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AINTE-BARBE, AINTE-BARBE, UNE ICÔNE FÉDÉRA UNE ICÔNE FÉDÉRA TRICE TRICE POUR LES TRA POUR LES TRA V V AUX SOUTERRAINS AUX SOUTERRAINS François MARTIN, Centre d'Etudes des Tunnels, Association Ste-Barbe des Mines Alain GUILLAUME Ingénieur Prévention en Travaux Souterrains S S 1 PRÉAMBULE Comme le dit avec humour Traugott Benz, ingénieur sur le tunnel du Lötschberg, le jour de la Sainte-Barbe est le seul jour de l'année où tout se déroule comme prévu et où les tunneliers n'ont pas de surprise : « Ce jour-là, la montagne ne peut pas nous jouer de mauvais tours ». Sainte-Barbe sonne dans la tête de certains professionnels des tunnels comme un cri de ralliement unanime. Pour d'autres, c'est tout simplement une superstition complètement démodée. Pourtant nul n'est censé ignorer ce que sont et ce que représentent ces deux mots, dès lors qu'il a mis les pieds dans le monde sou- terrain. Connaissez-vous vraiment son histoire, ses traditions ? Jean Pera, dans un article paru en 1991, proposait pour la première fois dans TOS une biographie commentée de Sainte- Barbe. Il est également intéressant de se plonger dans l'histoire de ses traditions, et de voir comment a évolué son culte dans les métiers du sous-sol. Peut-on d'ailleurs toujours parler de culte ? L'article qui suit vous propose de retracer la légende de Barbe, de revenir sur les tradi- tions qu'elle a engendrées, de se rappeler certaines fêtes qui ont marqué l'histoire du 4 décembre et de réaliser un petit bilan en ce début de siècle. I – BARBE : UNE MARTYRE SANCTIFIÉE La vie de Sainte-Barbe a fait l'objet de nom- breuses publications, avec parfois des degrés de détails très étonnants. Son exis- tence n'est sans doute pas à remettre en cause, mais le peu de sources sûres et anciennes à propos de sa vie en fait plus un récit légendaire qu'une vraie biographie. A tel point que l'Eglise décida de supprimer son nom du calendrier en 1969, pour le remplacer par Barbara – une nuance lexicale très subtile ! Son histoire mérite tout de même d'être connue par son originalité et la cruauté des sévices subis. De plus cela permet d'éclairer l'origine de son choix pour patronne dans de nombreuses profes- sions. Le texte qui vous est proposé ci-après est largement inspiré de "La vie des saints", de P. Giry en 1864. Le lecteur désirant avoir plus de précisions sur la vie de la Sainte et ses différentes versions pourra se référer à l'article de Jean Pera (TOS n°108, Nov- Déc 1991). Sainte-Barbe, née d'un père païen – adorant les idoles – vers 235 à Nicomédie (en Turquie, aujourd'hui Izmit), fut cependant de bonne heure instruite des vérités chré- tiennes par ses lectures, et fit tout son pos- sible pour éviter le mariage. Dioscore, son père, était un être d'une humeur bizarre et d'un naturel cruel ayant toutes les inclinations d'un barbare. Celui-ci, voyant que sa fille, déjà parvenue à l'adolescence, était d'une beauté très remarquable, et comprenant les dangers auxquels ne tarderaient pas à l'exposer ses grâces jointes à une immense fortune, imagina de l'enfermer dans une forteresse inaccessible. La célèbre tour ressemblait plus à un palais magnifique qu'à une prison. Barbe profita de l'absence de son père pour faire percer une troisième fenêtre en plus des deux dont disposait sa prison dorée, pour symboliser la Trinité : le Père, le Fils et le Saint-Esprit. De même elle y traça des signes de croix. Son père, à son retour, lui demanda l’expli- cation de ces signes. Elle lui dit qu’elle avait voulu représenter un Dieu en trois per- sonnes et la mort du fils de Dieu sur la croix. Dioscore entra dans une grande colère en voyant que sa fille Barbe embrassait "les rêveries" des chrétiens : elle fut obligée de fuir. Il la poursuivit longtemps et, l’ayant enfin atteinte, il l’accabla de coups, la prit par les cheveux et la ramena à sa maison où il la tint enfermée dans la tour et la traita comme une esclave. Il la mena ensuite au Statuette de Sainte-Barbe, commercialisée par l'asso- ciation Sainte-Barbe des Mines (2003). Descenderie de St-Martin-la-Porte (G. Cueille)

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Page 1: SAINTE-BARBE, UNE ICÔNE FÉDÉRATRICE POUR … · AINTE-BARBE, UNE ICÔNE FÉDÉRATRICE POUR LES TRAVAUX SOUTERRAINS François MARTIN, Centre d'Etudes des Tunnels, Association Ste-Barbe

AINTE-BARBE, AINTE-BARBE, UNE ICÔNE FÉDÉRAUNE ICÔNE FÉDÉRATRICE TRICE POUR LES TRAPOUR LES TRAVVAUX SOUTERRAINSAUX SOUTERRAINS

François MARTIN,Centre d'Etudes des Tunnels, Association Ste-Barbe des Mines

Alain GUILLAUMEIngénieur Prévention en Travaux Souterrains

SS

1

PRÉAMBULE Comme le dit avec humour Traugott Benz,ingénieur sur le tunnel du Lötschberg, lejour de la Sainte-Barbe est le seul jour del'année où tout se déroule comme prévu etoù les tunneliers n'ont pas de surprise : « Cejour-là, la montagne ne peut pas nous jouerde mauvais tours ». Sainte-Barbe sonnedans la tête de certains professionnels destunnels comme un cri de ralliement unanime.Pour d'autres, c'est tout simplement unesuperstition complètement démodée.Pourtant nul n'est censé ignorer ce que sontet ce que représentent ces deux mots, dèslors qu'il a mis les pieds dans le monde sou-terrain.

Connaissez-vous vraimentson histoire, ses traditions ? Jean Pera, dans un article paru en 1991,proposait pour la première fois dans TOSune biographie commentée de Sainte-Barbe. Il est également intéressant de seplonger dans l'histoire de ses traditions, etde voir comment a évolué son culte dans lesmétiers du sous-sol.

Peut-on d'ailleurs toujoursparler de culte ?L'article qui suit vous propose de retracer lalégende de Barbe, de revenir sur les tradi-tions qu'elle a engendrées, de se rappelercertaines fêtes qui ont marqué l'histoire du4 décembre et de réaliser un petit bilan ence début de siècle.

I – BARBE : UNE MARTYRESANCTIFIÉELa vie de Sainte-Barbe a fait l'objet de nom-breuses publications, avec parfois des

degrés de détails très étonnants. Son exis-tence n'est sans doute pas à remettre encause, mais le peu de sources sûres etanciennes à propos de sa vie en fait plus unrécit légendaire qu'une vraie biographie. Atel point que l'Eglise décida de supprimerson nom du calendrier en 1969, pour leremplacer par Barbara – une nuance lexicaletrès subtile ! Son histoire mérite tout demême d'être connue par son originalité etla cruauté des sévices subis. De plus celapermet d'éclairer l'origine de son choixpour patronne dans de nombreuses profes-sions.

Le texte qui vous est proposé ci-après estlargement inspiré de "La vie des saints", deP. Giry en 1864. Le lecteur désirant avoirplus de précisions sur la vie de la Sainte etses différentes versions pourra se référerà l'article de Jean Pera (TOS n°108, Nov-Déc 1991).

Sainte-Barbe, née d'un père païen – adorantles idoles – vers 235 à Nicomédie (enTurquie, aujourd'hui Izmit), fut cependantde bonne heure instruite des vérités chré-tiennes par ses lectures, et fit tout son pos-sible pour éviter le mariage. Dioscore, sonpère, était un être d'une humeur bizarre etd'un naturel cruel ayant toutes les inclinationsd'un barbare.

Celui-ci, voyant que sa fille, déjà parvenue àl'adolescence, était d'une beauté trèsremarquable, et comprenant les dangersauxquels ne tarderaient pas à l'exposer sesgrâces jointes à une immense fortune, imaginade l'enfermer dans une forteresse inaccessible.La célèbre tour ressemblait plus à un palaismagnifique qu'à une prison.

Barbe profita de l'absence de son père pourfaire percer une troisième fenêtre en plusdes deux dont disposait sa prison dorée,pour symboliser la Trinité : le Père, le Fils et

le Saint-Esprit. De même elle y traça dessignes de croix.

Son père, à son retour, lui demanda l’expli-cation de ces signes. Elle lui dit qu’elle avaitvoulu représenter un Dieu en trois per-sonnes et la mort du fils de Dieu sur la croix.

Dioscore entra dans une grande colère envoyant que sa fille Barbe embrassait "lesrêveries" des chrétiens : elle fut obligée defuir. Il la poursuivit longtemps et, l’ayantenfin atteinte, il l’accabla de coups, la pritpar les cheveux et la ramena à sa maison oùil la tint enfermée dans la tour et la traitacomme une esclave. Il la mena ensuite au

Statuette de Sainte-Barbe, commercialisée par l'asso-ciation Sainte-Barbe des Mines (2003).

Descenderie de St-Martin-la-Porte(G. Cueille)

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tribunal de Marcien, gouverneur de laProvince où, l’ayant accusée d’être chré-tienne, il demanda qu’elle fût châtiée selonla rigueur des édits que les empereursavaient promulgués contre les chrétiens (ellen'avait que 16 ans).

Marcien s’efforça d’abord de la faire fléchirpar de belles paroles mais, la voyant insen-sible à ses remontrances, il changea cettefeinte douceur en cruauté. Après une hor-rible flagellation, il la fit ramener en prisonen attendant d'avoir inventé quelque nou-veau supplice pour la punir.

La même nuit, le Seigneur lui apparut dansune lumière admirable, l’exhorta à la persé-vérance, lui promit de l’assister dans tous lescombats qu’elle allait soutenir pour la gloirede son nom. Et pour lui donner des marquessensibles de protection, il la guérit parfaite-ment de toutes ses plaies.

Le lendemain, le gouverneur la fit compa-raître une seconde fois devant son tribunalet, la voyant guérie des blessures dont soncorps avait été tout couvert, il attribua cemiracle à ses faux dieux et tâcha de la per-suader de leur offrir quelques sacrifices enactions de grâces.

Mais la jeune fille lui affirma qu’elle avait étéguérie par Jésus-Christ, fils du Dieu vivant.Le juge, irrité par sa hardiesse, commandaau bourreau qui était présent de lui déchirerles flancs avec des peignes de fer, de les luibrûler avec des torches ardentes, et, enfin,de lui décharger sur la tête de grands coupsde marteau.

Pendant qu’on exécutait cet arrêt, elle avaitles yeux élevés au ciel et priait. A ces tour-ments en succéda un plus douloureux : lasainte eut les mamelles coupées ; maisl’amour qu’elle portait à Dieu et le désir desouffrir pour lui, faisaient que ces douleurslui étaient agréables. Marcien, se voyantvaincu par la constance de Sainte-Barbe,s’avisa d’un autre genre de supplice, quiétait le plus sensible qui put faire souffrir unevierge : il commanda qu’on lui ôta seshabits, et qu’en cet état elle fût chassée àcoups de fouet par les rues de la ville.

Alors la sainte, levant les yeux au ciel, fitcette prière à Dieu : « Ô mon Seigneur etmon Roi, qui couvrez quand il vous plaît leciel de nuages et la terre de ténèbres,cachez, je vous en supplie, la nudité de moncorps, afin que les yeux des infidèles ne levoyant point, ils n’aient pas sujet de fairedes railleries de votre servante ».

Sa prière fut aussitôt exaucée et Dieu luiapparut, remplit son cœur de consolation etla couvrit d’un vêtement lumineux qui ôtaaux idolâtres la vue de son corps.

Enfin, Marcien perdant toute espérance defaire ébranler le cœur de notre sainte, quiavait paru invincible au milieu de tant desupplices, la condamna à avoir la tête tran-chée. Dioscore, qui s’était trouvé à tous lestourments de sa fille, semblait n’attendreque cette sentence pour se baigner dansson sang virginal et achever d’assouvir sarage contre elle ; car dès qu’elle fut pronon-cée, il se présenta pour en être lui-même lebourreau (afin qu’elle ne mourût point dansd’autres mains que les siennes).

Cette cruelle demande lui ayant été accor-dée, Barbe fut menée hors de la ville, enhaut d’une montagne où, étant arrivée, ellese mit à genoux pour remercier Dieu de lagrâce qu’il lui faisait de l’honorer du martyre.Elle le pria aussi d’exaucer ceux qui deman-deraient quelque chose par son interces-sion. A l’heure même, on entendit une voixcéleste l'assurant que sa requête étaitacceptée, et l’invitant à venir recevoir la cou-ronne qui lui était préparée au ciel. Sonpère, inhumain, ne lui laissa pas plus detemps pour faire sa prière : il lui coupa la têtele 4 décembre, sous l’empire de Maximin Ier(et non de Maximien).

C'est alors que, retournant à la Cour, triom-phant et fier de son zèle à servir les idoles del'Etat, il fut, par le ciel, frappé d'un coup defoudre – éclair qui réduisit son corps encendres. Plus tard, le corps de Sainte-Barbefut exhumé solennellement et ses reliquestransportées en divers pays. Par cette inter-vention divine contre son père, elle s'étaitrévélée puissance de feu.

Elle eut pour compagne de son martyre unevertueuse femme appelée Julienne, convertiepar son exemple.

II – LE CHOIX POUR UNE SAINTE PATRONNEBarbe, de par son histoire étonnante, laforce de son engagement dans la foi, sarésistance aux supplices et cette interventiondivine foudroyante, soudaine mais furieuse-ment efficace, a fait l'objet d'un culte trèsfervent dans de nombreuses corporations.

Elle était invoquée, dans le passé, contre lamort subite, les accidents et le trépas sansconfession et sans communion particulière-ment redouté par les croyants.

On dénombre pas moins d'une quinzaine deprofessions l'ayant pour sainte patronne.Ainsi est-elle vénérée par les pétroliers, leslibraires et les étudiants – car c'est son ins-truction qui l'a convertie au christianisme –les couvreurs, les architectes, les charpen-tiers, les maçons, les mathématiciens et les

marins-pêcheurs. Cette dernière corporationlui voue en particulier une forte vénération.C'est en effet en Bretagne que l'on ren-contre le plus de statues de la sainte dansles églises, et ce n'est pas un hasard. ARoscoff, une chapelle du XVIIème lui estdédiée ; Sainte-Barbe – patronne de la ville –protégeait les marins des pirates.

Mais c'est bien grâce à sa maîtrise du feuqu'elle fut choisie pour protéger les métiersen rapport avec les flammes et les éclairs,utilisant la poudre ou les explosifs. L'endroitoù l'on stockait la poudre sur les navires nes'appelait t-il pas la "Sainte-Barbe" (devenunom commun) ?

Ainsi les mineurs de fond, les artilleurs, lesarmuriers, les artificiers, les soldats du génie,les pompiers (les sapeurs en général), lesforgerons et plus récemment les ouvriersmineurs – constructeurs de galeries, puits,plans inclinés, descenderies, cavernes ettunnels – lui demandent sa protection. C'estdans ces professions que son culte est leplus fort.

Enfin il reste un métier qui lui trouve uneaffection toute particulière : les bouchers.Vous aurez compris pourquoi…

III – A L'ORIGINE : UNE PURE TRADITION MINIÈRELes travaux de recherche de RolandeTrempé et Chip Buchheit ont permisd'éclaircir de nombreuses zones d'ombresur les origines du culte "souterrain" de lasainte. Il semble bien que ce soit les mineursextrayant le métal (fer, or, argent, cuivre…)qui aient honoré les premiers Sainte-Barbe.

L'extension géographique de son culte estcalquée sur celle du catholicisme. Il se pro-page d'Orient vers l'Occident où il pénètrepar l'intermédiaire des mines d'Europe cen-trale. Les mineurs de charbon ont été parmiles derniers à le pratiquer, tout simplementparce que la houille a été exploitée bien plustard que les minerais métalliques.

Nous sommes, en l'état actuel des connais-sances, bien mal documentés sur les dates,les lieux et les traditions de célébration deSainte-Barbe dans les régions houillères aucours des XIV, XV et XVIème siècles. Ce qui estsûr, c'est que la présence de statues ou dechapelles vouées à Barbe ne prouve pas queles mineurs l'honoraient et la fêtaient.

Quoi qu'il en soit, en France, elle était célé-brée dans les Vosges au milieu du XVIème

siècle, dans les mines d'argent de la régionde Ste-Marie-aux-Mines (De Re Metallica,

S ainte-Barbe, une icône fédératrice pour les Travaux Souterrains

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S ainte-Barbe, une icône fédératrice pour les Travaux Souterrainsd'Agricola). Mais c'est au XVIIIème siècle quela croissance de l'exploitation des mines dehouille a accéléré la diffusion du culte de lasainte.

Malheureusement très peu de témoignagesrestent de cette époque. Des documentsattestent cependant de la forte tradition dece jour chômé par les mineurs et payé parles directeurs, en Normandie notamment(mines de charbon de Littry). Ils étaient siattachés à cette célébration qu'il fut impos-sible de les faire travailler le 4 décembre,même sous la pression révolutionnaire.

Mais c'est au XIXème siècle, période de l'in-dustrialisation des mines, que se répandentsur tout le territoire les traditions de laSainte-Barbe. L'afflux d'une main-d’œuvred'origine paysanne et de culture chrétienne– surtout catholique – dans les grands bassinsminiers y est pour beaucoup.

Dans "La Vie Souterraine", ouvrage de réfé-rence sur l'univers de la mine, Louis Simoninraconte en 1867 la cérémonie qui suivit uneexplosion mortelle dans les mines de Saint-Etienne : « une statue de Sainte-Barbe futsolennellement installée à l'entrée de laprincipale galerie. […] Les mineurs implo-raient la recommandation et la protectiondivine ». Il est curieux de noter que Germinal,écrit peu de temps après, ne fasse pas allusionau culte de Sainte-Barbe, pourtant incon-tournable pour qui s'intéresse à l'univers desGueules Noires.

Tout au long du XXème siècle, les mineursfrançais ont continué à célébrer et prierBarbe. Dans les années 70, le côté religieuxétait encore très fort. Croyants et mêmenon-croyants se mettaient sous la protectionde Sainte-Barbe, qui intercède auprès deDieu pour mettre les mineurs à l'abri desaccidents.

Dans les bassins miniers français, jusqu'à lafermeture des dernières houillères, la fêtede la Sainte-Barbe se déroulait ainsi :

• Elle était toujours précédée par une quin-zaine de surtravail. C'étaient les "longuescoupes" avec parfois des nuits de sommeilde 4 heures, qui permettaient aux mineursde doubler leur salaire. A l'époque, on y aréalisé les plus beaux records des houillères.

• L'aspect religieux : messe et parfois pro-cession derrière la statue ou la bannière deSainte-Barbe. Les directeurs, ingénieurs,contremaîtres et mineurs sont tous réunis,plus ou moins sur un même pied d'égalité,autour du culte de la sainte.

• L'aspect laïc et festif : après les cérémoniesofficielles, les mineurs fêtent "entre eux" lajournée en dansant, buvant, chantant…

• La journée est chômée et payée sousforme de "gratification".

Avec l'immigration de mineurs étrangers àculture musulmane (ou d'autres religions)ainsi qu'avec la transformation sociale etpolitique des ouvriers, la sainte s'est trans-formée en un objet fédérateur et de reven-dications syndicales.

Les traditions laïques du 4 décembre ontperduré mais le rituel catholique a peu à peudisparu. Le côté festif a cependant pris plusde place, avec des manifestations qui com-mencent dès la veille (mines du Gard par ex.).

Les compagnies ont peu à peu renoncé àleur rôle dirigeant pour l'organisation de lajournée. La messe autrefois obligatoire nel'est plus, ou juste remplacée par une béné-diction. A la fin de l'ère du charbon enFrance, le clivage ouvriers/cadres est trèsprononcé : les mineurs font la fête entre eux,tandis que la direction organise un banquetpour ses cadres supérieurs. Le 4 décembreest tout de même resté, jusqu'à la fin, unedate de souvenir pour tous ceux qui sontmorts au fond, le symbole d'une unité forteentre les hommes d'une même corporationsi exposée et enfin l'occasion pour la direc-tion de récompenser les meilleurs ouvriersde la mine.

En 2006, la Sainte-Barbe "minière" estencore fêtée par certains retraités. Dans lesArdoisières d'Angers, une des dernièresmines de France, le 4 décembre n'est plusqu'un jour férié parmi les autres, sans mêmel'organisation d'un pot pour l'occasion. Sonculte fut pourtant très fervent autrefois, et cedepuis que les ardoisiers ont obtenu le statutde mineurs (1920 puis 1947), et non plus decarriers.

S'il faut trouver une continuité logique dansles traditions de la Sainte-Barbe souterraine,

c'est bien dans le monde des galeries et tunnelsqu'il faut chercher…

IV – SAINTE-BARBE DANS LES TRAVAUXPUBLICS : COUTUMES,ANECDOTES ET FÊTESOn recense très peu de faits liés à Sainte-Barbe dans les métiers des TravauxSouterrains avant la seconde guerre mondiale.

Dès la fin du XIXème siècle et pendant le XXème

siècle, les ouvriers-mineurs ayant creusé lesgrands tunnels alpins, pyrénéens et duMassif Central1 admettent Barbe commesainte patronne ; mais tous ces projets, sou-vent sans continuité dans le temps pour lesentreprises, ne font pas naître une traditionsemblable à la mine. Ces ouvriers-mineurs-tunneliers des T.P. n'étaient d'ailleurs pasreconnus comme "mineurs".

Pour le tunnel du Lioran cependant(1839/1847), près d'Aurillac, il est à noterqu'après la percée du 23 novembre 1843, legouvernement de Louis-Philippe accordaune subvention de "720 francs" pour queles mineurs – leur ingénieur en tête : AdrienRuelle – puissent fêter Sainte-Barbe. La fête,acclamée par toute la population, dura 3 jours.

Le statut des ouvriers évolue – un peu –après l’aménagement hydraulique d'Isère-Arc, suite à une longue série d’accidentsmortels (14 – soit 1 mort au kilomètre) et àun long conflit social qui se traduit entreautre par l’octroi de "primes" liées auxrisques et conditions de travail endurés2.

C'est notamment avec la construction desgrands barrages hydroélectriques (Alpes,Pyrénées et Massif Central) de 1950 à 1985et le recrutement d'une main-d’œuvre issuedes houillères pour une petite partie – maisde plus en plus importante – que la fête du 4décembre prend toute sa grandeur dans lestravaux publics.

Tunnels, galeries, puits, plans inclinés etcavernes des aménagements hydrauliquesliés aux barrages de l’E.D.F., tunnels et gale-ries des équipements ferroviaires, routiers eturbains se succèdent en France (liste non-exhaustive) :

Lioran / Fréjus ferroviaire / Isère-Arc / Mont-Blanc / Mont-Cenis / Bromat I et II /Montézic / Arc-Isère / Grand-Maison / Fréjusroutier / La Coche / Ax-les-Thermes ferro-viaire / Somport / Laparan / Puymorens /Transmanche / Saint-Gothard / RERChâtelet / Métro RATP / S.I.A.A.P / Lyonavec Fourvière, Croix-Rousse et contourne-

Sainte-Barbe du tunnel VL de l'A86 à l'Ouest (2003).

1 Mais aussi les galeries ferroviaires ou de transport des eaux en Ile-de-France.2 Prime d'entrée en galerie, d'eau en calotte ou/et en radier, de port du ciré ou des bottes, d'utilisation continue du marteau-piqueur, du travail en puits, etc…

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S ainte-Barbe, une icône fédératrice pour les Travaux Souterrainsment Nord / Nice / Toulouse / La Réunion /L’A86 à l’Ouest, et ceux en constructionaujourd'hui…

Lors de la journée de Sainte-Barbe, après latraditionnelle messe ou bénédiction dumatin, ce sont les ouvriers qui invitent leurspatrons à déjeuner.

En échange, ceux-ci – M. Campenon, M.Bernard, M. Verdier, M. Borie, M. Chagnaud,M. Pico, M. Findeling de la Sotrabas, etc… –payent la journée chômée. Le festin du midi,où la boisson coule à flot dès l’apéritif, estl'occasion de rompre avec la hiérarchie. Lesmineurs s'octroient le droit de "couper lescravates" des cadres et invités présents carce sont eux qui invitent. Ces bribes de cra-vates3, tels des trophées, sont ensuite accro-chées à l'entrée de la galerie. La journée estfestive du lever au coucher du soleil, voiremême plus tard pour "la nuit des mineurs".Sur certains chantiers, les effets de l'alcool etl'excitation aidant, certaines rancœurs res-sortent et entraînent parfois la bagarre. Maisces échauffourées de la Sainte-Barbe sontvite oubliées – volontairement ou involontai-rement d'ailleurs.

Les anciens des travaux publics françaisn'ont pas souvenir d'avoir vu de Sainte-Barbe à l'entrée des tunnels en constructionavant les années 1970. Une des premières àfaire son apparition est celle de l'usine sou-terraine du barrage de Grand-Maison, en1979. Les nombreux ouvriers-mineurs etporions issus des houillères en déclin qui ytravaillaient ont apporté avec eux leur sta-tue. Les chantiers français suivants ontconservé la tradition : Sainte-Barbe a étélongtemps la "seule femme" admise dansles tunnels. Les mineurs sont des gens trèssuperstitieux !

Cependant, dans d’autres pays – en Autrichepar exemple – sa statue est présente sur leschantiers depuis plus longtemps. Derrièrecette image religieuse et protectrice, c'estbien sûr le respect sacré de la roche et de lamontagne qui transparaît.

Avec la généralisation de la mécanisationdes méthodes de creusement4, le travail dumineur s'est petit à petit modifié. De même,avec la diversification des tâches peu à peuexécutées par des sociétés sous-traitantesspécialisées – injection, marinage, bétonnage,montage/démontage – les us et coutumesliés à Barbe se sont transformés.

Dès le démarrage d’un chantier mécanisé, lamachine (le Tunnelier) est "baptisée" parune célébration solennelle où un nom fémininde "marraine" lui est donné, à l’image dece qui se fait en Autriche5. Exemple :

Marie-Paule pour le Tunnelier CSM BESSACà Rueil-Malmaison en 1997…

Un exemple de Fête de la Sainte-Barbe : Puymorens 1992Une des plus belles fêtes du 4 décembre futcelle organisée sur le chantier du tunnel routierdu Puymorens dans les Pyrénées : galeriedevenue tunnel routier de 4 520 ml réaliséeen méthode dite traditionnelle (explosif +attaque ponctuelle).

Elle avait pour nom de baptême en phasechantier : Fabienne, personne féminine qui –au nom du Maître d’Ouvrage – s’occupait dela sécurité interentreprises. Elle était de cefait acceptée par les premiers "vrais mineursautrichiens" qui – en l’absence de personnel"français" en nombre suffisant – ontdémarré les travaux de creusement.

Cette Sainte-Barbe mémorable de 1992,entre 2 autres, fut préparée et organisée parles 400 mineurs et coffreurs avec l’aide finan-cière de leur Direction du Groupementfranco-allemand d’Entreprises européennes,du Maître d’Ouvrage (les ASF) et accompa-gnée d’une démarche de sponsoring 1/3 –1/3 – 1/3.

La journée du 4 décembre a débuté vers11 heures 30 par l’arrivée progressive desinvités et le rassemblement des mineurs/cof-freurs, accompagnés pour quelques-uns deleurs épouses ou compagnes et grandsenfants, suite à un accord par référenduminterne.

Sur 920 personnes, environ 600 ont pénétréen galerie jusqu’au PM 800 – premiergarage excavé où était installée unescène/autel de 6 mètres de longueur devantune croix d’environ 4 mètres fabriquée avecdes éléments métalliques assemblés par lesmécanos-soudeurs du chantier. Note : cettecroix a trouvé sa place – en don – dansl’église de la Paroisse de Merens en Ariègeprès d’Ax-les-Thermes.

Les invités ont participé à l’office religieuxcélébré par les 2 évêques et leurs 2 curésdes paroisses ariégeoises et catalanes. Ilsétaient secondés par 12 ouvriers-mineurs entenue, y compris la lampe frontale. Ils ont, enfin d’office et de manière œcuménique, dis-tribué et partagé des portions d’un paingéant cuit pour l’occasion par le boulangerd’un village voisin.

Au moment de l’élévation, un des chefsmineurs (ancien porion des houillères et –sans blaguer – cousin polonais du PapeJean-Paul II) a surpris toute l’assemblée en

mettant à feu un tir de mines (quelques car-touches d’explosif) au front de taille situéenviron à 1000 m.

Une chorale catalane des PyrénéesOrientales – dont l’un des 25 choristes étaitle Médecin du Travail du chantier – aentonné des chants accompagnés d’unpiano classique et d’un orgue classé. Ce der-nier appartenait à l’un des magasiniers duchantier. Au-delà de la "confiance" à Sainte-Barbe, des assurances correspondantesfurent souscrites pour ces deux instrumentsde musique à la présence inhabituelle entravaux souterrains.

A la fin de l’office, derrière une bâche-rideaucoulissante sur une câblette de 25 m de lon-gueur, les invités à côté de l’autel ont com-mencé à dialoguer autour de l’apéritifsavoyard, puis sont sortis "bras dessus brasdessous" pour se répartir aux tables dres-sées devant une grande estrade, sous unchapiteau chauffé et résistant à 40 cm desurcharge neigeuse.

Les chefs de chantier et chefs d’équipe ont,tour à tour, sur des airs de musique corres-pondant à leurs nationalités respectives etmixés par un DJ du chantier :

- présenté nominativement les hommes deleurs équipes ;

- reçu individuellement un "diplôme" remispar la Direction.

puis les "politiques et les dirigeants" – aumilieu du repas ariégeois aux plats chauds –ont pu s’exprimer par leurs discours, courtoi-sement écoutés par les invités et lesouvriers-mineurs occupés déjà à "couper lescravates".

Vers 19 heures 30 – alors qu’au dehors laneige alourdissait doucement la toile duchapiteau – les invités et convives furentconviés à sortir pour admirer et entendre unfeu d’artifice émaillé d’intermèdes sonoresde l’histoire de Pyrène pendant _ heure.

A leur retour sous le chapiteau :

- le bar à bières d’une des entreprises duGroupement était ouvert ;

- 1/3 des tables avait disparu pour faireplace à la piste de danse ;

- l’estrade était devenue podium musicalavec les spots et lumières pour un orchestreavec ses danseuses et chanteuses ;

- des tables dressées sur le pourtour du cha-piteau offraient des mets et plats pour conti-nuer à se restaurer…

Alors a commencé "la nuit des mineurs"pour danser et chanter jusqu’à 3 heures du

3 Et ces dernières années les belles écharpes des Dames invitées.4"jumbos" avec plusieurs bras de foration automatisés, machines à attaque ponctuelle et tunneliers5 notamment : la marraine tricotait des chaussettes pour les bottes de ses mineurs

Page 5: SAINTE-BARBE, UNE ICÔNE FÉDÉRATRICE POUR … · AINTE-BARBE, UNE ICÔNE FÉDÉRATRICE POUR LES TRAVAUX SOUTERRAINS François MARTIN, Centre d'Etudes des Tunnels, Association Ste-Barbe

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S ainte-Barbe, une icône fédératrice pour les Travaux Souterrainsmatin – heure à laquelle les plus vaillants ontcontinué leur Sainte-Barbe dans les bars etautres lieux en Espagne toute proche…

Les invités dirigeants sont repartis prendreleur vol d’avion à Toulouse avec leurs "moi-gnons de cravates", y compris le Directeurde la construction des ASF.

Ils/elles avaient – sans aucune bagarre6 – entoute amitié consommé avec modération200 bouteilles de blanc Apremont etRoussette, 500 litres de bière, 1000 bou-teilles de vin d’un cru spécial du Domaineviticole de Sainte-Barbe de Perpignan, 350bouteilles de champagne et "ingurgité"tous les plats de la réserve préparés par unfameux traiteur ariégeois.

On retrouva cette formidable ambiance lorsd’autres fêtes de la Sainte-Barbe, parexemple sur la galerie de Séchilienne – en2000 – ou dernièrement - en 2003 - à St-Michel-de-Maurienne sur la descenderie deL.T.F…

A partir des années 1990, les mentalitéspour la construction des travaux en souter-rains ont changé.

Ce qui aurait pu paraître absurde il y aencore 30 ans est monnaie courante aujour-d'hui : c'est l'Entreprise qui organise le repasde Sainte-Barbe et non plus les ouvriers(Vinci : S.G.E., GTM-Dumez, ChantiersModernes, Campenon Bernard, SOGEA –Eiffage : Borie, Quillery, Verdier – Spie Bat. :Sotrabas – Razel : Pico – Bouygues…).

Mais sans cette pirouette de la tradition, lafête aurait peut-être complètement disparu.

Par contre, depuis sa création, il est à noterque tous les ans l'AFTES organise pour sesmembres une messe et un repas le jour de laSainte-Barbe. Toutefois les effectifs décrois-sent d'année en année, et surtout le renou-vellement des organisateurs régionaux estdifficile. Certains vous diront que la fête estdevenue trop mondaine, d'autres qu'elle agardé sa jovialité d'antan. Cette journée,c'est pourtant l'occasion rêvée de se retrou-ver "autour d'un verre", discuter des métierset bavarder de la même passion qui nousanime, celle de bâtisseurs d’Ouvrages d’artsous les terrains.

V - UNE FIN ANNONCÉE ?Non, la Sainte-Barbe n'est pas en perdition.Sa statue trône toujours à l'entrée des tun-nels importants, mais aussi sur les bureauxdes "anciens" chefs mineurs. Le 4 décembreest encore un jour de fête pour les travauxsouterrains. Mis à part les pompiers qui ontleurs propres traditions, il faut toutefois se

rendre à l'évidence : Barbara n'est plus lesymbole fédérateur qu'elle était il y a encoreune vingtaine d'années.

Aujourd'hui beaucoup d'ouvriers-mineurs –qui n'ont plus l'étiquette d'une spécialisa-tion "mineurs" – préfèrent rentrer chez euxavec la prime du 4 décembre en poche –quand elle existe – plutôt que de se retrou-ver autour d'une table avec leurs collègues.

Et si, auparavant, aucun mineur n'a osépénétrer dans une galerie en creusementsans la présence de Sainte-Barbe à l'entrée,il faut reconnaître aujourd'hui que beaucoupd'entre eux ignorent même son existence.Le bouche-à-oreille et le compagnonnagene fonctionnent-ils plus ? A qui la faute ?

Les avis divergent.

Des causes parmi d'autres :

- les Entreprises grossissent et se diversifient ;

- les clients sont de plus en plus exigeants,les prix sont particulièrement tirés ce quiréduit les marges financières ;

- les méthodes se modernisent, se mécani-sent. Il y a moins de contacts avec le terrain ;

- le creusement, le soutènement et le revête-ment des galeries, tunnels, puits, plans incli-nés, descenderies et cavernes font appel àdes métiers très divers et complémentairesqui, pour une bonne partie, n'ont plus rien àvoir avec l'univers du mineur : étancheurs,terrassiers, coffreurs, avec équipements detravail sophistiqués issus de la métallurgie,bétons faisant appel à des chimistes… ;

- les fêtes arrosées sur le chantier sont deplus en plus déconseillées voire interdites.

Cela s'accompagne souvent d'une perte enrelations humaines, accompagnée d'unrecul des "vieilles traditions". La sociétéévolue, la Sainte-Barbe aussi !

Au-delà de l'icône religieuse, Sainte-Barbe aété le symbole de ce que l'on appelait "lagrande famille des mineurs", soudés pour lemeilleur et pour le pire dans leur péniblelabeur. C'était vrai pour ceux des Houillèreset ceux des T.P. qui ont inventé leursméthodes de travail avec le matériel existant– de la barre à mine, poudre noire, marteauxperforateurs pneumatiques – qu’ils portaient– puis hydrauliques – fixés sur des plates-formes improvisées – jusqu'aux plans de tirs,machines et équipements gérés par carteset puces d’ordinateurs…

Sainte-Barbe reflétait et doit refléter encorela passion qui anime ceux qui gravitent danscet univers, leur offre l'occasion de se retrou-ver autour d'une même œuvre collective : laconstruction de galeries, puits, cavernes,plans inclinés et descenderies.

Avec l'arrivée des nouveaux grands projetssouterrains de montagne – dans lesPyrénées et les Alpes – il serait bon de voirse poursuivre ces traditions, et en particulier,plus que tout, de voir ressurgir "l'esprit deSainte-Barbe".

Comment ?

L'AFTES et les grandes entreprises spéciali-sées – les "majors" – pourraient jouer unrôle très important dans la relance des festi-vités de la Sainte-Barbe. Il faudrait s'appuyersur le calque de la fête annuelle existantepour organiser, plusieurs mois en avance,une grande journée nationale. Cette jour-née pourrait être l'occasion d'ouvrir certainschantiers au public, de sensibiliser les jeunesaux métiers des tunnels et de promouvoir laprofession de mineur dans les TP. La péren-nité de la tradition passe inévitablement parune ouverture au monde extérieur et parune information dispensée dès le début deschantiers aux "petits nouveaux". La Sainte-Barbe est avant tout une fête de chantier, etdoit le rester.

D'autres organismes – tels les musées de lamine – et d'autres associations pourraientconsacrer une part de leur énergie à l'orga-nisation de cette journée nationale.

Certes, il serait ridicule d'ajouter aux CCTPla nécessité de présence d'une statue à l'en-trée des tunnels, et encore moins l'organisa-tion de festivités en décembre. Mais par unediscussion initiée dès le départ entre leclient, le maître d'œuvre et l'entreprise, laSainte-Barbe pourrait retrouver toute saplace sur les chantiers. ▲

CHANT À SAINTE-BARBE(QUELQUES COUPLETS…)

RefrainSainte-Barbe, ô douce patronne

Tu nous vois à tes pieds, Implorant ton secoursQuand le rocher s'abat Et que la mine tonne

Veille, veille sur nous toujours.-1-

Quand nous descendons à l'auroreEn toi nous mettons notre espoir,

Et là, sous la voûte sonore,Combien n'ont pas revu le soir.

-2-A l’entrée des tunnels tu veillesSur ceux qui creusent le terrain

Pour eux sauvegarde et surveilleTous ces ouvrages souterrains.

6 Douze ouvriers-mineurs volontairement sobres veillaient au grain.

Partitions et texte complet du chant de Ste-Barbe disponibles sur http://www.stebarbe.com