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109 The Canadian Journal of Program Evaluation Vol. 24 No. 1 Pages 109–132 ISSN 0834-1516 Copyright © 2010 Canadian Evaluation Society Correspondance à l’auteure : Elsa Piou Iliassi, 2 rue des Aires, 66 600 Calce, France; [email protected] Résumé : Abstract: L’ÉVALUATION DES PROGRAMMES DE DÉVELOPPEMENT EN AFGHANISTAN. ÉTUDE DE CAS : UNE ÉVALUATION PARTICIPATIVE DU PROGRAMME DE SOLIDARITÉ NATIONALE Elsa Piou École des Hautes Études en Sciences Sociales Paris, France Cette étude de cas concerne le processus d’évaluation à l’œuvre dans le Programme de Solidarité Nationale (NSP) en Afghanistan et une méthodologie pilote d’évaluation participative utilisée au niveau local. Face aux défaillances des mécanismes d’évaluation existants, qui peuvent aboutir à des résultats contradictoires, la méthodologie proposée d’évaluation participative se base sur les théories de l’anthropologie du don. Elle vise à étudier les impacts d’un programme à travers le vécu et l’analyse partagée entre les partenaires. Cette méthodologie soulève de nombreux enjeux opérationnels et concernant l’articulation entre proces- sus d’évaluation et programme. Cependant, en faisant évoluer les perceptions des différents acteurs, l’outil présenté peut être considéré comme un levier pour le changement social. This case study focuses on the evaluation and monitoring proc- ess implemented for a development program in Afghanistan, the National Solidarity Program (NSP), and a pilot methodology for participative evaluation at the local level. Given the weaknesses of the current evaluation system, which can produce contradic- tory results, the proposed participative evaluation methodology is based on gift-giving and exchange anthropology theory and at- tempts to study program impacts through experience and analysis shared by the partners. This methodology raises many opera- tional issues and issues involving the link between evaluation and program processes. The tool presented may be considered a lever for social change through the evolution in perception among various participants. Depuis 2002, de nombreux programmes de dévelop- pement sont mis en œuvre en Afghanistan. Leur impact est très différemment relayé. Ils peuvent être marqués par un manque de

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109The Canadian Journal of Program Evaluation  Vol.  24 No.  1  Pages 109–132ISSN 0834-1516  Copyright © 2010  Canadian Evaluation Society 

Correspondance à l’auteure : Elsa Piou Iliassi, 2 rue des Aires, 66 600 Calce, France; [email protected]

Résumé :

Abstract:

L’ÉVALUATION DES PROGRAMMES DE DÉVELOPPEMENT EN AFGHANISTAN. ÉTUDE DE CAS : UNE ÉVALUATION PARTICIPATIVE DU PROGRAMME DE SOLIDARITÉ NATIONALE

Elsa PiouÉcole des Hautes Études en Sciences SocialesParis, France

Cette étude de cas concerne le processus d’évaluation à l’œuvre dans le Programme de Solidarité Nationale (NSP) en Afghanistan et une méthodologie pilote d’évaluation participative utilisée au niveau local. Face aux défaillances des mécanismes d’évaluation existants, qui peuvent aboutir à des résultats contradictoires, la méthodologie proposée d’évaluation participative se base sur les théories de l’anthropologie du don. Elle vise à étudier les impacts d’un programme à travers le vécu et l’analyse partagée entre les partenaires. Cette méthodologie soulève de nombreux enjeux opérationnels et concernant l’articulation entre proces-sus d’évaluation et programme. Cependant, en faisant évoluer les perceptions des différents acteurs, l’outil présenté peut être considéré comme un levier pour le changement social.

This case study focuses on the evaluation and monitoring proc-ess implemented for a development program in Afghanistan, the National Solidarity Program (NSP), and a pilot methodology for participative evaluation at the local level. Given the weaknesses of the current evaluation system, which can produce contradic-tory results, the proposed participative evaluation methodology is based on gift-giving and exchange anthropology theory and at-tempts to study program impacts through experience and analysis shared by the partners. This methodology raises many opera-tional issues and issues involving the link between evaluation and program processes. The tool presented may be considered a lever for social change through the evolution in perception among various participants.

Depuis 2002, de nombreux programmes de dévelop-pement sont mis en œuvre en Afghanistan. Leur impact est très différemment relayé. Ils peuvent être marqués par un manque de

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connaissance de l’organisation locale, l’importation de techniques difficilement maîtrisables par les populations locales, l’extériorité de l’aide (Centlivres & Centlivres-Demont, 1999; Dorronsoro, 1993; Gentelle, 1979; Lorentz, 1987; Ritchie, 2006; Roy, 2000). En parallèle, un discours très rassurant met en avant les progrès réalisés (Banque Mondiale, 2008; Rahimi, 2006). On en vient naturellement à se de-mander comment les programmes sont évalués. Si les interventions extérieures se sont multipliées, de quelle manière influencent-elles la vie des populations locales?

Le Programme de Solidarité Nationale (National Solidarity Program ou NSP) constitue l’un des plus ambitieux programmes actuellement en cours en Afghanistan. Depuis 2003, il est coordonné par le gouver-nement Afghan à travers le Ministère de la Réhabilitation Rurale et du Développement (MRRD). Celui-ci est appuyé, pour l’ensemble du processus méthodologique, par un organisme de consultants (Over-sight Consultants ou OC/NSP), devenu Management Support Consul-tant (MSC) en 2007. Le NSP, financé en large partie par la Banque Mondiale, vise à réduire la pauvreté et améliorer la gouvernance locale (MRRD, Oversight Consultants, 2006). Dans chaque district, le MRRD contracte avec un « facilitateur » (Facilitating Partner ou FP). Il s’agit d’ONG. Elles sont chargées d’appuyer le Conseil de Développement Communautaire (CDC) et les communautés rurales dans chacune des cinq étapes prévues : (a) information et mobilisation sur le programme, (b) préparation et tenue des élections des Conseils de Développement Communautaire, (c) élaboration d’un plan de développement communautaire, (d) préparation et soumission de propositions de projets, et (e) réalisation concrète des projets. Les CDC sont responsables de l’ensemble du processus dans la communauté, et notamment de la consultation des habitants. À terme, le NSP devrait être implanté dans l’ensemble des communautés Afghanes. En mars 2007, il avait été présenté à 16 827 communautés rurales dans 34 provinces, sur un total d’environ 24 000 communautés; 16 343 CDC avaient été élus, 16 068 plans de développement communautaire remplis, 25 525 projets approuvés, et 10 001 projets terminés (NSP Quality Assurance Unit, 2007).

Le NSP est présenté comme « le » programme participatif du gou-vernement Afghan. Un programme participatif suppose notamment une implication des populations dans le processus évaluatif. Qu’en est-il dans le NSP?

Les mécanismes d’évaluation mis en œuvre dans le NSP, complexes et essentiellement quantitatifs, font apparaître des défaillances, les

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résultats obtenus étant peu révélateurs de l’impact du programme et pouvant être contradictoires avec des observations de terrain (Piou, 2009a). Une évaluation participative, menée entre septembre 2006 et juillet 2007 en collaboration avec des villageois et les équipes de l’ONG MADERA (Mission d’Aide au Développement des Économies Rurales Afghanes) facilitant le programme, propose une alternative. Le pré-sent article traite un cas pratique de recherche-action : il est issu de cette évaluation pilote (MADERA, 2007), ainsi que d’observations de terrain et d’entretiens complémentaires auprès de la population et de professionnels du NSP. La zone d’étude concerne les provinces du Laghmân, de la Kunar, et du Nuristân.

UN PROGRAMME COMPLEXE AUX MÉCANISMES D’ÉVALUATION DÉFAILLANTS

L’évaluation et le suivi du NSP se confondent et traitent essentiel-lement de la conformité entre les prévisions et la réalisation du programme. Confié aux ONG facilitatrices (FP) et à l’organisme de consultants superviseur (OC/NSP), le travail de suivi-évaluation favorise une relation de contrôle parmi les acteurs du programme.

Évaluer l’adéquation entre les critères du programme et leur application

Plusieurs mécanismes d’évaluation se superposent mais restent li-mités.

Au niveau national, des évaluations commanditées par le Ministère Afghan du Développement de la Réhabilitation Rurale (MRRD) ou la Banque Mondiale ont été menées, mais plusieurs de leurs résultats restent confidentiels. Pendant les trois dernières années, Afghanistan Research and Evaluation Unit (AREU) a mené plusieurs études sur le NSP concernant : les difficultés rencontrées par les FP (Kakar, 2005), la validation de l’aspect participatif du programme (Boesen, 2004), les impacts du NSP en termes de gouvernance locale (Nixon, 2008). Cependant, ces études ne remettent pas en question les pa-radigmes promus par le NSP (comme celui de la gouvernance). Les questionnements s’inscrivent dans la continuité des objectifs mis en avant par le programme.

L’OC/NSP dispose de trois équipes mobiles Post Implementation Mo-nitoring (PIM), basées à Kabul et chargées du suivi des communautés après la réalisation des projets. Elles travaillent à partir d’une liste de questions de plus de 10 pages (MRRD, 2006, Form 5, OC’s Com-

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munity-Level Monitoring Report). Cet outil se propose essentiellement d’évaluer la connaissance que les villageois (et surtout le Conseil de Développement Communautaire ou CDC) ont du programme, puisque la plupart des questions visent à vérifier si les activités sont menées en accord avec le Manuel des Opérations (recueil de l’ensemble des procédures du NSP, actualisé chaque année).

Dans chaque région, l’OC/NSP coordonne une équipe Monitoring and Evaluation (M&E) qui travaille en théorie à partir du même formulaire que les PIM. Cependant, les équipes M&E rencontrées préféraient poser quelques questions aux villageois, afin de s’assurer qu’ils connaissaient le cadre du programme (de qui vient-il, qui le finance, etc.), plutôt que d’imposer ces longs questionnaires. Elles formulaient quelques recommandations orales ou écrites aux équipes facilitatrices (professionnels), en fonction des normes définies dans le Manuel des Opérations. Ces remarques ou critiques étaient vécues par les professionnels comme un contrôle, ce qui ne favorisait pas une réelle amélioration de leurs pratiques (MADERA, 2007).

Pour chaque district, l’ONG Facilitating Partner concerné transmet essentiellement des données quantitatives à l’OC/NSP à travers des rapports mensuels et trimestriels. La participation féminine, par exemple, est évaluée en fonction du nombre de sous-CDC de femmes élus et du nombre de projets soumis par les femmes. Or, l’existence d’une instance de représentation ne signifie nullement qu’elle par-ticipe à la prise de décision. De plus, différentes stratégies peuvent être développées par les acteurs en présence et les projets réservés aux femmes être détournés des objectifs mis en avant par le NSP et pas toujours en adéquation avec la société locale (Piou, 2009b).

Les villageois ne sont associés à aucune étape du processus de réflexion sur le programme. En 2009 et depuis le lancement du programme, deux National Public Consultation Conferences avaient été organisées à Kabul, mais s’apparentent davantage à de grands rassemblements destinés à mettre en avant les succès du NSP et à intensifier le lien entre les campagnes et le gouvernement central (MRRD, 2007).

Les professionnels disposent simplement d’un formulaire (MRRD, 2006, Capacity Assessment Form 1b), destiné à l’OC/NSP et au MRRD, qui évalue les capacités développées par les CDC. Il s’agit par exemple de s’assurer que « le livre logistique comporte toutes les signatures » ou qu’« au moins trois membres de la communauté ont participé à l’appel d’offre ». Plusieurs questions concernent la proportion dans laquelle les membres du CDC ou de la communauté ont intégré ces

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normes : « il y a moins de 10 % d’erreur dans le livre de comptabilité »; « des membres de la communauté sont capables (ou pas capables) de vérifier le livre des comptes ». Quelques rubriques sollicitent directe-ment les professionnels : « terminer les projets est une priorité pour la communauté. » S’assurer que les CDC assument la gestion des projets, la comptabilité, travaillent en consultant les communautés, et ainsi de suite sont autant d’éléments qui constituent, selon la logique du programme, des garanties d’une « bonne gouvernance ». Les critères d’évaluation définis correspondent à une vision très ethnocentriste des objectifs à atteindre. La perception locale de la « gouvernance », sa correspondance dans les systèmes de représentation et de prise de décision, et l’appropriation de cette question par les communautés ne sont pas considérés.

Les professionnels des FP ont la responsabilité d’accompagner les communautés pour qu’elles atteignent les objectifs fixés. Ils se re-trouvent donc dans la position de devoir évaluer les résultats de leur propre travail. Dans le cas de résultats « insatisfaisants », les fonds destinés à la communauté restent bloqués, jusqu’à une nouvelle évaluation :

The CDC must receive a “(2) satisfactory” or “(3) very good” grade for each indicator to be eligible for additional funds. Since all the indicators are considered a minimum requirement for eligibility, the CDC is not eligible for additional funding if they receive a grade of “(1) un-satisfactory” for any indicator. (MRRD, 2006, Capacity Assessment Form 1b)

Entre temps, les professionnels doivent répéter des formations pré-vues pour les CDC. Cela signifie également une surcharge de travail, et aucune garantie de réussite, puisqu’il s’agit d’inculquer des pra-tiques qui dépassent en grande partie les représentants villageois (e.g., le trésorier du CDC doit être en mesure de manipuler et remplir sans erreur neuf livres de comptes différents). Les professionnels ont tendance à développer des stratégies de défense et à exagérer les réponses positives (MADERA, 2007).

Un discours évaluateur réservé à des « experts »

L’évaluation est réservée aux équipes de consultants (OC/NSP) qui contrôlent la mise en œuvre du programme. Ce processus établit une relation inégale entre ceux qui évaluent et ceux qui doivent apprendre et s’adapter.

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Face à ce monopole du discours évaluateur, professionnels et villa-geois ont tendance à développer des stratégies de défense. Des pro-fessionnels font à la place des villageois pour accélérer le processus ou ont pu surévaluer le risque d’insécurité dans des zones éloignées afin de dissuader les équipes de l’OC/NSP de s’y rendre, et de les accompagner uniquement dans des communautés choisies. Certains travaillent à former les villageois afin qu’ils répondent en concordance avec les questions qui leurs seront posées, par exemple, « de qui vient le NSP? », auquel il faut répondre, « du gouvernement Afghan ». Tout cela contribue à accroître la distance entre ce qui est affiché par le programme et la réalité locale. Par exemple, des communautés répondent à l’exigence du NSP d’avoir une représentation féminine, même si celle-ci reste souvent symbolique.

L’OC/NSP est perçu comme un contrôleur, dont la légitimité est re-mise en cause. Il est en position de rappeler les règles, ce qui suppose une relation de pouvoir, mais reste distant des communautés qui ne sont pas autorisées à une réelle prise de parole. Le partenariat est limité. Villageois et professionnels n’entretiennent pas de relation de confiance avec l’évaluateur et subissent l’évaluation.

Il n’existe pas d’espace de confrontation où les différentes logiques des acteurs du programme (MRRD, OC/NSP, FP, CDC, villageois) puis-sent s’exprimer. Il en résulte la coexistence de diverses stratégies indi-viduelles ou de groupes, qui restent plus ou moins dissimulées afin de préserver le déroulement du programme. Des professionnels tentent de camoufler la réalité, les villageois se présentent comme il convient pour s’assurer un accès aux financements. Cela contribue à faire du NSP un théâtre, dans lequel chaque acteur joue le rôle qui a été défini pour lui. Il devient très délicat d’aller au-delà d’un discours devenu officiel et de ce qui est affiché, pour analyser l’impact du programme.

Tout questionnement sur le sens de l’action mise en œuvre est évité.

La nécessité ressentie de prendre du recul

Dans ce contexte, les ONG FP ne disposent pas d’une réelle visibilité concernant les impacts des actions menées. Les professionnels déve-loppent des perceptions personnelles sur les effets du NSP, en fonction de leur vécu, leur expérience, leurs représentations des villageois et des changements qu’ils estiment nécessaires. Or, le NSP occupe désormais une place prépondérante dans les activités de plusieurs ONG. En 2007, plus de la moitié des effectifs de l’ONG MADERA

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étaient engagés dans ce programme. Elle intervenait dans 650 com-munautés réparties dans différentes provinces : Nuristân, Laghmân, Kunar, et Ghor (entretien avec la direction, 2007). Fin 2007, l’ONG Agency for Technical Cooperation and Development (ACTED) mettait en oeuvre le programme dans 1 721 communautés, soit plus de 9 % des communautés mobilisées dans le pays (ACTED, 2008).

Lors du lancement du programme, les incertitudes ont pu laisser des espaces d’échange ouverts. Avec l’augmentation croissante du nombre de communautés et la charge de travail correspondante, les professionnels se sont efforcés de mieux maîtriser les procédures qui s’imposent à eux. Progressivement, ils se sont professionnalisés et ont eu tendance à se laisser entraîner dans une routine, la place laissée aux échanges et à la prise de distance s’amenuisant d’autant. Or, questionner les pratiques demande une réelle démarche : dégager du temps, prendre du recul par rapport à un cadre et des procédures de travail qui ont été assimilés. Cela peut s’avérer d’autant plus complexe que les professionnels sont pris dans une tension qu’ils se doivent de gérer entre l’application d’un programme et des commu-nautés qui ne sont pas automatiquement adaptées à ses exigences.

A travers la mise en œuvre d’une évaluation participative pilote, l’ONG MADERA a souhaité développer un regard réflexif et d’apprentissage à partir des pratiques. Ce mouvement se démarque d’une tendance à l’institutionnalisation des ONG, qui se professionnalisent. En tentant de survivre dans l’environnement de la coopération internationale très concurrentiel, elles tendent à se reproduire pour elles mêmes, à deve-nir une fin en soi, et cessent de se questionner sur les finalités de leurs actions. Ce processus d’institutionnalisation aboutit à la mise à l’écart des « bénéficiaires » de toute réflexion sur la structure et les actions menées. Ils deviennent de simples usagers. Dans toute démarche par-ticipative, cette distance doit être réduite et la relation transformée, afin que les « usagers » puissent se positionner en « partenaires ».

UNE MÉTHODOLOGIE ALTERNATIVE D’ÉVALUATION PARTICIPATIVE

Face aux défaillances du système d’évaluation du NSP, l’ONG MA-DERA a souhaité mener une évaluation participative. Celle-ci avait pour objectif de : formuler des propositions pour renforcer les prati-formuler des propositions pour renforcer les prati-ques de développement communautaire, mettre en évidence l’impact du NSP sur les communautés et sur les structures de pouvoir local, travailler sur les conditions de la participation des femmes et des

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hommes dans le débat public communautaire. Il s’agissait également d’accompagner une prise de recul sur les pratiques professionnelles, à travers une analyse partagée entre les partenaires.

Le modèle de l’évaluation participative

L’évaluation participative suppose une implication des différents acteurs (y compris les habitants) comme partenaires de l’évaluation.

Les théories du don développées dans le prolongement de Marcel Mauss (Godbout, 2000; et dans La Revue du MAUSS) soulignent et analysent les implications et l’importance des relations humaines, des échanges sous forme de don, la relation d’aide en faisant partie. L’anthropologie du don rappelle que les hommes s’inscrivent dans des relations sociales où ils se positionnent constamment en tant que donneurs et receveurs. Ils sont reliés par des échanges qui s’opèrent sur le mode de la réciprocité. Ainsi, donner à quelqu’un établit la relation, mais celle-ci ne perdure, et ne s’équilibre momentanément que s’il est donné l’occasion de rendre, ce qui n’éteint pas la dette symbolique mais la fait circuler. La dignité dépend notamment de l’espace laissé pour rendre possible ce contre don.

Cette approche anthropologique implique, au niveau méthodologi-que, la création d’espaces de participation ouverts, nécessaires à l’expression de ce contre don. Être partenaire d’un programme (ou d’une évaluation), suppose de pouvoir y apporter quelque chose de soi-même, un supplément. Les villageois, en partageant et faisant valoir leur vécu, valeurs, représentations, perceptions, et proposi-tions au même titre que les autres acteurs du programme, peuvent se reconnaître comme partenaires, et non plus être considéré comme des « bénéficiaires récepteurs ».

L’objet de l’évaluation est déplacé : c’est le programme dans son en-semble qui est au centre et c’est sur lui que les partenaires portent leur regard. Les villageois ne sont pas « objets d’étude » ; ils ne sont pas « parlés » (Bourdieu, 1977) mais peuvent intervenir, s’investir dans la réflexion commune sur l’adaptation de l’action. Ils peuvent se reconnaître dans le projet d’évaluation et se l’approprier lorsqu’il intègre leur point de vue. Ils ont aussi un retour sur les analyses, dont ils sont souvent privés dans une recherche classique. La restitu-tion des résultats fait partie du processus de circulation de la dette. Le chercheur propose des analyses aux villageois et leur offre une nouvelle occasion de contre donner par un regard réflexif sur leurs discours et pratiques.

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Les tentatives de la population pour s’approprier les programmes (peu participatifs) doivent être prises en compte. Un programme de déve-loppement et l’arrivée d’un projet dans une communauté modifient les relations de pouvoirs. Une relation de dette (au moins symbolique) est créée, mais est rarement considérée par les développeurs.

L’approche par les théories du don intègre les circulations de dettes symboliques, constructrices du lien social, et se propose de prendre en considération la société locale dans sa complexité. Une évaluation cantonnée à une mesure d’efficacité de l’action, à une perspective économique, laisse de côté tout un pan de la société.

La méthodologie vise à créer « un lieu de confrontations concrètes d’acteurs sociaux en interaction autour d’enjeux communs » (Olivier de Sardan, 1995, p. 179). Les acteurs expriment des représentations, attentes, et points de vue très variables; ils défendent des stratégies diverses, voire contradictoires. Les espaces créés doivent présenter les conditions nécessaires à une confrontation des logiques et perceptions. « Il s’agit d’une négociation sociale, collective, une confrontation “orga-“orga-orga-nisée” entre les points de vue, les conceptions, les représentations, les systèmes de référence, les valeurs et les savoirs, les connaissances, les compétences, les expériences, les idéologies des différentes personnes vivant ou exerçant dans le territoire » (Bass, 2001).

Une attention particulière portée sur les techniques d’animation, la posture des facilitateurs, et la préparation des réunions permet à une parole inédite d’exister dans les espaces créés. Obtenir une expression libérée et inédite nécessite beaucoup de préparation et surtout une qualité dans la relation : prendre le temps de se rencontrer à plusieurs reprises, respecter l’organisation sociale locale, aborder d’autres sujets de conversation que le programme. Sortir d’une relation inégale entre évaluateurs et évalués suppose un travail préliminaire sur les pra-tiques, les perceptions, et les relations existantes entre professionnels et villageois. L’évaluateur doit se repositionner, être à l’écoute, et s’ins-crire dans une démarche d’apprentissage : il apprend des échanges d’expérience entre les différents acteurs et s’investit dans une ré-flexion menée en commun. Instaurer un réel échange signifie que les villageois ne sont pas les seuls à raconter, mais que les facilitateurs doivent aussi apporter à la relation. Ils racontent leur expérience du programme dans leur propre village, comme professionnels, des his-toires ou anecdotes entendues. Tenter de susciter le rire est d’ailleurs un outil de facilitation. Ces échanges d’expérience servent souvent de levier à la discussion qui s’engage alors d’elle-même. « La participation se négocie, c’est un rapport » (Caratini, 2004, p. 92).

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L’évaluateur s’intègre dans une relation avec les villageois sur le mode du don : une dette symbolique circule entre les acteurs qui acceptent de livrer qui ils sont. L’instauration d’une relation de confiance sup-pose de comprendre l’autre dans son identité et libère la parole. « Le chercheur leur fait, implicitement, la proposition suivante : «ouvrez moi votre zone d’incertitude, donnez moi la clef, mais je ne l’utiliserai pas […]». C’est un rapport de dette : La réussite de l’interviewer, c’est quand l’interviewé vous quitte en disant : «Je vous remercie.» Celui qui donne reçoit » (Godbout, 2007, p. 250).

L’application et adaptation de la méthodologie en Afghanistan

En Afghanistan, les espaces d’échanges et la parole sont ritualisés, ce qui réduit les risques d’être décrédibilisé en public. Avant de donner un avis, surtout dans la sphère publique, il importe de connaître la réponse qui pourra être donnée, afin de ne pas se heurter à un refus. Celui-ci remettrait en cause le prestige personnel, l’honneur, en public. Celui qui parle établit « la » voix de la communauté et il est difficile de le contredire, de le critiquer ouvertement car beaucoup de positions se jouent dans le « théâtre » des réunions publiques. La prise de parole, espace où peuvent se manifester les relations de compétition, est risquée. Les individus utilisent toutes les occasions pour participer au jeu politique, asseoir leur prestige personnel afin que le groupe reconnaisse leur légitimité. « Dans le monde de la po-litique fondée sur le prestige, les initiatives ne deviennent risquées que quand elles sont publiques » (Azoy Whitney, 2002, p. 62).

Il y a toujours un voile, une part cachée dans la parole publique. Un débat contradictoire, se voulant ouvert et franc, peut avorter car les enjeux réels se situent ailleurs, à sa marge. Les oppositions qui s’ex-priment publiquement concernant la réalisation d’un projet peuvent n’être qu’un signe d’une lutte de prestige, le projet n’étant qu’un prétexte à la prise de parole. Dans ce contexte, toute parole collectée pose la question de son interprétation et de son sens.

L’intervenant extérieur au village peut se retrouver, sans l’avoir sou-haité, au centre d’enjeux de prestige, de compétitions, et de rivalités. Une distance est aussi préservée par la population qui ne se dévoile pas totalement vis-à-vis de lui, ce qui se retrouve dans les règles d’hospitalité. Un théâtre se joue devant lui, et il joue parfois un rôle qu’il ne maîtrise pas et n’a pas choisi. On attend aussi de lui qu’il sache faire « remonter » certains discours ou demandes en termes de projets. Cependant, son extériorité, lorsqu’il entretient une relation de confiance avec les villageois, suscite également les confidences.

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L’organisation sociale afghane est très hiérarchisée. La parole des anciens, de ceux qui occupent des positions sociales prestigieuses, des lettrés est respectée. Les évaluateurs (qui sont aussi des profes-sionnels) sont considérés comme des « éduqués » par la population, leur discours est davantage écouté. Pour que l’évaluation ne soit pas perçue comme normative, mais soit force de propositions, il est es-sentiel de transformer cette relation. La méthode participative « vise à transgresser les mécanismes d’exclusion multiformes générés par le développement, et dont la division entre ceux qui subissent les problèmes et ceux qui les analysent serait justement un symptôme. […] Elle légitime ainsi une nouvelle pratique sociale de la recherche, qui abolit tendanciellement aussi bien le modèle du chercheur que celui de l’expert » (Guichaoua & Goussault, 1993, p. 56). L’expert n’a plus qu’un rôle d’accompagnement des équipes et villageois dans cette prise de recul sur les pratiques.

Les villageois Afghans, pour lesquels l’autonomie constitue l’une des valeurs saillantes, ont une compréhension intuitive des enjeux de pouvoir induits par une relation d’aide, qui traversent leur organi-sation sociale et politique. Si l’intervention d’acteurs extérieurs est un « facteur de changement social et de recomposition identitaire » (Centlivres & Centlivres-Demont, 1999, p. 963), les Afghans ne sont pas les receveurs passifs de l’aide. Ils développent des stratégies d’adaptation et de refus, et des tentatives de contre donner, qui doi-vent être explicitées afin de comprendre les impacts d’un programme.

L’intérêt de l’étude de cas suppose de prendre en considération et ana-lyser le contexte socio-politique de quelques communautés, qui éclaire les dynamiques en présence. Elle suppose une approche qualitative, un suivi des évolutions locales, une compréhension des logiques des acteurs, ce qui est impossible si l’on considère l’ensemble des villages participant au NSP.

Si la recherche est localisée, elle ne se limite pas à une approche pu-rement spatiale. Les « communautés » sont disséminées dans l’espace, traversées et influencées par des flux de personnes, de biens, d’idées, de valeurs, et ainsi de suite. Le NSP appréhende « la communauté » comme un groupement d’au moins 25 familles nucléaires (MRRD, 2006). L’image de la « communauté villageoise consensuelle » (Olivier de Sardan, 1995, p. 60) ne peut qu’être remise en cause. Les notables et leaders se sont multipliés, l’économie s’est autonomisée du poli-tique, divers groupes et individus défendent des stratégies variées, les échanges se sont amplifiés et des relations d’interaction sont ac-

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tivées avec l’extérieur. C’est dans les relations, dans le sentiment de se reconnaître comme partie prenante d’un même groupe que peut se définir la « communauté ». Le terme de qawm « exprime bien la complexité de la réalité sociale afghane. […] Son niveau de référence varie : tour à tour il peut signifier parentèle élargie, lignage, tribu ou groupe ethnique, voire groupe professionnel ou religieux » (Centlivres, cité par Monsutti, 2004, p. 116). Les groupes identitaires se superpo-sent et s’entremêlent. Le sentiment d’appartenance s’est complexifié avec la guerre, les migrations, le développement de nouveaux réseaux.

Ces changements conditionnent la méthodologie de recherche : il est nécessaire d’intégrer et privilégier une étude des relations sociales pour comprendre les enjeux qui se nouent autour d’un programme et appréhender ses impacts. L’approche est « trans-communautaire » (Monsutti, 2004) dans le sens où elle considère le territoire, mais aussi les différents réseaux et acteurs qui travaillent et influencent cet espace discontinu.

La structure de l’évaluation

L’évaluation a été pensée afin de créer des espaces d’échange et de partage.

Une structure impliquant différents acteurs

Un groupe d’analyse s’est chargé de la coordination de l’évaluation, la formation des facilitateurs, la réalisation des guides d’entretiens, l’animation du comité de pilotage et des entretiens auprès des pro-fessionnels, la traduction, l’analyse des entretiens, la rédaction des rapports, et l’organisation des restitutions.

Un comité de pilotage, composé de professionnels, de représentants de Conseils de Développement Communautaire (CDC), de personnes influentes dans les communautés, et de villageois (soit une quinzaine de personnes), s’est réuni à deux reprises. Il peut se positionner par rapport aux points de vue issus des entretiens et aux pistes de réflexion qui lui sont présentées, et proposer ses propres analyses.

Le groupe de facilitateurs, une fois formé, a participé à la réalisation des guides d’entretiens. Il est responsable de l’animation des entre-tiens collectifs auprès des CDC et de la population, de la rédaction de comptes rendus. Il participe à une restitution collective, ainsi qu’à une première analyse.

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Six communautés ont pris part à l’évaluation. Du fait des moyens et du temps disponibles, il a été décidé d’impliquer une communauté par district (Wamâ, Want, Doab, et Nangaraj pour le Nuristân; Qarghay et Dawlatshâh pour le Laghmân). L’échantillon n’est pas représentatif (ce qui aurait nécessité un bien plus grand nombre de communautés étant donné la diversité locale en termes de langues, d’ethnies, de cultures, de conditions agro-écologiques, etc.) mais privilégie une pluralité de situations. Six critères pouvant influencer le travail d’éva-luation ont été définis (auxquels s’ajoute la situation sécuritaire) : la taille des hameaux, le niveau de vie, la proximité des axes routiers, l’existence d’un sous-CDC de femmes, les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre du programme, et la capacité d’initiatives présentée par le CDC. Six communautés, correspondant différemment aux critè-res mentionnés ont été présélectionnées. Chacune a discuté le projet d’évaluation avant de le valider au cours d’une réunion publique.

La formation des facilitateurs

La réalisation de l’évaluation a nécessité un temps de formation des équipes chargées d’animer les entretiens. Ni les facilitateurs, ni les villageois n’étaient familiers de cette approche. La formation a no-tamment porté sur le positionnement : il ne s’agissait plus d’expliquer le NSP, mais d’appréhender les représentations des villageois sur le programme et ses impacts. Ils devaient donc prendre de la distance avec leurs pratiques professionnelles et leurs stratégies personnelles et adopter un regard critique (dans le sens positif du terme).

Les facilitateurs ont participé à une adaptation des guides d’entretien, qui avaient vocation à évoluer et à relancer les discussions plutôt qu’à enfermer les facilitateurs dans des questionnaires (entretiens semi-directifs). Plusieurs sont devenus des interlocuteurs privilégiés, capables de prendre suffisamment de distance vis-à-vis d’un rôle de professionnel pour enrichir l’étude de leur propre expérience.

Les entretiens

Afin de rééquilibrer la parole, nous avons fait le choix d’effectuer des entretiens avec la population et les professionnels facilitant le programme, davantage qu’avec ses représentants officiels. Plusieurs documents reprennent le point de vue officiel du gouvernement et d’OC/NSP (MRRD, 2004, 2006, 2007).

Le travail a mobilisé plusieurs langues. Afin de dénaturer le moins possible, par les traductions, la parole exprimée, les entretiens ont

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donné lieu à de longues restitutions, privilégiant pashto et dari, pour assurer un maximum de fidélité par rapport au discours des villageois et entrer dans un système de référence, où les connotations, les sous-entendus ne sont pas les mêmes qu’en anglais.

Après la réalisation d’entretiens préparatoires (auprès de profes-sionnels des ONG, de villageois(es), et de membres des CDC), la méthodologie a été adaptée.

Les entretiens avec les professionnels (effectués entre novembre 2006 et mars 2007) ont respecté un échantillonnage représentatif des différents niveaux hiérarchiques (facilitateur, social organizer, team leader, et coordinateur), tout en évitant de mettre en présence un professionnel avec son supérieur hiérarchique, ce qui aurait pu créer un sentiment d’être évalué. Afin de préserver la parole des facilitatrices, des réunions leurs ont été spécifiquement dédiées, séparément de leurs homologues masculins. Une première série d’entretiens collectifs (facilitateurs et social organizer / team leader et coordinateur / femmes facilitatrices et social organizer) a porté sur le vécu des professionnels, leurs perceptions sur le programme, les relations avec ses différents acteurs, ses objectifs, ses atouts et les difficultés rencontrées. Trente-huit professionnels (24 hommes et 14 femmes) intervenant dans six districts ont participé.

Après un premier travail d’analyse, un entretien a regroupé des professionnels de chaque groupe (quelques facilitatrices étaient pré-sentes) afin de partager et discuter avec eux les écarts de points de vue, de saisir la culture et les logiques professionnelles en œuvre dans le programme.

Les entretiens avec les villageois ont été menés de mars à juin 2007 dans les six villages. Une première série d’entretiens collectifs a concerné différents acteurs selon la partition : leaders préexistants au NSP, représentants des CDC, villageois (opposés ou en accord avec le programme), villageoises, et représentantes des CDC. Nous avons ren-contré villageoises et représentantes ensemble, car les femmes présen-tent moins d’enjeux de pouvoir dans la prise de parole que les hommes. Au total, 31 membres de CDC, 44 personnes influentes, 79 villageois, et 20 femmes ont participé à la première série d’entretiens collectifs.

Dans un deuxième temps, dans chaque village, ces acteurs ont été mis en présence au cours d’entretiens de groupe (exclusivement mas-culins). Cela s’est révélé très instructif concernant les relations de pouvoir, mais aussi par la confrontation de perceptions différenciées du programme. Cette série de cinq entretiens a rassemblé 44 membres des CDC et personnes influentes et 36 villageois. Deux entretiens de

123123la revue Canadienne d’évaluaTion de Programme

groupe avec les villageoises, dans les communautés disposant d’une représentation féminine, ont réuni 12 femmes.

Les thèmes abordés ont concerné essentiellement la perception du programme et de son déroulement, les représentations des besoins de la population, les changements apportés par le NSP (sur la population, sur les formes de représentation locales, sur les professionnels), les difficultés rencontrées, la perception de leur propre rôle, la relation entre professionnels et villageois, et les objectifs du programme et ses réalisations.

Quelques entretiens avec des institutionnels (OC/NSP, MRRD, ca-dres d’ONG FP) visaient à impliquer ces derniers dans la réflexion. Il s’agissait de recueillir leurs points de vue sur le programme et de partager avec eux des analyses issues des entretiens avec les villa-geois et professionnels.

Tableau 1Récapitulatif des entretiens menés

Villageois Professionnels Institutionnels

Entretiens préparatoires 8 hommes et 2 femmes 2 hommes et 2 femmes

1 représentant de FP

Première phase d’entretiens avec les professionnels

24 hommes et 14 femmes

Deuxième phase d’entretiens avec les professionnels

10 hommes et 2 femmes

Première phase d’entretiens avec les villageois

75 membres de CDC et leaders, 79 villageois et 18 femmes, soit 174 personnes.

Deuxième phase d’entretiens avec les villageois

44 membres de CDC et leaders, 36 villageois et 12 femmes, soit 92 personnes.

Entretiens avec les institu-tionnels

Représentants de FP, d’OC/NSP, de la Banque Mondiale, du MRRD, soit 8 personnes

La « participation observante » (Caratini, 2004) et l’implication continue dans le programme

Chacun des acteurs a pu observer tout en participant, ou participer tout en observant. L’implication directe des évaluateurs a enrichi les analyses par des observations de terrain, l’animation de réunions avec les villageois, la réalisation d’analyses de besoins, l’organisation de formations, le suivi des activités du programme, la participation aux

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réunions institutionnelles, autant d’occasions de mieux comprendre les tenants et aboutissants du programme, sa complexité, et les stra-tégies qui s’expriment et s’y rencontrent.

C’est également à travers des moments partagés, des confidences, des histoires, qu’il a été possible d’accéder à une dimension plus profonde que celle qui était affichée au premier abord.

Le travail de restitution et de partage des analyses : un contre don nécessaire des « évaluateurs »

Le travail d’analyse de données a surtout consisté en des analyses de discours, couplées à des données sur l’évolution socio-politique des zones d’étude.

Le travail de restitution a fait partie intégrante de l’évaluation par-ticipative. Après la rédaction des rapports, leurs grandes lignes et conclusions ont été discutées avec professionnels d’une part et villa-geois d’autre part. Une restitution a été organisée au sein de l’ONG parmi ses dirigeants. Enfin, les résultats ont été partagés avec les acteurs institutionnels, à Kabul en juillet 2007. Plusieurs participants (essentiellement des FP) ont appuyé les conclusions de l’évaluation participative.

Cette phase essentielle permet à chacun d’être confronté à sa parole et à celle des autres acteurs, ainsi qu’à ses implications. Elle peut accompagner un premier changement dans les perceptions, mais aussi permettre d’identifier certaines situations de blocages, ressenties par les professionnels, contraints dans leur travail par la manière dont le programme avait été pensé.

LES ATOUTS ET LIMITES DE L’APPROCHE

Plusieurs limites ont pu bloquer l’évaluation participative pour qu’elle serve réellement de levier pour une évolution du programme. Cepen-dant, ce travail sur les représentations a permis d’opérer un premier pas vers le changement.

Crispations sur le programme et risques liés à la prise de parole

Tous les participants à l’évaluation étant impliqués dans le pro-gramme en tant qu’acteurs, ils ont continuellement dû opérer une gymnastique entre ces deux positionnements.

125125la revue Canadienne d’évaluaTion de Programme

En tant que participants directs au programme, souvent depuis plusieurs années, les membres de l’équipe avaient déjà un ressenti sur le programme et avaient eu l’occasion d’expérimenter sa mise en œuvre et de vivre son fonctionnement de l’intérieur. Ils avaient eu le temps de créer des relations de confiance (ou de défiance) avec les différents acteurs du programme.

Les professionnels ont été formés à respecter les cadres, les règles, et les procédures du NSP. La difficulté pour eux d’intégrer toutes ces procédures et la maîtrise des outils de suivi a entraîné une sorte de crispation sur le programme qui rend douloureuse la prise de recul par rapport aux pratiques en cours. Le questionnement du sens des actions menées a été éludé pour se focaliser sur la réalisation du programme dans sa définition officielle établie par le Manuel des Opérations.

Les professionnels ont eu tendance à réinterpréter et sélectionner les paroles des villageois qu’ils restituaient. Cela a constitué un enjeu de taille puisque l’évaluation était menée dans le souci de préserver la parole villageoise. Cette attitude était souvent de bonne foi, les professionnels considérant que les villageois avaient « mal répondu », qu’ils « ne savaient pas bien », et cherchaient à apporter des informa-tions « plus exactes ». Les villageois, habitués à une relation inégale, les sollicitaient également en leur demandant « est-ce que j’ai bien répondu? » Dépasser ces attitudes a nécessité du temps, mais indi-que également l’un des résultats de l’étude, à savoir, l’aspect très descendant du programme auquel les différents acteurs étaient ha-bituésDans cette perspective, l’expérience des facilitatrices a été très enrichissante. Davantage libérées d’enjeux de pouvoir, elles avaient tendance à répéter quasiment mot pour mot ce qu’elles avaient en-tendu, ayant comme enregistré dans leur mémoire la discussion passée, et ayant également moins de complexes à relayer les critiques qui étaient formulées à leur égard ou celui du programme.

Mobiliser une équipe de professionnels du programme pour animer les entretiens auprès des populations a influencé le discours des villa-geois. Ces derniers ont, dans un premier temps, mis en avant ce qu’ils pensaient que les équipes souhaitaient entendre, cherchant à main-tenir le programme au sein du village. En tant que femme étrangère, beaucoup ont tout d’abord souhaité me présenter une participation féminine idéale dans les communautés. Il était beaucoup plus facile d’obtenir un discours ouvert sur les sujets ne touchant pas directement au NSP. Les villageois contrôlaient davantage leur discours lorsque

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les discussions concernaient le programme. Au cours des entretiens, il est arrivé qu’un interlocuteur unique monopolise la parole en début de réunion, établissant l’espace de ce qui peut être dit, ayant tendance à se cadrer sur le discours de ceux qui « savent », qui connaissent le NSP (soit les professionnels) pour ne pas les contredire. C’est à l’occasion de ces entretiens qu’est nettement apparue une volonté de la part des villageois de préserver une part cachée, intime au village, et de ne di-vulguer que ce qui faisait partie du domaine public. Dans ce contexte, dépasser le discours habituellement réservé aux acteurs extérieurs a nécessité du temps et l’établissement de relations de confiance.

Cette attitude était liée à une culture de l’évaluation basée sur le contrôle plutôt que sur la participation de tous pour améliorer les pratiques. Les villageois n’étaient pas habitués à exprimer librement leur point de vue sur un programme et s’autocensuraient, appréhen-dant que les critiques ne soient synonymes d’un arrêt du programme. Ainsi, il était nécessaire d’expliquer à plusieurs reprises les objectifs de ce travail pour inciter la parole à sortir du « tout va bien » très répandu au premier abord et de renforcer une méthodologie basée sur l’anthropologie du don.

L’évaluation participative sollicite beaucoup les villageois et nécessite un réel engagement des communautés, ce qui peut parfois poser pro-blème dans un contexte où l’aide internationale est peu coordonnée, et très massive par endroits. Les villageois peuvent se lasser de par-ticiper à des réunions, qui, avec le NSP, se multiplient à un rythme qui n’est sûrement pas le leur.

Une méthodologie tournée vers le changement?

L’objet d’une évaluation participative réside également dans la for-mulation de propositions communes afin d’influencer le programme.

La plupart des études d’impact portant sur les programmes de dé-veloppement en Afghanistan sont des rapports mandatés par des organismes internationaux, reliées à des objectifs opérationnels. Elles portent sur les activités et les résultats des projets, en fonction d’objectifs fixés. Les termes de référence sont souvent trop précis pour que les experts puissent remettre en question les paradigmes promus par les politiques d’aide au développement. Si certaines ONG se donnent la liberté de mener des études « hors cadre », elles sont coûteuses. Elles s’ajoutent aux évaluations standardisées budgétées, et sont rares dans un contexte où les ONG se plient de plus en plus aux exigences des bailleurs de fonds.

127127la revue Canadienne d’évaluaTion de Programme

Plusieurs ONG traversent aujourd’hui une réelle crise d’identité, qui peut les amener à faire appel à des anthropologues ou sociologues pour trouver des réponses inédites à leurs questionnements. On se retrouve alors dans une méthodologie mixte de recherche-action. Le risque est le suivant : ces « chercheurs se mobilisent dans l’espoir de favoriser le dialogue entre les partenaires, d’établir un pont entre les cultures […]. Le plus souvent c’est en vain, car les équilibres sont précaires et la notion «d’aide au développement» trop pervertie par les pratiques en vigueur. Les cris des ethnologues se perdent alors dans le désert ou sont récupérés pour légitimer un nouveau discours dans lequel ils ne reconnaissent pas leur voix. Au bout du compte, le volet «action» de la recherche n’aura été qu’une illusion » (Caratini, 2004, p. 28).

L’introduction de la recherche-action pour une dynamique partagée de changement s’avère délicate. Des propositions qui sembleraient claires et concrètes à un sociologue peuvent rester floues et générales pour un gestionnaire de programmes. La compréhension des recom-mandations formulées dépend en grande partie de la sensibilité de chaque professionnel, et de sa perception du programme. C’est aussi en ce sens que cette évaluation participative ne reprend pas les procédures classiques de recherche, puisque l’équipe de chercheurs était également impliquée en tant qu’acteur. Cela a rendu possible quelques inflexions dans le programme et une concordance entre l’évaluation et l’approche des professionnels. Finalement, c’est la marge d’adaptation laissée par le programme qui permet ou non de mettre en œuvre les conclusions de l’évaluation. Dans le cas étudié, le NSP s’est démontré trop rigide et peu participatif pour se laisser influencer localement. Les recommandations, assimilées au bagage de développement communautaire de l’ONG, ne seraient bénéfiques qu’à certains projets à venir. Cette rigidité soulève la question du rôle des ONG aujourd’hui : celles-ci peuvent elles toujours prétendre être force de proposition ou sont elles réduites au rôle de sous traitants soumis aux politiques définies par les bailleurs de fonds?

Un nouvel espace d’échange a été créé, qui a permis l’évolution de certains regards ou l’expression d’une parole qui n’attendait que ces espaces pour pouvoir s’exprimer. Si des professionnels s’accommo-dent du NSP et n’ont pas souhaité investir les questionnements, des facilitateurs et facilitatrices, des villageois, des CDC ont été forces de proposition pour que les programmes de développement soient mis en œuvre selon d’autres modalités, en accord avec les valeurs, les savoirs être et savoir faire, et la culture locale. Certains professionnels et villageois se sont sentis valorisés par cette approche.

128 The Canadian Journal of Program evaluaTion128

La recherche-action accompagne le changement social, et l’implica-tion des villageois et professionnels dans le processus d’évaluation engendre des modifications plus rapides des comportements (Dionne, 1998). L’analyse partagée de discours et de représentations contribue à faire évoluer ces dernières, et ainsi, favorise le changement social. Contribuer à ce que ces acteurs deviennent force de proposition consti-tue l’un des pas vers des programmes menés autrement.

L’enjeu réside alors dans l’implication des représentants du gouver-nement, des bailleurs de fonds, et des concepteurs du programme. Les associer à la réflexion est central et conditionne les évolutions de la structure du programme. Cela soulève des questions liées à leurs dispositions à accepter de remettre en cause des méthodologies qu’ils ont défendues et promues. Dans le cas de l’évaluation partici-pative du NSP, plusieurs représentants des consultants d’OC/NSP ou des bailleurs de fonds, présents en Afghanistan depuis plusieurs années, partageaient les conclusions de l’étude. D’autres, nouvelle-ment arrivés, faisaient valoir leur expertise, et des représentations importées de la participation. Ils se sont réapproprié une partie des conclusions pour servir leurs argumentaires : renforcer les formations des professionnels, afin qu’ils facilitent mieux le programme tel qu’il est déjà pensé. L’évaluation participative aurait nécessité un travail d’approfondissement avec ces acteurs, aux commandes du NSP.

CONCLUSION ET LEÇONS TIRÉES

L’évaluation participative propose aux différents acteurs d’adopter un regard distancié sur leur propre rôle et position dans le programme, de déplacer les rapports de pouvoir existants pour favoriser un espace de réflexion dans lequel chaque participant devient acteur. Finale-ment, l’évaluation a conclu que la place accordée aux communautés est insuffisante pour un programme à vocation participative. Le NSP reste essentiellement un programme classique dans lequel c’est avant tout à la population de s’adapter.

Quelques leçons peuvent être tirées de cette expérience d’évaluation participative.

• L’évaluation doit être un espace ouvert, dans lequel les dif-férents acteurs peuvent réagir et exprimer leur point de vue sur un programme.

• Un programme de développement communautaire doit lais-ser l’espace nécessaire pour que les professionnels puissent

129129la revue Canadienne d’évaluaTion de Programme

développer une écoute fine des problématiques des commu-nautés, et ne se sentent pas bloqués et contraints par les procédures et normes du programme.

• Les projets doivent pouvoir mettre en avant les savoirs lo-caux, plutôt que de se concentrer sur des réponses tech-niques. Ces dernières limitent l’appropriation des projets, créent un lien de dépendance des villageois par rapport aux experts, et tendent à effacer les compétences des populations rurales à répondre à leurs propres besoins, ce qui favorise une attitude attentiste vis-à-vis de l’extérieur.

• Les programmes se doivent de s’adapter aux populations et de reconnaître ce qu’elles sont, plutôt que de prédéfinir une place pour elles et de s’attacher à former et adapter les populations pour qu’elles entrent dans le cadre fixé.

• Les échanges réciproques ont contribué à un changement de représentation de la population sur les professionnels et inversement. La reconnaissance mutuelle a contribué à améliorer l’image que des villageois avaient d’eux même. Des villageois prennent dorénavant plus facilement la parole et défendent leurs positions dans le débat public.

• A la marge du programme, des communautés ont trouvé le moyen de sortir d’une position de bénéficiaires en effectuant un contre don (financier, matériel, humain). Celui-ci n’est cependant pas reconnu officiellement, ce qui limite leur parti-cipation à la prise de décision. Évaluer dans quelles mesures des espaces existent et permettent l’expression de ce contre don peut constituer un fil directeur pour les évaluateurs de programme.

EN CONCLUSION

Dans une démarche de recherche et d’évaluation, il est essentiel de ne pas se laisser influencer par un mode de pensée qui tend à s’imposer dans le monde du développement et sur les populations locales. Plu-sieurs programmes, se présentant comme participatifs, contribuent en réalité à remettre en cause les valeurs, les modes de représenta-tions, les normes, les identités locales. Ils favorisent de nouveaux notables qui détiennent les clés de compréhension des programmes, et accompagnent un phénomène de recomposition identitaire. Or, l’enjeu d’un programme de développement réside également dans la reconnaissance des communautés telles qu’elles sont.

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier les équipes de l’ONG MADERA qui ont participé au travail d’évaluation participative, particulièrement Sébastien Lodeiro, Esmat Saïfi, et Safiullah Baran. Ils ont, avec l’auteure du présent article, dirigé l’évaluation participative. Je remercie Olivier Roy, mon directeur de recherche. Enfin, cet article a bénéficié du travail de relecture de Gérard et Francine Piou.

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Elsa Piou Iliassi, Ph.D., est diplômée en sciences politiques de l’Ins-titut d’Études sur le Développement Économique et Social (IEDES), rattaché à l’université Panthéon Sorbonne à Paris. Elle a soutenu sa thèse à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) en juin 2009. Elle a travaillé pendant presque quatre ans en Afghanistan, avec une organisation non gouvernementale, la Mission d’Aide au Développement des Économies Rurales Afghanes (MADERA), par-ticipant notamment à la coordination d’une évaluation participative du Programme de Solidarité Nationale (NSP).