une production de needcompany. coproduction
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Une production de Needcompany. Coproduction: Kunstenfestivaldesarts, KunstFestSpiele Herrenhausen,
FIBA - Festival Internacional de Buenos Aires, KĂŒnstlerhaus Mousonturm. Avec le soutien des autoritĂ©s flamandes.
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Jan Lauwers & Needcompany
Texte, mise en scĂšne, images Jan Lauwers
Musique Maarten Seghers
Avec Grace Ellen Barkey, Jules Beckman, Anna Sophie Bonnema, Hans Petter MelĂž Dahl, BenoĂźt Gob,
Maarten Seghers, Mohamed Toukabri, Elke Janssens, Jan Lauwers
Costumes Lot Lemm
Costume Mohamed Bachir bin Ahmed bin RhaĂŻem El Toukabri
Dramaturgie & sur-titrage Elke Janssens
LumiĂšres, concept Marjolein Demey, Jan Lauwers
Son, concept Ditten Lerooij,
Son Ditten Lerooij/Marc Combas
Directeur de production Marjolein Demey
Technique de la production Marjolein Demey, Kurt Bethuyne
Réalisation technique des décors De Muur, X-Treme
Soutien logistique Irmgard Mertens
Assistante costumes Lieve Meeussen
Stagiaire mise en scĂšne Lisaboa Houbrechts
Stagiaires Technique Pablo PĂ©rez Albalaejo, Ludovicus Grevendonk
Introduction dramaturgique Erwin Jans
Conseil dramaturgique Jef Lambrecht, Lucas Catherine, Taha Adnan
Traduction française Olivier Taymans
Traduction anglaise Gregory Ball
Photographie Maarten Vanden Abeele
Diffusion en France
ScĂšne Nationale de SĂšte et du bassin de Thau / Fabrique - production
Florence Marguerie +33 4 67 18 68 68
Une production de Needcompany. Coproduction: Kunstenfestivaldesarts, KunstFestSpiele Herrenhausen,
FIBA - Festival Internacional de Buenos Aires, KĂŒnstlerhaus Mousonturm. Avec le soutien des autoritĂ©s flamandes.
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Anna Komnene, Alexiade, 1148
Peut-ĂȘtre vaudrait-il mieux changer de nature pour devenir une chose privĂ©e de tout sentiment
plutĂŽt que dâĂȘtre si sensible au mal.
DĂ©cret Royal de 1567,
Andalousie
Nous, les rois chrĂ©tiens, Ordonnons que personne nâait le droit de parler, lire ou Ă©crire la langue arabe en public ou en privĂ©, et que chacun
parle, lise et communique dans notre propre langue. Les vendredis aprĂšs-midi, dimanches et jours fĂ©riĂ©s lors de noces ou de la publication des bans ou tout autre jour, il ne sera tenu aucune fĂȘte dansante ou fĂȘte nocturne avec
de la musique arabe. Il a Ă©galement Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© que dĂšs Ă prĂ©sent, les femmes devront maintenir leur visage dĂ©couvert⊠et en outre, le visiteur des bains qui se lavera les bras, les mains, les coudes, le visage, la bouche, le nez,
les oreilles et les jambes sera en faute, et plus encore celui qui se lavera les partiesâŠ
Statue dâAbu alâala al Maâarri, fĂ©vrier 2013, Maâarat al-Nuâman, au sud dâAlep, Syrie
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Jan Lauwers a Ă©crit âLe poĂšte aveugleâ en collaboration Ă©troite avec le compositeur Maarten Seghers. Jan Lauwers
sâinspire des arbres gĂ©nĂ©alogiques des performers pour Ă©crire une nouvelle histoire, basĂ©e sur leurs diffĂ©rentes
nationalitĂ©s, cultures et langues. Il revient mille ans en arriĂšre pour mĂ©diter sur la notion dâidentitĂ© dans lâEurope
multiculturelle dâaujourdâhui. Il plonge dans lâĆuvre dâAbu al âala al Maâarri, poĂšte arabe aveugle des Xe-XIe siĂšcles,
et de Wallada bint al Mustakfi, une poĂštesse andalouse du XIe siĂšcle. Leurs Ćuvres sont lâĂ©cho dâun temps oĂč les
femmes Ă©taient puissantes et lâathĂ©isme courant, oĂč Paris nâĂ©tait quâune petite ville de province et Charlemagne, un
analphabĂšte notoire. LâHistoire est Ă©crite par les vainqueurs. Par les hommes. Combien, au juste, de mensonges, de
rencontres fortuites, dâaccidents de parcours ont dĂ©terminĂ© lâhistoire que nous connaissons? A propos de femmes qui
jettent des pierres et finissent au bĂ»cher. A propos dâun croisĂ© Ă lâarmure Ă©triquĂ©e.
Image de répétition © Bea Borgers
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Lorsque lâesprit est hĂ©sitant,
Il se laisse submerger par le monde,
Homme faible embrassé par une catin.
Lorsque lâesprit est devenu confiant,
Le monde est une dame de rang,
Qui refuse la caresse de ses amants.
Abu al âala al Maâarri (vers 950)
Le poĂšme ci-dessus est du poĂšte syrien aveugle Abu al âala al Maâarri.
« LâidĂ©e de « Le poĂšte aveugle » est nĂ©e lors de ma visite Ă la grande mosquĂ©e de Cordoue. Au milieu de cet Ă©difice
unique aux trois cents colonnes, lâĂ©glise catholique a dĂ©truit une sĂ©rie de colonnes pour y Ă©riger une cathĂ©drale. La
cathĂ©drale paraĂźt petite et un peu grotesque au milieu de cette architecture âmauresqueâ sophistiquĂ©e. JâĂ©tais
interloqué devant tant de maladresse historique.
Cordoue Ă©tait la capitale de ce monde-lĂ , avec ses 300.000 Ă 1 million dâhabitants. Les femmes Ă©taient puissantes,
traduisaient Platon, lâathĂ©isme Ă©tait courant. Plusieurs bibliothĂšques, plus de 600.000 livres, et cetera. A titre de
comparaison : la plus grande ville du monde chrétien était Paris, avec environ 30.000 habitants. La plus grande
bibliothÚque chrétienne comptait 60.000 livres, et Charlemagne était analphabÚte.
Quâest-ce que cela signifie au juste ? Pourquoi lâhistoire nous ment-elle et nous trompe-t-elle toujours ? Lâhistoire est
Ă©crite par les vainqueurs. Par des hommes. Par des individus qui dictent Ă la masse ce quâelle doit faire.
Dans la Cordoue du 11e siĂšcle, les femmes Ă©taient les Ă©gales des hommes. Du moins, les femmes musulmanes. Les
femmes chrétiennes les jugeaient trop inconvenantes, trop dangereuses.
Cette histoire de Cordoue n'est qu'un exemple parmi de nombreux autres de la façon dont l'histoire vient à nous. « Le
poÚte aveugle » parcourt l'histoire à travers les arbres généalogiques de tous les membres de Needcompany. Ainsi,
nous avons constaté que chacun a quelque part un lien ou une correspondance avec tout le monde. L'un de mes
ancĂȘtres Ă©tait armurier Ă l'Ă©poque de Godefroid de Bouillon, et il a rejoint sa croisade. Ils sont passĂ©s par l'Allemagne,
oĂč l'ancĂȘtre de Grace Ellen Barkey les a reçus en tant que maire.
Par Dieu je cherche lâhonneur et la gloire, et je parcours trĂšs dignement mon propre chemin
A mon amant jâoffre mes joues, et mes lĂšvres, je les donne Ă qui les veut.
Wallada bint al Mustakfi (Cordoue, 1000)
Combien, au juste, de mensonges, de rencontres fortuites, dâaccidents de parcours ont dĂ©terminĂ© lâhistoire que nous
connaissons ?
A propos de femmes qui jettent des pierres et finissent au bûcher.
A propos dâun croisĂ© Ă lâarmure Ă©triquĂ©e. »
Jan Lauwers
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Massacre in Antioch, Gustav Doré
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Le monde nâest pas en cause
Alors pourquoi donner la faute au monde ?
Abu alâala al Maâarri (973 - 1057)
Depuis La chambre dâIsabella (2004), ce qui se trouve au centre des spectacles de Needcompany, câest le
groupe : ce rĂ©seau fragile de relations conscientes et inconscientes, visibles et secrĂštes entre membres dâune
famille, amis et inconnus. Les récentes paraboles théùtrales de Jan Lauwers partagent une trame identique :
un groupe ou une communauté est déséquilibré par un nouveau venu ou par un événement inattendu, et
se voit contraint de se redĂ©finir. La question de lâ(im)possibilitĂ© du vivre ensemble est devenue le thĂšme
principal des spectacles de Lauwers. Câest le cas de la maniĂšre la plus explicite dans la production prĂ©cĂ©dente
de Lauwers, Place du marché 76, dans laquelle une petite communauté est touchée par un grand désastre,
se retrouve traumatisĂ©e et dĂ©structurĂ©e, et part Ă la recherche dâune nouvelle source de vie.
Le poĂšte aveugle semble sâĂ©carter de ce schĂ©ma. Tandis que Place du marchĂ© 76 se dĂ©roule dans lâespace
public et interroge lâidentitĂ© collective, Le poĂšte aveugle se concentre sur les individus. Lauwers a laissĂ©
derriĂšre lui la parabole au profit du portrait, il a Ă©changĂ© lâhistoire du groupe contre lâhistoire de lâindividu.
Pour sept comĂ©diens de la troupe â Grace Ellen Barkey, Jules Beckman, Anna Sophia Bonnema, Hans Petter
MelĂž Dahl, BenoĂźt Gob, Mohamed Toukabri, Maarten Seghers â Lauwers a Ă©crit sept portraits, sept cartes
dâidentitĂ© qui commencent Ă chaque fois par la mĂȘme formule : « Je suis⊠». Ce sont des hommages
affectueux Ă ses comĂ©diens quâa Ă©crits Lauwers. Il offre littĂ©ralement Ă chacun dâentre eux la scĂšne, et donc
la pleine attention du public, pour un laps de temps. Mais de la mĂȘme façon que ses paraboles se dĂ©ploient
comme des rĂ©cits sociĂ©taux, ces portraits individuels ouvrent eux aussi une fenĂȘtre sur la grande histoire.
Pour les âcartes dâidentitĂ©â de ses sept comĂ©diens, Lauwers sâest basĂ© sur leurs arbres gĂ©nĂ©alogiques
respectifs. Pour certains portraits, il se sert des rĂ©cits sur les ancĂȘtres pour sâimmerger profondĂ©ment dans
la trouble histoire du monde, tandis que pour dâautres, il reste accrochĂ© aux perturbations des histoires
familiales humaines, trop humaines. Peu importe, dans le fond, oĂč exactement la rĂ©alitĂ© devient fiction et,
inversement, oĂč la fiction raconte Ă nouveau la vĂ©ritĂ©, oĂč lâimagination de lâauteur prend des libertĂ©s avec
les biographies de ses comĂ©diens. Peu importe aussi que les comĂ©diens sâidentifient Ă leurs ancĂȘtres et
semblent avoir menĂ© la vie de ces derniers. LâidentitĂ© est toujours aussi dĂ©sir, construction et imagination.
En images surrĂ©alistes, grotesques, kitsch et tragicomiques, Lauwers dĂ©compose le temps et lâespace :
« Nous sommes les marins et les explorateurs qui vivent dans un anti-temps, » dit lâun des comĂ©diens.
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Un anti-temps plein dâinsoutenable lĂ©gĂšretĂ©, dâhumour, de banalitĂ©, de clichĂ©s, de profond sĂ©rieux et
dâamour tout aussi profond.
Le portrait de Grace Ellen Barkey et de ses ancĂȘtres nous conduit en IndonĂ©sie, en Chine, en Allemagne, aux
Pays-Bas et en Belgique : « Je suis un miracle multiculturel. Grace Ellen Barkey. Multiculturalité. » Mohamed
Toukabri prĂ©fĂšre les choses simples : « HĂ© Grace, tu es peut-ĂȘtre un miracle multiculturel, mais moi je suis
la monoculture la plus pure. Un sang pur coule dans mes veines. Dans les veines de musulman de Mohamed
Toukabri. Touche. Une parfaite peau de musulman monoculturel, un parfait corps de musulman
monoculturel. » Avec lâarbre gĂ©nĂ©alogique de Maarten Seghers, hĂ©ritier de quarante gĂ©nĂ©rations
dâarmuriers, on se retrouve dans la premiĂšre Croisade (1096-1099) sous le commandement de Godefroid de
Bouillon. Le comĂ©dien norvĂ©gien Hans Petter MelĂž Dahl ne peut ĂȘtre quâun Viking, et sa femme Anna Sophia
Bonnema est une Mennonite de Frise. On nâĂ©chappe pas aux clichĂ©s culturels : « Les Frisons tiennent mieux
lâalcool que les Vikings. » Lâarbre gĂ©nĂ©alogique de BenoĂźt Grob ne nous emmĂšne pas plus loin que le Delhaize
et les bordels de LiĂšge : « Mon pĂšre buvait plus que tous ces Vikings et croisĂ©s rĂ©unis. Mon pĂšre nâavait pas
besoin de bateau pour conquérir le monde. Il partait naviguer sur la Meuse dans un tonneau à biÚre vide. »
Il sâavĂšre que, par le biais dâun ancĂȘtre, Ferdinand Hamer, Anneke Bonnema a elle aussi Ă©tĂ© en contact avec
la Chine. Personne ne sait pourquoi Ferdinand est parti pour la Chine, mais son navire se trouvait dans le
détroit de la Sonde entre Java et Sumatra lorsque, en août 1883, le volcan Krakatoa entra en éruption avec
une violence sans prĂ©cĂ©dent. Les ondes de choc dans lâatmosphĂšre Ă©taient tellement puissantes quâelles
firent sept fois le tour de la terre. Les catastrophes naturelles sont mondialisées depuis toujours : « La
poussiĂšre du Krakatoa est aspirĂ©e dans la stratosphĂšre et se dĂ©pose sur dâinnombrables corps et relie tout
Ă tout le monde. Câest pourquoi je suis tout le monde et le monde câest moi. Et câest pourquoi il est bon que
nous ne parlions que de nous-mĂȘmes. Car câest cela la vĂ©ritable histoire. Câest cela le vĂ©ritable amour. Tout
le reste nâest que faux en Ă©criture. »
Câest une belle pensĂ©e : je suis tout le monde et le monde câest moi. Mais ce nâest pas la pensĂ©e qui
prĂ©domine actuellement, bien au contraire. LâEurope â et pas seulement elle â est traversĂ©e par le spectre
de la âbĂȘte identitaireâ. Le dictionnaire dĂ©finit âlâidentitĂ©â comme âunitĂ© dâĂȘtre, correspondance totale, Ă©galitĂ©
personnelleâ. LâidentitĂ© ressemble ainsi Ă un havre de paix et dâharmonie. Pourtant, lâĂ©crivain franco-libanais
Amin Maalouf parle dââidentitĂ©s meurtriĂšresâ : « [Le mot âidentitĂ©â] commence par reflĂ©ter une aspiration
lĂ©gitime et soudain il devient un instrument de guerre. Le glissement dâun sens Ă lâautre est imperceptible,
comme naturel, et nous nous y laissons tous prendre quelquefois. » Maalouf sait de quoi il parle : son pays
natal, le Liban, a Ă©tĂ© dĂ©chirĂ© de 1975 Ă 1990 par une guerre civile sanglante qui a vu sâaffronter de nombreux
groupes ethniques et factions religieuses.
LâidentitĂ© culturelle est revendiquĂ©e comme un âheimâ : un âfoyerâ, une âmaisonâ, un âchez-soiâ. Mais comme
lâa observĂ© Freud, notre maison est Ă©galement le lieu de lââunheimlicheâ. Il y a quelque chose de
fondamentalement âunheimlichâ qui est prĂ©sent dans la culture, et qui ne se laisse pas domestiquer. VoilĂ
pourquoi une culture nâest jamais le lieu oĂč nous pouvons nous sentir entiĂšrement chez nous, une âdomusâ
dans laquelle nous vivons en tant que membres dâune mĂȘme famille, dâune mĂȘme tribu, du mĂȘme sang. Les
idĂ©ologies dâextrĂȘme-droite, racistes et intĂ©gristes cherchent Ă re-domestiquer la culture â qui est toujours
habitĂ©e par lâautre â en un espace âfamilialâ pur, un espace qui nâa jamais existĂ© et qui nâest possible en tant
quâidĂ©al que par la violence et lâexclusion : « Lâhomo re-domesticus au pouvoir tue dans les rues aux cris de :
Vous nâĂȘtes pas de ma maison. Il prend lâhĂŽte en otage. Il persĂ©cute tout ce qui migre. Il le met au secret
dans ses caves, le rĂ©duit en cendres au fond de ses basses plaines. » (Jean-François Lyotard) La bĂȘte
identitaire porte de nombreux noms monstrueux : de la destruction des juifs Ă Auschwitz Ă la purification
ethnique de Sarajevo, du gĂ©nocide rwandais Ă lâhorreur de lâĂtat islamique. Mais la bĂȘte identitaire se
manifeste aussi sous des formes plus modestes, dans les clichés et préjugés banals, sous les traits du racisme
quotidien et de lâexclusion.
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Quand on parle de différences culturelles, les blagues ne tardent jamais à fuser : Un Hollandais, un Belge et
un Marocain sont dans un cafĂ©. Le Hollandais dit : « ⊠! » Des soupapes pour Ă©vacuer le malaise, lâangoisse
et lâagitation intĂ©rieure ? Le vĂ©ritable Ă©tranger se trouve en nous. Comment pourrions-nous lâexpulser sans
nous dĂ©truire nous-mĂȘmes ?
« Tu ne maltraiteras point lâĂ©tranger, et tu ne lâopprimeras point, car vous avez Ă©tĂ© Ă©trangers dans le pays
dâĂgypte. » Câest par ce message sans Ă©quivoque que lâExode, le second livre de la Bible, sâadresse aux juifs
et leur rappelle leur passĂ© dâexilĂ©s au pays du pharaon. Cette citation souligne la possibilitĂ© que dans
certaines circonstances, chacun peut devenir Ă©tranger et donc entiĂšrement dĂ©pendant de lâhospitalitĂ© des
autres. « Je suis aussi une boat people, » fait remarquer Grace incidemment, faisant ainsi rĂ©fĂ©rence Ă lâune
des grandes tragĂ©dies europĂ©ennes du moment. Dans le rĂ©cit de Hans Petter, au sujet dâun gamin qui se
noie parce que lui-mĂȘme est trop ivre et trop dĂ©foncĂ© pour plonger dans lâeau pour aller le sauver, resurgit
lâimage des boat people qui ont essayĂ© ces derniers mois dâatteindre lâEurope depuis lâAfrique du nord dans
des conditions inhumaines, et qui y ont laissé la vie. Paul Valéry a qualifié un jour la Méditerranée de
âmachine Ă faire de la civilisationâ Ă cause des grandes civilisations qui sont nĂ©es sur ses cĂŽtes au fil des
siĂšcles. Mais cette mĂȘme mer menace Ă prĂ©sent de se transformer en un gigantesque cimetiĂšre oĂč lâEurope
elle-mĂȘme pourra peut-ĂȘtre bientĂŽt sâenterrer en tant que projet politique et moral. La Mer MĂ©diterranĂ©e
est devenue un mur par lequel lâEurope se coupe dâune partie de son histoire. LâidentitĂ© future de lâEurope
se joue Ă sa frontiĂšre mĂ©ridionale. Les yeux Ă©teints des demandeurs dâasile Ă©chouĂ©s sur les plages reflĂštent
lâimage de lâEurope utopique, lâEurope des idĂ©aux des LumiĂšres, de la tolĂ©rance et des droits de lâhomme.
Mais nous refusons de regarder ces yeux éteints. Les boat people sont les derniers Européens qui croient
encore en la mission et en la promesse de lâEurope. Ils pourraient nous remettre en contact avec les grands
idĂ©aux de lâhistoire europĂ©enne, nous les citoyens de la Forteresse Europe, devenus cyniques ; mais nous ne
les entendons plus. Nous sommes devenus trop vieux. Trop fatiguĂ©s. On ne peut quand mĂȘme pas tous les
accueillir, nâest-ce pas ? On ne peut quand mĂȘme pas sauver le monde entier ? Et Ă cause de ce
raisonnement-lĂ , dâinnombrables hommes, femmes et enfants reposent au fond de la MĂ©diterranĂ©e sans
que personne ne sache jamais leur nom. Mais les âfigurants de lâhistoireâ reviennent : « They always come
back to the surface again one day or another », dit Anna Sophia Bonnema. Ce qui est exclu ou refoulé finit
toujours par revenir. Lâautre ne se laisse pas nier si facilement. Les morts ne sont jamais complĂštement
morts. « LâĂ©poque oĂč les morts sâamusent est arrivĂ©e », pouvait-on dĂ©jĂ entendre dans Place du marchĂ© 76.
Un jour, nous devrons leur rendre des comptes.
Chacun nâa quâune seule identitĂ©, dit Amin Maalouf, mais celle-ci se compose de nombreuses facettes et
horizons. Câest pourquoi, outre Ă un âexamen de conscienceâ, il propose de procĂ©der Ă©galement Ă un âexamen
dâidentitĂ©â. Cela ressemble Ă la mĂ©thode gĂ©nĂ©alogique que propage Nietzsche : plus on remonte dans le
passĂ©, plus on trouve de couches dont est composĂ©e notre identitĂ©, et plus âimpurâ on devient : « Chaque
personne, sans exception aucune, est dotĂ©e dâune identitĂ© composite ; il lui suffirait de se poser quelques
questions pour débusquer des fractures oubliées, des ramifications insoupçonnées, et pour se découvrir
complexe, unique, irremplaçable. » Maalouf se sert Ă©galement de cette belle image : « LâidentitĂ© dâune
personne nâest pas un patchwork, câest un dessin sur une peau tendue ; quâune seule appartenance soit
touchĂ©e, et câest toute la personne qui vibre. »
Pourquoi ne pas voir Le poĂšte aveugle comme une forme thĂ©Ăątrale de âlâexamen dâidentitĂ©â de Maalouf ?
Une tentative non pas de trouver lâorigine unique qui expliquerait tout, mais au contraire, de dĂ©couvrir
toujours de nouvelles ramifications et des liens inattendus. Toujours plus dâancĂȘtres. Toujours plus de
facettes de lâidentitĂ©. A en croire Jan Lauwers, lâidĂ©e concrĂšte du spectacle lui est venue en visitant la
Mezquita Ă Cordoue, en Espagne. La Mezquita est un Ă©difice architectural unique Ă lâendroit oĂč se trouvait
jadis lâĂ©glise wisigothique consacrĂ©e Ă Vincent de Saragosse, qui Ă©tait elle-mĂȘme bĂątie sur les fondations
dâun temple romain. En 711, Cordoue fut conquise par les musulmans, et une mosquĂ©e fut Ă©rigĂ©e sur le site.
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A partir de la reconquĂȘte chrĂ©tienne de Cordoue en 1236, lâĂ©difice devient la cathĂ©drale du diocĂšse de
Cordoue. Au fil des siĂšcles, plusieurs transformations ont eu lieu, de sorte quâaujourdâhui, les influences tant
mauresques que chrĂ©tiennes sont clairement identifiables. Quâune seule identitĂ© culturelle de ce bĂątiment
soit touchée, et ce sont toutes les autres qui vibrent avec elle.
Avec la Mezquita de Cordoue, nous nous trouvons au cĆur dâune pĂ©riode cruciale pour lâhistoire de lâEurope,
mais peu connue et souvent mal comprise : la confrontation avec lâislam entre 711 et 1492, la pĂ©riode de la
domination mauresque de lâEspagne (al-Andalus), les Croisades et la Reconquista. A partir du septiĂšme
siĂšcle, tandis que lâislam bĂątissait son vaste empire Ă la vitesse de lâĂ©clair, les savants dans des villes comme
Bagdad et Ispahan se mirent Ă conserver, traduire et commenter les Ă©crits scientifiques grecs et romains, et
ce pendant prĂšs de six siĂšcles. Ce travail de traduction, et la recherche scientifique quâil stimula, eut un grand
impact sur la vie culturelle et intellectuelle européenne, qui était à cette époque loin derriÚre celle du monde
islamique. Al-Andalus a acquis lâaura quasi-mythique dâune pĂ©riode marquĂ©e par la tolĂ©rance religieuse, le
vivre ensemble multiculturel, et lâĂ©change intellectuel entre juifs, musulmans et chrĂ©tiens. La vĂ©ritĂ© est plus
nuancĂ©e, mais le fait est que la vie scientifique, intellectuelle et littĂ©raire Ă©tait dâun niveau trĂšs Ă©levĂ© dans la
culture islamique. En effet, contrairement au christianisme, lâislam stimulait la recherche de la connaissance.
Câest le prophĂšte Mahomet qui eut cette citation cĂ©lĂšbre : « Cherchez la connaissance, jusquâen Chine sâil le
faut. » Tandis que lâEurope traversait son âobscurâ Moyen Ăge, la culture islamique Ă©tait au sommet de son
rayonnement. Mais lâinfluence des savants arabes et autres du Moyen Orient et dâAndalousie Ă©tait
controversĂ©e. PĂ©trarque parlait sans ambages des âmensonges arabesâ. Et encore aujourdâhui, le rĂŽle de la
culture islamique en tant que pont entre lâAntiquitĂ© et la Renaissance europĂ©enne nâest pas entiĂšrement
reconnu. Trop souvent encore â et ce nâest quâun exemple â on saute un peu facilement de PtolĂ©mĂ©e (2e
siĂšcle), qui considĂ©rait la terre comme le centre fixe de lâunivers, Ă Copernic (16e siĂšcle), qui dĂ©veloppa un
systÚme héliocentrique. Les théories et connaissances intermédiaires des savants arabes sont souvent
minimisées, alors que de récentes recherches ont démontré que Copernic avait poursuivi les travaux de
savants arabes comme Ibn al-Shatir et at-Tusi. De plus, le manuel mĂ©dical dâIbn Sina (Avicenne) fut un
ouvrage de rĂ©fĂ©rence dans les universitĂ©s europĂ©ennes jusquâen 1600. Il en va de mĂȘme pour des ouvrages
dans les domaines de lâoptique, de la chimie, de lâarchitecture et de lâalgĂšbre. A une certaine Ă©poque, lâarabe
était, à cÎté du latin, le principal moyen de communication parmi les savants et scientifiques européens.
Lauwers prend au sĂ©rieux cette vibration islamique au sein de lâidentitĂ© europĂ©enne, et il la fait clairement
retentir dans son spectacle. Il cite notamment le poĂšte syrien aveugle Abu alâala al Maâarri (973 - 1057) et la
poétesse Wallada bint al Mustakfi de Cordoue (1001-1091), et il évoque des philosophes et des
scientifiques : « Je connais le grand penseur Ibn Rushd, connu chez vous sous le nom dâAverroĂšs, dont les
livres ont Ă©tĂ© enterrĂ©s par Thomas dâAquin parce quâils Ă©taient trop dangereux pour le peuple. Ou encore
Ibn Firnas, qui a construit le premier avion, six cents ans avant LĂ©onard de Vinci. (âŠ) Ou bien est-ce une seule
vĂ©ritĂ©, indivisible et dĂ©nuĂ©e de toute temporalitĂ© ? Et quelle est cette vĂ©ritĂ© alors ? Car câest bien de vĂ©ritĂ©
quâil sâagit. Lâhistoire est un mensonge qui nous remplit de honte », dit Mohamed Toukabri. Lâun de ces
âmensongesâ de lâhistoire, ce sont les Croisades. Les expĂ©ditions militaires des chrĂ©tiens occidentaux en
Palestine entre 1095 et 1271 doivent sans doute ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme lâun des premiers exemples du
mouvement expansionniste européen qui se mit en marche aprÚs la fin, au dixiÚme siÚcle, des invasions de
lâEurope par les Vikings, les Maures et les Huns. Les chefs de guerre qui s'Ă©taient ensuite combattus entre
eux et avaient opprimé les populations étaient désormais unis par la conviction que les lieux saints en Terre
Sainte, que le christianisme considĂ©rait comme sa propriĂ©tĂ© lĂ©gitime, devaient ĂȘtre libĂ©rĂ©s de leurs maĂźtres
musulmans, qui en avaient pris possession en 638. Ce nâest pas ici le lieu pour traiter des causes politiques
et Ă©conomiques des Croisades, mais elles nâĂ©taient Ă©videmment pas aussi idĂ©alistes quâune âlibĂ©ration de la
Terre Sainteâ. Dans son livre Les Croisades vues par les Arabes (1983), Amin Maalouf dĂ©crit les Croisades du
point de vue arabe : rien de trÚs glorieux, à en croire le titre de la traduction néerlandaise, Bandits, chiens
de chrétiens et violeurs.
![Page 15: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/15.jpg)
15
Hasard ou pas, presque tous les arbres gĂ©nĂ©alogiques des comĂ©diens du PoĂšte aveugle sâentrecroisent Ă
lâĂ©poque des Croisades ! Les comĂ©diens nâont pas de quoi ĂȘtre fiers de ce quâils y dĂ©couvrent : leurs aĂŻeuls
ont presque tous Ă©tĂ© cannibales : « Ce nâĂ©tait pas ce que nous avions imaginĂ©. Nous ne savions ni lire ni
Ă©crire. Pendant le siĂšge dâAntioche en 1097, les chrĂ©tiens mangeaient les enfants des juifs et des musulmans.
CâĂ©tait la seule viande quâon trouvait encore. Nos chevaux Ă©taient trop prĂ©cieux », dit Maarten Seghers. Hans
Petter MelĂž Dahl exprime les choses ainsi : « Nous sommes Ă la recherche dâune perspective plus large.
Lâhistoire hystĂ©rique des mangeurs dâhommes et des guerres oubliĂ©es. Mes ancĂȘtres Ă©taient cannibales.
Tout est dit. » La perspective large de Lauwers sur lâhistoire rappelle lâinterprĂ©tation de Walter Benjamin du
tableau Angelus Novus de Paul Klee, sur lequel figure un ange, les yeux écarquillés, la bouche ouverte et les
ailes dĂ©ployĂ©es : « Tel est lâaspect que doit avoir nĂ©cessairement lâange de lâhistoire. Il a le visage tournĂ© vers
le passĂ©. OĂč paraĂźt devant nous une suite d'Ă©vĂ©nements, il ne voit quâune seule et unique catastrophe, qui
ne cesse d'amonceler ruines sur ruines et les jette Ă ses pieds. Il voudrait bien sâattarder, rĂ©veiller les morts
et rassembler les vaincus. Mais du paradis souffle une tempĂȘte qui sâest prise dans ses ailes, si forte que
lâange ne peut plus les refermer. Cette tempĂȘte le pousse incessamment vers lâavenir auquel il tourne le dos,
cependant que jusquâau ciel devant lui sâaccumulent les ruines. Cette tempĂȘte est ce que nous appelons le
progrĂšs. » VoilĂ lâhistoire de lâhomme : catastrophe, ruines, cannibalisme et hystĂ©rie.
Pouvons-nous encore nous rencontrer en tant quâhumains dans ces ruines de lâhistoire ? Nos villes sont
devenues les âzones de contactâ du monde, des zones oĂč les cultures et les individus qui Ă©taient jusquâalors
sĂ©parĂ©s par la gĂ©ographie, lâhistoire, la race, lâethnicitĂ©, etc. se voient forcĂ©s de vivre ensemble. Le
philosophe Rudi Visker distingue trois positions qui peuvent ĂȘtre adoptĂ©es vis-Ă -vis de lâautre, avant de les
rejeter et de chercher une nouvelle perspective. Il distingue successivement les positions multiculturelle,
transculturelle et ironique. LĂ oĂč le multiculturaliste situe la vĂ©ritĂ© dans âlâenracinementâ culturel et dans
lâĂ©quivalence de toutes les cultures, la vĂ©ritĂ© rĂ©side prĂ©cisĂ©ment pour le transculturaliste dans le
âdĂ©racinementâ culturel et la possibilitĂ© de se libĂ©rer de sa propre tradition (par exemple dans une attitude
de vie cosmopolite). Pour Visker, ces deux positions sont liĂ©es en dĂ©finitive Ă une forme dâangoisse. Le
multiculturaliste a lâangoisse de perdre sa spĂ©cificitĂ© dans la confrontation avec lâautre, et conçoit par
consĂ©quent les cultures comme des entitĂ©s certes Ă©quivalentes, mais souvent refermĂ©es sur elles-mĂȘmes et
isolées les unes des autres. Le transculturaliste est angoissé par cette solitude et est disposé, au nom du
dialogue et de lâinteraction, Ă renoncer Ă sa spĂ©cificitĂ© culturelle. Visker reproche Ă ces deux positions
quâelles tentent de parler de tout sauf dâelles-mĂȘmes. VoilĂ prĂ©cisĂ©ment ce que fait, pour sa part, lâironiste.
Lâironiste se met Ă douter de sa propre vĂ©ritĂ©, car il voit que lâautre possĂšde une autre vĂ©ritĂ© et quâil la prend
au sĂ©rieux. A partir de ce doute de soi, lâironiste demeure toujours intĂ©ressĂ© par la vĂ©ritĂ© des autres. Ce que
Visker apprĂ©cie chez lâironiste, câest que celui-ci considĂšre le dĂ©ficit de vĂ©ritĂ© comme une caractĂ©ristique de
toute vĂ©ritĂ©, pas seulement de la sienne ou de celle de lâautre. Mais Visker lui reproche de penser nĂ©anmoins
ce dĂ©ficit toujours par rapport Ă quelque chose qui est absent, mais qui aurait en fait pu ĂȘtre prĂ©sent. VoilĂ
pourquoi lâironiste ne cesse de zapper dâune vĂ©ritĂ© Ă lâautre, comme sâil Ă©tait convaincu quâelle doit quand
mĂȘme se trouver quelque part. Le dĂ©ficit de vĂ©ritĂ© constitue le point de dĂ©part de la position que Visker
dĂ©finit pour lui-mĂȘme : je ne respecte lâhumanitĂ© de lâautre que dĂšs lors que jâaccepte quâil est, tout comme
moi, porteur dâun dĂ©ficit. Câest un dĂ©ficit que je ne peux pas combler et que mon dĂ©ficit ne peut pas combler,
et ce dĂ©ficit nâa pas davantage entraĂźnĂ© le mien. La rencontre entre âjeâ et âlâautreâ est en dĂ©finitive une
rencontre entre deux dĂ©ficits. Ce nâest que ce dĂ©ficit âcommunâ qui rend la rencontre possible. A partir de lĂ ,
on en arrive Ă©galement Ă une autre dĂ©finition de ce quâest la culture : non pas un Ă©difice impressionnant
dont on puisse ĂȘtre fier, mais âune construction de lâembarrasâ afin de pouvoir gĂ©rer notre dĂ©ficit. Non pas
une preuve de supĂ©rioritĂ©, mais une tentative humble et ratĂ©e de rĂ©soudre le mystĂšre de lâexistence.
Lâhistoire en tant que catastrophe, la culture en tant que construction de lâembarras, lâhomme en tant que
dĂ©ficit : « Nous sommes tous rĂ©fugiĂ©s ou cannibales. Mangez ou lâon vous mangera. Câest ce que nous
apprend lâhistoire », dit Jules Beckman. Pourtant, ce nâest pas le dernier mot de Lauwers.
![Page 16: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/16.jpg)
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Ce dernier mot, aussi Ă©trange que cela puisse paraĂźtre dans ce contexte, câest lâamour. Lâamour dont parle
Lauwers dans ses piĂšces, câest le âyesâ vital de Molly Bloom dans le dernier chapitre dâUlysse (1922), le roman
de James Joyce. Ce chapitre est un long monologue ininterrompu qui se termine comme suit : « ...jâĂ©tais
jeune une Fleur de la montagne oui quand jâai mis la rose dans mes cheveux comme le faisaient les
Andalouses et comment il mâa embrassĂ©e sous le mur des Maures et jâai pensĂ© bon autant lui quâun autre et
puis jâai demandĂ© avec mes yeux quâil me demande encore oui et puis il mâa demandĂ© si je voulais dire oui
de dire oui ma fleur de la montagne et dâabord je lâai entourĂ© de mes bras oui et je lâai attirĂ© tout contre moi
comme ça il pouvait sentir tous mes seins mon odeur oui et son cĆur battait comme un fou et oui jâai dit oui
je veux Oui.» Par un heureux hasard, elle se compare ici aux filles andalouses et se fait embrasser sous le
Mur Mauresque. Ce âouiâ, dit Joyce, câest un âouiâ fĂ©minin. Cela est trĂšs clairement le cas aussi chez Lauwers.
Depuis Isabella, lâarchĂ©type de la dĂ©esse mĂšre ou de la pute sacrĂ©e parcourt les spectacles de Lauwers
comme un fil rouge. Elle est lâicĂŽne dâune hospitalitĂ© inconditionnelle qui nous impose de donner Ă lâĂ©tranger
notre maison et nous-mĂȘmes, sans lui demander son nom, sans la moindre compensation,
inconditionnellement. Câest lâattitude dâun âouiâ absolu, une ouverture absolue Ă celui ou ce qui se prĂ©sente,
antĂ©rieure Ă toute dĂ©termination, anticipation ou identification, quâil sâagisse dâun Ă©tranger, dâun immigrant,
dâun invitĂ© ou dâun visiteur inattendu, quâil sâagisse dâun homme ou dâune femme, quâil sâagisse, mĂȘme, dâun
ĂȘtre humain, animal ou divin, quâil sâagisse, enfin, dâune chose vivante ou morte.
Dans Le poĂšte aveugle, il est trĂšs souvent question de femmes, de mĂšres, dâamour et de dĂ©sir : « A mon
amant jâoffre mes joues, et mes lĂšvres je les donne Ă qui je veux », dit Wallada de Cordoue par la bouche
dâAnna Sophia Bonnema. Ou alors : « Ma mĂšre offrait ses joues Ă son amant, et ses lĂšvres, elle les donnait Ă
qui la payait », dit BenoĂźt lorsquâil raconte son histoire. « Je suis Anna Sophia Bonnema. Je suis toutes les
femmes. Je suis la mĂšre aimante sans enfant. Je suis LucrĂšce, mais je ne me suiciderai pas, je suis lâamazone
Penthésilée qui aime Achille, je suis Sappho la dixiÚme muse, je suis Madame Curie qui voit mourir son bras.
Je suis Corday qui crie quâelle a sauvĂ© des centaines de milliers de gens. Je suis Zarcamodonia qui tranche la
tĂȘte dâun homme qui veut lui confisquer son voile. » Outre la poussiĂšre du volcan Krakatoa en Ă©ruption â la
catastrophe â câest ce âouiâ vital, fĂ©minin, accueillant qui volĂšte par-dessus dâinnombrables corps et, ce
faisant, relie tout Ă tout et rend le monde un, unique et indivisible.
P.S. La page Wikipédia de la Mezquita de Cordoue dit ceci : « Comme la construction de la cathédrale dura
trÚs longtemps, plusieurs styles de construction différents ont été utilisés. De plus, la cathédrale a un effet
positif sur lâĂ©difice : grĂące Ă elle, la Mezquita rĂ©siste mieux aux tremblements de terre. » A cause de
lâenchevĂȘtrement de diffĂ©rentes formes de construction, grĂące Ă son âimpuretĂ©â stylistique en dâautres
termes, la construction est devenue plus solide. Peut-ĂȘtre une belle mĂ©taphore de la cohabitation de
plusieurs cultures en tant que renforcement de lâhumanitĂ© tout entiĂšre contre des sĂ©ismes Ă venir ?
Erwin Jans
![Page 17: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/17.jpg)
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PREMIERE Kunstenfestivaldesarts, Kaaitheater, Bruxelles les 12, 13, 14, 15 mai 2015
KunstFestSpiele Herrenhausen, Hanovre les 13, 14 juin 2015
KĂŒnstlerhaus Mousonturm, Francfort les 19, 20, 21 juin 2015
La Biennale di Venezia, Teatro alle Tese le 5 août 2015
FIBA, Festival Internacional de Buenos Aires le 23, 24, 25 septembre 2015
TNT, Terrassa Noves Tendencies, Terrassa le 1 octobre 2015
EuropÀisches Theaterfestival Eurothalia, Timisoara le 10 octobre 2015
Konfrontacje Teatralne, Lublin le 18 octobre 2015
Theaterfestival Spielart, Munich le 25 octobre 2015
ScĂšne Nationale de SĂšte et du Bassin de Thau, SĂšte le 5, 6 novembre 2015
Teatro Central, SĂ©ville les 20, 21 novembre 2015
Heidelberger StĂŒckemarkt le 7 mai 2016
TANZ UND THEATER â Internationales Festival Freiburg le 13, 14 mai 2016
International Festival of Theatre and Street Arts from Valladolid le 28 mai 2016
Berliner Festspiele / Foreign Affairs le 15 juillet 2016
ImPulsTanz, Wenen le 13 août 2016
Theaterfestival Basel les 3, 4 septembre 2016
Concertgebouw Bruges le 29 septembre2016
Ludwigshafen le 16 octobre 2016
Toneelhuis, Anvers les 24, 25, 26 novembre 2016
Théùtre Garonne, Toulouse les 7, 8, 9 décembre 2016
Le Parvis, ScÚne Nationale Tarbes Pyrénées le 12 décembre 2016
ScÚne Nationale d'Albi le 15 décembre 2016
Les 2 scÚnes, ScÚne nationale de Besançon les 7, 8 mars 2017
La Rose des Vents, ScĂšne nationale Lille MĂ©tropole Villeneuve dâAscq les 25, 26, 27 avril 2017
Cliquez ici pour consulter la liste Ă jour.
![Page 18: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/18.jpg)
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![Page 19: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/19.jpg)
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1987 Need to Know
premiĂšre : le 24 mars, Mickery, Amsterdam
1989 ça va
premiĂšre : le 18 mars, Theater am Turm, Francfort
1990 Julius Caesar
premiĂšre : le 31 mai, Rotterdamse Schouwburg
1991 Invictos
premiĂšre : le 18 mai, Centro Andaluz de Teatro, SĂ©ville
1992 Antonius und Kleopatra
premiÚre : le 14 février, Teater am Turm, Francfort
1992 SCHADE/schade
premiĂšre : le 21 octobre, Theater am Turm, Francfort
1993 Orfeo, opéra de Walter Hus
premiÚre : le 23 mai, Théùtre Bourla, Anvers
1994 The Snakesong Trilogy - Snakesong/Le Voyeur
premiĂšre : le 24 mars, Theater am Turm, Francfort
1995 The Snakesong Trilogy - Snakesong/Le Pouvoir (Leda)
premiĂšre : le 11 mai, Dance 95, Munich
1996 Needcompany's Macbeth
premiĂšre : le 26 mars, Lunatheater, Bruxelles
1996 The Snakesong Trilogy - Snakesong/Le DĂ©sir
premiĂšre : le 6 novembre, Kanonhallen, Copenhague
1997 Caligula, No beauty for me there, where human life is rare, part one
premiĂšre : le 5 septembre, Documenta X, Kassel
1998 The Snakesong Trilogy, version adaptée avec musique live
premiĂšre : le 16 avril, Lunatheater, Bruxelles
1999 Morning Song, No beauty for me there, where human life is rare, part two
premiĂšre : le 13 janvier, Lunatheater, Bruxelles
2000 Needcompanyâs King Lear
premiĂšre : le 11 janvier, Lunatheater, Bruxelles
2000 DeaDDogsDonÂŽtDance/DjamesDjoyceDeaD
premiĂšre : le 12 mai Das TAT, Francfort
2001 Ein Sturm
premiĂšre : le 22 mars, Deutsches Schauspielhaus, Hambourg
2001 Kind
PremiĂšre : le 21 juin, Het Net, Bruges
2002 Images of Affection
premiÚre : le 28 février, Stadsschouwburg Bruges
![Page 20: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/20.jpg)
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2003 No Comment
premiĂšre : le 24 avril, Kaaitheater, Bruxelles
2004 La chambre dâIsabella
premiĂšre : le 9 juillet, CloĂźtre des Carmes, Festival dâAvignon
2006 La Poursuite du vent
premiĂšre: le 8 juillet, ThĂ©Ăątre Municipal, Festival dâAvignon
2006 Le Bazar du homard
premiĂšre : le 10 juillet, CloĂźtre des CĂ©lestins, Festival dâAvignon
2008 La maison des cerfs
premiĂšre : le 28 juillet, Perner-Insel, Hallein, Festival de Salzbourg
2008 Sad Face | Happy Face, une trilogie, trois histoires sur la condition humaine
premiÚre : le 1er août, Perner-Insel, Hallein, Festival de Salzbourg
2011 Lâart du divertissement
premiĂšre : le 5 mars, Akademietheater (Burgtheater), Vienne
2012 Caligula
premiĂšre : le 17 mai, Kasino (Burgtheater), Vienne
2012 Place du marché 76
premiĂšre : le 7 septembre, Ruhrtriennale, Jahrhunderthalle, Bochum
2014 Begin the Beguine
premiĂšre : le 1 mars, Akademietheater (Burgtheater), Vienne
2015 Le poĂšte aveugle
premiĂšre : le 12 mai, Kunstenfestivaldesarts, Bruxelles
Cliquez ici pour consulter la liste Ă jour
![Page 21: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/21.jpg)
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![Page 22: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/22.jpg)
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- LAUWERS, Jan, Leda, Bebuquin (Anvers) en coproduction avec les Ă©ditions IT&FB, Amsterdam, 1995 (en
néerlandais).
- VANDEN ABEELE, Maarten, La luciditĂ© de lâobscĂšne, Needcompany en collaboration avec les Ă©ditions IT&FB,
Bruxelles/Amsterdam, 1998, (en néerlandais, français et anglais).
- LAUWERS, Jan, La chambre dâIsabella suivi de Le bazar du homard, Actes Sud-papiers, Paris, 2006 (en français).
- STALPAERT, Christel, BOUSSET, Sigrid et LE ROY, Frederik, (Ă©ds.), No beauty for me there where human life is rare.
On Jan Lauwersâ theatre work with Needcompany, Academia Press et IT&FB, Gand, Amsterdam, 2007 (en anglais).
- LAUWERS, Jan, LâĂ©nervement, Fonds Mercator, BOZAR Books, Needcompany, (Bruxelles) / Actes Sud (Paris), 2007.
- LAUWERS, Jan, Sad Face | Happy Face, Drei Geschichten ĂŒber das Wesen des Menschen, Fischer Taschenbuche
Verlag (Francfort), 2008.
- LAUWERS, Jan, La maison des cerfs, Actes Sud-papiers, Paris, 2009.
- LAUWERS, Jan, KEBANG !, Uitgeverij Van Halewyck, 2009.
- FREEMAN, John, The Greatest Shows on Earth. World Theatre form Peter Brook to the Sydney Olympics, Libri
Publishing, Oxfordshire, 2011.
- LAUWERS, Jan, Sad Face | Happy Face, Una trilogĂa sobre la humanidad, Papeles Teatrales, Facultatad de FilosofĂa y
Humanidades, 2014.
- Mobil Pegasus Preis, Internationales Sommertheater Festival Hamburg, pour la meilleure production
internationale, 1989, pour la piÚce ça va.
- Thersitesprijs, prix de la critique théùtrale flamande, 1998.
- Obie-Award Ă New York pour le spectacle Morning Song, 1999.
- International Film Festival Venice 2002, Kinematrix Prize pour le format digital, 2002, pour Goldfish Game.
- Grand Jury Honor for Best Ensemble Cast, Slamdance Filmfestival, 2004, pour Goldfish Game.
- Le Masque, prix du meilleur spectacle Ă©tranger de lâAcadĂ©mie quĂ©bĂ©coise du ThĂ©Ăątre Ă MontrĂ©al, Canada, 2005,
pour La chambre dâIsabella.
- Prix du meilleur spectacle étranger du Syndicat professionnel de la Critique de Théùtre, de Musique et de Danse,
France, 2005, pour La chambre dâIsabella.
- Prix Culture 2006 de la Communauté flamande, catégorie littérature de théùtre, pour les textes La chambre
dâIsabella et Ulrike.
- Grand Prix â Golden Laurel Wreath Award for Best Performance / MESS Festival Sarajevo, pour La chamber
dâIsabella (2009).
- Insigne dâOr du MĂ©rite de la RĂ©publique dâAutriche, 2012.
- Lion dâOr Lifetime Achievement Award Ă la Biennale de Venise, 2014.
- Golden Laurel Wreath for Lifetime Achievement Award / 54ste MESS International Theatre Sarajevo, 2014.
- Premio Mayor, Premio Teatro del Mundo, dans la catĂ©gorie âTraductionsâ, pour la traduction de Micaela van Muylem
de la trilogie Sad Face | Happy Face, Université de Buenos Aires, 2014.
- Barcelona Critics Prize - Prix pour le Meilleur Spectacle de Danse International pour le spectacle Le poĂšte aveugle de
Jan Lauwers & Needcompany, 2015.
![Page 23: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/23.jpg)
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NĂ© Ă Anvers en 1957, plasticien de formation, Jan Lauwers est un artiste qui pratique toutes les disciplines. Ces
vingt derniĂšres annĂ©es, il sâest surtout fait connaĂźtre par son Ćuvre thĂ©Ăątrale pionniĂšre forgĂ©e avec son ensemble,
Needcompany, fondé à Bruxelles en 1986. Depuis 2009, Needcompany est artist-in-residence au Burgtheater
(Vienne). Pendant tout ce temps, il a accumulĂ© une Ćuvre plastique considĂ©rable, qui a Ă©tĂ© exposĂ©e en 2007 au
BOZAR (Bruxelles). En 2012, Jan Lauwers sÊŒest vu dĂ©cernĂ© « lÊŒinsigne dÊŒOr du MĂ©rite de la RĂ©publique dÊŒAutriche ». En
2014, il est rĂ©compensĂ© du Lion dÊŒOr Lifetime Achievement Award Ă la Biennale de Venise. Il est le premier Belge Ă
recevoir ce prix dans la catégorie théùtre. Il est le premier Belge à recevoir ce prix dans la catégorie théùtre.
Jan Lauwers a Ă©tudiĂ© la peinture Ă lâAcadĂ©mie des Beaux-Arts de Gand. Fin 1979, avec plusieurs autres artistes,
il forme lâEpigonenensemble. En 1981, cette troupe est transformĂ©e en un collectif, Epigonentheater zlv (zlv = «
zonder leiding van », sous la direction de personne), qui, en six productions, épate le paysage théùtral. Jan Lauwers
sâinscrit ainsi dans le mouvement de renouveau radical du dĂ©but des annĂ©es quatre-vingts en Flandre, et perce
sur la scÚne internationale. Epigonentheater zlv fait du théùtre concret, direct et trÚs visuel, avec la musique et le
langage pour éléments structurants. Parmi les spectacles : Reeds gewond en het is niet eens oorlog (1981), dE
demonstratie (1983), Struiskogel (1983), Background of a Story (1984) et Incident (1985). Jan Lauwers a dissous ce
collectif en 1985 pour fonder Needcompany.
NEEDCOMPANY
Jan Lauwers needs company. Il a créé Needcompany avec Grace Ellen Barkey. A eux deux, ils sont responsables
des productions importantes de Needcompany. Le groupe de performers quâon rassemblĂ© Jan Lauwers et Grace
Ellen Barkey ces derniÚres années est unique dans sa multiplicité. Les associated performing artists sont
MaisonDahlBonnema (Hans Petter Dahl & Anna Sophia Bonnema), Lemm&Barkey (Lot Lemm & Grace Ellen Barkey),
OHNO COOPERATION (Maarten Seghers
& Jan Lauwers) et lâensemble NC, avec notamment lâinĂ©narrable Viviane De Muynck. Ils crĂ©ent leurs propres
productions sous lâĂ©gide de Needcompany.
Depuis la création de Needcompany en 1986, son activité comme sa troupe de performers présentent un caractÚre
explicitement international. Les premiĂšres productions de Needcompany, Need to Know (1987) et ça va (1989) â
pour laquelle Needcompany a obtenu le Mobil Pegasus Preis â sont encore trĂšs visuelles, mais dans celles qui
suivent, la ligne narrative et la notion de thĂšme central gagnent en importance, mĂȘme si la construction
fragmentée est conservée.
La formation de plasticien de Jan Lauwers est déterminante dans son rapport au théùtre et résulte en un langage
thĂ©Ăątral personnel, novateur Ă plus dâun titre, qui interroge le thĂ©Ăątre et son sens. Lâune de ses caractĂ©ristiques
principales est le jeu transparent, « pensant », des comĂ©diens, ainsi que le paradoxe entre âjeuâ et âperformanceâ.
Cette écriture spécifique se retrouve également dans ses adaptations de Shakespeare, Julius Caesar (1990), Antonius
und Kleopatra (1992), Needcompanyâs Macbeth (1996), Needcompanyâs King Lear (2000) et Ein Sturm (2001, au
Deutsches Schauspielhaus Hamburg). AprĂšs la mise en scĂšne dâInvictos (1991), du monologue SCHADE/Schade
(1992) et de lâopĂ©ra Orfeo (1993), il entame en 1994 la rĂ©alisation dâun vaste projet pour lequel il sâest, pour
la premiĂšre fois, pleinement rĂ©vĂ©lĂ© en tant quâauteur, The Snakesong Trilogy : Snakesong/Le Voyeur (1994),
Snakesong/Le Pouvoir (1995) et Snakesong/Le Désir (1996). En 1998, il a proposé une version adaptée de la Trilogie
Snakesong dans son intégralité.
![Page 24: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/24.jpg)
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En septembre 1997, il est invitĂ© Ă participer au volet thĂ©Ăątral de la Documenta X (Kassel). Il y crĂ©e Caligula dâaprĂšs
Camus, le premier volet du diptyque No beauty for me there, where human life is rare. Avec Morning Song (1999),
le second volet du diptyque No beautyâŠ, Jan Lauwers et Needcompany remportent un Obie Award Ă New York.
A la demande de William Forsythe, Jan Lauwers conçoit, en coproduction avec le Ballet Frankfurt, le spectacle
DeaDDogsDonÂŽtDance/DjamesDjoyceDeaD (2000).
Images of Affection (2002) a Ă©tĂ© crĂ©Ă© pour fĂȘter les 15 ans de Needcompany. Sous le titre de No Comment, Jan
Lauwers propose trois monologues et un solo de danse. Charles L. Mee, Josse De Pauw et Jan Lauwers Ă©crivent
respectivement des textes pour Carlotta Sagna (Salomé), Grace Ellen Barkey (La buveuse de thé) et Viviane De
Muynck (Ulrike). Six compositeurs, Rombout Willems, Doachim Mann, Walter Hus, Senjan Jansen, Hans Petter
Dahl et Felix Seger, ont composé la musique pour le solo de danse de Tijen Lawton. Les thÚmes de ce spectacle
sont ceux que Lauwers reformule et redéfinit depuis le début de son travail avec Needcompany : la violence,
lâamour, lâĂ©rotisme et la mort. Une collection de plusieurs milliers dâobjets ethnologiques et archĂ©ologiques constitue
le point de dĂ©part pour raconter lâhistoire dâIsabella Morandi dans le spectacle La chambre d'Isabella (2004)
(Festival dâAvignon). Neuf interprĂštes dĂ©voilent ensemble le secret de la chambre d'Isabella. Le personnage
central est interprété par l'immense actrice Viviane De Muynck. Ce spectacle a obtenu plusieurs prix, dont le Prix
de la Communauté Flamande Culture 2006 dans la catégorie littérature théùtrale. En 2006, Jan Lauwers crée deux
spectacles pour le Festival dâAvignon, dont Le Bazar du Homard, sur un texte personnel, et un monologue de
Viviane De Muynck, La Poursuite du vent, l'adaptation par Viviane De Muynck du roman homonyme de Claire Goll.
LâĂ©tĂ© 2008, le Festival de Salzbourg invite Jan Lauwers Ă crĂ©er un nouveau spectacle, La maison des cerfs. AprĂšs La
chambre dâIsabella (2004) et Le Bazar du Homard (2006), ce spectacle constitue le dernier volet de la trilogie de
lâhumanitĂ© : Sad Face| Happy Face. Cette trilogie Ă©tait jouĂ©e pour la premiĂšre fois dans son intĂ©gralitĂ© au Festival
de Salzbourg 2008.
Depuis 2009 Jan Lauwers est artist in residence au Burgtheater (Vienne). Lâart du divertissement (2011), dont la
premiĂšre a eu lieu Ă Vienne, tourne aprĂšs avec Dirk Roofthooft dans le rĂŽle principal. Caligula (2012) et Begin the
Beguine (2014), un text de John Cassavetes, sont créés en collaboration avec le Burgtheater.
Jan Lauwers a écrit Place du marché 76. La premiÚre a eu lieu à la Ruhrtriënnale en septembre 2012. Le poÚte aveugle
(2015) est le titre du tout nouveau spectacle de Jan Lauwers, la premiĂšre aura lieu lors du Kunstenfestivaldesarts 2015.
PROJETS
En 1999, Jan Lauwers lance les Needlapbs : des rencontres permettant la présentation d'idées, d'observations,
d'esquisses, de considĂ©rations diverses. Pendant les Needlapbs le public dĂ©couvre diffĂ©rents projets Ă lâĂ©tat
dâĂ©bauche, des expĂ©riences se frayant Ă tĂątons un chemin vers la scĂšne.
Just for Toulouse (ThĂ©Ăątre Garonne, 2006) fut la premiĂšre Ă©dition de ces soirĂ©es oĂč des associated performing
artists proposent installations et spectacles de Needcompany. Au BOZAR (2007), câest Just for Brussels qui fut
présenté.
Maarten Seghers et Jan Lauwers créent ensemble OHNO COOPERATION afin de donner forme a leur engagement
artistique rĂ©ciproque. JusquâĂ prĂ©sent, cela sâest traduit par un regard, une pensĂ©e et une action communs dans
le domaine de la musique, de lâart plastique et des performances : The Grenoble Tapes (2006),
O.H.N.O.P.O.P.I.C.O.N.O. (2006), The OHNO Cooperation Conversation On The O.H.N.O.P.O.P.I.C.O.N.O. 0ntology
(2007). Tout cela se trouve réuni dans an OHNO cooperation evening (2008). AIR Antwerpen a invité OHNO
COOPORATION comme commissaire de la cinquiÚme édition de OPEN AIR, qui a eu lieu en août 2011. Des
artistes venus du monde entier y ont été présentés. The OHNO Cooperation Conversation On The
O.H.N.O.P.O.P.I.C.O.N.O. Tautology (2014) a été créée à la demande de FIDENA 2014.
![Page 25: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/25.jpg)
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La Biennale de Venise a invité Lauwers à plusieurs reprises pour enseigner dans des classes de master dans le cadre
du Biennale College. Ce qui a donné lieu aux représentations The Seven Sins (2011) et The Impossible Act (2013). En
2014, Jan Lauwers y montera Just for Venice.
PROJETS CINEMA
Jan Lauwers a signé un certain nombre de projets cinéma et vidéo, dont From Alexandria (1988), Mangia (1995),
Sampled Images (2000), C-Song (2003), C-Song Variations (2007) et The OHNO Cooperation Conversations on the
O.H.N.O.P.O.P.I.C.O.N.O. Ontology (2007). Au cours de lâĂ©tĂ© 2001, Lauwers a rĂ©alisĂ© son premier long mĂ©trage,
Goldfish Game (2002). Il a Ă©crit le scĂ©nario en collaboration avec Dick Crane. Goldfish Game raconte lâhistoire dâune
petite communauté qui subit une désagrégation violente. La premiÚre du film a eu lieu au Festival de Cinéma de
Venise, dans la section « Nuovi Territori ». Dans cette catégorie, le jury avait surtout sélectionné des films
tĂ©moignant dâune approche innovante, privilĂ©giant lâexpĂ©rimentation, les nouvelles technologies et les nouveaux
styles, qui porte déjà en elle les prémisses de la culture visuelle de demain. La revue Internet italienne Kinematrix
a désigné Goldfish Game comme meilleur film dans la catégorie
« Formati Anomali ». Extrait du rapport du jury : « Un style de mise en scÚne novateur, au-delà des limites
habituelles de la vidĂ©o numĂ©rique ». Goldfish Game a Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ© pour lâInternational Human Rights Film
And Video Festival de Buenos Aires en 2002, pour le Festival du Film de Gand, Ă©galement en 2002, et pour le
Solothurn FilmFestival en Suisse en 2003. Ă la demande de William Forsythe, une projection du film a eu lieu Ă
DAS TAT à Francfort. Au Slamdance Film Festival (janvier 2004) Goldfish Game a reçu le prix du meilleur ensemble,
le « Grand Jury Honor for Best Ensemble Cast ».
En février 2003, Jan Lauwers a réalisé un court métrage sans paroles sur le thÚme de la violence, C- Song. Depuis
lors, plusieurs projections de C-Song pour un public restreint ont eu lieu lors des Needlapbs au STUK Ă Louvain
et aux Studios du Kaaitheater Ă Bruxelles, ainsi que pendant Oorlog is geen Kunst au Vooruit Ă Gent. En avril 2004
a eu lieu la premiÚre officielle de C-Song lors du festival du court métrage Courtisane à Gand. Le film a ensuite été
sélectionné pour le Festival international du Court métrage de Hambourg. En juillet 2004, il a été projeté à l'ancien
chùteau d'eau de Bredene, dans le cadre de « Grasduinen 2004, SMAK-aan-Zee ».
C-Song Variations (2007), un court métrage réalisé dans le cadre du Bazar du Homard, a connu son avant-premiÚre
au mois dâavril au BOZAR (Bruxelles), et sa premiĂšre au festival Temps dâImages Ă La Ferme du Buisson (Paris) en
octobre 2007. Ensuite, ce court métrage a été projeté à la haus der kunst (2007) à Munich.
Pour le SPIELART Festival à Munich (2007), Jan Lauwers a réalisé avec Maarten Seghers un projet vidéo : The
OHNO Cooperation Conversations on the O.H.N.O.P.O.P.I.C.O.N.O. Ontology. The OHNO Cooperation Conversation On
The O.H.N.O.P.O.P.I.C.O.N.O. Tautology (2014) a été créée à la demande de FIDENA 2014.
ART PLASTIQUE
A la demande du curateur Luk Lambrecht, Jan Lauwers a participé à l'exposition Grimbergen 2002, en compagnie de
8 autres artistes (notamment Thomas SchĂŒtte, Lili Dujourie, Job Koelewijn, Atelier Van Lieshout, Jan De Cock et Ann
Veronica Janssens).
DĂ©but 2006, ses Ćuvres Ă©taient Ă lâexposition DARK, au musĂ©e Boijmans van Beuningen, Ă Rotterdam.
En 2007, Jan Lauwers a présenté sa premiÚre exposition en solo au BOZAR de Bruxelles, dont le commissaire
Ă©tait JĂ©rĂŽme Sans (ancien directeur du Palais de Tokyo, UCCA). A lâoccasion de cette exposition, il a Ă©galement
publiĂ© un premier livre qui traite plus particuliĂšrement de ses Ćuvres plastiques de 1996 Ă 2006. Au salon
Artbrussels (2007), il a Ă©tĂ© invitĂ© par le BOZAR Ă rĂ©aliser une Ćuvre liĂ©e Ă lâĂ©vĂ©nement. Jan Lauwers a Ă©tĂ© invitĂ©
par Luk Lambrecht Ă participer Ă lâexposition collective de cĂ©ramiques Down to Earth au CC Strombeek, avec
notamment des Ćuvres dâAnn Veronica Janssens, Heimo Zobernig, Atelier Van Lieshout, Lawrence Weiner, Kurt
Ryslavy et Manfred Pernice.
![Page 26: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/26.jpg)
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En mai 2009, JérÎme Sans a invité Jan Lauwers à exposer dans le cadre de Curated by_vienna 09. Curated by
rassemblait 18 galeries d'art contemporain viennoises et un certain nombre de commissaires internationaux. Champ
dâAction et M HKA ont organisĂ© en septembre 2011 la 8e Ă©dition de Time Canvas, oĂč « Last Guitar Monster » de Jan
Lauwers a été diffusé.
Les Déconstructions sont composées par Jan Lauwers à partir des débris des musées. Ces installations muséales
avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©es au BOZAR (Bruxelles) et Ă la haus der kunst (Munich) en 2007. Lâensemble NC y a
exĂ©cutĂ© une performance marathon de six heures reprĂ©sentant lâunivers mental de Jan Lauwers. De lĂ est nĂ© The
House of Our Fathers, qui Ă©tait Ă voir Ă la 16e Ă©dition des Internationale Schillertage de Mannheim, au Museum M
de Louvain (2011) et pendant le Kunstfestspiele Herrenhausen de Hanovre (2013).
![Page 27: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/27.jpg)
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En tant quâartiste individuel, Maarten Seghers crĂ©e des objets, des installations, des performances et de la musique.
Sous couvert dâune absurditĂ© apparente, Seghers dĂ©shabille - avec sa derniĂšre creation WHAT DO YOU MEAN WHAT
DO YOU MEAN AND OTHER PLEASANTRIES (2014) - la pratique de lâart avec toute son inimitable finesse, et il se fraye
un passage à travers la nécessité de notre souffrance, en toute beauté et hilarité.
Maarten Seghers a crĂ©Ă© OHNO COOPERATION en 2006 en Ă©troite collaboration avec lâartiste Jan Lauwers et la
musicienne Elke Janssens. Ensemble, ils font des performances, des créations vidéo, des installations et de la musique.
OHNO COOPERATION invite Ă©galement dâautres artistes et musiciens et prĂ©sente le rĂ©sultat de ses collaborations lors
de tournĂ©es internationales dâexpos et de concerts. Ces confrontations constituent un enrichissement fondamental
pour la suite de leur parcours.
Depuis 2001, Maarten Seghers, diplÎmé en mise en scÚne théùtrale à Bruxelles, est par ailleurs impliqué dans les
créations théùtrales et de danse de Jan Lauwers et Grace Ellen Barkey en tant que performer et compositeur.
Needcompany le soutient pleinement, tant sur le plan artistique que de la production.
Dans les spectacles Images of Affection (2002), La chambre dâIsabella (2004), Le Bazar du Homard (2006), La maison
des cerfs (2008) de Jan Lauwers et (AND) (2002), Chunking (2005) et The Porcelain Project (2007) de Grace Ellen Barkey
il a composé la musique du spectacle, en plus de sa participation en tant que performer.
Pour No Comment (2003), Chunking, Needlapb, Lâart du divertissement (2011) et The Unauthorized Portrait (2003) â
un film de Nico Leunen sur Jan Lauwers â il a signĂ© la musique.
Needcompany le soutient pleinement, tant sur le plan artistique que de la production. Certaines de ses Ćuvres ont
Ă©tĂ© intĂ©grĂ©es Ă la collection permanente du FRAC Nord â Pas de Calais.
CONSULTEZ LES BIOGRAPHIES DES PERFORMERS ICI
Grace Ellen Barkey
Jules Beckman
Anna Sophie Bonnema
Hans Petter MelĂž Dahl
BenoĂźt Gob
Mohamed Toukabri
![Page 28: Une production de Needcompany. Coproduction](https://reader031.vdocuments.mx/reader031/viewer/2022020623/61f1120e7356e31a631e1c93/html5/thumbnails/28.jpg)
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Quai au foin 35
Bâ1000 Bruxelles
tél. +32 2 218 40 75
www.needcompany.org
Directeur Artistique | Jan Lauwers
Directeur général | Yannick Roman : [email protected]
Coordination artistique | Elke Janssens : [email protected]
Directrice administrative | Eva Blaute : [email protected]
Assistant au directeur général et tournées | Toon Geysen : [email protected]
Directrice technique | Marjolein Demey : [email protected]