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15 MAI 2013 NUMéRO 11 Web journal indépendant et gratuit. Disponible par mail tous les 1 ers et 15 de chaque mois Applications smartphones Autorisations de stationnement Libéralisation Mobilisation

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Web journal d'informations professionnelles, gratuit et indépendant. Diffusé tous les 1ers et 15 de chaque mois.

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15 mai 2013 numéro 11

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éditoa

lors que nous nous apprêtions à diffuser ce numéro, un communiqué nous informe que les taxis du Loiret sont également, comme tant d’autres de leurs confrères,

dans l’impasse. Pour preuve, ils ont boycotté pour la seconde fois la commission préfectorale qui devait se dérouler hier afin de « protester contre l’irréalité qui règne dans [leur] département en matière de gestion de [leur] profession ». Un peu d’humour n’ayant jamais fait de mal, nous leur dédions cette petite fable empruntée à Dominique Dupagne, un médecin qui n’a pas sa langue dans sa poche ainsi que vous pourrez le lire dans ce numéro. « Deux universités ont pour habitude de se confronter chaque année dans une course d’aviron. Le doyen de l’université A, qui a perdu les deux courses précédentes contre l’université B, décide d’appliquer à son équipe les techniques de management modernes enseignées dans son établissement. Il débloque un budget conséquent pour ce projet et fait appel au cabinet de conseil fondé par d’anciens élèves. Les deux équipes s’entraînent dur. À l’heure de la compétition, le bateau A perd de justesse. Très vexés par cet échec, le doyen de l’université A et les consultants se réunissent pour en rechercher les causes. Un audit de haut niveau est ordonné. Après enquête, elle constate que l’équipe A est constituée d’un barreur, de cinq consultants et de trois rameurs, alors que l’équipe B comporte un barreur et huit rameurs. La direction décide de se donner les moyens de la victoire pour l’année suivante et confie cette mission à un groupe d’experts reconnus qui proposent de procéder à une réorganisation totale du bateau A. Des modifications structurelles intégrant un processus qualité avec des contrôles réguliers des procédures appliquées doit améliorer le rendement et la productivité. La nouvelle équipe comprend désormais un directeur général d’aviron, un directeur adjoint d’aviron, un manager d’aviron, un superviseur d’aviron, un consultant qualité, un contrôleur de gestion, un chargé de la communication interne, un barreur et… un rameur ! Il est demandé au rameur de rédiger un rapport d’activité tous les vingt coups de rame et une brève réunion de suivi et d’évaluation des objectifs est programmée tous les kilomètres. La course a lieu et l’équipe A termine cette fois avec trois kilomètres de retard sur l’équipe B. Le doyen et les consultants sont profondément affectés et prennent une décision rapide, mais logique et courageuse : ils licencient le rameur, celui-ci n’ayant pas atteint ses objectifs. Ils vendent le bateau et annulent tous les investissements prévus. Avec l’argent ainsi économisé, le doyen rénove son bureau, l’associé en charge du projet octroie une prime aux managers, superviseurs ainsi que directeurs et s’attribue une indemnité exceptionnelle de fin de mission. »Hélène Manceron

Publication : LNM communication Rédactrice en chef : Hélène Manceron

helene.manceron [at] gmail.comSecrétaire de rédaction : Laurent Thelliez

Graphisme : Stanislas MarçaisIllustration : GÄ

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Contactez la rédaction : helene.manceron[at]gmail.com

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a près l’annonce de l’ouverture aux taxis de

son application smartphone dédiée jusqu’à présent aux VTC de luxe, nous avons rencontré Pierre-Dimitri Gore-Coty, directeur France de Uber, pour l’interroger sur cette initiative qui semble bousculer l’ordre établi dans le transport de moins de 9 places.

numéro 11 /// 15 mai 2013

un projet de loi pour mieux équilibrer la concurrence ?

P our répondre aux taxis et à leurs organisations professionnelles qui

les avaient interpellés en manifestant le 10 janvier, les pouvoirs publics avaient exprimé le souhait d’arriver à une « concurrence équilibrée » entre les différents acteurs du transport de personnes de moins de 9 places. Pierre Moscovici, ministre de l’Économie et des Finances, paraît vouloir tenir parole. C’est par le biais d’un projet de loi visant à réorganiser et renforcer les droits des consommateurs que le gouvernement entend ainsi répondre aux revendications des taxis concernant les VTC. Décryptage.

Directrice de Publication : Hélène Manceron

L ille, Besançon, Chalon-sur-Saône… Les conflits entre taxis d’ag-glomération et leurs confrères des communes avoisinantes se multiplient. Le contexte de crise économique et le développement

de la concurrence semblent accentuer l’enjeu de certains territoires. Médias et tribunaux sont saisis tandis que le projet de loi sur les Métro-poles fait son chemin.

>>> suite de l’article page 4

uBEr, la première application mixte

>>> suite de l’article page 5

Zones de discorde dans les territoires

Web journal indépendant et gratuit. Disponible par mail tous les 1ers et 15 de chaque mois

>>> suite de l’article page 6

D ominique Dupagne ne mâche pas ses mots. Médecin médiatique mais pragmatique, il n’hésite pas à dénoncer les dangers de la

libéralisation du transport de malades. Une prise de position particulièrement intéressante de la part d’un praticien qui redoute que la nécessaire optimisation du financement de l’Assurance mala-die ne finisse par créer des désert médicaux.>>> suite de l’article page 7

« Libéralisation du transport des malades : typique de la fausse bonne idée ! »

actu

terraininterview

débat

Libéraliser le TAP serait "dangereux" "coûteux" et "douloureux".

À Chalon-sur-Saône, c'est entre taxis de nuit que le ton monte.

Le projet de loi prévoit cinq mesures exclusivement VTC et une meilleure protection contre la publicité mensongère.

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Crédit : Wikimédia Daderot

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100% NEWS numéro 11 /// 15 mai 2013

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Racolage interditLes deux dernières mesures concernent principalement les VTC à quatre roues. La première vise à définir clairement la notion de réser-vation préalable, en s’attachant parti-culièrement aux zones éminemment sensibles que constituent gares et aéroports. Le législateur tient ici à réaffirmer que seuls les taxis ont la possibilité de stationner en attente de clientèle sur la voie publique dans leur commune de rattachement. Là encore, le but des pouvoirs publics est d’harmoniser les réglementations en vigueur et donc d’aligner celle des VTC sur celle s’appliquant aux motos.Découlant naturellement de cette pre-mière mesure, la seconde instaure un

L es taxis avaient pourtant exposé largement leurs doléances concernant la concurrence des VTC et des TPM - transports de personne à moto ( voir 100 % News numéros 3, 4 et 5 ). Dans

nos dernières parutions, nous avions fait échos à leurs craintes de voir leurs revendications ignorées. La réponse du gouvernement semble être arrivée : le 2 mai 2013, le projet de loi relatif à la consommation est enregistré par l’Assemblée nationale. Ses articles 68 et 69 créent ou précisent « des obligations à la charge des exploitants de voitures de tou-risme avec chauffeurs et de véhicules motorisés à deux ou trois roues ». 5 mesures qui complètent ou remplacent les textes déjà existants, dans le but de rendre la concurrence à la fois loyale et transparente. Les chefs d’entreprise taxis ont-ils été entendus ?De nouvelles obligationsSi tout un chacun peut se rendre sur le site d’Atout France afin de connaître le nombre des exploitants de VTC inscrits dans son dépar-tement ainsi que leurs coordonnées, il est en revanche impossible de savoir le nombre de véhicules correspondants. La modification de l’article L. 231-2 du code du tourisme qui figure dans le projet de loi permettra de pallier cette lacune en obligeant chaque entreprise

inscrite au registre des exploitants de VTC de déclarer auprès d’Atout France les véhicules affectés à l’ac-tivité de VTC préalablement à leur

mise en service, en précisant leur type, immatriculation, etc. De quoi y voir un peu plus clair sur l’importance réelle de cette concurrence dont les inscriptions, après avoir été suspendues, avaient rapidement repris leur ascension.La sanction administrative : l’arme absolue ?Estimant que l’arsenal répressif visant à « réprimer les manquements à l’exercice de l’activité » des chauffeurs de VTC et de TPM paraissait, d’un point de vue pénal, globalement suffisant, les pouvoirs publics ont néanmoins fini par constater que ces dispositions restaient sans impact sur la détention de la carte professionnelle et permettaient aux contrevenants de poursuivre leur activité… une aberration que n’avaient cessé de dénoncer les taxis depuis de nombreux mois ! Cette coupable omission devrait être désormais réparée avec la création de sanctions administratives allant du simple avertissement au retrait définitif… Une avancée majeure qui, selon les experts, présente le double avantage d’avoir un effet dissuasif avéré et d’être autrement plus rapide qu’une sanction pénale dont les délais de mise en œuvre s’avèrent particulièrement longs.

un projet de loi pour mieux équilibrer la concurrence ?

délit spécifique en cas de méconnais-sance, par les VTC, de l’obligation de réservation préalable. Le législateur envisage donc d’aligner le code du tourisme, qui régit l’activité VTC, sur celui des transports, qui régit celle des motos, en instaurant une infraction pénale comparable à ce qui est déjà prévu pour le délit d’exercice illégal de l’activité de taxi.« Les entreprises qui investissent dans la qualité de leurs produits et de leurs services doivent pouvoir récolter les fruits de leurs efforts et être protégées de la concurrence déloyale de celles qui ne respectent pas les règles », a expliqué Pierre Moscovici. Puissent les parle-mentaires entendre ses paroles…

La réglementation des VTC à quatre roues sera harmonisée

sur celle des deux roues.

Crédit : Wikimédia

actu

humour

Crédit : LNM Communication

Le rééquilibrage de la concurrence avec les VTC est une revendication

prioritaire des taxis.

Les VTC devront déclarer les véhicules affectés au préalable de leur mise en service.

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uBEr, la première application mixteP

remière application smartphone mixte taxis / VTC lancée en France, Uber témoigne d’une communication très

réactive. Spécialisé dans le transport de luxe, le service s’est largement implanté en Amérique du Nord, non sans faire quelques remous. Dis-ponible depuis un an à Paris, l’application ouvre aujourd’hui son réseau aux taxis parisiens et étend son développement à Lyon.Interview de Pierre-Dimitri Gore-Coty, direc-teur général de Uber France.Après un lancement aux États-Unis avec une levée de fonds de plus de 40 millions de dol-lars, comment se déroule votre arrivée en France ? Née à San Francisco en 2010, Uber est déjà ins-tallée dans de nombreuses villes d’Amérique du Nord. Paris est notre première métropole euro-péenne. Notre objectif est d’ouvrir une nouvelle ville par semaine  : Stockholm, Berlin, Milan, Singapour, Melbourne, Détroit, Minneapolis, etc.Le principe est toujours le même : nous n’avons pas de voiture, nous ne conduisons pas nous-mêmes. Jusqu’à présent, notre offre française reposait sur un service haut de gamme de VTC sur le modèle des grandes remises qui existaient avant 2008. Parfois, notre installation a suscité des remous mais nous avons su nous adapter. À New York par exemple, la municipalité ayant contracté un partenariat exclusif pour gérer les paiements électroniques, nous avons intégré ce sys-tème dans notre applica-tion afin de poursuivre notre développement. À Washington, ce sont les taxis qui ont fait évoluer leur réglementation pour pouvoir librement uti-liser les nouvelles technologies.Vous avez récemment ouvert votre service de « chauffeurs privé » aux taxis parisiens. Com-ment réagissent les professionnels ?Dans beaucoup de villes où Uber se développe, notre application est ouverte aux taxis. Côté clients, nous proposons une offre taxis plus accessible que celle des chauffeurs privés tout en continuant de profiter de la simplicité de

commande et de facturation de notre application. Côté professionnels, Uber propose une alternative aux centraux radio classiques, sans l’abonnement. La clientèle paie le tarif compteur et notre service est facturé au chauffeur par une commission de 10 % sur les courses réalisées. Les taxis souhai-tant rejoindre notre réseau doivent s'inscrire en ligne, qu’ils soient arti-san, locataire ou salarié. Puis nous les rencontrons dans nos locaux de la rue de la Chaussée-d’Antin à Paris où ils bénéficient d’une courte formation. Après validation, ils disposent d’un téléphone réservé à l’usage de l’appli-cation qui leur permettra également d’évaluer les zones d’activités selon les moments de la journée. Plus les chauf-feurs ont d’informations sur l’activité des clients, mieux ils peuvent se posi-tionner.Comment se dessinent les perspec-tives de votre développement ?Aujourd’hui, nous travaillons à Paris avec des centaines de sociétés de transport qui ont effectué plusieurs centaines de milliers de courses via Uber ! Notre application est gratuite et ne nécessite pas d’abonnement. Après chaque course, le client reçoit un reçu

par mail, un plus pour ceux qui doivent justifier

leurs notes de frais. Nous diffusons également des codes de promotion incitant à se fidéliser. Notre campagne de communication a réussi à faire valoir nos atouts dans le service haut de gamme et celui du luxe. Certains de nos affiliés VTC ont crainte de l’ouver-ture de l’application aux taxis. En effet, de nombreux taxis proposent un ser-vice haut de gamme et leur tarification offre un très bon rapport qualité/prix pour notre clientèle.

A qualité de service égal, le rapport qualité/prix est en faveur du taxi.

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Pierre-Dimitri Gore-Coty, directeur général de Uber France.

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100% nEWS numéro 10 /// 1er mai 2013

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justice quand on sait que l’Aire urbaine de Besançon regroupe près de 250 communes réparties entre trois départements et dont le nombre varie selon les sources d’informations consultées…Les tribunaux n’ont pas fini de découvrir la complexité du service taxi et d’essayer d’arbitrer des situations où s’enchevêtrent des zones de compétences.Un contexte de conflits délicat que le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale, permettant l’affirmation des métro-poles, propose de résoudre à sa façon…

D ans de nombreuses villes, le tor-chon brûle entre professionnels. Taxis de périphérie contre taxis

du centre, taxis ruraux contre taxis d’agglo : le chevauchement entre terri-toires de prise en charge taxi et zones de coopérations intercommunales brouillent les notions de limites, à moins que ce soit la précarité frappant de nombreuses entreprises qui pousse les taxis dans leurs retranchements.Les villes, centres de convoitiseSurpris par le mouvement de pro-testation des salariés des transports publics, les taxis de Lille ont annulé in extremis leur manifestation prévue ce mardi 14 mai. L’objet de leur colère ? Le climat entre taxis de l’aggloméra-tion et ceux de la périphérie, notam-ment concernant l’accès à la gare Lille-Europe. « Le fait qu'il n'y ait pas d'arrêté du maire de Lille interdisant le stationnement des taxis de la métropole à la gare Lille-Europe ne signifie pas un droit pour ceux-ci », indique Francis Prévost, président du Syndicat auto-nome des artisans taxis des Hauts de France à La Voix du Nord. Saisi par le Syndicat des taxis du Nord, repré-sentant les taxis de périphérie, le tri-bunal administratif de Lille a, en effet, débouté les plaignants sur la question de l’accès à la gare. Mais le calme n’en est pas pour autant revenu car c’est au tour de l'aéroport de Lesquin, acces-

sible à tous les taxis, que le conflit s’est reporté. À Chalon-sur-Saône, même climat tendu comme le rapporte le site d’in-formations locales info-chalons.com  : «  Chalon-sur-Saône n'échappe vérita-blement pas à la guerre des taxis des grandes agglomérations françaises, mais la situation appelle à une clarifica-tion claire et nette des pouvoirs publics, voyant là une véritable distorsion de concurrence inadmissible. À l'échelle de l'agglomération chalonnaise, la ques-tion pourrait éventuellement être posée au conseil communautaire, afin de limiter le nombre de taxis autorisés. »Intercommunalités à géométrie variableÀ Besançon, c’est désormais à la jus-tice qu’est soumise l’organisation des

Zones de discorde dans les territoires

Sous la pression de la crise économique, les aéroports et les gares sont devenus vitaux pour de nombreux taxis.

taxis pour servir les clients à de la Gare TGV ! Saisi par des taxis de l’Aire urbaine ne pouvant accéder à la gare TGV de Besançon Franche-Comté, le tribunal administratif de Besançon est chargé d’apprécier l’arrêté préfec-toral en vigueur depuis 2011. Rédigée selon les propositions d’un groupe de travail réunissant les chambres consu-laires des départements du Doubs

et du Territoire-de-Belfort ainsi que des représentants d’organisations profession-nelles taxi, la décision pré-

fectorale autorisait le stationnement sur le pôle d’échange multimodal de la gare TGV à 47 taxis d’une dou-zaines de communes composant l’Aire urbaine de Besançon et satisfaisant à une condition d’ancienneté. « Le préfet a indiqué qu’étaient autorisés à stationner sur le pôle multimodal les taxis dont le temps trajet entre le lieu de stationnement habituel et la gare TGV était de 12 minutes maximum », avance l’avocat des taxis plaignants qui estime « que cette décision est une entrave à la liberté du commerce que rien ne justifie », s’étonnant « qu’un taxi de Bourgogne ne soit pas autorisé à stationner de droit en zone taxi, alors qu’il se trouve à moins de 10 minutes de la gare ». Difficile à démêler pour la

À défaut d'entente entre chefs d'entreprise taxi, ce sont les juges qui doivent statuer sur l'organisation de l'activité.

terrain

Il existe dans de nombreux territoires une multitudes de zones de compétences administratives que le projet de loi "Métropole" se propose de simplifier.

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Si cette libéralisation est mise en place, elle finira par coûter plus cher, ajoutera de la souffrance inutile à celle provoquée par la maladie et provo-quera des accidents, eux-mêmes source de coûts supplémentaires. […] Après les déserts médicaux, ne créez pas de déserts des transports. »Plus d'info : atoute.org

« Quand on me demande de définir ce qu’est un médecin généraliste, je dis que c’est un chauffeur de taxi bac +10. Nous avons beau-

coup de points communs avec les taxis : Beaucoup d’heures de travail, forte productivité, fort indi-vidualisme. C’est à ce titre que je me permets de parler d’un problème qui paraît plus économique que médical. » Plantant le décor sans langue de bois, Dominique Dupagne, médecin français passionné d’informatique, expose au million de visiteurs que son site atoute.org informe par mois en quoi la libéralisation du transport de malades assis serait un projet « à la fois dange-reux, coûteux pour la collectivité et douloureux pour les malades ». Extraits.Forcément plus coûteux« Comment puis-je affirmer que cette libéralisa-tion sera forcément coûteuse à moyen terme ? Tout simplement parce qu’un chauffeur de taxi libéral est la solution la plus économique pour faire le job. Il travaille bien plus de 35 heures pour un revenu modeste. Pas d’arrêt maladie, pas de congés payés, pas de primes. Il gère et finance son matériel. Il ne génère pas de frais administratifs inutiles. Il est impossible de produire la même quantité de trans-ports au même coût avec des chauffeurs salariés. Le problème est identique à celui des dispensaires médicaux en faillite qui ne peuvent payer leurs salariés avec les honoraires versés par la sécu-rité sociale. Seuls des médecins libéraux peuvent s’en sortir avec des tarifs aussi bas. Donc, une entreprise qui répondrait à l’appel d’offres d’une agence régionale de santé ne pourrait fournir les mêmes prestations pour un coût inférieur, même en payant ses chauffeurs au SMIC. Seule une dégradation de la qualité des transports en regroupant les patients dans des minibus pourrait diminuer les coûts. […] En pratique, il se passera ce qui se passe toujours dans ces situations  : de grands groupes proposeront initialement des prix cassés et travailleront à perte pour gagner les mar-chés. Une fois les taxis libéraux mis en faillite et leurs licences rachetées à bas prix, ces groupes en situation de monopole feront remonter les tarifs au-delà du coût actuel. Les agences sanitaires devront suivre faute de concurrence et feindront de ne plus se souvenir de leurs responsabilités face à ce désastre économique. »Plus douloureux« Regrouper des patients dans le même véhicule peut paraître logique. C’est méconnaître la réalité du terrain. Un tel regroupement est très difficile, tant les aléas et les retards hospitaliers sont mon-naie courante. Cela suppose de faire attendre des heures dans des couloirs des patients mal synchro-nisés. Attendre deux heures après une chimiothé-rapie alors que l’on est nauséeux et impatient de

Libéralisation du TaP, la fausse bonne idée

rentrer chez soi est une torture. Arriver en retard à sa consultation car le patient co-transporté n’était pas prêt génère un stress dont les malades se pas-seraient bien. Enfin, quand on est malade et fra-gile, savoir que l’on peut compter sur son chauffeur de taxi habituel est sécurisant et rassurant, sur-tout quand on est âgé ou dépendant. Cet aspect humain non pris en compte est fondamental. »Plus dangereux« Parmi les personnes transportées, de nombreuses personnes âgées sont un peu désorientées. Le chauffeur de taxi régulier est autant un aidant qu’un transporteur. Son rôle en tant que personne humaine est capital et bien sûr sous-estimé par les administratifs qui pondent ce genre de projet.

Ce sont les mêmes admi-nistratifs qui croient que les aides-soignantes et les infir-

mières sont interchangeables et qu’une intérimaire apporte la même qualité de prestation qu’une soi-gnante affectée à demeure au même service hos-pitalier.

En pratique, il se passera ce qu'il se passe toujours dans ces situations.

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Un taxi habituel est sécurisant et rassurant, surtout quand on est âgé ou dépendant.

Crédit photo : Stanislas Marçais

débat

Dominique Dupagne, médecin, figure de proue de la médecine 2.0