n° 5037. - fusion de societes - participation de la ... · dans la societe absorbante. des raisons...
TRANSCRIPT
![Page 1: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/1.jpg)
._ 61 -
N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la societe absorbee dans la societe absorbante.
1. L'absorption d'une societe par une autre s'analyse, dans le
chef de la societe absorbante, en urie augmentation de capital
destinee ~ remunerer les apports de la societe abs:orbee.
Dans l'hypothese ou la societe absorbee possede une participa- ·
tion dans la societe absorbante, le probleme particulier qui se pose
consiste a determiner si la societe absorbante doit augmenter son
capital pour remunerer }' apport de ses propres actions, OU si elle
peut vialablement remettre ces actions qui ont fait I' objet de l'ap
port, aux actionnaires de la societe absorbee sans proceder a une
augmentation de capital.
2. La difficulte peut etre evitee, soit que la societe absorbee
realise sa participation avant l'apport, soit qu' elle distribue elle
meme a ses actionnaires, avant la fusion, . les titres qu' elle possede
dans la societe absorbante.
Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas
echeant, les repercussions qu'une vente pourrait avoir au point de
vue de la majorite au sein de la societe absorbante, militent sou
vent en faveur du rejet de l'un ou l'autre processus.
Pour eviter que la societe emettrice devienne proprietair.e de
ses propres actions ou parts sociales, la doctrine fran~aise preco
nise d' exclure de I' apport les titres de la societe absorhante, les
quels titres seront joints a ceux qui sont crees en remuneration des
apports, en vue de leur distribution aux actionnaires de la societe
absorbee ( 2) . L' administration beige de I' enregistremen t con teste qu' ii puisse
y avoir fusion s' ii est .procede de la sorte, pour le motif que les
actionnaires de la societe absorbee, ou tout au moins tine partie
d' entre eux, trouvent leur droit de recevoir des titres de la societe
absorbante dans une decision de la societe absorbee . et non pas
dans un apport effectue par une societe clans I' autre ( 3).
En 1' absence d' une definition leg ale de la fusion, c' est peut-etre
beaucoup s'avancer que de nier clans ce cas !'existence d'une
(I) Rapport du nombre de titres necessaires pour obtenir · une action de la societe absorbante.
(2) MOULIN, Le rachat par une societe de ses prop1·es titres, p. 122; Colloque intern. de Dr. europ. 1961, Rapport du Prof. G. BRULLIARD, p. 9 bf.
(3) Ree. Gen., 1959, n° 20.072, par. 32, p. 149·
No 5037
5
![Page 2: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/2.jpg)
- 62 -
fusion, avec la consequence de priver la societe absorbante du
benefice des dispositions favorables du Code des droits cl' enregistrement.
11 s'agit en realite d'une modalite de la realisation d'une opera
tion qui a toutes les caracteristiques d'une fusion. Ces caracteristiques sont les suivantes : ( 4)
l' existence de deux societes;
I' expression d'une volonte deliberee de fusionner;
la disparition de la societe fusionnee par suite de I' apport;
le maintien de la qualite d'associe clans le chef des action
naires de la societe absorbee.
3. L'absorption d'une societe qui possede des actions de la
societe absorbante est un moyen pour cette derniere cl' entrer en
possession de ses propres titres.
Le cas presente des'. analogies avec celui du rachat par une
societe de ses actions (5). La similitude est cependant loin cl' etre
complete. Dans l'un cas, il s'agit d'un achat, clans l'autre cas d'un apport.
Dans le premier cas, comme en vertu de I' article 2 06 des' lois
coordonnees sur les societes commerciales, le paiement du prix
cl' achat des litres ne peut entamer ni le capital ni la reserve legale
constituee, le probleme se limite a I' emploi de benefices, a moins
que le rachat s~ realise en vue cl' operer une reduction de capital. Dans l'hypothese de I' absorption, la difficulte consiste a fixer
les modalites de la remuneration des apports.
Diverses considerations formulees a propos du rachat d'actions;
portent a faux lorsqu' on cherche a les etendre a I' absorption.
4. Le droit pour une societe cl' acquerir ses propres t_itres n' est
pas conteste. II n' existe aucune restriction legale autre que I' arti:
cle 206 des lois coordonnees sur les societes commerciales en
(4) P. DEMARET, «Les fusions de societes et les lois d'impots sur les reve· nus »,Rev. Fisc., 1960, n108 59 a 71, pp. 291 et SS.; J. BAUGNIET, «La fusion de societes en dmit beige», Rev. Prnt. Not., 1961, pp. 303 et ss.; MOULIN, op. cit., p. 122 : Les actions ne sont pas exclues de l'apport clans· le but d·e restreindre les effets de la fusion, mais ·pour une raison purement juridique.
(5) La question des fusions est generalement abordee clans le cadre des etudes concernant le rachat de titres : MOULIN, op. cit., pp. 121 et ss., 1931; A. RAUCQ, « Une societe -anonyme peut-elle etre proprietaire de ses actions?», Ann. Not., et Enr., 1934, p. 460; A. RAUCQ, Fo'rmulaire annote de procedure commerciale, t. Jer, Societes· commerciales, n° 242, par. 8; Mme VEAUX-FOURNERIE, L'acquisition de ses propres actions ou !Parts sociafos par la societe emettrice, 1953, n° n4.
N° 5037
![Page 3: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/3.jpg)
- 63 -
matiere de rachat de titres ( 6). Cet article fournit par ailleurs un argument a contrario ( 7) en f.aveur de la liceite du rachat d' actions
et, par extension, de I' acquisition par une societe ~.e ses propres
titres.
La doctrine a cependant subordonne le rachat a certaines condi
tions ( 8). a) On a insiste sur l' obligation de respecter l' egalite entre les,
actionnaires ( 9), c' est-a-dire d' assurer a chacun d' eux des chances
eg;ales d' obtenir le « remboursement » de leurs titres ( 10).
Pareille obligation, que I' on rattache au jus fraternitatis ( 11), est
(6) Liege, 26 mai 1932, Revue, 1932, n° 3257, p. 303; P. COART-FRESART, «Du rachat de ses propres actions par une societe anonyme », Annales de Dr. et Sc. pol., 1937/38, t. VI, p. 146 A. Legislation. La loi du 17 octobre 1945 etablissant un impot sur le capital preyoit l'hypothese ou une societe possederait ses propres titres. Ces titres n'entrent pas en Jigne de compte pour la determination du nombre d'actions a creer au profit de l'Etat comme impot sur le capital (art. 6, par. 3).
(7) Ch. del MARMOL, « L'achat par une societe anonyme de ses propres actions», Revue, 1955, rr> 45II, p. 263, par. 6.
(8) Ces conditions sont synthetisees dans le rapport de la Commission bancaire, exercice 1947 / 48, p. 63, note 2.
(9) J. VAN DER STEGEN, «Le rachat par une societe anonyme de ses propres actions a I'aide de benefices», Jur. comm. des Flandt-es, 19'36, rr> 56291
p. 133; D. S., « Une societe peut-elle affecter ses benefices disponibles a l'achat de ses pro.pres actions?», A mz,, Not. et Enr., 1937, p. 29; M. ANSPACH, « Rachat des actions au moyen de benefic·es libres • Remise de ces titres en circulation», id., 1948, · n° 10, p. 166; RESTEAU, Traite des societes anonymes, t. IV, n° 2005, p. 245; FREDERICQ, Traite de Dr. comm. belge, t. V, no 435~ p. 755; R epert. prat. D1·. belge, yo S. A., n° 1838; MOULIN, op. cit., p, 36.
(10) Le rachat n'est pas juridiquement par I ant un remboursement d'apports; del MARMOL, op. cit. Revue, 1955, pp. 257, par. 2 et 268, par. n, a moins qu'il ne constitue une modalite de la reduction du capital, rendant applicable !'art. 72, al. 3, des L. C. soc. comm. Le prix paye est parfois assimile a un rem.boursement anticipe et forfaitaire de la part d'associe que les titres representent, Comm. ·bancaire, Rapport 1947/48, p. 67i VAN RYN, t. Jer, n° 510, p. 346; selon la Cour de cassation, si !'operation conclue entre la societe et l'actionnaire constitue dans le chef de celui-ci une yente, elle ne peut etre consideree dans le chef de la societe que comme un achat et non comme une distribution de benefices ou un remboursement total ou partiel du capital social. Cass., 6 octobre 1959, Revue, 1960, n° 4880, p. 65. VAN RYN et VAN OMMECLAGHE, «La nature de l'operation par laquelle une societe acquiert ses propres actions», Rev. Grit. de Jur. Beige, 1960, p. 312 ;. Voir la note detaillee de MM. J. de LONGUEVILLE et L. DEFOSSET et la jurisprudence citee, sous Brux., 8 janYier 1959, Revue Fisc., 1959, p. 546. Juridiquement, selon Mme VEAUX-FOURNERIE, le remboursement de !'action ne se dongoit que si la societe preleye sur son capital (op. cit., n° 306). Le rachat serait un procede original de mutation (no 3II)-
(II) G. RIPERTi Traite elementaire de droit commercial, 1959, t. Jer no 623, p. 331; Le principe d'egalite ne serait pas d'ordre public, CORDONNIER, Journ. Soc., 1924, p. 417; cfr art. 1853 et 1855 du C. ciY.; Rep. prat. Dr. belge, yo Contrat de societe, n°8 336, 362 et 363; l'egalite permet a chacun de ceux qui participent au contrat de societe de s'irnmiscer dans Ja gestion des interets communs; id., n·; 409 : Le jus fraternitatis se justifie par un besoin d'e collaboration· en yue de mener a bonne fin une reuYre commune. La yente par un actionnaire de ses titres va a l'encontre d.e ce principe de collaboration.
No 5037
![Page 4: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/4.jpg)
- 64 -
particuliere au rachat d' actions et ne saurait viser le cas de I' absorp·
tion. On imagine mal, en effet, que sous le pretexte de maintenir
cette egalite de traitement, tous les actionnaires de la societe absor·
bante puissent pretendre faire apport de leurs titres aux seules fins
d' en recevoir de nouveaux.
b) On subordonne aussi la liceite du rachat de titres a la sauve~
garde des droits des tiers ( 1 2) . I
Or, les droits des creanciers de la sofiete absorbante ne sont
generialement pas mis en peril, car l' avoir social de cette societe
tend a s' accroitre du montant net des apports ( 13). La loi du
30 juin 1961 concernant la verification des apports en nature insti~
tue une garantie supplementaire clans l'inten~t des actionnaires et
des creanciers.
L' apport par la societe absorbee de titres de la societe absor~
bante n' a cl' autre consequence que d'influer sur !'importance de
I' accroissement du patrimoine de cette derniere ( 14).
Quant aux creanciers de la societe absorbee, ils trouvent clans
I' ac!ion paulienne le moyen de sauvegarder leurs droits ( 1 5).
c) On a emis des opinions divergentes quant au pouvoir du
conseil d' administration ( 16) de racheter les titres de la societe.
Ces controverses sont etrangeres au cas de fusion.
Le fait que la societe absorbee possede des titres de la societe
absorbante n' a aucune incidence sur la determination de I' organe
competent pour decider de I' absorption.
Les conditions edictees par la loi OU formulees par la doctrine
concernant le rachat d' actions sont done inapplicables clans l'hypo~
these de l' absorption.
5. Si l':apport porte sur toute la situation active et sur tout le
passif de la societe absorbee qui possede des actions de la societe
(12) del MARMOL, op. cit. Revue, 1955, p. 271, par. 14. (13) VAN RYN, op. cit., t. Je~·, n° 858. (14) Sur la determination de la valeur de ces titres apportes, n° II.
(15) VAN HOUTTE, « L'apport en societe de l'avoir social total ou partiel d'une societe en liquidation», Revue, 1935, n° 3420, par. 7, p. 5; VAN RYN, op. cit., t. Jer, n° 860; Cass., 5 juin 1902, Pas., 1902, I-264; J. BAUGNIET, op. cit. Rev. prat. Not, 1961, pp. 314/315,
(16) Dans la pratique, des clauses statutaires ont ete amenagees en vue de permettre au conseil de realiser le rachat des titres de la societe emettrice : RAUCQ, op. cit. Ann. Not. et Enr., 1934, p, 456; ANSPACH, id., 1948, p. 165; VAN DER STEGEN, op. cit.; lter. comm. Flandres, 1936, n° 5629, pp. 132 et suiv.; P. COART-FRESART, op. cit.; Ann. Dr. et Sc. pol., 1937/38, p, 165: E. CEREXHE, «Le rachat par une societe de ses propres actions en droit beige, fran9ais et allemand », Revue, 1962, n° 5027, par. 19.
N° 5037
![Page 5: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/5.jpg)
-65-
absorbante, celle~ci devient, comme nous I' avons signale, proprie~ taire d' actions qu' elle a emis:es.
Une importante partie de la doctrine pretend que ces actions
doivent etre annulees par la societe absorbante ( 1 7).
D'autres eminents auteurs admettent, au contraire, qu'une societe place ses benefices dans I' achat de ses propres titres.
« Si le capital et la reserve ]egale sont intacts, I' application d'une partie qes benefices a des rachats d'actions n'implique ni une faute
morale, ni un danger plus grand que I' emploi a acheter d' autres
valeurs'. » ( 1 8)
La doctrine ( 1 9) a invoque la confusion decoulant de la reunion des conditions prevues a !'article 1300 du Code civil pour justifier
I' obligation qu' aurait la societe absorbante d' annuler les titres
rentres en sa possession. L'argument n'est pas determinant. L'article 1300 du Code civil
s' applique aux creances. Or, I' action n' est pas une creance ( 2 0} ;
le droit de I' actionnaire au remboursement de I' apport ne devient un droit de creance qu'une fois la liquidation entree dans sa phase
distributive ( 2 1 ) . En outre, la confusion a un effet suspensif et non extinctif ( 2 2}.
(17) A. ROUSSEAU, Des societes comftne1·ciales fran~aises et etrmtigeres, 1902, t. Jer, n'°2515bis; LAGARDE, «Des reserves investies en titres emis par l'entreprise », Rev. crit. legisl. et jur., t. LVll, 1937, p. 250, n° 7; VAN RYN, op. cit., t. Jer, n° 510; opinion de MMes MARCO et RESTEAU. citee par Ch. del MARMOL, op. cit. Revue, n° 44H, p. 273, renvoi (1); CEREXHE, op. cit., Revue, 1962, n° 5027, par. 21.
(18) WAUWERMANS, Manuel, 1933, n° n76, p. 706; GILSON, Les modifications aux statuts des societes anonymes, n° 174, p. 266; WAUWERM'ANS cite a l'appui de son opinion M. E. PIRMEZ, Oh. Repres., seance du 12 mai 1886; GUILLERY, Comm. tegisl., t. III, p. 59, co.nitra VAN DER STEGEN, op. cit. Jur. comm. Flandres, 19361 nP 5629, p. 131. Les travaux preparatoires n'abordent pas la question.
(19) HOUPIN et BOSVIEUX, Traite general theorique et pratique des societes civiles et commerciales, n° 491, p. 576; J. COPPER-ROYER, De la fusion des societes, pp. 98 et ss.
(20) RESTEA.U, op. cit., t. Jer, n° 578; Rep. pmt. Dr. be1lge, v0 Soc. anonymes, n° 448; VAN RYN, op. cit., t. Jer, nP 510, p. 345, n° 520, p. 351; RIPERT, op. cit., t. Jer, n° 1413, p. 667; MOULIN, op. cit., pp, 32/33.
(21) :deJ MARMOL, op. cit., Revue, 1955, p. 273, par. 16; DE PAGE, Trnite elem., t. v, n° 715, p. 634 : « L'associe n'a pas de droit actuel dans l'avoir social».
(22) LAURENT l'explique parfaitement dans ses P1·indpes de Droit civil, t. XVIII, n° 489, p. 500 : «La creance n'est pas eteinte, elle subsiste, mais c'est une creance inutile, inefficace, puisque le debiteur contre lequel elle devrait s'exercer se confond avec le creancier »; PASSELECQ, Novelles, Droit commercial, t. III, n° 6516; LYON-CAEN et RENAULT, Traite de Droit commercial, t. II, no 886; DE PAGE, op. cit., t. III, n° 694; THALLER E., Traite ele-men,t. de droit commercial, 1931. n° 666; contra LAGARDE, op. cit., Revue ct·it. tegisl. et fur., 1937, n° 6, pp. 147 et ss.
No 5037
![Page 6: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/6.jpg)
- 66-
L' exercice du droit se trouve temporairement paralys:e. La deter
mination des consequences de la remise en circulation des titres a sans doute suscite des controverses. Mais on s' accorde a dire que
la confusion cesse avec effet retroactif ( 2 3). La societe conserve cependant les a vantages pecuniaires attaches a I' action durant la
periode ou celle-ci se trouve clans son portefeuille (24).
La theorie de la confusion, telle qu' elle derive de I' article 1300 du Code civH, est impuissante a justifier l' obligation d' annuler les
titres rentres en possession de la societe emettrice.
6. Un autre argument est tire de l' article 2, dernier alinea, des
lois coordonnees sur les societes commerciales.
« La societe constitue une individualite juridique distiilcte de celle de ses associes:; elle a une personnalite propre, independante
de la personne des associes. En devenant proprietaire de ses
actions, la societe devient son propre actionnaire, sa personnalite
se confond, au moins pour partie, avec celle de ses aS'socies. » ( 2 5)
· Ce raisonnement, fonde sur des deductions en apparence deci
sives, n'emporte cependant pas la conviction.
7. II s'indique de preciser tout d'abord le sens de la phrase
selon laquelle la societe qui acquiert une partie de ses titres con.fond, en devenant actionnaire d' elle-meme, sa personnalite (26)
avec celle de ses associes.
(23) LAURENT, op. cit., t. XVIll, n°s 506 et ss.; DE PAGE, op. cit., t. III, nc 697; et t. IV, n° 453 (en matiere de cession de droits successifs); BAUDRYLAOANTINERIE, Obligation 1s, t. III, n° 19!4; cfr cependant A. DORFF, « L'a remise en circulation d'obligations rachetees par la societe qui les a emises », Revue, 1934, n° 33541 p. 15; COART-FRESART (op. cit., Ami'. Dr. et Sc. pol., 1937/38, p. 159), conformement a l'opinion de JOSSERAND (Cours de dr. civ., t. II, n° 948), et de PLANIOL et RIPERT (Traite prat. de Dr. civ., t. VII n° 1300), pretend que si la confusion prend fin par un fait nouveau, telle la revente, Ja remise en circulation des titres serait impuissante a restituer aux actions leur efficac:ite primitive.
(24) D.S., op. cit., Ann. Not. et Em·., 1937, n° 22, p. 29 : Les titres. 'acquis font partie du portefeuille· de la societe, qui profite des dividendes; THALLER iet PERCEROU, Traite elem. de dr. comm., t. Jer, n° 665; MOULIN, op. cit., p. III; Trib. civ., du Havre, 15 fevrier 1952, cite par Mme VEAUX-FOURNERIE, op. cit., n° 245, p. 197; VAN DER STEGEN, op. cit. Jur. comm. Flandres, 1936, p. 123; contra ANSPACH, op. cit. A n·n. N of. et Enr., 1948, n° 8, p. 166; J. ESCARRA, C-om·s de dr. commerc., 1952, n° 888, p. 562; RIPERT, op. cit.,
· n° 1032. (25) A. RAUCQ, op. cit. Ann. Not. et Enr., 1934, p. 457; id., For'mttlaire
amtote de procedure com,m., t. Jer, Societes commerciales, n° 242, par. 2; Com· . mission bancaire, Rapport 1947 /1948, p, 66. ·
(26) DE PAGE, t. Jer, nP 233 : la personnalite est la situation qui caracterise la personne, c'est-a-dire tout etre capable :d'avoir des droits et obligations; cfr J. DABIN, Le droit subjectif., pp. 107 et 108 sur l'emploi des termes « sujet de droit » de preference a ceux de personne et personnalite.
No 5037
![Page 7: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/7.jpg)
-67-
A la condition que I' on admette que la societe devient son
pro pre actionnaire, ii s' ensuit qu' un des actionnaires (a savoir la
societe) aurait la meme personnalite que la societe, ce qui est
contraire au texte de I' article 2 des lois coordonnees sur les societes
commerciales, aux termes duquel la societe a une individualite
distincte de c:elle de ses associes. La portee de I' article 2 semble toutefois etre differente. Quand
il est declare que la societe constitue une individualite juridique
distincte de celle de ses associes, la loi entend simplement dire que la societe a la personnalite morale (2 7). Cette personnalite est
destinee principalement a assurer la separation du patrimoine
social decelui des actionnaires (28).
En acquer.ant ses propres titres, la societe ne pourrait « confon
dre sa personnalite avec celle de ses associes » que pour autant
qu' elle devienne elle-meme actionnaire, qualite qu'une importante
partie de la doctrine s' acc.orde a lui refuser ( 2 9).
Des lors, a moins de recevoir la theorie germanique de la per~
sonnification, selon laquelle le titre est sujet de droit ( 3 0), on ne
voit pas comment la personnalite de la societe emettrice pourrait,
par le fait de I' acquisition de ses titres, se confondre avec celle de
ses actionnaires ( 3 1 ) .
8. D' apres I' argument tire de I' article 2 des lois coordonnees
sur les societes commerciales, en devenant proprietaire de ses
actions, la societe deviendrait son propre actionnaire. A supposer
(27) Mme VEAUX-FOURNERIE, op. cit., nP 318, note 2 : entendre la for· mule a la lettre·, c'est la pousser a l'absurde.
(28) NYSSENS et CORBIAU, Traite des Soc. comm., t. Jer, n° 370; VAN RYN, op. cit., t. Jer, n° 354, p. 249.
(29) cfr infra n° 8. (30) W:AHL, Traite theor. des titres au porteur fran<;ais et etrangers, t. Jier,
n° 246; MOULIN, op. cit., p. 243; LAGARDE, «Des reserves investies en titres emis par l'entreprise », Rev. crit. de Legisl. et de Jur.,. t. LVII, p. 244, n° 5; LARGUIER J., La notion de titre en droit prive, n° 220, p. 246; Mm:e VEAUXFOURNERIE, op. cit., n°s 48 et 3n : la societe est debitrice vis-a-vis du titre lui-meme, plus qu'a l'egard de son titulaire; PERCEROU, preface au livr'e d·e MOULIN, op. cit., p. x; A. DORFF, op. cit. Revue, 1934, n° 3354 : Le droit beige ne con9oit un lien juridique qu'entre deux personnes et ii n'y a aucune disposition de droit civil OU commercial qui permette d'attribuer a Ull dodument le pouvoir de lier un debiteur sans qu'il y ait un creancier.
(31) En possession de tous les titres qu'elle a emis, la sodiete conserverait sa personnalite. Elle deviendrait ingouvernable selon les regles legales et statutaires, et sa dissolution devrait etre prononcee sur la demande :d'e tout interesse, dans ies conditions prevues a l'art. 104 des L.C. sur les societes commerciales. On peut concevoir une societe ·sans actionnaires, d'un type nouveau. (Mme VEAUX· FOURNERIE, op. cit., n° 349).
No 5037
![Page 8: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/8.jpg)
- 68
meme que le hien-fonde de cette affirmation soit etabli, ii n' en decoule pas . qtie les' titres devraient necessairement etre annu
les (32). Au contraire, si la societe est devenue son propre actionnaire, elle se devrait: de conserver ses actions par devers elle en
vue de pouvoir exercer les droits qui y sont attaches ..
La these de la societe actionnaire d' elle-meme n' est cependant pas acceptable· ( 3 3) .
Aux ternies de l'article 1832 du Code civil, la societe est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent de
mettre quelque chose en commun clans le but de partager le benefice qui pourra en resulter. Les lois sur les ·societes commerciales
accordent aux societes commerciales visees a I' article 2 une indivi
dualite juridique distincte de celle des associes.
II resulte de la combinaison de ces textes que les actionnaires sont des sujets de droit distincts de la societe, reunis en vue de se
partager les benefices realises par cette derniere.
II existe deux modes de devenir actionnaire : lia souscription et I' entree en possession d' actions ou de parts sociales.
La qualite d'actionnaire s'acquiert en premier lieu a la suite d'un
apport qui opere le transfert a la societe des droits sur les biens apportes (34). II ne se con~oit pas, des lors, qu'une societe se
fasse a elle-meme un apport, oar le bien qu' elle pourrait apporter
est deja affecte a I' objet social (35). Elle ne saurait, par ce moyen,
devenir · son propre actionnaire ( 3 6) . La qualite d' actionnaire decoule ens:uite de I' acquisition d' actions
ou de parts de la societe.
(32) A. RAUCQ, op. cit. Ann1, Not. et Em·., 1934, p. 459. Les actions devraient etre annulees et remplacees par des actions de jouissance.
(33) RIPERT, op. cit., t. Jer, n° 1032; ESCARRA, op. cit., n° 888, p. 56~; VAN RYN, op. cit., t. Jer, n° 510.
(34) VAN RYN, op, cit., t. Jer, n° 332, p. 232. (35) RIPERT, op. cit., n° 636, p. 328. (36) La souscription par la societe, lors de sa constit1,1tion, n'est pas legale
ment possible,. soit qu'il s'agisse d'une fondation instantanee·, la societe ne pou.vant etre formee qu'une fois les titres souscrits, soit d'une fondation par voie de souscription, car alors les fonds necessaires a la souscription devraient provenir d'autres souscripteurs, ce qui rendrait la souscription fictive : M 1me VEAUXFOURNERIE, op. cit., n° 49. L'augmentation de capital par incorporation d'e reserves entrainerait egalement un apport des actionnaires : V. MARTENS, « Societes anonymes, Incorporation des reserves au capital», Rev.. Prat. Not. Beige, 1949, n° 2318, pp. 201 et ss.; contra Mme VEAUX-FOURNERIE, op. cit. : Une societe pourrait soit acheter des droits de souscription, soit en deta.cher de ses titres qu' elle aurait en portefeuille, en vue de souscrire ( n° 50). Ge serait transformer in parte qu~ l'augmentation prevue par apports exterieurs en augmentation de capital par incorporation de reserves (n° 293).
No 5037
![Page 9: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/9.jpg)
_. 69 -
F aut-il inverser la proposition, et soutenir que la propriete ou
la possession reguliere d'un titre confere ineluctablement a la per
sonne qui le detient la qualite d' actionnaire? Ce serait, semble-t-il,
une erreur certaine clans le cas ou la societe vient a posseder ses
propres titres.
Cette maniere de voir trouve son fondement clans l' economie de
la loi sur les societes commerciales.
Dans la conception du legislateur, qui s' appuie sm la theorie de
la fiction des personnes morales ( 3 7), la societe n' est pas une fin
en soi ( 38). La realisation de son but social se poursuit clans l'inte
ret des « tiers » associes. La societe qui serait son propre action
naire tendrait a avoir une fin en soi clans la mesure ou elle influerait
sur ses destinees. 11 n' est pas possible que la societe se gouverne
elle-meme ( 3 9) . C' est la raison pour laquelle une societe ne peut
disposer du droit de vote afferent aux titres qu' elle a acquis.
Or, le droit de vote est une prerogative fondamentale de l' actipn
naire ( 40). Ne pas le reconnaltre a la societe revient a denier a celle-ci la qualite d'actionnaire.
Les actionnaires doivent, pour permettre a la s10ciete de fonc
tionner conformement au droit positif, former un groupe de per
sonnes distinctes· de la societe ( 4 1 ) .
(37) NYSSENS et CORBIAU, op. cit., t. Jer, n° 354; BELTJENS, Encyclopedie de droit co'tnmercial, t. II, p. 159, art. 2, par. II; FREbiERICQ, op. cit., t. IV, n° 65.
(38) DABIN, op. cit., p. 145 : « L'association n'a pas d'existenc'e "pour soi". Elle est au service de personnes individuelles appelees a recueillir profit du but social qu'elle poursuit. » Selon l'art. 1833 C. civ., toute societe. doit etre contractee pour l'interet commun des parties. Dans la theorie institutionneHe : la societe est un organisme ne .pour poursuivre ses fins propres (FREDERICQ, op. cit., t. IV, n° 62), ce qui ne signifie pas qu'elle ne puisse le faire au profit exclusif de ses actionnaires, dont la personnalite est distinc.te de la sienne.
(39) D.S., op. cit. Ann. Not. et Enr., 1937, n° 21, p. 29; VAN DER STEGEN, op. cit. Jur. comm. des Ffondres, 1936, n° 5629, p. 123; MOULIN, op. cit., p. n2.
(40) VAN RYN, op. cit., t. Jer, n° 521. (41) Les personnes morales ont leur origine clans l'individu, elles redescendent
clans leur fonctionnement jusqu'a l'individu : GARY, Les notions d'unive1·salite de fait et d'un~versalite de droit, p. 205. Une societe qui serait son propre actionnaire devrait voter par le canal de ses organes. Dans le cas extreme de la societe proprietaire de tous ses titres ou tout au moins detentrice de la miajorite de~ voix, les organes sociaux seraient appeles a approuver leur propre gestion. L'argument n'est cependant pas decisif, puisque par une anomalie de notre legislation, l'actionnaire administrateur ou commissaire peµt voter sa propre dechar.ge. La raison invoquee est que les administrateurs et commissaires agissent souvent clans la pratique comme mandataires d'autres actionnaires. Ceux-ci, .par le fait de ce mandat, approuvent leur gestion. Rapport Ch., Doc. Parl., 1910/wn, p. 2·39; W AUWERMlANS, op. cit., n° 714; FREDERICQ, op. cit., t. V, n° 502, p. 715. Cette situation tend a renforcer l'absenteisme aux assemblee·s.
Le conseil se designerait lui-meme, ce qui equivaudrait a rendre inutile le role d'actionnaire de la societe.
No 5037
![Page 10: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/10.jpg)
- 70
9. Des lors que la societe qui rentre en possession d' actions
qu' elle a emises ne se trouve pas vis-a-vis d' elle-meme dians la
situation d'un actionnaire, les titres detenus par elle ont, a son
egard, la valeur d'un instrumentum ( 42). Us ne representent plus
un droit d'associe ( 43) durant la periode ou ils restent la pro
priete de la societe, clans la mesure tout au moins { 44) ou ce droit
d' associe consiste en prerogatives indispensables au fonctionne
ment de la societe ( 4 5).
En acquerant ses titres, la societe entre en possession d'instru
ments de preuve qui constatent I' existence d'un apport qui lui a ete
effectue anterieurement. La representation de son capital n' en est
pas affectee. En effet, la division de celui-ci en un certain nombre
d' actions, prescrite par I' article 41 des lois coordonnees sur les
societes comrnerciales, ne saurait etre modifiee sans !'intervention
d'une assemblee generale extraordinaire, sauf disposition contraire
des statuts ( 46). Aussi longtemps que cette assemblee n' en decrete
pas I' annulation, les titres acquis par la societe emettrice continuent
de subsister.
II n' existe, a notre connaissance, aucune autre cause juridique
d'annulation pour autant que les titres soient reguliers(47).
Les actions remises: en circulation ont les memes attributs
qu' avant leur acquisition par la societe qui les a emises. Cette solu-
(42) La loi est clans ce sens : RESTEAU, t. J'er, n° S7S, p. 367; Cass., 7 juin I9SI, Pas., I9SI, I-679; P. DEMEUR, «Du droit pour les porteurs cl' actions irregulieres de participer a l'assemblee generate de la societe », Revue, r924, n° 2s4s, p. 99; id., note sous Brux., I3 juillet I9S3, Revue, I9S4, n° 44rn, p. 246; BEATSE, «Soc. anonyines · Augmentation de capital», Revue, r927, nP ·2806, p. 302 f FREDERICQ, op. cit., t. IV, n° 33r, p. srs, contra VAN RYN et HEENEN, Principes, t. II, n°6 . r3or-r3ro.
_(43) Sur l'focorporation des droits de l'associe aux titres, VAN RYN et HEENEN, op. cit., t. II, n°6 r3or-r3ro; selon RIPERT (op. cit.), la feuille de papier n'a, par elle-meme, aucune valeur, elle n'est pas un meuble corporel : elle ne vaut que comme titre (n° r6or, p. 75r), mais est soumise au regime de'l meubles corporels SOUS reserve d'une regJe differente en CaS de perte OU de vol ( n° ro29, p. 499) •
(44) II s'a~it de prerogatives d'ordre intellectuel et non pecuniaire, Madame VEAUX-FOURNERIE, op. cit., n° 3r8, p. 379; MOULIN, op. cit., pp. 3r et ss. et ns.
(4S) VAN RYN et HEENEN, op. cit., t. II, n°6 r297, p. 283 : l'action est avant tout le titre d'un droit d'associe, c'est-a-dire d'un droit qui s'exerce normalement non pas contre Ja societe, mais en vue de perm:ettre le fonctionnement de cette derniere.
(46) del MARMOL, op, cit., Revue, I9SS, n° 4S7I, par. r7, p. 274. (47) Dans le cadre de notre etude ii est sans interet de rechercher s'il y a
<< remboursement anticipe et' forfaitaire » de la mise de l'associe comme dans l'hypothese d'un rachat de titres ( cfr n° 4, renvoi IO), puisqu'on ne peut assimiler un apport ,a un remboursement.
No 5037
![Page 11: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/11.jpg)
..,- 71 -
tion se justifie par le besoin de securite dans la circulation des
actions et par la regle de l'inopposabilite des exceptions en matiere
de titres negociables ( 48).
1 0. Le maintien dans le portefeuille de la societe de titres rache
tes emis par elle pose des problemes juridiques difficiles a resou
dre en l'iabsence de textes legaux. Le danger de speculations et
d' abus ( 49)' conjugue a I' incertitude des solutions preconisees,
explique le discredit clans lequel est souv.ent tenu le rachat de
titres ( 5 0). L' annulation des actions rachetees constitue un pallia
tif a cette situation ( 5 1 ) . Les memes difficultes et les memes dangers ne se retrouvent
pas, comme on serait parfois tente de le croire, clans le cas ou la
societe absorbee apporte sa participation clans la societe absor
bante. Les operations de fusion et de rachat sont absolument dis
semblables; on ne pourrait trop insister sur ce point.
Si I' on examine l'hypothese ( 5 2) peu courante selon laquelle
les titres apportes sont joints aux titres nouveaux pour etre remis
aux actionnaires de la societe absorbee, on aperc;oit que nombre
de problemes souleves par le rachat de titres ne se posent pas en
cas de fusion. La societe absorbante n' est pas appelee a voter avec ses propres
titres, puisqu' elle ne les possede pas1 encore au moment ou son
assemblee generale prend la decision de fusionner. Les difficultes
connexes a la reunion d'une assemblee generale se trouvent en
consequence eliminees (articles 7 0 a 7 4 des lois coordonnees Sur
(48) Le tire .peut remettre en circulation une lettre de change, instrument de credit nominatif, apres l'avoir endossee. A fortiori doit-il en etre ainsi en ce qui concerne les titres au porteur qui ont un caractere anonyme. DORFF, op. cit., Revue, 1934, n° 3354, pp. r2/r3; COART-FRESART, op. cit. A1zn.. Dr. et Sc. pol., 1937/38, pp. rs8 a 164; Mme VEAUX-FOURNERlE: !'existence d'un titre de credit met obstacle a la confusion, op. cit., n° 308, p. 368; Sur I'inopposu.bilite des exceptions en matiere de titres ne·gociables, VAN RYN et HEENEN, op. cit., t, II, n°5 r3r6 et ss.
(49) RAUCQ, op. cit. Ann" Not. et Enr., 1934, p. 478; D.S., op. cit., id., 1937, par. 12, p, 27; ANSP A:CH, op. cit., id., 1948, n° 12, p. 167; Mme VEAUXFOURNERIE, op. cit., n° 298.
(so) RIPERT, op. cit., n° rn32 : Mieux vaudrait interdire aux administrateurs Pne telle operation.
(SI) Certains auteurs enumerent pourtant Jes avantages de !'operation et SOU•
haitent une reglementation legate de la matiere. del MARMOL, op. cit., Revue, I9SS, n° 4SII, par. 3, p. 2s9; ANSPACH, op. cit, Ann. Not. et Enr., 1948, n° 6, p. l6S THALLER se place au point de vue des creanciers, Traite elem. de Droit commerc., l93I, n°5 666 et ss.; Mme VEAUX-FOURNERIE, op. cit., nos 291 et suiv.
(s2) RAUCQ, Formulaire, t. Jer, Soc. Comm., n° 242, par. 8.
N° 5037
![Page 12: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/12.jpg)
- 72 -
les societes commerciales : oalcul de quorum, formalites de convocation, computation des votes).
L' obligation qu' aurait la societe absorbante d' offrir par prefe
rence a ses actionnaires les titres remis en circulation ( 5 3) ne
concerne pas le rachat de titres. A supposer qu' elle s' etende a la
fusion, la decision de fusionner prise par l'assemblee generale de la
societe absorbante implique une renonciation par les anciens actionnaires a leur droit preferentiel.
Lorsque les actions ne sont pas entierement liberees, la doctrine
reste partagee sur le point de savoir si le rachat est permis (54).
En cas de fusion, I' existence dans les .apports de la societe absorbee
d' actions de la societe absorbante non entierement liberees constitue une entrave certaine a la realisation de I' operation. Elle ne
permet pas aux dispositions d' ordre public de I' articl~ 5 2 des: lois
coordonnees sur les societes commerciales de sortir leur plein effet.
L' operation requiert, semble-t-il, de la part des actionnaires de la
societe absorbee, la souscription d'un engagement de liberer les actions qu'ils recevront en echange des titres de la societe absorbee, au fur et a mesure des appels de. fonds.
On a fait valoir par ailleurs contre le rachat que les droits atta
ches aux titres rachetes et conserves en portefeuille sont juridiquemen.t mal definis ( 5 5). La situation se presente differemment pour
la fusion. En effet, on peut pretendre a bon droit que la societe
(53) ANSPACH, op, cit. Ann. Not. et Enr., 1948, n°8 16 et 17, p. 169; selon VAN RYN (op. cit., t. Ier, n° 510) : En remettant les actions rachetees en circulation, la societe procederait a une emission de titres sans respecter les regles Jegales; LAGARDE, op. cit., Rev. crit. Leg. et Jur., 1937, n° 17, p, 260. Sur le droit de preference en cas d'augmentation de capital, MOULIN, op. cit., p. 113.
(54) Certains auteurs pretendent qu'une action non entierement liberee ne peut faire l'objet d'un rachat (VAN DER STEGEN, op. cit., Jm-. comm. des Fla#dres, 1936, n° 5629, p. 126), d'autres. que I' operation peut etre realisee a la condition que Ja societe dispose de reserves suffisantes qui seront incorporees au capital pour liberer l'appel de fonds (THALLER, op. cit., n° 666; MOULIN. op. cit., p. 63).
(55) La Commission bancaire est d'avis que si les titres rachetes ne sont pas annules, les droits attaches aux titres restants et a ceux emis ne seraient plus exactement definis, accrus par <<I' extinction» . des actions conservees en portefeuille ou par la paralysie temporaire des droits y atta~hes (contra ARTHUYS, T1·aite de Dr. rom-m., t. II, n° 644, p. 125; GILSON, op. cit., note 2, p. 255), ils seraient reduits a nouveau si celles-ci etaient remises en circulation.
La Commission bancaire demande « l'annulation des titres conserves en porte· fcuille » (Rappl)rt 1947 /1948, p. 67). Si les titres de la societe absorbante appor· tes par la societe absorbee sont joints a ceux crees en suite de la fusion pour etre distribues aux actionnaires de la societe absor-bee, il ne semble pas que 1'011
se trouve dans le cas de valeurs « conservees » en portefeuille.
No 5037
![Page 13: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/13.jpg)
-73-
absorbante devient proprietaire de ses titres pour un instant de
raison, puisque, des !'instant OU elle les re~oit, elle s' engage a les
remettre aux actionnaires de la societe absorbee. Aucune incerti
tude ne plane sur le statut des titres. Les droits y afferents restent
toujours exactement definis.
11 convient d' insister aussi tout particulierement sur la publicite
qui entoure ]a realisation des fusions, publicite renforcee par la loi
du 30 juin 1961 relative a la verification des apports en nature,
ce qui diminue le risque d'abus et de speculations.
11. Apres avoir etabli que, d'une part, il est licite pour une
societe d' acquerir ses propres titres et que, d' autre part, leur annu
lation ne s'impose pas necessairement, il convient d' examiner si la
societe absorbante est tenue d'augrnenter son capital pour remu
nerer l' apport de ses propres actions.
Les accords preliminaires a la fusion, intervenus entre les socie
tes interessees, ont arrete le nombre d' actions que la societe absor
bante remettra aux actionnaires de la societe absorbee, soit par
l' entremise de celle-ci, soit directement, en cas1 d' approbation de la
fusion par les assemblees respectives. Une fois la fusion approuvee,
ii importe peu aux actionnaires de la societe absorbee de savoir
quelle siera la provenance des titres qu'ils recevront en echange de
leurs actions.
Le probleme se cantonne, des lors, aux mesures que prendra la
societe absorbante pour procurer aux actionnaires de la societe
absorbee le nombre d'.actions prevu par l'accord de fusion. Ce
nombre est fonction de l'importance des1 apports qui lui sont faits.
Selon la formule de M. RIPERT ( 5 6), I' apport en societe est
l' operation juridique qui a pour but d' affecter le bien apporte a l' obj et social. II doit etre reel et effectif ( 5 7), et avoir une valeur
appreciable en argent ( 5 8).
Une valeur · pecuniaire s' attache a l' action, que I' on adopte la
(56) op, cit., n° 636, p. 328.
(57) CORBIAU, «De la fictivite et de l'exageration d'evaluation des apports en nature», Revue, 1904, n° 1495, p. 43; Rep. prat. Dr. beige, v° Contrat de societe, n° 219; FREDERICO, op. cit., t. IV, n° 33.
(58) NYSSENS et CORBIAU, op. cit., t. Jer, nP 68, p. 57; Liege, 2 mai 1933, Pas., 1933, Il-215.
No 5037
![Page 14: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/14.jpg)
-74-
these de la valeur bilantaire ( 5 9) OU celle de la valeur de realisa
tion ( 60). Logiquement, I' apport a la societe absorbante de ses
propres actions entralne, au meme titre que celui de tous autres
biens, une augmentation de capital et la creation d' actions nouvel- ·
les ( 61 ) . A supposer, pour prendre un cas extreme, que I' apport
consiste uniquement en actions ou parts de la societe absorbante,
il se produirait un simple echange titre pour titre, puisque ces
actions OU parts representent les memes droits ( 62).
II ne suffit cependant pas que I' apport ait une valeur appreciable
en argent. II faut encore qu'il ne soit pas fictif. On entend gene
ralement par la que pour etre valable, les obligations passiv.es le
grevant doivent laisser un. actif net a la societe ( 63).
Le caractere fictif existe aussi lorsqu'il est fait apport a la societe
de ses propres titres. Ces titres attestent I' existence d'un apport
anterieur dont il a ete tenu compte pour la fixation du capital
social. Ils ne constituent pas un apport nouveau pour la societe
dont I' avoir social n' est juridiquement pas affecte par une augmen
tation du nombre des titres qui le representent. Les actions qui
seraient cree~s le seraient sans contre-partie reelle ( 64). La societe
emettrait des actions OU parts relatives a une fraction de SIOn capital
deja representee ( 65). Aussi, les partisans de la these de 1' augmen-
(59) Selon cette these (LAGARDE, «Des clauses reservant l'agrement d'un tiers pour la cession de droits », Rev. crit. de Leg, et de Jur., 1928, p. 109; anno· tation sous Casimtion franc;aise · civil, 15 mars 1927, S., 1927, I-209, col. 3) : Une action ne peut avoir de valeur que dans la mesure oi:t elle confere a son titulaire un droit a une quote-part de l'actif social. Si l'action est rachetee, elle prend la place des fonds sociaux utilises pour le paiem1ent du prix. 11 s'ensuit que la quote-part d'actif a laquelle donnaient droit ces actions· se trouve absorbee; en consequence, meme si le :document qui representait l'action subsiste, i1 ne saurait avoir d'autre valeur que celle d'un morceau de papier.
11 en est autrement en cas d'apport, puisqu'il n'y a pas sortie de fonds sociaux, mais en quelque sorte echange de l'action ancienne contre une action nouvelle.
(60) Mme VEAUX-FOURNERIE, op. cit., n° 63 : essentiellement, lorsqu'elle fait l'objet d'une cotation en bourse, l'action possede une valeur de realisation dont le chiffre traduit Fopinion portee par le public sur la situation sociale,. et qui subsiste tant que le titre incorporant l'action n'est pas detruit.
La valeur de realisation a un caractere plus economique que juridique. (61) RAUCQ, op. cit. Ann. Not. et Enr., 1934, p. 460; id., Fot•mulaire, t. Jer,
Soc. an., n° 242, par. 8. (62) MOULIN, op. cit., p. 122. Toutefois, avant l'entree en vigueur de la loi
dt;. 30 juin 1961 relative a la verification des apports en nature, les actions nouvelles auraient ete frappees d'indisponibilite relative conformement a l'art. 4i ancien des L. C. soc. comm., a moins que la societe absor;bee ait eu plus 1 de c~nq ans d'existence.
(63) FREDERICO, op. cit., t. IV, n° 38. (64) MOULIN, op. cit., p. 122. (65) Mme VEAUX-FOURNERIE (op. cit., n° 124) developpe l'hypothese ou
la sodiete absorbante est proprietaire de titres de la societe absorbee.
No 5037
![Page 15: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/15.jpg)
-75-
tation de capital et de la creation de titres nouveaux pour remune
rer I' apport a la societe absorbante de ses propres actions, prescri
vent-ils cl' annuler les titres apportes et de reduire en consequence
le capital ( 66).
Un exemple fera m1eux saisir encore le caractere fictif de l' ap~ port.
Une societe A est constituee au capital de F 1.000.000 repre
sente par 1.000 parts s:ociales. A absorbe ensuite une societe B qui
est proprietaire de 5 00 parts sociales de A. Par souci de simplifi
cation, l' avoir social de A, au moment de la fusion, vaut toujours
F 1.000.000. A augmente son capital de F 500.000 et cree 500 parts sociales
nouvelles. II existe des lors 1.5 00 parts sociales au lieu de 1.000, en regard d'un avoir social constant de F 1.000.000. La valeur des
parts sociales tombe de F 1.000 a F 666,66 par titre, parce que
les 500 parts sociales nouvelles ont ete creees sans contre-partie
effective ( 6 7).
Pour eviter semblable consequence, la doctrine propose cl' annu
ler les 5 00 parts sociales apportees par B par reduction correlative
du capital social.
Cette solution parait difficilement defendable. En effet, la societe
absorbante n'a pas le droit d'augmenter son capital et de creer
des parts sociales nouvelles pour la raison que I' apport est fictif.
Comme le bien apporte doit etre affecte a l' objet social, c' est clans
le chef de la societe absorbante que sa valeur doit s' apprecier.
Le caractere fictif de l' apport a la societe absorhante de ses pro
pres titres renforce la these selon laquelle ces titres constituent a son egard de simples instruments de preuve. Ce sont en quelque
sorte des « re~us », des « morceaux de papier » que l' on ne peut
assimiler a des actions ou interets1 au sens de l' article 5 2 9 du Code
civil ( 68).
II ne semble done pas que la societe absorbante puisse augmen
ter son capital pour remunerer l' apport de SeS actions OU parts.
1 2. Ces conclusions ne sont-elles pas infirmees si, comme on
(66) RAUCQ, op_. cit. Ann. Not. et Em·., 1934, p. 460. ( 67) Comptablement, les 500 parts sociales apportees figureraient clans Jes
livres de la societe pour F 500.000. Si elles y etaient maintenues, la societe devrait, a l'inventaire annuel, comptabiliser une moins-value de F I.OOO - F 666,66 = F 333,33 par titre.
(68) DE PAGE, op. cit .. t. V, n()s 715 et 716.
No 5037
![Page 16: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/16.jpg)
- 76-..
I' a pretendu, la fusion po rte sur une universalite, sur un ensemble
de droits et de charges? ( 69)
En partant de la conception de l'universalite de droit ( 70) -qui est bien c.elle proposee - les biens apportes ne sont pas consi~
deres ut singuli, mais comme une masse ( 7 1 ) , portant sur la reunion
abstraite d'un actif et d'un passif correspondant : les apports .de la societe absorbee sont envisages comme un tout. II en decoule
une obligation pour la societe absorbante d' augmenter son capital
de la valeur des apports. Par la suite, faisant l'inventaire des biens
qui lui sont apportes et des dettes dont elle se charge, la societe se
doit de constater que parmi I' apport global se trouvent certains
de ses propres titres qui, a son egard, ne constituent pas juridique
rnent un nouvel element d'actif. Elle doit les annuler et reduire
son capital en consequence.
Pour reprendre I' exemple du numero precedent, le capital de
la societe A s'elevant a F 1.000.000 est represente par 1.000 parts
sociales; l'avdir social, au moment de la fusion, vaut toujours un
million. B apporte, cette fois, des actifs pour un million, dont
5 00 parts sociales de A, a charge pour A de payer son passif de
F 750.000. L'avoir SIOcial de B s'eleve a F 250.000 pour lesquels B
a droit selon la convention de fusion - clans cet exemple theori
que - a 2 5 0 parts sociales de A.
Comme I' apport consiste par hypo these en une universalite,
A augmente son capital de F 250.000 et cree 25.0 parts socia
les a !'intention des actionnaires de B. L'avoir social de A, de
F 1.000.000, devrait s'etre accru de F 250.000 par suite de la
fusion et valoir F 1.250.000. Mais comme il se trouve parmi les
apports de B cinq cents de ses propres parts sociales qui, bien
qu'ayant pour B une valeur de F 500.000, ne concourent pas juri
diquement a augmenter l'actif de A a concurrence de cette valeur,
A annule les cinq cents parts sociales apportees par B et reduit son
capital de F 5 00. OOO. Son avoir social, apres la fusion, est ampute
(69) Liege, 31mars1939, Revue, 1939, nl0 3825:, p. 294 et observations; VAN RYN, op. Cit., t. Jer, n° 857; RIPERT, op. cit., t. yer, n°s 1421 et 1423; L. VAN BEIRS, «Le nouveau regime fiscal des fusions de societes », Revue, 1959, n° 4843, p. 244. Sur le rejet d'une assimilation de la fusion a une succession entre personnes physiques, DEl\'.J:'.ARET, op. cit., Rev. Fisc., 1960, p. 137, n°6 8 et ss.; RENAULD, «Les fusions de societes en droit be1ge », Rev. de D1·. intern. et de· D1·. compare, 1961, pp. 71 et ss.; !'auteur y 1developpe la these de la cession d'universalite par opposition a la these de la transmission a titre universel.
(70) DE PAGE, op. cit., t. V, n° 57I. (71) GARY, Les notions d'universalite de fait et d'un-iversalite de droit,
p. 326. No 5037
![Page 17: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/17.jpg)
- 77 ~
de F 250.000 et vaut F, 1.250.000 - F 500.000 = F 750.000
representes par 7 5 0 parts sociales. Cette diminution d' actif s' ex
plique par le fait que A n'a re~u un apport effectif que de F 500.000
mais a repris des dettes de B pour F 750.000, d'ou une difference .en moins de F 2.J0.000.
En somme, clans le systeme de I' universalit'e, la constatation du
caractere fictif de I' apport des titres de la' societe emettrice se
realise a posteriori, clans une seconde operation qui suit immediatement la decision de fusionner, alors qu' elle devrait, semble-t-il, se faire au moment de la fusion, de maniere a empecher que · se
realise une augmentation de capital ne correspondant pas a des apports effectifs et reels clans le chef de la societe absorbante.
Dans I' exemple donne, A remet aux actionnaires de B 2 5 0 parts
sociales apportees par B et annule les 2 5 0 autres, en reduisant cor
relativement son capital social de F 2 5 0. OOO. Comme I' avoir social de A est en effet reduit a· F 750.000 par suite de la prise eri charge
des dettes de B, la reduction de capital s'impose pour conserver aux titres de A la valeur de F 1.000 qu'ils avaient avant la' fusion, de telle sorte que l'interet des anciens actionnaires de fa socie.te
absorbante ne soit pas Iese;
13. Les c<;>nsequences de la theorie de l'universalite ont une portee beaucoup plus large qu'il n'apparait de prime ~bord.
Les efforts deployes par la doctrine et la jurisprudence poµr degager les notions d'univers1alite sont certes meritoires(72),.
Dans le domaine. particulier de la fusion, il serait toutefois
regrettable que la tendance a former des categories aboutisse ~. '
restreindre le champ d'application de ,la fusion. Dans cet ordre
d'idees, la notion d'.universalite de droi~ ne parait pas satisfaisal)te,
La circonstance que la societe absorbee exch;it de I' apport certains
biens destines au paiement des dettes, n' est generalement pas co~sideree comme ayant pour consequence d' enlever a I' operation son
caractere de fusion, pour auta_nt qu'il soit satisfa.it aux conditions
enoncees sub n° 2 ( 7 3) .
(72) RENAULD, op. cit., Rev. Dr. intern. et Dr. compare, 1961, p. 75 : La doctrine et la jurisprudence. n'ont pu .arriver au degre de .precision , et de securite que peut attefodre I' intervention legislative expresse.
(73) VAN HOUTTE, op cit., Revue, 1935, n° .3420, par. 21; FEYE, Traite de Dr. Fisc., t. Jer, n° 18, p. 27; R ec. Gen., 1959, n° 20.072, par. 28; FREDERICQ, op, cit., t. V, n° 743, p. 1035; DEMARET, op, cit., Rev, Fisc., 1960, n° 5 30, 69 et 73, pp. 150, 300 et 303. Pourquoi, des lors, n'y. aurait-il pas fusion lorsque la societe absorbee conserve par :devers elle les titres de la societe· absorbante pc:mr les repartir ensuite a ses actionnaires en meme temps que les titres nouveaux c1·ees par la societe absorbante en remuneration des apports effectues?
No ·5037 6
![Page 18: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/18.jpg)
- 78-.
On est meme en droit de douter de l' utilite de cette theorie, car elle incite a croire, en !'absence d'une reglementation legale de la matiere, que r objet du transfert est une chose unique, alors qu' en fait chaque element reste soumis. a son statut individuel ( 7 4).
Precisement, clans le cadre restreint de notre etude, la conception que les apports effectues a l' occasion d'une fusion sont constitutifs d'une universalite conduit la societe absorbante a augmenter son capital pour remunerer un apport fictif, al ors qu' en pratique elle sait parfaitement, par les accords de fusion, qu'une partie de ses propres titres est englobee clans les appbrts. Elle propose d' ailleurs d'annuler ces titres immediatement apres avoir pris la decision de fusionner.
En outre, la theorie de l'universalite rend I' operation de fusion plus onereuse.
Ainsi qu' on le sait, le droit de timbre ne frappe plus, a proprement parler, les actions ou parts de la societe, mais le capital dont elles sont la representation ( 7 5).
Le droit est pergu sur le montant du capital statutaire, c' est-adire du capital social proprement dit. En cas d' augmentation de capital, il se calcule sur la partie du capital statutaire qui excede la valeur precedemment imposee ( 7 6).
Des lors, si, au cours d'une meme assemblee generale des action-· naires on procede successivement a une augmentation et a une reduction du capital statutaire ( ce qui se passe si la theorie de l'univ:ersalite est suivie), il n' est pas tenu compte pour la percep
tion du droit du sur l' augmentation, de la reduction qui est ensuite decidee. Cette fa~on de faire est commandee par la convention elle-meme, dont le fisc n'a pas le droit de s'ecarter (77).
La societe absorbante supporte ainsi le droit "de timbre sur la partie de l'augmentation de capital ·correspondant a l'apport de ses propres titres, alors que clans I' autre these, qui denie a la societe le droit d' augmenter son capital pour remunerer cet apport, les dispositions du Code des droits de timbre ne sont pas applicables.
Ces quelques considerations suffisent, semble-t-il, a montrer le,
(74) DE PAGE, op. cit., t. IV, n() 489bis, p. 320; DEMARET, op. cit., Rev. Fisc., 1960, par. 37, p. 157; sur l'utilite de la notion de l'universalite, cfr J. LIMPENS, «La notion juridique du fonds de commerce et la subrogation reelle », Revue de la Banque, 1950, par. 30.
(75) Cen-tres d'etudes des societes: le droit fiscal des societes, t. Jer, p. 120. ( 76) Art. 15, alinea 41 Code des Droits de Tim'bre. (77) DEFESCHE, Commen·taires du Code des droits de timbre, n'() 783, p. 225;
Rep. R.J., Decision 19 octobre 1956, EE/73622.
No 5037
![Page 19: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/19.jpg)
-79-
peu d'interet pratique qui s'attache a suivre les tenants de la theorie
de l'universalite des apports.
14. II reste a examiner, sur un plan gen.era!, la question des droits d' enregistrement qui frappent l'apport par la societe absor
bee d'actions ou parts de la societe absorbante.
Si la determination de la base c;le perception des droits d' enre
gistr.ement clans le cas ou la societe absorbante possede une participation, clans la societe absorbee a fait I' objet de decisions juris
prudentielles ( 78) et de commentaires doctrinaux ( 79), l'hypo
these in~erse, par contre, d'une societe absorbee qui a une participation dans la societe abso~bante n'a pas, a notre connaissance,
ete envisagee.
L' administriation de I' enregistrement a toutefois pris position en
ce domaine clans les termes suivants : « Lorsque I' acte constate I' apport de tout I' avoir social de la societe absorbee, done y com
pris les actions de la societe absorbante, moyennant un certain nombre d' actions de la societe absorbante, la perception du· droit
de 1,60 f'0 sur l'integralite de l'avoir net de la societe absorbee, done y compris les actions de la societe absorbante, s'impose, car
c' est le nouvel acte, l' acte de fusion, qui constituera le titre des
actionnaires de la societe absorbee a toutes les actions de l1a societe
absorbante a repartir entre eux. » ( 80) -Nous avons emis precedemment ( 81) des doutes quant au
bien-fonde de· la these administrative qui, en !'absence de disposi
tions de droit positif, tend a subordonner I' existence d'une fusion
a I' obligation pour les actionnaires de la societe absorbee de -tenir
leur droit de recevoir des titres d~ la societe absorbante de I' acte
de fusion emanant de cette derniere ( 82).
(78) Bruxelles, 8 juillet 1936, Ann·. Not. et Enr., 1937, .p. 8; Jugement Liege, 16 decemhre 1937, id., 1938, p. 41; Brux., 21 janvier 1939, Ree. Gen., 1940, n° 18.098; Cass., 19 juin 1944, Pas., 1944, I-417.
(79) Decis. 25 'juin 1932, Ree. Gen., 1933, n° 17.172, vivement criti.quee par la doctrine : V. GOTH OT, «Fusion de societes • Societe absorbante possedant ·des titres de fa societe absorbee », Ann. Not. et Enr., 1934, p. 23; M. FEYE, op. cit., t. Jer, n° 81bis, p, 128; cfr aussi Ann. Not. et Enr., 1937, pp. 91 et 440 (n° 331bis); id., 1938, p. 41; E. GENIN, Re·c. Gen., 1938, n° -.:7.903; GENIN E. et A., Commentaire des Droits d'Enregistrement, t. II, n° 1288'.
(80) Ree. Gen., 1959, n° 20.072, p, 149· (81) sub no 2,
(82) L'accord de fusionner s'exprime par le vote d'une decision parallele prise par l'assemiblee generate des societes interessees (VAN RYN, op·. cit., t. Ier, n° 855). 11 se comprend sans peine que la decision de chacune de ces societes fasse etat. de l'obligation qu'a assumee ia societe absorbee de distribuer a ses actionnaires les actions de la societe absorban.te qu'elle a conservees par devers
No 5037
![Page 20: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/20.jpg)
- 80 -
Cette these ne parait d'ailleurs pas suffisante pour -justifier par
elle-meme la perception du droit cl' enregistrement. En effet, que
la s.ociete absorbante recoure ou non a une augmentation de capital ·pour rernunerer I' apport de ses propres titres, I' acte de fusion
porte toujours !'indication du nom:bre de titres a remettre aux
actionnaires de la societe absorbee.
II semble qu'il faille plutot rechercher le fondement de la pre
tention de I' administration a percevoir le droit sur l'integralite de I' a voir n'et de la societe abs or bee, clans I' interpretation de I' arti
cle 11'8 du CoCle des dr~its cl' enregistrement. La base imposable
est determinee, selon cet ~rticle, par la valeur conventionnelle des biens apportes telle qu' elle resulte 'des stipulations de I' acte ( 83).
Or, selon I' administration, la valeur conventionnelle est repre
sentee par ce que I' apportant re~oit en contre-partie de son apport,
c' est-a-dire par les actio.ns. qui lui sont attribuees ( 84). II importe peu, des lors, que la societe absorbante augmente son capital poµr remunfaer }' apport de. ses propres actions OU C)U
1 elle Se borne a remettre ces actions aux actionnaires de la societe absorbee, san~
proceder a un~ telle' augmentation : le droit d' enregistrement est du sur la valeur ( 85) des titres repartis a la suite de la fusion ..
Cette solution s'appuie sur le rapport au Roi precedant le Code
des droi ts d' enregistremen t ( 8 6) .
1 5. La valeur conventionnelle des apports' s' apprecie ainsi clans
le chef de la societe abso~bee ou de ses actionnaires ( 8 7) et non
elle; au m~me titre que les actions qui lui sont attribuees en remuneration des apports effectues .. Les actionnaires trouvent ainsi clans l'acte indivisible de fusion de la societe absorbante un titre «a toutes les actions de la societe absorbante a repartir entre eux ».
(83) Sous reserve qu'elle ne pent, en ce qui concerne les immeubles sis en Belgique, etre inferieure a la valeur venale.
(84) E. et A. GENIN, op. cit., t. II, n°5 1283 et 1284; J. BAUGNIET, «Le regime fiscal des societes sous l'em:pire du Code des Droits d'Enregistrement », J.P.D.F., 1941, p. 145, n° rn; Ree. Gen., 1959, n10 20072, par. 6 et 32; V. GOTHOT, op. cit., Ann. Not et Enr., 1934, p.· 25.
(85) L'administration a le moyen de d·eterminer cette valeur, clans le cas ou les titres apportes sont remis aux actionnaires de la societe absorbee, puisqu'elte connait la valem· conventionnelte des titres crees en remuneration des apports autres que les actions ou parts de la societe absoribante"
(86) C'est la valeur reelle des actions attribuees en retour des apports qui est determinante de la valeur conventionnelle de ceux-ci. Rapp. au Roi, n° 64. Mon. beige, 1er decembre 1939, p. 8018.
(87) Ce qui est ]e cas de la fusion directe selon laquelle les a.ctionnaires ·de la societe absorbee reQoivent en echange de leurs actions des titres de la soc'iete a.bsorbante que celle-ci le'ur remet directement sans passer par· l'intermediaire de la so"iete absorbee.
N°.5037
![Page 21: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/21.jpg)
-81 -
pas clans celui de la societe absorbante qui est tenue cependant au paiement ··de l'impot ( 88).
La societe absorbante devient redevable d'un droit, alors que
son avoir social ne s' est pas accru de la valeur de ses propres titres,
I' apport de ceux-ci presentant a son egard un ca:ractere fictif.
On se trouve en presence du cas tres particulier (89) ou un
titre constitue ·pour I' apporteur le bien meuble vise par I' article 5 2 .9 du Code civil .et pour la societe qui le rec;oit un simple mstrumentum.
L' emission par la societe absorbante de cet instrumentum s' est reali.·
see anterieurement a la suite d'un apport effectif qui a donne' ouverture, a I' epoque de I' emission, a un droit prO'portionnel d' enregistre
rrient (90). La societe se trouve ainsi amenee a devoir payer au
moment de la fusion une deuxieme fois des droits d' enregistre
ment (91 ) I alors qu'un seul apport .effectif 1ui a ete fait. Peut-etre
meme la seconde imposition sera-t-elle licjuidee sur une base supe
rieure, si les affaires sociales ont prospere depuis I' emission du
titre. De telles consequences n' apportent-elles pas la confirmation que
le cas d'une participation de la societe absorbee clans la societe
absorbante en cas de fusion n' a pas ete envisagee au cours de I' elaboration du Code des droits d' enregistrement? ( 9 2).
On est des lors porte a croire qu'il conviendrait d'inflechir la
·rigueur des principes et de tenir compte, pour le calcul des droits
d'enregistrement, de ce qui entre (93) clans le patrimoine de la
societe absorbante effectivement et d'une maniere definitive, et
non pas seulement pour un instant de raison, de telle sorte que
(88) C'est egalement sur I'acte que la societe absorbante depose que s'opere fa taxation.
(89) GENIN parle, dans le cas ou la societe absoribante possede des titres de la societe absorbee, « d'une contingence purement fortuite, etrangere a la nature de I' operation de fusion». Ree. Gen., 1938, n° 17.903; par. 12.
(90) Pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une emission de titres a. la suite d'une incorporation de reserves au capital.
(91) II ne s'agit pas d'une application du principe Non bis in idem qui suppose une identite de fait generateur (P. HARMEL, Le principe non ,bis in i:dem et les droits d'e~registrement, n° 5; PILON, Principes et technique des droits d'enre'. ~istrement, t. fer, n° 8 624, 633 et ss.; VAN HOUTTE, Principe de droit fiscal beige, n° 142.) II existe plutot dans le chef de la societe absorbante une absence de·· matiere imposable; ·
(92) M. COART.FRESART n'aborde pas non plus cette question dans son rapport sur la sjmplification fiscale. Ann. Not. et Enr., 1937, p. 440, n° 331bis.
(93) THOMAS, Co,mmentaire de la loi du IS ~ai r905 modifiant les droits d'enregistreme11,t sur les actes de partage, p. 98. Rapport de M. TIBBAUT; Rep. prat. de Dr. beige, v0 Enregistrement, n° 802; HAUCHAMPS et GOTHOT, Code des Droits d'Enregistremen·t, 1940, p. 163, n° 9.
No 5037
![Page 22: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/22.jpg)
- 82 -
les apports qui n' accroissent pas (94) reellement I' actif de la
societe absorbante echappent a la taxation en raison du carac.tere fictif qu'ils revetent dans son chef.
16. Conclusions.
L'apport a une societe de ses propres titres dans le cadre d'une
fusion n'a de commun avec le rachat d'actions que !'existence, a un moment donne, dans le patrimoine de la societe de titres qu' elle
a emis. Les restrictions et les con:ditions dont depend la liceite du rachat ne sauraient s' etendre au cas de I' absorption.
n n '.existe, par ailleurs, aucune rais.on juridique decisive qui
permette de conclure a I' obligation qui incomberait a une societe
d' annuler ceux de ses titres rentres clans son patrimoinie.
Ces titres representent pour la. societe qui les a emis de simples instruments de preuve. En consequence, l'apport a la societe absor
bante de ses propres titres revet pour celle-ci un caractere fictif,
alors qu'il represente dans le chef de la societe absorbee un.e valeur
reelle et effective. 11 en resulte que la societe absorbante ne peut augmenter son
capital pour remunerer rapport de ses propres titres, mais que la societe absorbee, par contre, a cependant le droit de recevoir pour
cet apport aussi des titres de la s.ociete absorbante.
11 se recommande des lors que la ·societe absorbante, dans les
limites de la convention de fusion, affecte, a la remuneration des apports de la s:ociete absorbee, celles de ses actions qui lui sont
apportees au meme titre que les actions nouvelles qu' elle cree par
augmentation de son capital en contre-partie des apports qui ont
un caractere effectif clans son chef.
Une solution plus simple consis:terait, a l'instar de ce que preco
nise la doctrine fran~aise, a exclure des apports effectues par la societe absorbee les actions de la societe absorbante. Les titres
nouveaux crees par la societe absorbante seraient remis a la societe
absorbee pour etre joints a ceux que celle-ci a conserves par devers
elie. La societe absorbee se chargerait ensuite d' echanger toutes
ces actions contre ses propres titres. Cette solution se heurte aux prescriptions arretees par l' admi
nistration beige de I' enregistrement, qui cherche a restreindre la
portee des dispositions favorables de I' article 11 7 du Code des
(94) de LEUZE, Cours Droits d'Enregistrement, 1949 .: Lorsque l'art. 114 vise l'apport de ·biens nouveaux, i1 entend manifestement les mises qui accroissent l'actif .social.
'N-0 5037
![Page 23: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/23.jpg)
- 83-
droits d',enregistrement. L'administration invoque l'absence d'ab
sorption, alors qu' elle admet I' existence d'une fusion lorsque la
societe absorbee exclut des apports unie partie de son actif de
maniere a assurer elle-meme le paiement de ses dettes. Dans I' un et I' autre cas, la societe absorbee est cependant appelee a disparattre, « et c' est la I' essen tiel » ( 9 5 ) .
La position de I' administration s' explique par le souci d' eviter
que, clans la poursuite d'un meme resultat, la societe absorbante
soit taxee dans l'un cas et non dans l'autre. Ainsi, en adoptant
I' attitude de la doctrine fran~aise, le droit d' apport ne serait pas du, al ors qu' il en serait autrement lorsque I' apport porterait sur
tout I' avoir social de la societe absorbee, en ce compris les actions
de la societe absorbante. Mais ainsi que nous I' avons fait ressortir, si le droit cl' enregistre
ment est reclame par I' administration dans ce dernier cas, sur les
titres de la societe absorbante apportes puis redistribues aux actionnnaires de la societe absorbee, c'est en vertu d'une interpre
tation des termes « valeur conventionnelle », selon laquelle I' as
siette du droit d' enregistrement correspond a la valeur que I' appor
teur re~oit en retour de ses apports (96).
Or, ii semble que cette regle doive etre tenue en echec chaque fois que I' apport ne represente pas une augmentation effective de
I' avoir social de la societe a qui les apports sont faits, comme
c' est le cas pour I' apport a la societe absorbante de ses propres
titres. S'il en est ainsi, les societes intervenant a la fusion ont le choix
entre la solution recommandee ci-avant et celle, plus radicale,
avancee par la doctrine fran~aise, puisqu' elles entratnent toutes
deux des consequences fiscales semblables. Cependant, ii paratt preferable, en considei;ation des disposi
tions administratives actuelles, de faire prevaloir tout d' abord la
solution qui consiste a apporter a la societe absborbante la totalite
de I' avoir social de la societe absorbee, englobant done les actions
de la societe absorbante, sans recourir a une augmentation de capital pour remunerer I' apport de ces actions destinees a etre
reparties ensuite entre les actionnaires de la societe absorbee.
(95) Ree. Gen., 1959, n° 20.072, par. 28.
Pierre DEMARET Docteur en droit.
(96) En l'occurrence la sodiete absorbee ou, en cas de fusion directe, ses ar.tionnaires, cfr renvoi 87.
N° 5037
![Page 24: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/24.jpg)
- 84
N° 5038. - Cour de cassation ( 1 re eh.). - 16 mars 1961. Sieg. : MM. Giroul, pres.; Vroonen, rapp.; Depelchin,. av. gen. Plaid. : MiMies Ansiaux, della Faille d'Huysse .et Van Ryn, avoc. (Huileries du Congo belge et Savonneries Lever freres et cts. . . , c/ .c~lonie du Congo, .belge et Tarlta.)
Representation en justice. - Societe commerciale ne pouvant agir que par .. une. personne physique. - Pom·voi en cassation ne la mentionnant pas.
-. Ine.;·evabilite.
Une societe commerciale ne peut ester en justice comme deman•deresse que pm ime person1z,e physique qui la 1·epresente, soit, en ce qui concerne · une societe en liquidation, par la personne de son liquidateur.
Le pom·voi en cassation· doit indiquer l'identite du ou des Uquidateurs. N'est pas recevable le pourvoi qui ne remplit pas cette con·dition,
ARRET. La Gour, Oui' MQnsieur le conseiller Vroonen en son rapport et sur les conclusions de
Monsieur Depelchin, avocat general; Vu l'arret attaque, rendu le 19 juillet 1958 par la Cour d'appel de Leopold¥ille
et le pourvoi remis au greffe de la Cour le 19 janvier 1960;
Sur la fin de n·on-recevofr, opposee par la defenderesse societe Tarica freres, en liquidation, a tous les pourvois et, en ce qui concerne le pourvoi forme par la Compagnie du Lomami et du Lualaba, en liquidation, contre l'ancienne Colonie du Congo beige, sur la fin de non-recevoir proposee d'office par le ministere public et notifiee par lui conformement a I' article 2 de la loi du 20 juin 1953 j
Attendu qu'une societe commerciale ne peut ester en justice comme demanderesse que par une personne physique qui la represente soit, en ce qui concerne une societe en liquidation, par la personne de son liquidateur; qu'il s'ensuit que le pourvoi en cassation doit ind'iquer l'identite du ou des liquidateurs;
Attendu qqe le pourvoi de la Compagnie du Lomiami et du Lualaba, en liquidation, ne remplit pas cette condition; qu'il n'est done pas recevable;
Attendu que la defenderesse societe Tarica freres, en liquidation, soutient que la non-recevabilite du pourvoi en tant qu'il est fo.rme contre elle par la Compa~gnie du Lomami et du Lualaba, en liquidation, entraine, a raison du caractere indivisible du litige, la non-recevabilite d'u pourvoi fortne au nom des autres demanderesses ;
Mais attendu qu'il n'y a pas indivisibilite entre les demandes lorsque, comme ·en l'espece, chacun des demande~rs originaires reclame du defendeur originaire une somme distincte pour uine cause propre a chacun, et qu'il n'est pas allegue que !'absence aux debats de l'un des demand'eurs serait de nature a modifier les droits des autres, ni les obligations du defend·eur a l'egard de ceux-ci;
Que l'irregularite du pourvoi de la demanderesse Compagnie du Lomaml et du Lualaba, en liquidation, est done sans effet quant a la regularite des autres;
Par ces motifs, Rejette les pourvois ...
No 5038
![Page 25: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/25.jpg)
-85-
Observations. - Cet arret est a rapprocher de l' arret rendu par
la Cour de cassation le 2 2 juin 1961 et reproduit ci-apres sous le
numero 5039. II est d'ailleurs cite dans l'avis de M. le Procureur General
HAYOIT DE TERMICOURT reproduit sous le meme numero (cfr 5039).
N° 5039. - Cour de cassation ( 1 re eh.). - 22 juin 1961. Sieg. : MM. Giroul, pres.; Van Beirs, rapp.; Hayoit de Termic·ourt, proc. gen.
Plaid .. : MMJ0 s Struye .et Faures, avoc.
(Vleugels c/ Socihe Nationale des Cheminis de Fer Belges.)
Representation en justice. - Societe commerciale ne pouvant agir que par une personne physique. - Acte d'appel ne la mentionnant pas. - lrrecevabilite. - Reg le applicable a la S. N. Chemins de Fer Belges.
Une societe coimimerciale ne peut agfr en justice comme deman•deresse que par une personne physique qui la represente.
La loi creant la Societe Nationale des Chemins de Fe1· Belges ne deroge pas au prindpe general de la 1·epresentation des societes commerciales.
Lorsque !'exploit de signification de l'acte d'ap•pel n·e mentionn·e pas les nom,s et qualites des man·dataires qui representent la societe ou sont habiles a este1· pour elle en justice, cette societe nla pas legale•ment accompli l'acte de procedm·e ayant pour objet de defere1· la cause a la juridiction d'appel.
L'article IJ.1, al. rer, C. pr. civ. est ett-anger aux nul'lites 1·esultant de ce que l'acte est depourvu d'un· de ses elements substantiels.
ARRET.
Vu le jugement attaque, rendu en degre d'appel le 6 mai 1959, par le tribunal de premiere instance de Namur;
Sur le moyen pris de la violation des articles 61, 173, 443, 456 du Code de procedure civile, 97 de la Constitution, 5 et 7 de la loi du 23 juillet 1926 creant la Societe nationale des chemins de fer belges,
en ce que le jugement attaque, apres avnir constate que l'acte d'appel signifie par la societe defenderesse au demandeur « ne renseignait pas les noms et qua· lites de ses mandataires qui la representent ou sont habiles a ester par elle en justfoe » et que « pareille omission est, suivant une jurisprudence constante, une cause de nullite », a decide qu'aux termes de l'article 173 du Code de procedure civile « aucune nullite d''exploit ou d'acte de procedure ne pourra etre admlise que s'il est justifie qu'elle nuit aux interets de la partie adverse» et a deduit de la que le demandeur, n'offrant pas de prouver et n'alleguant meme pas que l'omission vantee lui aurait porte prejudice, et les mentions exigees par la jurisprudence ne tenant pas a l'ordre public, l'appel etait recevable,
alors que l'article 173, alinea 1°r, ne s'applique ni aux decheances, ni aux nonrecevabilites qui resultent de ce que l'acte est fait a la requete d'une personne sans qualite ou sans pouvoir,
No 5039
![Page 26: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/26.jpg)
- 86-
alors que l'aCite d'appel etait en consequence nul et, partant, l'appel non recevable,
alors que le jugement attaque n'est done pas legalement motive; Attendu que, suivant les articles 6r, 82bis et 456 du Code id'e procedure civile,
l'exploit de signification de l'ac'te d'appel, formalite prescrite a peine rde nullite, doit, sous la meme sanction, contenir les nom, profession et domicile de l'appelant;
Attendu qu'une societe commerciale ne peut agir en justice comme demianderesse que par une personne physique qui la represente;
A!ttendu que la foi creant la Societe nationale des chemins de fer belges ne deroge pas au princip1e general de la representation des societes commerciales;
Attendu, des lors, que l'exploit de signification de l'acte d'appel ne mentionnant pas, suivant les constatations du jugement attaque, « les noms et qualites des mandataires qui representent la societe demanderesse, ici defenderesse ou sont habiles a ester pour elle en justice», cette societe n'a pas legalement accompli l'acte de procedure ayant pour objet de deferer la cause a la juridiction d'appel;
A!ttendu que !'article I7'3, alinea yer, du Code de procedure civile, est etranger aux nullites resultant de c'e que l'aote est depourvu d'un de ses elements substantiels, c'est-a-dfre d'un element indispensable pour qu'il remplisse son objet;
Attendu que le jugem1ent attaque n'a done pas legalement fait application du dit article r73 pour declarer en l'espece l'appel recevable;
Que le moyen est fonde;
Par ces motifs,
La Cour, Casse le jugement attaque; ...
Observations. - Cet arret a ete precede de I' avis de M. le Procureur General HA YOIT DE TERMICOURT, reproduit ci~dessous.
Le jugement attaque constate que l'acte d'appel, interjete par la defenderesse, n'indique pas les noms et qualites des mandataires qui representent cette societe OU ·sont habiles a ester pour elle en justice. II decide que pareille omission est une cause de nullite, mais que cette nullite est soumise au regime :d'e l'article r73, alinea: r1er, du Code de procedure civile, c'est-a-dire qu'elle ne peut etre admise que si le demandeur justifie - ce qu'il ne fait pas - qu'elle a nui a ses interets.
Cette these est difficilement admissible, Dans le rapport au Roi precedant I' A.R. n° 300 du 30 mars r936 - dont I' arti
cle ro a modifie le dit artcile 173 - ii est d·it expressis verbis (1) quei : « l'alinea yer de Particle 173 nouveau ne s'applique pas ... aux decheances ni aux nonrecevabilites qui resultent, par exemple, de ce que l'acte est tardif ou est fait a la requete d'une personne sans quaJite OU sans pouvoir ».
On comiprendrait mal que I'alinea ffit, en revanche, applicable lorsque la personne qui a fait l'acte est inconnue ou, s'agissant d.'une personne morale qui ne ·saurait agir elle-meme, lorsque l'acte n'indique pas la personne qui agit pour elle. C'est d'ailleurs en ce sens qu'est fixee la jurisprudence de la Cour.
(r) Pasin·omie, 1936, p. 218.
N° 5039
![Page 27: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/27.jpg)
- 87-
Le 8 fevrier 1940 (2), vous avez decide « qu'est non recevable le pourvoi forme au nom d'une societe anonyme, lorsque !'exploit de signification de la requete ne mentionne pas les nom, profession et domicile des mem1bres du conseil d'administration ».
Suivant l'arret du IO decembre 1954 (3), est nulle, et ne fait point courir le delai du pourvoi, la signification: d'un arret, a la requete d'une societe, qui, tout en mentionnant la denomination de la societe, n'indique aucune P'ersonne physique qui la represente ou agit pour elle.
Enfin, le 16 mars 1961 (4), la Gour declarait non recevable un pourvoi introduit par une societe commerciale en liquidation sans indication de l'identite du ou des liquidateurs : « Attendu, porte l'arret, qu'une societe commercia:le ne peut ester en justice comme demanderesse que par une personne physique qui la represente ».
A quoi la defenderesse oppose :
I. un motif de l'arret du 13 avril 1905;
II. l'arret du IO mai 1948;
III. l'arret du 6 fevrier 1956.
I. L'arret tlu I3 avril z905 (5) d1eci:de qu'est nul un exploit d'opposition signifie a la requete d'une societe anonyme sans mention des noms et qualites d,es mandataires qui la representent.
Dans un de f!es motifs, toutefois, ii releve que pareilles menj:ions ont « pour objet de permettre a l'adversaire de verifier et de s'assurer si les pretendus representaOJts de la societe ont qualite pour agir contre lui ».
De ce motif la defenderesse deduit, d'une part, qu'il ne s'agit que d'un vice de forme et, d'autre part, que ce vice n'entraine pas nullite si la partie adverse ne justifie pas d'une lesion de ses interets.
Cette deduction est hative. D'abord, si un vice concerne une formalite substantielle et touche a l'ordre
public, l'article 173, alinea 1er, du Code de procedure civile est sans application "(6).
Ensuite, ii ne s'agit pas d'un simple vice de fot'me, lorsque, comme en l'espece, l'identite d'aucwne personne physique n'est indiquee. Un element substantiel de l''acte lui-meme fait defaut, et a pareil cas !'article 173, alinea 1er, est etranger ( 7). On se trouve dans une situation analogue a celle qu' exam in a l'arret du 3 mars 1960 (8) : une signification de pourvoi ne contenant · aucune mention des nom, domicile et immatricule de l'huissier signifiant.
II. L'arret du zo mai z948 (9), rendu en matiere repressive. II s'agissait d'un acte d'appel fait a la requete d'une societe anonyme et signe
par Me Demaret, agissant en vertu d1'une procuration.
(2) Bull., 1940, p. 41. (3) Bull., 1955, p. 359• (4) En cause Societe Huilever c/ ancienne Colonie du Congo beige. (5) Bull., 1905, p. 187. (6) Cass., 13 avril 1953, Bull., 602. ( 7) Comp. la note sous Cass., 25 septemlbre 1950 (Bull., 1951, p. 23). (8) Bull., 770. (9) Bull., 311.
No 5039
![Page 28: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/28.jpg)
- 88
La validite de la procuration n'avait pas ete contestee devant la juge du fond; eJle ne pouvait plus l'etre devant la Gour.
Le demandeur soutenait aussi, ii est vrai, que, la procuration ffit-elle valable, 'l'acte d'appel eut d,fi contenir lui-m'eme l'identite des organes de la societe.
A quoi l'arret repond que le demandeur ne soutient pas qu'il y eut d·efaut de qualite ou de pouvoir et que, partant, i1 ne s'agit que d~un vice de forme.
Gette decision n'est pas inconcilia.ble avec les arrets de la Gour que j'ai cites au debut de mes conclusions. En effet, dans la cause sur laquelle statue l'arret du IO mai · 1948, l'acte d'appel indiquait une personne physique agissant au nom de la societe, alors que, a mes yeux du moins, c'est !'absence d'indication de toute personne physique qui entraine le defaut d'un element swbstantiel de I'acte et soustrait la nullite au regime de I' article 173 du Cod'e de procedure civile ( IO).
III. Reste l'arret du 6 fevrier 1956 (II)' egalement rendu en matiere re'pressive.
Cet arret id'it qu'un pourvoi introduit, en matiere repressive, par un: avoue au nom d'une societe et un memoire depose a l'appui par un avocat a la Cour sont valables, quoiqu'ils n'indiquent pas les personnes physiques ayant le pouvoir d'agir au noml de la societe. Cette deoisfon s'inspire notamment d'un arret rendu le 15 octobre 1951 (12). Dans cette derniere cause le prevenu avait soutenu, dcvant la Cour d'appel, que la constitution de partie civile de la societe etait nulle parce que cet acte, signe par un avoue, n'indiquait pas les representants de la societe.
La Gour d'appel avait rejete ce moyen de defense pour le motif que, suivant l'article 173 C.P.C., il eut du etre propose in· limin'e litis.
La Cour n'adop,te pas cette these : elle rejette le moyen pour le motif que l'avoue est presume avoir constitue regulierement, c'est-a-dire par les organes qualifies· de la societe.
Ni cet arret ni celui du 6 fevrier 1956 n'appuyent done la these de la dcSfenderesse, puisqu'aucun d'eux ne fait application de }'article 173, alinea 1°r, du Code de procedure civile. De plus, dans l'une et dans 1l'autre de ces procedures ·une personne physique, dont I'identite etait indiquee, declarait agir au nom de la societe.
J e conclus a la C'assation avec renvoi.
(rn) Voy. la note sous Cass., 25 septembre 1950 (Bull., 1951, p. 23). La Gour de cassation de France use de l'expression « formalites substantielles », mais en donnant a ces mots un sens moins large que leur sens habituel, a savoir le sens de « formalites tenant a la raison d'etre de I'acte et indis.pensables pour remplir son objet » ( cfr 3 mars 1955, Sem. J ud., 1995, ! II, n° 8654,
(11) Bull., 576. (12) Bull., 1952, p. 78.
No 5040
![Page 29: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/29.jpg)
- 89-
N° 5040. - Cour d'appel de Liege (7° eh.). - 31 octobre 1961. Sieg. : MIM. Renard, pres.; Caprasse et Capelle, cons.; Delree, av. gen.
Plaid. : M,e Riga, avoc, (Imp/as c/ Etat beige.)
Representation en justice. - Societe ne pouvant agir que par une personne physique. - Societe anonyme. - Recours mentionnant l'identite, non pas de tous les actmmistrateurs ma!is _des personnes chargees par les statuts des .. poursuites et diligences », - Equivalence. - V alidite.
L'iwdicatiocn de l'idenotite des perso·nnes ayant qualite pour agir en justice au nom de la societe (en l'espece soci:ete anonyme) est un·e formalite substantieUe, touchan,t a l'ortlre public. Les personnes morales, en prin'Cip·e capables de plai· der, ne peuv·ent le faire que par l'intermediait-e de personnes physiques, leurs organes.
Lorsque /'exploit (et notamment celui qui introduit un recours fiscal aupr~s
d'une Gour d'appel apres un arret de cassationJ n'est pas introduit au nom des personnes physiques auxquelles la so.ciete a d'elegue ses pouvoirs, l'action n'est pas · recevable.
Lorsque les statuts sont muets sur la representation en justice, le conseil d'administration est le seul organe de la societe capable d'inteniter une action en son n·o'm. Lo1·squ'au contraire les statuts p1·evoien·t que les actions en justice seroni suivies «Poursuites et diligences» d'un ou de plusieurs admhtistrateurs, cette mesure delegue aux personn·es designees le pouvofr detenu pa1· le conseil d'adrministratioff! de representer la societe en justice.
Est valable le 1·ecours qui mentionne l'identite complete des administrateurs delegues par les statuts pour agir en justice.
ARRET.
Vu l'arret rendu le 15 octobre 1959 par lequel la Gour de cassation a casse partiellement . un arret du 21 mai 1957 de la Gour d'appel de Bruxelles et a renvoye la cause ainsi limitee devant la Cour d'appel de Liege,
Vu la decision renduie le 24 aout 1954 par le Directeur des contributions directes de Bruxelles, premiere direction;
Vu le recours depose au greffe avec !'original de sa denonciation, le 4 decembre 1959 et dirige contre les cotisations aux impchs ordinaires, exercice 1952, rappels d'e droits, exercice 1948;
Attendu qu'avant d'aborder le fond du litige, !'administration souleve une exception de non-recevabilite du recours du 4 dec'embre 1959;
Qu'elle signale que !'article 8 des statuts de la societe dispose que « les actions judiciaires sont suivies au nom de la societe par le conseil d'administration, poursuites et diligences du president du conseil ou de deux administrateurs »;
Que le recours devant la Cour d'appel de Bruxelles et le pourvoi devant la pour de cassation .sont mus par la societe representee par son conseil d'adm:inis;tration compose de trois membres dont ils donnent l'id'entite complete;
Que, par contre, le rec'ours qui introduit 'la presente instance est mu par la ~ociete representee par M. G ... , administrateur. president, et par Mme L ... V ... , administrateur;
No 5040
![Page 30: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/30.jpg)
- 90-
Qu'a defaut de mentionner les trois membres du conseil d'administration, le recours serait non recevable;
Attendu qu'en vain la requerante soutient que seul le recours devant la Gour d'appel de Bruxexlles constitue !'exploit introductif d'instance, le present recours n'etant qu'un acte de procedure intercalaire, un avenir, non soumis aux exigences de I' exploit introductif d'instaince;
Qu'en effet, le second recours introduit une procedure nouvelle, qui n'est pas une suite necessaire de la precedente, et ce devant une juridiction differente, laquelle ne peut etre saisie du litige que par lui, et clans toutes les formes exigees par la loi;
Attendu que !'exception n'est pas fondee sur la non-observation d·es dispositions de !'article 61 du Code de procedure civile, prescrites a peine de nullite de !'exploit, lesquelles visent a permettre !'identification du demandeur. Que le recours precise suffisam:ment l'identite de la requerante et que d'ailleurs !'administration ne demande pas qu'il soit declare nul;
Attendu que le moyen reproche au recours l'absence d'un element essentiel la mention d'un organe ayant seul qualite pour agir au nom de la· societe;
Attendu que !'indication de l'identite ides personnes aiyant qualite pour agir en justice au nom de la societe, est une formalite substantielle, touchant a l'ordre public; que les personnes morales en principe capables de plaider, ne peuvent le faire que par l'intermediaire des personnes physiques, leurs organes;
Que si I1exploit, quelque regulier qu'il soit d'autre part, n'est pas introduit au nom des personnes physiques auocquelles la societe a delegue s·es pouvoirs, l'action n'est pas valablement introduite et n'est pas recevable;
Attendu que l'article 8 des statuts comporte deux dispositions distinctes :
1° les actions sont suivies en justice par le conseil d'ad!ministration; 2° poursuites et diligences du president du c'onseil ou de deux administrateurs;
Attendu que la these de !'administration selon laquelle tous les membres du conseil d'admfoistration ·devraient etre cites clans le recours, repose sur une interpretation erronee du texte des statuts et d'ailleurs du sens meme de la loi j
Attendu que lorsque les statuts sont muets sur la representation en justice, le conseil d'administration est le seul organe de la societe capable d'intenter une action en son nom ;
Que lorsque Jes statuts, comme en l'espece, prevoient que les actions en justice seront suivies « poursuites et diligences » d'un ou de plusieurs administrateurs, o'est la une mesure qui, d·ans un but de simplification, delegue aux personnes designees le pouvoir detenu par le conseil d'administration ou de « represenfer fo societe en justice»;
Attendu qu'ainsi apparait errcnee la distinction faite par !'administration entre la « representation en justice» et les « poursuites et diligences », ces derniers mots designant simplement ceux qui pourront en fait exercer cette reprc!tlentation;
Qu'on ne voit d'ailleurs .pas, si le conseil d'administration figure en entier a l'exploit, pourquoi devraient intervenir en plus les deux administrateurs dont le nom figure deja clans le cons·eil d'administration, et alors que le dit conseil a necessairement tout pouvoir d'agir en justice;
N° 5040
![Page 31: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/31.jpg)
-91 -
Qu'enfin, !'intervention obligatoire de tout le conseil d·'administration priverait de tout sens la clause deleguant « les poursuites et diligences »;
Que c'est si vrai que l'administra:tion n'a pas cru devoir attaquer les deux exploits precedents (premier recours et pourvoi) qui ne mentionnent que le conseil d'admfoistration et non les deux administrateurs charges des poursuites et diligences;
Attendu qu'il n'est pas allegue que le recours ne soit pas conforme a la volonte du conseil d'administration;
Que le recours qui mentionne l'identite complete du president .du conseil et d'un administrateur, delegues par les statuts pour agir en justice, est done vala· blement introduit et recevable;
Par ces motifs, La Coor, Out en audience publique et en langue fran~aise, M. le president Renard en
son rapport et M;. le substitut du procureur general Delree en son avis conforme; Rec;oit le recours ; Et avant faire droit, ordonne la reouverture des debats pour les parties oonclure
et plaider au fond ; Fixe jour a cette fin au 12 decembre 1961;
Condamne l'n,dministration aux depens de !'incident; Reserve les autres depens.
Obs.ervations. - Pour ce qui est de l'irrecevabilite des procedures mues par une societe sans designation de personne physique, cfr
les arrets de la Cour de cassation des 16 mars et 22 juin 1961, reproduits sous les numeros precedents, l' a vis de M. le Procureur
General HAYOIT DE TERMICOURT publie au pied de l'arret du 22 juin 1961, ainsi que l' arret de la Cour d' appel de Gand du 8 mars 19 5 6 (Revue, 1959, n° 4823).
Sur l' identification des personnes qualifiees pour agir, cfr l' arret
de la Cour d'appel de BruxeHes du 15 avril 1959 (Revue, 1959, n° 4853) et l'arret rendu par le Conseil d'Etat le 22 novembre
1956 (Revue, 1959, n° 4848) avec les notes. Sur le pouvoir de representer une societe anony~e, pouvoir re
serve en principe au conseil d'administration tout entier, mais sus
ceptible de delegation, par ou en vertu des statuts, cfr Cass.,
20 octobre 1960 (Revue, 1961, n° 4954) et 20 novembre 1958 (Revue, 1960, n° 4864) - pareille delegation ne pouvant cepen
·dant pas exceder la gestion journaliere (cfr Revue, 1961, n° 4953). Enfin, pour ce qui est de la valeur de la formule « poursuites et
diligences ... » - formule a laquelle se refere aussi un arret rendu par la Cour d'appel de Bruxelles le 30 novembre 1959, reproduit
d'autre part en sommaire sous le numero 5041, cfr, en sens con
traire de l'.arret, VAN RYN, Principes de droit commercial, t Jer, n° 603.
N° 5040
![Page 32: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/32.jpg)
Sans doute appartient-il aux tribunaux d'interpreter la disposition
en cause comme repondant a une intention plus etendue que le
pouvoir de pourswivre l' execution des decisions prises par les organes
superieurs de la societe : celui de prendre ces decisions. Le sens obvie
est pourtant different et il est expedient de s'y tenir. Ceci ne signifie
pas, pour autant, que soient nuls les exploits ou ces « organes d' exe
cution » seraient seuls designes; mais, de toute fa~on, la partie
adverse serait fondee a exiger la preuve de la. decision dont I' execu
tion est "poursuivie, a tout le moins s'il s'agit d'une matiere excedant
la gestion journaliere.
N° 5041. - Cour d'a_ppel de Bruxelles (2° eh.) .. 30 novembre 1959.
P. D.
Sieg. : MM. Hanssens, pres.; Baron Verhaegen, prem. av. gen, Plaid.: MMes Hamibye et Vertessen (du barreau de Mons).
(Simexo c/ V eriter.)
Exploit de signification a une societe. - « Parlant a sa personne », -
Administratem delegue charg6 de la gestion journaliere. - Organe s'identifiant a la societe, specialement au sens de l'art. 158 · C. pr. civ.
Un administrateur detegue de societe anonyme, habilite a. (a gestion• journa· liere des affaires sociales et a faire les poursuites et diligen·ces en cas de proce· dure judiciaire exprime de maniere directe, en tant qu'orgatie distinct de la societe, la volonte de celle-ci tout comme le comeil d'administration; il est l' organe permanent de la societe qu'il incarne pour son activite cournnte, quoti· dienne, tandis que le con·seil d'adiministration n'exerce ses fonctio1is que par intermittence.
Le principe de !'attribution de pouvoirs a cet administrateur delegue est consa· ere par les lois coordonnees sur les sociEtes comlmerciales sous la .forme d'une faculte dont l'art. 63 des dites lois pennet d'user; le rOle de·s statuts est seule· ment de regler la nomination, la t·evocation et les attributions du detegue.
On doit. considerer comme tegalement faite «en parlan·t a sa perso.nne » au sens de !'art. zs8 C. pr. civ., une signification faite en parlan·t a wn organe de la societe,. lequel s'identifie avec celle-ci, dont il est l'emanation· p·hysique ·et directe.
Observations. - L'arret dont le sommaire precede est reproduit
zn extenso clans laPasicrisie (1960.2., p. 204).
La Cour de cassation a deja eu a examiner le point de savoir
ce qu'il faut entendre par signification a personne lorsqu'il s',agit
d'une societe, et a distinguer suivant qu'il s' agit d'une signification
faite a Uh organe OU a Un prepose.
N° 5037
![Page 33: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/33.jpg)
-. 93 -
L'arret r:endu par elle sur ce point le 27 janvier 1955, et du reste cite par I' arret de Bruxelles dont le sommaire precede, a ete reproduit dans la Re1Jue ( 19 5 6, n° 45 5 2) avec une note se refe~ rant specialement a un avis de M. le Procureur General HAYOIT
DE TERMICOUHT accompagnant Cass., 19 fevrier 1955 (Revue, 1955,
n° 4478). Sur ia qualite d'organe appartenant a l'administrateur delegu_e
et son pouvoir c{ agir en justice, dr aussi la note sous Bruxelles, 13 fevrier 1954 (Revue, 1956, n° 4567), ainsi que l'etude P. DEMEUR clans la Revue ( 1961, n° 4953).
N° 5042. - Cour de cassation (Ze eh.). - 30 octobre 1961. Sieg. : MM. Wiaer·segger, rapp.; Janssens de Bisthoven, prem; av. gen.
Plaid. : MM~s Ansiaux et Demeur, avoc. (Allard c/ lnstitut des reviseur d'entreprises et cts.)
Commissaire-Reviseur. - Institut des Reviseurs d'entreprises. - I. Refus par le conseil de l'Institut d'autoriser l'exercice du mandat de commissaire. - Justification.· - II. Autorisation par le conseil de l'Institut. -Appreciation de la remuneration. - N'est pas se substituer a l'assemblee generale de la societe.
I. Le refus d'autorisation du conseil de l'In·stitut d'exercer un mandat de com· missaire-reviseur doit avoir pour justification la realisation de l'objet en· vue duque/ la /oi du 22 juil/et I953 a cree cet institut.
II. Le conseil de l'Institut des reviseurs d'entreprises n'excede pas les pouvoirs que ta loi lui confere lorsqu'i'l refuse a un membrlJ de l'institut l'autorisation d'exercer une activite a laquelle est attachee une remunemtion qu'il juge inadequate.
Apprecie1· le caractere adequat de la 1·emuneration attachee au mandat du com· missaire-reviseur d'une societe anonyme n'est pas se substiftter a rassemblee generate des actionnaires dans /'execution de /'obligation· d'etablir la som'me fixe CO·nstifuan·t [es emo/wments des commissaires,
ARRET.
Vu la sentence attaquee, rendue le 30 mars 1960 par la Commission d'appel de I'Institut des reviseurs d'entreprises;
Sur le moyen· pris de la violation des articles 7, specialement alinea 2, 9, 20 de la loi du 22 juillet 1953 dreant un Institut des reviseurs d'entreprises, modifiee par la loi du 10 juillet 1956, 64, specialement alinea 4, 64bis et 64ter des Iois sur Jes societes commerciales, coordonnees par l'arrete royal du 30 novembre 1935 et com/pletees quant aux articles 64bis et 64ter par Ies articles 11er et 2 de la loi du 1er decembre 1953, en ce que la decision entreprise, qui confirme la sentence a quo, declare que, saisi par un reviseur d'entreprises d'une demande d'autorisation d'exercer au sein d'une societe les fonctions de commissaire-revi-
N° 5042
7
![Page 34: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/34.jpg)
- 94
seur, le conseil de l'lnstitut en refusant la dite autorisation sous pretexte que la remuneration prevue n'est pas suffisante, reste dans les limites des pouvoirs d'appreciation dont la loi l'investit, qu'elle decide, en consequence, que le demandeur, en exer~ant malgre le refus d'autorisation du conseil les fonctions de commis·saire-reviseur au sein de la dite societe, a manque gravement a la discipline, et lui inflige de ce chef la peine de la radiation, alors que, s'il est exact que le conseil de l'Institut est charge d'assurer le respect de la deontologie professionnelle et peut, clans ce cadre, etablir et controler les modalites et les conditions de la remuneration des reviseurs d'entreprises, encore ne peut-il, en refusant a un reviseur l'autorisation necessaire pour exercer les fonctions de commissaire-reviseur au sein d'une societe, se substituer a la decision de l'assemblee generate des actionnaires de ceUe-ci quant au montant de la remuneration, l'assem1blee generate etant legalement seule qualifiee pour en fixer souverainement !'importance, C'elle-ci ne concernant pas la deontologie professionnelle, en ce que, etant justifiee par des motifs illegaux, la decision de refuser au demandeur l'autorisation d'exercer les fonctions de commissaire-reviseur aupres de la societe Cimescaut, et par consequent la peine disciplinaire infligee au demandeur pour avoir passe outre a ce refus illegal, sont depourvues de fondement legal;
Attendu qu'il resulte de la .sentence attaquee que la faute disciplinaire qu'elle sancitionne est d'avoir contrevenu a l'artie'le 7, alinea 2, de la loi du 22 juillet 1953, creant un Institut des reviseurs d'entreprises, pour avoir exerce, en qualite de membre de cet institut, un mandat de com·missaire clans une societe anonyme, alors que l'autorisation d'exercer ce mandat lui avait ete refusee par le ,conseil du dit institut;
Attendu qu'il ne peut etre d'eduit de !'article 7, alinea 2, que l'autorisation dont il .s'agit devrait en principe etre consideree comme exceptionnelle et que l'appre· ciation de l'opportunite d'accorder ou non c·ette autorisation serait laissee a la discretion du comeil de l'lnstitut;
Qu'une semblahle interpretation serait inconciliable avec l'exigence formulee par !'article 64bis, § 2, des lois coordonnees sur les societes commerciales, dispo· ~ition 16gale qui est en relation etroite avec l'institution des reviseurs d'entreprises et qui, en vue d'assurer mieux la sauvegarde de l'epargne publique, impose la presence d'au moins un commissaire-reviseur dans certaines sodetes anonymes;
Attendu que dans l'etat de la structure economique du pays, a !'organisation de taquelle concourt la loi du 22 juillet 1953, le refus de l'autorisation d'exercer un mandat de commissaire-reviseur clans une societe anonyme ou la presence d'un te1 conimissaire est Iegalement requise, doit avoir pour justification la realisation de l'objet en vue duquel cette loi du 22 juillet 1953 a cree un Institut des reviseurs d'entrcprises, cet objet etant precise par I' article 2 de C'elle-ci;
Attendu que, competente pour exercer son controle sur la legalite de la sentence attaquee, la Gour est necessairement competente pour apprecier la conformite a la loi de la mesure dont la meconnaissance est sanotionnee comme faute disciplinaire par cette sentence;
Attendu que lorsque la loi, en son article 7, alinea 2, confie au conseil de l'Institut des reviseurs d'entreprises le soin de· se prononcer sur une demande d'autorisation d'exercer Ull mandat de commissaire de societe, OU lorsqu'en SOll arti•
No 5042
![Page 35: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/35.jpg)
- ... 95 -.
r,le 9 .elle le charge d' etablir et de. con:troler les modalites et les conditions de la remuneration du reviseur, elle ne limite pas a la sauvegarde de la deontologie professionnelle la tache ainsi devolue au conseil, ainsi que le donne a entendre le moyen, mais determine les voies par lesquelles doit etre realise l'objet que precise son article 2;
Attendu, d'autre part, que le dit conseil n/excede pas les pouvoirs que la loi lui confere lorsque, eu egard a cet objet, il decide n'y avoir lieu d'autoriser un ,des membres de l'Institut a exercer une aC'tivite a laquelle est attachee une remuneration qu'il juge inadequate en raison des exi,gences de competence, d'independance et de prob!te professionnelle qu'il est tenu d'imposer a ses membres;
Attendu, d'autre part, qu'apprecier objectivement le caractere adequat de la remuneration attachee au mandat de commissaire-reviseur d'une societe anonyme, n'est pas se substituer a l'assemblee generale des actionnaires dans !'execution de !'obligation imposee a cette assemblee par !'article 64ter des lois coordonnees f.iur les societes C'ommerciales d'etablir au debut .et pour la duree du mandat la somme fixe constituant les emoluments des commissaires;
D'ou ii suit que le moyen ne peut etre accueilli;
Par ces mo.tif s,
Rejette le pourvoi. ..
Observations. - D'une part l'art. 64ter, al. Jer; des lois coordondonnees sur les societes commerciales dispose que les emoluments
des com,missaires consistent en une somme fixe etablie, au debut et pour la duree du mandat, par I' assemblee generale. D' autre part,
l'article 7, al. 2, de la loi du 22 juillet 1953 creant un lnstitut des reviseurs d' entreprises dispose que les membres de l'Institut ne peuvent exercer des mandats de commissaire de societe qu' avec I' autorisation du conseil de l'Institut et I' article 9 de la meme loi ajoute : « Les modalites et les conditions de la remuneration du reviseur sont etablies et controlees par le conseil de l'Institut ... »
On sait aussi que I' article 64bis des lois coordonnees impose aux societes ayant fait OU faisant publiquement appel a }' epargne, de
choisir, sous peine de sanctions penales (art. 204, 5°), au moins un commissaire parmi les membres de l'Institut des reviseurs d' entreprises.
On s' accorde a voir clans l' article 9 le droit souverain de l'Insti~ tut des reviseurs d'interdire a ses membres l'exercice d'un mandat
dont la remuneration .ne serait pas conforme a la <lignite et a la mission du reviseur ( cfr notamment le 4° attendu de la decision rapportee). Mais on ne contestera pas davantage que le droit d'une assemblee generale de fixer les remunerations du commissairereviseur est egalement souverain.
N° 5042
![Page 36: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/36.jpg)
-· 96-
Sera-t-on clans une impasse si les conditions que le conseil de
l'Institut des reviseurs impose a son membre ne rencontrent pas les oHres de l' assemblee generale?
Les Chambres ont aper~u les difficultes qui pouvaient naitre de la conjonctl.on de I' obligation pour certaines societes de recourir
a un commissaire-reviseur et du pouvoir de l'Institut d' autoriser
l'exercice d'un mandat de commissaire. M. VAN DER SCHUEREN
(Ann. Parl. Chambre, seance 1 0 j uin 1 9 5 3, p. 3 5) a cru trouver
une solution en declarant que I' autorisation de l'Institut serait auto
matique pour les reviseurs appeles a remplir ce mandat clans les
societes obligees de recourir a leurs services. Cette solution trop
simple ne tenait pas compte du but de I' autorisation, a savoir la protection du renom que la nouvelle institution doit acquerir.
(L' amendement de M. ScHOT tendant a supprimer I' autorisation
de l'Institut pour l'exercice d'un mandat de commissaire clans les
societes devant le choisir parmi les reviseurs d' entreprises a ete
rejetee. Ann. Parl. Chambre, seance 22 mai 1956, pp. 10 et SS.)
M. J. TASSIN (La remuneration des commissaires-reviseurs, J.T., 195 7, p. 41 3) denie a l'Institut le droit de fixer un minimum de remu
neration des commissaires-reviseurs, son role se limitant, suivant
cet auteur, a controler les conditions et modalites de cette remuneration. 11 propose a I' appui de sa these une sorte d' abrogation tacite
des textes contradictoires; a savoir I' abrogation de I' article 9 de la
loi du 22 juillet 1953 (controle de la remuneration par l'Institut)
par la loi du 1 er decembre 1 9 5 3 qui confie a I' assemblee generale
des societes le soin de fixer les emoluments d'un commissaire-revi
seur. Cette these est contredite par le rejet, lors du vote de la loi
du 10 juillet 1956 modifiant celle du 22 juillet 1953, d'un amen
dement tendant a I' abrogation de I' article 7. Elle est aussi opposee
au principe aux termes duquel !'abrogation tacite doit toujours
etre interpretee clans un sens restrictif (DE PAGE, t. Jer, n° 219). M. TASSIN, sans d'ailleurs soutenir totalement la these de !'abroga
tion, voit plutot clans I' autorisation de l'Institut une formalite qui
doit se faire avec un certain automatisme. J' ai dit ci-dessus que
c' etait la denaturer I' autorisation voulue par la loi.
M. FREDERICQ (Revue, 1954, n° 4420, specialement p. 280) ne
voit pas de contradictions entre les lois coordonnees sur les socletes
et la loi du 22 juillet 1953; la remuneration arretee par l'assemblee
generale sera con.trolee par l'Institut ( cfr aussi R. BoUILLENNE, f. T., 1'9 5 7, p. 7 41 ) . C' est ce que ·dit aussi l'arret rapporte : apprecier le
N° 5042
![Page 37: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/37.jpg)
- 97 -
caractere adequat de la remuneration n'est pas se substituer a l'assemblee generale.
II n'y a ·pas plus de contradiction en cette matiere qu' entre I' ar
ticle 15 83 C. civ. prevoyant la determination du prix de la vente par les contractants et les dispositions legales qui permettent au gouvernement cl' etablir des prix maxima.
S'il n'y a pas de contradictions, une difficulte cependant peut
surgir lorsque les emoluments proposes par I' assemblee sont esti~
mes inadequats par l'Institut. Elle provient du caractere actuelle
ment imprecis du droit des societes qui glisse du domaine contrac
tuel vers le domaine institutionnel. M. SCHEYVEN disait a ce sujet : « En cas de contestation sur le montant de la retributiOn entr.e le
commissaire-reviseur et la societe qu'il est appele a controler, le
differend devrait etre tranche par le Conseil de l'Ordre des Revi
seurs, qui etablira en cette matiere les regles que I' experience reve
lera necessaires pour que soient sauvegardes le respect et l'hon
neur de la profession (Doc. Parl. Chambre, session 1950-195'1, n° 501, p. 6, cite par le Centre cl' etude des societes clans: Le statut des commissaires et des commissaires-reviseurs, 1 9 5 6, p. 31 ; cfr aussi
J. RAEMAEKERS, L' en tree du reviseur d' entreprises dans la vie economiquc et sociale, 195 7, pp. 359 et ss.).
J e ne pense pas que le conseil de l'Institut, a defaut de compro
mis arbitral, ait competence pour trancher le differend qui surgirait
ainsi entre la societe et l'Institut.
Seule la decision du conseil de l'Institut refusant au reviseur
I' autorisation cl' accepter un mandat de commissaire, serait-elle
susceptible d'un recours; le litige se mouvrait alors entre l'Institut
et son membre; celui-ci pourrait attaquer la decision de l'Institut
devant le Conseil d'Etat pour exces OU detournement de pouvoir
OU violation des formes substantielles et prevues a peine de nul
lite. L' examen de cette difficulte, des droits de l'lnstitut dans la
fixation de la remuneration du commissaire-reviseur et des recours
qu'il possede, me semble depasser le cadre de cette note.
Jacques 'T KINT
A vooat pres la Cour d'appel de Bruxelles.
No 5042
![Page 38: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/38.jpg)
-98-··
N° 5043. - Cour de cassation de France ( Ch. civ.). 30 jan.vier 1961.
Sieg. : MiM. Lescot, pres.; Monguilan, rapp.; Come, av. gen. MMes Coutard et Labbe, avoc.
(Le Profit et cts c/ Ateliers de menuiserie rationnelle.)
Actions de societe anonyme. - Souscription par prete-noms; - Liberation effective. - Nombre d'associes non inferieur a sept. - Pas de nullite.
Cowstatant qw'une simulation de souscription d'action's de sociBte anonyme ne 1·ecouvrait aucune fraude et que la liberation des actiom n'etait pas fictive, le nombre des souscripteurs, d'autre part, n'etant pas inferieur a sept, le juge dtt fond conisidere a juste titre <Jue des sou;criptions par prete~noms ne ~onstituaient pas, en elles-memes~ une cause de nullite. ~ •
ARRET. La Cour; Sur le .premier moyen, pris en ses trois branches : Attendu qu'il resulte des motifs et des qualites de l'arret attaque (Paris,
IO mai 1958) . qu'aux termes de I' accord passe le 23 septembre 1954 pour. la orea• tion de la societe anonyme Ateliers de menuiserie rationnelle (A.M.R.) au capital de 6.000.000 de francs· reparti en 60 actions, les fondateurs de cette societe avaient prevu que deux d'entre eux, Rouhach et la Societe a responsabilite 1imitee Le Profil, n'apparaitraient ·pas en nom dans l'acte de constitution, les dix-neuf actions attribuees a la societe Le Profit etant apparemment souscrites par Stamfort et I' action reservee. a Roubach etant souscrite par Deparis; que, selon la meme ·convention, la societe Le Profil, qui, avec la societe Menuiserie metaUique moderne devait entreprendre des fabrications d'huisseries metalliques pour le compte de la societe A.M.R., s'enga.geait a ~onfier a celle-ci l'exolu· sivite des ventes de fenetres metalliques et objets similaires;
Attendu qu'assignee en dommages-interets pour n'avoir pas temi cet engage. ment, la societ6 Le Profil a oppose la nullite de la societe A.M.R., motif pris de ce que la participation simulee de Stamfort et de Deparis, simples pl'ete· noms, a la souscription du capital de cette societe, avait entache de fictivite la dite. souscription; ~ttendu qu'il est teproche a la Cour d'appel d'avoir refuse d'aidmettre une
telle cause de nullite alors, d'une part, que la sousoription du capital social par des prete-noms et la liberation du quart. des actions par eux souscrites au moyen de foods ne leur appartenant pas ne satisfait pas aux dispositions im.pe· ratives de l'art. r,er, al. 2, de la loi du 24 juillet 1867 exigeant pour la constitu· tion de la societe la souscriptioii de la totalite d1i capital social et le versement en especes, "par chaque actionnaire, •d'un quart au moins du montant des actions souscrites par· 1ui, ni a celles du meme lart. 11.er, al. 16, 18 et 19, concernant la declaration de souscription et de versement et ses annexes; alors, d'autre part, que l'arret constate que les deux sousoriptions emanant de prete-noms ont ete liberees a concurrence du quart au moyen de foods appartenant a un senl des SOUScripteurs S{l'i-disant reels, d'ou ii resulte que le nombre des SOUScripteurs reels ayant ete inferieur a sept, la societe ne pouvait, meme dans le systeme
No 5043
![Page 39: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/39.jpg)
-99-
de l'arret, se constituer valablement; et alors, enfin, que Jes dis·positions, egalement imperatives et penalement sanctionnees, de I'art. 13, al. 4, de la mem:e Joi (redaction du decret du 29 novembre 1939), expressement invoquees par la societe Le Profil en des chefs de conclusions restes sans reponse, entachent de nullite le vote emis, comme en l'espece, a l'assemblee constitutive d'une societe anonyme par des personnes se presentant comme proprietaires d'actions qui ne leur appartiennent pas et, partant, la societe elle-meme ainsi delictueusement constituee;
Mlais attendu, d'une part, qu'apres avoir constate qu'en l'espece la simulation incrim.inee ne recouvrait aucune fraude et que la liberation des actions n'etait pas fictive, Jes fonds etant reellement et definitivement entres dans Jes caisses de la societe, la Cour d'appel a considere a juste titre que Ies souscriptions par prete-noms ne c·onstituaient pas, en elles-memes, une cause de nullite;
Attendu, rd'autre part, que, si l'arret enonce « que Jes fonds furent verses par Deparis et Stamfort au moyen de cheques emis par la societe Le Profil e Fordre de ceux-ci et endosses par eux a l'ordre de Baron, notaire charge de dresser l'acte consti'tutif de la societe », une telle enonciation n'etablit nullement, comme le pretend le pourvoi, qu~ Deparis et Stamfort n'agissaient, l'un et l'autre, que pour compte de la societe Le Profil; que, selon Jes constatations de l'arret, seul Stamfort representait la dite societe, tandis que Deparis etait le prete-nom de Roubach, a qui ii a, par. la suite et conformement a la convention, transfere !'action par Jui souscrite, en sorte que le nom:bre des souscripteurs n'a pas ete inferieur a sept;
Attendu, enfin, que la pretention de la societe Le Profil ne tendait nullement a l'annulation d'un vote et que la reference, qu'aux termes de ses conclusions, regulierement produites, la dite societe faisait a rart. 13, al. 4, de la Joi du 24 juillet 1867, dont l'iapplication n'etait pas e~ cause, constituait un simple argument et non pas un moyen auquel la Cour d'appel fut tenue de repondre; qu'ainsi le premier moyen n'est fonde en aucune de ses branches;
Sur le second moyen (sans interet); Par ces motifs, rej ette.
Observations. - Si le simple fait que le titulaire reel des actions n' est pas celui qui a declare les souscrire n' est generalement pas
considere en France comme une cause de nullite de la societe anonyme ( cfr RIPERT, Traite elementaire de droil commercial, 4e ed.,
n° 960, la Chronique de M. R. HoUIN clans la Revue trimestrielle de droil commercial, 1961, p. 384, le Recueil Dalloz hebdomadaire, 1961, J. p. 292, et les autorites citees, mais aussi le dissentiment releve clans ce dernier recueil), a fortiori doit-on en Belgique adopter une solution semblable sous I' empire de textes tels que I' art. 3 5 des lois coordonnees admettant la validite d'une souscription comme porte-fort, cette souscription ne fut-elle pas ratifiee (text~ impliquant que les veritables actionnaires peuvent etre differents de ceux
qtie la lecture de I' acte faisait prevoir).
No· 5043
![Page 40: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/40.jpg)
- 100 -
Aussi runanimite existe-t-elle chez nous a. cet egard (cfr Jean CoRBIAU dans la Revue, 1904, n° 15 29, RESTEAU, Traite des societes anon'J)mes, 2e ed., n° 225, FREDERICQ, Traite de droit commercial, t. IV,
n° 284, VAN RYN, Principes de droit commercial, t. {er, n°8 491 et 496, Repertoire pratique de droit belge, v° Societe anonyme, n°s 11 0 et s.).
Ce n' est point a. dire que la nullite ne puisse etre reconnue a. I' egard de ceux qui auraient agi frauduleusement (l' arret annote
n'a point manque de souligner qu'au~une fraude n'avait ete relevee
en l'espece), a l'exclusion des autres. Ni qu'il soit de l'essence de
la societe anonyme de ne pas etre liee a la consideration' de la personne (cfr Re'lJue, 1955, n° 4500, par. 9); et au cas ou cette liai
son serait etablie - toujours dans le res~ect des droits des tiers
- la nullit'e pouriait etre egalement decla,ree. P. D.
N° 5044. - Cour de cassation de France (eh. reunies).
28 avril 1961.
Sieg. : MM. Battestini, premier pres.; Ancel, rapp.; Gegout, av. gen. Plaid. : M)Mes Mnrtin-Martiniere et Rouviere, avoc.
(Veuve Gatellier c/ _Vignon et S.A.R.L. Les Moulins de Condetz.)
Parts sociales. - Droit de preemption apres deces au profit d'associes ou d'heritiers - Pacte sur succession future. - Validite.
Au~ termes de /'art. z868 C. civ. le pacte social peut prevoir, au deces d'tm des associes, la continuation de la societe entre les seuls survivan·ts qui peuvent alors racheter dans les conditions p1·evues au contrat les parts sociales du predecede; une telle stipulation, bien qu'attribuant aux associes survivants un droit evenituel sttr une partie d'une succession non ouverte est, par exception, autorisee par !'art. z868 et par suite ne tombe pas sous le coup de la pro·kibition des pactes sur succession· future edictee par l'art. zz30 . .
ARRET. La Gour;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il resulte des motifs et des qualites de l'arret attaque que la societe en nom collectif, fondee en 1925 pour !'exploitation du MoUJlin de Condetz entre Marcel Vignon et Charles Gatellier a ete, a la mort de ce de:rnier, transformee en commandite, Vignon restant seul gerant et les heritiers de Gatellier, sa veuve et son .fils Roger, devenant commanditaires; que la veuve Gatellier ayant cede tous ses droits dans la societe a son fils, Vignon et la mandataire de Roger Gatellier, parti comme officier en Indochine, procederent par actes des 28 et 29 juin 1945, a une nouvelle transformation de la societe · qui prit la forme de societe ii responsabilite limitee; qu'il etait stipule au pacte ·social qu'en cas de deces d'un
No 5044
![Page 41: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/41.jpg)
- 101 -
associe, la societe continuerait entre l'associe survivant et le conjoint ou les heritiers directs rde l'associe predecede, tandis que·, si les parts de celui-ci se trouveient transmises a d'autres ·successibles, l'associe survivant pourrait les racheter suivant un prix et des modalites fixes par le contrat; que Roge·r Gatellier disparut lors d'un combat en lndochine et que, apres que son acte de deces euf ete dresse, Vignon declara vouloir exercer son droit de preemption, le seul heritier du defunt etant, non le conjoint OU un descendant, mais sa mere, la dame Gatellier; que cette derniere assigna alors Vignon en nullite de la clause de pre· emption;
Attendu qu'il est reproche a l'arret confirmatif attaque d'avoir decide que la clause litigieuse ne constituait pas un pacte sur succession future prohibe par l'art. n30 c. civ., au motif qu'une telle stipulation etait autorisee pat' l'art. 1868, que, .selon le pourvoi, ce dernier texte n'apporte aucune exception fi la prohibition rigoureuse edictee par l'art. n30, qui doit des lors £rapper toute disposition du contrat de societe ayant pour objet de determiner, au deces d'un associe, la devolution des ·droits sociaux de celui-ci contrairement aux regles d'ordre public de la devolution successorale•:
M!ais attendu qu'aux termes de l'art. 1868 C. civ. le pacte social peut prevoir, au deC'es d'un des associes, la continuation de la societe entre les seuls survivants qui peuvent alors racheter dans les conditions prevues au contrat les parts sociales du predecede; qu'une telle stipulation, bien qu'attribuant aux associes survivants un droit eventuel sur une partie d'une succession non ouverte est, par exception, autorisee par l'art. 1868 et par suite ne tombe pas sous le coup de la prohibition des pactes sur succession future edictee par l'art. n30; d'ou ii suit qu'en statuant comme ii l'a fait, l'arret attaque, loin de violer les textes vises par le moyen, en a fait au contraire une exacte application; qu'ainsi le premier moyen ne saurait etre accueilli;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore reproche a l'arret attaque d'avoir declare valable la clause litigieuse sans s'expliquer sur le moyen tire par la veuve Gatellier de ce que l'art. 1868, a supposer qu'il validat de telles dispositions, ne le faisait que pour assurer la .survie de la societe, alors qu'elle avait ete en l'espece detournee de son but pour exclure frauduleusement certains heritiers de l'associe pre· deoede, et qu'au surplus la Gour ·d'appel ne constatait pas que la compensation offerte a l'heritier evince ffit suffisante pour le dedommager;
Mais attendu que la clause litigieuse, justem:ent reconnue valable, emportait necessairement pour l'associe survivant, la faculte d'ecarter de la societe l'heritier a qui cet associe pouvait imposer le raohat des parts sociales du predecede; que l'arret attaque, en constatant que les stipulations du pacte social respectaient l'egalite successorale .et tous les droits hereditaires de la veuve Gatellier «grace a la prevision de certaines compensations efficaces », ecartait par la meme le moyen tire d'une fraude pretendue ou ·d'une insuffisance materielle du dedommagement en valeur; qu'ainsi le rejet du premier moyen emporte, en l'etat des c'onstatations de la Gour d'appel, le rejet du second moyen; que l'arret attaque, qui est motive, a Iegalement- justifie sa decision;
Par ces motifs, rejette.
No 5044
![Page 42: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/42.jpg)
- 102 -
Observations. - L' arret dont le texte precede met apparemment fin a un long proces dont l'histoire est resumee clans le Dalloz hebdomadaire C1961, J. 697) au corps d'une note de M. Andre BESSON.
Deja la Revue avait reproduit ( 1959, n° 4 788) un premier arret rendu par la Cour de cassation de France (sect. comm.) le 18 oc
tobre 19 5 5, - avec une note de M. Roland VAN LINT, faisant notamment ressortir la divergence sur la matiere des jurispruden
ces beige et fran~aise. Plus recemment, elle a reproduit un arret rendu par la Cour de
cassation de Belgique (arret du 10 novembre 1960, Re-vue, 1961, n° 49 5 9) ou le pacte social est reconnu applicable a I' encontre de !'interdiction du pacte successoral (les choses etant comprises ainsi qu' on les entend chez nous') - OU, plus exactement, la notion du
pacte sur succession future est ramenee a de justes limites. A la difference de I' arret du 1 8 octobre 1 9 5 5, I' arret du 2 8 avril
1961 refuse de donner le pas a l'innegociabilite des avoirs dependant d'une succes·sion future sur la validite des conventions aleatoires relevant du contrat de societe.
On voudra bien se reporter, pour le surplus, aux observations de M. v AN LINT, comme a I' etude precitee de M. BESSON et aux references que contiennent ces deux etudes. P. D.
N° 5045. - Cour d'appel de Bruxelles. - 3 fevrier 1960. Sieg. : MM. Hans·sen.s, pres.; Baron Verhaegen, prem. av. gen.
Plaid. : MMes P. Geysers et F. Danhier, avoc. (Vim der Elst c/ Me Danhier q.q.)
Societe anonyme. - Adm.inistrateur ou fonde de pouvoirs. - Decheance (article 123sexies du Code penal). - Mesure civile prise dans l'interet des tiers. - Ne rend pas incapable de contracter.
La decheance du droit d'exercer la fonction d'administrateur ou de fonde de pouvoirs dans rme societe anonyme (art. r23sexies du Code penal) est un•e mesure de nature civile. Elle est assimilable a l'in·terdiction portee par rarrete royal 1t0 22 dtt 24 octobre I934 ( defense pour les fail/is de. participer a ratfiministration des societes par actions}. Cette mesure n'a pas pour effet de ran•ger ces con•damt1es au nombre des incapables de contracter dont s'occupe /'art. II24 C. civ. EUe est edictee exclusivement dans l'interet des tiers.
ARRET. Attendu que pour obtenir que la vente a la societe anonyme Verreries de Vil
vorde, actuellement faillie, soit declaree nulle, ou annulee ou resolue avec effet
No.5045
![Page 43: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/43.jpg)
- 103 -
retroactif, et obtenir consequemment la restitution du vehicule vendu plutot que le paiement de son prix en monnaie de faillite, l'appelant fait valoir d'aboiid que l'acheteuse, la societe anonyme susdite, n'a pu etre valablement engagee par son administrateur delegue, un sieur Waroquiers, pour le motif que si ce derniel' avait reQu, par decision du conseil d'adm:inistration du 17 janvier 1953, publiee aux annexes du Moniteur (II aout 1955, acte n° 22482)' les « pouvoirs les plus etendus pour tous actes d'administration et de disposition concernant toutes · affai. res speciales », ii avait ete, par l'effet d'un jugement du conseil de guerre d'Anvers du 12 decembre 1946, dechu du droit d'exercer la fonction d'administrateur ou de fonde de pouvoirs dans une societe anonyme (articles l23sexies, litt. h, et l23septies du Code penal) ;
Mais ·que l'appelant perd de vue qu'il s'agit ta d'une mesure de nature. civile ( {Cass., 13 novembre 1944, Pas .. , 194, I, 32), assimilable a !'interdiction, portee par l'arrete . royal n° 22 du 24 octobre 1934, pour certains condamnes et pour les faillis, de participer a I' administration et a la surveillance des societes par actions; que si, d'apres le texte et· I' esprit· du susdit arrete royal, cette interdiction a «le caractere d'une incapacite civile, attache'e aux condamnations prononcees du chef des infractions qu'il specifie » (Cass., 13 juillet 1936, Pas., 19'36, I, 351), elle n'a toutefois « nullement pour effet de ranger ces condamnes ~u nombre des inca· p,ables de contrac'ter, dont s'occupe I' article n24 du Code civil» et elle «est edictee exclusivement dans l'interet des tiers, a titre de precaution contre le:. condamnes » (Cass., 19 fevrier 1940, Pas., 1940, I, 56) ;
Qu'il doit as·surement en etre de m:eme pour la decheance de droits, organisee a des fins identiques par les articles 123sexies et 123septies du Code penlll; . Que si done, la societe anonyme Verreries de Vilvorde eut pu faire etat de
cette decheance de droits de Waroquiers, elle ne l'invoque cependant_pas, et, bien au contraire, le curateur a sa faillite, l'actuel intime, conclut a la confirmation du jugement, lequel a dit n'y avoir « pas lieu de prononcer la nullite de la vente »;
Qu'au surplus, « les incapables peuvent etre choisis comme mandataires et, concernant les relations juridiques entre mandant et tiers, c'est-a-dire, en l'e.spece, entre les Verreries de Vilvorde et l'actuel appelant, Waroquiers, mandataire de la societe, n'a personnellement joue aucun role; ii n'a ete « qu'un simple instrument entre les mains du mandant .. L'acte accompli au nom de ce dernier ne le touche pas; personriellement, ii ne s·'est pas oblige et n'avait pas a le faire a l'egard de l'appelant; et, des lors, ce dernier est mal venu de se prevaloir d'une incapacite OU d'une interdiction civile de droits - qui Iui est restee etrangere et est sans auctin efret-vis-a-vis de Iui (cf. DE PAGE, t. V, n°s 383 et 384);
-Qu'a ·tOrf '·done l'appelant considere . comme nulle de plein droit la vente du vehicule dont Iitige et pretend reprocher a la societe faillie une faute delictuelle OU quasi delictuelle, pour la reparation des suites de laquelle l'intime q,q, d'e• vrait restituer en nature le vehicule Iivre ...
(La suite est sans interet pour le droit des· societes.)
Observations. - Cet arret est publie en entier a la Pasicrisie, 1960, II, 241 .
II semble le premier a traiter de la decheance prevue par I' arti
cle 1 2 3sexies, h, du Code penal en ce qui concerne un administra-
No 5045
![Page 44: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/44.jpg)
- 104 -
teur de sociele. Le cas avait ete cite par cette Revue ( GoEDSEELS, Nature et portee de l'interdiction pour certains condamnes C'i pour les faillis de participer d l' administration et a la surveillance de certaines societes .. ., Revue, 1948, p. 137, specialement n° 14, p. 140).
L' arret assimile cette sanction a !'interdiction portee par I' arrete royal n° 22 du 24 octobre 1934 {interdiction pour certains condamnes et pour les faillis de participer a I' administration et a la surveillance des societes).
La question de s:avoir si la decheance prevue par I' arrete de 1934 et frappant un membre du conseil d'administration vicie les actes de celui-ci, est controversee en Belgique et en France; (cfr notamment la note de P. COPPENS sous Bruxelles, 5 octobre 1960, Revue, 1961, p. 113, specialement II; Comm. Bruxelles, 6 mars 1 9 5 6, Revue, 19 5 6, p. 31 3 et les references citees· en note; Cass. franc., 18 novembre 194 7 et Paris, 21 janvier 1948, Revue, 1954, pp. 16 7 et 1 70; cfr aussi Cass., 19 fevrier 1940, Revue, f948,
p. 110; Comm. Bruxelles, 30 mars 1948, Revue, 1948, p. 114; Comm. Verviers, 27 octobre 1960, Revue, 1962, p. 53).
Quant au sens des mots de l'arrete de 1934 « participer a !'administration et a la surveillance ... » on lira le jugement du tribunal de premiere instance de Bruxelles du 26 septembre 1956, Revue, 195 7, p. 98.
L' argumentation subsidiaire de la Cour, soit le principe general · aux termes duquel les incapables peuvent etre choisis comme man~ dataire, parait inadequate. Elle laisse en effet sans solution le point de savoir ce qu'il en est de l'acte accompli par une personne a laquelle la loi interdit particulierement I' exercice de ce mandat. Encore faut-il remarquer aussi que, suivant la theorie de I' organe, un administrateur n' est pas un mandataire vis-a-vis des tiers.
Jacques 1
T KINT
Avocat pres la Cour d'appel de Bruxelles.
No 5045
![Page 45: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/45.jpg)
- 105 -
N° 5046. - Cour d'appel de Bruxelles (4° eh.). - 26 juin 1961. Sieg. : MM. Bernard, pres.; Beckers et Emond, cons.; Baron van den Branden
de Reeth, av. gen. Plaid. : MMes Jean Scoriels et A. Marechal, avoc.
( Etablisseme1its P. Plasman c/ S. A. R utex Product.)
Societe anonyme. - Adminiswation assumee notamment par une autre societe anonyme. Validite sous reserve de conformite aux statuts de cette derniere.
La designation d'une societe anonyme a la fo11iction d'administrateur d'un·e autre societe ( anonj1me) .ne vicie pas la composition du conseil d'admbnistration de cette derniere.
La capacite juridique d'une societe est cependant limitee par les statuts sociaux et l'acceptation par elle d'un mandat d'administrateu1· n'est valable que pour autant qu' elle soit conciliable avec ses statuts.
A bon droit, cette condition etant realisee, sont rejetes les moyens de nullite d'exploit et d'irrecevabilite d'action tires de ce que les poursuites ont eu lieu a la diligence d'un conseil d'administration irregulier en ce qu'il ne compo1·te que deux personn·es physiques et une societe anonyme.
ARRET.
I. Quant a la validite de l'ajournement et a la recevabilite de !'action : Attendu que l'appelante pretend l'ajournement nul, et a tout le moins !'action
de l'intimee non recevable, les poursuites ayant eu lieu a la diligence d'un conseil d'administration irregulier, en ce qu'il ne comporte que deux personnes physiques et une personne morale, la societe anonyme Galeries de I'Est, juridiquement incapable, en cette qualite, d'etre administrateur;
Attendu que la question de la capacite d'une societe d'assumer le mandat d'administrateur d'une autre societe, n'est pas resolue d'une maniere concordante par la doctrine, tout au moins en Belgique; que la doctrine fran9aise ne peut etre consultee qu'avec beaucoup de circonspection, eu egard aux differences de la legislation des deux pays en la mati~re;
Attendu que les adversaires •de cette capacite ne sauraient fonder leur opinion sur une disposition prohibitive de la loi; que pour la justifier, ils proposent divers arguments, tires du caractere personnel du mandat d'administrateur, mandataire direct de l'assemblee, de la necessite de sauvegarder le libre jeu des dispositions penales susceptibles de frapper l'administrateur, des difficultes et des entrave& a la ·bonne administration de la societe, auxquelles donnerait lieu la solution opposee ( voy, notamment : W AUWERMANS, n° 297; R .P.D .B., v0 Societes anonymes, n° 707; J. HEENEN, De la possibilite, pour une personne morale, d'etre l'organe d'une societe, clans Rev. prat. Soc., 1954, n° 4358);
Attendu que, si serieuses que soient ces objections, elles se heurtent a la regle rappelee recemment par la Cour Su,preme, que «pour tous les actes juridiques que n'exclut pas sa nature d'etre moral, une societe anonyme a, en principe, la meme capacite que celle d'une personae physique, si la Joi ne l'a pas
N° 5046
![Page 46: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/46.jpg)
- 106 -
restreinte » (Cass., 31 mai 1957, et avis de M. le Procureur General HAYOIT de TERMilCOURT, Rev. prat. Soc., 1957, n° 4718);
Attendu que l'exercice d'un mandat d'administrateur dans une autre societe n'est pas contraire a la ngture ·de l'etre moral, lequel peut accomplir l'acte juridique par son organe, son propre conseil d'administration, et !'executer par delegation a l'un des membres de celui-ci, que, d'autre part, aucun texte legal n'interdit l'acte;
Attendu qu'il faut done admettre en principe que la designation d'une societe anonyme a la fonction d'administrateur d'une autre societe ne vicie pas la composition du conseil d'administration ·de cette derniere (FREDERICO, t. V, n° 417; VAN RYN, t. Jer, n° 371) ;
Attendu que la capacite juridique d'une societe est cependant limitee par les statuts sociaux, et que l'acceptation par elle d'un mandat d'administrateur n'est valable que pour autant qu'elle soit conciliable. avec ses statuts (FRE:DERICQ, loc. cit.) ; .que l'appelante soutient qu'en l'espece, l'acceptation du mandat par la societe anonyme Galeries de l'Est serait etrangere a son objet social;
Attendu que l'objet de cette societe comprend toutes les operaions se rappor· tant au commerce de meubles et articles id'ameublement en general, mais que ses statuts l'autorisent, en termes tres larges et qualifies d'interpretation exten· sive, a s'interesser par les voies les plus diverses a toutes entreprises ayant en tout ou en .partie un objet connexe au sien ou simplement susceptible d'accroitre son activite sociale; qu'en participant aux affaires de la societe Rutex, qui comportent les .produits d'entretien, les couleurs et les vernis, dont l'emploi en matiere d'ameublenient est loi~ d'etre inconcevable, la societe des Galeries de l'Est a pu legitimement estimer qu'elle s'orientait vers un domaine suffisam.ment connexe a son objet social pour ne pas s'ecarter de celui-ci; que, des lors, l'ohjection ide l'appelante manque en fait;
Attendu qu'il n'est, d'autre part, point conteste que la societe anonyme Galeries de l'Est a ,tSte regulierement autorisee par son propre conseil d'administration a accepter la fonction 1d'administrateur de la societe intimee, et qu' elle en a regu. lierement delegue l'exercice a l'un de ses adm.inistrateurs;
Attendu que c'est done a bon droit que le premier juge a rejete les moyens de nullite d'exploit et d'irrecevabilite d'action invoques par l'appelante;
Par ces motifs, la Gour,
Oui'. M. l'avocat general Baron van den Branden de Reeth en son avis conforme, emis sur la question de la validite de l'ajournement et de la recevabilite de l'aetion, a I' audience publique du 19 juin 1961;
Re~oit les appels, ... Declare l'appel principal non fonde ...
Observation. - Cet arret fait I' objet d'un pourvoi en cassation.
N° 5046
![Page 47: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/47.jpg)
- 107
N° 5047. - Cour d'appel de Paris. - 20 mars 1959. Sieg. : MM. Molinier, pres.; Desangles, av. gen. - Plaid. : MMes Chresteil,
Gravier, Launais et Toulouse, avoc. {Lombard c/ Courat.)
I. Societe entre concubins. - Preuve. - Ecrit pas indispensable. - Vie commune insuffisante. - II. Societe entre concubins. - Pas creee pour favoriser Jes relations hors mariage. - V alidite.
I. Si, en vertu des articles z834 C. c. et 39 du Code de comif1terce, la co1t·stitu· tion de toute societe doit donn·er lieu a un ec1·it, il est adm,is en jurisprudence qu'entre assocUs l'existen·ce d'une societe de fait peut etre etablie, pour le passe, en vue de sa liquidation~ meme en !'absence d'un acte con·stitutif.
Lorsqu'il s'agit de concubins, la vie commune ne suffit pas a etabtir la societe de fait.
II. Un contrat entre personnes qui entretiennent hors mariage des relations intimes est nul si ce con·trat a ete conclu en vue de l'etablissement, de (a conti· nuation ou de la 1·ecompense de ces relations. Une societe de fait peut avoir existe en·tre concubins.
ARRET.
Statuant sur l'appel, interjete le 28 decembre 1957, par le sieur Andre-Emile Lombard, d'un jugement du tribunal civil de la Seine rendu le 14 novem;bre 1957, qui a autorise la demoiselle Courat a rapporter la preuve de certains faits arti· cules a l'appui de la demande introduite par la dite demoiselle en declaration de !'existence d'une societe ide fait entre elle et le sieur Andre Lombard, pere de l'appelant, et en partage et liquidation de la dite societe; ensemble sur les canclusions de l'intimee tendant a la confirmation du jugement entrepris;
Considerant qu'il est constant que le sieur Andre Lomrbard et la demoiselle Courat, qui se sont connus en 1921 dans l'etablissement oil ils travaillaient l'un et l'autre, sont devenus a cette date amant et maitresse et que leur liaison a dure jusqu'au deces d'Andre Lombard, le 31 juillet 1952; que cette liaison etait notoire et qu'apres le deces de la dame Lombard, survenu le 12 juillet 1943, le sieur Lombard vint habiter avec la demoiselle Courat; qu'a partir de 1927, Andre Lombard, avec lequel la demoiselle Courat continua a travailler, crea sous son nom un fonds de commerce de mecanique generale, devenu ensuite une entreprise de fabrication d'accessoires electriques, qui, apres une periode de stagnation, prospera a partir de 1938 et donna lieu a la creation, de 1941 a 1946, d'une societe anonyme et de deux societes a responsabilite limitee dont la majeure partie des actions et parts furent at;tribues a Andre Lombard; qu'Andre Lombard a laisse pour unique heritier son fils, Andre-Emile Lombard, qui a recueilli les actions et parts de son pere; que la demoiselle Courat soutient qu'il a existe entre elle et Andre Lombard une societe de fait et que c'est cette societe, qui est proprietaire des actions et parts attribuees a Andre Lombard, lors de la creation des trois societes anonyme et a responsabilite limitee consti· tuees pour la gestion ides entreprises com.merciales qui appartenaient a la societe de fait; que pour l'etablir, elle a fait une offre en preuve que le tribunal a accueillie en se fondant tant sur !'existence d'un commencement de preuve par
No 5047
![Page 48: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/48.jpg)
- 108-
ecrit que sur le caractere pertinent et admissible des faits articules; qu'en cause d'appel, l'appelant demande a la Cour de rejeter l'enquete et de debouter de piano la demanderesse qui, de son cote, conclut a la confirmation du jugement entrepris et fait une offre en preuve complementaire;
Considerant qu'il convient d'examiner successivement si la societe :de fait est possible, si elle est licite, par quels moyens son existence peut etre prouvee, et dans l'hypothese ou la preuve testimonale est admise, si !'articulation faite par la demoiselle Courat est s~ffisamment vraisemblable et si chacun des faits articules est pertinent et admissible;
1° Possibilite de la societe de fait :
Considerant que si en vertu des articles · 1834 du Code civil et 39 du Code commercial, 'la constitution de toute societe doit donner lieu a un ecrit, il est admis en jurisprudence qu'entre associes !'existence d'une societe de fait peut etre etablie pour le passe en vue de sa liquidation, meme en !'absence d'un acte constitutif, si par ailleurs sont remplies a l'egard des deux associes les condi· tions de fond de !'existence de toute societe, c'est-a-dire les apports, la partici· pation aux benefices et aux pertes et I' affectio societatis;
Considerant qu'une telle societe peut avoir existe entre personnes quelconques et notamment entre concubins; qu'il s'agisse d'un veritable concubinage ou d'une simple liaison sans habitation commune, d'un concubinage simple ou d'un concu· binage adultere, la loi ignorant les relations hors mariage en matiere contrac· tuelle et .tous contrats etant, sous la reserve qui va etre indiquee plus loin, permis entre concubins ;
Consi:derant toutefois que lorsqu'il s'agit de concubins, la vie commune ne suffit nullement a etablir la societe de fait et que le pretendu associe doit faire la preuve de la reunion des trois conditions de fond sus rappelees ;
Considerant, en consequence, qu'une societe de fait a pu exister entre Andre LoII11bard et la demoiselle Courat aussi bien a l'epoque OU leur liaison n'entrainait pas la vie commune que· durant celle-ci;
2° Liceite de la societe de fait :
Considerant qu'aux termes des articles 1131 et 1133 du Code civi,l sont nuls les contrats qui ont une cause prohibee par la loi, ou sont contraires aux bonnes mreurs OU a l'ordrc public, qu'iJ en resulte qu'un contrat entre personnes qui entretiennent hors mariage des relations intimes, est nul si ce contrat a ete conclu en VUe de }'etablissement, de la continuation OU de la recompense de ceS relations;
Considerant qu'il n'en est pas ainsi en l'espece; que les relations intimes entre Andre Lombard et la demoiselle Courat ont commence plusieurs annees avant la creation du fonds de commerce dont la gestion aurait donne lieu a la constitu· tion de la societe ide fait; qu'il n'est ni etabli ni meme articule que cette societe aurait ete. creee pour decider la demoiselle Courat a continuer ces relations in times OU pour la recom:penser d'y COllSentir j
Considerant, sans doute, qu'une autre cause immorale du contrat pourrait etre trouvee clans le comportement de Lombard si la societe de fait l'avait amene a detourner au profit de sa maitresse et au detriment de sa famille legitime les produits de son travail, mais qu'il n'en est non plus pas ainsi; qu'il n'est ni etabli
No 5047
![Page 49: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/49.jpg)
- 109-
ni articule que Lombard ait prive sa famille de la contribution qu'il devait apporter a son entretien, et qu'au contraire, c'est la demoiselle Courat qui'. se plaint, si l'existence de la societe ne dev:ait pas etre reco.nnu.tr, d'etre priivee,, a.u profit de la famille legitime de son concubin, de la jouissance de bien~ pro~ena1_1t en partie du travail de toute sa vie;
Considerant enfin que la societe de fait dont il s'agit, si la preuve en etait rapportee,· resterait distincte des societes anonyme et a responsabilite limitee constituees par Lom:bard, et ne serait don~ pas .. en contradiction avec le contenu des actes de ces societes; qu'il serait seulement etabli que les droits .de Lorn· bard dans ces dernieres societes appartiennent en realite a la societ~ de ~ait;
qu'aucune violation des dispositions des articles 1834 du Code civil et 41 du _Code de commerce sur la sauvegarde du contenu des actes de societe ne peut done resulter de I' existence de la societe de fait;
Considerant qu'il n'apparait done pas que la societe de fait dont se prevaut Ja demoiselle Courat ait une cause immorale ou illicite;
3• Preuve de la societe de fait:
Considerant que le premier juge trouvant dans une lettre ectite a sa :maitresse par Lombard, de New York, en 1948, dont un. passage est ci.te dans le jugement; un commencement de preuve par ecrit, a autorise la preuve testimoni11le; ·_
Considerant sans doute que le passage de la lettre retenµ- par_ le premier juge n'a pas le caractere que celui-ci lui a rcconnu, mais qu'il n'est nullement be~oin d'un commencement de preuve par ecrit pour que la preuve testimoniafe soit admissible;
Considerant, en effet, et sans qu'il y ait meme lieu de rechercher .. si l'impos·· sibilite dans laquelle la demoiselle Courat se serait trouvee a raison de la· nature de leurs relations d'obtenir de Lombard un e~rit lui permettant en_ appli~ation de l'article 13481 par. 1er, du Code civil, d'etablir par temoins l'existence.-de la societe de fait, que cette existence, s1agissant par definition d'un~ -s~ci~te qui n'ii dcnne lieu a aucun ecrit, peut etre etablie par to us moyens et ineme . par pt6~ somptions, et que le juge peut l'iriferer des circonstances de la cause et de l'intention des parties qu'il apprecie souverainement;
... (la suite sans interet).
Observations. - Les societes e.ntre concubins ont deja fait I' obw jet de notes publiees en cette revue ( cfr note COPPENS sous Rennes, 22 mai 1950, Revue, 1952, p. 293, et sous Cassation fran~.aise,
3 novembre 1953, Revue, 1954, p. 244,; note HENRYsous Com~ merce Liege, 2 8 fevrier 1 9 5 6, Revue, 1 9 5 6, p. 2 0 5). L' ~volution de la j.urisprudence beige relevee clans ces etudes semble se-- confirw
mer.
Le concubinage et la vie eo'rrimune qu'il implique entrainent
necessairement une tnise en comm tin de certains· bien.c · Cette· _situation ne doit pas etre confondue avec celle qui resulte'd'une activite
lucrative exercee eventuellement· en commun par. les concubins
No 5047
8
![Page 50: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/50.jpg)
--110-
(Liege, 7 decembre 1 9 5 l, Revue, 1 9 5 4, p. 2 3 9) . Une comparai~
son imparfaite permettrait de dire qu' il y a entre ces deux situa;.
tions · la meme difference que ceUe qui, clans le cadre du mariage, existe en.tie le regime matrimonial des epoux et la. socie.te com
mer~iale que, s.ous certaines conditions, ils constituent .entre -eux. Si la- confusion entre ces deux situations essentiellement distinctes
est a. I' origine de la coinplexite de la matiere, il faut ·reconnaitre
qu' en fait il est parfois bien difficile de distinguer I' une de I' autre (cfr notamment le jugement du Tribunal de Gand, Revue, 1961, p. 300; Liege, 7, de~embre 1951, Revue, 1954, p. 239).
Plusieurs theses ont ete avancees pour expliquer la « situation
patrimoniale » decoulant du concubinage; certains auteurs ont parle d'une sorte de regime matrimonial, d'autres ont songe au
contrat de societe, d' autres encore a une societe · ou a une com
munaute de fait. M. R; DEKKERS examine ces theories clans une
note sous I' arret de la Cour d' appel de Bruxelles du 20 juin 194 7
(R.C.J.B., 1948, pp. 11 0 et suiv.; cfr aussi I' examen de jurispru
dence de Mme GEVERS, R.C.].B., 1953, p. 326, n° 30). Avec cet auteur et cette decision, je crois qu'il faut admettre
qu~ le, concubina~e (independamment de tout exercice d'une
activite lucrative) ne cree aucune situation juridique nouvelle. Les
coricubins peuvent done revendiquer les biens dont ils prouvent qu'ils sont proprietaires. Quant aux biens dont la preuve de pro
priet~ ne serait pas rapportee, ils constituent une indivision ou
c~pr<?priete regiepa_r I' article 5 77bis du Code civil ( cfr aussi Paris, 29 janvier 19 53, Revue, 1954, p. 240). C' est le -tribunal civil qui
serait competent pour connaitre d'une telle action (Comm; Liege,
24 fevrier 1956, Revue, 1956, p. 202) .
.. .. . Mais ·tous les concubins ne se contentent .pas d'avoir une vie
privee c_ommune; certains exercent auss1 ensemble une activite
lucrative~
.Nous verrons que cette activite commune est loin d' entrainer
necessairemen t I' existence d' une societe ~n tre eux. Mais le premier probleme que je voudrais r~ppeler est celui de savoir si une
, I
fociete peut · e:X:i"ster entre concubins. · . II y a>quelques annees, la Cour d' appel de Bruxelles -(Revue, 1949, n° 4100) excluait fa possibilite de creer une soci6te entre
concubins. Elle estimait en effet « que les concubins n' ont pas
No 5047
![Page 51: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/51.jpg)
-111-
I' affectio societatis ... et ... que leur volonte de mettre des biens en commun serait du reste inefficace, cette mise en commun n' etant qu'un moyen de realiser des fins que les bonnes mreurs reprouvent ».
Les auteurs ( cfr notamment en Belgique M. FREDERICQ, t. IV, n° 2 1 , et DE PAGE, t. IV, n° 2 6) ont montre ce que cette these pouvait avoir d' outrancier. La realisation en commun d'un bene
fice a-t-elle neces~airement pour resultat de favoriser les relations hors mariages? Ce serait affirmer de fa~on hative « que les societes entre concubins ne visent qu' a leur procurer les ressources indispensables a leur communaute » (note COPPENS sous Rennes,
22 mai 1950, Revue, 1952,_p. 293).
La jurisprudence fran~aise, sans voir une societe a cote de tout concubinage, bien au contraire, admet cependant la possibilite d'existence d'une societe entre concubins (Cass. fr., 25 juillet 1949, Revue, 1952, p. 290; Cass. fr., 17 novembre 1952, Revue, 1954, p. 26; Cass. fr., 1 decembre 1952, Revue, 1954, p. 243;
Cass. fr., 3 novembre 1 9 5 3, Revue, 1 9 5 4, p. 2 44; Rennes deja cite; Paris, 29 janvier 1953, Revue, 1954, p. 240; la decision commentee et Cass. fr., 14 fevrier 1961, D.H., 1961, Sommaires, p. 71, rejetant le pourvoi contre cette decision.)
La jurisprudence beige semble, dans sa majorite, suivre maintenant I' enseignement des tribunaux de nos voisins du Sud.
Le 7 decembre 1951, la Cour d'appel de Liege (Revue, 1954, p. 239) disa_it « qu'il n'existe aucun obstacle legal ace qu'un cou
ple, lie par des liens illegitimes, contracte valablement une association de fait pour exercer en commun une activite lucrative » ( cfr dans le meme sens Comm. Liege, 2 4 fevrier 1 9 5 6, Revue, 1956, p. 202). Avant cela le Tribunal de premiere instance de cette meme ville avait admis qu' en principe il peut se creer entre concubins une indivision ou communaute de fait dont la liquidation et le partage peuvent etre demandes (Civ. Liege, 12 juin 1948, Revue, 1948, n° 4055). L'arret de la Cour de Gand du 4 juillet 195 5 (Revue, 1962, p. 5 2) admet justement que les dispositions principales de I' acte de societe ne sont pas entachees de nullite, car bien que conclu entre concubins, ce contrat n'avait pas pour but de favoriser ou renforcer le concubinage ( cfr aussi Comm. Bruxelles, 27 decembre 1956, Revue, 1958, p. 128).
Par contre, le Tribunal de Gand (cfr le jugement du 29 fevrier
N° 5047
811-
![Page 52: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/52.jpg)
- 112-
1956, Revue, 1961, p. 300) ne semble pas enclin a reconnaitre
l' existence d'une societe constituee entre des concubins.
* * * Mais si on doit admettre que des concubins peuvent constituer
des societes entre eux, encore ne faut-il pas. en conclure qu' une
societe entre concubins est necessairement. valable.
En effet, pour qu' une telle societe ne soit pas contraire a l' ordre
public et aux bonnes mreurs, il faut qu' elle ne soit notamment pas
erigee pour favoriser OU renforcer le concubinage ( cfr notam
ment Com. Liege, 24 fevrier 1956, Revue, 1956, p. 202). 11 conviendra, clans chaque cas d' espece, de rechercher l'intention des
concubins. Ont-ils seulement voulu exercer en commun une activite lucrative ou, au contraire, ont-ils recherche, en creant une
societe, a faciliter leurs relations coupables} L' arret de la Cour
d'appel de Gand du 4 juillet 1955 (Revue, 1962, p. 52) analyse
a ce sujet judicieusement la valeur du contrat clans son ensemble
et la validite d'une de ses clauses .en particulier.
Serait ainsi contraire a l' ordre public la societe entre concubins qui aurait permis a l'un d'eux de detourner, au profit de l'autre
et au detriment de sa famille legitime, le produit · de son travail
( cfr l' arret comm en te) . * **
Si, sous reserve de l' ordre public et des bonnes mreurs, une
societe peut etre constituee entre concubins, encore faut-il aussi
que les elements du contrat de societe soient reunis ( cfr notam
ment Comm. Bruxelles, 2 7 decembre 1956, Revue, 1958, p. 129). Ainsi que le disait la Cour d' appel de Paris clans un arret du
29 janvier 1953 (Revue, 1954, p. 240): « La cohabitation, ~eme prolongee, de personnes non mariees est insuffisante pour prouver
la constitution d'une societe de fait entre concubins ... , I' existence
d'une telle societe ne peut etre reconnue que si les conditions
exigees pour la formation du contrat de societe se trouvent remplies ... » (cfr aussi Cass. fr., 3 novembre 1953, Revue, 1954, p. 244, et 25 juillet 1949, Revue, 1952, p. 290, et la decision
rapportee) . Souvent il sera .difficile de differencier la copropriete resultant
de la vie commune de la societe resultant de l'activlte lucrative
commune. Frequemment <« les concubins ne visent pas a fonder
une societe a but commercial, mais simplement a vivre ensemble
en gagnant leur subsistance » (SAVATIER, note sous Civ. Seine,
No 5047
![Page 53: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/53.jpg)
-113-
3 mars 1922, D.P., 1924, 2, 9 et suivants, cite par Comm. Bruxel#
les, 27 decembre 1956; cfr aussi Paris, 29 janvier 1953, Revue, 19 54, p. 240). C' est a celui qui invoque I' existence d'une societe de la prouver.
II faut rechercher principaleme.nt, non tant si les concubins ont
respecte les formes du contrat de societe (on sait que les societes
dites de fait ou irregulieres possedent la personnalite juridique;
cfr VAN DER MENSBRUGGHE, Des societes constituees sans acte ecrit ou dont l' acte constitutif n' a pas ete publie, Revue, 19 5 7, pp .. 1 03 et suiv.)
mais surtout s'ils ont mis des biens et/ ou une activite en commun
en vue de partager les benefices en provenant.
C' est cependant un raisonnement hatif que de deduire, comme
le Tribunal de Gand reproduit sous le numero 5023, !'absence
d' affectio societatis de I' existence du concubinag·e ( cfr supra) ..
* ** Enfin, on doit s'interroger sur les modes de preuves d'un contrat
de societe entre concubins.
L' article 1834 C. c. stipule que toute societe doit etre formee
par ecrit lorsque son objet est d'une valeur de plus de 3.000 F. Cette disposition, contrairement a !'article 4 des lois coordonnees
sur les societes commerciales, ne fait pas de I' ecrit un element Cle
validite du contrat. C' est une application de I' article 1341 C. c.
(FREDERICQ, t. IV, n° 97). Mais, en matiere commerciale !'article 1341 C. c. peut etre
ecarte par !'article 25 de la loi du 15 decembre 1872, qui prevoit
la possibilite de prouver les engagements commerciaux, notam#
ment par presomptions. Aussi admet#on que I' existence d'une
societe commerciale irreguliere peut etre prouvee, entre associes,
par toutes voies de droit (Cass., 4 decembre 1924, Revue, 1925, n° 262 7; Comm. Liege, 19 fevrier 192 7, Revue, 192 7, n° 2800; Bruxelles 14 decembre 1928 Revue, 1930 n° 3019; Liege, 7 fe
vrier 1951, Revue, 1954, p. 239). Mais si; en matiere commerciale, I' existence d'une as·sociation
de fait petit etre etablie par toutes voies de droit, « encore n' est#ce
que sous I' appreciation prudente du juge ... qui ... ne doit l'admet~
tre qu' avec circonspection et seulement s'il n' a pas ete possible
OU d'usage de se reserver une preuve ecrite » (Comm. Liege,
24 fevrier 1956, Revue, 1956, p. 202). Jacques 'T KINT
Avocat pres ta Cour d'appel de Bruxelles.
N° 5047
![Page 54: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/54.jpg)
- 114-
N° 5048. - Tribunal de commerce de Bruxelles ( 6e eh.). 31 decembre 1960.
Sieg. : MM. De Bluts, pres.; Corbiau et de Deyn, juges; Scheyvaerts, ref. Plaid. : MJMes E. A. Flagey et G. Scoriels, avoc,
(Societe de !'Exposition c/ Marinof Vasil.)
Societe anonyme. - Action en justice. - Representation par un comite executif pris au sein du conseil d'administration. - Disposition statutaire l'auto1isant. - Validite.
Il n'est pas requis que la representation d'une societe anonyme en· justice soit assumee par son conseil d'administration, mais seulement que l'assignation porte !'identification des man·dataires qui ont pouvofr de la representer a cet effet.
Rien dan'S la loi n'interdit a la societe de conf erer ce pouvoir a des matidataires speciaux et notammen·t d'autoriser son comeil d'aJ.ministration a designer dans son sein un comite executif ayant le pouvoir de poursuivre toutes actions judici'aires.
JUGEMENT.
Attendu qu'a tort le defendeur deduit ses exceptions de nullite de !'assignation et d'irrecevaibilite de la demande du fait que cet exploit enonce que la demanderesse est representee aux fins de la demande par son comite de direction, qui n'a, statutairement et legalement, d'autre pouvoir que de diligenter la poursuite de la demande, et la regle juridique a appliquer voulant que la representation d'une societe ano-nyme en justice soit assuree par son c'onseil d'administratio-n;
Attendu qu'il est seulement requis que !'assignation signifiee a la requete d'une societe anonyme porte !'identification des mandataires qui o-nt po-uvoir de la representer a cet effet;
Que rien dans la loi n'interdit a la societe de conferer ce pouvoir a des mandataires speciaux;
Attendu qu'aux termes de !'article 18 des statuts de la demanderesse, son conseil d'administr_ation pourrait designer dans son sein un comite executif, dont ii determinerait lui-meme la composition, les pouvoirs et le mode de deliberation;
Qu'il resulte du proces-verbal de la reunion du dit conseil d'administration, tenue le II mars 1954, que cet or.gane a decide de co-nferer au comite executif, constitue par lui, le pouvoir de poursuivre toutes .actions judiciaires, tant en
I
demandant qu'en defendant, ce droit comportant ce~ui de plaider, transiger ou compromettre; ;
Qu'en lui do-nnant un tel pouvoir le conseil d'administration de la societe dcmanderesse a necessairement donne a son comite executif celui de representer la societe en justice;
Qu'il importe peu qu'il ait ajoute « mais au nom de la societe, poursuites et diligences de son conseil d'administration »;
Que dans un tel contexte, cette addition ne peut au plus imposer que la forme dans laquelle le comite executif exercera son pouvoir;
Qu'elle ne peut etre inspiree que par la preoccupation d'assurer en tout cas la regularite de procedures et d'eviter toute contestation a ce sujet, mais qu'elle
No 5048
![Page 55: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/55.jpg)
- 115 -
µ'est pas de nature a diminuer l'etendue du pouvoir expressement confere au comite executif;
Attendu qu'il ne s'agit done pas ·d'une question de pouvoir et de representation, mais au plus d'une nullite de forme, qui aux termes de l'article 173 du Code de prodedure civile ne peut etre admise que s'il est justifie qu'elle nuit aux interets de la partie adverse;
Que le defendeur ne fait valoir aucune cause de prejudice; Que le moyen doit done etre repousse; Attendu que ce moyen a id'ailleurs d'autant moins d'interet pour le defendeur
que la societe demanderesse se trouve actuellement en etat de liquidation et que les liquidateurs, dont la qualite pour ce faire n'est pas contestee, declarent reprendre !'instance;
Qu'il y a lieu de Ieur donner acte de cette declaration qui ne fait pas l'objet tl'une contestation;
(La suite sans interet.)
Observations. - Le probleme parait ne pas avoir ete pose de savoir si I' action dont le tribunal de commerce etait saisi ne debor~ dait pas du cadre de la gestion journaliere et n' etait pas de ce chef susceptible d' exceder les pouvoirs de delegation du conseil d' ad~ ministration.
Cfr sur ce problem~ J. LEHRER (Revue, 195 7, n° 465 7) et P. DEMEUR (Revue, 1961, n° 4953).
N° 5049. - Loi du 28 deqembre 1961 prorogeant l'application de Ja Joi du 15 juillet 1959 tendant a favoriser }'absorption OU la fusion de societes et l'apport de branches d'activite (Moniteur du 18 janvier 1962, p. 348).
Article unique. Aux articles l'er, § ler, alinea ler, et 2, alinea ler, de la loi du 15 juillet 19591 tendant a favoriser J'absorption OU la fusion de societes et J'apport de branches d'activite, les mots « jusqu'au 31 decembre 1961 » soot rempfaces par Ies mots « jusqu'au 31 decembre 1962 ».
Promulguons la presente Ioi, ordonnons qu'elle soit revetue du sceau de l'Etat et publiee par le Moniteur beige.
N° 5050. - Loi du 28 decembre 1961 modifiant la loi du 27 mars 1957, relative aux foods communs de placement et modifian.t le Code des droits de timbre et le Code des taxes assimilees au timbre (Moniteur du 18 janvier 1962, p. 347).
Article rer. Les articles 12 et 14 de la loi du 27 mars 1957 relative aux foods communs de .placement et modifiant le Code des :droits ·de timbre et le Code des taxes assimilees au timbre, soot abroges.
N° 5050
![Page 56: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/56.jpg)
- 116-·
Art; 2. L'article 18 de Farrete du Regent du 26 1um 1947, contenant le Code des droits de timbre, confirme par l'article 101' de la loi du 14 jtiillet 1951; est remplace par les dispositions suivantes :
« Article 18. Sont assujettis a un droit de 1,60 p.c., les titres nominatifs ou au porteur emis par des personnes physiques OU morales etablies en BeLgique en representation, en tout ou en partie, d'actions, obligations ou effets publics quelconques emanant d'autorites, collectivites OU societes etrangeres, OU de quotite d~ pareils effets, en ce compris les certificats crees en representation des parts de copropriete des participants a un foods commun de placement gere ou admi· nistre par une personne etablie en Belgique,
» Le droit est calcule sur la valeur cumulee des effets puhlics etrangers OU
de la quotite d'e.ffets publics etrangers que le titre OU certificat represente. La . base. est arrondie, le cas echeant, a la dizaine' de francs superieure.
» La valeur a prendre en consideration est celle notee au demier prix courarit publie par ordre du gouvernement avant la date de l'exigibilite du droit ou, a defaut de notation au prix courant, la valeur venale declaree par l'emetteur sous le controle de !'administration.
» Les dispositfons du present article ne sont pas applicables lorsque !'emission a lieu a l'etranger, a condition que les modalites de !'emission. permettant de differencier le·s titres emis a l'etranger de ceux emis en Belgique soient prealablement app-rouvees par le Ministre des Finances ou son delegue. »
Art. 3. Dans l'article. 20 du meme arrete du Regent, un alinea redige comme suit est insere entre les alineas 1 et 2 :
« Le meme droit est applicaible aux titres nominatifs OU au porteur emis a l'etranger clans les conditions precisees a !'article 18, dernier alinea. »
Art. 4. L'article 1er de la presente loi entre en vigueur le 31 decembre 1961.
Art. 5; Le Ministre des Finances fera rapport au padement pour le 31 decem· bre 1965 sur le fonctionnement des fonds communs de placem:ent, ainsi que sur !'application de la presente loi.
Promulguons la presente loi, ordonnons qu'elle· soit revetue du sceau de l'Etat et publiee par le Moniteur beige.
N° 5051. - Colloque international de droit europeen.
L'association beige pour le droit europeen a organise a. Bruxel~ les, les 12, 1 3 et 14 octobre 196.1, un colloque dont les tr-avaux portaient sur
1° Fusion des societes (rapporteur general : M. le Professeur
Houin; rapport beige presente par M. le Professeur J ;. G. Renauld);
2° Lois anti-trust (rapporteur general : M. le Professeur Bernini; rapport beige presen te par M. P. Van Reepinghen) ;
3° Vente avec primes {rapporteur general: M. Marcel Gregoire; rapport beige presente par Me W. Van Gerven).
No 5051
![Page 57: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/57.jpg)
- 117-
Voici le texte de la resolution votee par l' assemblee en matiere
de fusion de societes :
Consiiderant que la fusion de societes peut constituer un instrument de progres economique qui presente un interet particulier dans les relations du Marche Commun.;
Emet le voou :
lo Qu'une convention entre Jes Etats membres. conclue par ap·pJication de !'article 220 'du Traite de Rome, reconnaisse la vaJidite des fusions entre societes relevant de deux ou plusieurs legislations de ces Etats membres;
. 2~ Que cette convention etende aux fusions visees a l'alinea precedent le regime fiscal applicable dans ~haque Etat membre aux societes relevant de sa legislation; que la meme absence de discrimination fiscale soit appliquee aux scissions de societes et aux apports partiels d'entreprises dans les Etats membres qui soumettent ces operations a un regime fiscal particulier;
30 Que, par application de !'article 54, III g) et eventueHement de !'article loo
du Traite de Rome, soient prises les mesures de coordination des legislations nationales afin que :
a) soit affirme dans toutes les legislations des Etats rnembres le principe que par Je seul effet de la fusion, Ja societe absorbante ou nouvelle se trouve substituee aux droits et obligations de toute nature de la societe absorbee ou des societes fusionnantes ; '
b) que dans l'interet des associes et des creanciers toute fusion fasse I'objet d'une verification: soit de la part d'une autorite judiciaire, soit de la part d'une administration publique, soit de Ja .part de commissaires verificateurs, soit par tout autre moyen presentant une efficacite analoigu:e;
c) qu'une publicite adequate soit organisee en faveur des actionnaires et des creanciers des differentes societes intervenantes j
d) qu'a la suite de cette pUJblicite un delai uniforme soit ouvert pour permet~ tre aux creanciers d'exercer un recours devant l'autorite judiciaire ou administrative du siege social de la societe debitrice afin que des garanties leur soient fournies a moins que la fusion ne risque pas de porter atteinte a ieurs interets; que si de telles garanties ne pouvaient leur etre foumies, les creanciers ileraient recevables a demander I' execution immediate de leurs droits j
·e) qu'a !'expiration de ce meme delai, aucune action en nullite ne puisse plu1 etre dirigee contre !'operation de fusion, seule une action en dommages-interet9 pouvant etre eventuellement dirigee contre les organes des societes et contre la societe absorbante ou nouvelle.
Le Colloque tienrt a ajouter qu'il serait souhaitable que ces reformes relativet a la fusion des societes soient suivles dans Ies delais les plus brefs d'une harmonisation des legislations nationales ou d'une convention concernant :
a) la publidite des sooietes, b) !'execution des jugements, c) la faillite,
ces matieres etant directement liees a la protection des interets des associes et des tiers a !'occasion OU a la suite d'une fusion de societes relevant de legisfa. tions nationales differentes.
![Page 58: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/58.jpg)
- 118-
BIBLIOGRAPHIE
N° 5052. - Jean SERVAIS et E. MECHELYNCK, Les Codes et les lois speciales les plus usuelles en Belgique, 30° edition, par Jean BLONDIAUX, substitut du Procureur general pres la Cour d' appel de Liege, et Jean MASQUELIN, juge au Tribunal de premiere instance de Charleroi, delegue au bureau de coordination du Conseil d'Etat; 5 vol. in 8'0 , t: {er, 1 040 pp., t. II, 102 7 pp., t. III, 746 pp.; t. IV, 840 pp., t. V, 3 76 pp., plus, dans chaque volume 312 pp. de tables. (Bruxelles, Etablissements Emile Bruylant, 1961, prix global 2.400 F.)
Au temps de notre jeune·sse, les « lois les plus usuelles » tenaient en un volume; a ce volume nous donnions une sympathie empreinte de familiarite, conscients que nous etions d'en pouvoir connaitre en gros la_ matiere. Mais la matiere a cru, s'est multipliee, et ce n'est pas sans quelque effroi et decontenance que nous avons assiste a ce phenomene, eprouvant a present le souci d'i,gnorer non pas seulement le detail de la legislation, mais son architecture meme au-dela des grandes lignes, et les communications entre les differentes ailes de la construe· tion.
Perdue la sobriete primitive, repandue en plusieurs volumes la matiere grossie, le praticien se trouvait devant un edifice (un complexe, d'irait-on aujourd'hui) a plusieurs portes, dont on ne savait souvent laquelle em\p·runter, fut-ce apres avoir lu les panneaux d'entree, et l'on ignorait, une fois en&,age, si l'on avait acces a !'ensemble de ce qu'on entendait aborder.
Sans doute des tables generales servaient-elles de guide : un volume de 900
pages dans !'edition de 1959 des Codes Servais. M\ais_ pour l'emploi hors de la salle d'audience, du cabinet ou de la bibliotheque, quelle difficulte de maniement.
L' edition de 1961 (la 30°) nous donne a presentj la matiere etant divisee en cinq . tomes, des tables qui se trouvent reparties dans chacun des volumes, et perm et ainsi une consultation isolee, accompagnee, des references, ·s'il y a lieu, au volume que l'on n'a pas sous la main.
Tel est, parait-il, le principal merite a souligner de !'edition actuelle. 11 n'est, er: effet, pas besoin de revenir sur celui des editions anterieures, qui se trouve naturellement integre dans !'edition .presente.
P. D.
No 5052
![Page 59: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/59.jpg)
- 119-
N° 5053. -. - Recueil annuel de.jurisprudence belg,e, publie sous la
direction de Charles VAN REEPINGHEN, ancien Batonnier de
FOrdre des Avocats a la Cour d'appel de Bruxelles; Professeur
a l'Universite de Louvain; Tables Decennales 1949-1958, par
Jacques PuTZEYS, Aime DE CALUWE, Jacques 'T KINT, Guy VAN FRAEYENHOVEN, Claude VAN HAM, Avocats a la Cour d'ap~
pel de Bruxelles. (Maison Ferd. Larcier, S.A., 1961, 743 pages,
1200 F.)
Chaque fois que je me trouve devant l'une de ces tables offrant la substance de ce qui, au COUrS d'e plusieurs annees, a ete publie en une matiere OU pour un recueil donnes, je me sens saisi d'admiration pour le merite de ceux qui pretent ainsi un la,borieux concours a la connaissance juridique sans qu'au~une couronne leur soit promise - d'admiration et de confusion aussi en me jugeant incapable de pareil sacrifice.
Quelle taohe necessaire cependant si l'on veut voir survivre ce qui defile au rythme precipite de notre epoque !
Parmi les repertoires ainsi elabores, celui qui nous est aujourd'hui presente est sans doute l'un des plus copieux. II nous est confie que le Recueil annuel a collige quelque 70.000 decisions de justi~e et etudes de doctrine. Parmi lesquelles combien interessent la matiere des societes? Un grand nombre, on le constatera, en nous excusant de n'en avoir pas fait le compte.
Le tout n'est pas cependant d'accumuler. II s'agit de classer, avec le sens juridique de l'endroit convenant aux differents articles, en maniere telle qu'a la fois les categorisations logiques soient respectees et le consultant y trouve chaque chose a la plade OU ii peut le pressentir.
Les auteurs y ont reussi et toute gratitude leur est due. P.D.
N-0 5054. - Le contribuable et l'Etat, par Camille ScAIL TEUR. -
Editions de la Societe cl' etudes morales, sociales et juridiques,
Louvain, 1 961, 1 7 2 pp.
En un style alerte et concis et sous une presentation de choix, l'auteur, deja connu par ses recherohes sur le devoir fiscal, nous donne un livre cons acre aux rapports entre le contribuable et l'Etat. Sujet brulant s'il e,n est mais qui n'altere pas la serenite scientifique de l'auteur. M. Camille SCAILTEUR n'a pas dis· perse sa pensee et, tout au long des pages de son expose, la rigueur des develop· pements ne quitte pas le theme qu?it nous propose.
11 s'est attache tout d'abord aux differentes conceptions du devoir fiscal depuis l'Anitiquite jusqu'a nos jours. Notre epoque ne .met plus guere en parallele que deux systemes, celui, d'inspiration socialiste, qui vise a la redistribution des reve· nus par les canaux de la fiscalite, et celui, inspire de solidarisme, qui s~ fonde sur le devoir de cooperation au bien common selon les moyens de chaque memlbre de fa communaute.
Quelle est la valeur morale intrinseque de la loi d'impot? La fraude est aussi
No 5054
![Page 60: N° 5037. - Fusion de societes - Participation de la ... · dans la societe absorbante. Des raisons fiscales ou simplement pratiques ( 1 ) . et,, le cas echeant, les repercussions](https://reader033.vdocuments.mx/reader033/viewer/2022041607/5e34f3d2b9171a5a115993cb/html5/thumbnails/60.jpg)
- 120 -
mal,saine pour l'individu qu'elle est nuisible a la collectivite, Elle n::iine la securite contractuelle en falsifiant les clauses et les modalites d'une operation juridique. Elle initie au mepris de Ja loi en general et, circonstance puisee dans la justice distributive, elle aggrnve le fardeau des concitoyens.
II y a toutefois des limites au devoir fiscal. L'auteur expose brillamment ce qu'est la liberte de choisir la voie la moins imposee (oblique sed non simulate) et la regle qui retourne -contre le Iegislateur fiscal le doute sur la portee d'une loi (in dubio contra fiscum).
Dans le domaine de la psychologie des contribuables, l'auteur releve 'que la classe possedante, lourdement taxee, se considere comme la minorite lesee qui fait les. frais des depenses votees par les parlementaires au profit de leurs electeurs. Cette classe estime que le jeu de la loi du nombre est fausse par l'intervention des parlementaires qui ont un interet electoral au galvaudage. de~ deniers publics. Elle reagit par !'evasion des capitaux taiidis que dans le·s classes moyen· nes, la . fraude est le plus souvent une dissimulation rudimentaire de revenus professionnels. Avec justesse, l'auteur remarque que la fraude devient parfois une forme d'oppo•sition politique-:-
Quels sont les devoirs de l'Etat? La question, en elle-meme, est heureuse et l'auteur doit en etre felicite. La principale caracteristique de son ouvrage est, selon nous, ce souci d'equilibre entre les devoirs du contribuable et ceux de l'Etat. Certes, la loi fiscale est une loi de subordination a l'Etat, auteur et bene· ficiaire de cette loi, contrairement a la loi civile qui est un arbitrage par l'Etat d'un conflit d'interets, mais les efforts des contribuables ne doivent pas demeu· rer sans echo, « Que, par ailleurs, le contribuable decouvre de serieuses raisons de croire que les gouvernants se servent de l'impot comme d'une arme de lutte partisane .... il en vient a considerer l'impot comme une· extorsion » (p. II7). L'auteur rappelle que l'Etat ne peut quitter, par besoin de rendement, le chemin de la bonne foi ni depasser un taux maximum ou «breaking point». Nous ajouterons que le citoyen, im1puissant comme electeur a obtenir l'assainissement des depenses publiques, reagira comme contribuable pour que l'impot des uns ne paie pas l'incom.petence des aUJtres.
Rien n'autorise, id:it l'auteur, a ecarter les sanc:tions penales dans le domaine des fraudes fiscales. Cependant, devant un delit fiscal, le Tribunal se trouvera place dans une position moins severe que devant un delit . ordinaire, a la fois parce qu'il n'existe pas 1de reprobation sociale des fraudes fiscales et parce que le contribuable fraudeur n'est pas un delinquant en 'etat d'agressivite sociale.
Les lecteurs de la Revue retiendront I' opinion de l'auteur qui est hostile a la mise des titres au nominati:f car elle serait nuisible a l'ec'onomie nationale. II approuve le precompte •de l'impot complementaire personnel qui n'est qu'une variante de perception. II rejette la deductibilte des impots payes, ceux-ci n'etant pas une « charge du revenu » mais un « facteur de production».
L'ouvrage de M. SCAILTEUR vient a son heure. Les idees qu'il contient sont appuyees par son autorite et son experience. Qu'elles ne soient pas perdues, au seuil de la reforme fi~cale et qu'elles evitent de la rendre illusoire. La fraude sin.on se colorerait de plus en plus d'opposition a un regime incoherent et, sur le phm moral des lois justes, deviendrait •de moins en moins une tricherie.
Pierre. COPPENS.
No 5054