sommaire À pleines pages - tetraslire.fr · dans les exploitations forestières, la trompe très...
TRANSCRIPT
2 33
Sommaire
Toomai des éléphantsUn récit tiré du Livre de la jungle de Rudyard Kipling,
traduit par Louis Fabulet et Robert d'Humières et illustré par Jame's Prunier
p. 74LA PETITE FABRIQUE Des guimauves au chocolat en forme de petit indien !
p. 68TÉTRAS-DÉLIRETests et jeux d’animaux.
p. 58L’AS-TU LU ? L’AS-TU BIEN LU ?
p. 62 DIS-M’EN PLUS
Ton dossier pour tout savoir sur l'Inde au temps de Kipling et pour découvrir l'éléphant, seigneur de la jungle.
À pleines pages
p. 3À PLEINES PAGESToomai des éléphants
Un récit tiré du Livre de la jungle de Rudyard Kipling, traduit par Louis Fabulet et Robert d'Humières, illustré par Jame's Prunier. Petit Toomai suit son père pour la grande traque des éléphants sauvages. Avec Kala Nag son éléphant, il va vivre une expérience inouïe.
p. 90 LIRE ET SORTIRDes pistes de lecture pour aller plus loin, des idées de sorties pour de nouvelles découvertes.
p. 82DU MONDE ENTIERSix aveugles et un éléphant
Un conte indien illustré par Stéphanie Augusseau.
9
Toomai des éléphants
Kala Nag – autrement dit Serpent Noir – avait
servi le Gouvernement de l'Inde, de toutes les
manières dont un éléphant peut servir, pendant
quarante-sept années ; et, comme il avait au moins vingt
ans lors de sa prise, cela lui faisait environ soixante-dix
ans à cette heure, l'âge mûr des éléphants.
Il se souvenait d'avoir, un gros bourrelet de cuir attaché
sur le front, poussé pour dégager un canon enlisé dans
la boue profonde [...]. Il avait transporté des tentes,
douze cents livres de tentes, durant la marche à travers
l'Inde Supérieure [...]. Il avait vu ses camarades éléphants
Livre : unité de mesure équivalant à environ un demi-kilo. Douze cents (1 200) livres font environ 600 kilos.
Âge mûr : début de la vieillesse.
1514
Toomai des éléphantsToomai des éléphants
" Place à l'éléphant du Roi ! " Ce sera beau, Kala Nag,
mais pas aussi beau que de chasser dans les jungles.
– Peuh ! dit Grand Toomai, tu n'es qu'un petit garçon
et aussi sauvage qu'un veau de buffle. Cette façon
de passer sa vie à courir du haut en bas des mon-
tagnes n'est pas ce qu'il y a de mieux dans le service
du Gouvernement. Je me fais vieux et je n'aime pas
les éléphants sauvages. Qu'on me donne des lignes à
éléphants, en briques, une stalle par bête, des pieux
solides pour les amarrer en sûreté, et de larges routes
unies pour les exercer, au lieu de ce va-et-vient tou-
jours en camp volant... Ah ! les casernes de Cawnpore
avaient du bon. Tout près un bazar et trois heures
seulement de travail par jour. »
Petit Toomai se rappela les lignes à éléphants de
Cawnpore, et ne dit rien. Il préférait beaucoup la vie
de camp, et détestait ces larges routes unies, les distribu-
tions quotidiennes de foin au magasin à fourrage et les
longues heures où il n'y avait rien à faire qu'à surveiller
Kala Nag piétinant sur place entre ses piquets.
Ce qu'aimait Petit Toomai, c'était l'escalade par
les chemins enchevêtrés que seul un éléphant
peut suivre, et puis le plongeon dans la vallée,
la brève apparition des éléphants sauvages pâturant
à des milles au loin, la fuite du sanglier et du paon
effrayés sous les pieds de Kala Nag, les chaudes pluies
aveuglantes, après quoi fumaient toutes les collines et
toutes les vallées, les beaux matins pleins de brouillard
quand personne ne savait où l'on camperait le soir, la
poursuite patiente et minutieuse des éléphants sau-
vages, et la course folle, les flammes et le tohu-bohu
de la dernière nuit, quand, rués en masse à l'intérieur
des palissades, comme des rochers dans un éboulement,
Stalle : compar-timent réservé à un animal dans une écurie ou une étable.Pieu : piquet.Camp volant : camp de courte durée.Bazar : en Orient, marché où l’on trouve de tout.
Fourrage : foin ou autre plante servant à nourrir les animaux.
Enchevêtré : embrouillé.
Tohu-bohu : chaos, grand désordre.
16
Toomai des éléphants
ils découvraient l'impossibilité de sortir, et se lançaient
contre les poteaux énormes, repoussés enfin par des cris,
des torches flamboyantes et des salves de cartouches
à blanc.
Même un petit garçon pouvait se rendre utile alors, et
Toomai s'en acquittait mieux que trois petits garçons.
Il tendait sa torche et l'agitait, et criait de son mieux.
Mais le vrai bon temps arrivait quand on commençait
à faire sortir les éléphants, quand le keddah, c'est-à-dire
la palissade, ressemblait à un tableau de fin du monde,
et que, ne pouvant plus s'entendre, les hommes étaient
obligés de se faire des signes.
Alors Petit Toomai, ses cheveux noirs, blanchis par le
soleil, flottant sur ses épaules, et l'air d'un lutin dans
la lumière des torches, grimpait sur un des poteaux
ébranlés ; et dès la première accalmie, on entendait les
cris aigus d'encouragement qu'il jetait à Kala Nag, parmi
les barrissements et les craquements, le claquement des
cordes et les grondements des éléphants entravés.
Salve : décharge de plusieurs armes à feu en même temps.Cartouches à blanc : cartouches utilisées à l'entraînement, qui explosent mais ne contiennent aucun projectile. S’acquitter (d’une tâche) : mener à bien, accomplir une tâche.
Accalmie : calme momentané.
et
Dis-m’en plus
et
Dis-m’en plus
Dès le XVIIe siècle, les Européens sont attirés par les fabuleuses richesses des Indes, c’est-à-dire des régions que recouvrent aujourd’hui l’Inde, le Pakistan, le Bouthan, le Bangladesh et la Birmanie.
Les Compagnies des Indes orientales
Dès les années 1600 se créent en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas et en France des c o m p a g n i e s commerciales chargées d’ins-
taller des comptoirs en Inde et dans les pays proches. Le but pour chaque compagnie est d’établir solidement la présence de son pays dans les Indes orientales, de s’emparer des plus grandes richesses et d’organiser un commerce rentable vers l’Europe. Les navires britanniques, néerlandais et français reviennent chargés de soie-ries, de pierreries, de métaux précieux, d’ivoire, de bois exotiques, d’épices et de parfums…
Dès le milieu du XVIIIe siècle pour-tant, la compagnie britannique des Indes orientales prend l’avantage sur ses deux concurrentes, et vers 1850, la domination anglaise s’étend sur presque toute l’Inde.
Le Raj britanniqueEn 1858, à la suite d’une série de ré-voltes indiennes, la reine d’Angleterre, Victoria, décide de placer le territoire indien sous l’autorité directe de la cou-ronne britannique. Quelques années plus tard, la reine prend le titre d’Im-pératrice des Indes et le gouverneur général des Indes, qui représente la reine sur place, reçoit le titre de Vice-roi des Indes.
Le gouvernement de l’Inde organise une ar-mée pour faire régner l’ordre et pour com-battre les aventuriers français, hollandais ou portugais qui pourraient menacer la toute-puissance anglaise. Cette armée comporte des régi-ments britanniques formés de soldats ve-nant d’Angleterre et des régiments indigènes formés de soldats indiens. L’armée des Indes comporte des batteries d’éléphants chargées du transport des canons et du matériel.
Ali Musjid AFGHANISTAN
PAKISTAN
OCÉAN INDIEN
INDE BIRMANIE
L’utilisation des éléphants pour le combat ou le transport de charges remonte à l’Antiquité. Les généraux grecs, macédoniens (du nord de la Grèce) et carthaginois (d'Afrique du Nord) possédaient des élé-phants qui effrayaient l'ennemi par des charges très efficaces sur le champ de bataille.
Dans les exploitations forestières, la trompe très souple et très puissante des éléphants leur permet de saisir un tronc entier et de le tirer jusqu’à la piste pour le charger sur un charriot de transport ou un camion.
Les éléphants apprivoisés finissent souvent leur vie comme éléphant d'apparat, pour les défilés ou les cérémonies. La tradition veut que leurs oreilles, leur trompe et leurs pattes soient alors maquillées de motifs multicolores.
Repère sur la carte les lieux où se passe l'histoire...
Des éléphants à tout faire
Moulmein
Assam
montagnes du Garo
Cawnpore(Kanpur)
Les montagnes
du Garo où étaient
capturés les éléphants
à l'époque de Kipling.
C’est aux confins du Rajasthan. C’est dans la jungle profonde.Ce sont six aveugles qui suiventLeurs chemins invisiblesLes uns derrière les autres, Et le premier devant.
Leurs yeux ne voient rien. Mais leurs oreilles entendentMais leurs narines respirent Mais leurs mains sont sensiblesEt c’est ainsi qu’ils forment dans leur tête Mille images colorées.
Tout à coup, ils entendentUn barrissement sourd ; Ils sentent une odeur de poussière Et de bois vert ; Ils se savent tout près du seigneur éléphant,Les uns derrière les autres, Et le premier devant.
À quoi ressemble un éléphant ?Se demandent les six aveugles.
Le premier saisit la trompe de l’éléphant.c’est froid, humide, ondulant. « Pas de doute, dit le premier,L’éléphant ressemble à un serpent. »
Le deuxième tâte la défense de l’éléphant.C’est courbe, pointu, brillant.« Pas de doute, dit le deuxième,L’éléphant est un sabre luisant. »
Le troisième touche l’oreille de l’éléphant.C’est plat, chaud, frémissant.« Pas de doute, dit le troisième,L’éléphant a des ailes de marabout blanc. »
Le quatrième tapote le ventre de l’éléphant.C’est dur, tendu, très grand.« Pas de doute, dit le quatrième,L’éléphant est comme un tambour géant. »
Le cinquième caresse le genou de l’éléphant.C’est rond, rugueux, puissant.« Pas de doute, dit le deuxième,L’éléphant est un tronc de banian. »
Le sixième attrape la queue de l’éléphant.C’est fin, souple, caressant.« Pas de doute, dit le sixième,Rien ne ressemble plus à une corde qu’un éléphant. »