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Négocier le Développement Durable
« peut-on civiliser le capitalisme ? »
Thierry Demuysère, FEC
Septembre 2007
Négocier le DD, une drôle d’idée !
I Comment l’idée fait son chemin ?
II A quelles conditions la négociation est-elle un progrès ?
III Quelles pourraient être les pistes à explorer ?
I Une idée qui fait son chemin …
Colloque de l’OIT « Protection de l’environnement et développement durable : le rôle pratique des syndicats » Genève 6-8 octobre 1993
“Révision de la stratégie de l’Union Européenne en faveur du développement durable” Bruxelles, 14 et 15 juin 2005
Résolution de l’assemblée des syndicats sur le travail et l’environnement, Nairobi 15-17 janvier 2007
Colloque de l’OIT 1993
« La planification d’un développement durable est l’affaire des partenaires sociaux »
« L’expérience des syndicats en matière de négociation sociale est une pierre à l’édifice du nouveau consensus sur les questions d’environnement »
Déclaration CES sur la stratégie de l’UE en faveur du DD 2005 (1)
“26. La CES et ses organisations membres agiront pour que les travailleurs dans les entreprises soient reconnus comme des acteurs des processus de transformation requis par le développement durable, pour que des droits en matière d’environnement soient accordés aux représentants des travailleurs et pour que le dialogue social à tous les niveaux, tant sectoriel que nationaux et européens, s’élargisse aux questions d’environnement. “
Déclaration CES sur la stratégie de l’UE en faveur du DD 2005 (2)
“34. La CES, avec les fédérations professionnelles européennes et les comités d’entreprise européens, intensifiera ses efforts pour promouvoir les Normes internationales du travail et les Accords mondiaux sur l’environnement par le biais des accords-cadres négociés avec les entreprises multinationales.”
Résolution de l’assemblée des syndicats sur le travail et l’environnement, 2007
« 1. L’assemblée est convenue des objectifs suivants :
b) intégrer les dimensions sociales et environnementales du DD à une approche reposant sur les droits. »
h) développer le dialogue entre syndicats et directions, les consultations et négociations concernant le DD dans le cadre des lieux de travail ainsi que le dialogue social aux niveaux sectoriels, national et international, tant dans le secteur public que dans le secteur privé,recourir à des moyens appropriés pour que les responsabilitsé sociales et écologiques des entreprises soient accrues… »
Différentes étapes du chemin en Belgique
Depuis 1991 , des conventions avec des entreprises pionnières (Makro, Ter Beke, L’Oreal)
Une réflexion partagée par les ailes francophones et néerlandophones des syndicats (Duuzaame Werken Praktijkgids, A & M 2003 ; Environnement et négociations collectives, FEC 2005)
Dissémination dans les négociations sectorielles 2007-2008 : Responsabilité sociale des entreprises, souci de l’environnement, utilisation de l’énergie, vêtements de travail propres, coopération au développement: CP 115, 118, 120.02, 124, 142, 149, 211, …
II. Négocier le DD : un progrès à certaines conditions
- 1. Clarifier le concept DD- 2. Clarifier le rôle syndical comme
stakeholder- 3. Encourager une RSE réellement
engageante
1. Clarifier le concept DD
Avantages et inconvénients d’un concept flou ; autant de définitions que d’intérêts particuliers
Conception syndicale : le pôle environnement et le pôle économique est subordonné au soci(ét)al
… versus
Conception patronale : le pôle environnement et le pôle social subordonné à l’économique
L’environnement : pas un objectif en soi L’économie : un moyen au service de l’homme, et non
l’objectif central Le sociétal (plus large que le social au sens classique),
l’humain
suppose dans la définition des priorités de prendre un ensemble de critères (ex pommes bio mais cueillies par enfants mexicains…versus variétés de pommes québecoise peut-être plus chers)
Une interprétation québecoise pédagogique :
Vérifier le respect des principes DD
5 grands principes d’une approche DD: Intégration des composantes
économique, sociale et environnementale (et non la somme!)
Responsabilité commune mais différenciée
Penser à long terme, agir à court terme
Participation de tous Principe de précaution
2. Clarifier le rôle syndical
CommunautésLocales
EntrepriseFournisseursSous traitants
Concurents
Clients
ONG
Travailleurs
Partenaires commerciauxInvestisseurs
Pouv.Publics
Stakeholder
RSE : le DD à l’échelle de l’entreprise
Les différentes outils de la RSE- les codes de conduite (chartes, codes de bonnes
pratiques, code de déontologie, recommandations, lignes directrices…)
- Les labels, normes et clauses sociales par les pouvoirs publics (label social belge, éco-label européen, norme EMAS, …)
- Les labels et normes privées (ISO, VCA, SA 8000 …)- Les notations (Ethibel, VIGEO, …)- Les fonds d’investissement éthiques (Triodos,…)- Les bilans sociétaux des entreprises
Démesure des salaires de PDG , scandales financiers ( Enron , Lernoudt et Hauspie, Picanol, …)
L’industrie pharmaceutique en Afrique : le brevet avant le soin
Coca-cola en Inde : épuisement des ressources en eau
… les pouvoirs publics pas à l’abri de tous reproches
Les entreprises ne sont pas responsables par nature
3. Pour une RSE réellement engageante
« la RSE doit être complémentaire et d’aucune manière substitutive à la législation concernant les droits sociaux et environnementaux et aux normes fixées par les négociations collectives, ce qui implique que toute entreprise ne respectant pas les conventions, la législation ou le dialogue social ne pourrait être définie comme socialement responsable. … »
Résolution CES 9-10 juin 2004 à Bruxelles
«Des points clefs doivent être explicités »
1. l’illusion que les rapports de pouvoir n’existeraient plus avec la RSE, avec une dilution des responsabilités de l’employeur
2. l’illusion que toutes les parties prenantes sont à égalité dans cette politique
3. l’illusion que la méthode « volontaire » ou autres « meilleures pratiques » seraient suffisantes pour affirmer la RSE.
Points d’attention exprimés par la CES
Philosophie RSE : auto-régulation contre réglementation?
Risque d’affaiblir, sinon supprimer le droit législatif et contractuel Le rôle régulateur et arbitral des Pouvoirs
Publics nationaux et internationaux qui définit l’intérêt général ? Pourquoi pas : choisir les partenaires qui
conviennentet écarter les autres
Enjeu syndical stratégique ?
Le syndicalisme a toujours fait du développement durable dans l’entreprise (juste salaire, égalité H-F, stress, bien-être …)
ce qui est relativement neuf :- l’agenda environnemental ou DD de l’UE devient
peut-être une opportunité pour débloquer certains points de l’agenda social
- La globalisation des échanges et des entreprises implique de pallier certaines discordances de réglementation par des CCT
Les défis du contrôle
Les pouvoirs publics désinvestissent leur rôle Les nouvelles normes prônent l’auto-contrôle (norme RSE
ISO 26 000) Le contrôle par les ONG posent certains problèmes
d’indépendance (contrat WWF pour des entreprises à faible émission de CO2)
Le syndicat est en bonne place pour un certain regard interne, est-ce son rôle ?
D’une conception ‘verticale’ du contrôle à une conception horizontale ‘x partenaires+1 garant’
III. Quelques pistes concrètes de négociation Piste 1 Un bilan sociétal structuré Piste 2 Droit à la formation Piste 3 Participer aux concertations externes sur
l’environnement et l’énergie Piste 4 Déplacements facilités, coûts diminués Piste 5 Achats durables dans l'entreprise Piste 6 + de sécurité pour la sous-traitance et + de
respect de l'environnement Piste 7 Fonds de pension éthique Piste 8 Fonds de solidarité Piste 9 Un certificat de responsabilité sociale Piste 10 Renouveler les formes de la concertation
Piste 1 Un bilan sociétal structuré
L’entreprise (le groupe multinational) doit communiquer aux représentants des travailleurs
- ses bilans financier, social et environnemental consolidés sur base d’ une structure standard définie en commun (Voir recommandations accord CP 116 Industrie chimique)
- un profil de développement durable sur base d’indicateurs internationaux
(cfr. indicateurs Trade Union Advisory Committee sur www.global-unions.org/pdf/ohsewpQ_7a.EN.pdf)
Piste 2 Droit pour tous les travailleurs à une formation DDTous les travailleurs (pas seulement les cadres) ont accès
pendant leur travail à une formation d’ouverture aux enjeux du DD avec aussi des retours concrets (exemple énergie, lighting,…)
Bénéfices attendus pour les travailleurs Se qualifier et acquérir des compétences nouvelles, à
usage professionnel et privé Développer la satisfaction au travail par la meilleure
connaissance de l'entreprise. Comprendre les enjeux sociaux environnementaux, et se
sentir ainsi respecté et reconnu au-delà de sa position de salarié
Piste 3 Participation aux concertations extenes de l’entreprise sur environnement et l’énergie (accords de branche) Lors de conflits liés à la pollution, les travailleurs sont
souvent pris en ‘otages’ d’un dialogue ‘emploi’ contre ‘environnement’
La substitution des substances dangereuses tant pour l’entreprise (groupe) que pour la cascade des sous-traitants et fournisseurs est un enjeu syndical majeur
L’utilisation efficiente des ressources et de l’énergie est un élément de + en + déterminant pour la valeur ajoutée de l’entreprise
(exemple : concertation tripartite avec syndicats sur émissions CO2 en Espagne)
Piste 4 Négocier des plans de mobilité
Effet sur le pouvoir d’achat (meilleur remboursement des frais de transports en commun , économie d'une voiture dans les ménages)
Effet sur l'accès à l'emploi à des travailleurs non motorisés (possibilité de se rendre sur un lieu de
travail autrement qu'en voiture) Effet sur la santé (évite aux travailleurs des pertes
de temps et du stress liés à la congestion des routes.)
(exemple : obligation belge)
Piste 5 Achats durables dans l'entreprise
Négocier des achats durables et éthiques c’est mettre en place une solidarité concrète avec d'autres travailleurs (agriculteurs, ouvriers, artisans)
Exemple : campagne vêtements propres
www.fairtrade.be www.gidsvoorduurzameaankopen.be, www.milieukoopwijzer , www.oww.be
Piste 6 + de sécurité pour la sous-traitance et de respect de l'environnement
La loi souvent règle la responsabilité du maître d’œuvre, qui est obligé d’informer correctement les sous-traitants qui viennent effectuer pour lui des travaux dans l’entreprise.
Néanmoins, dans de nombreux pays, la loi comporte certains flous quant à la manière d’assurer cette responsabilité.
Exemple : convention REPSOL en Espagne
Piste 7 Des fonds de pension éthiques
Une CCT sectorielle peut stipuler que les fonds de pension investissent de façon éthique. A titre de cogestionnaires, les syndicats peuvent veiller au respect de ce principe
Exemples : label Ethibel
Piste 8 Fonds de solidarité
Certaines CCT ou des CE d’entreprise décident l’octroi directe de fonds de solidarité Exemple : Fonds de solidarité internationale (CCT
2007/2008 Industrie alimentaire) Epargne réaffectée de manière sociale et solidaire et
Fonds d’Investissement en DD au Québec, les micro-credits
Comment faire bénéficier les travailleurs des gains substantiels permis par les efforts collectifs en matière d’économie d’énergie ? Pourquoi pas un fonds social «économie d’énergie» avec droit de tirage des travailleurs pour isoler ou assainir leur logement ?
Piste 9 Un certificat de responsabilité sociale
Tous les pays n’adhèrent pas aux conventions de l’OIT.
Les syndicats peuvent inciter les entreprises à obtenir un certificat de Responsabilité Sociale pour impliquer les différnets sites de l’entreprises, sous-traitants et fournisseurs
Exemple : SA 8000, label social belge, …
Piste 10 Renouveler les formes de concertation
Développer des concertations ‘multistakeholders’ L’accord sur le café: associations + syndicat + 4
multinationales Développer des concertations préventives entre les
travailleurs, la soustraitance ,les riverains projet RISE (B)
Nouer des alliances entre usagers et travailleurs TSE et CNE Banque: accès aux services bancaires
Nouer des alliances entre syndicats et ONG Dossier Reach