50374-2011-pottiez_tome1
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UNIVERSIT DES SCIENCES ET TECHNOLOGIES DE LILLE INSTITUT DADMINISTRATION DES ENTREPRISES
COLE DOCTORALE SSAM Sciences conomiques, sociales, de lamnagement et du management
Thse prpare au sein du laboratoire LILLE CONOMIE ET MANAGEMENT
(LEM UMR CNRS 8179)
No dordre : 40752
valuation de la performance de la formation en entreprise par une approche systmique
Tome I Revue de littrature et cadre thorique
Thse de doctorat en stratgie et management des organisations
Pour lobtention du titre de
Docteur en sciences de gestion
(arrt du 7 aot 2006)
Prsente et soutenue publiquement Lille
Le 5 dcembre 2011 par
Jonathan POTTIEZ
JURY
Directeur de thse : M. Pierre LOUART Professeur des universits IAE de Lille
Co-directeur de thse : M. Jean-Yves LE LOUARN Professeur honoraire HEC Montral
Prsident du jury : M. Charles-Henri BESSEYRE DES HORTS Professeur associ HEC Paris
Rapporteurs : M. Dominique BOUTEILLER Professeur agrg HEC Montral
M. Alain ROGER Professeur des universits IAE de Lyon
Suffragant : M. Dominique BESSON Professeur des universits IAE de Lille
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valuation de la performance de la formation en entreprise par une
approche systmique
Rsum
On considre depuis longtemps la formation comme un puissant levier permettant de
dvelopper les comptences du personnel et, donc, damliorer la performance
organisationnelle. En France, elle reprsente annuellement une dpense de 26 milliards
deuros, rpartie entre les acteurs publics et privs, un cot important qui incite certains
acteurs parler d investissement-formation . Pourtant, lvaluation de sa relle efficacit et
de son hypothtique rentabilit (en tant quinvestissement) demeure un vieux dbat, un
mystre non rsolu, certains le qualifiant de serpent de mer de la formation . Cependant,
les multiples enjeux et dfis auxquels est cense rpondre la formation, au moins en partie,
posent nouveau la question de son valuation et la ncessit dapporter des rponses
pragmatiques, rigoureusement ancres dans des dveloppements thoriques solides. Cette
recherche doctorale se veut une contribution ltude du lien entre formation et performance
en sappuyant sur une mthode qualitative teste au sein dun nombre restreint de PME/PMI
franaises. Nous verrons que les modles thoriques dvaluation de la formation dvelopps
antrieurement se focalisent majoritairement sur les actions et programmes de formation, au
dtriment des politiques et systmes de formation. Ce manque thorique nous amnera
formuler une problmatique de recherche posant la question de lvaluation des systmes de
formation. La thse vise ainsi construire un modle thorique dvaluation des systmes de
formation, modle construit partir dune revue de littrature relativement exhaustive et
valid par ltude approfondie et contextualise de trois systmes de formation. Cette
recherche nous permettra de prciser le concept de performance du systme de formation
en identifiant ses rsultats possibles. galement, nous identifierons diffrents facteurs
organisationnels pouvant tre des catalyseurs ou des barrires cette performance.
Mots-cls : formation, performance, valuation de la formation, approche systmique,
facteurs de contingence, systme de formation, dterminants de la performance, modles
dvaluation de la formation.
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Corporate Training Performance Evaluation through a Systems Approach
Abstract
Training has been for many years regarded as an important lever for the development of staff
skills and thus, for the improvement of organizational performance. In France, it represents an
annual expenditure of 26 billion euros, supported by public and private sectors, a major cost
that encourages some actors to talk about investment in training. However, the evaluation of
its real effectiveness and of its hypothetical profitability (as investment) remains an old
debate, an unsolved mystery, some even calling it the sea serpent of training. However, the
many issues and challenges that training is expected to meet, at least in part, again raise the
question of its evaluation and the need to provide pragmatic answers, rigorously grounded in
solid theoretical developments. This doctoral research is thus a contribution to the study of the
link between training and performance using a qualitative method, in a small number of
French SMBs. We will see that the theoretical models of training evaluation developed earlier
mainly focus on training actions and programs, to the detriment of training policies and
systems. This theoretical weakness leads us to formulate a research problem posing the
question of training systems evaluation. The thesis aims to build a theoretical model for
evaluating training systems, model built from a relatively comprehensive literature review and
validated by the thorough and contextualized study of three training systems. This research
will allow us to clarify the concept of performance of the training system by identifying its
possible outcomes. Also, we will identify several organizational factors that can be catalysts
or barriers to this performance.
Keywords: training, performance, training evaluation, systemic approach, contingency
factors, training system, performance determinants, training evaluation models.
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Le tome I regroupe la partie I (Les enjeux de la formation du personnel), la partie II
(Formation et performance) et la partie III (Cadre thorique) de cette thse.
Le tome II, qui regroupe la partie IV (Mthode de recherche) et la partie V (tudes
empiriques), fait lobjet dune publication spare, librement accessible.
AVERTISSEMENT
LUniversit des sciences et technologies de Lille nentend ni approuver, ni dsapprouver les
opinions mises dans cette thse. Ces opinions doivent tre considres comme propres leur
auteur.
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REMERCIEMENTS
Arriv au terme de ces annes de ce travail, je tiens avant toute chose remercier plusieurs
personnes de mon entourage personnel et professionnel sans qui cette thse naurait pu
aboutir. La thse de doctorat est un travail de longue haleine et je sais que leur soutien,
indfectible, a t prcieux pour la voir aboutir.
Dans un premier temps, mes remerciements iront mes directeurs de thse, les professeurs
Pierre Louart et Jean-Yves Le Louarn, qui ont su morienter et me guider jusqu la
conclusion de cette recherche. Grce, entre autres, son expertise dans les problmatiques
dintervention sur les systmes de gestion des ressources humaines (GRH), Pierre Louart ma
appris voir au-del de la seule instrumentation de gestion en mincitant tudier les rles et
stratgies des acteurs au sein de ces systmes. Il est donc pour beaucoup dans lorientation de
ce travail doctoral. Aussi, il ma accompagn dans lvolution de mon statut de consultant
vers celui de jeune chercheur, me faisant prendre conscience de la ncessit de dpasser le
vocable managrial pour apprendre thoriser et conceptualiser, me faisant dcouvrir au fil
des annes divers travaux fondateurs en GRH. Pour moi, ltudiant frachement diplm de
master 2 professionnel (ex-DESS), cela se fit un peu dans la douleur et je le remercie de
mavoir fait confiance et de mavoir permis de relever ce dfi en maccordant une autonomie
croissante. Enfin, je noublie pas que, en tant que directeur de lIAE de Lille, il ma permis de
travailler dans les meilleures conditions possibles. Jean-Yves Le Louarn, en ayant accept de
participer galement au suivi de cette thse, ma permis de bnficier dune co-direction
franco-canadienne, vritable source de richesse dans un champ de recherche majoritairement
nord-amricain. Cest dailleurs la lecture de son ouvrage co-crit avec Thierry Wils1, au
tout dbut de cette thse, que jai pris connaissance de son expertise dans le champ de
lvaluation de la GRH. Prenant conscience de limportance de ces questions, jai souhait
mon tour en faire lun de mes thmes de recherche de prdilection. Enfin, merci galement
pour sa confiance, la simplicit de nos relations, ainsi que pour sa patience dans les moments
de schizophrnie relatifs lambivalence de mon double statut de consultant et de chercheur.
Un grand merci galement lAssociation nationale pour la recherche technique (ANRT)
davoir accept de participer au financement de cette thse dans le cadre dune convention
1 Voir Le Louarn et Wils (2001).
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industrielle de formation par la recherche en entreprise (CIFRE). Ce dispositif ma permis de
bnficier dun soutien financier qui fait encore dfaut trop de doctorants, malheureusement.
Aussi, la croissance du nombre de CIFRE signes en sciences de gestion est encourageante,
ce dispositif mritant dtre valoris, notamment pour participer au rapprochement entre les
entreprises et la recherche.
Je remercie les membres du jury davoir accept dvaluer cette thse et davoir consacr du
temps la lire. Leur prsence mhonore, leurs travaux ayant t de vritables rfrences tout
au long de mon parcours doctoral et me font prendre conscience du chemin parcourir. Je les
remercie galement pour leurs critiques et commentaires qui me permettront de progresser
dans ma formation de chercheur, au bnfice de mes recherches venir.
Mes remerciements vont aussi lquipe de lentreprise Formaeva (ex-Vulpus) au sein de
laquelle jai pass le plus clair de mon temps ces dernires annes. Tout dabord,
Franois-Xavier, son dirigeant, et Guillaume, dveloppeur informatique, pour leur confiance
en mon travail dans le cadre de nos projets communs. Nous avons pass ensemble de longues
heures de travail, oscillant entre langoisse des premiers contrats et la joie des succs fts. Je
pense que, depuis, nous avons dpass le cadre de la seule relation professionnelle et quils
sont pour moi plus quun patron et un collgue. Merci aussi mes autres collgues, actuels et
passs, notamment milie, Julie, Pauline, Franck et Jean-Franois, sans oublier lensemble de
nos stagiaires. En plus de mavoir permis de travailler dans une trs bonne ambiance (une
entreprise o il fait dcidment bon vivre), je noublie pas que cest aussi par ce contact
permanent avec le terrain que jai appris passer de la recherche la pratique, et inversement.
Cette entreprise a de grandes choses raliser, je lui souhaite pleine russite et espre encore
pouvoir y contribuer activement de longues annes.
Merci galement tous mes collgues enseignants ou enseignants-chercheurs, de toutes les
institutions au sein desquelles jai pu me forger mes premires expriences denseignant. Leur
confiance ma permis de passer rapidement de lautre ct du bureau , alors que jtais
frachement diplm de master 2 et que dbutait mon travail de thse. Merci galement tout
le personnel administratif, aux secrtaires dvou(e)s. Nous aurions tort de ne pas saisir
limportance de leur travail dans le bon droulement des cours, au profit des enseignants
comme des tudiants. Je remercie aussi lensemble de mes tudiant(e)s qui, en plus davoir
particip mes premiers pas en tant quenseignant, mont permis, par leurs ractions et leurs
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commentaires, de faire avancer mes rflexions thoriques et empiriques. Cest aussi grce
eux que jai toujours eu lesprit ce souci de produire une recherche qui puisse leur tre
communique et de prserver les liens entre la recherche et lenseignement. Que soient
galement remercis les enseignants rencontrs tout au long de mon cursus qui ont su me
donner le got et lenvie de dcouvrir la GRH. Une pense toute particulire pour ric
de Baets, directeur des ressources humaines (DRH), qui venait nous faire part de son mtier-
passion le samedi matin. Moi, lancien lycen aux rsultats modestes, pense dcidment que
limportant reste de trouver sa voie. Nul doute que ceux-ci my ont aid. Merci aussi tous les
membres de lIAE de Lille, doctorants, enseignants-chercheurs et personnel qui mont
soutenu, directement ou indirectement, lors de mes premiers pas dans le monde de la
recherche. Jai eu plaisir changer avec eux diverses occasions, particulirement
Dominique Besson, Didier Cazal, Anne Dietrich, Xavier Lecocq, Christel Louart, Philippe
Pailot et Frdric Sauvage. Ayant t leur tudiant peu de temps avant le dmarrage de cette
thse, jai vivement apprci quils prennent le temps de me conseiller. Merci aussi aux
chercheurs et consultants, spcialistes de la formation et de son valuation, avec lesquels jai
pu changer, par courriel ou en face--face. En particulier, merci Alain Meignant pour son
accessibilit. Son humilit force ladmiration et ses crits ont toujours t pour moi de
vritables rfrences.
Un grand merci aux acteurs de terrain qui ont collabor cette recherche de faon active. Leur
patience et leur collaboration mont permis de mener bien chacune des tudes de cas.
Jespre sincrement que ce travail leur aura apport, a minima, un regard extrieur utile.
Un grand merci galement mes frres, belles-surs et amis qui se sont rgulirement
informs de ltat davancement de cette thse. Une pense mue galement pour Ccile, ma
grand-mre maternelle. Merci aussi Nicola Sirkis et ses compagnons qui, sans le savoir, ont
accompagn en musique la rdaction dune partie importante des pages qui vont suivre.
Enfin, last but not least, merci ma femme, Dorothe, mon fils, Quentin, et mes parents
pour leur soutien aussi ncessaire que constant tout au long de ces annes. Ils ont su me faire
lever de temps autre le nez du guidon , pour me permettre de passer un temps prcieux
(et toujours trop rare) leurs cts, sans jamais oublier de me rappeler mes obligations de
thsard. Cet ouvrage leur est tout simplement ddi.
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SOMMAIRE DU TOME I
INTRODUCTION GNRALE............................................................................................. 11
1 La formation comme objet de recherche : dfinitions et dlimitation........................... 12
2 Performance et formation : prolongement et innovation dans lapproche................... 15
3 Architecture gnrale de la recherche............................................................................ 17
PARTIE I. LES ENJEUX DE LA FORMATION DU PERSONNEL ................................. 21
CHAPITRE I. LES ENJEUX JURIDIQUES ET INSTITUTIONNELS............................. 23
1 Historique et construction de la formation professionnelle continue........................... 24
2 Le rle prpondrant des acteurs institutionnels ........................................................... 32
3 Les dispositifs de formation prvus par la loi................................................................. 58
CHAPITRE II. LES ENJEUX CONOMIQUES................................................................. 95
1 Entre 1970 et 1980 : lmergence ................................................................................... 95
2 Les annes 1980 : le dveloppement............................................................................... 96
3 De 1990 2001 : le ralentissement ................................................................................. 96
4 Aprs 2001 ..................................................................................................................... 100
CHAPITRE III. LES ENJEUX ORGANISATIONNELS .................................................. 105
1 Les apports de la formation pour lorganisation ......................................................... 105
2 Dfis prsents et venir de la formation en organisation ........................................... 112
CHAPITRE IV. LES ENJEUX INDIVIDUELS ................................................................. 145
1 Formation, salaire et carrire : quels liens ? ............................................................... 145
2 Motivations aller se former et dterminants de laccs la formation.................... 153
CHAPITRE V. LES ENJEUX SOCITAUX ......................................................................171
1 Formation et volution socitale................................................................................... 171
2 Formation, employabilit et march du travail ............................................................ 172
3 Formation et dfi dmographique ................................................................................ 176
4 Formation initiale et formation continue..................................................................... 177
5 Formation et changements technologiques.................................................................. 180
6 Formation et mondialisation......................................................................................... 181
CONCLUSION DE LA PARTIE I ....................................................................................... 185
SYNTHSE DE LA PARTIE I............................................................................................. 186
PARTIE II. FORMATION ET PERFORMANCE.............................................................. 187
CHAPITRE I. LIER GRH ET PERFORMANCE............................................................... 189
1 GRH et stratgie ............................................................................................................ 189
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2 GRH et performance de la firme .................................................................................. 199
3 Quels enseignements pour une GRH mesure ?.......................................................... 215
CHAPITRE II. APPROCHES THORIQUES DE LA FORMATION ET CONCEPT DINVESTISSEMENT-FORMATION ............................................................................... 227
1 Deux thories sur le lien formation-performance .................................................. 227
2 Le concept de formation-investissement ................................................................. 249
CHAPITRE III. LES MODLES DVALUATION DE LA FORMAT ION ................... 261
1 La modlisation de lvaluation de la formation : un dfi de longue date ................. 262
2 Les niveaux dvaluation de la formation .................................................................... 305
CHAPITRE IV. TAT DES LIEUX DES PRATIQUES DVALUATION..................... 479
1 Les pratiques dvaluation des formations dans les entreprises.................................. 479
2 Pourquoi ne pas valuer la formation ? ....................................................................... 488
3 Pourquoi valuer la formation ?................................................................................... 499
CHAPITRE V. PROBLMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE..................... 509
1 Des pratiques de formation au systme de formation : un autre angle danalyse...... 509
2 Pertinence du projet de recherche ................................................................................ 510
3 Formulation de la problmatique et des questions de recherche ................................ 512
4 Finalits de la recherche............................................................................................... 513
CONCLUSION DE LA PARTIE II...................................................................................... 515
SYNTHSE DE LA PARTIE II ........................................................................................... 516
PARTIE III. CADRE THORIQUE ................................................................................... 517
1 Le systme de formation................................................................................................ 518
2 La politique de formation.............................................................................................. 522
3 Les pratiques de formation............................................................................................ 537
4 Les rsultats du systme de formation.......................................................................... 549
5 Les facteurs de contingence .......................................................................................... 560
6 Lvaluation de la performance du systme de formation........................................... 577
CONCLUSION DE LA PARTIE III .................................................................................... 581
SYNTHSE DE LA PARTIE III ......................................................................................... 582
RFRENCES BIBLIOGRAPHIQUES............................................................................. 583
TABLE DES ILLUSTRATIONS DU TOME I .................................................................... 633
TABLE DES MATIRES DU TOME I............................................................................... 635
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Introduction gnrale
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INTRODUCTION GNRALE
Au cours des dernires dcennies, la formation professionnelle sest considrablement
dveloppe en France, aide notamment par le cadre lgal qui, depuis la loi de 1971, incite les
entreprises former toujours plus leur personnel. Ce contexte, en apparence idyllique, nest
toutefois pas exempt de critiques dont deux nous semblent plus particulirement marques.
Dun ct, laccumulation des lois et des dcrets, au fil des rformes, tend rendre le systme
de la formation professionnelle continue (FPC) illisible et incomprhensible pour les
praticiens, au risque de les carter des vraies questions de formation. En effet, embourbs
dans cet imbroglio administratif, juridique, financier et fiscal, leur esprit nest pas tant au
management de la formation qu sa seule administration. Le gestionnaire est ainsi bien
souvent cantonn un rle de comptable de la formation, limitant par la mme occasion la
porte de celle-ci comme levier stratgique du dveloppement ou du changement dans
lentreprise. De lautre ct, lobligation lgale de participation au financement de la
formation professionnelle et la multiplication des dispositifs2 ont comme consquence un
accroissement continu des dpenses de formation. La formation aurait ainsi cot en France
en 2005 la bagatelle de 23 milliards deuros, soit 1,4 % du produit intrieur brut (PIB), mais
sans impact avr (Cahuc et Zylberberg, 2006, p. 4). Ce volume de dpenses, conjugu
un contexte conomique difficile, met sous pression les acteurs de la formation qui doivent
montrer que les sommes considrables investies (ou dpenses ?) en formation sont
rellement profitables aux individus comme aux organisations. En ce qui concerne les
entreprises en particulier, le montant des budgets formation (reprsentant parfois plus du
double de lobligation lgale) pose question aux directions gnrales qui attendent la
dmonstration effective dun hypothtique retour sur investissement de la formation3. Il est
vrai que les acteurs de la formation, grands coups de discours incantatoire, ont us et abus
du qualificatif d investissement pour caractriser la formation, convaincus de lutilit
vidente de celle-ci. Mais la mthode Cou ne suffit plus et cette question du retour sur
investissement attend une rponse dautant plus justifie dans un contexte conomique qui
2 Qui, en pratique, ne se substituent pas toujours au plan de formation et viennent donc le complter. 3 Pour reprendre la double interrogation de Meignant (2003, p. 14) : Qui, parmi les DRH, ne sest pas dit que le niveau du budget formation ne pourrait pas indfiniment tre justifi auprs du comit de direction par un discours gnral sur linvestissement formation qui ne soit pas accompagn de la dmonstration de rsultats effectifs ? ; Qui na pas regrett que les arbitrages financiers en termes daffectation de ressources la formation sappuient aussi peu sur des donnes objectives dvaluation des rsultats atteints dans le pass et de pronostic de rsultats pour lavenir, ou sur des scnarios permettant de choisir le meilleur rapport cot/avantages entre des solutions alternatives ?
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Introduction gnrale
12
instaure le doute quant la valeur ajoute de la fonction formation, au risque quelle en fasse
directement les frais4. Ces lments contextuels justifient ainsi dautant plus que lon
questionne lefficacit de la formation et que lon donne aux gestionnaires les moyens
dafficher les rsultats de la formation, sans les confondre avec les tableaux statistiques
comptabilisant les heures/lves ou les semaines/stagiaires, les pourcentages de masse
salariale, ou de taux de consommation des heures de DIF (Meignant, 2006, p. 14).
Cette recherche doctorale en sciences de gestion est ainsi partie de considrations thoriques
et pratiques. Elle sinscrit tout dabord dans la ligne des recherches portant sur lvaluation
de la formation tout en proposant un angle danalyse diffrent : celui du systme de
formation. Par ailleurs, elle cherche apporter des rponses aux praticiens ayant besoin dun
cadre danalyse solide pour valuer et amliorer en continu leurs pratiques de formation. De
ce fait, notre objet de recherche est la formation ou, plus prcisment, le systme de
formation, sa performance et les dterminants de celle-ci. Afin de situer le contexte de cette
thse et ses enjeux, cette introduction aura pour objectifs de prsenter la formation en tant
quobjet dune recherche en sciences de gestion, dexpliquer en quoi il est ncessaire de
poursuivre les recherches sur la question de son valuation au travers dune approche
alternative et, enfin, de prsenter brivement larchitecture gnrale de la thse.
1 La formation comme objet de recherche : dfinitions et dlimitation
Cette recherche porte sur la formation, qui nest que lun des leviers dacquisition des
comptences5. Notre recherche se situant dans le champ des sciences de gestion, nous
tudierons prcisment la dimension organisationnelle de la FPC, savoir la formation du
personnel en entreprise. Il convient donc en introduction de cette thse de la dfinir afin den
dlimiter les contours.
4 Dabord limite la gestion administrative, lexternalisation de la formation a pris ces dernires annes une place importance dans certaines entreprises, entranant parfois la suppression pure et simple du poste de responsable formation, souvent pour des raisons purement conomiques. Bien souvent, ce dernier stait cantonn ce rle dadministrateur de la formation, nayant pas pris soin de dmontrer la valeur ajoute dune fonction formation en interne. 5 Il existe dautres occasions dapprendre, parfois plus efficaces dans certains cas, que la formation (et parfois coupls la formation). Lexprience professionnelle a, par exemple, un rle majeur jouer, au point que Vincens (2001) pense quil est le plus souvent difficile de sparer ce qui est d lexprience stricto sensu et la formation informelle ou plus organise mais ponctuelle qui est surtout donne dans lentreprise (p. 6). Pour lauteur, la formation peut toutefois favoriser la diffusion plus rapide et plus large de certaines comptences en se substituant lexprience.
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Introduction gnrale
13
De longue date, diffrents auteurs se sont essays dfinir la formation en milieu de travail.
Pour Sonntag (1994, p. 2), elle dsigne un moment ddi lacquisition de comptences,
souvent sous la forme de stages. Cette dfinition se concentre donc sur laction de formation
formalise. Hamblin (1974) propose une dfinition largie en considrant toute activit qui
tente dlibrment damliorer la comptence dune personne dans un travail 6 (p. 6,
traduction libre), tout comme Hesseling (1971) pour qui la formation est une squence
dexpriences ou dopportunits structures pour modifier le comportement en vue datteindre
un objectif donn 7 (p. 93, traduction libre). Cest galement lorientation prise par Candau
(1985) qui la dfinit comme tant toute activit qui essaye, dlibrment, damliorer ou de
complter les connaissances, aptitudes ou attitudes dune personne dans son travail
(p. 228) ; une activit devant permettre d atteindre un objectif de productivit et defficacit,
grce une main-duvre adapte, tout en sefforant de combler ses aspirations (p. 229).
Lauteur ne manque ainsi pas de rappeler les finalits de la formation du point de vue de
lorganisation. Dans une autre perspective, pour Savall et Zardet (1995, p. 495) la formation
du personnel correspond lensemble des comptences acquises par celui-ci, tant dans le
cadre de la formation initiale, de la formation continue que de leur exprience professionnelle
(crant un savoir structur, des mthodes et techniques de travail). Ces auteurs insistent donc
sur lobjet de la formation (le dveloppement des comptences) et sur le fait que la formation
dbute avant lactivit professionnelle (par la formation initiale) et que lexprience
professionnelle est elle-mme formatrice. En guise dessai de synthse, nous pouvons
reprendre la dfinition propose par Larouche (2006) qui, se rfrant plusieurs auteurs
(Marsick et Watkins, 1992 ; Munger, 1983 ; Swanson, 1995), dfinit la formation en milieu de
travail comme Un ensemble dactivits gnralement de courte dure, destines
lacquisition et lamlioration des connaissances techniques et pratiques ncessaires
lexercice dune fonction ou dun emploi et visant rendre lemploy plus apte effectuer son
travail au sein dune organisation (p. 20). La plupart de ces dfinitions soulignent aussi le
fait quil nexiste pas une forme unique de formation8, notamment selon son degr de
formalisation et dencadrement9 (Blaug, 1976, cit par Vincens, 2001, p. 2 ; Carr, 2004a,
6 any activity which deliberately attempts to improve a persons skill in a job (Hamblin, 1974, p. 6). 7 a sequence of experiences or opportunities designed to modify behavior in order to attain a stated objective (Hesseling, 1971, p. 93). 8 noter que les chercheurs amricains distinguent le terme training qui dsigne des actions de formation menes dans un but prcis, du terme development qui correspond aux actions de formations plus gnrales visant le long terme. 9 Les modes de formation se sont fortement diversifis au cours des dernires annes : au-del du classique stage se dveloppent les dispositifs de formation ligne, distance, de tutorat, de coaching ainsi que lavnement dun nouveau paradigme de la formation matrialis par le social learning.
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Introduction gnrale
14
p. 32 ; Larouche, 2006, p. 21 ; Meyer-Dohm, 1988, p. 194). Loccasion nous est donne ici de
prciser lune des caractristiques de la recherche : celle-ci sintressera la formation dans
sa globalit, quelle que soit la nature des actions engages, et non pas lune de ses modalits
en particulier.
La formation en milieu de travail ayant t dfinie, il convient de sinterroger sur la nature des
travaux de recherche dont elle fait lobjet. Il apparat que la recherche en formation est en
volution permanente : elle est dsormais interdisciplinaire10 (Jennings, 1994 ; Wright et
McMahan, 1992), forte de nombreux apports thoriques, empiriques et mthodologiques
(Caspar, 1997 ; Ferris et Judge, 1991 ; Salas et Cannon-Bowers, 2001). Aussi, cette
multidisciplinarit de lobjet de recherche ne doit pas nous amener prtendre traiter la
question de la formation au travers de lensemble des disciplines sy intressant. Comme nous
lavons dj prcis, nous inscrivons notre recherche dans les sciences de gestion, donc
ltude de la formation en tant quobjet de gestion dans une perspective organisationnelle. En
lien avec cette orientation gestionnaire, nous avons souhait tudier la formation au travers
du concept de performance qui est central dans les disciplines de gestion. En nous focalisant
sur la question de la performance de la formation en milieu organisationnel, nous nous
plaons dlibrment au sein des sciences de gestion et dlimitons ainsi les frontires de notre
recherche, tout en nous consacrant logiquement notre domaine de comptences. Cette
orientation rsolument gestionnaire ne doit toutefois pas nous empcher de mobiliser les
apports thoriques des autres disciplines11, mme partiellement. Cela participe en effet de la
formation du chercheur (qui est lun des objectifs premiers du travail de thse) que
dapprendre des autres disciplines, ce qui est aussi lessence mme de la gestion12.
Lobjectif de cette recherche ne sera donc pas tant de sinterroger sur le comment les salaris
apprennent ?13 que sur le comment la formation devient performante dans lorganisation ?
Nous allons voir quen la matire de nombreux travaux existent et quil peut tre intressant
de les prolonger en adoptant une approche originale.
10 La formation fait en effet lobjet de recherches en sciences de lducation, en conomie, en gestion, en psychologie, en sociologie, en droit, etc. 11 Nous verrons notamment que lidentification des dterminants de lefficacit des actions de formation est majoritairement issue de travaux en psychologie pour ceux ayant trait lindividu (avec des concepts comme la motivation se former, la motivation transfrer, le sentiment defficacit personnelle, etc.), de travaux en sciences de lducation (et en andragogie en particulier) pour ceux ayant trait la formation, etc. 12 Sans quoi la gestion pourrait tre considre, tort, comme tant une forme de micro-conomie applique. 13 Davantage lobjet des sciences de lducation.
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Introduction gnrale
15
2 Performance et formation : prolongement et innovation dans lapproche
Nous avons donc dcid daborder la formation en tant quobjet de recherche sous langle de
la performance et donc par la problmatique de son valuation. Ce choix nest pas neutre, tant
il est vrai que lvaluation de la GRH14 et le lien entre les actions de GRH et la performance
de lentreprise sont des proccupations rcentes auprs des chercheurs comme des praticiens.
Elles occupent en effet une place de choix dans la littrature scientifique et professionnelle, et
ce, de manire croissante, notamment en Amrique du Nord. En France, les questions
dvaluation des pratiques de GRH sont plus rcentes, lAssociation francophone de gestion
des ressources humaines (AGRH) en avait dailleurs fait le thme de son congrs annuel en
200415. Quels sont alors les enjeux de ce champ de recherche ?
Les enjeux de lvaluation en GRH partent dun double constat thorique et pratique. Sur le
plan thorique, nous pouvons reprendre les propos de Le Louarn et Wils (2001) qui rsument
bien le premier constat : Sans nier la complexit du concept de performance en matire de
gestion des ressources humaines, il nous semble que certains cadres suprieurs savent mieux
sy prendre que dautres pour aligner la gestion des ressources humaines sur le succs des
organisations. Dans la mme veine, il savre que certains gestionnaires hirarchiques sont
meilleurs que dautres pour mobiliser les nergies de leurs employs sur les objectifs
organisationnels et que certains professionnels en ressources humaines sont plus sensibles que
dautres pour soutenir les efforts de ces cadres. Reconnatre cette diffrence constitue un
premier pas vers une dmarche valuative en gestion des ressources humaines (p. 11).
Lvaluation de la GRH semble donc thoriquement possible et justifie, mais est-elle pour
autant une ralit sur le terrain ? Le Louarn (1995) est assez sceptique sur ce point et
sinterroge : Doit-on prendre la gestion des ressources humaines au srieux ? (p. 10).
Lauteur, voquant le rle et les activits du DRH, cite ainsi au tableau des actes manqus le
fait de dpenser en formation sans mesurer limpact sur la productivit du personnel form
(Le Louarn, 1995, p. 10) et propose de passer de lincantation la mesure16. Cela signifierait-
il que la formation ne fait pas exception en matire dvaluation ?
14 Prcisment, lvaluation des politiques et des pratiques de GRH. 15 La GRH mesure ! 16 Comme le soulignent Le Louarn et Wils (2001) : Apprendre mieux compter aidera peut-tre les DRH encore plus compter dans leur entreprise ! (quatrime de couverture).
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Introduction gnrale
16
Plusieurs auteurs abondent en ce sens. Rafinon (1988), par exemple, rapporte lanecdote
dune journaliste ayant questionn ainsi un responsable formation : Pouvez-vous dire
combien rapporte un franc de formation dans votre entreprise ? (p. 99). En actualisant la
devise montaire, en passant des francs aux euros, il savre que ce type de question soit
encore dactualit et que les rponses continuent de manquer. Meignant (2006) aussi
sinterroge : 100 000 personnes temps plein pour quel rsultat ? (p. 12). Lauteur
explique en effet quau moment de la rdaction de son ouvrage 3 570 000 salaris des
entreprises ont suivi des formations reprsentant au total 162 millions dheures de formation,
soit environ 100 000 personnes en formation temps plein (en arrondissant 1 620 heures le
temps de travail annuel par personne pour faciliter le calcul). Ces sommes et ce temps ont-ils
t bien utiliss ? Bien manags ? Cette grosse entreprise de 100 000 personnes est-elle aussi
productive quelle le devrait ? (Meignant, 2006, p. 13). Sur le terrain, les pratiques
dvaluation des formations dans les entreprises peinent pourtant se dvelopper, alors que la
littrature de recherche cumule plus de cinquante annes de publications de travaux, posant au
passage la question du transfert des savoirs par la communaut scientifique et celle de leur
appropriation par les praticiens. Mais est-ce la seule raison possible ?
Une partie de lexplication rside peut-tre dans les caractristiques des recherches en
valuation de la formation, dont les principales ont t mises en exergue par Bouteiller et
Cossette (2006, p. 2) :
- le champ du discours prescriptif est bien dvelopp, alors que le champ de recherche
empirique lest ingalement ;
- la recherche en psychologie dtient un monopole quasi-absolu sur le sujet ;
- il sagit dune tradition de recherche presque exclusivement nord-amricaine :
nombreuses sont les recherches outre-Atlantique alors quelles se font plus rares en
France ;
- on sest plus intress au transfert qu la mesure des impacts et plus aux impacts
organisationnels quaux impacts individuels ;
- lvaluation de la formation revt des enjeux sociaux, conomiques et organisationnels
majeurs alors que le sujet demeure quelque peu tabou.
Ainsi, en se basant sur les propos de ces auteurs, nous pouvons identifier quelques axes de
progrs des recherches en valuation de la formation qui seraient, a minima, les suivants :
ces recherches devraient a) tre plus ancres sur le terrain en accordant une large place aux
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Introduction gnrale
17
prconisations managriales, en rponse une demande sociale, b) se focaliser sur les
questions dvaluation de la performance de la formation dans une perspective gestionnaire et
c) intgrer la pluralit des rsultats possibles de la formation, sans se focaliser sur un niveau
dvaluation en particulier (ex. le transfert) et en apprhendant mieux les diffrents niveaux
danalyse (ex. individus et organisations). Cest ainsi que, dans le prolongement des travaux
existants qui ont principalement consist dvelopper des modles dvaluation centrs sur
les actions de formation et proposant gnralement des critres dvaluation pr-tablis, nous
avons souhait construire un modle dvaluation centr sur les systmes de formation,
ceci afin de pouvoir valuer leur performance et didentifier les dterminants de celle-ci. Afin
dexpliquer notre dmarche, nous allons prsenter ci-aprs comment nous avons structur
notre recherche en rponse cette problmatique.
3 Architecture gnrale de la recherche
Nous avons souhait structurer la prsentation de cette thse en cinq parties, depuis les
enjeux gnraux de notre objet de recherche jusqu la prsentation et la discussion des
rsultats issus de nos investigations empiriques. Ci-dessous sont prsentes succinctement
chacune des parties composant cette recherche doctorale.
La partie I consistera principalement en un expos des enjeux de la formation, permettant de
situer celle-ci comme objet dune recherche en sciences de gestion. Ainsi, cinq chapitres
prsenteront successivement les enjeux juridiques et institutionnels de la formation (chapitre
I), ses enjeux conomiques (chapitre II), ses enjeux organisationnels (chapitre III), ses enjeux
individuels (chapitre IV) et, enfin, ses enjeux socitaux (chapitre V). Cette partie permet de
mieux cerner cet objet de recherche quest la formation, den prciser les enjeux de diffrentes
natures et de le dlimiter dans une perspective gestionnaire. Cest un pralable qui nous a paru
indispensable avant den questionner la performance et donc son valuation. Nous verrons
que cet objet nest pas neutre, notamment de par le cadre lgal franais qui contribue en
modeler les pratiques, de par son poids conomique croissant (questionnant dautant son
efficacit) et des attentes de ses diffrentes parties prenantes (principalement les individus, les
organisations et la socit).
La partie II sera consacre une revue de littrature de travaux thoriques et empiriques en
valuation de la GRH et, plus particulirement, en valuation de la formation. Tout dabord,
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Introduction gnrale
18
nous prsenterons les thories fondatrices ayant questionn les liens entre formation et
performance organisationnelle (chapitre I), en particulier la thorie du capital humain et la
thorie des ressources stratgiques, tout en nous intressant aux approches thoriques
existantes en valuation de la GRH. Ces fondements thoriques seront discuts, critiqus et
mis en perspective par rapport notre objet de recherche. Nous proposerons ensuite une
analyse critique du concept de formation-investissement (chapitre II) : sil est frquent
daccoler les termes investissement et formation , il importe de vrifier si, dans la
pratique, la formation est rellement gre et comptabilise comme un investissement. Nous
passerons ensuite en revue les modles dvaluation de la formation existants, leurs
orientations, leurs biais et leurs limites (chapitre III). Nous verrons que, riches
denseignements, ceux-ci sont principalement focaliss sur les actions de formation, le niveau
du systme de formation dans son ensemble tant gnralement pass sous silence. Par
ailleurs, lanalyse des pratiques dvaluation de la formation dans les entreprises nous fera
constater quelles peinent se dvelopper, malgr labondante littrature existante (chapitre
IV). Ces deux constats nous amneront formuler une problmatique de recherche (Comment
valuer la performance dun systme de formation ?) et les questions de recherche en
dcoulant (Quelle est la performance dun systme de formation ? Quels sont les dterminants
de la performance dun systme de formation ?) (chapitre V). Les rponses ces deux
questions de recherche convergeront vers un seul et mme objectif : le dveloppement dun
modle thorique dvaluation des systmes de formation (construction du modle) et sa
confrontation, mme partielle, au terrain (test de la mthode dvaluation associe au
modle). En traitant ces questions de recherche, nous souhaitons que notre travail doctoral
rponde diffrentes finalits qui seront galement tayes. La pertinence du projet de
recherche sera galement discute.
La partie III sera exclusivement consacre llaboration du cadre thorique et conceptuel
de notre recherche. Celui-ci consistera en la construction dun idal-type wbrien du systme
de formation dont les diffrentes composantes (facteurs de contingence, politique, pratiques,
rsultats) seront exposes et prcises. Chacune delles sera discute et mise en perspective
afin dvaluer son pouvoir explicatif intrinsque et sa place dans le systme. Globalement, il
sagira de peser le potentiel thorique explicatif de notre modle en rponse notre
problmatique de recherche. Notons que si la revue de littrature dveloppe au chapitre III de
la partie II a permis de disposer dun nombre suffisant dlments pour mener une rflexion
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Introduction gnrale
19
thorique profonde ayant permis laboutissement de ce modle, celui-ci a t ajust et
peaufin ds nos premires investigations empiriques.
La partie IV traitera des dimensions pistmologiques et mthodologiques de la thse. Dans
un premier temps, nous prciserons et expliciterons notre positionnement pistmologique, en
loccurrence celui de type interprtativiste (chapitre I). Puis, dans un second temps, nous
dtaillerons lensemble du dispositif mthodologique qui nous a permis de mener bien la
phase empirique de notre recherche (chapitre II). En particulier, nous justifierons le choix
dune mthode de recherche de nature qualitative (mthode des cas) qui nous a paru
pertinente en vue danalyser en profondeur chaque systme de formation tudi. La richesse
des donnes collecte sera mise en exergue, notamment de par la multiplicit des sources
dinformations mobilises. Nos mthodes danalyse des donnes et de prsentation des
rsultats seront galement prcises. Enfin, le design densemble de notre recherche sera
valu en fonction des critres rgulirement mobiliss dans ce type de recherche
(ex. validits et fiabilit) (chapitre III).
La partie V prsentera les rsultats de notre recherche. Aprs avoir expos quels taient les
particularits de nos terrains de recherche (les petites et les moyennes entreprises/industries
[PME/PMI]) en matire de formation et, prcisment, dvaluation de la formation
(chapitre I), nous analyserons les trois cas que nous avons tudis (chapitre II). Cette partie
empirique se voudra intensive et galement comparative. En effet, chaque systme de
formation sera dabord prsent de manire apporter aux lecteurs les cls ncessaires la
comprhension des analyses subsquentes. Les trois systmes de formation seront ensuite
confronts entre eux avec comme rfrentiel commun notre idal-type wbrien du systme
de formation. Enfin, les rsultats qui mergeront de ces analyses seront mis en lien avec les
rsultats de travaux antrieurs, ceci afin didentifier les convergences et divergences
potentielles. Ils mettront notamment en exergue la ncessaire complmentarit des diffrents
niveaux de modles dvaluation (ceux focaliss sur les actions de formation et ceux axs sur
les systmes de formation). La gnralisation de ces rsultats sera aussi discute
ultrieurement lors de la conclusion gnrale de cette recherche.
Le schma propos la page suivante synthtise larchitecture gnrale de la recherche,
depuis la prsentation des enjeux de la formation jusquau bilan des rsultats en vue dune
validation de notre modle dvaluation des systmes de formation.
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Introduction gnrale
20
Schma 1. Structure et dmarche gnrale de la recherche
Des questionnements thoriques
Des questionnements pratiques
Problmatique de recherche Comment valuer la performance dun systme de formation ?
Partie I : Les enjeux de la formation du personnel Quest-ce que la formation du personnel en entreprise ? Quels en sont les principaux enjeux ?
Partie II : Formation et performance Peut-on valuer lefficacit des pratiques de GRH ? Peut-on valuer lefficacit de la formation ? Suite cette revue de littrature, quelle problmatique et quelles questions de recherche formuler ?
Partie III : Cadre thorique Quelle modlisation thorique du systme de formation ? Quels rsultats possibles du systme de formation ?
Partie IV : Mthode de recherche Comment tudier la performance des systmes de formation et les dterminants de cette performance ?
Partie V : tudes empiriques Quelles sont les caractristiques des systmes de formation tudis ? Quels enseignements tirer de chaque tude de cas ? Que nous apprend la dmarche comparative (dterminants convergents et divergents entre les cas et par rapport aux rsultats de la littrature) ?
Conclusion gnrale et synthse des rsultats
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Partie I
21
PARTIE I. LES ENJEUX DE LA FORMATION DU
PERSONNEL
En premire partie de cette recherche, il nous a sembl vident de rappeler en quoi la
formation est un objet de recherche intressant en sciences de gestion de par la multiplicit de
ses enjeux. Cette partie vise donc prsenter les grands enjeux de la formation du personnel,
quune revue de littrature nous a permis de classer en cinq catgories. Cinq chapitres se
succderont pour prsenter le dtail de chaque catgorie denjeux :
- Chapitre I : dans un premier temps, nous prsenterons les enjeux juridiques et
institutionnels de la formation. Nous verrons que le cadre lgal franais est trs
prgnant et tend influencer fortement les pratiques de formation des entreprises. Ses
limites seront galement discutes au regard de notre objet de recherche.
- Chapitre II : ce second chapitre portera sur les enjeux conomiques de la formation.
La formation reprsente en France des montants financiers consquents, rpartis entre
les acteurs publics et privs, qui justifient dautant de sintresser la problmatique
de son valuation.
- Chapitre III : seront ici dbattus les enjeux organisationnels de la formation. Notre
recherche sinscrivant dans le champ des sciences de gestion, il nous a sembl
essentiel de questionner les dfis de la formation du personnel en contexte
organisationnel.
- Chapitre IV : les enjeux organisationnels prsents au chapitre prcdent sont
indissociables des enjeux individuels de la formation. En effet, le cadre lgal franais
de la FPC est focalis sur lindividu, ayant pour objectif de favoriser laccs de tous
les salaris la formation pour dvelopper leur employabilit. Ce chapitre montrera
que cet objectif est encore loin dtre atteint.
- Chapitre V : enfin, parce que les apports de la formation ne sont pas exclusivement
centrs sur les individus et les organisations, nous nous intresserons aux enjeux
socitaux de la formation : en quoi la formation peut tre une rponse, mme partielle,
aux dfis poss la socit ? La construction dune socit de la connaissance est-elle
une ralit ?
Pour des raisons de clart, ces enjeux seront donc exposs distinctement, chapitre par
chapitre, sans occulter bien videmment leur caractre interactif.
-
Partie I Chapitre I
23
CHAPITRE I. LES ENJEUX JURIDIQUES ET
INSTITUTIONNELS
La formation professionnelle en France est le fruit dune construction progressive qui
comprend deux ensembles : la formation professionnelle initiale et la FPC. La loi du 4 mai
2004 exige de la FPC quelle favorise linsertion ou la rinsertion professionnelle des salaris,
permette leur maintien dans lemploi, favorise le dveloppement de leurs comptences,
favorise laccs aux diffrents niveaux de la qualification professionnelle et contribue au
dveloppement conomique et culturel ainsi qu leur promotion sociale17. Le fait dassurer
une formation professionnelle tout au long de la vie constitue une obligation nationale aux
yeux de la loi18. Ainsi, Le droit structure profondment lunivers de la formation
professionnelle. Les dcideurs de toute nature et tous les niveaux, les gestionnaires, les
dispensateurs, les formateurs et les bnficiaires inscrivent leurs dcisions et leurs dmarches
dans un corps de rgles qui simposent eux []. Laffirmation du droit lducation
permanente pour tous est trop gnrale pour servir de socle des obligations juridiquement
sanctionnables. Des objectifs plus prcis doivent tre fixs : le droit la qualification
professionnelle et sociale, le droit ladaptation face la rapidit des changements, le droit
linsertion et la reconversion (Luttringer, 1999, cit par Louart, n.d., p. 9-10). Le cadre
juridique contribue donc structurer la formation. Il la contraint, sans toutefois sassigner des
objectifs prcis dont la non-atteinte serait juridiquement sanctionnable. Une comprhension
fine du cadre juridique de la FPC est donc ncessaire afin de mieux saisir le sens des pratiques
sur le terrain, de par ce ct structurant et contraignant de la loi. Ce chapitre prsentera donc
une analyse de lvolution historique de la FPC en France, les acteurs institutionnels qui
laniment ainsi que les dispositifs prvus par la loi19. Nous questionnerons aussi la pertinence
de ces derniers partir des rsultats de diffrentes tudes.
17 Permettant aux salaris daccder la culture, de maintenir ou de parfaire leur qualification ou leur niveau culturel ainsi que dassumer des responsabilits accrues dans la vie associative (Parmentier, 2008, p. 123). 18 Le livre IX du code du travail oriente la FPC des salaris et des demandeurs demploi. 19 Ce chapitre prsente les principaux lments juridiques et institutionnels structurant la FPC, tels que nous les avons identifis lheure o nous rdigeons ces lignes. Lactualit sociale tant particulirement mouvante, notamment sur ce thme, il ne serait pas tonnant que certains de ces lments soient dj obsoltes quand le lecteur consultera cette thse. Que celui-ci veuille bien nous en excuser si tel est le cas. Il ne sagit pas dune thse en droit du travail, mais bien dune thse en sciences de gestion : notre objectif est donc de montrer comment la lgislation influence les pratiques de formation des entreprises.
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Partie I Chapitre I
24
1 Historique et construction de la formation professionnelle continue
Pour comprendre lancrage contextuel de la FPC dans les entreprises franaises, nous allons
retracer un rapide historique de sa construction et mettre en exergue quelques dates phares.
La construction de la FPC est une histoire tant ancienne que longue, faite davances et de
reculs. Ses fondements datent de la rvolution industrielle qui a contribu la modernisation
des modes traditionnels de formation, notamment par lmergence de lapprentissage dans le
cadre des corporations. la fin du XIX e sicle, les ouvriers et les paysans nont droit aucune
formation, initiale (scolarisation) comme continue. Cette situation ne durera pas ternellement
car, la fin de la premire guerre mondiale, une lgislation relative la formation initiale
sinstaure progressivement, puis, dans les annes 1960, la formation continue se voit
rglemente et fait lobjet dune diffusion effective. Sur la base dun ouvrage dArdouin
(2003), Parmentier (2008, p. 79-82) rappelle les quatre grandes priodes cls de lhistoire de
lvolution de la FPC20. Nous les avons synthtises dans le tableau ci-dessous.
Tableau 1. Les quatre grandes priodes cls de lhistoire de lvolution de la FPC
Priodes Faits saillants
1re priode :
de 1971
1975
Mise en uvre de la loi du 16 juillet 1971 instituant le cadre rglementaire et les modalits de
financement de la formation professionnelle dans lentreprise.
La formation devient un droit pour le salari.
La formation est surtout perue comme une charge visant ladaptation du salari son poste de
travail.
Organisation encore trs taylorienne, on ne parle pas encore dingnierie de formation ni de capital
humain.
2e priode :
de 1976
1982
Dveloppement de loffre de formations (catalogues) qui structure fortement la demande.
Chmage de masse, la formation permet de rparer les dsordres du march du travail et les
dysfonctionnements mal identifis.
La formation nest pas encore considre par lentreprise comme un levier essentiel de son
dveloppement.
3e priode :
de 1983
1992
mergence forte du concept dingnierie en formation.
Changement des pratiques de gestion des entreprises.
La formation devient un investissement.
20 Voir Parmentier (2008, p. 83-99) pour un historique trs complet de lvolution de la FPC.
-
Partie I Chapitre I
25
4e priode :
partir de
1993
Introduction de lducation et de la formation dans laction communautaire et mise en uvre
dune politique de formation professionnelle europenne (trait de Maastricht).
Flexibilit accrue de lemploi.
Contenus des mtiers et des tches complexifis.
Le dveloppement de la polyvalence, de lautonomie et des qualifications accrot la demande de
formation.
La formation fait davantage partie intgrante du parcours de progression professionnelle et
personnelle du salari.
Source : daprs Parmentier (2008, p. 79-82).
La pierre angulaire du systme fut constitue par la loi du 16 juillet 197121 qui instaura, pour
lensemble des entreprises dau moins 10 salaris, lobligation de participer au financement de
la FPC. Par extension, les entreprises de moins de 10 salaris furent galement concernes ds
1992. Cette disposition fit du systme franais un cadre unique pour la FPC, incitant les
entreprises contribuer financirement toujours davantage leffort de formation de leur
personnel. Il est noter que, vingt-cinq ans aprs la France, le Qubec, en 1996, sest dot
dune loi obligeant les entreprises dont la masse salariale est suprieure 1 million de dollars
canadiens consacrer au minimum 1 % de celle-ci la formation de leur personnel22 (Tessier,
Roger et Lorrain, 1999, p. 3). La loi franaise reconnat aussi un droit la formation pour tous
les salaris concerns par laccord et leur confre le droit de sabsenter de leur travail pour
suivre une formation tout en bnficiant du maintien de leur salaire et de la gratuit de leur
formation. De plus, le cadre juridique dveloppe de nouveaux dispositifs (en faveur des
demandeurs demploi par exemple, notamment les chmeurs de longue dure),
lindividualisation de la formation, lalternance, etc. Au fil des annes et des dfis rencontrs,
la formation a t progressivement reconnue comme un moyen de dvelopper lemployabilit
(notamment pour les salaris sortis sans qualification du systme scolaire), dadapter et de
dvelopper les comptences des salaris, de favoriser linsertion et la rinsertion
professionnelle, daccompagner les salaris dans leur mobilit professionnelle, etc.
Toutefois, ds la promulgation de la loi de 1971, la conciliation des objectifs conomiques et
sociaux de la formation fait dbat et les diffrents partenaires sinterrogent : comment
satisfaire les attentes des salaris (dveloppement des comptences pour accrotre
lemployabilit et donner des possibilits de carrire) et celles de lentreprise (accrotre la
21 Les ngociations ayant suivi les grves de mai et de juin 1968 ont men la conclusion de laccord national interprofessionnel (ANI) du 9 juillet 1970 qui sera repris et complt par la loi du 6 juillet 1971. 22 Loi favorisant le dveloppement et la reconnaissance des comptences de la main-duvre, chapitre D-7.1.
-
Partie I Chapitre I
26
performance par latteinte des objectifs de production et le dveloppement de la productivit
notamment) ? Cest ainsi que plusieurs rapports et bilans successifs ont critiqu la loi et
soulign la ncessit dapporter des rformes majeures afin dadapter la formation aux
nouveaux enjeux conomiques et sociaux (de Virville, 1996 ; Gauron, 2000 ; Pry, 1999).
Tous saccordent dire que le systme est dune grande complexit, quil ne rpond pas
lenjeu de la formation tout au long de la vie et quil ne permet pas la rduction des
ingalits sociales. Ainsi, lvolution du cadre juridique est en partie la consquence dune
non-atteinte des objectifs fixs par le lgislateur : lingalit daccs la formation perdure
car ce sont toujours les salaris les plus qualifis qui bnficient le plus de la formation23. Le
taux de chmage lev a aussi incit le lgislateur dvelopper le systme de formation afin
de privilgier une adaptation permanente des comptences et une meilleure employabilit via
la formation continue, notamment pour les salaris dots dun bagage scolaire/universitaire
initial trs faible.
Suite la mise en place de diffrents groupes de travail, des axes de rforme voient le jour, la
ngociation entre les partenaires sociaux24 dbute. Au terme de celle-ci, les partenaires
sociaux ont conclu lunanimit un ANI le 20 septembre 200325 relatif laccs des salaris
la formation professionnelle tout au long de la vie. Celui-ci a pour objectif la refonte du
dispositif de formation professionnelle datant de 1971. LANI dans sa version du 5 dcembre
2003 reprend les principales dispositions de lANI du 20 septembre 200326. Cet accord a
permis de moderniser le systme de formation sur de nombreux points. Larrt du 17
dcembre 2004 publi au Journal officiel du 24 dcembre rend ainsi obligatoires pour tous
les employeurs et tous les salaris compris dans son champ dapplication, les dispositions de
lANI du 5 dcembre 2003 relatif laccs des salaris la formation tout au long de la vie
professionnelle (avec toutefois certaines exclusions et rserves) (Parmentier, 2008, p. 97).
De cet ANI dcoulera aussi la loi no 2004-391 (dite loi Fillon ) relative la formation
professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, vote par les dputs le 4 mai
2004, publie au bulletin officiel le 5 mai et entre en application le 7 mai 2004. ce stade, la
23 Voir le chapitre IV de la partie I pour plus de dtails sur les bnficiaires de la formation. 24 Reprsentants syndicaux et patronaux. 25 la suite dun processus de ngociation de plus de trois ans. Cet accord concernait 15 millions de salaris et la loi, par extension, a permis son application 4 millions de salaris en plus, non-concerns par laccord dorigine (des grandes entreprises publiques comme EDF, GDF, la SNCF, la RATP ainsi que dautres secteurs comme lagriculture, la presse crite, le secteur du spectacle et de laudiovisuel, celui de lconomie sociale, etc.). 26 LANI du 5 dcembre 2003 sinspire aussi du texte sur la ngociation collective approuv le 16 juillet 2001 par quatre confdrations syndicales (CFDT, FO, CFTC et CFE-CGC), mais pas par la CGT, qui visait clarifier les responsabilits de ltat et des partenaires sociaux en ce qui a trait aux rgles de la ngociation collective.
-
Partie I Chapitre I
27
loi ne concerne encore que les salaris du secteur priv, car modifiant le livre IX du code du
travail. Cette loi est divise en trois titres : le titre I reprend les principales dispositions de
lANI conclu en septembre 2003 alors que le titre II reprend la position commune des
partenaires sociaux conclue en juillet 2001 visant dvelopper la ngociation collective et
favoriser la dmocratie sociale en France (le titre III est relatif aux dispositions diverses). Pour
Faisandier et Soyer (2007), cette loi est ainsi la cristallisation dun long processus
dvolutions lgislatives et rglementaires (p. 12). Ces auteurs notent quelle a succd de
multiples volutions lgislatives et rglementaires : le livre blanc de lUnion europenne qui a
labor le concept de formation tout au long de la vie (1996), le rapport Pry (1999), le projet
de refondation sociale ayant lanc les ngociations sur ce thme (2000), la rsolution du
Conseil europen qui a entrin la dfinition de ce mme concept27 (27 juin 2002), la loi de
modernisation sociale, la rforme LMD luniversit (licence master doctorat) afin de se
conformer au modle europen existant, la rforme de lapprentissage, etc. Ainsi il sagissait
de reprendre dans le cadre lgislatif ce qui avait dj t dcid dun commun accord par les
partenaires sociaux et favoriser ainsi le dialogue social. Comme le remarque Parmentier
(2008), Lautonomie des partenaires sociaux lors de la ngociation a t recherche pour
construire la meilleure articulation possible entre leurs initiatives et le rle de garant de
lordre public confi au lgislateur (p. 98). lheure actuelle, les partenaires sociaux
peuvent se demander si la rforme a permis de rpondre aux trois grandes questions souleves
par le diagnostic du systme franais de la FPC : celles de lgalit daccs la formation,
de la dimension qualifiante et de la lisibilit du systme (Parmentier, 2008, p. 99). La
formation est dsormais perue comme tant un levier efficace de lutte contre le chmage, par
le dveloppement de lemployabilit, et damlioration des conditions de vie et de travail de
lensemble des salaris. Comme pour la loi de 1971, celle de 2004 stait fixe comme dfi de
trouver un compromis difficile entre les objectifs des salaris et ceux de lentreprise (Plassard
et Loukil, 2000). Elle se donnait donc pour objectif de faciliter laccs la formation pour
lensemble des salaris tout au long de leur vie professionnelle et visait donc replacer le
salari au cur du systme de formation. La rforme reprsente potentiellement une
formidable avance, aussi bien pour lamlioration de la comptitivit des entreprises que
pour le dveloppement de lemployabilit des salaris. Elle nest pas une simple volution du
systme de formation franais, mais propose une vritable rupture (Dennery, 2004, p. 15).
27 Dans le mmorandum de la Commission europenne du 30 novembre 2001, la formation professionnelle tout au long de la vie est dfinie comme correspondant toutes les activits dapprentissage menes au cours de la vie dans le but damliorer ses connaissances, ses qualifications et ses comptences, que ce soit dans une perspective personnelle, citoyenne, sociale ou en vue dun emploi.
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Partie I Chapitre I
28
Pour Ladsous (2004), cette rforme recle de multiples gisements de progrs pour le
systme de formation professionnel franais (p. 9). Pour Faisandier et Soyer (2007, p. 12),
elle fait suite un diagnostic partag par lensemble des acteurs sur la ncessit de rformer le
systme de la FPC, notamment :
- lingalit persistante daccs la formation continue, fonction de nombreuses
variables organisationnelles (ex. taille de lentreprise) et individuelles (ex. niveau de
scolarit, situation professionnelle, genre, ge) ;
- le manque de crdibilit de la formation continue en vue de lobtention dune
qualification compar ce que permet la formation initiale28 ;
- un systme de formation professionnelle franais fragment et peu lisible, manquant
de passerelles selon les statuts et moments de la vie (tudiant, salari, chmeur).
Pour ces auteurs, cette rforme tente dapporter un cadre favorable au dveloppement de la
co-initiative (on parle mme de codcision) en matire de formation et de la reconnaissance
des acquis, deux thmes rcurrents dans les nombreuses tentatives de rformes de la
formation depuis les annes 1990 (Faisandier et Soyer, 2007, p. 12).
De nombreuses critiques ont ainsi t mises lencontre de la rforme de 2004 (Dayan et
Eksl, 2007 ; Seillier et Carle, 2007), qui convergeaient parfois vers le mme constat et les
mmes solutions (ex. transfrabilit du droit individuel la formation [DIF]). Le rapport de
Cahuc et Zylberberg (2006) montre ainsi que la formation ne remplit pas son objectif de
promotion sociale du fait, notamment, des rformes rcentes qui lloigneraient encore plus
de cette finalit. Ses auteurs proposent mme de supprimer le DIF, qui visait rduire les
ingalits daccs des salaris la formation. Ils notent ainsi plusieurs limites, dont quatre se
dmarquent plus particulirement :
- lamoncellement de dispositifs mis en parallle dune multitude dacteurs aux objectifs
et interventions parfois mal dfinis et coordonns ;
- le systme priv de redistribution des financements de la FPC, dont le manque de
transparence des rgles pose des problmes de mutualisation des ressources ainsi que
dimportants carts concurrentiels. Cette opacit de la gestion des fonds par les
organismes paritaires collecteurs agrs (OPCA) est vivement critique par les
auteurs, comme ce fut le cas en 2006 par la Cour des comptes la suite dun contrle
des OPCA les plus importants : lorganisation de la collecte ne favorise gure la
28 Comme le remarquent les auteurs, Tout semble jou avant 25 ans (Faisandier et Soyer, 2007, p. 12).
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Partie I Chapitre I
29
mutualisation et pche par manque de transparence quant la contribution des fonds
au financement du paritarisme (Dayan et Eksl, 2007, p. 3). De plus, on constate que
la gestion du DIF reste relativement complexe assumer, notamment pour les OPCA
(Faisandier et Soyer, 2007, p. 27) ;
- la formation initiale aurait un rendement suprieur celui de la formation continue :
une anne dtudes supplmentaire augmenterait sensiblement le revenu des salaris
(5 15 % en moyenne), alors que les actions de FPC auraient des rendements nets
faibles, voire ngatifs pour les moins qualifis ;
- la formation professionnelle aurait un impact trs limit, voire nul, sur le niveau des
salaires et la scurit de lemploi.
Afin damliorer le systme, Cahuc et Zylberberg (2006) soumettent les rflexions suivantes :
- Le systme de financement priv ne devrait plus contraindre les entreprises au
former ou payer . Ce systme nincite pas les entreprises qui natteignent pas le
seuil de lobligation lgale investir davantage en formation (prfrant sacquitter de
la taxe ). De plus, il ne tient nullement compte des effets collectifs de la formation
(ex. diffuser les savoirs dans le corps social). Les auteurs suggrent donc de supprimer
cette obligation lgale et de mettre en uvre un systme de prlvements-
subventions : toutes les formations feraient lobjet de subventions, mais les taux de
subvention varieraient en fonction des priorits des politiques de formation29. Comme
ce systme tiendrait compte des gains collectifs de la formation cits prcdemment, il
serait financ par le budget gnral de ltat. Ils pensent aussi que le DIF ne rpond
pas cette logique et aurait mme accentu les aspects ngatifs du systme de
formation actuel. En effet, son format universel (20 heures par salari et par an, quels
que soient les publics et les secteurs dactivit, aux besoins htrognes) nest pas
cohrent avec cette logique de priorisation des financements des actions de formation.
- Selon Grard Lenoir de lAGEFOS PME30, la mutualisation des fonds par
lintermdiaire des OPCA permet de rpondre une demande de formation de la part
des PME et des trs petites entreprises (TPE), souvent trs variable et exprime par
-coups (Seillier et Carle, 2007, p. 4). Il estime donc au contraire que cette
obligation lgale aurait un effet positif de lissage des efforts de formation des
29 Par exemple, pour favoriser un public en particulier. 30 LAGEFOS PME est un OPCA qui se dfinit comme tant le premier gestionnaire priv des fonds de la formation professionnelle en France (http://www.agefos-pme.com).
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entreprises. Par ailleurs, lANI de 2003 permettait aux partenaires sociaux de revenir
sur lobligation lgale de financement de la formation professionnelle, ce qui semble
prouver quil subsistait des interrogations ce sujet (Seillier et Carle, 2007, p. 8). Pour
Meignant (1986), ce mode de financement, au moins dans son mode de calcul, est
critiquable : le sacro-saint critre du budget formation calcul en pourcentage de la
masse salariale apparat singulirement inadquat. Des ratios plus pertinents devraient
tre recherchs, par exemple en mettant les dpenses de formation en rapport avec les
budgets dinvestissements, ou les volutions attendues de la marge brute (p. 105).
- Les dispositifs crs pour favoriser laccs des chmeurs la formation
professionnelle devraient tre mieux contrls. Lefficacit des actions de formation
dispenses pourrait ainsi tre value laide dindicateurs comme le taux de
placement gnral ou limpact sur le niveau des salaires lembauche.
- Les formations longues (donc coteuses), qui sont visiblement celles ayant un impact
rel sur les parcours professionnels des salaris, devraient tre favorises au lieu de
saupoudrer les financements et multiplier les actions de courte dure. Au vu du cot de
ces actions, les publics et les besoins devraient tre identifis plus prcisment et
pertinemment.
Au vu de ces critiques, une nouvelle rforme du systme de la FPC tait ncessaire. Christine
Lagarde et Laurent Wauquiez ont ainsi propos dans un document dorientation quatre axes
de rflexion31 devant faire lobjet de ngociations entre les partenaires sociaux. galement, un
groupe de travail multipartite sur la formation professionnelle, prsid par Pierre Ferracci,
P.-D.G. du groupe Alpha et membre du Conseil dorientation pour lemploi (COE), a remis
un rapport le 10 juillet 2008, proposant huit axes32 autour desquels articuler la rforme.
Paralllement, trois groupes de travail (sur lorientation tout au long de la vie, la validation
des acquis de lexprience [VAE], la qualit de loffre et de lachat de formation33) et deux
31 1) Renforcer le lien entre formation et emploi ; 2) Rviser le systme de la formation professionnelle ; 3) Amliorer lefficacit de la formation professionnelle ; 4) Conforter le rle dacteur des individus dans leurs parcours professionnels. 32 1) Clarifier les comptences des diffrents acteurs ; 2) Raliser un droit la formation diffr ; 3) Scuriser les parcours professionnels ; 4) Faire voluer le CIF et le DIF ; 5) Faire voluer les modalits de financement de la formation professionnelle ; 6) Faire voluer le mtier des OPCA et leur gouvernance ; 7) Accrotre les capacits danticipation, la transparence et lvaluation de lensemble du systme formation ; 8) Amliorer la qualit de loffre de formation. 33 Un rapport remis en dcembre 2008 mettait dj 10 propositions pour amliorer la qualit de loffre et de lachat de formation : 1) Visibilit de loffre : auto-inscription des prestataires ; 2) Exonration de TVA : nouveau primtre ; 3) Lisibilit de loffre de formation : fiche didentit des prestataires en ligne ; 4) En amont de la formation : engagements multipartites ; 5) lissue de la formation : une attestation des acquis (o
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groupes de travail paritaires se sont galement constitus (sur la rforme des OPCA,
loptimisation du DIF et du cong individuel de formation [CIF]). Au terme de trois mois de
ngociations, un nouvel ANI a t sign le 7 janvier 2009 par lensemble des organisations
syndicales et patronales. Il vient complter lANI du 5 dcembre 2003 et concrtiser diverses
dispositions introduites par lANI du 11 janvier 2008 sur la modernisation du march du
travail ou faisant lobjet de ngociations sur lassurance-chmage et la GPEC. Son objectif
tait double : contribuer la scurisation des parcours professionnels (salaris et demandeurs
demplois) et amliorer la lisibilit des dispositifs de formation et des financements. Ainsi,
lun de ses objectifs majeurs est de permettre chaque salari de progresser dau moins un
niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle ou dobtenir une nouvelle
qualification dans le cadre dune reconversion. Le 5 octobre 2009, les partenaires sociaux du
Comit paritaire national pour la formation professionnelle (CPNFP) ont fusionn les
dispositifs des deux ANI, celui du 5 dcembre 2003 et celui du 7 janvier 2009 (plus de 250
articles traiter), aboutissant un nouvel ANI sur le dveloppement de la formation tout au
long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la scurisation des parcours
professionnels. Il annule et remplace ainsi presque intgralement les textes des ANI du 5
dcembre 2003 ( certaines exceptions34) et du 7 janvier 2009 et comprend galement deux
annexes35. Lentre en vigueur de celui-ci est subordonne ladaptation de lensemble des
dispositions lgislatives et rglementaires ncessaires son application36. Cest ainsi que le
14 octobre 2009, la loi no 2009-1437 relative lorientation et la formation professionnelle
tout au long de la vie est dfinitivement adopte. Elle comporte 62 articles rpartis en huit
titres et reprend la majeure partie des dispositions de lANI de 200937, certaines
exceptions38, et prvoit la cration dun service dmatrialis gratuit permettant toute
personne de bnficier dune premire information et dun premier conseil personnalis en
matire dorientation et de formation professionnelle.
pourraient figurer les objectifs de laction de formation ainsi que les rsultats aux preuves et valuations ventuelles) ; 6) Achat public : une voie mdiane (entre le march et la subvention) ; 7) Achat public : un systme dachat ; 8) Qualit et prix : un observatoire des prix ; 9) Qualit des prestations : une fonction dintermdiation ; 10) Lintermdiation : une mission pour les OPCA. 34 En loccurrence, les 2e, 3e et 4e alinas de larticle 9-10 de lANI de 2003 qui demeurent en vigueur au titre de lanne 2009 en application de larticle 235 du prsent accord. 35 Deux avenants lANI du 5 dcembre 2003 en date du 20 juillet 2005 : le premier sur lentretien professionnel, le bilan de comptence et le passeport formation, et le second sur la VAE. 36 Dans le cas o ces dispositions ne seraient pas en conformit avec celles de lANI, les parties signataires avaient convenu de se runir pour examiner les consquences de cette absence de conformit. 37 Comme le Fonds paritaire de scurisation des parcours professionnels (FPSPP), la prparation oprationnelle lemploi (POE), etc. 38 Comme la formation initiale diffre.
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Partie I Chapitre I
32
Ces rformes successives du systme de la FPC ont ainsi contribu structurer le cadre
juridique, notamment en confiant de nouvelles responsabilits ou en renforant celles
existantes diffrents acteurs. Il est noter que la formation a galement jou un rle dans le
cadre de la crise financire et conomique survenue en 2008-200939. Ici, nous resterons
toutefois focalis sur les constantes du systme de la formation professionnelle : les acteurs, le
cadre de leur intervention et les dispositifs de formation permanents.
2 Le rle prpondrant des acteurs institutionnels
Le systme de la FPC fait interagir de nombreux acteurs conomiques et sociaux. Le schma
ci-dessous propose une cartographie des relations entre ces acteurs.
Schma 2. Cartographie des relations externes de la formation continue
Source : Parmentier (2008, p. 31).
39 Par exemple, le 13 mai 2009, le Fonds unique de prquation (FUP) a runi les diffrents collecteurs de fonds de la formation pour faire le point sur le Fonds durgence formation (prvu par les partenaires sociaux suite la signature de lANI du 7 janvier 2009 et matrialis par la signature dun accord entre ltat et le FUP le 21 avril 2009) visant former les salaris les plus touchs par la crise. Mobilis en 2009, il est relay ds 2010 par le FPSPP.
Trsor Public (dclaration fiscale)
OPCA FUP FONGECIF OPACIF
Branche CPNEFP
Organismes de formation
1,7 % du PIB
Para-public Chambres consulaires Mtiers / Agric / Ind
Priv Organismes de formation
Public AFPA/GRETA UNIVERSITS CNED/CNAM CNFPT
Internes Organismes de formation internes aux entreprises
Europe : Union europenne FSE tat : tat (DFP et ministres) GNC Rgion : Rgion, DRTEFP, prfecture CARIF-OREF, coll. territoriales Dpartement : DDTEFP, bassins, agglomrations, villes
RH secteur Formation : Ingnierie des comptences de formation pdagogique - Stratgie avec arbitrage DRH et DG - PF / dispositifs / cahiers des charges / Plan de formation / valuation Ngociation
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Partie I Chapitre I
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On retrouve notamment dans ce schma les rgions (lois de dcentralisation de 1982 et 1983,
loi quinquennale de 1993, lois de modernisation sociale et de dmocratie de proximit de
2002), les Chambres de commerce et dindustrie (loi de 1898) et ltat (garant du principe
dgalit daccs des citoyens la formation et assurant une fonction normative et de contrle
dans le domaine de la formation). La FPC concerne donc tous les acteurs, publics ou privs,
mme si lquilibre des pouvoirs ou la rpartition de leurs responsabilits a sensiblement
volu au cours des vingt dernires annes. Prsentons les principaux acteurs qui concourent
llaboration des politiques de formation professionnelle.
2.1 Les pouvoirs publics
Les pouvoirs publics peuvent ou non mettre en uvre des politiques incitatives en faveur du
dveloppement de la formation professionnelle destination des entreprises40, en agissant
tout la fois, par la voie de la rglementation, sur lenvironnement de la formation et, par le
moyen dune politique incitative, sur la demande de formation des entreprises (conseil en
formation, engagements de dveloppement de la formation et, tout rcemment, crdit dimpt
formation) (Voisin, 1988, p. 66). titre danecdote, Parmentier (2008) rappelle que la
formation professionnelle a dj fait lobjet dun oubli lors de la constitution dun
gouvernement, Cest dire la place quelle peut occuper parfois dans lesprit des dirigeants
politiques ! (p. 83). Outre llaboration mme de politiques de formation, les pouvoirs
publics ont en charge laide au financement et le contrle de la formation professionnelle.
2.1.1 Laide au financement de la formation professionnelle
Les politiques publiques, europennes ou nationales, tendent favoriser le dveloppement de
la participation des travailleurs des programmes de formation professionnelle (Conter,
Maroy et Orianne, 2002b). Cela passe ncessairement par une optimisation du financement de
la formation professionnelle, laquelle participent principalement ltat (au niveau national,
rgional, dpartemental et, parfois, local) et lUnion europenne.
Ltat et les rgions sont responsables de la mise en uvre de la FPC dun point de vue
politique et travaillent avec les partenaires sociaux pour ltablissement de conventions de
40 Cest par exemple le cas de la rgion Nord-Pas-de-Calais qui finance un Diagnostic comptences organisation (DCO), permettant des entreprises de travailler avec un cabinet conseil sur leur gestion des comptences.
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Partie I Chapitre I
34
branche par secteur professionnel. La formation y est considre comme un outil de
rgulation sociale permettant de favoriser lemployabilit des salaris, notamment ceux
victimes de restructurations. Ils sont amens rendre des comptes sur lutilisation du budget
allou aux actions de formation. Ils se partagent ainsi la responsabilit de la mise en uvre
des politiques. Historiquement, comme les partenaires sociaux nont pu rpondre au besoin de
monte en comptences des ouvriers qualifis (souvent davantage proccups par les
questions relatives aux salaires et la sauvegarde de lemploi) et que les associations ne
dtenaient pas les moyens financiers suffisants, cest donc ltat qui est devenu le principal
acteur de la formation sur ces problmatiques, do la promulgation de la loi de 1971
(Plassard et Loukil, 2000). Toutefois, la loi de finance de 1996 tend dmontrer un certain
dsengagement de ltat (ex. suppression de la contribution de ltat au financement du CIF,
au plan national). Ltat exerce ainsi des comptences limitativement numres par la loi et,
du fait de la dcentralisation de ces comptences41, ce sont davantage les rgions qui jouissent
dune comptence gnrale en matire de formation et sont donc autonomes dans
llaboration de leurs politiques de formation. En plus de diverses incitations fiscales (comme
les excdents reportables), ltat et les rgions proposent des aides financires dont lobjectif
est dinciter les entreprises former leurs salaris ou les aider valider leurs acquis
professionnels. Ces aides publiques dpendent des orientations prises par ltat en matire
demploi et de ses comptences dlimites en matire de formation professionnelle. Ces
diffrentes aides publiques peuvent tre gres par ltat mais selon diffrents chelons
territoriaux (national, rgional, dpartemental). La Direction dpartementale du travail, de
lemploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) est responsable de la mise en uvre
des dispositifs, tandis que son quivalent rgional (DRTEFP) intervient lors dactions
cofinances par le Fonds social europen (FSE). En effet, la plupart des aides publiques et
rgionales la formation dans lentreprise bnficient dun cofinancement du FSE dfini pour
des priodes de programmation pluriannuelles. Il est noter quau plan national, le comit de
coordination des programmes rgionaux de lapprentissage et de la formation professionnelle
a t cr afin de coordonner au mieux laction commune de ltat et des rgions (et ainsi
favoriser la cohrence et lharmonisation des programmes proposs). Ltat peut aussi
participer la formation des demandeurs demploi, notamment via le Ple Emploi. Cest ainsi