photochimie aéronomique

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1 Bull. SOC. Chim. Belg. 71, pp. 665-669, (1962) i I PHOTOCHIMTE AERONOMIQUE Marcel NICOLET CNRE 3, Avenue Circulaire, Bruxelles 18 Les rbactions chimiques prennent une grande importance dans l’atmosphkre lorsqu’un des deux constituants principaux (a et N2) peut &re dissocit. La photodissociation de l’oxygkne est bien connue : dans le conti- nuum & Herzberg B h < 2400 A avec un faible coefficient d’absorption 10-24 B lO-23cm2 et dans le continuum de Schumann-Runge B A < 1750 A avec un coefficient d’absorption atteignant 10-18 B 10-17 cm2. L’absorption par le continuum de Schumann-Runge s’effectue dans la thermosphkre (altitude z > 85 km) tandis que celle par le conti- nuum de Herzberg a lieu dans la mdsosphkre (50 km < z < 85 km). Dans la stratosphke (z < 50 km), l’ozone intervient comme Clbment absorbant de la radiation solaire entre 2400A et 2000A. Lorsque I’oxygkne est photodissocit par le processus 0s; 4- hv -+ 0 + 0 (1) avec une valeur du coefficient de dissociation Jm(On) = 4 x sec-l pour une dpaisseur optique nulle, les rtactions suivantes apparaissent (3) (4) (5) pour laquelle l’bnergie d’activation est encore ma1 connue. On a souvent admis que Ea(5) = 6 kcal; cependant, elle pourrait Qtre de l’ordre de 3 kcal. La connaissance d’une valeur exacte est nbcessaire car les rCac- tions ont lieu dans une r6gion atmosphkrique o h l a tempbrature varie entre un minimum de 1500K et un maximum de 300OK. On voit, en adoptant les concentrations atmosphbriques de 02 et Nz aux altitudes requises, que dans une atmosphkre soumise au rayon- nement solaire, l’ozone est imm6dhtement en Cquilibre photochimique 0 + 0 + M -+ 02 + M ; k1= (3 f 1) 10-83 cm6 sec-1 0 + 02 + M+O3 + M; kz= (1 f 0.5) 10-34cmasec-1 03 + 0 -+ 208 (coefficient k3)

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1 Bull. SOC. Chim. Belg. 71, pp. 665-669, (1962) i I

PHOTOCHIMTE AERONOMIQUE

Marcel NICOLET CNRE 3, Avenue Circulaire, Bruxelles 18

Les rbactions chimiques prennent une grande importance dans l’atmosphkre lorsqu’un des deux constituants principaux (a et N2) peut &re dissocit.

La photodissociation de l’oxygkne est bien connue : dans le conti- nuum & Herzberg B h < 2400 A avec un faible coefficient d’absorption 10-24 B lO-23cm2 et dans le continuum de Schumann-Runge B A < 1750 A avec un coefficient d’absorption atteignant 10-18 B 10-17 cm2.

L’absorption par le continuum de Schumann-Runge s’effectue dans la thermosphkre (altitude z > 85 km) tandis que celle par le conti- nuum de Herzberg a lieu dans la mdsosphkre (50 km < z < 85 km). Dans la stratosphke (z < 50 km), l’ozone intervient comme Clbment absorbant de la radiation solaire entre 2400A et 2000A.

Lorsque I’oxygkne est photodissocit par le processus 0s; 4- hv -+ 0 + 0 (1)

avec une valeur du coefficient de dissociation Jm(On) = 4 x sec-l

pour une dpaisseur optique nulle, les rtactions suivantes apparaissent (3) (4) ( 5 )

pour laquelle l’bnergie d’activation est encore ma1 connue. On a souvent admis que Ea(5) = 6 kcal; cependant, elle pourrait Qtre de l’ordre de 3 kcal. La connaissance d’une valeur exacte est nbcessaire car les rCac- tions ont lieu dans une r6gion atmosphkrique o h l a tempbrature varie entre un minimum de 1500K et un maximum de 300OK.

On voit, en adoptant les concentrations atmosphbriques de 0 2 et Nz aux altitudes requises, que dans une atmosphkre soumise au rayon- nement solaire, l’ozone est imm6dhtement en Cquilibre photochimique

0 + 0 + M -+ 0 2 + M ; k1= (3 f 1) 10-83 cm6 sec-1 0 + 02 + M+O3 + M ; kz= (1 f 0.5) 10-34cmasec-1

0 3 + 0 -+ 208 (coefficient k3)

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avec l’atome d’oxygtne. Le coefficient de photodissociation de l’ozone JO est en effet trts tlevt,

Jo _?i 1 0 - 2 ~ e c - l (6) 3

3

Cependant, l’atome d’oxygtne atteint difficilement son tquilibre photo- chimique dans la thermosphtre, car le temps de recombinaison est trts long. A 100 km, il est suptrieur A un mois. C’est pourquoi sa distri- bution verticale au-dessus de la mtsopause (z > 85 km) s’adaptera aux conditions des mouvements atmosphtriques qui tendent ttablir une distribution analogue aux constituants principaux que sont l’oxygbne et I’azote moltculaires.

L’effet de passage du jour A la nuit se manifeste par une importante variation dans la mtsosphtre, A savoir une diminution de la concentra- tion d’atomes d’oxyghe et une augmentation de celle de l’ozone - par la reaction (4). Cet accroissement de l’ozone peut Ctre trbs important. Mais malheureusement, une valeur certaine ne peut &re obtenue, car elle dtpend de la reaction (5). En effet, la valeur limite de l’ozone au-des- sus de 70 km est donnte par les rtactions (4) et (9, c’est-&-dire

kz ka (7) n(&) = - ~(OZ) n(M)

En tout cas, cet accroissement nocturne de l’ozone a d’importantes constquences, car il conduit aux rtactions suivantes :

et

oh l’hydrogbne atomique est un catalyseur. L’hydrogtne rtsulte de la prtsence de H2, de la photodissociation de H20, de l’oxydation de CH4 et de la ptnttration des protons dans l’atmosphtre terrestre. Le fait que les rtactions oh interviennent Hz et H pour la dttermhation de l’tquilibre chimique requibrent des energies d’activation trbs tlevtes, fait que l’atome d’hydrogbne au-dessus de la mtsopause suit pratique- ment une distribution atmosphtrique normale. Sa concentration est de l’ordre de 108 cm-3 ti 85 km, 107 cm-3 a 100 km et tombe B 103 - 104 cm-3 B 500 km suivant les conditions de temptrature. L’atome d’hydrogbne est soumis au processus d’tchappement de l’atmosphtre terrestre et le flux de libtration correspond A quelque 3 x 1 0 7 atomes d’hydrogbne cm-2 sec-1. Une telle libtration requiert donc une source produisant continuellement des atomes diffusant dans la thermosphbre.

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La reaction (8) est d’une trks grande importance, car elle conduit l’tmission la plus importante dans la lumikre du ciel nocturne apparais-

sant surtout dans l’infrarouge. Ce sont les bandes de vibration-rotation de OH de u Q 9 dont 1’Cnergie est de l’ordre de 3 ergs cm-2 sec-1. Cette tnergie correspond A environ 1012 photons cm-2 sec-1 alors que la raie verte bien connue de l’atome d’oxygkne ne fournit que 2 x 108 photons cm-2 sec-1.

La dissociation directe de l’azote est trks peu importante dans la haute atmosphkre. Elle apparait dans la thermosphkre inftrieure (85- 100 km) avec un coefficient qui n’est pas suptrieur A 10-12 sec-1. En fait, le problkme aeronomique de la dissociation de Nz est lie A des processus d’ionisation. On a

Nz + h v + N : + e (10)

pour toute longueur d’onde inferieure A 796A. Ceci conduit tout d’abord B une recombinaison dissociative dans l’ionosphkre

N l + e + N + N

avec un coefficient de recombinaison aN2 compris entre 5 x 10-7 et 10-6 cm3 sec-1.

I1 faut ajouter que la prtsence d’ions Of conduit ti des reactions d’tchange d’atomes et d’ions (et non de transfert de charges)

(12) O+ + Nz +NO++ N

o+ + 0 2 + 0 2 + + 0 Ces deux reactions sont exothermiques et jouent un rale considerable dans l’ionosphkre. Malheureusement, les coefficients de ces rtactions ne sont pas bien connus. On trouve dans la litttrature des valeurs s’tchelonnant de 10-9 cm3 sec-1 & 10-13 cm3 sec-1. Les hautes valeurs sont dkduites par analogie avec certaines rtactions d’echange d’atomes et d’ions analystes au laboratoire tandis que les faibles valeurs rtsultent de considtrations atronomiques ntcessaires pour expliquer les phtno- mtnes ionosphtriques.

Lorsque I’atome d’azote est formt, il rtagit avec 0 2 suivant le processus

(14) N + 0 2 --f NO + 0 ; coefficient 61

dont le coefficient bl a une valeur bl = 1.5 x 10-13 e - 3 0 0 0 / ~

correspondant a une energie d’activation de l’ordre de 6 kcal.

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A la rtaction (14) s’oppose la reaction immtdiate NO + N + N2 + 0 ; coefficient ba

car son coefficient bp peut s’exprimer par b2 = 1.5 x 10-12 T112

indiquant que l’tnergie d’activation est ntgligeable. En tquilibre, on obtient la concentration de NO

n ( N 0 ) = 10-1 e-300°T/ n(O2) (18)

montrant que la concentration de NO est toujours une fraction de celle de 0 2 . La prtsence de NO dans la mtsosphtre (z < 85 km) explique la formation de la region D dans l’ionosphtre. En effet, la moltcule NO est la seule moltcule pouvant ttre ioniste par des radiations solaires de longueurs d’onde suptrieures h lo00 A. En particulier, la radiation solaire Lyman-a h 1216 A ionise NO et explique ainsi la prtsence d’une couche ioniste

Quant h la concentration de l’atome d’azote, elle est donnte, si sa production est P(N) [cf. (lo), (11) et (12)], par

faible altitude dans l’atmosphtre terrestre.

En urilisant des valeurs numtriques, on voit que la concentration de l’azote atomique est toujours nettement inftrieure h celle de l’azote moltculaire. En effet, sa durte de vie ‘TN (rtduction de la concentration initiale 21 50%) est donnte par

‘TN~= 0.7/2bi n(02) (20)

Ceci conduit au-delh de 130 km h des durtes de vie de l’ordre de l’heure. En tout cas, il est certain que l’atome d’azote doit ttre un Cltment

mineur dans la haute atmosphtre, car des rtactions telles que

0 + N + M +NO + M N + N + M +N2 + M

qui conduisent normalement A l’tmission de systhmes tlectroniques, sont de faible importance.

La rCaction (21 a) conduit h I’tmission des syttmes a, (3, y de NO et la rtaction (21 b) conduit h l’tmission, par exemple, du ler positif de N2. Comme les coefficients de recombinaison de (21 a) et (21 b) qui sont de l’ordre de 10-32 cme sec-1, ne sont pas trts difftrents des coefficients d’tmission, il faut conclure que l’atome d’azote n’est pas

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trks abondant dans I’atmosphkre. En effet, I’absence de telles tmissions dans la lumikre du ciel nocturne conduit B conclure que la concentration de l’azote doit Etre infkrieure B 108 cm-3.

La photochimie akronomique doit donc tenir compte : (1) des ruptures d’dquilibre chimique car les temps requis pour atteindre un Cquilibre sont trks souvent supkrieurs aux temps que prennent les mouvements atmosphiriques pour contrecarrer les actions photochimi- ques ; (2) des phtnomknes apparaissant dans l’ionosphkre qui font intervenir des ions dans les rkactions avec les particules neutres; (3) de la diffusion dans le champ de la pesanteur qui modifie la distribution verticale des Cltments.

L’effet de la diffusion est tel, par exemple, que le rapport n(O)/ n(02) au-dessus de 100 km dCpend plus de la diffusion que de l’action photochimique. De meme, l’effet de diffusion dirige la distribution verticale de l’atome d’hydrogkne. En fait, vers 100 km, il y a toujours un flux vertical de diffusion FD qui correspond approximativement &

(22)

ou n, reprksente la concentration de l’tlCment de masse rnl prCsent dans l’atmosphkre B 100 km. Ce flux conduit ainsi B 1’Cchappement de l’hydrogkne de l’atmosphbre terrestre et B 1’Cquilibre de diffusion dans le champ de la pesanteur de tous les autres constituants atmosphkriques dans la trks haute atmosphkre.

FD = nl cm-z sec-I

ComminiquP a la SociPtP Chimique de Belgique le 18,juin 1962

Dr. B.A. Thrush (Cambridge) said : We have recently used a fast flow system to measure the rate constant of

the reaction H + 0 2 + M = HOz + M which is an important reaction for the removal of hydrogen atoms in the upper atmosphere. We find k = 3.3 x

cm6 molecule -z sec-l at 3000K for M = Ar. The rate constant has a small negative temperature coefficient similar to those found for the related reactions H + NO and 0 + NO (Clyne and Thrush, Disc. Faraday SOC. 1962, 33). We would expect the rate constants for M = NZ and M = On to be very little larger than our value for argon.

Dr. Nicolet replied to comment of Dr. B. A . Thrush : The reaction H + 0 2 + M is a very important reaction in the mesosphere

since it gives the lower boundary conditions for atomic hydrogen. The reaction H + 0 3 +OH* + 0 2 leads to the strong airglow emission and the lower boundary of the emission layer depends on the vertical distribution of atomic hydrogen as it is expected from Bates’ and Nicolet’s theory.