vision hallucination et figurativite - denis bertrand

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  • 8/13/2019 Vision Hallucination Et Figurativite - Denis Bertrand

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    ACTION PASSIONCOGMT ON

    D APRS A J GREIMAS

    S l lS la clirection deierre Ouel et

    NUITBL NCHEDITEURPULlM

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    VISION, HALLUCINATION ETFIGURATIVIT

    Denis BertrandUniversit Paris IV

    L HALLUCINATION DE FRENHOFER

    Si vousvouliezme laisser voirvotrematresse, demande le pein-tre Porbus au Matre Frenhofer quis crie, tout mu : Montrer monuvre Non, non,je dois la perfectionner encore1 . Chacun connat ceclbrevnement de vision du hef d uvre inconnude Balzac,o setrouvent confronts deux regards concretssur une toile peinte, le regardqui croitce qu il voit et le regard qui voit cequ il croit, parcequ il voitson proprevoir: les observateurs, Porbus et Poussinn y voient que descouleurs confusment amasseset contenues par une multitude de lignesbizarres quifonnent une muraille de peinture2 , alors que le crateur,Frenhofer, ivred amour et hallucin, y voit non pas une peinture, mais

    un sentiment, une passion : Vous tes devant une femme et vouscherchez un tableau3. Je prendrai appuisur ce dchirement des visionspour envisager, non pas la thorie de la cration artistique de Balzac

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    ACTION, PASSION, COGNITION

    cadre de la thorie smiotique,pour clarifier le statut ambigu et problmatique qui est aujourd hui le sien. Son caractre de dimension smantique autonome, identifiable sparment et dfiniepar des paramtresqui lui sont propres, me semble en effet faire problme.La perceptioncontradictoire du fameux portrait de Catherine Lescault, parcequ elle nous prsente des formes extrmes et antagonistes de la visibilit, nous servira dans cette perspective, la manired un laboratoiretextuel de la figurativisation, de mdiation discursive entre la figurativitet la perception.

    SUR LA FIGURATIVITEN SMIOTIQUE

    Pourquoi cettemdiation? L volution des recherches smiotiquesau tournant des annes 1990, si ellea enrichi considrablement la problmatique de la figurativit, a cependant dtach de la textualisationsonmode de questionnement.Du coup, la pertinence initiale duconcept at brouille et peut-tre branle. Sa position elle-mme au sein de lathorie gnrale, o la figurativisation est traditionnellement rangeau niveau des structures discursives de surface,s est trouve implicitement miseen question. Il est ainsi frappant de constater que les travauxmens sur la dimension figurative des discourssont le plus souventintresss parson dpassement: on traverse la figurativit, mais on nes y arrtepas. Sur le front du discours, lesvoies figuratives du sens nousconduisent aux problmes de la symbolisation, de l abstraction, de la

    perception etde la rfrence, de l expressivit et de l affect. Bref, elless ouvrent sur le dehors de la langue et des discours. Ces observationssuffisent justifier que nous prenions attache dans un texte qui nousprsenteune vritablescnographie de la figurativisation.

    Les changements dfinitionnels attestent cette instabilit du concept. grands traits, on peut dire que noussommespasss d une dfmitionsmantiqued origine structurale une dfinition phnomnologique. la premire se rattache l identification des smmes figuratifs pleins,dploys,par rcurrence de traits rsultant d oprationsd assimilationenchanes5 ou de rfrentialisation, en isotopies responsablesde l impression rfrentielle. La dfinition classique(depuis celle duDictionnaire), mme lorsqu elle marque, dansses formulations rcentes,le lien qui unit la figurativit et la perception6, relve de cette approche

    5. Franois Rastier,Smalll ique el recherches cog tives , Paris,Presses universitairesde France, 1991 , p 220.

    6. Voir notamment JosephCourts,Analyse sm iotique du discours. De l nonc l nonciation, Paris, Hachene,1991, p 163.

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    VISION, HALLUCINATION ET FIGURATIVIT

    et postule, c est son noyau, lacorrespondance entre les figures du plandu contenud une langue naturelle et celles du plan de l expression dumonde naturel. Cette dfinition s applique au rsultatd une constructiondynamique qu ellen entend pas dcrire en elle-mme. La seconde,en revanche,par un dplacement de focalisation, assume clairement leprocessus qui remonte de la mise en discours de la figurativit l apprhension de l acte sensible, c est--dire aumouvement de constitutionrciproque et solidaire de signification qui se forme, au cur de l acte,entre le sujet etl objet de la perception, et dont le discours ralis portela trace. La figurativitn est pas une simple ornementation des choses,crit Greimas dans une dfinition elle-mme figurative, elle est cet crandu paratre dont la vertu consiste entr ouvrir, laisser entrevoir, grceou cause de son imperfection, comme une possibilit d outre-sens. Leshumeurs du sujet retrouvent alors l immanence du sensible7. On estapparemment bien loin de la correspondance entre les deux smiotiques. n ralit, c est plus prcisment le chemin de cette correspondanceproblmatique qui est ici balis, localisant les diffrents vnements desens susceptibles de se produire en cours de route pour branler lejeu ,initialement statique, des relations: interviennent ainsi de nouveaux paramtres qui occupent le devant de la scne figurative, paramtre vridictoire(cranimparfait, le paratre figuratif est aussi une muraille de peinture) ,paramtre axiologique (la figurativit est valorise par une vertu ,paramtre actantiel (un sujet en formation se dessine l arrire-pland unecomptence cognitive - laisser entrevoir - et d une existence pathmique - les humeurs ), paramtre aspectuel (qui associe l imperfectifet l inchoatif), paramtre topologique enfin (qui postule l illimitationdu sens, prsupposant son caractre lacunaire et signalant les seuils defranchissement duparatre: l exprience esthtiques y configure).

    Le lieu d articulation de la figurativits est donc dplac. Dtachede la reprsentation univoque du rel comme faitet du ralismetextuel comme mimsis, elle intgre dsormais l ouverture au possible, la d-ralisation, la sur-ralisation et la connaissance par lesgouffres8 . Elle intgre dans la mme perspective la variation desmodes de suture par lesquels le sujet vient adhrer aux formes: ilcroit etil doute, il s merveille etil s meut , il voitet il hallucine, en unmot il se laisse absorber. Le sujet apparat comme un champ d oprations(aspectuelles et modales), en arrt devant le pouvoir-tre abyssal de lasignification sensible.

    7. Algirdas Julien Greimas, De l imperfecti on, Prigueux, Pierre Fanlac, 1987, p. 78.8. Henri Michaux,Passa ges, Paris, Gallimard, 1963.

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    ENTRE PERCEPTIONET PRDICATION: UN LIENRENFORC

    Comme onle sait, plus gnralementqu travers cette transfonnationpour ainsi dire locale de la thorie, l'histoire rcente de la smiotique a

    t marque par l'expressiond une convergence de plus en plus explicite avec la phnomnologie. Celle-ci tait, ds les premires pages deSmantique structurale le soubassement revendiqude la thorie du sens, la fondation mme de ses principes.Or les rfrences croises, directesou indirectes, sont aujourd hui troitement imbriques. Tout se passecommesi la smiotique (du sujet, du ptir, de la figurativit) s' immergeait dans la phnomnologie.propos du rapport entre nonc et mondenaturel, Maria Pia Pozzato notemme: Il n y a pas, mon avis, de vritable distance thorique entre la smiotique structurale et la philosophiede Merleau-Ponty, mme avant sa conversion linguistique 9.

    Il est donc possible d'associer le glissement dfinitionnel du figuratif, qui prend d sonnais appui sur une saisie du sensible simultanmentpercepti f et pathmique, un dplacement plus gnral de la smiotique.Celui-ci me semble emprunter deux voies qui, bien que diffrentes, voiredivergentes, cherchent en commun faire remonterle lieu d'articulationdescriptive au plus prs de la formation des instances (nonantes, subjectives, discursives, prsentes la deixis nonciative) et rendre comptede leurs modulations. La premire voie, inscrite dansle cadre gnratif,consiste postuler, en amont des structures fondamentaleset de leurscatgorisations discrtes, des catgories plus profondes de l'ordre ducontinu susceptibles de fonder et de gnrer les discontinuits signifiantes venir (ce sont les modulations tensives et phoriques, les prconditions de la smiotique des passions, l o le sujet sensible trouvesa fonne-origine). La seconde, l'cart du processus gnratif, cherche saisir l'mergence des instances premires , les centres de discursivit (Coquet) solidairement nous autour del acte prdicatif et de l' actesensible. Marquons un arrt sur cette seconde voie pour indiquer troisfonnes de relations entre prdication et perception qui pennettent deprciser le problme: relations de mtaphorisation, de schmatisationet d'homologie.

    UNE RELATION QUASI-MTAPHORlQUE

    Rfrence oblige, ce lien est dj affich, sous une fonne vrai direambigu et marque par une sorte d'indcision mtaphorique, dans la

    9. Maria Pia Pozzaro, Le monde textuel Nouveaux A cles smio t u es n 18,Limoges, PULIM , 1991 p. 38 .

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    VISION, HALLUCINATION ET FIGURATIVlT

    Phnomnologie de l perception. Merleau-Ponty y voque le drou

    lement des donnes sensibles sous notre regardou sous nos mains [ .. ]comme un langage qui s enseignerait lui-mme ; maisil tranche immdiatement aprs, modifiant radicalementle statut de cette communicationperceptivo-Iangagire qui n tait convoque qu titre d analogie, encrivant : On peut dire l lettre que nos sens interrogent les choses etqu elles leurrpondent ; et puis il module nouveau l identificationde l exprience perceptive avec les prdicats anthropologiques dont elleest charge: La nature entire est [.. ] notre interlocuteur dansunesorte de dialogue 10. La traductionsystmatisede cette analogie dansla thorie du langage a t l tablissement d une relation decorrespondance entre les deux smiotiques dela langue etdu monde informpar la perception. Fortement assum par les smioticiens,le lien entrediscursivit et sensibilit a fait plusieurs reprises l objet de formulations explicitesI l J en retiendrai ici deux, qui donnent cette relation uncaractre crucial et fondateur.

    UNE RELATION DE SCHMATISATION

    Pierre Ouellet, dans Le don des formes analyse avec unegrandefinesse les conditions dans lesquelles se ralisent les processus d iconisation au sein du discours12. Non seulementil rcuse le rle des reprsentations lexicales dont les smmes sont figuratifs, affaiblissant dumme coup la fonction de rfrenciation(visant le rfrent externe),mais il confmne et prolonge les hypothses qui fondent la productiondes effets d iconicit sur la rfrentialisation interneau procs discursif.Cette opration, seule apte tisser les relations responsables de tels

    effets, est corrlative aux actesde perception dont elles forment leschme et expriment les conditions. Partant,il assigne l iconisation aumouvement mme de l nonc oudu phras : celui-ci constitue

    l essentiel de l icneverbaledont le texte a pour enjeu de fairesurgirl apparition [ .. ] en schmatisant l acte par lequelle monde se donne

    10. Maurice Merleau-Ponty, Le langageindirecl etles voix dusilence dans Signes,Paris, Gallimard, 1960, p. 369 et 370 ; je souligne.

    I l Voir notamment, Algirdas Julien Greimas et Jacques Fontanille, SmioLique despassions . Des tats de choses aux tats d me, Paris, Seuil,1991 ; Le monde textuel,art. cil. ; Denis Bertrand, Le langagespatial dans La Ble humaine , dans PhilippeHamon et Jean-Pierre Leduc-Adine (dir.), Mimesis et Semiosis. Miscellanes p our HenriMillerand. Paris, Nathan , 1992 ; Teresa Keane, Figurativitet perception NouveauxActes sm iotiques, nO17, Limoge s, PULIM, 1991.

    12. Pierre Ouellet, Le don desformes ,dans Denis Bertrandet Louise Milot (dir.),Schmas , P ro le. Thories el pratiques smiotiques, vol. 21, n 1 Universitdu

    Qubec Chicoutimi, 1993.

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    ACTION , PASSION , COGNITION

    conune phnomne [ ... ] dans le don que le sujet lui fait d une fonne 3 .Dans cette perspective , les oprations de l nonciation et le tissu des noncs qui les ralisent schmatiseraient nos actes de perception au sens large.

    UNE RELATION D HOMOLOGIE

    Le lien conceptuel tabli entre le sujet du discours et celui de laperception est ainsi un lien de ralit . Il suppose une reconsidrationcompl te de la construction de l identit actantielle . Celle-ci doit tre,conune l explique Jean-Claude Coquet, rapporte son procs continude formation. D o ce qu il appelle la vise syntagmatique qui a pourambition de circonscrire jusqu l abolition de la limite (celle desdiscontinuits et des changements d tat) les processus d identificationpennettant de serrer au plus prs [ .. ] l histoire transfonn ationne lle del actant 14 . Mais l actant ainsi conu ne peut plus tre envisag conunel ancrage exclusif du discours. Plus profondment, ce centre de discursivit s ancre lui-mme dans le temps. C est par son insertion dansle prsent, dont le concept temporel est insparable de la prsence ausens phnomnologique, que les instances de la prdication se trouventhomologues avec celles du sentir: Le rel nous e st prsent ds laprdication et par elle , de mme qu il nous est prs ent au moment de laperception . Et plus loin: Par la perception mais aussi par la prdication, nous nous conjoignons au monde 15

    Cette convergence , ici rapidement esquisse, fonne le contexte gnral o s insre l analyse de la configuration particulire que je voudraisvoquer prsent : j ai associ la vision , l hallucination et la figurativit,pour chercher dmler entre ces trois tennes les paradigmes dsonnaisentrecroi ss du discours et de la sensibilit . L analyse doit donc se tenir proximit de s instance s sujet voyant et objet vu, dans l inti mit de leurfonnation conune dirait le phnomnologue, dans la ngociation continuequi affecte leur statut rciproque et qui pose la question de leur ligne departage. Cela justifie, me semble-t-il , le dtour par la scne cruciale ole sujet de la vision se met radicalement en jeu: la crise hallucinatoire.

    LE REGARD HALLUCIN

    L hallucinat ion dessine une ligne de fuite dans la perception ordinaire, et par l en claire le fonctionnement primordial : pour paraphraser

    13. fbid p 23-24 .14. Jean-Cl aude Coquet, Temps ou aspect ? Le problme du devenir , dans Hennan

    PalTet (dir. , Temps el d isc our s Louvain, Pre sses univer si taire s de Louvain, 1993 , p. 35.5 Ibid. p. 37.

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    VISION,HALLUCINATION ET FIGURATIVlT

    Beckett, on pourrait dire qu'une fonne extrmede vision, commele regardhallucin, fore des troUS dans la perception etpennet d'apercevoir

    ce qui est tapi derrire16 ce niveau d'apprhension,il n'y a doncpas de solution de continuit entre le regard communment partag et leregardhallucin; la brisure de celui-ci est dj contenue dansla vulnrabilit de celui-l.C'est mme dans le parcours instable entre ces deuxralisations du regardque se situerait l'esthsie. L'analyse que MerleauPonty propose du phnomne hallucinatoire invite approfondir cetteperspective.

    L'hallucination dsintgrele rel sous nos yeux et lui substitue unequasi-ralit1 7 : elle est simultanment d-ralisante et para-ralisante.La questionque Merleau-Pontyjuge essentielle ce propos est desavoir si 1 hallucination doit tre comprise comme une vision sansobjet ou seulement une"attitude"favorise par une dgradation de lacroyance8 La mthode de saisie, pour en dcider, consiste se placerau sein du processus lui-mme, dans le milieu effectif o coexistentvision relle et vision hallucine, o elles s'o ffrent concrtementcomme deux voies de l'aperception: comme deux modes de significationdu sensible. Le chass-crois desvisions en conflit et,d'une certainemanire, leur reconnaissance rciproque dans la scne finale duhefd uvre inconnu illustre la co-existence et mme la contamination desvisions. Frenhofer est conduit reconnatre l'imposture de lasienne:

    Tt ou tard, il s'apercevra qu'iln'y a rien sur satoile, s'criePoussin,et Porbus, hsitant, finitpar la lui indiqueren disant : Voyez , et enlui rvlant ainsil 'absence de tout portrait. Mais, inversement, le coursde la vision se transfonne lui aussipour les deux spectateurs : leurcertitude s'altre et ils s'ouvrent la lgitimitd'une autre visibilit

    lorsqu 'ils aperoivent dans un coin de la toilele bout d'un pied nu quisortait de ce chaos de couleurs, de tons, de nuances indcises[" . ] unpiedvivant , ... vivant,comme la Catherine Lescault de Frenhofer19 .Ce dtail, soudainement et incontestablement figuratif,vaut moins parce qu'il signifie quepar ce qu'il provoque, interrompant lejugementinterprtatif et introduisant un autre signifi possible,par lui appel, etd'ordre figuratif: Il y a une femme l-dessous, s'crie Porbus ens'engageant dans une autre vision dela muraillede peinture : celle-ci

    16 Cit par Gilles Deleuze, Crilique el clinique, Paris, Minuit, 1993, p 917 . Maurice Merleau-Ponty,Phnom nologi e de la perception, Paris, Gallimard,1945,

    p.385.18 Maurice Merleau-Ponty,Le primai de la perceplion el ses cons q uences philoso-

    phiques , Paris, Cynara,1989(1934),p. 19 .19 Le che f d uvre inconnu, op Cil., p 436.

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    avait enseveli une figure toute prte se manifester dansun autre ordredu sensible. Ainsi,la valeur assigne et reconnuene renvoie pas un faitbrut, mais un systmede possibles: l'expression rend possible unecommunication,un changede valeurs dont l'quivalent estun ce dontil s'agit , non pasun ce qui a t l20 . L'enjeu modalse situe ds lorsdans l'entrecroisement etle conflit entreun savoir etun croire, dontlersultat pistmique est complexe: l'hallucination est reconnue la foiscomme vrit et comme illusion. L'hallucin, voyanten de et au-delde sa vision saitne pas voir vraiment et voit cependant. Son espacecoexiste avec l'espace normal mais celui-ci est comme noy etensous-impression21 selonla fonnulede Henri Michaux. Et, l'inverse,le regard nonnal consent parcourirle feuillet du visible, larencontrede l'autre regard. L'un et l'autreen mme temps rcusent etadhrent. L'imposture hallucinatoire est celle d'une adhsion quivoque.

    La vision hallucinede Frenhofer n'est pas la perception, maiselle en a la valeur et l'efficience,au point d'avoir pu l'usurper;de mme,dans l'autresens, la perception vraie a pu,un moment, entrer danslergime d'adhsionde la vision hallucine et en accepter l'ordre. L setrouve 1 hypothse centralede l'analyse: une seule et mme oprationmodale, plus profonde quele savoir etle croirequi se disputentla manifestation, sous-tendraitla perception et l hallucination. Cette oprationest de l'ordre dela croyance. Elle raliseun mouvement d'adhsionprimordial qui doit tre saisien lui-mme,en amont du rgimede certitude qui s'tablit dans l'un et l'autre cas. Commele recollllateneffet Porbus, en commenant s'expliquerla vision qu'a Frenhofer

    de son tableau: il est debOlllle foi 22 .Peut-on alors parler d'une structure gnrative du regard ?Lesfonnulationsde Merleau-Ponty sollicitent une telle miseen perspective: au-dessous des perceptions proprement dites,il y a donc, pour lessous-tendre, une fonctionplus profonde sans laquelle l'indicede ralit(nous dirions:le moment figuratif) manquerait aux objets perus [ .. parlaquelle ilsse mettent compter et valoir pour nous. Cette fonctionest le mouvement qui nous installe dansle monde [.. avant toutevrification: i l la nomme l'opinion originaire ou, ailleurs, la foiperceptive(l Urdoxa de Husserl),et nous pouvons l'interprter commela modalit primordiale d'un mta-croire23 . Ce croire profond est

    20. Per Aage Brandt, La charpente modaledu temps , dans Herman Parret(dir.),Temp s el discour s Louvain, Presses universitaires de Louvain, 1993, p. I l l

    21 . Henri Michaux,Conna issa nce p ar les gouffr es Paris, GaJlimard, 1967, p. 12.22. Le ch d uvre inconnu, op. cil., p 436.23 . Le langage indirect et lesvoix du silence, arl . Ci l. p. 394-395; je souligne.

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    VISION. HALLUCINATIONET FIGURATIVIT

    ant-prdicatif: il est de l ordre de la prsupposition.Il indique l amorced une adhsion, antrieure toute assignation et investissement de lavaleur. Il en suscite le pressentiment, mais lavaleurn est encorequ implicite et prsomptive.On peut aisment rapprocher le contenud un telcroire du concept devalence comme nous invite du reste le faire letexte deMerleau-Ponty: l hallucinationvaut comme ralit , lesobjets perusse mettent compter et valoir pour nous, et l on rejointalors, par une autre voie, la dfrnition de ce concept dansSmiotique despassions 24 : la valence met en attente lavaleur investir dansl objetperu,comme dans la catgorisation smantique elle-mme. Or, le mtacroire ainsi isol etstructurconstitue un dispositif modalcommun au

    syntagmeperceptif etau syntagme hallucinatoire. Il est fondateur del un et de l autre procs.On pourrait alors dire que ceux-ci bifurquent,lors de la ralisation figurative, dans deux directions diffrentes.

    Dans la perception, ce croire primordialse convertit en croyanceassume parcequ il est une croyance confirme. Le flux duvisible,sousle regard-sujet,circule alorscomme une valeur change. Tous les spectacles, autres que celuiqu il voit, tous les autres points de vue souslesquelsil sait pouvoir apprhender l objet par une synthse d horizon,sont impliqus danset par le sien actuel. Autrui y est inscrit de fait.Laperception concide avec un nombre infini de parcours perceptifs quiconcordent avec elle et la confortent. Le boug, la transition, la motivation, ces conceptsfluents dont Merleau-Ponty affirme lancessit, forment les oprations micro-syntaxiques quiviennents enporter garantes, assurant la dfinition rciproque dusujet voyantet del objet visible. Ainsi,le parcours de lavisions inscrit-il, profondment,dans unesortede contractualit fiduciaire qui rgule l assignationet lacirculation desvaleursdans la perception. Cette approche implique que laprocessualit propreau parcours perceptif, et notamment son aspiration voir les valeursqu il suscite confirmes et valides, est justiciabled une description en termes smio-narratifs.

    L hallucinn en croit pas tant25 . On pourrait dire qu il ne convertit pas la valence envaleur: il s en tient donc la premire, ce degrprimordial et inabouti de lacroyance.L espace entre le croire etle sujetest un espace disjonctif, non contractualis et marqupar le manque.Manque la prvisibilit qui fonde la circulation etl change: la perception est instabilise et prcarise. Michaux crit propos de l expriencemescalinienne: Je devaisapprendremoi-mme l horrible, trpidante

    24. Smiotique des passiolls op cit. p 47.25 Le langage indirectet les voix du silence, art. cit. p 390

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    exprience que c ' est de changer de tempo, de le perdre, subitement, d'entrouver un autre l a place, incolll1u [ . J dont on ne sa it que faire, rendanttout diffrent, mco nn a iss abl e 26 , Manque aussi le parcours qui conduit

    vers les autres expriences de la perception: le partage intra- et intersubjectif du visible , qui en fonde l ' inhrente prsence . Manque enfinl ' insertion du corps propre dans le paratre qui dfinit , comme l'crivaitGreimas au dbut de De l imperfection 27, notre condition d ' homme :le para tre v rai est bien l , mais le sujet en est ab sent . L'hallucinationn'est pas dans le monde mais devant lui , parce que le corps de l ' hallucin n ' est plus serti dans le systme de l 'apparence 28. Il a , pour contrepartie, ces images intrieures qu'voque Michaux, images dont on nepeut plus se dtacher [ . J qui brisent la tte de celui qui vainement veutse retrouv er dans la pullulation gnrale 29 , Ainsi install dans l 'amontde toute fiducie, l'hallucin ne croit pas la chose mme qu'il voit: sacroyance d v ie s ' applique aux affects qu il y a in vestis et qui en fontsurgir l'image. Cette seule exigence lui suffit. Il reste ainsi en amont du

    figuratif : la figure ne vaut pas en tant que figure et, le plus souvent , ellene se fi xe pa s , elle n'est pas mme gratifie de crdibilit , elle vaut entant que support furtif et occasiolll1el d'une valence , cette ombre devaleur qui en moti ve tout entire la prsence . la base , il y a donccette scission smantique de la figure entre son signifi figuratif et lesignifi pathmique qui s'y dilate : le plat empoisolll1 peru commetel par le sujet hallucin n'offre pas ses yeux les proprits figurati veset fonctiolll1elles du poison, le poison est ici une entit affective .Cette observation de Merleau-Ponty rejoint les descriptions de HenriMichaux dont les visions mescaliniennes ne fixent pas l 'image d'objets ,mais une figuralit mouvante, faite de figures passantes, en de desformes : ondes, entrelacements , vibrations , trames, tressaillements, commes'il s ' agissait de mcanismes figurau x , rgissant la gense des images,

    La mes caline lude la forme [ " ,J Les o bjet s n'ont jamais t vus , mai sont toujours t interprts 30 , Ca r , comme le prcise encore cet exprimentateur de la vision hallucine , la valeur objectale des objets adiminu/leur indpendance objectale 31 ,

    Si, d'un ct, le sentir rapporte les qualits sensibles un objetidentifiable, c'est son vers ant figuratif , il focalise aussi , d ' un autre

    26. Passages , op. cit. , p. 203.27 Algirdas Julien Greima s, D e l i mpe rfec tion, Prigueux, Pierre Fanlac, 198 7.28, Le langage indirect et le s v o ix du silence , art. cit p 391.29. P as sages , op. cit., p. 204 .30 ib id, p . 20-2 131. ibid ., p 188.

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    ct, chaque qualit comme un champ opratoire en rsonance dans cemilieu de qualitsqu est le corps propre, etc est son versant pathmique. Tout se passe donc commesi , dans l'hallucination,le momentfiguratif se trouvait affaibli, la relation avecla figure n'actualisant quela puissance visuelle, le dploiement de sa potentialit subjectale et son affolement L'hallucin ne slectionne donc que ce qui, de la figure,est tournvers le sujet: il en dsolidarise les deux versants et ne conduit la ralisation que les smes pathmiques qui l'ont suscite. Il laboreainsi une conformit d'un ordre particulier, dont les proprits structurelles pourraient tre compares celles du discours passionn. Le milieuqu il construit est conforme son schma pathmique et s'ordonnepartir de lui. Dans cet espace,sujetet objet ne peuvent plustre sparmentinstancis: ils se fondent indissolublement dans lesvalencesdu sensible.

    LE PROCS DU VISIBLE DANSLE CHEF D UVRE INCONNU

    a vision du tableau, telle qu'elle est textualise dansLe h f d uvreinconnu, pourrait tre ainsirsume: les uns peroivent une substancede l'expression laquelle manquela forme du contenu. Poussin et Porbuslient le figuratif etle plastique. Il en rsulte pour eux une smiosisincomplte, ou le scandale d'une non-smiosis. L'autre peroit, non pasune forme du contenu, maisle versantpathmique de cette forme, lequelgnre, pour son proprecompte,une substancede l'expression conforme sa viseintentionnelle. Frenhofer lie le pathique etle figuratif.C est lescandaled une hyper-smiosis. Afin d'identifier les raisons de ce doubledvoiement dela figurativisation, d'analyserle processus qui la gnre

    commeun plan de signification autonome mais instable etde localiserle franchissement des seuils qui en transformela morphologie,je retiendrai deux parcours corrls, qu'illustre et figurativise en abondancelanouvelle deBalzac: le parcours du sens lacunaire et imperfectif et celuidu sens excessif et hyper-perfectif, entre lesquels cherche se fixerl'quilibre incertain dela vision.

    LE SENS LACUNAIRE

    L'inachvement, l'imperfection,la latence, l'inaperu, le non-ditsont inhrents la fois au langage et la vision.Ils n'atteignent jamaisla chose mme. De mme quele langageexprimerait autant par ce quiest entre les mots que par les mots [ ... ] par ce qu'il ne dit pas que parce qu'il dit 32 , comme ces messages qui circulent entre les merles

    32. Le langage indirectet les voix du silence art . cit., p 56.

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    d Ita lo Calvino dont la signification rsiderait dans la varit des

    silences entre leurs sifflements et non dans les sifflements eux-mmes33

    ,de mme le sens qu apporte la vision dborde par principe ce que l onvoit: Voir, c est accder un tre de latence 34 . Cette dimension lacunaire , que dlimite entre autres choses le point de vue, est en mme tempscondition de la vision, elle est promesse d un autre visible et dtennineainsi l appar tenance du sujet voyant au monde qui se manifeste sousses yeux. Or, c est partir de cette incompltude que se dveloppe chezFrenhofer, dans Le chef d uvre inconnu, la qute insense du visible.Ce qui manque la peinture de Porbus qu il critique dans la premirepartie de la nouvelle, c est prcisment cette synthse de transitionqui donne l invisible, en tant qu il est toujours visible d ailleurs, parglissement de point de vue , sa force de ralit. L image de sa femmepeinte sur la toile est, dit-il, une apparence dcoupe qui ne saurait se

    retourner ni changer de position. Je ne sens pas d air entre ce bras et lechamp du tableau 35 L obsdante exigence de Frenhofer est de saisircette signification en sursis, laquelle le signe visible fait toujoursallusion sans l atteindre jamais. ce phnomne de la vision diffre,inachevable, non perfectible et finalement inaccessible, fait cho dans letexte balzacien une structure homologue d attente. Une correspondances tablit, en effet, entre la qute du non-visible partir de ce qui est manifest dans l ordre de la vision, et celle, dans l ordre du discours narratif,du non-nomm partir de ce qui est racont: une mme suspension desnoms de Frenhofer et de Poussin, qui sont longtemps diffrs dans lercit, avant que leur dnomination vienne parachever l identification.Cette observation renforce le caractre la fois central et dceptif, dansle texte, de la dimension lacunaire de la signification. Bref, le manqueautorise ou, plus encore, rclame l excs . Ce vide offert sollicite l invasion du sens, et son expansion. Ce que Frenhofer entend peindre, c est laforce de sa vision elle-mme, son excs de prsence.

    LE SENS EXCESSIF

    L tat du sujet fascin et absorb par ses propres percepts ou, plusencore, par l expansion des affects investis dans ses percepts, conduitfinalement son dpouillement et son anantissement. Comme lemontre l expr ience esthsique de Frenhofer, il se dissout dans un

    33. halo Calvino, Le sifflement du merle dans Palomar, Paris , Seuil, 1985, p. 30.34. Le langage indirect el les voix du silence , arl. cil., p . 29.35. Le che/d uvre inconnu , op Cil . p 416.

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    monde excessif36 . Ainsi la lacune inhrente au langage, qui ouvre lespotentialitsdu sens, rpond l excs dela perception insoutenable, quicherche les actualiser. Paroxysmede la prsence dansla vision hallucine Michaux parle aussi de cettehyperacuit ,de l attention

    prodigieusement prsente [.. J d un conscience ivre de perceptions etde savoirs simultans37 . Une telleintensitdemande tre prcise:plus qu un excs de la prsence,c est bien de la prsence comme excsqu il s agit ici. Aux yeux de Frenhofer,CatherineLescault estl ; ou,plus exactement, elle est prsente dans l acception tymologiquede l adjectif, elle est l avantde son regard,la pointe avance desonregard. Cettevaleurextrmalede la prsence est singulirementclairepar l analyse d mile Benveniste lorsqu il dgagela structure sublogique de la prpositionprae, rgissant la diversit deses contextesd emploi - dont celui depraesens 38 . Il explique ainsi commentpraesensfait entendre non pas ce qui est l, mais ce qui est l avant demoi ,c est--direla partie antrieure etavanced un continu.C est dans cetteacception radicale que le regard de Czanne est prsent sa peintureet son sujet: Les yeux mesortentde la tte [ ..J Ils sont tellementcolls au point que je regarde qu il mesemblequ ils vont saigner39 Il y a danspraesens un sme d imminence, d urgence. Benveniste prcise mme: Ce qui estpraesens ne souffrepas de dlai [...] n est passpar par un intervalle du moment ol on parle. Plus gnralement,signalantla pointe extrme de quelquechose,et particulirement l excsd un affect (prae gaudio, l extrme de ma joie, cet excs mmeexpliquantla valeur causale dela prposition), la structure sub-logiquede prae manifeste donc toujours une valeur paroxystique.

    Telle est la prsence de Frenhofer son tableau.Il porte sa vision en avantde lui . On comprend qu il revendique ainsi le regard rapproch commeune rgle de visibilit.Il prescrit ses interlocuteurs: Approchez,vous verrezmieuxce travail. De loin,l disparat40. Telleest la conditionpour que, de l intrieur dela toile, la figure qu il a projete le regarde et l anime. Or, dans l excessive prsence de la proximit,la distinction diffrentielle productrice du signifi disparat.Il ne reste

    36. De l imperfection, op cit., p. 52.37. Passages. op cit., p. 12.38. Voir mileBenveniste, Le systme sub-Iogiquedes prpositionsen latin , dans

    Problme s de linguistique gnrale , tome l,Paris, Gallimard,1966, p. 132-140.39. Dites, est-ce que je ne suis pas un peu fou? ... L ide fixe de la peinture...

    Frenhofer cit d apr s P.-M. Doran, Conver sations avec Czanne, Paris, Ma cula, nO4,p. 202 ; Georges Didi-Huberman, La peinture incarne, Paris, Minuit, 1985, p. 12.

    40. Le he f d uvre inco nnu , op cil. p 437.

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    plus que le continuwn d une substance , un pt de couleur claire .Cette substance seconde devient alors une chair touche par les yeux , etla fonction optique se transfonne en une fonction haptique 41 . Le sujetfinit par se confondre avec la prsence de sa vision elle-mme. Il y perdson regard.

    CONCLUSION

    L hallucination, tendue entre les dimensions lacunaire et excessiveinhrentes l apprhension du sens, s inscrirai t alors dans un cadre pluslarge. Elle serait rgie, sur le mode intensif qui lui est propre , par unordre gnral du sensible, et fonnerait une configuration spcifique dansune schmatisation des actes perceptifs que manifestent la surface desdiscours les organisations figuratives de la signification. La prdicationfigurative , ainsi rapporte au processus de la vision et son avnement,appelle donc une meilleure intgration de la sensibilit, isole comme unprocessus signifian t spcifique, au sein de la saisie smiotique : cela peutimpliquer, en amont, une redfinition des catgories plastique , figuratif et pathique , rintgrant celle de l actant sujet engag dans lesparcours de la perception; et, en aval, l tude largie des configurationsperceptives o, sur le mme substrat modal du mta-croire, l identit decet actant se diffuse, se dlaie 42 , se spcularise : l extase mystique,le rve, la saisie esthtique. La reconnaissance de proprits communespennettrait de prciser les relations graduelles que ces configurationsentretiennent avec des fonnes extrmes comme celle de l hallucination .C est par un aller et retour entre ce que les textes nous disent de la vision,dont ils faonnent le schma, et l clairage que l analyse du phnomnepsycho-cognitif apporte, que pourrait se consolider une approche de lafigurativit conue non plus comme un arrt sur les impressions rfrentielles, mais comme une traverse incertaine du sensible pennettant demieux saisir les organisations discursives, culturelles et esthtiques de lavision. C est ainsi que le regard du narrateur, dans La recherche dutemps perdu quitte un instant le livre o la lecture l avait absorb etaperoit le monde: Quand je voyais un objet extrieur, la conscienceque je le voyais res tait entre moi et lui, le bordait d un mince liser spirituel qui m empchait de jamais toucher directement sa matire ; elle sevolatilisait en quelque sorte avant que je prisse contact avec elle 43 .

    41. Voir La peinture incarne op. cit.42. Le monde textuel , art. cit.43 . Marcel Proust , Du ct de chez Swann. l Combray , Paris , Gallimard, coll. La

    Pliade , 1954, p. 84.

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