences entre les
groupes expérimentaux permettent d'affirmer que la vélocité verticale est un des facteurs
déterminants pour la réussite du double axel. Les variables telles la hauteur, la longueur du
saut ainsi que le temps d'envol sont des conséquences de la vélocité verticale et ne peuvent
Ztre modifiées en soi.
Cette différence entre les vélocités verticales des deux groupes ne serait pas expliquée
par l'amplitude articulaire de Ia jambe libre car il n'y avait pas d'effet Groupe pour l'angle de
flexion de la hanche ni pour la distance entre les chevilles à l'appel. La durée ainsi que la
longueur de la carre d'appel pourraient avoir eu un effet sur la vélocité verticale en
prolongeant le temps d'application de la force. D'une part, la durée de la phase d'appel ne
serait pas liée à un abaissement plus important du centre de masse. Cependant. il serait
intéressant de vérifier si l'angle du genou demeurait constant ou effectuait une double flexion
comme l'ont observé Albert et Miller (1996). Ces deux stratégies auraient pour effet de
prolonger la durée de la phase d'appel. D'autre part, en ce qui concerne la longueur de carre
d'appel plus importante chez les expertes, elle peut être due à une plus grande vitesse
d'approche et à une durée de la phase d'appel plus longue. D'autres facteurs peuvent aider à
augmenter la vélocité verticale. Ils n'ont toutefois pas été analysés dans le cadre de cette
étude (par exempIe la force musculaire). Ceux-ci sont énoncés au second chapitre de ce
document.
La longueur du saut est également importante en patinage artistique. Lorsque celle-ci
est adéquate, la réception du saut comporte une glisse, ce qui favorise la fluidité entre les
éléments. La vélocité horizontale au début de la phase d'appel et la longueur du saut
comportaient des différences significatives (effet Groupe). De plus, selon la figure 13, la
véloci té horizontale en début de glisse est corrélée (d.93) avec Ia longueur du double axel.
Par conséquent, augmenter la vitesse d'approche aurait pour effet d ' a ~ ~ p e n t e r la longueur du
saut.
Velocitb Horizontale a l'appel (mis)
Figure 13. Corrélation entre la longueur du saut et la vélocité horizontale du
centre de masse à I'appel du double axel pour les deux groupes de patineuses.
D'après les résultats de cette étude, les paramètres qui peuvent être déterminants en ce
qui concerne la réussite du double axel sont donc la vélocité verticale, la vélocité horizontale
au début de la glisse (vitesse d'approche) et la durée de la phase d'appel. Une amélioration
de ces paramètres aura pour conséquence d'augmenter la hauteur du saut. la longueur du saut
et le temps d'envol, favorisant ainsi la progression et éventuellement la réussite du double
axel.
La période d'acquisition du double axel est parfois longue par rapport aux autres sauts
doubles car elle comporte une demi-rotation suppIémentaire et nécessite donc un temps
d'envol plus important et une modification du timing de fermeture/ouverture des segments
Iibres. Pratiquer à outrance le double axel lorsque la vélocité verticale est insuffisante pourrait
augmenter le risque de blessures des athlètes. La vélocité verticale devrait être travaillée hors
glace en musculation et plus spécifiquement par des exercices d'impukion et de coordination
au sol (par exemple par différents exercices comprenant des impulsions et rotations). La
variété des exercices permet de bnser la monotonie! La vélocité verticale doit également être
entraînée sur glace en tentant de générer une impulsion plus importante lors de l'axel. Les
résultats ont montré que les patineuses expertes ont tendance à adopter une stratégie différente
des patineuses novices lors de l'exécution de I'axel. Celles-ci maximisent la vélocité verticale
et augmentent l'amplitude des segments libres à l'appel de I'axel (diminution de l'angle de
flexion de la hanche et augmentation de la distance entre les chevilles)- L'exécution d'un
simple axe1 ne nécessite pas l'augmentation de ces facteurs pour être réussie. Toutefois, il est
probable que la pratique de ces derniers ait une incidence positive sur l'augmentation de la
vélocité verticale à l'appel du double axe1 et permette, éventuellement, de compléter les
rotations requises.
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