universite de rouen -...

17
- 1 - UNIVERSITE DE ROUEN Année Universitaire 2012-2013 Travaux dirigés 1 ère année Licence Droit INTRODUCTION AU DROIT - Cours de Mme le Professeur Julie KLEIN DEUXIEME SEANCE L’ORGANISATION JUDICAIRE I. PRESENTATION Ayant pour objet de régir la vie en société, la règle de droit doit permettre de régler les contestations qui sélèvent entre les particuliers, ou entre l Etat et les particuliers. Encore faut-il, évidement, pour que ces règles soient efficaces, que soient prévus des mécanismes aptes à assurer son respect et sa mise en œuvre. Dans les sociétés développées et démocratiques , le respect de la règle de droit est assurée par l Etat, qui assume et organise la fonction de juger. Les tribunaux participent ainsi du service public de la Justice. A.- Envisagé ici en termes dorganisation, la justice regroupe un certain nombre dinstitutions et de personnels. Ces institutions doivent être ordonnées et structurées. Pour que soient garantis le respect de la règle de droit et sa bonne application au cas litigieux, le justiciable bénéficie dun double degré de juridiction . Il a un droit à ce que sa cause soit entendue à deux reprises par des juridictions distinctes. Ce principe commande ainsi lexistence de juridictions qui se situent à des degrés différents dans la hiérarchie judiciaires : pour cette raison, on distingue les juridictions dites du premier degré appelées à connaître pour la première fois du litige et les juridictions du second degré, qui en connaitront pour le cas où lune des parties, insatisfaite du premier jugement rendu, souhaiterait voir le litige être jugé à nouveau. Encore faut-il préciser que tous les litiges ne peuvent faire lobjet dun double degré de juridictions, cest-à-dire ne peuvent être jugés en première instance puis en appel. Certains jugements, rendus à propos de litiges de faible importance, ne sont pas susceptibles dappel : dans ce cas, la juridiction ayant statué en première instance aura jugé en premier et dernier ressort. Pour que soit garantie une unité dans lapplication de la règle de droit , sur tout le territoire, il convient quune juridiction unique, placée au sommet de la hiérarchie judiciaire, puisse remplir cette mission : cest le rôle de la Cour de cassation. Celle-ci ne

Upload: lamnhan

Post on 15-Sep-2018

218 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 1 -

UNIVERSITE DE ROUEN Année Universitaire 2012-2013

Travaux dirigés – 1ère année Licence Droit

INTRODUCTION AU DROIT - Cours de Mme le Professeur Julie KLEIN

DEUXIEME SEANCE

L’ORGANISATION JUDICAIRE

I. PRESENTATION Ayant pour objet de régir la vie en société, la règle de droit doit permettre de régler les

contestations qui s’élèvent entre les particuliers, ou entre l’Etat et les particuliers. Encore

faut-il, évidement, pour que ces règles soient efficaces, que soient prévus des mécanismes

aptes à assurer son respect et sa mise en œuvre. Dans les sociétés développées – et

démocratiques –, le respect de la règle de droit est assurée par l’Etat, qui assume et

organise la fonction de juger. Les tribunaux participent ainsi du service public de la Justice.

A.- Envisagé ici en termes d’organisation, la justice regroupe un certain nombre

d’institutions et de personnels. Ces institutions doivent être ordonnées et structurées.

Pour que soient garantis le respect de la règle de droit et sa bonne application au cas

litigieux, le justiciable bénéficie d’un double degré de juridiction. Il a un droit à ce que sa

cause soit entendue à deux reprises par des juridictions distinctes. Ce principe commande

ainsi l’existence de juridictions qui se situent à des degrés différents dans la hiérarchie

judiciaires : pour cette raison, on distingue les juridictions dites du premier degré appelées

à connaître pour la première fois du litige et les juridictions du second degré, qui en

connaitront pour le cas où l’une des parties, insatisfaite du premier jugement rendu,

souhaiterait voir le litige être jugé à nouveau. Encore faut-il préciser que tous les litiges ne

peuvent faire l’objet d’un double degré de juridictions, c’est-à-dire ne peuvent être jugés

en première instance puis en appel. Certains jugements, rendus à propos de litiges de

faible importance, ne sont pas susceptibles d’appel : dans ce cas, la juridiction ayant statué

en première instance aura jugé en premier et dernier ressort.

Pour que soit garantie une unité dans l’application de la règle de droit, sur tout le

territoire, il convient qu’une juridiction unique, placée au sommet de la hiérarchie

judiciaire, puisse remplir cette mission : c’est le rôle de la Cour de cassation. Celle-ci ne

Page 2: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 2 -

constitue pas, il convient de ne jamais l’oublier, un troisième degré de juridiction : elle ne

doit pas juger l’affaire à nouveau. Différemment, elle a pour mission d’apprécier la

décision rendue antérieurement (qui doit l’avoir été, par hypothèse, en dernier ressort – il

faut donc qu’il y ait eu appel, si celui-ci était possible). Elle n’a pas à apprécier à nouveau

les faits du litige, qu’elle ne peut plus discuter. Elle doit uniquement juger de la bonne ou

mauvaise application de la règle de droit par les juges ayant statué au préalable, que l’on

nomme également les juges du fond. Elle doit uniquement juger en droit – et non en fait et

en droit. C’est parce qu’elle est unique et que ses arrêts ont une autorité parfois décisive,

que les décisions qu’elle rend ont vocation, en certaines hypothèses, à influencer sur ce

qui sera à nouveau jugé dans des hypothèses semblables et similaires. Les arrêts de la Cour

de cassation ont, en ce sens, vocation à faire jurisprudence. C’est la une question de fond,

non sans liens évidents avec l’organisation judiciaire, que l’on évoquera un peu plus tard

dans le semestre.

Comme elle ne juge pas les faits et n’a donc pas pour objet de résoudre le litige à l’origine

du procès, elle est logiquement démunie pour mettre un terme à ce litige d’un point de

vue pratique. Aussi, lorsque le jugement ou l’arrêt dont elle a eu à connaître a été mal

rendu, elle doit renvoyer l’affaire devant une nouvelle juridiction : elle casse et renvoie

(v.doc.2)

B.- Cette organisation, qui vient d’être ainsi envisagée verticalement (premier degré,

second degré, Cour de cassation), est également structurée horizontalement. Il n’est en

effet pas possible, à un particulier qui entend voir son litige tranché par un juge, de saisir

n’importe quelle juridiction. Il existe, sur ce point, des règles de compétence qui

déterminent d’une part, les cas dans lesquels il convient de saisir un tribunal d’instance, un

tribunal de grande instance, un tribunal de commerce, un Conseil de prud’hommes, etc.

(v.doc.1) et d’autre part, lequel est compétent territorialement. A cet égard, plusieurs

décrets pris au cours de l’année 2008 ont organisé une modification de la carte judiciaire.

Cette réforme avait pour objet de rééquilibrer la répartition des tribunaux sur l’ensemble

du territoire en fonction des réalités sociales, économiques et démographiques du pays.

Document 1 : L’organisation judiciaire en droit privé (tableau)

Document 2 : Le pourvoi à travers ses différentes phases

II. LE DEROULEMENT DU PROCES ET L’ORGANISATION JUDICAIRE Pour comprendre, concrètement, comment se mettent en œuvre les principes décrits ci-

dessus de façon sommaire et la manière dont se déroule un procès, vous analyserez les

décisions rendues par les différentes juridictions ayant eu à statuer dans la célèbre affaire

Clément-Bayard.

L’essentiel est de comprendre ici la distinction du fait et du droit, la répartition des rôles

entre les juges du fond et la Cour de cassation et, enfin, le mécanisme du pourvoi.

Page 3: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 3 -

Document 3 : Tribunal civ. Compiègne, 19 février 1913, D., 1913.2.181.

Document 4 : Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179.

Document 5 : Req., 3 aôut 1915, D., 1917.1.79.

III. LA DEPROFESSIONNALISATION DE L’ORGANISATION JUDICIAIRE

Si elle obéit à de grands principes intangibles, l’organisation judicaire n’est cependant pas

statique. Elle évolue continuellement, notamment sous l’influence des décisions de la

Cour européenne des droits de l’homme qui obligent la France à renforcer les garanties

processuelles offertes au citoyen, en particulier en matière pénale. Pour ne prendre qu’un

exemple, c’est sous la pression de la Cour européenne des droits de l’homme que le

législateur français a consacré dans la loi du 15 juin 2000 le droit de faire appel des

décisions de cours d’assises ; c’est encore sous son influence qu’il vient dernièrement (Loi

n° 2011-939 du 10 août 2011) d’imposer que les décisions de ces mêmes cours d’assises

soient motivées.

Au-delà, les réformes de l’organisation judiciaire se multiplient afin d’apporter des

remèdes au problème récurrent de l’encombrement des juridictions. La réforme de la

carte judiciaire déjà évoquée participe de ces remèdes, à côté d’autres mesures techniques

telle l’instauration par une loi du 25 juin 2001 d’une procédure d’admission, et donc de

filtrages, des pourvois en cassation. L’idée est alors de mieux répartir et de sélectionner le

contentieux.

Mais le remède le plus spectaculaire apporté à l’encombrement des juridictions réside sans

aucun doute dans la création par la loi du 9 septembre 2002 dans le ressort de chaque

cour d’appel de juridictions de premières instances appelées juridictions de proximité.

L’objectif de la création de cette nouvelle juridiction est de rapprocher la justice du

justiciable mais surtout de permettre un règlement rapide des « petits litiges » tout en

désengorgeant les tribunaux d’instance.

Document 6 : Articles L. 231-1 s. du Code de l’organisation judiciaire.

La création de ces juridictions de proximité participe également d’un mouvement plus

général de déprofessionnalisation de l’organisation judicaire. En effet, alors que le

service public de la justice est traditionnellement assuré par des magistrats professionnels

formés à l’ENM, de plus en plus d’individus qui ne font pas partie de la magistrature

exercent les fonctions de juge.

A dire vrai, le constat n’est pas complément nouveau : les juges du tribunal de commerce

ne sont pas des magistrats mais des commerçants, le conseil des prud’hommes est

constitué non pas de magistrats mas de représentants des salariés et des employeurs.

Toutefois, jusqu’alors, la pratique restait très marginale.

Page 4: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 4 -

Désormais, à travers la création des juridictions de proximité, ce sont l’ensemble des

litiges de droits commun qui sont concernés par le mouvement de déprofessionnalisation

de l’organisation judiciaire.

Une telle déprofessionnalisation a toutefois suscité de nombreuses critiques. On peut en

effet s’interroger sur l’efficacité de cette nouvelle juridiction et surtout sur les

compétences de ces juges de proximité dont on n’exige qu’une formation juridique

élémentaire. La déprofessionnalisation peut dégénérer en amateurisme, comme le révèlent

certaines décisions.

Document 7 : Les juridictions et juges de proximité – Leur rôle en matière d’accès à la

justice des petits litiges civils. Etude rédigée par une équipe de recherche du CERCRID

de l’Université de Saint-Etienne, JCP, 2009, I, 106 (extraits).

Document 8 : Cass. civ. 2ème, 14 septembre 2006, Bull. civ. II, n° 222.

Ces critiques ont porté leurs fruits, au point que l’article 1er de la loi n° 2011-1862 du 13

décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines

procédures juridictionnelles a pris acte de l’échec des juridictions de proximité en les

supprimant à compter du 1er janvier 2013. La loi maintient néanmoins les juges de

proximité et les rattache au tribunal de grande instance en modifiant leurs attributions.

Document 9 : Article 1er de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011.

L’échec des juridictions de proximité n’a toutefois pas mis fin au mouvement de

déprofessionnalisation de l’organisation judiciaire.

Il faut dire que cette déprofessionnalisation croissante de l’organisation judiciaire ne sert

pas seulement la lutte contre l’encombrement des juridictions. Elle s’inscrit également

dans une politique de défiance vis-à-vis des magistrats professionnels.

La déprofessionnalisation n’est plus alors une réponse pragmatique à un problème

structurel d’encombrement des juridictions ; elle devient une réponse idéologique à

l’indépendance statutaire des magistrats.

La réforme visant à intégrer dans les tribunaux correctionnels et auprès des juges de

l’application des peines des jurés populaires au côté des magistrats professionnels, dont

l’expérimentation a été récemment gelée, en témoigne.

Document 10 : Articles 399-1 s. du Code de procédure pénale.

Document 11 : F. Rome, Justice populaire ou populiste ?; D., 2011, p. 665.

EXERCICE : Outre la lecture des documents, vous devrez tout d’abord faire un effort

pour maitriser le vocabulaire important et nouveau qui permet d’évoquer le déroulement

Page 5: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 5 -

du procès et l’organisation judiciaire : la différence entre les jugements et les arrêts, le taux

du ressort, statuer en premier et dernier ressort, casser, rejeter, débouter, infirmer,

interjeter appel, se pourvoir en cassation, un moyen, les motifs, le visa, un moyen, une

branche, etc…

Vous devrez ensuite avoir parfaitement compris l’organisation judicaire elle-même et, tout

particulièrement, le rôle et le fonctionnement de la Cour de cassation.

Vous devrez enfin vous familiariser pour la première fois avec la lecture d’arrêt. Dans ce

contexte, vous devrez identifier, au sein des arrêts rendus par la Cour de cassation le 3

août 1915 (Doc. 5) et le 14 septembre 2006 (Doc. 8), les éléments suivants :

- le visa,

- les faits,

- la procédure,

- la solution de la cour d’appel,

- la solution de la Cour de cassation.

Pour y parvenir, quelques conseils de méthodes :

Vous avez de la chance : un arrêt de la Cour de cassation obéit toujours à la même

structure (différente cependant selon que l’on est en présence d’un arrêt de cassation ou

d’un arrêt de rejet), ce qui facilite l’identification de ces différents éléments.

En présence d’un arrêt de cassation, l’arrêt débutera par le visa du texte sur lequel se

fonde la décision, éventuellement accompagné d’un attendu de principe au terme duquel

la Cour de cassation énoncera la règle de droit qu’elle applique. Ensuite, l’arrêt reprendra

les faits et la procédure de l’espèce, puis rappellera la solution retenue par l’arrêt de la cour

d’appel contre lequel le pourvoi a été formé avant d’énoncer la solution de la Cour de

cassation.

En présence d’un arrêt de rejet, l’arrêt débutera par le rappel des faits et de la procédure

applicable à l’espèce, puis rappellera la solution retenue par la cour d’appel avant de

présenter les moyens développés par le pourvoi, et d’énoncer la solution de la Cour de

cassation.

Pour ne pas vous tromper entre les moyens du pourvoi et la solution de la cour d’appel

par exemple, il faut être très méthodique et faire attention aux différentes conjonctions

« alors que », « mais attendu que »… qui sont là pour vous guider, comme vous le

montrera votre chargé de travaux dirigés.

Armez vous de stylos de couleurs (surligneurs par ex.) et affectez à chacun des éléments

que vous pouvez rencontrer (le visa, les faits, la procédure, la solution de la cour d’appel,

les moyens du pourvoi, la solution de la cour de cassation) une couleur distincte. Il ne

vous reste plus alors qu’à identifier les différents éléments en respectant votre code

couleur.

Page 6: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 6 -

Page 7: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 7 -

Document 2 : Le pourvoi à travers ses différentes phases

Page 8: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 8 -

Document 3 : Tribunal civ. Compiègne, 19 février 1913, D., 1913.2.181.

Page 9: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 9 -

Document 4 : Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179.

Document 5 : Req., 3 aôut 1915, D., 1917.1.79.

Page 10: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 10 -

Document 6 : Articles L. 231-1 s. du Code de l’organisation judiciaire.

Page 11: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 11 -

Document 7 : Les juridictions et juges de proximité – Leur rôle en matière d’accès

à la justice des petits litiges civils. Etude rédigée par une équipe de recherche du

CERCRID de l’Université de Saint-Etienne, JCP, 2009, I, 106 (extraits).

Page 12: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 12 -

Document 8 : Cass. civ. 2ème, 14 septembre 2006, Bull. civ. II, n° 222.

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme X..., qui avait donné en location à M. et Mme Y..., pendant une période estivale, une caravane et ses accessoires, a été condamnée par une juridiction de proximité à leur payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts ; Sur le premier moyen, pris en sa première branche : Vu l’article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; Attendu que, pour condamner Mme X..., le jugement retient notamment "la piètre dimension de la défenderesse qui voudrait rivaliser avec les plus grands escrocs, ce qui ne constitue nullement un but louable en soi sauf pour certains personnages pétris de malhonnêteté comme ici Mme X... dotée d’un quotient intellectuel aussi restreint que la surface habitable de sa caravane, ses préoccupations manifestement strictement financières et dont la cupidité le dispute à la fourberie, le fait qu’elle acculait ainsi sans état d’âme et avec l’expérience de l’impunité ses futurs locataires et qu’elle était sortie du domaine virtuel où elle prétendait sévir impunément du moins jusqu’à ce jour, les agissements frauduleux ou crapuleux perpétrés par elle nécessitant la mise en œuvre d’investigations de nature à la neutraliser définitivement" ; Qu’en statuant ainsi, en des termes injurieux et manifestement incompatibles avec l’exigence d’impartialité, le juge a violé le texte susvisé ; Sur le deuxième moyen : Vu l’article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 1353 du code civil et 455 du nouveau code de procédure civile ; Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; Attendu que, pour écarter les éléments de preuve produits par Mme X..., le jugement énonce notamment "que si la présente juridiction conçoit aisément que les requérants aient dû recourir à des attestations pour étayer leurs allégations, elle ne saurait l’accepter de la bailleresse, supposée de par sa qualité, détenir et produire à tout moment, sauf à s’en abstenir sciemment et dès lors fautivement, tous documents utiles, que si Mme X... disposait d’éléments autrement plus probants mais certainement très embarrassants à produire auprès de la juridiction de céans que toutes les attestations sans exception aucune, de pure et manifeste complaisance dont elle a cru mais à tort qu’elles suffiraient à corroborer ces allégations, il échet de déclarer ces dernières mensongères et de les sanctionner" ;

Page 13: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 13 -

Qu’en statuant par des motifs inintelligibles et en écartant par une pétition de principe certains des éléments de preuve produits par Mme X..., rompant ainsi l’égalité des armes, le juge a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 26 mai 2004, entre les parties, par la juridiction de proximité siégeant dans le ressort du tribunal d’instance de Toulon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant par la juridiction de proximité siégeant dans le ressort du tribunal d’instance de Marseille.

Document 9 : Article 1er de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011.

Chapitre Ier : Suppression de la juridiction de proximité et maintien des juges de

proximité

Article 1

I. ― Le code de l'organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Après le chapitre Ier du titre II du livre Ier, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :

« Chapitre Ier bis

« Les juges de proximité

« Art. L. 121-5. ― Le service des juges de proximité mentionnés à l'article 41-17 de

l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de

la magistrature, appelés à exercer des fonctions de juge d'un tribunal de grande instance et

à être chargés de fonctions juridictionnelles dans un tribunal d'instance, est fixé

conformément aux dispositions du présent chapitre.

« Art. L. 121-6. ― Chaque année, le président du tribunal de grande instance répartit les

juges de proximité dans les différents services de la juridiction auxquels ils peuvent

participer en tenant compte de leurs fonctions au tribunal d'instance à l'activité duquel ils

concourent.

« Art. L. 121-7. ― Chaque année, le magistrat chargé de la direction et de l'administration

du tribunal d'instance organise par ordonnance le service dont les juges de proximité sont

chargés au sein de ce tribunal, en tenant compte de celui auquel ils sont astreints au

tribunal de grande instance.

Page 14: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 14 -

« Art. L. 121-8. ― Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent

chapitre. Il précise les conditions dans lesquelles la répartition des juges de proximité peut

être modifiée en cours d'année. » ;

(…)

III. ― 1. Le titre III du livre II du code de l'organisation judiciaire, la section 2 du chapitre

II du titre III du livre V du même code, la section 3 du chapitre II du titre V du même

livre V, la section 3 du chapitre II du titre VI dudit livre V, les articles 522-1,522-2 et 523-

1 du code de procédure pénale et l'article 41-18 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22

décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature sont abrogés.

2. A l'intitulé du chapitre Ier du titre III du livre II du code de procédure pénale, les mots

: « et de la juridiction de proximité » sont supprimés.

Document 10 : Articles 399-1 s. du Code de procédure pénale.

Paragraphe 2 : Du tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne

Article 399-1

Pour le jugement des délits énumérés à l’article 399-2, le tribunal correctionnel est

composé, outre des trois magistrats mentionnés au premier alinéa de l’article 398, de deux

citoyens assesseurs désignés selon les modalités prévues au sous-titre II du titre

préliminaire. Il ne peut alors comprendre aucun autre juge non professionnel.

Article 399-2

Sont jugés par le tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne, en application de

l’article 399-1, les délits suivants :

1° Les atteintes à la personne humaine passibles d’une peine d’emprisonnement d’une

durée égale ou supérieure à cinq ans prévues au titre II du livre II du code pénal ;

2° Les vols avec violence prévus au dernier alinéa de l’article 311-4, au 1° et au dernier

alinéa de l’article 311-5 et à l’article 311-6 du code pénal, ainsi que les extorsions prévues

aux articles 312-1 et 312-2 du même code ;

3° Les destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes

passibles d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans

prévues à la section 2 du chapitre II du titre II du livre III du code pénal ;

Le tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne n’est toutefois pas compétent pour

le jugement des délits prévus au présent article lorsqu’il s’agit d’un délit mentionné aux

articles 706-73 et 706-74 ou, sous réserve des dispositions de l’article 399-3, mentionné à

l’article 398-1 du présent code.

Article 399-3

Page 15: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 15 -

Le tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne est également compétent pour

connaître des contraventions connexes aux délits énumérés à l’article 399-2.

Il est également compétent pour connaître, lorsqu’ils sont connexes à ceux énumérés au

même article, les délits prévus aux 2° à 5° et 7° bis de l’article 398-1 du présent code ainsi

que les délits d’atteintes aux biens prévus au chapitre Ier du titre Ier et aux chapitres Ier et

II du titre II du livre III du code pénal.

Hors les cas prévus au présent article, le tribunal statue dans la composition prévue au

premier alinéa de l’article 398 pour le jugement des délits prévus à l’article 399-2 du

présent code lorsqu’ils sont connexes à d’autres délits.

Article 399-4

Les décisions sur la qualification des faits, la culpabilité du prévenu et la peine sont prises

par les magistrats et les citoyens assesseurs. Sur toute autre question, les décisions sont

prises par les seuls magistrats.

Article 399-5

Si, dans une même affaire, tous les prévenus poursuivis pour un délit mentionné à l’article

399-2 sont jugés par défaut, le tribunal examine l’affaire dans sa composition prévue au

premier alinéa de l’article 398.

Article 399-6

Lorsque l’action de la partie civile n’est pas jointe à celle du ministère public, le tribunal

correctionnel statue dans sa composition prévue au premier alinéa de l’article 398 pour

fixer le montant de la consignation en application de l’article 392-1.

Article 399-7

L’ordonnance prévue au premier alinéa de l’article 179 précise, s’il y a lieu, que les faits

relèvent de l’article 399-2 et que l’affaire est renvoyée devant le tribunal correctionnel

dans sa formation citoyenne.

Article 399-8

Lorsque le tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne est saisi selon la procédure

de comparution immédiate et qu’il est fait application de l’article 396, le délai de trois

jours ouvrables prévu à l’avant-dernier alinéa de ce même article est porté à huit jours.

La durée de la détention provisoire exécutée en application dudit article 396 s’impute sur

la durée prévue aux deux derniers alinéas de l’article 397-3.

Article 399-9

Page 16: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 16 -

Lorsque le tribunal correctionnel composé conformément au premier alinéa de l’article

398 constate que la qualification retenue dans l’acte qui le saisit entre dans les prévisions

de l’article 399-2, il renvoie l’affaire devant le tribunal correctionnel dans sa formation

citoyenne.

S’il a été saisi selon la procédure de comparution immédiate, le tribunal correctionnel peut

ordonner le placement sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire du prévenu

jusqu’à la date de l’audience de renvoi. Quelle que soit la procédure selon laquelle il a été

saisi, il peut ordonner le maintien de ces mesures de sûreté jusqu’à cette date lorsque le

prévenu en faisait l’objet lors de sa comparution.

Article 399-10

Lorsque le tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne constate que la qualification

retenue dans l’acte qui le saisit relève du tribunal correctionnel composé conformément

au premier alinéa de l’article 398, l’affaire est jugée immédiatement par les seuls magistrats.

Lorsqu’il constate que la qualification retenue dans l’acte qui le saisit relève du tribunal

correctionnel composé conformément au troisième alinéa du même article 398, l’affaire

peut être soit renvoyée devant le tribunal correctionnel ainsi composé, soit jugée

immédiatement par le seul président.

Article 399-11

Lorsque le tribunal correctionnel dans sa composition prévue au troisième alinéa de

l’article 398 constate que la qualification retenue dans l’acte qui le saisit relève de l’article

399-2, il renvoie l’affaire devant le tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne.

Page 17: UNIVERSITE DE ROUEN - jktd.frjktd.fr/data/uploads/introduction-au-droit-seance-2-lorganisation... · Document 4: Amiens, 12 novembre 1913, D., 1917, 1, 179. ... telle l’instauration

- 17 -

Document 11 : F. Rome, Justice populaire ou populiste ? ; D., 2011, p. 665.