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Education et lien social par la pratique artistique
Contact Mariana Nunes
Chargée des ateliers de création [email protected]
SOMMAIRE
I. Le projet 1
II. Les objectifs 3
III. Le contenu des ateliers 5
La compagnie du Mystère Bouffe et son engagement 8 La Commedia dell’arte, véritable outil pédagogique 11
Photos : Benoît Teillet et la Cie du Mystère Bouffe
I. LE PROJET
Notre projet est parti du constat que la pratique amateur du théâtre et plus
spécialement de la Commedia dell’arte, microcosme à l'image de notre vie sociale, peut
devenir une action civique et avoir des effets sociaux profonds. Réaliser une œuvre théâtrale
demande de la part de ceux qui y participent un esprit d'équipe et la nécessaire distance
pour la mener à bien. Exister sur une scène ne peut s'envisager dans une négation de l'autre,
ce qui mettrait en péril la création commune. Ainsi, ce compromis entre moi et l'autre se
concrétise dans l'objectivité du but à atteindre, celui de la représentation théâtrale.
D’autre part, cette forme de théâtre populaire peut attirer un public
extrêmement varié, car la parole est utilisée comme moyen privilégié de communication. En
conséquence, la commedia dell’arte offre les outils pour accéder à un public, qui serait peut-
être difficile à capter autrement, et intervenir de manière (re)structurante.
Le succès des ateliers amateur animés par notre compagnie nous amène à la
reconduite de nombreux projets tous les ans et à développer de nouveaux partenariats.
II. LES OBJECTIFS
Au-delà de son aspect ludique, le théâtre est une discipline structurante ayant
un réel apport sur les jeunes. Plus particulièrement :
- Grâce à la rigueur exigée pour la pratique du théâtre, les participants sont incités à la
réflexion, la sensibilisation et la réadaptation sociale.
- En favorisant la communication, le théâtre diminue les tensions entre les jeunes qui
amènent souvent, faute de mots à se transformer en acte violent et donc délinquants.
Par ailleurs, selon les témoignages des parents et des enseignants avec qui nous
travaillons, certains jeunes progressent considérablement en ce qui concerne
l’articulation et la formulation des phrases.
- Par le travail de groupe, le théâtre développe l’esprit de coopération, de
responsabilité, de respect et de solidarité.
Déroulement des ateliers de
commedia dell’arte
Travail technique
Respiration, articulation, formulation des phrases…
Travail artistique
Création de scénario et proposition d’une
« aventure » théâtrale, construite et choisie par
les participants
Travail social
Établissement de rigueur, communication au sein du
groupe
Représentations publiques
Les jeunes deviennent eux-mêmes médiateurs
des idées véhiculées lors des ateliers
III. LE CONTENU DES ATELIERS
Le programme pédagogique de l'enseignement de la Commedia dell’arte
comprend plusieurs aspects qui varient de l'initiation au perfectionnement selon le niveau du
public concerné et le type d'intervention.
Il s’agit de créer un projet pédagogique, comprenant au moins une représentation
en costume d’époque. Ce travail a deux objectifs :
� permettre aux enfants de comprendre et participer au processus de création d’un
scénario de Commedia dell’arte, tant au niveau théorique (historique de la
Commedia dell’arte et de ses personnages, étude des techniques expressives,
appréhension de l'espace scénique…) que pratique (la voix, le corps, l'espace,
improvisations libres et structurées…).
� leur donner la possibilité de jouer devant un public qui est fidèle au Festival Tréteaux
Nomades
Parallèlement à une découverte de l’histoire de la Commedia dell’arte, des
techniques expressives qui l’accompagnent, ainsi que l’histoire de l’utilisation du masque et
l’exploitation de l’espace scénique, un atelier de jeux théâtraux sera mis en place pour
travailler l’expression corporelle, l’utilisation de l’espace, la voix et la respiration et le
contact avec l’autre.
Par la suite, un travail sur les attitudes des personnages de la Commedia dell’arte
sera introduit grâce à des improvisations libres et structurées. Après la confection d’un
masque, une identification et une utilisation de son masque complètera le travail évoqué ci-
dessus. La réalisation d’un scénario de type Commedia dell’arte (canevas) sera engagé pour
amener les enfants à s’exprimer, donner corps à un projet à la fois personnel et collectif. On
pourra envisager un perfectionnement aux arts de la scène par le chant, la pantomime, le
combat de bâtons…
Enseignement théorique :
- Historique de la Commedia dell’arte
- Historique des techniques expressives de la Commedia dell’arte
- La Commedia dell’arte dans le théâtre contemporain
- Historique du masque
- L'espace scénique
Travail théâtral :
La voix : travail sur le souffle, précision et justesse du son, voix parlée, voix proférée
Le corps, l'espace: décontraction, assouplissement, éveil musculaire, prise de conscience du
corps dans l'espace, conscience et disponibilité au corps de l'autre, découverte de son corps
et de son fonctionnement à l'intérieur d'un ensemble, coordination des mouvements.
Le travail vocal et physique a pour but de préparer au jeu et d'obtenir une disponibilité
optimale et de mettre en valeur la personnalité et l'originalité de chacun.
Improvisations libres et structurées : Création imaginaire d'une situation ou reconstitution d'une
situation vécue (familiale, historique, faits divers, fait de société), mise en situation de la
personne dans un rapport à l'autre, construction de l'improvisation.
Le passage à l'acte dramatique exige des ressorts émotionnels et intellectuels qui mobilisent
en chacun concentration, écoute de l'autre, compréhension et imagination.
Attitudes des personnages de Commedia dell’arte, identification et utilisation du masque, ses
contingences techniques
Réalisation de scénarii de Commedia dell’arte.
Arts de la scène : chants, pantomimes, danses anciennes et acrobaties
Utilisation des armes: épées et bâtons
Le public étant une composante essentielle dans le processus créatif de la Commedia
dell’arte, le comédien est obligatoirement confronté à ce regard extérieur par le biais de
séances de travail publiques sur tréteaux et en costumes dans divers lieux de Paris et en
banlieue.
LA COMPAGNIE DU MYSTERE BOUFFE ET SON ENGAGEMENT
La Compagnie du Mystère Bouffe est une association à but non lucratif (loi de 1901) pour la
Création, la Diffusion et la Formation des Arts du Spectacle (théâtre, danse, pantomime,
musique, scénographie). Implantée au Pré Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis), elle a pour
activité principale le spectacle vivant et est composée d’une centaine d’artistes (comédiens,
musiciens, metteurs en scène, plasticiens…).
Gilbert Bourébia est directeur artistique de la compagnie. Diplômé de l’école des Beaux-arts
de Paris, il fut initié à la Commedia par Carlo Boso. Il est également saxophoniste et
percussionniste. Son engagement artistique et social l’a amené à créer et organiser de
nombreux évènements et festivals. Ses créations ont été jouées sur les plus grandes scènes
(Olympia, Zenith, Bercy).
Créée en 1979, la Compagnie du Mystère Bouffe a construit sa spécificité sur une
pluridisciplinarité des arts face à la culture d’une société sans cesse morcelée par le
cloisonnement des genres artistiques. Via le théâtre et les actions culturelles, le Mystère
Bouffe se bat pour une globalité : celle des spectacles que la compagnie crée et celle du
public auquel elle s’adresse. Elle privilégie le lien social qu’elle tisse sans cesse au fil de ces
interventions. Elle propose un théâtre interactif, riche visuellement tout en développant une
approche contemporaine des problèmes de notre époque.
Le Mystère Bouffe est avant tout une troupe de théâtre à part entière. Elle se produit sur les
plus grandes scènes européennes et françaises à Paris comme en province. A son actif, plus
de trente créations en 25 ans d’existence.
Une autre composante dominante des activités de la compagnie, est l’organisation de
festivals avec notamment le festival « Coup de théâtre à Carcassonne » en 2002 et tout
particulièrement les six «Tréteaux Nomades », Festivals Itinérants des Arènes de Montmartre
dont la dernière édition s’est déroulée du 20 août au 09 septembre 2007. La volonté de ces
tréteaux est d’organiser à Paris un Festival de Théâtre, de plein air, tourné vers un public
varié et international, tout en développant un espace de proximité avec les habitants,
prenant en compte leurs diversités culturelles, ethniques et sociales.
Le positionnement de la compagnie du Mystère Bouffe est le suivant : mener des actions afin
de démocratiser le théâtre et le faire découvrir aux personnes en difficulté ou en milieu
défavorisé, pour remplir pleinement une fonction "d'art populaire". Nos objectifs sont donc
les suivants :
• Fédérer les habitants autour d’un projet culturel convivial, préparé en amont.
• Valoriser le projet artistique des arrondissements et de la Compagnie.
• Développer la notoriété du théâtre de tréteaux, en utilisant les compétences de la
Compagnie du Mystère Bouffe, en affirmant son rôle en matière d’action culturelle, et en
utilisant son expérience de mise en réseau grâce à un travail sur les lieux.
• Développer des pratiques culturelles amateurs dans l'ensemble des quartiers,
défavorisés ou non.
• Créer puis diffuser des œuvres de qualité qui soient accessibles à tous et principalement
à ceux qui sont en marge des circuits de diffusion traditionnels.
• Dynamiser et mettre en valeur les émergences artistiques en les aidant à se mettre sur
la voie de la professionnalisation et/ou en leur donnant des outils d'autonomie et de
formation.
• Renforcer le travail quotidien des partenaires, en leur donnant des matériaux artistiques
et culturels susceptibles de faciliter leur mission.
L'enseignement proposé par la Compagnie, en son sein comme à l'extérieur, se présente
sous différentes formes et s'adresse à tous les publics. La Compagnie du Mystère Bouffe
propose aussi de nombreuses actions pédagogiques : formations professionnelles (stages
conventionnés AFDAS) ou amateurs (cours de théâtre enfants, adolescents, adultes, cours
de Commedia, capoeira…). Elle intervient au sein des entreprises, des associations, des
universités, en milieu scolaire (Classes à PAC), en milieu carcéral, auprès de handicapés, des
sans-papiers, dans les quartiers classés « Politique de la Ville »…
Fidèle à la tradition de la Commedia dell’arte, l'animation et la transmission orale sont au
cœur des préoccupations de la Compagnie du Mystère Bouffe. Ses spectacles ont toujours
été conçus pour un rapport immédiat avec le public que ce soit dans l'autonomie de son
espace théâtral, que dans la forme visuelle et interactive des mises en scène de Gilbert
Bourébia. Attachée à l'idée d'un art populaire, moteur de toutes ses créations, la Compagnie
du Mystère Bouffe puise son inspiration dans la diversité de ses pratiques artistiques et dans
la multiplicité des catégories socioculturelles auxquelles elle s'adresse. Elle se veut
l'interprète sensible de la réalité humaine et le critique attentif aux contrastes sociaux afin de
créer et de maintenir un lien social sans cesse en mutation.
Transmission orale et animation sont l'essence même de la Commedia dell’arte, véritable
outil pédagogique. Malgré les siècles, elle n'a pas pris une ride de par sa vocation de critique
attentif de la société, et elle rend à l'acteur la liberté d'être auteur de soi-même. Forte de ses
vingt-cinq ans d'expérience professionnelle, la Compagnie du Mystère Bouffe possède une
grande habitude de la pratique pédagogique et se consacre depuis de nombreuses années à la
transmission de cette forme théâtrale. Depuis plus de vingt ans, elle s'est engagée dans un
travail de collaboration avec le milieu scolaire et universitaire par le biais d'ateliers
artistiques, conférences, animation.
LA COMMEDIA DELL’ARTE, VERITABLE OUTIL PEDAGOGIQUE
La Commedia dell’arte est comparable aux traditions orientales, comme le
théâtre No, le Kathali, c'est de l'essence de cette universalité qu'elle tire son énergie. Cette
expression artistique repose sur deux pratiques fondamentales: l'improvisation et le masque
qu'elle incarne dans une multitude de savoirs-faire: chant, danse, escrime et pantomime.
L'improvisation permet au comédien de développer son imagination car elle mobilise toute
l'ampleur créative individuelle qui, mêlée à celle de l'autre, impose forcément certaines
règles. Le travail du masque procède beaucoup du dévoilement et d'une mise à nu de l'être.
Tout acteur en situation de jeu est confronté à l'autre et à la liberté de son
expression. La scène est un microcosme à l'image de notre vie sociale, cet espace commun
où se croisent, s'interpénètrent, se heurtent ou s'unissent l'imagination et la créativité
individuelle de chacun. Réaliser une œuvre théâtrale demande de la part de ceux qui y
participent un esprit d'équipe et la nécessaire distance pour la mener à bien. Désirer exister
sur une scène ne peut s'envisager dans une négation de l'autre, ce qui mettrait en péril la
création commune. Ainsi, ce compromis entre moi et l'autre se concrétise dans l'objectivité
du but à atteindre, celui de la représentation théâtrale. Le public, a, lui aussi, son rôle à jouer
dans le succès de cette médiation. Détenteur d'une seule alternative : adhésion ou
opposition, le public est porteur du regard extérieur au processus relationnel et créatif de la
mise en scène, le régulateur et la réponse immédiate aux problèmes soulevés pendant le
temps de travail.
Ce constat est d'autant plus exacerbé lorsqu'il s'applique à l'improvisation car elle
place l'acteur dans une liberté plus grande et dans l'écueil accru de sa subjectivité. C'est pour
cette raison que l'improvisation ne peut se définir comme le champ d'une expression
débridée mais bien plus comme une technique avec ses règles et ses conventions permettant
de développer toute l'ampleur créative du comédien. La Commedia dell’arte a perduré
jusqu'à nous avec ces principes de l'improvisation. Toute la force d'une telle tradition est de
les avoir forgés au fil des siècles, les confrontant sans cesse à la réalité de la pratique.
Le rôle du masque a également toute son importance dans le rapport du
comédien à lui-même et à autrui. Qui met un voile sur son apparence, croit la transformer
et tromper l'autre sur sa personnalité et son identité. Cependant, c'est ignorer tout le
pouvoir du masque qui procède beaucoup du dévoilement et d'une mise à nu de l'être qui se
cache derrière lui. En bref, le masque ne masque rien. Nous pourrions l'énoncer ainsi : tu te
masques donc tu te montres ou encore si tu te masques, c'est pour révéler quoi ?
Chaque personnage de la Commedia dell’arte possède son masque matérialisant
ainsi tous les archétypes sociaux de l'humanité. Au-delà de l'histoire et des spécificités
individuelles, ces derniers vivent en nous comme des masques qui s'interposent entre moi et
l'autre. En les mettant sur une scène, il permet de les extraire de nous-mêmes et de créer la
distance qui permettra de les appréhender. Pratiquer le masque est un moyen pour mieux
nous comprendre dans certains de ces fonctionnements sociaux qui nous emprisonnent.
Ces considérations ne doivent pas faire oublier le caractère ludique et vivant de la
Commedia dell’arte et qui lui donne encore toute sa popularité. Cette expression théâtrale
est une forme parfaitement adaptée à une pratique amateur. Loin du théâtre intellectuel,
elle fait appel au corps des interprètes. Physique et visuelle, elle renoue avec la spontanéité
et l'enfance qui sommeillent en chaque homme.
L'escrime, la danse, le chant, la danse et la pantomime sont autant de techniques
qui mettent en valeur les aptitudes corporelles du comédien. Tout comme le sport,
l'apprentissage permet une application immédiate et possède des vertus de mise en
confiance par le biais du jeu spontané. Elle est d'autant plus gratifiante pour un individu en
situation de difficulté identitaire qu'elle participe de la complicité collective et permet une
reconnaissance individuelle au sein du groupe dans les effets instantanés et tangibles de son
résultat.
Simple et légère dans son propos, elle suscite également le rire, un langage
commun qui provoque la participation de chacun, quelque qu'il soit et d'où qu'il soit. Loin de
laisser indifférent, elle mobilise par le plaisir un désir de dépassement de soi découvrant la
puissance d'un autre pouvoir, celui de l'imagination et de la créativité individuelle.