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Distribution : limitée Royaume du Maroc Ministère de l'Education Nationale RAPPORT D'EVALUATION EXTERNE du Projet d'Appui au développement du premier cycle de l'enseignement fondamental Division pour la reconstruction et le développement des systèmes éducatifs Secteur de l'éducation Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture ED-97/WS/59

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Distribution : limitée

Royaume du Maroc Ministère de l'Education Nationale

RAPPORT D'EVALUATION EXTERNE du Projet d'Appui au développement

du premier cycle de l'enseignement fondamental

Division pour la reconstruction et le développement des systèmes éducatifs Secteur de l'éducation Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture

E D - 9 7 / W S / 5 9

Ce rapport d'évaluation a été élaboré en mai 1997 lors d'une mission d'évaluation externe dans le cadre d'un projet d'appui au développement du premier cycle de l'enseignement fondamental financé par la Banque Mondiale (prêt no. 3026 M O R ) et exécuté par l ' U N E S C O (Projet 7 0 0 / M O R / 1 3 ) .

Les consultants évaluateurs :

Christian Depover, Université de M o n s - Hainaut, Belgique François Orivel, I R E D U , Université de Bourgogne, France

Les évaluateurs sont responsables du choix et de la présentation des faits figurant dans cet ouvrage ainsi que des opinions qui y sont exprimées, lesquelles ne sont pas nécessairement celles de l ' U N E S C O et n'engagent pas l'Organisation.

Responsable du projet :

Gwang-Chol Chang Division pour la reconstruction et le développement des systèmes éducatifs

Secteur de l'éducation UNESCO 7, place de Fontenoy 75352 Paris 07 SP

Tables des matières

1 Origine et contexte du projet 1

2 Développement des capacités en programmation, évaluation et gestion pédagogique 5 2.1 Logique de l'évaluation 5 2.2 Modalités de prise en charge des composantes pédagogiques du projet 6

2.2.1 Composante 1 : développement des programmes d'enseignement . . . . 7 2.2.2 Composante 2 : évaluation des apprentissages 8 2.2.3 Composantes 4 et 5 : Enseignement à niveaux multiples et administration

scolaire 9 2.3 L a phase de dissémination 10 2.4 Analyse des produits pédagogiques 12 2.5 Appréciation de la pérennité des effets du projet 15

3 Le développement des capacités en planification de l'éducation 19 3.1 L'informatisation des données et des outils d'analyse 19 3.2 L a formation des planificateurs à l'analyse des données 22 3.3 Les études sur l'analyse des carrières scolaires 24

3.3.1 Les déterminants des acquisitions des élèves du premier cycle du fondamental 24

3.3.2 L'accès au second cycle de l'enseignement fondamental 26 3.3.3 Quelques commentaires additionnels sur les études 26

4 Développement des capacités des services de santé scolaire 29 4.1 Renforcement des capacités de la division de la santé scolaire et informatisation

du service des accidents 29 4.2 Etude de faisabilité pour l'implantation d'un atelier de fabrication de verres

correcteurs 30

5 U n e conclusion sous forme d'invitation à poursuivre 31

1 Origine et contexte du projet

E n 1989, le Maroc a signé avec la Banque Mondiale (BIRD) et la Banque Africaine de Développement ( B A D ) un accord de crédit destiné à appuyer le développement du premier cycle de l'enseignement fondamental. Cet accord comprenait, pour la partie financée par la Banque Mondiale, un volet d'assistance technique pour un montant de 4 millions de dollars, dont l'objet visait à améliorer la qualité de l'enseignement primaire et les prestations des services de santé scolaire, et à accroître les capacités institutionnelles du Ministère de l'Education, notamment dans les domaines de la planification et de l'analyse des politiques éducatives. Les moyens mis en oeuvre pour y parvenir étaient variés: informatisation, études et formation des cadres du ministère, tant au niveau central qu'à celui des délégations provinciales.

Dans un premier temps, le Maroc s'est adressé à l ' U N E S C O pour lui demander de jouer le rôle d'agence d'exécution de ce projet, dans le cadre des accords qui régissent les rapports des organisations internationales entre elles, qui stipulent que lorsqu'un projet fait partie des compétences explicites d'une agence technique, il est possible de recourir à un contrat de gré à gré. L ' U N E S C O a favorablement répondu à la requête marocaine et a présenté une proposition détaillée d'exécution. A la suite de ces échanges, la Banque Mondiale a fait savoir que dans le cas d'espèce, une procédure de comparaison d'offres lui semblait préférable. E n conséquence, le dossier fut

repris à son point de départ, et à la suite de la comparaison d'offres, l ' U N E S C O fut sélectionnée sur l'ensemble des composantes, y compris celles où son avantage comparatif était moins évident, tels que l'appui à la santé scolaire.

Cet épisode devait être à l'origine d'un premier retard dans l'exécution du projet, qui dut malheureusement en connaître d'autres. E n effet, les autorités marocaines compétentes, soucieuses ajuste titre de limiter l'endettement du pays, ont exprimé le souhait de réduire l'enveloppe initiale et de ramener le budget de cette composante à 2,5 millions de dollars. Cette réduction fut obtenue par la suppression de trois composantes et par une légère ponction sur les sept composantes maintenues.

D'autres difficultés administratives s'ajoutèrent, liées en particulier à des différences de procédure entre l ' U N E S C O et le Ministère marocain des finances. C e dernier pratique le paiement sur facture et en dirhams après exécution des prestations prévues, alors que l ' U N E S C O n'engage les activités qu'après paiement préalable d'un dépôt en dollars. Ces différences de point de vue peuvent se comprendre. La préoccupation de limitation des dépenses découlent de la nature m ê m e du prêt, qui n'est pas assorti de conditions de libéralité particulières, et dont le budget marocain devra supporter la charge complète, principal et intérêts. Quand on connaît le niveau d'endettement public du pays, on ne peut qu'acquiescer à ce souci légitime. Les règles qu'impose l ' U N E S C O en matière de règlement (ex ante et en dollars) sont tout aussi compréhensibles. L ' U N E S C O ne prélève que des "overheads" modestes par rapport aux pratiques standards des bureaux d'études spécialisés (13% au lieu de 40-50%), et finance sur son propre

1

budget les services de son responsable de

projet. C'est un avantage appréciable pour

le Maroc, qui en revanche doit abandonner

celui de la disponibilité d'une certaine

trésorerie, ainsi que les avantages de

change éventuels qui résultent du paiement

en dirhams. Il convient de préciser que ces

deux mesures ne coûtent rien au budget

marocain. Elles le privent simplement d'un

bénéfice éventuel non prévu au contrat. Ces

différents obstacles expliquent pourquoi le

projet a connu un démarrage effectif aussi

tardif, trois ans et demi après la date

théorique. Ces retards, ajoutés aux

changements dans la liste et le budget des

sous-composantes, n'ont pas été sans

conséquence sur la façon dont les termes de

référence initiaux ont été interprétés. Plutôt

que de les suivre à la lettre, les

responsables de la mise en oeuvre du projet

ont adapté ces termes de référence à

l'évolution des besoins et des

circonstances, et c o m m e nous le verrons

plus loin, on constate ex post une certaine

distance entre ces objectifs initiaux et ce

qui a été effectivement réalisé. Cette

distance reflète une attitude pragmatique

des responsables concernés, et elle n'est

pas étrangère au fait que les termes de

référence initiaux étaient rédigés de façon

générale, pour ne pas dire standardisée, et

donc peu spécifique à la réalité éducative

marocaine.

L ' U N E S C O a initialement confié la

responsabilité du suivi du projet à M .

André L e m a y , spécialiste du programme

possédant une grande expérience, qui s'est

fortement impliqué dans son exécution.

Son action a été appréciée par tous les

acteurs que nous avons rencontrés, et en

tant qu'évaluateurs externes, nous avons

été impressionnés par la capacité de ce

responsable à répondre à toutes nos

questions, à trouver instantanément dans

les archives tout document relatif au projet,

et à mémoriser les dates de chaque

événement, si modeste soit-il. Durant les

trois premiers quarts de la période

d'exécution, la gestion budgétaire fut prise

en charge par le siège de l ' U N E S C O à

Paris. C e relatif éloignement a parfois

compliqué les choses, c o m m e par exemple

le versement des indemnités de

déplacement aux stagiaires provenant de

différentes localités marocaines pour

participer à des stages de formation

organisés par le projet. A partir du dernier

quart, durant lequel le nombre de

séminaires de formation a été important,

une grande partie de la gestion financière

pour les activités menées à l'intérieur du

Maroc a été déléguée à la représentation de

l ' U N E S C O à Rabat, qui a semble-t-il

donné sur ce point toute satisfaction.

D u côté marocain, deux directions

(celle de la planification et celle de

l'enseignement fondamental du premier

cycle) et une division (celle de la santé

scolaire), étaient les partenaires du projet.

Normalement, la Direction de la

planification, qui dispose d'une division

des projets financés par des bailleurs

extérieurs, assure la coordination de ce type

de projet. C'est ce qu'elle a fait dans une

première phase, se retrouvant du m ê m e

coup à la fois responsable de la

coordination et partie prenante dans deux

des sous-composantes clefs du projet

(l'appui à la planification et l'appui aux

études). Aussi, dans une deuxième phase,

a-t-on confié la tâche de coordination à une

troisième direction, celle de la coopération.

Il faut bien reconnaître qu'il est toujours

difficile d'exercer cette fonction lorsque

pendant plusieurs années, d'autres

procédures ont prévalu, et que l'on ne

dispose pas d'une connaissance intime du

projet et des raisons qui l'ont amené au

stade où il en est. C e contexte très

particulier ainsi que les changements en

2

cours de route expliquent pourquoi le

problème de la coordination a pu

rencontrer certaines difficultés.

Le présent rapport d'évaluation

comporte trois sections, qui se définissent

chacune à partir de l'identité du

bénéficiaire institutionnel des composantes

qui sont examinées, à savoir :

• Le développement des capacités en

programmation, évaluation et gestion

pédagogiques

1. développement des programmes

d'enseignement du premier cycle

de l'enseignement fondamental

2 . évaluation des apprentissages

4 . enseignement à niveaux multiples

5. administration scolaire: formation

des directeurs d'école

• le développement des capacités en

planification de l'éducation

7. planification de l'éducation

7.1 informatisation des procédures de

planification

7.2 recherche sur les facteurs influant

sur les acquisitions et les carrières

des élèves

D le développement des capacités des

services de santé scolaire

8. services de santé scolaire

10. étude de faisabilité sur la

production et la distribution de

verres correcteurs.

Les composantes 3, 6 et 9 sont

celles qui ont été supprimées. Elles ne

figurent donc pas dans la liste présentée ci-

dessus.

3

2 Développement des capacités

en programmation, évaluation et gestion pédagogique

2.1 Logique de l'évaluation

Les règles de " bonne pratique " en

matière d'évaluation de projets nous

conduisent à porter une appréciation sur les

résultats observés sur la base des résultats

attendus. Toutefois, pour que ce processus

trouve sa pleine cohérence, il convient que

les résultats attendus soient réalistes c'est-

à-dire adaptés aux moyens humains et

matériels mis en oeuvre mais aussi au

contexte dans lequel le projet sera amené à

prendre pied. Manifestement, dans le projet

dont il est question ici, cette cohérence

entre les moyens et les fins, entre les fins et

les besoins du m o m e n t n 'a pas été

complètement respectée.

L a raison principale qui explique

l'écart entre ce qui est annoncé dans les

termes de référence et les objectifs que les

autorités nationales ont finalement décidé

de poursuivre avec l'aide de l'opérateur

sélectionné ( U N E S C O ) trouve, pour

l'essentiel, son origine dans les reports

successifs qu'a connu le démarrage effectif

du projet. E n effet, alors que le rapport

d'évaluation de la Banque Mondiale est

daté de février 1989, les composantes

pédagogiques définies dans le cadre de ce

projet devront attendre décembre 1993

pour connaître un début de réalisation avec

la visite à l'Université Laval à Québec

( U L ) de deux responsables marocains.

Entre-temps, le système éducatif avait

évolué : en particulier une première

réforme des programmes était terminée,

l'évaluation de l'efficacité interne du

système avait connu une première phase de

prise en charge à travers la réalisation de

plusieurs études ponctuelles, des actions de

formation avaient été organisées dans le

domaine des classes à niveaux multiples

avec le soutien de l'aide bilatérale

française.

E n ce qui concerne l'adéquation des

termes de référence à l'évolution du

contexte éducatif national, un premier

constat qu'il nous paraît intéressant

d'établir est que, entre la formulation

initiale des termes de références telle

qu'elle apparaît en 1989 et la formulation

proposée en 1991, aucun ajustement n 'a été

opéré hormis la suppression de deux

composantes pédagogiques et la

diminution des ressources affectées aux

composantes maintenues.

Le document de projet soumis par

l ' U N E S C O témoigne d 'un souci de coller

davantage à la réalité éducative marocaine.

Ainsi, la composante 1 fait-elle l'objet

d'une révision assez profonde qui conduit

à l'abandon des aspects liés à la production

de matériel pédagogique. L a composante 2

subit une première inflexion vers

l'évaluation formative sans que toutefois

soient abandonnées les préoccupations en

matière d'évaluation de l'efficacité interne

du système. E n ce qui concerne les

composantes 4 et 5, on peut noter une

volonté de privilégier la formation de

cadres nationaux et d'exploiter des outils

déjà disponibles (guide pratique produit par

la Direction de l'enseignement primaire et

guide d'auto-formation produit par

l ' U N E S C O ) en les adaptant et en les

améliorant plutôt que de se lancer dans la

production de nouveaux outils.

Toutefois, dès que le projet

5

connaîtra un début de réalisation, il

s'avérera rapidement que ces

aménagements ne rencontrent plus

totalement les souhaits des responsables

nationaux chargés du suivi et que certaines

modifications fondamentales devront

encore être apportées au projet. Ainsi, il

faudra attendre la réunion tenue à Québec

entre les responsables nationaux et les

représentants de l 'UL en décembre 1993

pour que le projet prenne une forme proche

de celle qui sera finalement retenue pour

son exécution. Par la suite, des

changements mineurs y seront encore

apportés à l'exception du choix du modèle

de dissémination qui connaîtra une

réorientation majeure en octobre 1996.

Dans un contexte où l'on a choisi

de privilégier une gestion souple et réaliste

tenant compte des besoins prioritaires du

système éducatif et des moyens mis à la

disposition du projet, une évaluation basée

uniquement sur les objectifs de départ tels

qu'ils ont été définis dans les termes de

référence ou dans le document de projet

soumis par l ' U N E S C O risquerait de passer

à côté d 'un certain nombre d'apports

essentiels du projet et de le pénaliser pour

n'avoir pas atteint certains objectifs qui

n'étaient soit plus pertinents au m o m e n t de

la réalisation effective du projet soit

irréalistes en fonction des moyens mis à

disposition.

Compte tenu de cela, nous avons

décidé d'adopter une démarche

d'évaluation résolument pragmatique en

tentant d'appréhender la cohérence du

projet à travers ses réalisations effectives

ainsi qu'à travers les structures qu'il a

permis de mettre en place.

Complémentairement, nous tenterons

d'évaluer la pérennité de ce qui a été acquis

dans le cadre du projet et la possibilité de

voir ces acquis intégrés c o m m e

composantes permanentes du système

éducatif.

Pour mener à bien une telle

approche evaluative, il était important pour

nous d'avoir l'occasion de voir fonctionner

le projet " par l'intérieur " c'est-à-dire en

étant intégré au travail des personnels

chargés de sa réalisation sur le terrain.

Cette possibilité nous a été donnée par la

Direction de l'enseignement préscolaire et

du premier cycle de l'enseignement

fondamental ( D P P C E F ) en permettant

notre participation à des séminaires

organisés à Fès à l'intention des

inspecteurs et des responsables des

délégations locales. Ces séminaires nous

ont également permis de rencontrer les

membres du " groupe stratégique " qui,

c o m m e nous l'indiquerons par la suite, ont

joué un rôle déterminant dans la réalisation

du projet.

2.2 Modalités de prise en charge des

composantes pédagogiques du

projet

Les composantes pédagogiques du

projet étaient au départ au nombre de cinq

(composantes 1 à 5). Lors de la révision

budgétaire du projet, une de ces

composantes a été abandonnée

(composantes 3 consacrée au recrutement,

à la formation et à l'affectation des cadres

de l'enseignement). Quatre composantes

ont été maintenues, à savoir :

O Développement des programmes

d'enseignement (composante 1)

O Evaluation des apprentissages

(composante 2)

O Enseignement à niveaux multiples

(composante 4)

O Administrat ion scolaire

(composante 5)

6

Outre la suppression de deux

composantes pédagogiques, la révision

budgétaire a également porté sur une

diminution des montants affectés à chacune

des quatre composantes maintenues.

2.2.1 Composante 1 : développement des

programmes d'enseignement

Cette composante a fait l'objet d'un

premier ajustement, par rapport aux termes

de référence à l'occasion du document de

projet proposé par l ' U N E S C O en mars

1992. Il s'agissait d'adapter cette

composante au fait qu'une première

révision des programmes du cycle primaire

avait été achevée au momen t du début de

l'exécution de ce projet.

D'autres aménagements au projet

sont également apparus en phase

d'exécution. Ceux-ci avaient pour objet

principal de permettre une plus grande

focalisation des actions entreprises en

limitant le nombre des bénéficiaires des

actions de formation prévues à un groupe

de 13 personnes appelées à jouer un rôle

majeur dans le suivi du processus

permanent de révision des programmes mis

en place au sein de la D P P C E F

Les formations organisées dans le

cadre de cette composante comportaient

des séjours de longue durée (1 année) à

l 'UL pour 5 cadres du Ministère, des

séjours courts (10 semaines) à l 'UL pour

10 personnes ainsi que des actions de suivi

au Maroc, en particulier un séminaire d'une

semaine en mai 1995

Lors de la sélection des

bénéficiaires de cette formation, une

attention particulière a été apportée à

couvrir le champ des disciplines enseignées

dans l'enseignement fondamental à savoir:

la mathématique, la langue arabe, la langue

française et les sciences de la nature.

En ce qui concerne les contenus

traités par la formation, le choix a été fait,

dans le cadre des formations longues,

d'assurer aux bénéficiaires une large base

de connaissances communes dans les

domaines de la mesure des résultats

scolaires, de l'évaluation des programmes

ainsi que dans l'analyse des contenus

pédagogiques et des manuels. Par contre, la

volonté exprimée par les autorités

marocaines en ce qui concerne les stages

courts a été de focaliser davantage les

préoccupations sur l'évaluation des

programmes et des manuels dans le cadre

d'activités à caractère pratique inspirées de

la réalité marocaine (Rapport de mission au

Québec, août 1994).

Quatre fascicules ont également été

produits par l 'UL dans le cadre de cette

composante. Ceux-ci concernaient :

®> L'étude des besoins en éducation ;

®> L'élaboration de programmes ;

«s» L'évaluation de p r o g r a m m e s ;

s> L'évaluation des manuels scolaires.

Complémentairement à ces

fascicules, d'autres matériels d'intervention

ont également été produits par l 'UL pour

répondre à la préoccupation exprimée par

les autorités marocaines d'accorder une

part plus importante aux aspects pratiques

et à une référence plus directe à la réalité

marocaine dans le cadre de cette

composante. Il s'agit principalement d'une

grille d'évaluation des programmes qui

malheureusement n'a pas réellement

conduit aux bénéfices escomptés en raison

d'une implication jugée insuffisante des

personnes concernées (cf. compte-rendu de

la rencontre de coordination tenue à

Québec en février 1996).

7

Cette implication insuffisante des

personnes formées au processus de révision

des programmes trouve probablement en

partie sa source dans le fait que les cadres

et les structures d 'un processus permanent

de révision des programmes restent à

définir par les autorités marocaines. O n

peut néanmoins espérer qu'une décision à

ce niveau permettra de remobiliser les

personnes et de tirer le meilleur parti des

compétences acquises.

2.2.2 Composante 2 : évaluation des

apprentissages

Tout c o m m e les autres

composantes, la composante 2 a fait l'objet

d 'un certain nombre d'ajustements par

rapport à ses finalités initiales et aux

résultats attendus sur le système.

Certains de ces ajustements

s'expliquent par l'évolution naturelle du

système entre le m o m e n t de l'identification

initiale des composantes et leur réalisation

effective mais les changements les plus

importants trouvent leur source dans une

meilleure identification des besoins réels

du système.

Ainsi, l'accent placé initialement

sur le développement des capacités

nationales, humaines et instrumentales, en

matière d'évaluation de l'efficacité interne

du système éducatif s'est déplacé vers des

préoccupations davantage centrées sur le

diagnostic individuel et la régulation du

processus d'apprentissage dans le cadre

d'une évaluation qualifiée de formative.

C e changement de paradigme de

base qui a fait l'objet d 'un accord entre les

parties conduit à un réaménagement de

cette composante. Si on accepte cette

modification de paradigme, l'ensemble de

la démarche mise en oeuvre à l'occasion de

cette composante paraît logique et adaptée

aux besoins du pays en ce qui concerne

l'amélioration du personnel d'encadrement

et d'exécution du Ministère de l'éducation.

A u niveau des résultats attendus, les

responsables nationaux qui ont négocié la

phase de réalisation ont mis l'accent sur

trois aspects essentiels :

O la formation du personnel à

l'occasion de stages de longue durée à l ' U L

au bénéfice de deux cadres de l'éducation

nationale (une année) et de courte durée

(10 semaines) pour des cadres du ministère

et des inspecteurs;

•=> la conception de six fascicules de

référence sous la responsabilité de l 'UL et

la production de ces fascicules au niveau

local;

O la conception d 'un matériel

d'intervention destiné à servir de support

aux actions de dissémination.

Les fascicules produits dans le

cadre de cette composante portent les titres

suivants :

o> Introduction au vocabulaire de base

et à l'évaluation formative des

apprentissages

<^> La confection des items

®> Concepts de base en mesure et

évaluation

e> Les objectifs pédagogiques

®> L'approche instrumentée de

l'évaluation formative des

apprentissages

o> Glossaire

C o m m e nous l'avons déjà signalé,

certains produits identifiés dans les termes

de référence révisés (juillet 1991) n'ont pas

finalement été pris en compte ou finalisés

lors de la phase de réalisation du projet.

C'est notamment le cas de la réalisation

8

d'une banque d'outils d'évaluation des

apprentissages dont l'idée a été reprise sous

une forme amendée en cours de réalisation

du projet puis, semble-t-il, abandonnée.

D e manière cohérente avec la

réorientation du projet (telle que nous

l'avons résumée ci-avant), tous les aspects

relatifs à la réalisation d'outils d'évaluation

en vue de l'analyse de l'efficacité interne et

du pilotage du système ont été abandonnés

au profit d'une approche privilégiant

l'évaluation formative des apprentissages.

Certaines études ponctuelles sur

l'efficacité interne du système ont toutefois

été réalisées indépendamment de ce projet.

D e plus, il est dans les intentions de la

D P P C E F de mettre sur pied en la matière

une stratégie en deux étapes : améliorer

l'efficacité de l'environnement en intégrant

l'évaluation formative c o m m e composante

permanente du système éducatif et ensuite

mettre sur pied des instruments et des

structures permettant d'apprécier

l'efficacité interne du système.

2.2.3 Composantes 4 et 5 : Enseignement

à niveaux multiples et administration

scolaire

Pour des raisons d'efficacité et

d'économie des moyens, une certaine

synergie a été mise en place entre ces deux

composantes en cours de réalisation du

projet.

Cette synergie s'est essentiellement

traduite par la production de fascicules

dans lesquels on a apporté un soin

particulier à mettre en lumière les relations

qui pouvaient exister entre ces deux

composantes.

Les fascicules produits sont pour

ces deux composantes au nombre de six.

Les trois premiers concernent plus

particulièrement la composante 4 :

e> Gérer les différences, c'est

apprendre à gérer une classe

o> L'évaluation formative en classe à

degrés multiples

<s> L a pédagogie de la différence

appliquée aux classes multigrades.

Trois autres fascicules concernent

la composante 5 à savoir :

«s> Supervision et évaluation du

rendement du personnel. Projet

pédagogique

o> Direction d'établissement scolaire;

^> Le projet éducatif.

Pour ces deux composantes, on peut

également parler de réorientation par

rapport à la spécification du projet tel qu'il

apparaît dans les termes de références et

dans le document de projet proposé par

l ' U N E S C O . Ainsi, en ce qui concerne la

composante 4 , les aspects conduisant à la

production de matériel pédagogique ont été

abandonnés et réorientés vers la production

de documents susceptibles de servir de

référence à des actions de formation (les

fascicules). Pour la composante 5, le guide

d'auto-formation proposé par l ' U N E S C O

a été délaissé au profit de fascicules qui se

voulaient à la fois mieux adaptés à la

réalité marocaine et répondant davantage à

la vision plus ouverte du rôle du directeur

d'établissement qui se fait jour dans le

cadre d'une volonté marquée de

décentralisation du système éducatif

marocain. Pour cette composante, une

partie substantielle des activités prévues

dans les termes de référence ont été

abandonnées ce qui s'est traduit par une

réduction de l'ordre de 4 5 % du budget

affecté.

9

A u vu des éléments dont nous

disposons, il semble que ce soit cette

composante 5 qui ait le plus souffert de

certaines difficultés d'exécution du projet

et qu'une certaine insatisfaction existe au

niveau des autorités marocaines par rapport

aux actions prévues au niveau des

directions d'écoles. E n particulier, le

rapport de la mission effectuée au Québec

en février 1995 par Messieurs Bakkali et El

Yazidi mentionne explicitement que la

visite d'étude de 3 semaines organisée au

Québec n 'a traité que de la composante 4 et

donc que la composante 5 a été négligée

lors de cette visite. Soulignons toutefois,

qu'à notre connaissance, aucune demande

officielle n 'a été formulée pour que les

aspects liés à la direction d'écoles soient

pris en compte lors de cette visite et que

l'insatisfaction manifestée par les autorités

marocaines à ce niveau tient probablement

davantage à une formalisation insuffisante

des termes de référence de la visite qu'à un

non respect de certains engagements

contractuels de la part de l 'UL.

2.3 L a phase de dissémination

N o u s avons choisi de consacrer un

paragraphe particulier à cette phase car elle

a fait l'objet d'une réorientation essentielle

dont il convient de bien percevoir la

logique pour saisir la dynamique globale

du projet en ce qui concerne ses

composantes pédagogiques.

Les termes de références tels qu'ils

ont été ajustés en juillet 91 prévoyaient le

développement des capacités nationales

tant en ce qui concerne la conception des

programmes, l'évaluation, la gestion des

classes à niveaux multiples que la direction

d'écoles. Toutefois, aucun élément n'était

présent dans ce document quant à la forme

des interventions prévues à ce niveau et

aux stratégies à mettre en oeuvre. Le

document de projet proposé par

F U N E S C O est plus explicite à ce sujet.

D ' u n e part, il insiste sur la formation de

personnels susceptibles d'avoir un effet

multiplicateur et sur la constitution de

" noyaux de formateurs permanents et

mobiles " d'autre part, il prévoit des

actions de formation orientées vers les

bénéficiaires finaux dont la prise en charge

serait confiée au personnel ayant bénéficié

de stages à l'étranger.

Lors de la mission effectuée à

Québec en décembre 1993 par deux

responsables marocains, les premiers

éléments d'une stratégie de dissémination

dite " en cascade " ont été définis et

certaines dispositions concrètes ont été

prises dans ce sens en ce qui concerne la

formation du personnel amené à prendre

une part active dans cette stratégie ainsi

que la réalisation d'un matériel de

référence.

E n ce qui concerne la préparation

du personnel, il s'agissait d'une part

d'organiser à l ' U L des stages de longue

durée ( 7 x 1 année) et de courte durée (16

x 10 semaines et 7 x 3 semaines) et d'autre

part, de prévoir l'organisation de

séminaires locaux dont la prise en charge

serait confiée pour l'essentiel aux

personnes ayant bénéficié des stages dont

il est question ci-avant.

A l'occasion d'un rapport préparé

par l ' U L et approuvé par le Ministère de

l'Education nationale en date du 8 février

1994, les besoins de formation à prendre en

charge au niveau local dans le cadre du

projet ont été quantifiés.

Il s'agissait, dans le cadre de

séminaires de 2 semaines comportant 16

sessions, de former un total de 372

personnes dont 236 inspecteurs et 136

10

formateurs issus des centre de formation d'instituteurs (CFI). Enfin, en bout de la chaîne définie par cette stratégie en cascade, il conviendra de toucher les 1800 inspecteurs et les 300 directeurs dont dispose le Ministère de l'Education.

E n ce qui concerne le matériel de soutien à cette stratégie de dissémination en cascade, seule la production de fascicules était initialement prévue. Par la suite, lors de la mission à Québec d'août 1994, la nécessité de disposer d'un matériel complémentaire est apparue. Ainsi, il a été convenu de développer des guides pratiques dans les domaines de l'évaluation formative, des classes à niveaux multiples et de la direction des établissements scolaires.

L a réalisation de ces guides a été confiée au personnel ayant bénéficié d 'un stage à l ' U L dans les trois domaines concernés par ces guides. A ces personnes sont venues s'ajouter un certain nombre de ressources formées dans le cadre d'autres projets. Cet apport en personnel formé en dehors du projet a été particulièrement important pour la composante 5 (formation des directeurs d'établissement) ainsi que pour la composante 4 (classes à niveaux multiples). L'ensemble de ces personnes (au total 22) constituent ce qu'il a été convenu d'appeler "le groupe stratégique ".

C e groupe va par la suite se structurer autour d 'un " noyau dur " de 11 personnes pour répondre aux exigences d'une réorientation fondamentale de la phase de dissémination du projet. C'est ainsi que sous l'impulsion d'une consultante internationale dont l'intervention avait été suggérée par l ' U L , il a été décidé par les autorités nationales de mettre en place les moyens et les structures favorisant une implication plus

grande des bénéficiaires dans leur processus de formation à travers une approche de type "auto-formation assistée ".

Dans le cadre de cette approche d'auto-formation assistée, le groupe stratégique (dans sa forme restreinte à 11 personnes) va jouer un rôle déterminant. E n effet, il prendra en charge le développement des outils permettant de supporter ce processus d'auto-formation mais il aura aussi la lourde responsabilité de convaincre les inspecteurs et les responsables des délégations locales du bien-fondé des actions entreprises tant en ce qui concerne les contenus véhiculés que la stratégie mise en oeuvre.

C o m m e en ont témoigné les inspecteurs et les responsables pédagogiques présents aux séminaires organisés à Fès, un certain nombre de points sensibles doivent d'abord être pris en compte pour asseoir la démarche sur des bases solides. Il s'agit en particulier de structurer le cadre institutionnel et administratif dans lequel les actions prendront place de manière à répondre à la fois à des demandes ponctuelles relatives à la prise en charge de certains coûts et de certains compléments de rémunération mais aussi d'inscrire ces actions dans un contexte plus large d'amélioration continue du niveau de compétence du personnel.

C o m m e l'a souligné Monsieur Benmokhtar, Ministre de l'Education nationale, à l'occasion de l'entrevue qu'il nous a fait l'honneur de nous accorder, il s'agit par cette action reposant sur l'auto-formation assistée et par d'autres actions menées conjointement de fonder les bases d'une structure permanente susceptible de créer les conditions d'une formation continue pour l'ensemble du personnel du

11

Ministère de l'Education nationale.

Pour que l'opération de

dissémination prévue dans le projet puisse

produire les bénéfices escomptés, il nous

paraît utile de prendre en compte un certain

nombre d'éléments lors de

1'implementation de sa phase

opérationnelle.

1. L'auto-formation pour qu'elle

puisse trouver sa pleine efficacité doit

reposer sur une dynamique, une volonté,

une motivation qui viennent des

bénéficiaires eux-mêmes . Pour créer ces

conditions, il convient de s'assurer que les

bénéficiaires puissent identifier clairement

ce que leur engagement dans ce processus

pourra leur apporter non seulement en

améliorant leur sentiment de maîtrise

professionnelle mais aussi par référence

aux éléments qui détermineront leur

progression dans la carrière enseignante. A

ce niveau, il nous paraît particulièrement

utile de lier les actions entreprises au

système de promotion mis en place par le

Ministère de manière à ce que l'effort

réalisé s'inscrive dans un plan global de

carrière.

2 . O n sait aujourd'hui combien

l'encadrement joue un rôle déterminant en

matière d'auto-formation. Pour cette

raison, il conviendra d'être attentif à

assurer, tout au long de la chaîne de

dissémination, un encadrement de qualité

qui soit adapté aux spécificités des

personnes à former. Pour cela, il est utile

de prévoir une formation spécifique du

personnel chargé de cet encadrement en

particulier les inspecteurs de manière non

seulement à leur donner des bases solides

par rapport aux contenus traités mais aussi

à les préparer au rôle de tuteur qu'ils seront

amenés à prendre en charge.

3. La manière dont les actions auprès

des bénéficiaires finaux que sont les

directeurs et les inspecteurs seront mises en

oeuvre doit prioritairement tenir compte

des particularités locales dont l'étude sur

les déterminants des acquisitions scolaires

(composante 7) a montré toute

l'importance. E n particulier, ces auteurs

insistent sur les différences d'efficacité

pédagogique qui existent entre les

enseignants et qui dépassent très largement

en importance l'ensemble des autres

facteurs dans l'explication des progressions

des élèves. Compte tenu de ces données, il

convient d'être particulièrement attentif à

ajuster la stratégie d'auto-formation au

niveau réel des enseignants et d'envisager

certaines formes d'individualisation des

actions. Dans cette perspectives, trois types

de dispositions complémentaires nous

paraissent utiles à envisager:

- Veiller à ce que le matériel d'auto-

formation soit conforme au niveau réel des

enseignants en étant particulièrement

attentif à l'existence de larges diversités

locales.

- Adapter le tutorat aux diversités

locales tant en ce qui concerne

l'organisation des séances de regroupement

que l'aide particulière dont devraient

bénéficier certains enseignants compte tenu

de leur niveau de formation initiale.

- Prévoir des modalités spécifiques

pour certains enseignants qui, en raison de

leur niveau de formation, de leur isolement,

des conditions matérielles dans lesquelles

ils sont amenés à exercer, éprouveraient

davantage de difficultés pour satisfaire aux

exigences des formations prévues.

12

2.4 Analyse des produits

pédagogiques

La stratégie de réalisation définie

en c o m m u n par les autorités marocaines et

l ' U L prévoyait, pour chacune des

composantes, la conception de deux types

de produits. D ' u n e part, des fascicules dont

l'objectif essentiel est de servir de

" mémoire collective " ou encore de

réfèrent pour toutes les personnes

impliquées, à quelque niveau que ce soit,

dans le processus de développement des

capacités nationales et d'autre part, des

documents constituant un matériel

d'intervention susceptible de servir de

support aux actions de formation mises sur

pied à l'occasion de la phase de

dissémination.

La réalisation des fascicules (16 au

total) a été confiée à l 'UL sous le contrôle

des autorités marocaines. Chacun des

fascicules a d'abord été produit en français

ensuite validé par les responsables

marocains avant de faire l'objet d'une

traduction en arabe à l'occasion de laquelle

des efforts importants ont été réalisés pour

prendre en compte certaines spécificités de

la réalité marocaine. Ainsi, l'adaptation à

laquelle il a été procédé lors de la phase de

validation a notamment porté sur

l'introduction de situations directement

empruntées à la réalité scolaire marocaine,

le souci d'introduire des exemples relevant

des différentes disciplines de

l'enseignement fondamental, la

normalisation du choix des termes utilisés

pour désigner certains concepts techniques

relevant du domaine de l'évaluation. Par

rapport à ce dernier aspect, la recherche de

la plus grande systématisation a conduit à

définir un glossaire comportant plusieurs

dizaines de termes fréquemment utilisés

dans les différents fascicules. L'intérêt de

ce glossaire est double : fournir au lecteur

une base lui permettant de disposer d'une

définition claire et précise des principaux

concepts utilisés mais aussi servir de

référence lors de la traduction des

fascicules en langue arabe.

Les fascicules tels que nous avons

été amenés à les examiner dans leur version

française témoignent du haut niveau

scientifique des auteurs et du sérieux qui a

été apporté par l ' U L à leur réalisation. Le

principal regret que nous ayons à exprimer

à propos de ces fascicules tient à leur

manque de lien avec la réalité marocaine.

Soulignons toutefois que cette lacune a été,

au moins partiellement, comblée lors de

leur traduction par un personnel

soigneusement choisi pour sa compétence

linguistique mais aussi pour sa

connaissance des domaines pédagogiques

concernés. U n autre aspect susceptible

d'amélioration concerne la présence

d'exercices au sein des fascicules. Parmi

les fascicules que nous avons eu l'occasion

d'examiner, seul le fascicule intitulé

" L'approche instrumentée de l'évaluation

formative des apprentissages " disposait

d'exercices et de corrigés, ce qui, selon

nous, constitue une limitation fort

préjudiciable et cela d'autant plus qu'aucun

complément n 'a été réalisé, à ce niveau,

lors de l'adaptation des fascicules en arabe.

E n réaction à certaines remarques

qui leur ont été adressées à ce propos, les

auteurs se justifient par le fait qu'il ne

s'agit pas de documents pédagogiques

conçus pour " assurer une formation à

d'autres niveaux de la chaîne...mais plutôt

d'une mémoire de la formation donnée " (

Rapport de mission à Rabat, mai-juin 1995,

J. Plante et al). Tout en acceptant cette

distinction qui nous paraît fort pertinente,

nous estimons que l'effort consacré au

développement de ces outils paraît

disproportionné, par rapport à l'économie

13

globale du projet, si on limite leur

prétention à un rôle de documents de

référence qui, compte tenu de leur haut

niveau de technicité, risquent d'être peu

accessibles en dehors du personnel ayant

bénéficié d'une formation dans les

différents domaines considérés.

E n ce qui concerne le matériel

d'intervention, celui-ci est constitué d'une

part, de documents mis au point par l 'UL et

d'autre part, par des documents produits

par des équipes locales composées pour

l'essentiel de personnes formées dans le

cadre du projet.

Pour ce qui est du matériel produit

par l 'UL, leur qualité assez inégale a limité

leur impact sur le projet. E n effet, les

personnes que nous avons interrogées à ce

propos nous ont déclaré que seul le

document intitulé " Ateliers de formation

pratique en évaluation formative " avait

réellement été utilisé et encore c o m m e

matériel de base pour l'élaboration des

documents d'auto-formation dont il sera

question ci-après.

Le personnel local a pour sa part

réalisé trois guides d'intervention dont

nous avons eu l'occasion d'examiner des

formes non finalisées. Ces guides

concernent respectivement l'évaluation des

apprentissages, les classes à niveaux

multiples et la formation des directeurs

d'établissements. Compte tenu de la

réorientation qui a été donnée au projet en

ce qui concerne les aspects liés à la

dissémination, ce matériel doit avant tout

être considéré c o m m e des documents de

travail servant d'assise à la conception des

outils d'auto-formation.

L a décision de développer des

manuels d'auto-formation a été prise en

octobre 1996 c'est-à-dire environ 6 mois

avant la date de fin prévue pour le projet.

Trois manuels sont actuellement en cours

de finalisation. D e u x de ceux-ci sont

disponibles à la fois en français et en arabe.

Ils concernent respectivement l'évaluation

des apprentissages et les classes à niveaux

multiples. U n manuel relatif à la direction

des établissements scolaires n'est

disponible qu'en langue arabe.

A l'occasion de notre mission nous

avons eu l'opportunité d'examiner les deux

manuels disponibles en français.

A u m o m e n t de la mission, ces

documents n'étaient disponibles que sous

une forme provisoire mais néanmoins

suffisamment avancée pour se faire une

idée de la qualité du produit final qui

devrait être mis à la disposition des

inspecteurs, directeurs et enseignants de

l'ensemble du pays en juin 1997 (un tirage

de l'ordre de 100.000 exemplaires est

prévu pour le document destiné aux

enseignants).

La structure globale des manuels

est conforme à ce que l'on peut

légitimement attendre d'un document ayant

des prétentions d'auto-formation.

Ainsi, chacun des deux manuels

examinés comporte une structure identique:

une présentation générale des

principes de l'auto-formation;

• une justification de l'intérêt du

contenu susceptible d'agir sur la

motivation des apprenants;

• la description des objectifs et des

contenus de la formation;

une présentation des principes

régissant l'apprentissage par auto-

14

formation;

la description des aspects

organisationnels;

• la présentation de chacune des

activités d'apprentissage proposées (9 pour

le manuel consacré à l'évaluation des

apprentissages et 8 pour les classes à

niveaux multiples);

des exercices d'application et de

transfert ainsi que des auto-tests

accompagnés de leur corrigé;

une série de textes empruntés aux

fascicules préparés par l ' U L .

D ' u n e manière générale,

l'organisation de ces manuels est bien

adaptée au but poursuivi qui est de

permettre une appropriation progressive

des trois domaines de compétences

concernés par la formation sous la

supervision de tuteurs issus du cadre de

l'inspection. L'auto-formation telle qu'elle

est proposée par ces manuels fait en effet

une large part au tutorat par un personnel

d'encadrement qualifié ainsi qu 'au soutien

apporté par les pairs c o m m e composantes

essentielles d'une auto-formation assistée.

Cette démarche tout en étant parfaitement

conforme à l'état actuel des connaissances

en matière d'auto-formation comporte, si

on veut qu'elle trouve sa pleine efficacité,

un certain nombre d'exigences dont il

convient de ne pas négliger l'importance en

particulier dans le contexte éducatif

marocain.

Ainsi, la supervision efficace par le

personnel d'inspection exige de leur part

une double compétence : au niveau des

contenus concernés mais aussi au niveau

des techniques permettant d'assurer un

tutorat qui soit adapté aux exigences du

dispositif d'auto-formation et aux

particularités du milieu. Si on ajoute à cela

les difficultés logistiques et

institutionnelles auxquelles on peut

s'attendre, on perçoit facilement le soin

qu'il conviendra d'apporter à la

planification de l'ensemble du dispositif

d'auto-formation dont les manuels ne

constituent que l'une des composantes.

N o u s terminerons cette analyse des

produits mis à disposition dans le cadre de

ce projet en évoquant un certain nombre de

dispositions susceptibles de conduire à une

adéquation plus complète du matériel

pédagogique réalisé aux conditions réelles

de son utilisation.

Pour se donner toutes les chances

d'en arriver à une adéquation optimale du

matériel à ses conditions d'usage, il

convient :

• d'assurer un suivi continu, par un

groupe de spécialistes nationaux et/ou

d'experts internationaux indépendants, du

processus d'élaboration des produits et

prévoir des mécanismes de rétroaction

efficace vers les concepteurs ;

de budgétiser et d'intégrer dans la

planification temporelle de la phase de

dissémination des mises à l'essai auprès

d'échantillons significatifs d'utilisateurs

finaux ;

• de cerner avec un m a x i m u m de

précision le profil des utilisateurs finaux en

évitant de se contenter d'une image

moyenne de ceux-ci et en s'efforçant de

prendre en compte toutes les diversités

locales susceptibles d'avoir un effet sur les

actions de formation prévues (niveau de

formation initial et actuel, ouverture à

l'innovation et à l'amélioration des

pratiques professionnelles, motivation pour

15

l'auto-formation, contexte professionnel

actuel, accessibilité des lieux de

regroupement,...).

2.5 Appréciation de la pérennité des

effets du projet

Dans ce paragraphe, nous tenterons

de mettre en évidence d'une part, les

éléments identifiés dans la situation qui

nous paraissent favorables à la persistance

et à l'extension des effets attendus du

projet et d'autre part, de suggérer certaines

mesures susceptibles de renforcer ses

effets.

L'adoption d 'un style de gestion

souple, basé sur la négociation entre des

partenaires qui n'ont pas changé durant

toute la période d'exécution du projet, a

permis un ajustement permanent des

actions mises en œuvre. Cette manière de

faire, bien qu'elle ne soit pas conforme aux

pratiques habituelles en matière de

planification de projets, paraît ici

susceptible de favoriser, à terme, une

intégration efficace des éléments novateurs

introduits par le projet au sein du système

éducatif.

A notre sens, la permanence des

partenaires tant au niveau des autorités

marocaines que du prestataire de services

(l'UL) et de l ' U N E S C O a été déterminante

dans la cohérence qui se dégage in fine du

projet. E n particulier, celle-ci a permis

d'unifier les actions entreprises tant au

niveau de la formation que des produits

réalisés autour d 'un cadre conceptuel

c o m m u n largement inspiré par les travaux

réalisés par l 'UL et en particulier par le

département " Mesure et évaluation " de la

Faculté des sciences de l'éducation.

Les bénéfices de cette cohérence

sont très perceptibles au sein du groupe

stratégique dont une majorité des m e m b r e s

ont séjourné à l ' U L et qui disposent ainsi

d'une base de connaissances c o m m u n e qui

leur permet de faire face efficacement aux

tâches qui leur sont dévolues.

Le choix de limiter les bénéficiaires

des formations à l'étranger en privilégiant

des formations approfondies plutôt que de

courtes visites dont on sait qu'elles sont,

malgré l'attrait qu'elles peuvent présenter,

souvent beaucoup moins productives, nous

paraît particulièrement judicieux. E n effet,

cette organisation a permis la constitution

d 'un groupe stratégique solide qui a eu

l'occasion de démontrer ses capacités à

travers la production, dans des délais

particulièrement courts, de trois manuels

d'auto-formation.

Il nous paraît toutefois important

que les capacités du groupe stratégique

puissent être rapidement étendues pour lui

permettre de faire face aux tâches qui

l'attendent. E n particulier, l'effort de

formation à l'étranger consenti dans le

cadre de ce projet, nous paraît avoir été

largement sous-exploité dans la

constitution du groupe stratégique. E n

effet, guère plus de 2 0 % des personnes

ayant bénéficié d'une formation dans le

cadre de ce projet se retrouvent en tant que

membres actifs de ce groupe du moins tel

qu'il s'est structuré à l'occasion de la phase

de dissémination. L a mise en œuvre de

cette phase gagnerait certainement en

crédibilité et en efficacité par le renfort que

pourrait lui apporter le personnel formé à

l ' U L dans le cadre de stages de longue et

de courte durée.

Si l'on veut que le groupe

stratégique constitue réellement le fer de

lance du projet auprès du personnel de

terrain, il nous paraît important d'asseoir sa

légitimité par un mandat clair précisant la

16

portée et les limites de sa mission. Cette

légitimité pourra être trouvée dans les

compétences pédagogiques acquises par les

personnes mais devrait, nous semble-t-il,

également faire l'objet d'une

reconnaissance officielle par les autorités

nationales.

Il nous paraît également important,

si l'on veut se donner toutes les chances

d'observer les effets attendus sur le terrain,

d'assurer au groupe stratégique et ensuite

au personnel d'inspection (chargé de

l'encadrement de l'auto-formation) des

conditions matérielles de fonctionnement

satisfaisantes sans quoi la bonne volonté

manifestée jusqu'à présent risque

rapidement de s'essouffler.

L'idée d'intégrer la formation

continue du personnel enseignant c o m m e

composante permanente du système, qui a

été évoquée par plusieurs hauts

responsables nationaux, est de très bon

augure quant à l'avenir du projet.

Toutefois, sa mise en oeuvre ne sera

effective que si on ménage à cette

composante une place adéquate au sein du

système éducatif. Il s'agit à la fois de lui

donner l'indépendance qui lui permettra

d'être généralisée à toutes les catégories de

personnel mais aussi de préserver certaines

formes d'intégration par rapport aux

directions actuelles pour lui permettre de

synchroniser ses actions avec les objectifs

particuliers de chacune de ces directions.

E n toute rigueur, dans l'état actuel

de sa réalisation, on ne peut faire que des

hypothèses par rapport à ce que le projet

pourra apporter aux bénéficiaires finaux

(les enseignants et les directeurs

d'établissements) tels qu'ils ont été définis

lors de la décision de recourir à l'auto­

formation pour élargir la portée initiale du

projet. E n effet, au m o m e n t de la mission

d'évaluation, la mise en œuvre sur le

terrain de la phase de dissémination venait

juste d'être entamée. Par contre, la stratégie

et les outils de cette dissémination étaient

en cours de finalisation. Compte tenu de

cette situation, il ne nous a pas été possible

d'apprécier directement dans quelle mesure

le projet atteindra le personnel de terrain et

aura un effet d'ensemble sur le système

éducatif. Toutefois, les éléments que nous

avons examinés en particulier les manuels

d'auto-formation ainsi que la réaction du

personnel appelé à constituer les premiers

relais de la chaîne d'auto-formation mise

en place, nous portent à être optimistes

quant aux capacités du projet à améliorer

les capacités nationales dans les principaux

domaines concernés à savoir l'évaluation

formative, les classes à niveaux multiples

et les directions d'établissements.

Nous tenons à souligner que les

actions entreprises auprès des enseignants

dans le cadre de la composante 2

constituent un ajout majeur au projet tel

qu'il avait été défini dans les termes de

référence établis par les autorités

marocaines et la Banque Mondiale. Cet

ajout nous paraît cohérent avec le choix de

privilégier l'évaluation formative par

rapport à l'évaluation de l'efficacité interne

du système en ce sens que c'est au niveau

des pratiques enseignantes que l'évaluation

formative devrait être intégrée et non pas,

c o m m e c'est le cas pour l'évaluation de

l'efficacité du système, au niveau d'une

cellule spécialisée dans l'évaluation.

E n ce qui concerne les composantes

4 et 5, le souci de toucher les enseignants

(composante 4) et les directeurs

(composante 5) est conforme aux termes de

références qui mentionnent explicitement

la formation et le perfectionnement d'une

part, des instituteurs/trices responsables de

classes à niveaux multiples et d'autre part,

17

des directeurs d'écoles à leurs nouvelles

responsabilités

Toutefois, pour que la

dissémination trouve sa pleine efficacité, il

nous paraît opportun d'insister pour qu 'un

certain nombre d'éléments déjà évoqués ci-

avant (Section 2.3) soient pris en

considération : favoriser le développement

d'une véritable culture de l'auto-formation

au sein du personnel du Ministère de

l'Education, assurer aux inspecteurs une

préparation efficace au rôle de tuteur qu'ils

sont appelés à jouer dans la stratégie

d'auto-formation mise en œuvre et veiller

à ce que les outils d'auto-formation utilisés

soient adaptés, tant au niveau de leur

contenu que de leur forme, au public

amené à les utiliser.

18

3 Le développement des

capacités en planification de l'éducation

Dans la conception initiale du

projet, le renforcement des capacités de

planification était prévue dans la

composante 7, pour un montant total de

829.724 dollars. Après les laborieuses

négociations qui sont ensuite intervenues

entre le Ministère des Finances et le

Ministère de l'Education, le budget de cette

composante a été ramené à 572.224 dollars.

D e plus, la composante 6, qui prévoyait la

réalisation d 'un certain nombre d'études,

pour un budget total de 496.392 dollars, a

été entièrement supprimée. E n

conséquence, le budget global de ces deux

composantes, initialement estimé à

1.326.116 dollars, a été réduit à 572.224

dollars, soit environ 40% de l'estimation

initiale. Or il se trouve que l'exécution de

ces deux composantes 6 et 7 revenait

naturellement à la m ê m e direction, en

charge de la planification et des études, et

que les responsables de cette direction ont

décidé, non sans panache, de réaliser autant

que possible le programme initialement

prévu avec une enveloppe réduite de 60%.

Si l'on examine d'abord la

composante visant au renforcement des

capacités de planification, il convient en

premier lieu de souligner que son

démarrage a été particulièrement lent et

difficile. Il y a seulement un an, lorsque la

Banque Mondiale a fait sa propre

évaluation, on aurait pu encore douter du

succès de cette composante en raison du

modeste état d'avancement qui la

caractérisait. A u cours des douze derniers

mois, l'exécution a connu un processus

d'accélération remarquable, et l'on peut

avancer aujourd'hui que l'impulsion qui a

été donnée garantit à m o y e n terme le

succès final de cette activité, dont le

déroulement ne pourrait plus être

compromis que par une décision externe

d'interruption.

Le renforcement des capacités de la

direction chargée de la planification se

limitait, selon les termes de référence

originels, à la question de l'informatisation

des données et à leur utilisation pour

simplifier l'élaboration de la carte scolaire.

A u cours de la réalisation de la

composante, les responsables de la

Direction ont exprimé le souhait d'y

ajouter un volet de formation des cadres de

la planification à l'analyse des données et

à la conduite d'études s'appuyant sur des

enquêtes, tant au niveau central qu'au

niveau des délégations. N o u s examinerons

ce deuxième volet à la suite du volet

informatisation.

3.1 L'informatisation des données et

des outils d'analyse

C o m m e il a été dit plus haut, cette

sous-composante a connu des débuts

laborieux. Sa spécification institutionnelle

a changé à trois reprises, et quatre

responsables se sont succédés en trois ans.

C e n'est qu'avec la création d'une cellule

informatique ad hoc, aujourd'hui pilotée

par l'un des quatre membres du secrétariat

technique de la direction de la

planification, que le processus de mise en

oeuvre de l'informatisation des données

requises pour la planification du système et

l'actualisation annuelle de la carte scolaire

a pu être effectivement et correctement

enclenché.

Rappelons que les objectifs de cette

19

activité visaient à rationaliser la gestion du

système d'information, à étendre la g a m m e

de services que l'on peut en attendre, à

éviter les doubles emplois avec les

initiatives analogues dans d'autres entités

du ministère, à améliorer la productivité

des agents de la planification, notamment

au niveau des délégations, en leur offrant

l'opportunité de conduire des études

spécifiques, et enfin de limiter à une fois

par an la collecte des données de base au

niveau des écoles pour satisfaire

l'ensemble des besoins du ministère et des

délégations provinciales ou préfectorales.

La première phase de cette

composante a porté sur l'identification des

tâches de la direction de la planification qui

justifiaient un processus d'informatisation,

sur la conception d'ensemble du nouveau

système d'information, sur la

programmation des activités à mettre en

oeuvre, et sur les besoins de formation du

personnel. Cette phase, qui s'est déroulée

du mois d'août 1993 au mois de février

1995, a suscité plusieurs débats de fond.

Le premier concerne l'insertion du

nouveau système par rapport à l'existant,

c'est-à-dire (i) la collecte traditionnelle des

données nécessaires au fonctionnement du

système, notamment pour l'établissement

de la carte scolaire et l'estimation des

besoins en capacité d'accueil et

d'encadrement pour la rentrée suivante, (ii)

la gestion du personnel, en termes de

mobilité, de promotion et de rémunération,

(iii) la gestion du baccalauréat, dont

l'organisation en six partiels se déroulant

tout au long de la scolarité secondaire

suppose un suivi rigoureux de la part des

autorités compétentes. Ces différentes

activités relèvent pour deux d'entre elles de

directions autres que celles de la

planification, et pour la troisième, font

partie des missions de routine de la

direction, sans pouvoir être interrompues

pendant le processus d'élaboration du

nouveau système. C e contexte engendre un

double défi: obtenir la coopération des

autres sous-systèmes informatiques

développés à l'intérieur du ministère, ce

qui n'est pas acquis d'avance dans la

mesure où l'exercice constitue une menace

potentielle pour l'avenir de leurs

prérogatives présentes, et harmoniser les

nomenclatures pour rendre le système

d'information cohérent d'une direction à

l'autre, ou d 'un service à l'autre. O n peut

sans doute dire ici que la compréhension

réciproque qui est nécessaire pour assurer

le succès de l'opération n 'a pas toujours été

au rendez-vous.

Le second débat de fond a concerné

le contenu m ê m e de la base de données sur

un point précis mais capital: doit-on

introduire dans le système des données

nominatives sur les élèves, avec suivi

potentiel de leur cursus individuel, ou doit-

on se limiter à des données d'effectifs au

niveau de la grappe la plus élémentaire, à

savoir les effectifs de la classe Y de l'école

X ? C e débat n'est pas mineur dans la

mesure où l'enregistrement individuel des

élèves multiplie par quatre (environ) le

temps de saisie des données, ainsi que les

besoins en capacité de stockage de

l'information, et dans la mesure où ce

surcoût puisse être évalué à l'aune des

services supplémentaires que l'on peut en

attendre. Par exemple, le suivi individuel

des élèves peut permettre de procéder à des

études nouvelles sur les déterminants de

l'efficacité du système, mais est-ce plus

"coût-efficace" qu'une approche sur

échantillon ? Notre évaluation n 'a pas

permis de répondre à cette délicate

question, car cela suppose des

investigations plus approfondies que celles

permises dans le temps imparti, mais nous

avons pu constater qu'un débat de qualité

20

s'était instauré entre les différents spécialistes impliqués dans cette réflexion, débat qui a donné lieu à un arbitrage final, par les responsables marocains, en faveur de la solution la plus ambitieuse, c'est-à-dire la collecte et la saisie des données individuelles sur les élèves.

Les grandes options du futur système d'information étant décidées, à partir de mars 1995, le travail de la cellule informatique aborde le vif du sujet, c'est-à-dire le développement de l'architecture m ê m e du nouveau système informatique. Les personnels sont formés à la programmation. D e u x consultants nationaux sont engagés sur une base temporaire pour les assister dans cette tâche au niveau quotidien, tandis que l'assistance technique, confiée au service d'information de l'Université du Québec, qui a formé les analystes de la cellule, pilote et valide à intervalles réguliers l'avancement des travaux.

E n mai 1996, les questionnaires destinés à collecter les informations élémentaires qui seront ultérieurement saisies sont testés auprès de la délégation de Temara, qui procède à une expérimentation pilote auprès d 'un certain nombre d'établissements relevant de sa juridiction. Ces questionnaires sont ensuite corrigés en fonction des leçons de l'expérimentation. A partir de septembre 1996, les questionnaires définitifs sont adressés à sept délégations qui deviennent à leur tour "pilotes" pour la saisie informatique des données dans quatre modules: les établissements, les élèves, les locaux et le personnel. Deux séminaires, l'un à Tanger pour les délégations pilotes du Nord et l'autre à Marrakech pour les délégations pilotes du Sud, sont successivement organisés en novembre et décembre 1996 pour la dissémination du

logiciel de saisie.

E n avril 1997, quatre des sept délégations pilotes sont invitées à participer à un nouveau séminaire, à Fès, séminaire auquel l'évaluateur externe a eu l'opportunité d'assister. Il s'agissait de tirer les leçons de l'expérimentation sur le terrain des logiciels mis au point par la cellule informatique, le logiciel de saisie lui m ê m e et le logiciel destiné à la génération automatique de la carte scolaire. L e passage de sept délégations pilotes à quatre s'explique apparemment par le retard pris par les trois autres pour avancer dans l'expérimentation des logiciels. E n effet, les délégations n'ont pas reçu d'équipement informatique spécifique pour ce projet, et bien que toutes disposent d 'un équipement minimal, les concurrences entre utilisateurs n'ont pas toujours permis un accès aisé aux ordinateurs existants pour procéder à la saisie de ces nouvelles données. Il faut souligner ici que le processus de saisie est fort long: long parce que c'est la première fois que cette base est constituée (les prochaines saisies se limiteront à l'enregistrement des changements), et long en raison de la constitution d 'un fichier élèves, c o m m e il a été précisé ci-dessus. Par ailleurs, il n'est pas possible de repousser à plus tard la saisie des élèves, car la comptabilisation par classe, école, etc, se fait par l'addition des données élémentaires relatives aux élèves.

Les réactions des représentants des délégations ont été très encourageantes pour l'avenir du projet. Les objectifs du nouveau système sont compris et approuvés. Les remarques et suggestions apportées reflètent une volonté de participer et une motivation pour assurer le succès de l'entreprise. Le fait qu'une délégation rurale du Sud, où le système

21

éducatif est encore peu développé, ait été un participant actif et producteur de remarques pertinentes laisse penser que la généralisation du système à l'ensemble des 64 délégations est une tâche qui est à la portée du Ministère. Enfin, l'équipe de la cellule informatique a démontré qu'elle maîtrisait son sujet par les réponses qui ont été apportées aux délégations.

Le programme de généralisation qui est envisagé à présent semble réaliste. L a première année devrait permettre la constitution d'une base de données complète pour les quatre délégations présentes à Fès. L a seconde année devrait étendre ce résultat à onze nouvelles délégations faisant partie des treize qui sont couvertes par le projet B A J , projet multisectoriel de la Banque Mondiale destiné à poursuivre, entre autres objectifs, le renforcement de l'enseignement de base au Maroc (les deux autres délégations font déjà partie du premier groupe de quatre). Enfin, la troisième année devrait voir la généralisation du système à l'ensemble des 64 délégations. E n l'an 2000, le système éducatif marocain pourra fonctionner sur la base du nouveau système d'information.

Bien que cela ne fût pas explicitement convenu dans les termes de référence initiaux, qui rappelons-le, limitaient l'ensemble du projet à la fourniture d'assistance technique, la réalisation de la sous-composante d'informatisation s'est heurtée à un problème d'équipement informatique. E n ce qui concerne l'équipement de la cellule, le projet a pu y pourvoir de façon très satisfaisante grâce à des réallocations budgétaires. L a couverture des besoins dans l'avenir est cependant loin d'être assurée, notamment au niveau des 64 délégations, et il est important que cet aspect du programme soit intégré dans les

projets futurs.

Il aura ainsi fallu six ans (1993-1999) pour réaliser l'objectif d'informatisation des données au sein de la direction de la planification. L'exercice aurait sans doute pu être réalisé sur une période plus courte, mais il faut souligner que l'essentiel du retard a été accumulé lors de la phase de démarrage. Le processus de mise en oeuvre s'est par la suite nettement amélioré, sans éviter toutefois certains dysfonctionnements. O n peut déplorer en effet qu'après deux ans d'attente, la cellule informatique ne dispose toujours pas d 'un téléphone pour communiquer avec les délégations ou les autres entités du Ministère. O n peut aussi regretter que la formation des personnels de la cellule au système Informix ait connu un retard de près de neuf mois, ce qui a contraint ses membres à réaliser ex ante un certain nombre d'activités de programmation qui auraient été facilitées par le système Informix.

Parmi les activités non encore réalisées mais essentielles au succès final du projet, il faut citer la réalisation des logiciels d'exploitation des données au niveau central, afin de consolider les données de l'ensemble des délégations, la mise en réseau du nouveau système avec les autres services intéressés du ministère, les protocoles d'exploitation et d'analyse des données. U n e assistance technique minimale, à la fois locale et extérieure, doit rester mobilisée afin de suivre et de valider les différentes étapes restant à parcourir.

3.2 L a formation des planificateurs à l'analyse des données.

E n termes financiers, il s'agit d'une sous-composante beaucoup plus modeste que la précédente, qui n'avait pas été

22

prévue de façon explicite dans les termes

de référence initiaux, et dont la nécessité

est apparue spontanément lorsque

l'assistance technique extérieure s'est

lancée dans la réalisation d'études en

partenariat avec les techniciens locaux. C e

besoin a conduit les responsables du projet

à opter pour une approche pédagogique

économe en frais de formateurs, puisqu'on

a retenu un système d'auto-formation. Il

faut peut-être rappeler ici que dans une

première étape, des experts internationaux

ont produit un solide document de synthèse

sur les méthodes statistiques qui sont

aujourd'hui utilisées dans le m o n d e de

façon routinière, mais il est très vite apparu

que l'assimilation de ce corpus supposait

un détour pédagogique minimal, qui a

conduit à la réécriture du document sous

forme modulaire. L'élaboration de ces

modules d'auto-formation est le fruit

conjoint de l'assistance technique

internationale et de compétences

nationales, ayant mobilisé pour partie les

cadres les plus expérimentés de la direction

de la planification et les services d'un

professeur de l'Université de Rabat.

C o m m e pour la sous-composante

précédente, l'évaluateur externe a eu la

possibilité de participer à un séminaire

destiné à tester la validité pédagogique des

documents d'auto-formation auprès d 'un

groupe de 25 stagiaires de différentes

origines (délégations, inspections, etc), qui

s'est déroulé à Fès en avril 1997.

Le programme comporte quatre

modules, auxquels correspondent quatre

fascicules d'auto-formation, portant

respectivement sur la méthodologie

d'échantillonnage, la collecte des données

sur le terrain, l'analyse des données, et

l'exposé méthodique de la régression

multiple. Les quatre modules se

caractérisent par des degrés de difficulté de

compréhension fort divers, et leur maîtrise

doit en théorie suivre une progression

appropriée. Cette règle n 'a pu être

respectée durant ce séminaire, car il a fallu

tester parallèlement les quatre fascicules,

en raison de contraintes de temps. Cela

explique le degré inégal de compréhension

des modules d 'un groupe à l'autre,

L'évaluation qui a suivi le

séminaire pour tester le degré

d'assimilation des modules a montré que

pour le premier, les résultats ont été bons

(80% de réussite), sensiblement plus

faibles pour le second relatif aux

techniques d'échantillonnage (moins de la

moitié), satisfaisant pour le troisième (60%

de réponses correctes), et enfin très faible

pour le quatrième, dont le niveau s'écartait

significativement des compétences de base

des stagiaires. E n particulier, le niveau de

compétences en mathématiques requis pour

la compréhension de ce module est

relativement élevé, et les stagiaires ont

dans l'ensemble soit oublié leurs

acquisitions scolaires dans ce domaine, soit

ne l'ont jamais atteint. U n observateur a

souligné que l'âge m o y e n des stagiaires

était plus élevé que celui du public cible de

ces modules, et par conséquent, les

acquisitions en mathématiques datant de

leur formation initiale étant plus récente,

leur degré de rétention est

vraisemblablement meilleur. Cette

hypothèse est plausible, mais il n 'en reste

pas moins vrai qu 'un certain travail

d'adaptation pédagogique est nécessaire

dans la réalisation de plusieurs de ces

modules afin qu'ils se conforment aux

normes d'une approche d'auto-formation.

E n théorie, le public cible de cette

formation représente de 300 à 400

personnes affectées dans les services de

planification des délégations ou dans les

services centraux de la planification, et il

est peu probable que l'ensemble de ces

23

personnes s'engagent effectivement dans la

réalisation d'études requérant le niveau de

compétences auxquels ces modules sont

censés les préparer. Si quelques dizaines

parviennent à le faire, on pourra alors

considérer que cette activité aura été un

succès. Pour les autres, le principal mérite

de l'auto-formation sera de leur permettre

non pas de réaliser elles-mêmes ce type

d'études, mais de savoir interpréter

correctement les résultats d'études

comparables réalisées par d'autres, ce qui

est en soi un objectif souhaitable et utile.

3.3 Les études sur l'analyse des

carrières scolaires

O n a rappelé plus haut qu'à

l'origine du projet, une composante

numérotée " 6 " avait prévu la réalisation

d'études, celle-ci fut supprimée lorsque

l'enveloppe globale du projet fut ramenée

de 4 à 2,5 millions de dollars. Fort

heureusement, les responsables de

l'exécution du projet ont su habilement

redéployer le budget pour réintroduire,

sous une sous-composante numérotée

"7 .2" , un volet études qui en a en réalité

comporté deux: l'une sur les déterminants

des acquisitions scolaires au premier cycle

fondamental, l'autre sur la rationalité des

procédures de passage du premier au

deuxième cycle du fondamental. Dans la

mesure où les termes de référence de

l'évaluation externe prévoient de façon

explicite une analyse de la pertinence des

objectifs du projet, nous terminerons cette

section avec quelques considérations sur

l'ordre de priorités qui a été retenu pour ces

études.

3.3.1 Les déterminants des acquisitions

des élèves du premier cycle du

fondamental

L'étude sur les déterminants des

acquisitions est évidemment centrale dans

une perspective d'amélioration des

performances du système éducatif

marocain. Le recours à l'intuition des

politiques ou à l'expérience des

pédagogues a malheureusement montré,

dans un grand nombre de pays, que des

solutions ruineuses et peu efficaces étaient

souvent mises en oeuvre, et que certaines

innovations entraînaient des dépenses

budgétaires considérables pendant de

nombreuses années sans produire les effets

espérés. O n peut citer ici l'obsession de la

réduction de la taille des classes, dont le

rapport coût-efficacité est presque toujours

non significatif. C'est pourquoi la

réalisation d'études rigoureuses sur

l'identification des facteurs d'influence

effectifs constitue un m o y e n précieux

d'orientation des politiques éducatives, et

dans ce contexte, le choix de cette étude est

donc parfaitement justifié.

Ceci étant dit, beaucoup

d'observateurs émettent à propos du

système éducatif marocain un certain

nombre d'opinions négatives, notamment

en ce qui concerne sa qualité. Par exemple,

les responsables universitaires et leurs

professeurs déplorent que le niveau des

bacheliers qui leur arrivent soit trop faible.

Il faut bien comprendre que ce type de

jugement est nécessairement subjectif,

puisqu'il ne repose pas sur une mesure

standardisée des compétences. O n retrouve

les m ê m e s opinions dans un pays c o m m e la

France, où de nombreux pédagogues

affirment de façon péremptoire que le

niveau des élèves baisse, alors que les tests

chronologiques standardisés montrent au

contraire que le niveau monte.

Ces remarques n'impliquent pas

que les jugements émis sur la qualité

médiocre de l'éducation au Maroc sont

faux, mais tout simplement qu'il convient

24

de les fonder sur des mesures fiables. Il

existe pour ce faire une organisation

internationale compétente, l'IEA

(International Association for the

Evaluation of Educational Achievement),

qui coordonne les efforts des pays

intéressés par le sujet pour produire et faire

passer des tests standardisés dans un

certain nombre de disciplines

fondamentales, pour certains âges. Si l'on

souhaite fonder le débat sur la qualité du

système éducatif marocain sur des bases

solides, il conviendrait de s'appuyer sur

l'expérience de l'IEA.

L'étude sur les déterminants des

acquisitions des élèves est un modèle du

genre. Elle intègre la plupart des acquis de

la recherche dans ce domaine au plan

international: mesure des acquisitions en

termes de "valeur ajoutée", prise en compte

de tous les facteurs d'influence identifiés

par les études antérieures, analyse par

groupes de variables, traitements

statistiques recourant aux méthodologies

les plus avancées.

Elle montre que les résultats des

élèves sont meilleurs dans les écoles

complètes que dans les écoles incomplètes,

mais que le recours aux classes multiples

pour élargir la panoplie des cours offerts

dans les contextes de faible effectif n'est

pas très efficace. C e résultat, qui diffère de

ce qui a été souvent observé dans d'autres

pays, justifie a posteriori le bien fondé de

la composante 4 du projet, relative à

l'amélioration de l'enseignement à niveaux

multiples.

Le résultat le plus spectaculaire de

cette étude est la mise en évidence de

l'importance de l'effet maître. Il arrive en

tête de tous les déterminants actifs qui ont

pu être identifiés, et il ouvre la voie à des

réformes de fond dans la gestion du

personnel enseignant. Lorsqu'on interroge

les observateurs familiers de ce milieu, on

entend presqu'immanquablement un

discours sur la "démotivation" des

enseignants. Certes, par rapport à d'autres

carrières, la profession enseignante peut

sembler peu lucrative. Mais on n'est

cependant pas très éloigné des normes

internationales en la matière. Les

enseignants du primaire au Maroc gagnent

environ 2.5 fois le PIB par tête. Rappelons

que ce rapport est inférieur à deux dans les

pays développés, mais qu'il peut varier

beaucoup dans les pays en voie de

développement. L a situation marocaine à

cet égard est loin d'être la meilleure

c o m m e elle est loin d'être la pire.

Par ailleurs, une étude du cabinet

Price Waterhouse a montré qu'il y avait

20.000 à 30.000 enseignants en surnombre

dans l'enseignement fondamental, en

raison des pressions exercées par eux pour

être affectés en ville plutôt qu'à la

campagne. Il est donc clair que les

procédures de recrutement sont

défaillantes, puisqu'elles ne permettent pas

d'identifier les candidats qui souhaiteraient

être affectés en zone rurale. Le processus

de décentralisation qui est en cours devrait

être mis à profit pour modifier ce

regrettable état de fait.

Les projets de l'actuel Ministre de

l'éducation vont du reste dans le sens d'une

amélioration des mécanismes susceptibles

de motiver les enseignants. Il s'agit en

particulier de moduler les niveaux de

rémunération en fonction des résultats

obtenus. Il est vrai que lorsqu'un

enseignant efficace se rend compte que

celui qui fait le m i n i m u m , ou qui ne fait

rien parce qu'il est en surnombre (Cf

supra), gagne autant que lui et a les m ê m e s

perspectives de promotion puisque celle-ci

est accordée principalement à l'ancienneté,

25

les risques d'être gagné par la

"démotivation" s'en trouvent multipliés.

3.3.2 L'accès au second cycle de

l'enseignement fondamental

La deuxième étude vise à

comprendre les mécanismes de passage de

la sixième année d'études (fin du

fondamental 1) à la septième (début du

fondamental 2 ou encore, selon la

classification internationale type de

l'enseignement de l ' U N E S C O , l'entrée

dans le premier cycle du secondaire). Cette

étude est justifiée par le fait que la

disponibilité en places au niveau suivant ne

permet pas d'accueillir tous les élèves,

mais surtout par le fait que cette

disponibilité varie d'une région à l'autre,

d'une ville à l'autre, ou encore entre zones

urbaines et zones rurales, ce qui engendre

des inégalités entre les élèves en fonction

de leur situation géographique. Notre

interrogation sur cette étude n'est pas tant

liée à sa pertinence, que nous comprenons

et acceptons, que dans la hiérarchie

implicite des priorités qu'elle reflète. Si

l'étude montre qu'effectivement, les élèves

marocains sont inégalement traités dans

l'accès au secondaire, deux réponses sont

possibles en termes de politique éducative:

réduire l'accessibilité pour les plus

favorisés, ou l'augmenter pour les plus

défavorisés. Il est évident que la deuxième

réponse est la plus probable, car on

n'imagine pas que le ministère puisse

fermer certains collèges. Cela veut dire que

les décisions qui peuvent résulter de cette

étude, en termes de carte scolaire, risquent

de se traduire par une extension de l'offre

à ce niveau.

Or c'est bien là que le bât blesse:

est-il souhaitable d'accorder une priorité à

l'extension de l'accès au premier cycle du

secondaire dans un pays qui compte 4 3 %

d'adultes analphabètes, où 7 0 % des filles

du milieu rural ne vont pas encore à l'école

primaire, et où un individu sur trois, au

total, entre dans la vie active c o m m e

analphabète? Nous savons que nous

touchons ici un sujet délicat dans le

contexte politique national, mais il nous

semble aussi que l'on ne peut se contenter

de traiter ce problème avec un silence

convenu.

Il se trouve que l'étude, dont il

convient de dire que la méthodologie est

impeccable, a montré précisément qu'à

niveau égal de compétences, les élèves

ruraux avaient plus de chances d'accéder

au collège que les urbains. Si l'on s'en tient

à une vision réduite du concept d'équité, on

peut conclure qu'il faut accroître

l'accessibilité des urbains au collège. O n

peut le faire soit en créant de nouveaux

collèges urbains, ce qui à notre sens serait

peu compatible avec l'ordre de priorités qui

découle des observations faites au

paragraphe précédent, soit en affectant des

élèves urbains dans des collèges ruraux en

sous-effectifs, ce qui est probablement peu

praticable, et peu susceptible

d'enthousiasmer les familles concernées.

3.3.3 Quelques commentaires

additionnels sur les études

Les remarques précédentes nous

ramènent à un problème de fonds de la

planification éducative au Maroc.

L'approche qui prévaut est l'approche qui

a dominé dans le m o n d e jusqu'au milieu

des années 80, une approche fondée sur la

satisfaction de la demande sociale telle

qu'elle s'exprime de façon spontanée. Elle

n'est pas soutenue par des analyses qui

veillent à la cohérence entre les moyens

disponibles et l'équité au sens large, ainsi

qu'à la cohérence entre les sorties du

système éducatif et les besoins de

26

l'économie du pays (ou les besoins de

qualification par rapport aux emplois

disponibles). Cette approche n'est pas

étrangère au fait que selon les statistiques

officielles, près de 4 0 % des diplômés

universitaires sont aujourd'hui au

chômage, et qu 'un diplômé passe en

moyenne quatre années sans emploi, quatre

longues années au terme desquelles on peut

s'interroger sur le processus

d'obsolescence des connaissances qui s'est

nécessairement produit.

L a notion d'"arbitrage" est peu

présente dans le processus de planification.

Les choix qui sont opérés restent

excessivement fondés sur les conceptions

d'autrefois. Ils conduisent à élargir le fossé

qui existe entre une élite urbaine qui a

accédé à des niveaux de vie similaires à

ceux de leurs homologues en Europe ou en

Amérique du Nord, et des ruraux qui

c o m m e le rappelait Rida Lamrini dans un

récent numéro de La Vie Economique,

"vivent encore dans les conditions du

lóeme siècle". Offrir aux ruraux une

éducation primaire est sans doute l'un des

meilleurs investissements possibles pour

les aider à entrer dans la modernité, à

augmenter progressivement leur

productivité, leur niveau de vie et leur état

de santé.

Il s'agit notamment de la constitution d 'un

échantillon, de la préparation de

questionnaires, de leur expérimentation sur

le terrain, de la collecte des données, de

leur saisie informatique, de leur

exploitation avec les instruments de la

statistique descriptive. Il manque encore

quelque savoir-faire autonome dans

l'utilisation des outils économétriques

complexes, dans la capacité à interpréter

les résultats à la lumière des acquis

antérieurs de la recherche dans le domaine

considéré (ces techniciens ne sont pas en

contact quotidien avec la communauté

académique internationale, lisent peu les

travaux publiés en anglais, et ont rarement

la possibilité de publier leurs travaux dans

les revues spécialisées).

A l'occasion de ces études, il était

prévu que les experts internationaux

impliqués devaient transférer le savoir-faire

requis à leurs homologues marocains.

Plusieurs sessions de formation ont eu lieu

soit sur place, soit à l'étranger. U n certain

nombre de techniciens marocains ont suivi

parallèlement des enseignements sur le

m ê m e sujet dans le cadre d 'un D E S S

financé par la Coopération Française. Il est

clair aujourd'hui que pour un certain

nombre d'activités, ces techniciens

nationaux sont parfaitement opérationnels.

27

4 Développement des capacités des services de santé scolaire

Deux composantes, numérotées " 8 "

et "10", visaient à apporter un appui à la

division de la santé scolaire. L a santé

scolaire est assurée par un service de taille

modeste correspondant à une division qui

est rattachée pour ordre à la Direction des

Sports, mais qui entretient des liens plutôt

lâches avec cette direction. L a composante

8 avait pour objectif d'aider la division à

informatiser la gestion des dossiers

d'accidents scolaires (élèves et personnel),

dont elle a la responsabilité. Elle doit traiter

environ 2.000 dossiers de ce type par an, et

les suivre pendant cinq ans pour établir in

fine l'existence ou non d'une incapacité

permanente susceptible de faire l'objet

d'une pension. Par ailleurs, cette

composante visait à renforcer de façon plus

générale les capacités de la division, et

d'introduire dans l'enseignement marocain

des modules d'hygiène, de santé et de

nutrition. Apparemment, ce dernier point a

été abandonné à la suite d 'une initiative

conjointe de l ' U N I C E F et de la D P P C E F

qui l'a repris à son compte et a développé

six fascicules destinés aux six années du

fondamental 1.

L a composante 10 prévoyait de

chercher une solution à un problème qui

semble très répandu parmi les élèves

marocains, à savoir la prévalence de

déficiences oculaires non corrigées (on

parle de 2 0 % d'élèves concernés). Cette

absence de correction est liée au coût élevé

des lunettes au Maroc, proche des coûts

observés dans les pays développés, et hors

de portée d 'un grand nombre de familles à

faible revenu.

Les budgets accordés à ces

composantes étaient modestes,

respectivement 47.500 et 10.000 dollars. Ils

ont été légèrement réalimentés en cours

d'exécution, notamment pour la réalisation

de l'étude relative aux verres correcteurs

(composante 10). Aucune assistance

technique extérieure n'a été mobilisée pour

la réalisation de ces deux composantes.

4.1 Renforcement des capacités de la

division de la santé scolaire et

informatisation du service des

accidents.

Le renforcement des capacités de la

division a pris la forme d'un nombre limité

de voyages d'études à l'étranger dont on ne

peut pas dire qu'il en soit résulté des

initiatives ou des innovations significatives

dans la façon dont est gérée la santé

scolaire. Peut-être convient-il de préciser

ici que le Ministère de la Santé Publique

exerce un rôle beaucoup plus important à

destination des élèves que ne peuvent le

faire les services du Ministère de

l'Education. Les examens médicaux

annuels auxquels sont soumis les élèves

sont réalisés par des médecins relevant du

Ministère de la Santé Publique, et le

service de santé scolaire du Ministère de

l'Education se trouve un peu démuni

devant la force de frappe incomparable que

représente à côté de lui le Ministère de la

Santé. Les attributions des deux entités ne

sont pas clairement définies par les textes

en vigueur, et manifestement, la santé

publique occupe le terrain.

Le seul domaine où la santé

publique semble ne pas vouloir s'immiscer

dans les affaires de la santé scolaire est

celui de la gestion des dossiers

d'indemnisation des victimes d'accident

dans l'enceinte de l'école, accidents qui se

produisent le plus souvent à l'occasion des

29

séances de sport (il est possible que les

consignes de sécurité soient en partie

défaillantes dans ce domaine). Le

processus d'informatisation a fait appel aux

services d 'un bureau d'étude local, qui a

mis au point un logiciel de saisie, l'a

implanté sur un micro-ordinateur d'une

génération déjà ancienne cédé à la division,

et a fait une formation rapide des

personnels concernés pour son utilisation.

Formation sans doute trop rapide, car

depuis son implantation il y a environ deux

ans, le personnel en question n 'a jamais

utilisé cet instrument. C'est pourquoi

récemment, le projet a été relancé avec

deux initiatives: l'acquisition de deux

micro-ordinateurs neufs, la programmation

de 69 heures de formation entre avril et

juillet 1997 au bénéfice de 6 agents de la

division.

4.2 Etude de faisabilité pour

l'implantation d 'un atelier de

fabrication de verres correcteurs

Cette composante a été réduite à

peu de choses, à savoir une étude de

faisabilité concernant la fabrication de

verres correcteurs. Cette étude conclut que

le projet d'atelier élaboré par la Division de

la santé scolaire n'est plus une solution

appropriée en raison d'une double initiative

du Ministère de la Santé Publique. La

première a été l'annonce, il y a environ un

an (l'été 1996), de la création non pas d'un

atelier, mais d'une vingtaine d'ateliers de

montage de verres correcteurs répartis sur

l'ensemble du territoire. La seconde a été la

signature, le 4 octobre 1996, d'une

convention entre le Ministère de la Santé

Publique et le Syndicat des Opticiens

Diplômés du Maroc, aux termes de laquelle

il est prévu que les élèves déficients

oculaires peuvent obtenir des lunettes au

prix coûtant auprès des adhérents du

syndicat.

Concernant la mise en place des

ateliers de montage, nous n'avons pas été

en mesure, faute de temps, de vérifier s'ils

répondaient effectivement aux besoins.

Selon les responsables de la Division de la

santé scolaire, aucun ne serait opérationnel

à ce jour. Selon l'étude de faisabilité du

bureau d'études, on peut lire à la page 2 du

rapport de recommandations (cf. I C O N E ) ,

que ces "unités sont opérationnelles, mais

ne fonctionnent pas encore", ce qui est une

formulation pour le moins sibylline, mais

qui signifie que les locaux existent, qu'ils

sont en partie dotés du matériel et du

personnel compétent, mais qu'il m a n q u e

encore un ou plusieurs intrants (inputs)

indispensables pour pouvoir fournir

effectivement des lunettes. Enfin, selon le

directeur du bureau d'études, que nous

avons rencontré le 29 avril, il y aurait 18

unités qui sont en mesure de produire des

lunettes à l'heure actuelle. Le moins que

l'on puisse dire est qu'il existe une certaine

confusion dans ce dossier, et que

l'information a de la peine à circuler. E n ce

qui concerne le suivi de la convention

précitée, nous n'avons pu obtenir aucune

information sur son application effective 6

mois après sa signature, et là encore, on

doit constater que la Division de la santé

scolaire n 'a pas joué de rôle actif dans cette

initiative.

30

5 Une conclusion sous forme

d'invitation à poursuivre

Après avoir consacré plusieurs

semaines à l'examen du programme

7 0 0 / M O R / 1 3 , les évaluateurs ont acquis la

conviction que des jalons importants

avaient été posés le long du chemin du

développement et de l'amélioration du

premier cycle de l'enseignement

fondamental marocain.

E n ce qui concerne les composantes

pédagogiques, l'objectif de renforcement

des capacités nationales dans les domaines

de l'élaboration des programmes, de

l'évaluation formative, des classes à

niveaux multiples a été rencontré à travers

les actions de formation organisées et les

produits développés.

Plus particulièrement au niveau des

composantes 2 , 4 et 5, des actions de

dissémination ont été mises sur pied afin de

faire bénéficier les enseignants et les

directeurs d'une remise à niveau de leurs

compétences dans les différents domaines

concernés par ces trois composantes.

C o m m e nous l'avons déjà signalé,

il est encore trop tôt pour cerner l'ensemble

des bénéfices résultant des actions

entreprises. E n particulier, les actions de

dissémination n'en sont qu'à la première

phase du processus qui devrait les conduire

à atteindre les acteurs du terrain.

L'informatisation des procédures de

planification (composante 7.1), malgré une

période de démarrage difficile, paraît

aujourd'hui progresser efficacement et un

certain nombre d'outils de traitement ont

été finalisés et validés auprès des

délégations locales. Dans le cadre de cette

m ê m e composante, des outils d'auto-

formation ont été développés en vue de

former un personnel capable de participer,

tant au niveau central qu'au niveau local, à

des études portant sur divers aspects du

système éducatif marocain.

Deux études (composante 7.2)

portant respectivement sur l'analyse des

acquisitions et des carrières scolaires des

élèves et sur les procédures de passage du

premier au second cycle de l'enseignement

fondamental ont été réalisées

conjointement par des spécialistes

marocains et des experts internationaux.

Ces études fournissent des données

essentielles susceptibles de conduire, à

terme, à une amélioration des performances

du système éducatif marocain.

Les composantes 8 et 10 concernant

la santé scolaire ont été confiées à des

bureaux d'études locaux qui ont produit

d'une part, un logiciel de saisie permettant

de faciliter l'encodage de certaines données

médicales et d'autre part, un rapport sur la

faisabilité de la fabrication de verres

correcteurs.

Bien évidemment des effets en

profondeur sur le système éducatif ne

pourront être espérés que si une continuité

suffisante est assurée aux actions mises en

œuvre dans le cadre de ce programme.

E n particulier, les actions de

dissémination prévues pour les

composantes pédagogiques devraient être

poursuivies et approfondies par :

• le renforcement du groupe

stratégique et sa structuration sous la forme

d'une composante permanente du système ;

• la validation expérimentale du

matériel produit auprès d 'un échantillon

d'apprenants et/ou de directeurs en veillant

à ce que le plan d'échantillonnage prenne

en compte les principaux critères de

stratification susceptibles d'avoir un effet

sur l'efficacité pédagogique des

enseignants et/ou des directeurs ;

• la formation du personnel amené à

assurer l'encadrement pédagogique des

actions de formation et d'auto-formation

prévues ;

la prise en compte de critères de

discrimination positive dans les priorités à

accorder à la formation du personnel en

faveur des enseignants connaissant des

situations professionnelles jugées difficiles

en raison de leur niveau de formation ou de

leurs conditions particulières de travail ;

la mise sur pied d 'un dispositif

indépendant d'évaluation de l'efficacité des

actions de formation permanente.

L'informatisation des procédures de

planification devrait également faire l'objet

d 'un suivi attentif et bénéficier d 'une

expertise adéquate pour lui donner toutes

les chances d'être opérationnelle dans des

délais et avec une fiabilité qui soient

compatibles avec les objectifs de

décentralisation et d'amélioration de

l'efficacité de la gestion du système que

s'est fixés le Ministère de l'Education.

Si l'on veut maximiser l'effet des

actions initiées dans le cadre de ce

programme, les consultants-évaluateurs

considèrent qu'une attention particulière

devrait être accordée à la prise en compte

de certaines spécificités locales. E n

particulier, il s'agirait de cibler certains

publics et/ou certaines zones scolaires sur

la base de critères objectifs (taux de

rétention, taux de fréquentation des filles,

indices de rendement scolaire,...) afin de

faire bénéficier ces publics de mesures de

discrimination positive susceptibles

d'améliorer leur situation scolaire en la

rapprochant des normes nationales et/ou

des standards internationaux

c o m m u n é m e n t acceptés pour des pays dont

le niveau de développement est comparable

à celui du Maroc.

Par ailleurs, pour que de telles

actions d'ajustement puissent bénéficier

d 'un pilotage adéquat et trouver leur pleine

efficacité, il est urgent que le Maroc se dote

d'instruments efficaces de contrôle de

l'efficacité interne de son système éducatif

à travers la passation systématique

d'épreuves standardisées et la mise au

point de procédures de gestion

informatique des données récoltées.

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