réparation de l'adn par une protéine " radical-sam " : etude de la

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HAL Id: tel-00376741 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00376741 Submitted on 20 Apr 2009 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Réparation de l’ADN par une protéine “ Radical-SAM ” : Etude de la Spore Photoproduct Lyase Alexia Chandor-Proust To cite this version: Alexia Chandor-Proust. Réparation de l’ADN par une protéine “ Radical-SAM ” : Etude de la Spore Photoproduct Lyase. Biochimie [q-bio.BM]. Université Joseph-Fourier - Grenoble I, 2008. Français. <tel-00376741>

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  • HAL Id: tel-00376741https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00376741

    Submitted on 20 Apr 2009

    HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

    Larchive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestine au dpt et la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publis ou non,manant des tablissements denseignement et derecherche franais ou trangers, des laboratoirespublics ou privs.

    Rparation de lADN par une protine Radical-SAM : Etude de la Spore Photoproduct Lyase

    Alexia Chandor-Proust

    To cite this version:Alexia Chandor-Proust. Rparation de lADN par une protine Radical-SAM : Etude de la SporePhotoproduct Lyase. Biochimie [q-bio.BM]. Universit Joseph-Fourier - Grenoble I, 2008. Franais.

    https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00376741https://hal.archives-ouvertes.fr

  • UNIVERSITE JOSEPH FOURIER GRENOBLE I SCIENCES ET GEOGRAPHIE

    ECOLE DOCTORALE CHIMIE ET SCIENCES DU VIVANT

    THESE

    Pour obtenir le grade de

    DOCTEUR DE LUNIVERSITE JOSEPH FOURIER

    Discipline : Chimie / Biologie

    Prsente et soutenue publiquement par

    Alexia CHANDOR-PROUST

    Le 28 novembre 2008

    Rparation de lADN par une protine Radical-SAM

    Etude de la Spore Photoproduct Lyase

    Composition du jury

    Prsident : Pr. Alain FAVIER Rapporteurs: Dr. Pascale CLIVIO

    Dr. Bertrand CASTAING Examinateur : Pr. Olivier PLOUX Directeur : Dr. Mohamed ATTA Co-directeur : Pr. Marc FONTECAVE Laboratoire de Chimie et Biologie des Mtaux CEA Grenoble iRTSV/LCBM CNRS Universit Joseph Fourier

  • 3

    RESUME Chez les spores de bactries, le photoproduit le plus abondant form dans lADN irradi

    par les UV est un dimre de thymines appel Photoproduit des spores (SP, 5-(-thyminyl)-5,6-dihydrothymine). Au dbut de la germination, ce photoproduit est spcifiquement rpar par une enzyme, la Spore Photoproduct Lyase (SPL), rgnrant les deux rsidus thymine originaux. Cette enzyme est une protine Fe-S qui appartient la famille des Radical-SAM . Les protines de cette famille denzymes possdent un centre [4Fe-4S], coordin par 3 cystines conserves organises selon le motif CxxxCxxC, et utilisent la S-Adnosylmthionine comme cofacteur. Elles fonctionnent toutes selon un mcanisme radicalaire, initi par la formation du radical 5-dsoxyadnosyle issu de la coupure homolytique de la S-Adnosylmthionine par le centre [4Fe-4S] rduit. Dans ce travail, nous avons effectu une caractrisation biochimique et spectroscopique des SPL de Clostridium acetobutylicum et Bacillus subtilis. Par ailleurs, nous avons synthtis un substrat minimum sous la forme d'un dinucloside monophosphate appel SPTpT, pour lequel une caractrisation structurale par RMN a t ralise. Le SPTpT est reconnu et efficacement rpar par l'enzyme, ce qui nous a permis d'obtenir de nouvelles informations sur le mcanisme enzymatique de rparation. Enfin, la squence primaire des SPL contient une 4e cystine conserve, essentielle la rparation, mais qui nest pas implique dans la coordination du centre [Fe-S]. Nous nous sommes intresss au rle de cette cystine dans le mcanisme de rparation grce ltude biochimique et enzymatique du mutant SPLC141A. MOTS CLES : spore, ADN, lsion de lADN, photoproduit, rparation de lADN, SPL, Radical-SAM, centre fer-soufre TITLE : Study of Spore Photoproduct Lyase, a Radical-SAM enzyme involved in DNA repair ABSTRACT

    The major photoproduct of UV-irradiated DNA from bacterial spores is 5-(-thyminyl)-5,6-dihydrothymine, a unique thymine dimer called Spore Photoproduct (SP). At the beginning of germination, this photoproduct is specifically repaired by the Spore Photoproduct Lyase (SPL), regenerating the two thymine monomers. SPL belongs to a family of iron-sulfur enzymes named Radical-SAM . In this family, proteins have a [4Fe-4S] cluster, chelated by three cysteines highly conserved constituting the Radical-SAM motif CxxxCxxC, and use S-Adenosylmethionine as a cofactor. They all use a radical based mechanism, initiated by 5-deoxyadenosyl radical formation, derived from the homolytic cleavage of S-Adenosylmethionine by the reduced [4Fe-4S] cluster. Here, we have characterized, by biochemical and spectroscopic methods, the recombinant SPL from Clostridium acetobutylicum or Bacillus subtilis. Furthermore, we have synthesized a novel substrate called SPTpT under the form of a dinucleoside monophosphate. The structural characterization of this compound, using NMR spectroscopy, has been carried out. Moreover, this substrate is recognized and efficiently repaired by this enzyme, providing a convenient way to investigate the repair mechanism. Finally, the sequence of all SPL contains a fourth well-conserved cysteine. Site-directed mutagenesis shows that this residue is strongly involved in the repair mechanism but not in the cluster formation. The role of this cysteine 141 in the catalytic mechanism has been studied.

    KEYWORDS: spore, DNA, DNA lesion, photoproduct, DNA repair, SPL, Radical-SAM, iron-sulfur cluster

  • RemerciementsRemerciementsRemerciementsRemerciements

  • Remerciements

    7

    Je tiens tout dabord remercier Marc Fontecave de mavoir accueillie au sein du

    Laboratoire de Chimie et Biochimie des Centres Rdox Biologiques devenu le Laboratoire de

    Chimie et Biologie des Mtaux, de m'avoir fait confiance malgr les connaissances plutt

    lgres que j'avais en biochimie en octobre 2005. Je te remercie pour ta disponibilit, les

    runions de travail trs motivantes et les discussions scientifiques trs enrichissantes que nous

    avons eues.

    Je remercie galement mon directeur de thse Mohamed Atta ; pour mavoir permis

    deffectuer cette thse et pour ton encadrement au quotidien.

    Mes remerciements vont galement Sandrine Ollagnier-de-Choudens, si implique

    dans ce sujet passionnant mme si a ntait pas officiel . Merci de ttre implique dans

    ma formation pratique en biochimie, merci pour tes conseils et ton suivi rgulier, jusqu la

    rdaction de ce manuscrit et pour ta disponibilit lors de la prparation de ma soutenance.

    Je dsire ensuite exprimer mes plus chaleureux remerciements Thierry Douki et Didier

    Gasparutto, pour mavoir initie la chimie et la photochimie particulire de lADN. Merci

    pour votre accueil dans votre laboratoire, pour votre gentillesse qui mont permis de me sentir

    laise dans ce laboratoire que jai frquent par intermittence, et surtout pour mavoir appris

    tant de choses.

    Je tiens galement remercier les diffrentes personnes qui ont collabor mon travail :

    Tout dabord Serge Gambarelli, merci pour ta pdagogie en ce qui concerne les

    explications des principes de la RPE et de la spectroscopie Hyscore ;

    Je remercie le laboratoire de Rsonnances Magntiques du CEA, en particulier Michel

    Bardet, Jean-Marie Mouesca, Claire Mantel et Pierre-Alain Bayle pour leur implication dans

    le projet et leurs immenses comptences qui nous ont permis de rpondre une question

    cruciale sur le sujet ;

    Yvain Nicolet, je te remercie davoir accept dessayer de cristalliser la SPL, et je

    mexcuse auprs de toi de ne pas avoir pu te donner de protine suffisamment pure. Jespre

    que cela aboutira un jour.

    Je souhaite aussi remercier tous les membres du jury, Alain Favier, Pascale Clivio,

    Bertrand Castaing et Olivier Ploux, pour avoir accept de juger mon travail.

    Vient le tour de remercier tous les membres du LCBM, sans qui mes trois annes

    passes au laboratoire nauraient pas t si sympatiques !

  • Remerciements

    8

    Merci tous, chimistes ou biochimistes, pour les discussions scientifiques que nous

    avons pu avoir (Etienne, Vincent N, Vincent A, Stphane, Olivier, Caroline Marchi, Cathy,

    Fabien) et pour les moments de dtente au caf. Nico, je te remercie pour les premires

    manips de RMN que nous avons faites ensemble et aussi pour les discussions prolonges

    devant la porte du labo de RMN.

    Des Special Thanks pour Les Filles , qui plus que des collgues sont devenues de

    vritables amies, Mat avec qui jai partag beaucoup plus quun bureau ; Emilie ta

    gentillesse na pas dgal ; Carole, merci pour ce que tu mas appris en purification de

    protines et bien plus (pas seulement professionnellement), ta bonne humeur et ta tchatche ; la

    mystrieuse Carine et tes expressions spontanes devenues clbres ; Guni pour mavoir

    permis de pratiquer un tout petit peu lallemand pendant 2 ans ; Chantal pour tre la fois une

    maman et une mamie de substitution ; Adeline pas seulement pour ma mosaque, mais aussi

    pour partager mes gots tlvisuels !! Je ne vous remercierai jamais assez pour tous les bons

    moments passs ensemble au labo et lextrieur, pour mon enterrement de vie de jeune fille,

    pour les surprises lors de mon mariage, pour mes cadeaux de thse, pour mavoir soutenue

    dans les moments de doute, etc vous tes gniales.

    Je noublierai pas Sigolne (je compte sur toi pour perptuer le fameux Chimie

    Pariiiiiis) ; Florence, Pascal et son humour que japprcie beaucoup, Eric pour ses potins,

    Stphane Mouret pour mavoir forme lutilisation du spectro de masse et pour ses

    nombreux conseils, Silke, Ccile, Simon, Pierre-Andr et tous ceux qui ne sont plus au

    LCBM, Caro Ranquet, Yohan, Aziz pour les bons moments passs au labo.

    Pour terminer, je voudrais remercier ma famille, Edouard, Valentin et mes parents pour

    votre amour, votre confiance et votre soutien permanent ; ma grand-mre Nicole, Jean et

    Odile pour tout ce que vous avez fait pour moi ; Jacques et Martine Proust, qui avez accept

    quun docteur de plus entre dans votre famille et enfin et surtout Alexandre qui a accept de

    me suivre Grenoble et est devenu mon mari pendant cette thse. Je te remercie pour ton

    amour incommensurable, pour toujours croire en moi et pour mavoir soutenue mme dans

    certains moments de doute, merci pour tout ce que tu fais pour moi et pour ce que tu

    mapportes au quotidien.

  • Table des matiresTable des matiresTable des matiresTable des matires

  • Table des matires

    11

    Abrviations et notationsAbrviations et notationsAbrviations et notationsAbrviations et notations_________________________________________15

    IntroductionIntroductionIntroductionIntroduction ___________________________________________________21

    I. Les spores de bactries _______________________________________________ 24 I.1. Structure et caractristiques des spores _____________________________________ 25 I.2. Sporulation __________________________________________________________ 28 I.3. Germination__________________________________________________________ 29

    II. Agressions UV et rparation de lADN __________________________________ 30 II.1. Rappels sur lADN (structure, rle et nomenclature) __________________________ 30 II.2. Les lsions de lADN __________________________________________________ 37 II.3. Rparation des lsions photoinduites_______________________________________ 44 II.4. Le Photoproduit des spores ______________________________________________ 48

    III. La Spore Photoproduct Lyase _______________________________________ 63 III.1. Mise en vidence d'un processus de rparation spcifique ______________________ 63 III.2. La Spore Photoproduct Lyase ____________________________________________ 64

    IV. Les protines de la famille Radical-SAM ___________________________ 67 IV.1. Les protines centre [Fe-S] _____________________________________________ 67 IV.2. La famille des Radical-SAM __________________________________________ 68 IV.3. La Spore Photoproduct Lyase : Mcanisme propos___________________________ 74

    V. Objectifs de la thse__________________________________________________ 77

    Matriels et MthodesMatriels et MthodesMatriels et MthodesMatriels et Mthodes ____________________________________________79

    I. Matriels biologiques ________________________________________________ 81 I.1. Souches bactriennes___________________________________________________ 81 I.2. Vecteur de surexpression________________________________________________ 82 I.3. Milieux de culture _____________________________________________________ 82

    II. Mthodes de biologie molculaire ______________________________________ 83 II.1. Introduction dADN dans E. coli__________________________________________ 83 II.2. Amplification par PCR - Mutagense dirige ________________________________ 84

    III. Mthodes biochimiques_____________________________________________ 86 III.1. Obtention des protines _________________________________________________ 86 III.2. Reconstitution du centre [Fe-S] de la SPL __________________________________ 88 III.3. Analyses biochimiques _________________________________________________ 89

  • Table des matires

    12

    III.4. Libration du Photoproduit des spores de lADN par voie enzymatique ___________ 93 III.5. Tests enzymatiques ____________________________________________________ 95

    IV. Mthodes Chimiques_______________________________________________ 98 IV.1. Produits chimiques ____________________________________________________ 98 IV.2. Synthses ____________________________________________________________ 98

    V. Techniques physico-chimiques Mthodes analytiques ___________________ 105 V.1. Spectrophotomtrie UV-visible__________________________________________ 105 V.2. Spectroscopie de Rsonance Paramagntique Electronique (RPE)_______________ 107 V.3. Spectroscopie Hyscore ________________________________________________ 109 V.4. Spectroscopie Mssbauer ______________________________________________ 111 V.5. Spectroscopie de Rsonance Magntique Nuclaire (RMN) ___________________ 114 V.6. Chromatographie Liquide Haute Performance (HPLC) en phase inverse__________ 118 V.7. Chromatographie Liquide Haute Performance couple la spectromtrie de masse en tandem (LC-MS/MS) ________________________________________________________ 119 V.8. Spectromtrie de masse MALDI-TOF ____________________________________ 121

    RsultatsRsultatsRsultatsRsultats_____________________________________________________123

    Partie I Expression, Purification et Caractrisation de la Spore Photoproduct Partie I Expression, Purification et Caractrisation de la Spore Photoproduct Partie I Expression, Purification et Caractrisation de la Spore Photoproduct Partie I Expression, Purification et Caractrisation de la Spore Photoproduct LyaseLyaseLyaseLyase _______________________________________________________125

    Chapitre 1 : Rsultats___________________________________________129

    I. Obtention des protines (sauvages et mutes) de Bacillus subtilis et Clostridium

    acetobutylicum_________________________________________________________ 129 I.1. Expression et purification des protines recombinantes en arobiose_____________ 129 I.2. Quantification du Fer et du Soufre _______________________________________ 132 I.3. Purification de la SPL recombinante de C. acetobutylicum en anarobiose ________ 132 I.4. Reconstitution des protines purifies en arobiose __________________________ 133 I.5. Caractrisation biochimique de la SPL de B. subtilis reconstitue _______________ 134

    II. Caractrisation spectroscopique du centre [Fe-S] ________________________ 134 II.1. Caractrisation du centre [Fe-S] aprs reconstitution _________________________ 134 II.2. Caractrisation par RPE du centre aprs oxydation___________________________ 138 II.3. Caractrisation du centre [Fe-S] ltat rduit ([4Fe-4S]1+) ____________________ 139

    Chapitre 2 : Discussion _________________________________________143

    Partie II Synthse du Photoproduit des sporesPartie II Synthse du Photoproduit des sporesPartie II Synthse du Photoproduit des sporesPartie II Synthse du Photoproduit des spores _______________________147

    Chapitre 1 : Rsultats___________________________________________150

  • Table des matires

    13

    I. Synthse du SPTpT _________________________________________________ 150 I.1. Prparation du dinucloside monophosphate TpT (thymidylyl-(3'-5')-thymidine) ___ 150 I.2. Prparation du Photoproduit des spores SPTpT (thymidylyl-(3-5)-thymidine) ____ 152 I.3. Dtermination de la configuration absolue du C5 du SPTpT par RMN ___________ 155

    II. Obtention du 11mer contenant le Photoproduit des spores, simple et double brin

    166 II.1. Synthse de loligonuclotide 11mer GCGAATTCACG et de son complmentaire _ 167 II.2. Irradiation UV-C Incorporation du SP dans loligonuclotide_________________ 168 II.3. Squenage de loligonuclotide 11merSP _________________________________ 169 II.4. Hybridation du 11merSP avec le 11mercomp ________________________________ 171

    Chapitre 2 : Discussion _________________________________________172

    Partie III Partie III Partie III Partie III Quel mcanisme pour la SPLQuel mcanisme pour la SPLQuel mcanisme pour la SPLQuel mcanisme pour la SPL ???? ___________________________177

    Chapitre 1 : Rsultats___________________________________________180

    I. Activit et spcificit de la SPL sauvage de Bacillus subtilis________________ 180

    II. Activits de la SPL sauvage de Bacillus subtilis avec le SPTpT _____________ 181 II.1. Cintique de lactivit de rparation du Photoproduit des spores ________________ 181 II.2. Dtermination des paramtres cintiques Km et Vmax de la SPL sauvage de B. subtilis pour le substrat SPTpT _______________________________________________________ 182 II.3. Mesure de lactivit de rductolyse de la S-Adnosylmthionine________________ 183

    III. Activits de la SPLBsC141A de Bacillus subtilis en prsence du SPTpT ___ 185 III.1. Activit de rparation du SPTpT par la SPLBsC141A de B. subtilis _____________ 185 III.2. Activit de rductolyse de la SAM de la SPLBsC141A _______________________ 187 III.3. Identification des produits issus de lincubation de la SPLBsC141A avec le substrat SPTpT par spectromtrie de masse MS2 _________________________________________ 188 III.4. Modlisation chimique de la formation des produits A et B ____________________ 193

    IV. Dtermination du rle de la cystine 141 dans la raction enzymatique ____ 197 IV.1. Transfert de deutrium par la S-Adnosylmthionine marque en position 5 ______ 198 IV.2. Marquage de la SPL par du deutrium ____________________________________ 199

    V. Test dactivit de la SPL de B. subtilis avec le substrat oligonuclotidique ___ 204

    Chapitre 2 : Discussion _________________________________________206

    I. Activit de rparation de la SPL sauvage _______________________________ 206 I.1. Le substrat SPTpT ____________________________________________________ 206 I.2. Le substrat oligonuclotidique___________________________________________ 207

  • Table des matires

    14

    II. Activit de rductolyse de la SAM_____________________________________ 208

    III. Informations mcanistiques obtenues grce ltude de la SPL mute ____ 210

    Conclusion gnraleConclusion gnraleConclusion gnraleConclusion gnrale ____________________________________________215

    Table des illustrationsTable des illustrationsTable des illustrationsTable des illustrations __________________________________________221

    Table des figures _______________________________________________________ 223

    Table des schmas ______________________________________________________ 229

    Table des tableaux______________________________________________________ 233

    Rfrences bibliographiquesRfrences bibliographiquesRfrences bibliographiquesRfrences bibliographiques______________________________________235

    AnnexesAnnexesAnnexesAnnexes _____________________________________________________253

    1. Chandor, A., Berteau, O., Douki, T., Gasparutto, D., Sanakis, Y., Ollagnier-de-

    Choudens, S., Atta, M., and Fontecave, M. (2006) J Biol Chem 281, 26922-26931

    2. Chandor, A., Douki, T., Gasparutto, D., Gambarelli, S., Sanakis, Y., Nicolet, Y.,

    Ollagnier-De-Choudens, S., Atta, M., and Fontecave, M. (2007) C. R. Chim. 10, 756-765

    3. Chandor-Proust, A., Berteau, O., Douki, T., Gasparutto, D., Ollagnier-de-Choudens,

    S., Fontecave, M., and Atta, M. (2008) J Biol Chem 283, 36361-36368

    4. Mantel, C., Chandor, A., Gasparutto, D., Douki, T., Atta, M., Fontecave, M., Bayle, P.

    A., Mouesca, J. M., and Bardet, M. (2008) J Am Chem Soc 130, 16978-16984

  • Abrviations et Abrviations et Abrviations et Abrviations et notationsnotationsnotationsnotations

  • Abrviations et notations

    17

    (6-4)PP Adduit pyrimidine(6-4)pyrimidone

    Angstrm

    A Absorbance

    ADN Acide dsoxyribonuclique

    Ado radical 5-dsoxyadnosyle

    AdoH 5-dsoxyadnosine hydrogne

    APS Ammonium persulfate

    ARN Acide ribonuclique

    BET Bromure dEthidium

    CaCl2 Chlorure de Calcium

    CPD Dimre cyclobutabipyrimidique

    Cys (C) Cystine

    DMPD DiMthyl Phnylne Diamine

    DO Densit Optique

    DTT Dithiothritol

    E Energie

    EDTA Acide Ethylne Diamine TtraActique

    ESI Ionisation par Electrospray

    Coefficient dabsorption (ou extinction) molaire

    FPLC Fast Protein Liquid Chromatography

    G Gauss

    GHz Gigaherz

    h Constante de Planck

    HCl Acide Chlorhydrique

    HPLC Chromatographie Liquide Haute Performance

    Hz Hertz

    I Spin nuclaire

    IPTG IsoPropyl--D-ThioGalactopyranoside

    K Kelvin

    kDa Kilodalton

    LB Luria Bertani

    MALDI Matrix Assisted Laser Desorption Ionisation

    mL Millilitre

  • Abrviations et notations

    18

    mM Millimolaire

    mV Millivolt

    L Microlitre

    M Micromolaire

    NaCl Chlorure de Sodium

    NAD Nicotinamide Adnine Dinuclotide

    NADPH Nicotinamide Adnine Dinuclotide Phosphate, forme rduite

    ng Nanogramme

    NH4Cl Chlorure dammonium

    Ni-NTA Nickel- Acide Nitilotriactique

    nm Nanomtre

    Frquence

    OD Optical Density

    pb Paire de Bases

    PCA Acide Perchlorique

    PCR Polymerase Chain Reaction (Raction de Polymrisation en Chane)

    pmol picomole

    ppm Parties par millions

    RMN Rsonance Magntique Nuclaire

    RPE Rsonance Paramagntique Electronique

    Rpm Tours par minute

    Rt Temps de rtention

    S Radical thiyle

    SAM (AdoMet) S-Adnosylmthionine

    SDS-PAGE Sodium Dodcyl Sulfate polyAcrylamide Gel Electrophoresis

    SP Photoproduit des spores

    SPL Spore Photoproduct Lyase

    SPTpT Photoproduit des spores sous la forme dun dinucloside

    monophosphate

    T1 Temps de relaxation spin rseau

    T2 Temps de relaxation spin spin

    TEMED N, N, N, N-TtraMthylEthylne Diamine

    Thy Thymine

    Thd Thymidine

  • Abrviations et notations

    19

    TOF Time Of Flight (Temps de vol)

    TpT Thymidily-(35)-thymidine

    UV Ultra Violet

    Vitesse angulaire

  • IntroductionIntroductionIntroductionIntroduction

  • Introduction

    23

    Les spores de bactries sont des organites au mtabolisme ralenti voire quasi-inexistant

    ayant des proprits trs particulires. Ainsi sont-elles extrmement rsistantes toutes sortes

    dagressions extrieures (tempratures leves, irradiations UV et gamma, vide, agents

    chimiques). Cette rsistance confre aux spores une longvit extraordinaire, qui peut aller

    jusqu plusieurs milliers dannes (Nicholson et al., 2002).

    Les agressions extrieures peuvent fortement endommager lacide dsoxyribonuclique

    ou ADN, contenu dans toutes les cellules et support de linformation gntique, quil est donc

    primordial pour un organisme vivant de protger. Les spores de bactries ont ainsi acquis des

    mcanismes leur permettant la fois de protger leur matriel gntique, en vue de leur

    survie, et galement de rparer les dommages que lADN aurait pu subir pendant cet tat

    cryptobiotique.

    Mon sujet de thse sinscrit dans le contexte de ltude dune de ces lsions subies par

    lADN aprs irradiation provoque par le rayonnement solaire et plus particulirement le

    rayonnement ultra-violet ainsi que sa rparation enzymatique. Ce travail a t effectu dans

    deux laboratoires, le Laboratoire de Chimie et Biologie des Mtaux, spcialis dans ltude

    des mtalloenzymes, et le laboratoire des Lsions des Acides Nucliques, dont les

    thmatiques concernent la synthse et lanalyse de lsions de lADN. Cest cette

    complmentarit qui a permis de mener bien le projet. Aprs un rappel sur les spores de

    bactries et sur les lsions de lADN en gnral, nous prsenterons la lsion UV-induite

    spcifique des spores. Nous verrons que cette lsion est rpare spcifiquement par une

    mtalloprotine (la Spore Photoproduct Lyase ou SPL) appartenant la superfamille des

    Radical-SAM qui sera prsente la fin de cette introduction.

  • Introduction

    24

    I. Les spores de bactries

    Cest la fin du XIXme sicle, en 1876, que Cohn et Koch dcouvrent de faon

    indpendante les spores de bactries, bien quen 1838 ait t dj rapporte la prsence de

    corps rfractiles dans certaines cellules bactriennes. Alors que Cohn se concentrait sur une

    recherche plus fondamentale concernant la comprhension de la rsistance la chaleur de

    certaines bactries, lintrt de Koch tait plus appliqu, recherchant comment combattre les

    maladies de lpoque et particulirement la maladie du charbon1. Cest Koch, qui, 12 ans plus

    tard, dcrivit en premier le cycle complet sporulation germination multiplication

    resporulation (Schma 1).

    Schma 1 : Cycle de vie des bactries sporulantes.

    Les recherches sur les spores de bactries ont continu, et se sont surtout accrues aprs

    les annes 1950, notamment grce aux progrs de la gntique et de la biologie molculaire.

    La rsistance des spores constitue un problme majeur de sant publique, car le pouvoir

    pathogne de certaines bactries se manifeste lors de la germination de spores dans un milieu

    favorable (sang, tissus, etc.). A titre dexemple, Bacillus cereus et Clostridium botulinum

    sont responsables de certaines toxi-infections alimentaires, Clostridium tetani du ttanos,

    Clostridium difficile de certaines maladies nosocomiales, sans oublier Bacillus anthracis. Les

    spores de cette bactrie sont, lorsquelles rentrent en germination, responsables de la maladie

    du charbon qui est principalement une maladie du btail. Objet initial des travaux de Koch sur

    les spores, Pasteur dveloppa un vaccin contre elle en 1881. Cependant, les spores de Bacillus

    anthracis sont une arme de bioterrorisme potentielle depuis la fin de la seconde guerre

    mondiale. En effet, linhalation des spores provoque une pneumopathie mortelle.

    1 Maladie infectieuse provoque par Bacillus anthracis.

  • Introduction

    25

    I.1. Structure et caractristiques des spores

    Les spores bactriennes, ou endospores, sont des organites produits chez certaines

    espces de bactries, qui constituent un tat de dormance (encore appel tat cryptobiotique)

    induit par des conditions dfavorables la survie du microorganisme (stress nutritif,

    dessiccation, chaleur, ). Il existe 6 genres de bactries, toutes Gram+2, pouvant sporuler :

    Bacillus, Sporolactobacillus, Clostridium, Desulfotomaculum, Sporosarcina et

    Thermoactinomycetes. Ces bactries sont ainsi relies de faon phnotypique mais non

    phylogntique.

    Lors dobservations au microscope, les spores ne sont visibles que si elles sont colores

    au vert de malachite3 (Figure 1).

    Figure 1 : Observation au microscope de spores de Bacillus subtilis aprs coloration au vert de malachite.

    Larrive de la microscopie lectronique dans les annes 1960 a permis de dcrire la

    structure complexe des spores (Figure 2), ainsi que den identifier les composants spcifiques.

    La spore est constitue du protoplaste (core en anglais), pauvre en ARN, en enzymes et

    en eau mais contenant une quantit dADN proche de la cellule vgtative, et beaucoup

    dacide dipicolinique, un compos spcifique des spores constituant environ 20% du poids sec

    de celles-ci (Gould, 2006). Le noyau contient galement de petites protines solubles en

    milieu acide (Small Acid-Soluble Proteins ou SASPs). Ces protines se complexent fortement

    2 Les bactries Gram positif sont mises en vidence par une technique de coloration appele coloration de Gram. Elles apparaissent alors mauves au microscope. Les bactries Gram positif ont une structure qui sorganise en trois grandes parties : la couche de peptidoglycane, lespace priplasmique et la membrane plasmique. 3 La coloration seffectue chaud, de faon ce que le colorant entre dans les spores. Aprs lavage leau et contre-coloration la safranine froid, les bactries sont colores en rouge, et les spores en vert, le vert de malachite y tant pieg.

  • Introduction

    26

    lADN en le compactant, et sont responsables de la rsistance des spores aux agents

    chimiques dtriorant lADN et aux irradiations UV (Setlow, 1988). La membrane

    cytoplasmique, analogue celle de la cellule vgtative, est entoure de la paroi sporale et du

    cortex, une paisse paroi de peptidoglycane. La formation correcte du cortex est ncessaire

    ltat de dshydratation du protoplaste, confrant la spore la rsistance des tempratures

    leves. Applique contre le cortex on trouve la ou les tuniques (appeles alors intine ou

    tunique interne et exine ou tunique externe) formes de protines riches en ponts disulfures

    puis, ventuellement, l'exosporium (Figure 2) (Prescott et al., 2007).

    Figure 2 : Structure des spores, daprs une image au microscope lectronique

    Une bactrie ne peut donner lieu qu une seule spore, qui peut tre de forme et de

    position dans la bactrie diffrentes selon les espces, dformante ou non-dformante de la

    bactrie initiale, et de taille entre 0,2 et 2 m. Il existe en effet trois groupes (Figure 3) :

    - Les bactries spore ronde ou ovale, centrale ou sub-terminale non dformante ;

    - Les bactries spore ovale centrale ou sub-terminale dformante ;

    - Les bactries spore ronde terminale dformante.

  • Introduction

    27

    Figure 3 : Les diffrents types de spores, classes selon leur forme et leur position dans la bactrie initiale

    La spore diffre de la cellule vgtative par sa forme, sa structure, son contenu

    enzymatique ainsi que sa grande rsistance aux agressions dagents exognes (physiques,

    chimiques, radiatifs,), ce qui lui permet davoir une longvit extraordinaire dans des

    conditions dfavorables. La spore est en effet le type de microorganisme le plus durable

    trouv dans la nature. On peut attribuer ces proprits entre autres son tat de

    dshydratation, la prsence dacide dipicolinique dans le cortex et de ponts disulfures au

    niveau des tuniques. Le Tableau 1 permet de comparer quelques proprits des cellules

    vgtatives et des spores.

    Proprits Cellule vgtative Spore

    Apparence au microscope Non rfringente Rfringente

    Acide dipicolinique DPA Absence Prsence

    Prsence deau dans le

    cytoplasme Eleve Faible

    Activit enzymatique

    Synthse molculaire Eleve Faible

    Rsistance aux agents

    exognes Faible Eleve

    Sensibilit la coloration Sensible Rsistante

    Tableau 1 : Comparaison de quelques proprits des spores et des cellules vgtatives.

  • Introduction

    28

    I.2. Sporulation

    La sporulation est la diffrenciation qui conduit de la forme vgtative dune bactrie

    la forme spore. Cest un des procds de diffrenciation bactrienne les plus complexes. Elle

    se droule en 7 tapes, dcrites par Ryter en 1966 grce des tudes de microscopie

    lectronique (Ryter et al., 1966) (Figure 4).

    Figure 4 : Les diffrentes tapes de la sporulation. Image de droite : microscopie de fluorescence diffrentes tapes de la sporulation de B. subtilis daprs D. Rudner HMS Harvard.

    La sporulation commence par une division du cytoplasme en deux parties non gales,

    paralllement une duplication du matriel gntique (Stade I). Contrairement une division

    cellulaire normale, les deux protoplastes ne se sparent pas par la membrane cellulaire. En

    revanche la spore est progressivement invagine par le cytoplasme de la cellule mre et une

    premire membrane se forme (septum stade II). Par un mcanisme dendocytose, ce septum

    de sporulation enveloppe ensuite le cytoplasme de la plus petite partie pour former une

    prspore (forespore) caractristique du stade III. Lors du stade IV, la paroi sporale se forme

    entre les deux membranes dlimitant la prspore puis apparat rapidement le cortex. Les

    tuniques sont labores au cours du stade V, et, aprs maturation (phase VI), la cellule mre

    se lyse et libre la spore mature (phase VII).

  • Introduction

    29

    I.3. Germination

    La germination correspond au retour la forme vgtative. Cest la transformation

    inverse de la sporulation. Il est intressant de noter que cette volution a lieu sans aucune

    nouvelle synthse macromolculaire, tout le matriel requis tant dj prsent dans la spore.

    Les diffrentes tapes de ce processus ont t mises en vidence par lidentification des

    exsudats des diffrentes tapes de germination dans les annes 1950 (Moir, 2006).

    Aprs activation de la spore, et si les conditions du milieu sont favorables, la

    bactrie germe. L'activation est un stade souvent indispensable correspondant une ouverture

    des enveloppes sporales par des agents physiques ou chimiques. En l'absence de cette

    activation et mme si elles sont places dans un environnement favorable, les spores sont

    incapables de germer. L'activation peut tre provoque par des agents mcaniques (choc,

    abrasion), des agents physiques (choc thermique) ou chimiques (lysozyme, acides...)(Euzby,

    2006). Ce temps de latence (Microlag time Figure 5) peut aller de quelques minutes une

    vingtaine de minutes. Puis la germination proprement dite est dclenche (Figure 5), en

    prsence de conditions favorables dhydratation, par lactivation de rcepteurs spcifiques de

    molcules germinantes (alanine, adnosine, magnsium, ). Ces rcepteurs sont localiss sur

    la tunique interne. Aprs avoir pntr les couches externes endommages par lactivation et

    le cortex, le germinant interagit avec le rcepteur ce qui provoque la germination. Avant que

    le cortex ne soit hydrolys, la spore perd ses proprits de rsistance la chaleur, des

    mouvements dions sont observs, le DPA est libr dans le milieu et le protoplaste se

    rhydrate partiellement (phase I, quelques secondes). Durant la phase II (temps variable selon

    les espces et les conditions environnantes : de quelques minutes plusieurs dizaines de

    minutes), les enveloppes mdianes ainsi que le cortex sont dgrads, et les composants du

    peptidoglycane sont librs dans le milieu. Puis la cellule se rhydrate totalement.

  • Introduction

    30

    Figure 5 : Les diffrentes tapes de la germination (Hashimoto et al., 1969). Temps de latence : de 1 20 minutes, phase I de la germination : quelques secondes, phase II : de quelques minutes plusieurs dizaines de minutes.

    II. Agressions UV et rparation de lADN

    II.1. Rappels sur lADN (structure, rle et nomenclature)

    II.1.1. LADN : support de linformation gntique

    Les connaissances actuelles de la biologie proviennent de plusieurs disciplines : la

    gntique, la cytologie, la chimie, la physique molculaire, la biochimie et la biologie

    molculaire. La gntique molculaire est ne lorsque Avery, Mc Leod et Mc Carthy ont

    montr en 1943 que lacide dsoxyribonuclique (ADN) tait le support molculaire de

    linformation gntique (Avery et al., 1944). Cette dcouverte fut toutefois accueillie avec

    beaucoup de scepticisme, car cette poque la majorit des scientifiques pensaient que

    linformation gntique tait de nature protique. Lacceptation dfinitive de la thorie de

    Avery ne viendra quavec llucidation de la structure de lADN en 1953 par James Watson et

    Francis Crick (Watson et al., 1953), en partie grce aux clichs de diffraction des rayons X de

    lADN des cristallographes Rosalind Franklin et Maurice Wilkins. Cette dcouverte valut aux

    trois hommes le prix Nobel de mdecine en 1962.

    Lexistence dun code gntique permettant de traduire linformation contenue dans

    lADN en une squence dacides amins a t dcrite par Nirenberg et Khorana en 1961

  • Introduction

    31

    (Khorana, 1961, Nirenberg et al., 1961). Avec lavnement du gnie gntique dans les

    annes 1970, les gnes des organismes les plus complexes deviennent directement accessibles

    lanalyse.

    II.1.2. Structure de lADN :

    La macromolcule dADN est un polymre form de deux brins oligonuclotidiques

    antiparallles enrouls hlicodalement lun autour de lautre, en double hlice. Un brin

    dADN est constitu dune succession de quatre motifs lmentaires : les nuclotides (Schma

    2). Ceux-ci portent chacun une des quatre bases azotes diffrentes : adnine (A), guanine

    (G), cytosine (C) et thymine (T). Chaque base est fixe sur un 2-dsoxyribose par une liaison

    N-glycosidique pour former un nucloside. Lorsquun nucloside est li un ou plusieurs

    phosphates, il sagit dun nuclotide. A et G sont appeles bases puriques, alors que C et T

    prennent le nom de bases pyrimidiques.

    Schma 2 : Structure des quatre bases de lADN et des nuclotides. Adnine (A), Thymine (T), Cytosine (C) et Guanine (G). Numrotation des carbones du 2-dsoxyribose de 1 5. B reprsente une des quatre bases de lADN. Les N en vert indiquent les azotes impliqus dans la liaison N-glycosidique avec le dsoxyribose.

  • Introduction

    32

    Lenchanement des nuclosides est assur par des ponts phosphodiesters (Schma 3).

    Ceux-ci unissent le carbone C-3 dune unit osidique au carbone C-5 de la suivante. Lordre

    dans lequel sont disposes les bases constitue la squence des gnes, et donc le message

    gntique.

    Schma 3 : Structure des nuclotides dans lADN et complmentarit des bases selon Watson et Crick : A T, C G

    Des liaisons hydrognes entre bases complmentaires (appeles appariements de

    Watson et Crick) permettent dassurer la stabilit de la molcule dADN : la thymine

    sapparie avec ladnine et la cytosine avec la guanine (Schma 3). Cette complmentarit

    permet la duplication et la transcription en ARN de la molcule, chaque brin servant de

    matrice pour la synthse du brin oppos (il faut rappeler que lors de la transcription, la

    thymine T dans lADN devient un uracile U dans lARN).

    LADN tant extrmement long par rapport lespace cellulaire qui lui est accord, un

    compactage de celui-ci est ncessaire. Le gnome bactrien se concentre dans une zone

    appele nuclode. LADN dans cette structure forme des supers hlices et il est verrouill par

    des protines spcifiques.

  • Introduction

    33

    II.1.3. Conformation des nuclosides et de la double hlice

    Un nuclotide prsente plusieurs degrs de libert dont un au niveau de la liaison

    glycosidique et les autres au niveau du 2-dsoxyribose. Il est donc possible de dfinir deux

    paramtres majeurs pour un nuclotide : lorientation de la base par rapport au sucre et la

    conformation du 2-dsoxyribose. Ces paramtres sont lorigine du polymorphisme de

    lADN pouvant adopter majoritairement trois conformations A, B et Z dcrites plus loin.

    Orientation de la base par rapport au sucre

    Quand le carbonyle C2 des bases pyrimidiques ou le carbone C4 des bases puriques se

    situe au dessus du cycle du dsoxyribose, la base est dite en orientation syn. Dans le cas

    contraire, elle est dite en orientation anti (Figure 6). Dans lADN, lorientation la plus

    courante est anti.

    Figure 6 : Orientation de la base syn ou anti par rapport au sucre

    Conformation du 2 dsoxyribose

    Le cycle furanose ne peut tre plan du fait de la prsence de carbones sp3. La distorsion

    rsultante est nomme plissage ou puckering du sucre (Schma 4). Le cycle peut prendre

    la forme denveloppe (E) ou de demi-chaise (twiste T). Pour la forme E, quatre atomes sont

    dans le mme plan et le cinquime au dessus ou en dessous du plan. Pour la forme T, deux

    atomes adjacents sont de part et dautre du plan form par les trois autres atomes.

  • Introduction

    34

    Schma 4 : Forme enveloppe (E), 1 atome est en dehors du plan form par les 4 autres. Forme (T), deux atomes adjacents sont de part et dautre du plan form par les 3 autres.

    Dans le cas de la conformation twiste du 2-dsoxyribose, latome hors du plan est

    appel endo sil se trouve du mme ct que le C5, et exo sil est de lautre ct. Les

    dsoxyriboses de lADN prsentent essentiellement la conformation C2-endo-C3-exo, alors

    que les riboses de lARN ont la conformation C2-exo-C3-endo (Schma 5).

    Schma 5 : Notation endo/exo du puckering du sucre.

    Conformation de la double hlice

    Les changements de conformation des nuclotides induits par les conditions

    environnantes ainsi que par la squence du brin d'ADN expliquent que la double-hlice

    d'ADN peut adopter plusieurs conformations stables. LADN peut adopter jusqu 5 formes

    (Voet et al., 2002) dont trois majoritaires. Les deux formes qui nous intressent ici

    particulirement sont les formes A et B, toutes deux hlices droites (lenroulement se fait

    en tournant vers la droite). La forme B est la forme la plus naturelle. On peut observer la

    formation d'un petit et d'un grand sillon d au fait que les liaisons N-glycosidiques ne sont pas

    diamtralement opposes au sein d'une paire de base ce qui cre dun ct un espace plus

    grand (grand sillon) et de lautre un espace plus petit (petit sillon). La forme A, plus

    compacte, se rencontre lorsque lADN est dshydrat, et na t observe in vivo que dans

    lADN des spores de bactries. Les formes C et D sont des sous-classes de la forme B,

  • Introduction

    35

    galement hlices droites. En revanche, la forme Z (ou ZigZag) est de type gauche et est

    observe sur les portions dADN riches en cytosine et en guanine (Figure 7), mais la fonction

    biologique de cette forme est inconnue (Voet et al., 2002).

    Figure 7 : De gauche droite, conformation A, B et Z de lADN.

    Le Tableau 2 prsente les diffrentes caractristiques de ces 3 grandes formes :

    Paramtre A B Z Type dhlice Droite Droite Gauche Grand sillon

    Etroit et profond Large et profond

    Aplati

    Petit sillon Large et superficiel

    Etroit et profond

    Etroit et profond

    Degr dinclinaison des bases par rapport au plan perpendiculaire laxe

    20 6 7

    Liaison osidique Anti Anti

    Syn pour les purines Anti pour les pyrimidines

    Puckering C2-exo C3-endo

    Nord C2-endo C3-exo

    Sud

    C3-endo pour les purines

    C2-endo pour les pyrimidines

    Pas de lhlice et nombre de paires par pas

    28 11 pb

    34 10 pb

    45 12 pb

    Hauteur de lhlice par paire de base

    2,6 3,4 3,7

    Diamtre de lhlice 26 20 18 Tableau 2 : Donnes sur la structure de lADN idal respectivement A, B et Z. (Voet et al., 2002).

  • Introduction

    36

    II.1.4. Rle biologique :

    (1) La synthse protique

    Grce un code de 4 lettres (A, T, G et C), les gnes sont le point de dpart de la

    synthse des protines par la cellule. De plus, certaines rgions, non codantes, sont utilises

    pour la rgulation de lexpression des gnes, par lintermdiaire de la fixation de protines

    rgulatrices de type activateur ou rpresseur. Pour la synthse des protines, lADN est ainsi

    transcrit en ARN (le sucre est alors un ribonuclotide et non plus un dsoxyribonuclotide et

    la thymine est remplace par luracile), puis traduit en protine au niveau des ribosomes.

    Chaque triplet de nuclotides, appel codon, code pour un acide amin.

    (2) La transmission de linformation gntique

    En plus de sa fonction de support de linformation gntique, lADN assure aussi le

    transfert de cette information travers les gnrations cellulaires. En effet, avant chaque

    division cellulaire, la totalit de lADN se rplique afin que les cellules filles aient le mme

    contenu en ADN que la cellule mre.

    Le principe de la rplication est simple mais ce processus fait intervenir de nombreuses

    protines que ce soit pour la synthse du nouveau brin ou la correction des erreurs.

    La rplication est dite semi-conservative car au cours du processus, chaque brin dADN

    de la double hlice est utilis comme support sa recopie par des ADN polymrases. Ainsi

    chacun des nouveaux doubles brins contient-il un brin provenant de lADN parental et un brin

    nouvellement synthtis.

    Llongation seffectue dans le sens 5 vers 3. Le groupement phosphate relie le

    carbone C3 du sucre du premier nuclotide au C5 du nuclotide suivant, laissant libre

    lextrmit C3 de ce dernier, pour laccrochage dun nouveau nuclotide. Cette longation

    est accompagne dune tape de vrification. Celle-ci permet la polymrase de reprer un

    nuclotide incorpor de faon errone ; ce dernier est alors excis et remplac par le

    nuclotide correct. La rplication est un mcanisme dune trs grande fidlit (moins dune

    erreur pour 109 bases).

  • Introduction

    37

    II.2. Les lsions de lADN

    II.2.1. Gnralits

    Au cours de la vie cellulaire, l'ADN est constamment endommag par des agents

    endognes ou exognes (Lindahl, 1993). L'action de ces agents sur l'ADN conduit des

    modifications chimiques trs varies de celui-ci (Schma 6).

    Schma 6 : Exemples de lsions subies par lADN.

    Parmi ces agresseurs, on peut citer les agents physiques comme les radiations ionisantes

    (rayons X et ) et la lumire ultraviolette (dont nous dtaillerons les effets plus loin). L'ADN

    peut galement tre modifi par des agents chimiques, comme des agents alkylants entranant

    l'addition de chanes carbones sur les bases (cis-platine, gaz moutarde). Des ractions

    hydrolytiques spontanes pH et temprature physiologiques ou sous l'action de produits

    divers peuvent galement endommager l'ADN. Les groupements NH2 des bases A, C et G

    sont ainsi convertis en groupe ctonique ; la cytosine dsamine se transforme en uracile,

    l'adnine en hypoxanthine, la guanine en xanthine pouvant aboutir des mutations suite la

    rplication comme le montre le Schma 7.

  • Introduction

    38

    Schma 7 : Exemples de lsions frquemment rencontres dans lADN. a) Dsamination. b) Rupture de la liaison N-Glycosidique conduisant la formation de site abasique. c) Oxydation de la guanine par HO conduisant la formation de 8-oxo-2-dsoxyguanosine. dR signifie dsoxyribose.

    La liaison N-glycosidique est galement hydrolysable, plus facilement pour les bases

    puriques et conduit alors la formation de sites abasiques (Schma 7). Le mtabolisme

    cellulaire est aussi une source d'espces ractives de l'oxygne (Winterbourn, 2008), en

    particulier le radical HO, qui est capable dendommager l'ADN en l'oxydant (par exemple,

    oxydation de la guanine en 8-oxoGuanine - Schma 7). L'arrachement d'un atome

    d'hydrogne au niveau du fragment osidique sous l'effet des radiations ionisantes se traduit

    par la coupure d'un ou des deux brins d'ADN appele cassure simple ou double brin. Une

    autre consquence de laction d'agents photosensibilisateurs (psoralnes) ou physiques (UV,

    radiations ionisantes) est la formation de ponts covalents entre brins d'ADN ou entre l'ADN et

    des protines qui l'entourent.

    Enfin, des lsions peuvent tre provoques par le rayonnement ultraviolet (UV). En

    effet, le rayonnement UV fait partie des rayonnements lectromagntiques mis par le soleil

    qui parviennent la surface de la Terre avec la lumire visible, les infrarouges (IR) et les

  • Introduction

    39

    ondes de radiofrquence. Le rayonnement UV peut tre dcompos en trois catgories qui

    sont les UV-A (315-400 nm), les UV-B (280-315 nm) et les UV-C (200-280 nm), ces derniers

    tant filtrs par la couche d'ozone. Si les rayonnements UV-A et UV-B peuvent avoir des

    effets bnfiques sur la sant (synthse de la vitamine D, traitement du rachitisme, du

    psoriasis ...), ils sont galement l'origine d'effets gnotoxiques, les photons UV-A pntrant

    plus profondment dans l'piderme. Les effets de la lumire UV sur l'ADN font intervenir

    deux sries de mcanismes : une voie directe dans laquelle l'nergie des rayonnements UV-B

    est directement absorbe par l'ADN ; et une voie indirecte, qui concerne les UV-A et la

    lumire visible. Cette voie indirecte fait intervenir des photosensibilisateurs endognes ou

    exognes (Cadet et al., 1992).

    II.2.2. Effets indirects des UV-A

    L'ADN n'absorbe aucune longueur d'onde du domaine des UV-A et du visible.

    Toutefois, par photoexcitation de molcules endognes (flavines, acides amins, quinones) ou

    exognes (mdicaments, colorants ...), ces rayonnements sont capables de dtriorer l'ADN.

    Ces molcules sont appeles agents de photosensibilisation et, lorsqu'elles sont dans des tats

    excits triplets, peuvent agir sur l'ADN principalement par deux mcanismes nomms types I

    et II reprsents sur le Schma 8 (Aubin, 2001).

    Schma 8 : Effet indirect des UV-A sur lADN via un photosensibilisateur P. B signifie la base nuclique

    Mcanisme de type I:

    Le photosensibilisateur et la base changent un lectron ou un atome d'hydrogne,

    convertissant par oxydation la base en cation radical qui peut ensuite ragir avec l'eau ou se

  • Introduction

    40

    dprotoner. La guanine est la base nuclique la plus sensible ce mcanisme car elle possde

    le potentiel d'oxydation le plus bas dans l'ADN.

    Mcanisme de type II:

    Dans ce cas, une espce ractive de l'oxygne non radicalaire dite oxygne singulet 1O2,

    est produite partir d'un transfert d'nergie entre O2 et le photosensibilisateur excit.

    Il peut galement y avoir transfert de charge entre le photosensibilisateur et l'oxygne

    molculaire qui conduit la formation du radical anion superoxyde (O2-). Ce dernier peut

    ragir indirectement sur l'ADN aprs formation de peroxyde d'hydrogne (H2O2) puis

    gnration du radical hydroxyle HO via la raction de Fenton (Raction 1) en prsence de

    fer.

    Raction 1 : Production du radical hydroxyle par la raction de Fenton.

    L'oxygne singulet ragit trs spcifiquement avec la 2'-dsoxyguanosine pour former la

    8-oxo-2-dsoxyguanosine (Schma 7). A l'inverse, le radical HO peut oxyder les quatre

    bases nucliques ainsi que le 2-dsoxyribose et entrainer des cassures de chanes.

    II.2.3. Effets directs des UV-B et C

    L'effet direct du rayonnement UV est prdominant pour les photons de longueur d'onde

    de 260 nm (UV-C), ce qui correspond au maximum d'absorption de l'ADN. Toutefois, cet

    effet persiste pour les photons moins nergtiques comme les UV-B.

    Ce sont les bases pyrimidiques adjacentes de l'ADN qui sont les plus sensibles. Les

    photoractions impliquant ces bases conduisent des produits de dimrisation comme les

    cyclobutabipyrimidines (nots CPD par la suite) (cycloaddition 2+2 des doubles liaisons

    C5-C6 de deux pyrimidines adjacentes) pour lesquels plusieurs diastroisomres peuvent

    tre obtenus selon la position des deux noyaux pyrimidiques par rapport au cyclobutane

    (isomrie cis ou trans) et selon l'orientation relative des deux liaisons C5-C6 (isomrie syn ou

    anti) (Schma 9).

  • Introduction

    41

    Schma 9 : Structure chimique du dimre cyclobutabipyrimidique TT, et les diffrents diastroisomres. dR signifie dsoxyribose.

    Pour des raisons striques, seuls les drivs syn sont forms dans l'ADN ou les

    oligonuclotides, et l'isomre cis est nettement majoritaire.

    Un deuxime type de photoproduits issus de l'irradiation de l'ADN par les UV-B sont les

    adduits pyrimidine(6-4)pyrimidone (nots (6-4)PP par la suite). La raction consiste

    galement en une cycloaddition 2+2 entre la double liaison C5-C6 de la pyrimidine en 5' et le

    groupement carbonyle situ en position 4 de la thymine en 3' (ou imine si la base en 3' est une

    cytosine) (Schma 10).

    Une troisime classe de photoproduits provient de la photo-conversion des noyaux

    pyrimidone des adduits (6-4)PP en isomre de valence Dewar par exposition aux UV-B ou A

    (Schma 10).

  • Introduction

    42

    Schma 10 : Structures chimiques des photoproduits (6-4) et formation de lisomre de valence Dewar.

    Enfin, comme discut et dtaill plus loin, le Photoproduit des spores est obtenu par

    dimrisation de deux thymines adjacentes uniquement aprs irradiation des spores de

    bactries ou dans l'ADN isol dans des conditions trs spcifiques (Donnellan Jr. et al., 1965,

    Varghese, 1970).

    II.2.4. Consquences biologiques des lsions de lADN

    Ces nombreuses agressions conduisent la formation de plusieurs milliers de lsions par

    jours et par cellule dans le cas d'agressions endognes (Lindahl, 1993, Lodish et al., 2004).

    Ceci semble contradictoire avec l'apparente stabilit de l'information gntique contenue dans

    l'ADN et observe au fils des gnrations. Comme le dit E. Friedberg la vie est un quilibre

    dlicat entre la stabilit et l'instabilit gnomique ainsi qu'entre les mutations et la rparation

    (Friedberg, 2003). En effet, d'une part l'volution selon la slection darwinienne est fonde

    sur la diversit gntique. D'autre part, la vie et son volution n'est possible qu'en prsence de

    processus cellulaires performants assurant le maintien du message gntique et capable de

    contrecarrer les effets nfastes des dommages spontans et environnementaux.

  • Introduction

    43

    Schma 11 : Consquences biologiques des lsions sur lADN.

    La prsence d'un dommage dans l'ADN induit en gnral soit l'expression de gnes dont

    les produits sont impliqus dans la rparation, soit des blocages temporaires du cycle

    cellulaire, ou encore la programmation de la mort de la cellule (Schma 11).

    Cette dernire consquence est paradoxalement une faon de protger l'individu et les

    gnrations futures de mutations conduisant la cancrisation et au vieillissement. Cette

    proprit est utilise notamment en cancrologie par l'emploi d'agents alkylants ou oxydants

    qui induisent un grand nombre de dommages sur lADN des cellules tumorales ce qui

    dclenche le processus dapoptose4 (cis-platine, radiothrapie).

    Paralllement, la cellule dispose d'une panoplie de systmes de rparation de son ADN.

    Le principe de ces systmes a t conserv des procaryotes aux eucaryotes suprieurs. Leur

    complexit a cependant fortement augment au cours de lvolution, tant du point de vue du

    nombre denzymes impliques que de la taille des complexes multi-enzymatiques et du

    nombre de protines rgulatrices.

    Plusieurs stratgies peuvent tre utilises pour contourner leffet dltre dune lsion :

    les dommages peuvent tre rpars par rversion directe, par recombinaison et par excision-

    resynthse (Friedberg, 2003). Il existe de plus des polymrases spcialises dans la synthse

    4 Mort cellulaire programme contrle par un certain nombre de gnes.

  • Introduction

    44

    translsionelle qui permettent la cellule de rpliquer l'ADN endommag au risque d'induire

    des mutations (Shcherbakova et al., 2006).

    Nous nous intressons ici deux mcanismes de rparation prenant en charge les lsions

    dimriques induites par les UVB. La Rparation par Excision de Nuclotides (REN) et la

    rparation par rversion directe des dommages (Direct Reversal Repair DRR).

    II.3. Rparation des lsions photoinduites

    II.3.1. La rparation par excision de nuclotides (REN)

    Ce processus est un des plus importants mcanismes de rparation de l'ADN, retrouv

    la fois chez les procaryotes et chez les eucaryotes (Petit et al., 1999). Sa fonction principale

    est de rparer les lsions encombrantes de l'ADN qui crent des blocages de la rplication et

    de la transcription (comme les bases alkyles ou oxydes de l'ADN ainsi que les

    photoproduits) cause de la distorsion de la double hlice qu'ils engendrent. Ce systme a t

    bien tudi chez E. coli o il a t observ en premier au dbut des annes 1960 (Setlow et al.,

    1964), mais le mcanisme d'action est transposable tous les procaryotes.

    Dans les bactries, la REN implique l'excision d'un oligonuclotide de 12-13 bases. Le

    processus de la REN peut tre divis en 3 grandes tapes. Le dommage sur l'ADN est d'abord

    repr, puis le brin endommag est excis de part et d'autre de la lsion. La portion d'ADN

    manquante est enfin resynthtise et grce une ligation, lintgrit du double brin est

    restaure (Van Houten, 1990).

    Chez E. coli, la REN fait intervenir 5 protines d'un systme appel systme UvrABC.

    Trois gnes ont d'abord t identifis : uvrA, uvrB et uvrC puis plus tard deux autres uvrD et

    pdA (Figure 8).

    Les trois protines UvrA, UvrB et UvrC sont produites de faon constitutive un niveau

    trs faible mais elles sont inductibles par des agents gnotoxiques (multiplication par 10 du

    nombre de protines UvrA par cellule). Toutes ces protines sont recrutes conjointement ou

    successivement lors des trois tapes de la rparation.

  • Introduction

    45

    Figure 8 : La rparation de lADN par excision de nuclotides chez E. coli (Van Houten, 1990).

    (1) 1re tape : Reconnaissance du dommage

    Les dommages reconnus par le systme sont de nature trs varie (cis-platine, adduits

    avec la mitomycine, photoproduits). Cependant, le mcanisme doit tre suffisamment

    spcifique des dommages de faon ne pas exciser l'ADN inutilement. Pour cela, il semble

    que le systme reconnaisse les dommages induisant une distorsion de la double hlice (un

    dimre de pyrimidine droule l'hlice de 19 et cre une courbure de 27 au niveau du grand

    sillon). C'est cette dformation qui est reconnue par le dimre d'UvrA du complexe A2B1 (2

    protines UvrA et une UvrB) se dplaant le long du double brin d'ADN. La protine UvrB,

    une hlicase, droule alors localement l'hlice et s'enroule sur le brin endommag. Cette

  • Introduction

    46

    deuxime reconnaissance induit un changement de conformation qui entrane la dissociation

    de (UvrA)2. UvrC, en prsence d'ATP, vient se lier au complexe UvrB/ADN (appel

    complexe de pr-incision).

    (2) 2e tape : Excision du dommage

    Une premire incision est ralise ct 3' par la protine UvrB au niveau du 4e ou 5e

    nuclotide du ct 3' de la lsion. La seconde incision est faite au niveau du 8e nuclotide

    aprs la lsion ct 5' par UvrC. Le dimre d'UvrC se dissocie spontanment tandis que le

    complexe UvrB/oligonuclotide est stable et reste en place. Enfin, UvrD permet le

    dplacement du brin excis, mais UvrB reste complex l'ADN.

    (3) 3e tape : Resynthse et ligation

    L'extrmit 3'-OH du brin d'ADN ayant subi l'incision 5' est alors libre par le dpart

    d'UvrC. Ceci permet PolI, polymrase spcifique de la rparation, de synthtiser un brin en

    remplacement de celui excis, grce au brin complmentaire utilis comme matrice. Lorsque

    PolI arrive au niveau de l'autre extrmit incise, UvrB est libre. Une ligase relie enfin le

    brin nouvellement synthtis l'extrmit 5'.

    (4) La REN chez B. subtilis

    Les gnes codant pour UvrA, UvrB, UvrC ont chez B. subtilis de fortes similarits de

    squence avec ceux de E. coli. L'expression des protines de la REN est induite en rponse

    l'apparition de dommages de l'ADN l'tat vgtatif et pendant la phase de dveloppement au

    moment de la germination. En revanche, pendant la sporulation, les protines sont exprimes

    de faon constitutive un faible niveau (Nicholson et al., 2000).

    Ceci explique pourquoi la REN est dj fonctionnelle pendant la germination mme

    lorsque la synthse protique est bloque, les protines tant probablement enfermes dans le

    protoplaste de la spore pendant la sporulation (Munakata et al., 1974).

    II.3.2. Mcanisme de rparation par rversion directe : exemple des photolyases

    (1) Principe

    Ce mode de rparation consiste transformer une lsion en la base normale dont elle est

    issue en faisant intervenir une seule enzyme spcifique de la lsion. Cette voie concerne les

    alkyltransfrases (Mishina et al., 2006), la Spore Photoproduct Lyase (pour laquelle un

  • Introduction

    47

    paragraphe est ddi plus loin) ou les photolyases de dimres cyclobutane ou photoproduits

    (6-4) (Sancar, 2003).

    En effet, ces dernires rparent spcifiquement les dommages de l'ADN gnrs par

    exposition aux rayonnements UVB et C (200 300 nm). Ce mcanisme galement appel

    photoractivation semble tre le premier processus de rparation de l'ADN avoir volu

    dans la nature. C'est en tout cas le premier avoir t dcouvert (Friedberg, 2003) dans la fin

    des annes 40 indpendamment par deux laboratoires amricains. Ces enzymes catalysent la

    monomrisation des dimres bipyrimidiques aprs activation par exposition un rayonnement

    UV proche ou visible (300 500 nm). Les photolyases utilisent deux cofacteurs qui sont la

    flavine rduite (FADH2) note F1- dans le Schma 12 ; et une molcule de folate

    (mthylnettrahydrofolate ; 5,10-MTHF) ou une dazaflavine (8-hydroxydeazariboflavine ;

    8-HDF) nots F2 dans le Schma 12. L'absorption d'un photon par le folate permet son

    interaction avec le cofacteur redox de la protine, FADH2, qui aboutit la rduction du

    dimre et la rupture des liaisons du cycle cyclobutane. Fait remarquable, ce processus de

    rparation fait intervenir un mcanisme produisant des radicaux libres alors que nous avons

    vu plus haut que ceux ci peuvent tre fortement dltres pour l'ADN. Il est donc ncessaire

    que ce processus soit finement contrl.

    Schma 12 : Reprsentation des cofacteurs des photolyases et mcanisme ractionnel. F2 absorbe un photon et transfre son nergie F1-, tapes (1) et (2). La flavine rduite excite transfre un lectron au dimre PyrPyr. La monomrisation seffectue par voie concerte (3), avec rtro-donation dun lectron FADH (F1), afin de le rgnrer dans sa forme catalytiquement active (4).

  • Introduction

    48

    (2) Le base-flipping

    Il a t montr dans le cas de mthyltransfrases et de N-glycosylases et plus rcemment

    pour les photolyases (Mees et al., 2004, Roberts, 1995, Sancar, 2003) que le processus de

    rparation implique une tape initiale dite de base-flipping , non photo-induite, pendant

    laquelle la lsion (en jaune sur la Figure 9) est positionne par lenzyme de faon

    extrahlicodale afin de se fixer dans le site actif de celle-ci (Figure 9). Il est propos que des

    acides amins de la protine viennent remplacer les bases manquantes pour stabiliser le

    double brin (par liaisons hydrognes et liaisons de Van der Waals).

    Actuellement, des incertitudes subsistent concernant la reconnaissance du dommage : la

    protine retourne-t-elle toutes les bases unes unes dans son site jusqu ce quelle rencontre

    celle dont les interactions sont spcifiques de la lsion, ou ne retourne-t-elle que la base

    quelle doit rparer ?

    Figure 9 : Etapes de rparation dADN par une photolyase. La premire tape, dite base-flipping est active thermiquement (Sancar, 2003). La lsion, en jaune est positionne dans le site actif de la protine, puis la lsion est rpare par la photolyase.

    II.4. Le Photoproduit des spores

    L'exceptionnelle rsistance des spores bactriennes au rayonnement ultraviolet

    (Nicholson et al., 2000, Setlow, 2001) suscite beaucoup dintert et de ce fait a conduit

    ltude des photoproduits forms dans leur ADN. Ces tudes ont montr que lirradiation UV

    des cellules vgtatives conduit lapparition de dimres CPD (majoritairement les cis-syn

    entre une thymine et une cytosine, et entre deux thymines) et dadduits (6-4) entre deux

    thymines et entre une thymine et une cytosine adjacente (Douki et al., 2001). Or la prsence

    de ces dimres est la plus importante cause de ltalit pour la cellule vgtative expose aux

    rayonnements UV (Setlow, 1966). Cependant, dans le cas de spores exposes aux UV-C, la

    formation de ces photoproduits est absente, allant de pair avec la rsistance de ces

    organismes. Cette dernire ne s'explique cependant pas par l'absence de dommages l'ADN.

    En effet, Donnellan et Setlow ont dcouvert, en 1965, la formation dun autre photoproduit

  • Introduction

    49

    qui nest observ que dans les spores de bactries, do son nom le Photoproduit des Spores

    (SP) (Donnellan Jr. et al., 1965). Sa structure prcise a t dtermine par les travaux de

    Varghese en 1970, grce des analyses RMN 1H, de spectromtrie de masse et par

    spectrophotomtrie UV. Il proposa alors comme structure le motif 5-(-thyminyl)-5,6-

    dihydrothymine (Varghese, 1970) (Figure 10).

    Figure 10 : Motif 5-(-thyminyl)-5,6-dihydrothymine : le Photoproduit des spores.

    II.4.1. Conditions de formation de cette lsion

    Depuis la dcouverte de ce photoproduit particulier, les quipes travaillant sur ce sujet

    ont cherch en expliquer le mcanisme de formation, en dterminant plus particulirement

    les facteurs qui influencent la slectivit de formation de cet adduit par rapport aux dimres

    CPD et (6-4)PP.

    En effet, plusieurs paramtres peuvent favoriser la formation du Photoproduit des spores

    au dtriment des dimres CPD et (6-4)PP. Ceux-ci sont dtaills ci-dessous.

    (1) Conditions dirradiation des spores

    Milieu dirradiation

    - En solution :

    La premire observation du Photoproduit des spores a t faite suite lirradiation

    265nm de spores de Bacillus megaterium en solution dans leau (Donnellan Jr. et al., 1965).

    Les autres photoproduits nont pas t identifis, cependant aucune trace de formation du

    dimre CPD nest dtecte. De mme, pour des spores de Bacillus subtilis irradies 254 nm,

    la quantit de Photoproduit des Spores form est de lordre de dix fois plus importante que

    celle de dimres CPD (Smith et al., 1966).

    - A ltat sec :

    Les mmes observations peuvent tre faites si des spores sont irradies ltat sec

    (Lindberg et al., 1991), et, de faon trs intressante, si des cellules vgtatives et non plus

    des spores sont irradies ltat gel (Varghese, 1970).

  • Introduction

    50

    - Sous vide :

    Lorsque des spores sont irradies sous vide, le Photoproduit des spores se forme mais en

    plus faible quantit qu pression atmosphrique, ces conditions modifiant la structure de

    lADN, sans doute peu favorable la formation du SP. Sur la totalit des dimres de thymine

    forms, 70 % sont le SP, 23 % le dimre CPD cys-sin, et 7% le trans-syn (Lindberg et al.,

    1991).

    Longueur donde

    La longueur donde dirradiation a un effet sur la sensibilit des spores. Son influence a

    t tudie par C. Lindberg et G. Horneck sur la gamme 200-300 nm (UV-C et UV-B) et par

    R. Tyrrell pour des longueurs donde comprises entre 250 et 370 nm (UV-C, UV-B et UV-A)

    (Lindberg et al., 1991, Tyrell, 1978). Les spores sont plus sensibles pour les longueurs donde

    correspondant au maximum dabsorption de lADN (254 - 260 nm), car la rsistance des

    spores augmente quand labsorption diminue. Cependant, pour les longueurs donde

    infrieures 230 nm, une augmentation de la rsistance des spores aux UV est observe

    tandis que labsorbance de lADN augmente. Cette divergence peut sexpliquer par

    labsorption des radiations infrieures 230 nm par les couches externes de la spore qui

    entourent le cytoplasme contenant lADN. Ainsi cette filtration protge partiellement lADN.

    La longueur donde dirradiation a galement un effet sur la formation du SP.

    Lirradiation de spores 254, 313 et 365 nm montre que le SP se forme toutes ces longueurs

    donde. Cependant, on en observe de moins en moins quand la longueur donde augmente.

    Ainsi pour une mme dose dirradiation (J.m-2), lirradiation 313 nm produit mille fois

    moins de SP qu 254 nm (maximum dabsorption de lADN), et le rapport est de 1 million

    quand lirradiation est ralise 365 nm (Tyrell, 1978). Enfin, le SP reste le photoproduit

    majoritaire observ lorsque les spores de bactries sont irradies par le rayonnement solaire,

    ensemble de longueurs donde et non plus irradiation monochromatique (Slieman et al.,

    2000a, Tyrell, 1978).

    (2) Autres facteurs influenant la formation du SP

    Les travaux concernant ltude des conditions de formation et particulirement le rle de

    divers facteurs ont t effectus majoritairement, non plus sur les spores entires, mais sur des

    brins dADN isols, des oligonuclotides et des solutions de thymidine.

  • Introduction

    51

    Hydratation

    Alors que la cellule vgtative contient 75 80 % de son poids humide en eau, la spore

    n'en contient que 25 55 %. Cette faible quantit d'eau est l'origine de la rsistance des

    spores la chaleur, et galement serait un facteur influenant la formation du SP au dtriment

    des autres dimres de pyrimidines. En effet, R. Rahn et coll. et M. Patrick et coll. ont montr

    que la formation du SP tait favorise par irradiation d'ADN peu hydrat (Patrick et al., 1976,

    Rahn et al., 1969).

    Conformation de la double hlice

    Des tudes par dichrosme circulaire ont montr que lADN en solution dans un

    mlange eau/thanol pouvait adopter diffrentes conformations selon la quantit dthanol.

    Ainsi, au del de 80%, lADN est de conformation A (Ivanov et al., 1974). Par la suite, M.

    Patrick et D. Gray ont montr que la formation de SP tait favorise au dtriment de CPD lors

    dune exposition aux UV dADN isol en solution dans un mlange eau/thanol (20 : 80),

    (Patrick et al., 1976). Cette prparation correspond de lADN faiblement hydrat, comme

    lADN des spores.

    Small Acid Soluble Proteins : SASP

    Un deuxime facteur important influenant la photochimie de l'ADN dans les spores est

    un groupe de petites protines appeles SASP (Small Acid-Soluble Proteins). Ces protines

    sont spcifiques des spores de bactries et reprsentent jusqu' 20% de la quantit totale de

    protines dans les spores (Setlow, 1988). Elles sont synthtises la fin de la sporulation et

    leur fonction principale est de fournir lors de leur dgradation au tout dbut de la germination,

    les acides amins ncessaires la synthse protique qui redmarre alors. Il existe deux types

    de SASP : le type / et le type . Les SASP et ont un poids molculaire de 5 000

    7 000 Da pour 61 72 acides amins et comportent une quantit significative d'acides amins

    hydrophobes (21 29 %). Les SASP ont un poids molculaire de 8000 11000 Da pour 81

    96 acides amins et sont pauvres en acides amins hydrophobes (9 11 %). Les SASP /

    sont localises dans le protoplaste de la spore o elles se complexent l'ADN. Les SASP

    sont localises partout o l'on trouve de l'ADN, sans pour autant se complexer lui.

    Les SASP sont les produits des gnes ssp, chaque gne codant pour une seule protine

    (sspA pour SASP , sspB pour SASP , etc...). Leur expression est rgule au niveau

  • Introduction

    52

    transcriptionnel bien qu'il existe galement une rtro-rgulation. En effet, lors dune dltion

    du gne codant pour SASP , il n'y a pas de SASP mais un taux normal de et . En

    revanche si sspA est mute, un taux deux fois plus lev de SASP est observ (Setlow,

    1988).

    Des tudes sur des souches mutes des gnes codant pour SASP ont montr que les

    spores avaient une rsistance aux rayons UV et identiques aux souches sauvages (Hackett et

    al., 1988). En revanche, les spores dont les SASP et sont absentes ont une sensibilit

    accrue aux UV (elles sont plus sensibles que les cellules vgtatives et beaucoup plus

    sensibles que les spores sauvages). La rsistance aux UV retrouve un niveau normal lorsque

    les cellules sont complmentes avec les gnes sspA ou sspB. Enfin, ces souches dficientes

    en SASP et sont aussi rsistantes au rayonnement que les sauvages mais plus sensibles

    la chaleur (Hackett et al., 1988). Afin de comprendre ces observations, des analyses sur le

    type de photoproduit form ont alors t effectues. Dans les souches mutes pour SASP et

    SASP , la quantit de SP form est divise par deux par rapport aux souches sauvages

    (Douki et al., 2005a), la formation de dimres CPD et de (6-4)PP est observe la place avec

    des quantits de l'ordre de la moiti de celles trouves dans les cellules vgtatives (Douki et

    al., 2005a).

    Les squences en acides amins des SASP ne contiennent pas de tryptophane, et un

    certain nombre ne contient pas non plus de tyrosine, excluant ainsi un rle de

    photosensibilisateur pour les SASP. En revanche, la forte similarit de squence entre les

    SASP et entre elles et entre diffrentes espces suggre plutt un rle structural. En effet,

    lorsque lADN est complex par les SASP et irradi par les UV, la quantit de SP form

    augmente avec la quantit de SASP complexant lADN. Lorsque la saturation est atteinte (au

    dessus de 1 protine pour 5 paires de bases) seul le SP se forme (Nicholson et al., 1991). Puis

    ces auteurs ont galement montr que la complexation de SASP des plasmides induisait de

    nombreux surenroulements de ceux-ci. Ils observent que la superhlicit est maximale

    saturation de lADN par les SASP, avec une densit proche de celle des spores (Nicholson et

    al., 1990).

    Enfin, S.C. Mohr et coll. ont montr par dichrosme circulaire et spectroscopie

    infrarouge que la complexation de l'ADN isol par les SASP saturation (rapport massique

    3:1 soit une SASP pour 5 paires de bases) induisait un changement de conformation de l'ADN

    de la forme B la forme A (Mohr et al., 1991), favorisant ainsi largement la formation du SP

    par rapport aux CPD et (6-4)PP (Douki et al., 2005a).

  • Introduction

    53

    Cependant, la quantit de SP form lors de la complexation de l'ADN avec les SASP est

    de l'ordre de dix fois infrieure celle trouve dans les spores entires sauvages, ce qui

    suggre qu'un autre facteur augmente encore le rendement de formation du SP dans celles-ci.

    Acide dipicolinique (DPA)

    L'acide dipicolinique (acide pyridine-2,6-dicarboxylique) est galement un constituant

    spcifique des spores, prsent sous forme de dipicolinate de calcium (Figure 11). Cette petite

    molcule reprsente environ 20% du poids sec de la spore. Elle est synthtise la fin de la

    sporulation juste aprs la synthse des SASP par la DPA synthase, encode par deux cistrons

    (dpaA et dpaB) de lopron spoVF, et est localise dans le cortex et dans le protoplaste

    (Daniel et al., 1993, Setlow et al., 2006, Tovar-Rojo et al., 2002).

    Figure 11 : Pyridine-2,6-dicarboxylate de Calcium DPA.

    Le DPA jouerait un rle important dans la dshydratation du protoplaste de la spore,

    allant de pair avec la rsistance la chaleur (en effet, des souches mutes de l'opron dpaAB

    sont plus sensibles la chaleur humide (Paidhungat et al., 2000)). Il a t montr galement

    que le DPA serait impliqu dans la maintenance de l'tat de dormance, en effet, des souches

    DPA sont instables, et tendent germer spontanment (Paidhungat et al., 2000).

    Enfin, il a t montr par diffrentes quipes, que la sensibilit des spores aux UV tait

    diffrente selon qu'elles contiennent ou non du DPA (Douki et al., 2005b, Setlow et al., 2006,

    Setlow, 2006, Slieman et al., 2001).

    En effet, les spores de souches sauvages de Bacillus subtilis sont moins sensibles, en

    termes de survie aprs la germination, que celles mutes (ne synthtisant pas le DPA), aprs

    exposition aux rayonnements UV provenant soit de lampes monochromatiques, soit

    directement du rayonnement solaire, soit du rayonnement solaire filtr ne laissant passer que

    les UV-A. De plus, l'ajout de Ca-DPA dans des films d'ADN complex aux / SASP

    augmente de faon trs significative la production de SP par rapport aux autres dimres et ce

    quelle que soit la source de rayonnement (Setlow et al., 1993). Enfin, plusieurs tudes

    rapportent que le DPA peut interagir directement avec l'ADN in vitro (Lindsay et al., 1985,

    Lindsay et al., 1986).

  • Introduction

    54

    T. Douki et coll. ont d'ailleurs montr que dans les spores dficientes en DPA, le SP se

    formait beaucoup moins que dans les cellules sauvages. Plusieurs explications peuvent tre

    donnes quant au rle du DPA sur la photochimie de l'ADN (Douki et al., 2005b):

    une altration de la structure de l'ADN cause de la liaison du DPA la double

    hlice. Cependant, la nature de cette modification n'est pas claire l'heure

    actuelle ;

    une autre hypothse concerne l'observation que les spores dficientes en DPA

    voient leur contenu en eau augmenter modifiant ainsi la photochimie. Or l'eau de

    spores varie de 36% 44% sans DPA et des tudes ont montr qu'une variation

    de 34 39% d'eau dans les spores ne modifiait pas la sensibilit de celles-ci vis-

    -vis des UV. Il serait donc peu probable que l'augmentation 44% modifie

    considrablement la rsistance des spores aux UV ;

    Enfin, une autre hypothse propose par T. Douki et coll. est celle d'une

    photosensibilisation de l'ADN par le DPA impliquant un tat excit triplet du

    DPA. Les preuves d'un tel mcanisme sont d'une part que la quantit de

    photoproduits, incluant galement les CPD et dans une moindre mesure les (6-

    4)PP, augmente avec l'addition de Ca-DPA, et surtout que l'analyse des quantits

    de photoproduits issus de l'irradiation de films secs d'ADN en prsence de DPA

    indique que le rapport CPD/(6-4)PP augmente significativement avec l'addition

    de DPA. Or il a t montr qu'un tat triplet tait l'origine de la formation de

    CPD mais pas de (6-4)PP. Ceci suggre un transfert d'nergie de l'tat triplet du

    Ca-DPA excit l'ADN des spores. De plus, il a t montr que la

    photosensibilisation UV-A de films secs de thymidine par des psoralnes ou la

    benzophnone implique un tat triplet dans la formation du SP et que cet tat

    triplet favorise en outre la formation de dimres de thymines plutt que de

    cytosine (Charlier et al., 1972, Douki et al., 2003c, Lamola, 1970).

    En conclusion, la formation du Photoproduit des Spores dpend de nombreux

    paramtres. La dshydratation de l'ADN contenu dans le protoplaste empche l'ADN

    d'adopter une conformation B et limite ainsi la formation de dimre CPD ltal pour la cellule.

    La prsence des SASP induit une conformation A compacte qui permet une formation

    exclusive du SP, photosensibilise par le DPA prsent dans le protoplaste.

  • Introduction

    55

    II.4.2. Structure et formation du Photoproduit des spores

    - Nature du photoproduit : intra-brin ou inter-brin ?

    Pendant longtemps, toutes les tudes concernant le Photoproduit des spores ont t faites

    par hydrolyse acide de lADN afin den extraire et dtudier le Photoproduit des spores. Cette

    technique permet de dissocier les bases nucliques du sucre sur lequel il est fix, facilitant

    ainsi lanalyse. Cette dmarche ne permet cependant pas de dterminer si les lsions

    dimriques se produisent de faon intra-brin ou entre les deux brins complmentaires de

    lADN, puisque alors seules les deux bases dimrises sans les dsoxyriboses sont observes.

    Habituellement, ce type de lsions est considr comme survenant entre deux bases

    adjacentes donc situes sur le mme brin dADN ; mais dj en 1969, R. Rahn et H.

    Hosszu sinterrogeaient sur la nature intra- ou inter-brin du photoproduit de type spore (Rahn

    et al., 1969).

    En 2003, T. Douki et coll. prsentent une mthode danalyse qualitative et quantitative

    plus complte que celles utilises prcdemment en proposant de digrer les brins dADN

    irradis par des exonuclases (phosphodiestrases) qui vont donc hydrolyser les liaisons

    phosphodiesters entre les nuclotides. Les nuclosides issus de lhydrolyse sont ensuite

    analyss par HPLC5 couple la spectromtrie de masse (Douki et al., 2003b). Or, dans le cas

    des lsions dimriques intra-brin, les exonuclases sont incapables dhydrolyser le pont

    phosphodiester compris entre deux nuclosides renfermant la lsion bipyrimidique. Cest

    alors le dinucloside monophosphate qui est libr lissu de lhydrolyse. Dans le cas des

    lsions inter-brin, le photoproduit nempche pas lhydrolyse des ponts phosphodiesters de

    part et dautre des nuclotides engags dans la lsion. Ici, cest donc le dinucloside sans le

    pont phosphodiester qui est libr la suite de la digestion enzymatique. La diffrence entre

    les deux cas, intra- et inter-brin, peut ainsi tre distingue en HPLC-MS, comme le montre le

    Schma 13.

    5 High Performance Liquid Chromatography. Technique de chromatographie liquide haute performance. Voir dans le chapitre Matriels et Mthodes V.6, page 118.

  • Introduction

    56

    Schma 13 : Principe de la mthode utilise par Douki et coll. pour lanalyse des lsions bipyrimidiques (Douki et al., 2003b).

    Aprs avoir appliqu cette mthodologie lirradiation 254 nm de brins dADN

    lyophiliss, T. Douki et coll. ont montr que la totalit de la lsion SP produite dans lADN se

    rpartissait de faon presque quitable entre les lsions intra- et les lsions inter-brin, la

    proportion dinter-brin tant sensiblement plus importante (54% dinter contre 46% dintra).

    En revanche, dans le cas de lirradiation 254 nm dADN dans une solution eau/thanol

    20/80, favorable la formation du Photoproduit des spores car induisant une dshydratation et

    une conformation A de lADN, le profil est trs diffrent puisque les SP intra-brin

    reprsentent 91% des SP totalement forms dans lADN contre 9% de SP inter-brin (Douki et

    al., 2003b).

    Enfin, lirradiation de spores de B. subtilis conduit la formation de 99% de SP intra-

    brin et peine 1% de SP inter-brin (Douki et al., 2005a). Il semblerait donc que le

    Photoproduit des spores soit plutt une lsion intra-brin dans la cellule, mme si la forme

    inter-brin peut tre obtenue en grande quantit in vitro.

  • Introduction

    57

    - Slectivit de la raction de formation du Photoproduit des spores

    La stroslectivit de la raction de formation du Photoproduit des Spores est un

    paramtre important considrer puisque le C5 de la base sature est un carbone asymtrique.

    Plusieurs paramtres sont prendre en compte, dune part lorientation des bases par rapport

    au sucre (syn ou anti) avant irradiation, et dautre part la provenance du pont mthylne entre

    les deux bases : soit celui-ci provient du mthyle de la base en 5 qui ragit sur le C5 de la

    base en 3 (flches bleues conduisant aux composs de gauche sur le Schma 14 : 3R et

    3S ) soit linverse (flches orange conduisant aux composs de droite 5R et 5S ).

    A cause de ces diffrents cas, la formation de quatre diastroisomres peut tre envisage

    (Schma 14).

    Schma 14 : Les quatre diastroisomres du Photoproduit des spores obtenus selon lorientation des bases syn ou anti et lorigine du mthyle engag dans le pont mthylne. La notation 3 S signifie que le carbone asymtrique est sur la base en 3 et de configuration absolue S.

    Jusqu prsent, aucune tude na permis de dterminer quel isomre du Photoproduit

    des spores est obtenu par irradiation des spores. En effet, lhydrolyse acide ne permet pas de

    dterminer sur quelle base est le carbone asymtrique (5 ou 3), car celle-ci provoque une

    rupture de la liaison N-glycosidique. Les deux produits possibles sont alors identiques. De

    mme, la configuration absolue du carbone 5 asymtrique na encore jamais t dtermine.

  • Introduction

    58

    Cependant, la formation prfrentielle dun dimre peut tre suppose par :

    - des donnes de la littrature concernant la fois la conformation de lADN

    (conformation A) et des bases elles-mmes (en anti dans lADN), favorisant la

    formation des composs 3S et 5R ;

    - des tudes sur dautres dimres (effet de squence sur les dimres Guanine

    Thymine) (Bellon et al., 2002), indiquant que la base en 3 attaque la base en 5 ;

    - des contraintes striques et de distance (Figure 12).

    Il serait donc plus vraisemblable que le pont mthylne se forme entre le mthyle de la

    base en 3 et le C5 de la base en 5, car cette distance est plus courte que la distance inverse

    (entre le mthyle de la base 5 et le C5 de la base 3) (Figure 12, ralise partir du fichier

    pdb 1G4Q, structure dun ADN de conformation A). Cest cet effet de squence qui a

    galement t observ par S. Bellon et coll. sur les dimres forms artificiellement entre une

    guanine et une thymine. Le dimre d(GT) est form prfrentiellement au d(TG), car cest

    la thymine en 3 qui engage son mthyle (Bellon et al., 2002).

    Figure 12 : Distances entre deux thymines adjacentes dun ADN de conformation A. Les bases ont lorientation anti. Distance jaune : 3,69 entre le mthyle de la base en 3 vers le C5 de la base en 5. Distance rouge : 5,52 entre le mthyle de la base en 5 vers le C5 de la base en 3. Daprs le fichier pdb 1G4Q.

    Pour toutes ces raisons, il semblerait que lisomre naturel du Photoproduit des spores

    soit donc le 5 R , encadr sur le Schma 14.

  • Introduction

    59

    - Mcanisme de formation du Photoproduit des spores

    Deux hypothses concernant le mcanisme de formation du Photoproduit des spores ont

    t proposes. Une voie radicalaire et un mcanisme concert (Schma 15).

    Selon A.J. Varghese, qui tudia la structure du SP en 1970, le SP pourrait provenir de la

    recombinaison de deux radicaux issus de la thymine (Schma 15 (1)) (Varghese, 1970).

    La formation du radical 5,6-dihydrothyminyle centr en C5 (b) a t justifie par des

    tudes de rsonance paramagntique lectronique lorsque l'ADN est irradi sous UV -196C

    la faveur de l'addition d'un radical hydrogne sur le C6 de la base (Pershan et al., 1965). La

    formation de l'autre radical (a) peut tre dmontre par l'obs