mondes en collision 1

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L'auteur exprime ici sa reconnaissance pour les autorisations qui lui ont t accordes de faire des citations des ouvrages suivants : G. A. Dorsey, The Pawnee.- Mythology, Carnegie Institution of Washington, 1906 ; Maimonides:The Guide for the Perplexed, translated M. Friedlander. E. P. Dutton, Inc., 1928 ; Clements R Markham, The Incas of Peru, E.P. Dutton, Inc., 1910 ; Shakuntala and other writings of Kalidasa, transl. A. W. Ryder, Everyman's Library, E. P. Dutton, Inc., 1912 ; James Moffatt, The Bible: A New Translation, copyright, 1935, Harper & Brothers ; The Loeb Classical Library, Harvard University Press : Homer, The Iliad, transl. A. T. Murray, 1925 ; Hesiod, Theogony, transl. H. Evelyn-White, 1914 ; Euripides, Electra, transl. A. S. Way, 1919 ; Plato, Timaeus, Transl. R.C.Bury, 1929, and The Statesman (Politicus), transl.H. N. Fowler, 1925 ; Appolodorus, The Library, transl. J. B. Frazer, 1921 ; Seneca, Thyestes, transl. F. J. Miller, 1917 ; Virgil, Georgics transl. H. R. Fairclough, 1920 ; Ovid, Metamorphoses transl. F. L. Miller, 1916 ; Philo, The Eternity of the World, transl.F. H. Colson, 1941 ; Plutarch, Life of Numa, transl.B. Perrin, 1914 ; Louis Ginzberg, The Legends of the Jews, copyright, 1910, 1928, The Jewish Publication Society of America ; L. de Cambrey, Lapland Legends, Yale University Press, 1926 ; The Philosophy of Spinoza, ed. J. Ratner, copyright, 1927, Modern Library, Random House, Inc. ; R. A. Daly, Our Mobil Earth, copyright, 1926, Charles Scribner's Sons ; Evelyn Stefansson Here is Alaska, copyright, 1943, Charles Scribner's Sons ; J. F. Fleming, Terrestrial Magnetism and Electricity, McGraw-Hill Book Company, New York, 1939.

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Mondes en collision

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Avertissement des diteursToutes les grandes thories scientifiques ont eu leurs pionniers avant que de connatre leurs colonisateurs, leurs patients lgislateurs, puis leurs rvolutionnaires : Spallanzani est venu avant Pasteur, Fermat avant Descartes et Mendel a devanc Morgan. L'ouvrage du Dr Immanuel Velilcovsky que nous vous prsentons aujourd'hui vous apportera la fois le tmoignage d'une aventure spirituelle encore enivre de ses propres dcouvertes et le rcit de prodigieux vnements tout traverss de cataclysme terrestres et co;miques. Mondes en collision n'est pas seulement un livre tonnant par les faits qu'il relate, mais c'est aussi l'oeuvre d'un tllori cien sincre qui taye chacune de ses assertions par une documentation considrable puise aux sources les plus authentiques. Nous ne nous dissimulons cependant pas l'accueil trs rserv que cette thse rencontrera, tant auprs des milieux scientifiques que des esprits aveugls par trop d'orthodoxie. C'est pourquoi il nous a paru indispensable de prciser les motifs auxquels nous avons obi en publiant cette traduction. Les hypothses avances par le Dr Velikovsky n'engagent naturellement personne, ni nousmmes, mais nous estimons que l'essentiel de sa thse ne saurait tre rejet en allguant justement, le caractre conjectural de certaines thories secondaires que l'on y rencontrera. Mondes en collision ouvre magistralement la voie tout un ensemble d'analyses et de travaux dont la diversit et la complexit ne sauraient plus tre assumes par un seul homme, si rudit soit-il. Cette thorie qui semblera fantastique beaucoup est l'oeuvre d'un pionnier et, ce titre, elle nous parat digne de la plus srieuse attention. C'est fort de cette conviction que nous avons renonc demander au Dr Velikovsky d'oprer certaines coupures dans son ouvrage pour le i amever ses articulations principales. Cette mesure et sans doute vit quelques sursauts explosifs au monde savant mais nous risquions aussi de porter gravement atteinte au souci d'universalit qui se manifeste au long de cette oeuvre o toutes les disciplines, de l'astronomie l'archologie, de la gologie l'histoire, sont appeles tour tour fournir leurs preu\@es. Une si vaste entreprise est la mesure de ses audaces. Pour la commodit de la lecture nous avons rejet en fin d'ouvrage l'ensemble de l'appareil critique et des rfrences.

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Prface

Ce livre a pour sujet les guerres qui bouleversrent la sphre cleste dans les temps historiques, et auxquelles notre plante participa. Il ne dcrit que deux actes d'un grand drame : le premier se droula il y a trente-quatre trente-cinq sicles, au milieu du deuxime millnaire avant notre re ; le second au cours du VIIIe et au dbut du VIIe sicle avant J. C., il y a quelque vingt-six sicles. Cet ouvrage comporte donc deux parties, prcdes d'un prologue. Le principe de l'harmonie et de la stabilit des sphres cleste et terrestre est le fondement mme de notre conception prsente de l'Univers, qui trouve ses expressions essentielles dans la Mcanique cleste de Newton et dans la thorie darwinienne de l'volution. Si ces deux savants sont sacro-saints, ce livre est une hrsie. Et pourtant la physique moderne, avec sa thorie de l'atome et des quanta, constate des bouleversements dramatiques dans le microcosme - l'atome - prototype de notre systme solaire ; une thorie qui envisage la possibilit de phnomnes semblables dans le macrocosme - le systme solaire - ne fait qu'appliquer la sphre cleste les concepts de la physique moderne. Ce livre s'adresse au savant comme au profane; j'entends que nulle formule, nul hiroglyphe ne barrera la route qui en entreprendra la lecture. S'il arrive que des tmoignages historiques ne cadrent pas avec certaines lois dj formules, il importera de se rappeler que la loi n'est que la conscration de l'exprience et de l'exprimentation, et qu'en consquence les lois doivent se plier aux faits historiques, non les faits aux lois. Je n'exige pas du lecteur qu'il accepte une thorie les yeux ferms :je l'invite au contraire se demander en toute sincrit s'il s'agit l d'un livre de fiction pure ou bien d'une oeuvre solide, fermement taye par des faits historiques; je le prie de me faire crdit sur un seul point, au reste secondaire pour la thorie des cataclysmes cosmiques : j ai utilis un tableau synchronique de l'histoire d'gypte et d'Isral qui n'est pas orthodoxe. Au printemps 1940 il m'est brusquement venu l'ide que quelque gigantesque cataclysme avait eu lieu au temps de l'Exode : de- nombreux textes des critures en apportaient l'clatant tmoignage. Ds lors, cet vnement pouvait servir dterminer la date de l'Exode d'Isral dans l'histoire de l'gypte, ou tablir le tableau synchronique de l'histoire des deux peuples. C'est ainsi que j'entrepris Ages in chaos , qui est la reconstruction de l'histoire du monde antique depuis le milieu du second millnaire avant notre re jusqu' Alexandre le Grand. Ds l'automne 1940, j'eus l'impression d'avoir saisi la vraie nature de cette gigantesque catastrophe; pendant neuf ans je menai de front deux tches, en crivant de conserve l'histoire politique et l'histoire naturelle de cette poque. Ages in chaos fut achev le premier; il ne sera cependant publi qu'aprs Mondes en collision . Dans ce dernier livre j'tudie les deux ultimes actes d'un grand drame cosmique; certains actes antrieurs, tel le Dluge, feront l'objet d'un autre volume. Le rcit la fois cosmologique et historique que contient le prsent ouvrage s'appuie sur les tmoignages des textes de l'histoire du monde entier, sur la littrature classique, les popes nordiques, les livres sacrs des peuples d'Orient et d'Occident, les traditions et le folklore des tribus primitives, sur de vieilles inscriptions et d'antiques cartes astronomiques, sur les dcouvertes archologiques, gologiques et palontologiques. Mais si des bouleversements cosmiques se sont produits dans le pass historique, pourquoi la race humaine n'en a-t-elle pas conserv le souvenir? Pourquoi n'en retrouve -t-on la trace

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qu'au prix de recherches obstines ? Le chapitre l'amnsie collective clairera ce problme. Mon travail ressemblait assez celui du psychanalyste qui, partir de souvenirs et de rves discontinus, reconstruit une exprience traumatique oublie, qui imprima une trace profonde sur l'enfance d'un individu. En appliquant la mme mthode l'histoire de l'humanit, on se rend compte que les inscriptions ou les thmes des lgendes jouent un rle comparable celui des souvenirs et des rves dans l'analyse d'une personnalit. Est-il possible, partir de ces donnes polymorphes, d'tablir des faits certains? Nous comparerons, nous opposerons sans trve un peuple l'autre, les rcits piques aux cartes astronomiques, et la gologie aux lgendes, jusqu' obtenir enfin des faits authentiques. Dans quelques cas il est impossible d'affirmer avec certitude qu'un document ou une tradition se rapporte telle ou telle de ces catastrophes qui se produisirent au cours des ges; il est mme probable que certaines traditions ne sont qu'une synthse d'lments appartenant des ges diffrents. Dans l'analyse finale il n'est cependant pas capital de discriminer les lments de chaque catastrophe individuelle. Il parat autrement plus important, nous semble-t-il, d'tablir : 1 que certains bouleversements physiques ont vritablement exist, qui affectrent le globe entier aux poques historiques; 2 qu'ils furent provoqus par des agents extraterrestres; 3 que l'identification de ces agents est possible. Ces conclusions entranent de multiples consquences. Qu'il me soit permis d'en rserver l'examen pour l'pilogue de ce livre. Quelques personnes ont lu le manuscrit de mon livre et m'ont prsent des suggestions et des remarques pleines d'intrt. Ce sont, dans l'ordre chronologique de leur lecture : Dr Horace M. Kallen, ancien doyen de la Graduate Faculty of the New School for Social Research, NewYork ; John J. O'Neill, rdacteur scientifique du New York Herald Tribune ; James Putnam, coditeur de la Macmillan Company ; Clifton Fadiman, critique et commentateur littraire ; Gordon A. Atwater, directeur du Hayden Planetarium l'American Museum of Natural History, New-York. Ces deux dernires personnalits ont spontanment demand lire cet ouvrage, aprs que Mr. O'Neill en eut fait la critique dans le Herald Tribune du 11 aot 1946. Je leur exprime ici ma reconnaissance, mais la responsabilit des ides et du texte incombe moi seul. Miss Marion Kuhn a bien voulu revoir le manuscrit et m'a aid dans la correction des preuves. Il est courant qu'un auteur ddie un de ses ouvrages sa femme, ou mentionne son nom dans la prface. J'ai toujours considr que cet usage comportait une certaine part d'ostentation; mais il m'apparat, l'heure o ce livre va voir le jour, qu'il serait d'une rare ingratitude de ne point signaler que ma femme Elishevay a consacr presque autant de temps que moi-mme. Je lui ddie ce livre. Au cours des annes o je composais mes deux livres, une catastrophe mondiale, celle-ci provoque par l'homme faisait rage : les hommes s'entre-tuaient sur la terre, sur les mers et dans l'air. C'est pendant cette guerre que l'homme a dcouvert le moyen de dissocier quelques-uns des lments constitutifs de l'univers - les atomes de l'uranium. Si un jour il parvenait rsoudre le problme de la fission et de la fusion des atomes dont la crote terrestre, son eau et son atmosphre se composent, il se pourrait qu'il dclencht fortuitement des ractions en chane telles, que notre plante perdrait toute chance de survie et se verrait dfinitivement limine des membres de la sphre cleste. Immanuel Velikovsky.

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Prologue

Quota pars operis tanti nobis committitur SENEQUE

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Chapitre 1

Dans un immense universDans un immense univers, un petit globe, la terre, tourne autour d'une toile. Il occupe la troisime place, aprs Mercure et Vnus, dans la famille plantaire. Il est constitu par un noyau solide, tandis que la majeure partie de sa surface est recouverte de liquide, et il possde une enveloppe gazeuse. Des cratures vivantes peuplent le liquide. D'autres volent dans le gaz, et d'autres encore rampent ou marchent sur le sol, au fond de la couche gazeuse. L'homme, vertical, se croit le roi de la cration. Il en tait persuad bien avant qu'au prix de ses efforts il ft parvenu voler autour du globe sur des ailes de mtal. Il se croyait dieu, avant d'tre capable de parler ses frres de l'autre ct de la terre. Aujourd'hui il dcouvre le microcosme dans une goutte d'eau, et les lments dans les toiles. Il connat les lois de la cellule vivante avec ses chromosomes, et celles qui rgissent le macrocosme du soleil, de la lune, des plantes et des toiles. Il est convaincu que la gravitation garantit la cohrence du systme plantaire, maintient l'homme et la bte sur leur plante, et les ocans leur place. Depuis des millions et des millions d'annes, soutient-il, les plantes et leurs satellites suivent les mmes trajectoires et l'homme, au cours de ces millnaires, a gravi tous les degrs successifs qui, de l'infusoire monocellulaire primitif, le haussrent jusqu' son rang d'Homo Sapiens. La connaissance de l'homme approche-t-elle aujourd'hui de la perfection? Quelques pas de, plus suffiront-ils parachever la conqute de l'univers : extraire l'nergie de l'atome (depuis que ces pages ont t crites, c'est chose faite), gurir le cancer, contrler la gntique, communiquer avec d'autres plantes, savoir si elles aussi sont habites par des tres vivants. Ici commence l'Homo Ignorans. L'homme ignore ce qu'est la vie; il ignore quelle en fut l'origine et si elle a pris naissance dans la matire inorganique. Il ne sait si la vie existe sur d'autres plantes de notre soleil, ou sur celles d'autres soleils et, dans l'affirmative, si les formes de vie y sont identiques celles que nous connaissons sur notre terre, y compris l'homme. Il ne sait pas comment notre systme solaire fut cr quoiqu'il ait, l-dessus, imagin certaines hypothses. Il sait seulement que le systme solaire s'est form il y a des billions d'annes. Il ignore ce qu'est cette mystrieuse force, la gravitation, qui le maintient la verticale, pieds au sol, tout comme ses frres qui habitent l'oppos de la plante; et pourtant il considre ce phnomne comme la loi des lois . Il ignore tout de l'aspect du sol huit kilomtres de profondeur. Il ne sait comment les montagnes se sont formes, ni comment les continents ont surgi des mers, bien qu'il risque l-dessus de nouvelles hypothses; il ne sait pas, non plus, d'o est venu le ptrole : nulle certitude, rien que des hypothses. Il ne sait pourquoi, il n'y a pas tellement longtemps, une paisse couche de glace recouvrait la majeure partie de l'Europe et de l'Amrique du Nord (et c'est cependant une certitude); la prsence de palmiers l'intrieur du cercle polaire le dconcerte, et il est incapable d'expliquer par quel phnomne la mme faune se trouve emplir les lacs intrieurs du vieux monde et ceux du nouveau monde. Il ignore aussi bien d'o vient le sel des mers. Bien que l'homme sache qu'il vit sur cette plante depuis des millions d'annes, les premiers lments de son histoire ne remontent qu' quelques millnaires. Et encore ces quelques milliers d'annes sont-ils trs insuffisamment connus. 6

Pourquoi l'ge de bronze prcde-t-il l'ge de fer, alors que le fer est plus rpandu de par le monde, et que la fabrication en est autrement simple que celle de l'alliage du cuivre et de l'tain ? Par quels moyens mcaniques les hommes rigrent-ils des difices normes sur les hautes montagnes des Andes? Comment se fait-il que la lgende du Dluge ait pris naissance dans tous les pays de la terre ? Quel est le sens vritable du mot antdiluvien ? Quels faits ont inspir les images eschatologiques de la fin du monde? Luvre que j'entreprends, dont ce livre ne constitue que la premire partie, apportera des rpons quelques-unes de ces questions : mais ces rponses entraneront ncessairement l'abandon de certaines notions scientifiques aujourd'hui considres comme sacro-saintes, celle, par exemple, de la rvolution harmonieuse de la terre, et celle qui attribue des millions d'annes la constitution prsente du systme solaire : la thorie de l'volution elle-mme, en consquence, se trouvera remise en question.

L'harmonie clesteLe soleil se lve l'Est et se couche l'Ouest. Le jour a une dure de vingt-quatre heures, l'anne de 365 jours, 5 heures et 49 minutes. La lune tourne autour de la terre; elle prsente des phases et est successivement croissante, pleine, dcroissante. L'axe de la terre est dirig vers l'toile polaire. Aprs l'hiver vient le printemps, puis l't et l'automne - ce sont des faits d'observation courante. Mais sont-ce des lois invariables ? En sera-t-il de mme pour l'ternit ? En a-t-il toujours t ainsi ? Le soleil a neuf plantes. Mercure n'a pas de satellites. Vnus non plus. La terre a une lune. Mars a deux petits satellites, simples fragments de rochers, et l'un d'eux accomplit son mois avant que Mars n'ait achev son jour. Jupiter a onze satellites, et compte onze espces diffrentes de mois. Saturne a neuf satellites, Uranus cinq 1, Neptune un, Pluton n'en a aucun 2. En a-t-il toujours t ainsi ? en sera-t-il ternellement ainsi ? Le soleil accomplit sa rotation en direction de l'Est. Toutes les plantes gravitent autour du soleil dans le mme sens (sens inverse de celui des aiguilles d'une montre pour l'observateur tourn vers le Nord). La plupart de leurs satellites circulent dans le sens inverse des aiguilles d'une montre (sens direct) mais quelques-uns dans le sens contraire (sens rtrograde). Aucune orbite n'est un cercle parfait. Il n'y a aucune rgularit dans l'excentricit des orbites plantaires. Chaque ellipse s'incline dans une direction diffrente. On ne sait pas avec certitude, mais on pense que Mercure prsente toujours la mme face au soleil, comme la lune la terre. Les renseignements recueillis sur Vnus par diffrentes mthodes d'observation sont contradictoires. On ne sait si Vnus, tourne sur elle-mme si lentement que son jour est gal son anne, ou si rapidement que la partie dans l'ombre ne se refroidit jamais suffisamment. La dure de la rotation de Mars est de 24 heures 37 minutes 22,6 secondes, dure moyenne comparable au jour terrestre. Jupiter dont le volume est treize cents fois celui de la terre a une brve dure de rotation : 9 heures 50 minutes. D'o proviennent ces variations? Ce n'est point une loi absolue qu'une plante tourne sur elle-mme ou qu'elle ait des jours et des nuits; encore moins que son jour et sa nuit se reproduisent ncessairement toutes les 24 heures. Si Pluton tourne sur lui-mme d'Est en Ouest 3, il voit le soleil se lever l'Ouest. Uranus ne connait ni le soleil levant ni le soleil couchant, pas plus l'Est qu' l'Ouest. Ainsi ce n'est point -.me rgle qu'une plante du systme solaire accornplisse sa rotation d'Est en Ouest, ni que le soleil se lve l'Est. L'quateur de la terre est inclin sur le plan de l'cliptique selon un angle de 2327'. Ceci produit le changement des saisons, au cours de la rvolution annuelle autour du soleil. Les 7

axes des autres plantes prsentent des directions si varies, qu'ils semblent tre l'effet d'un choix dlibr. Ce n'est pas une rgle commune toutes les plantes que l'hiver succde l'automne, et l't au printemps. L'axe d'Uranus est situ presque dans le plan de son orbite. Pendant vingt ans environ, une de ses rgions polaires est le lieu le plus chaud de la plante. Puis la nuit tombe peu peu et vingt annes plus tard l'autre ple entre dans les tropiques pour une dure gale 4. La lune ne possde pas d'atmosphre. On ignore s'il en est de mme pour Mercure. Vnus est couverte de nuages pais, mais non de vapeur d'eau. Mars a une atmosphre transparente, mais presque sans oxygne ni vapeur d'eau, et sa composition nous demeure inconnue. Jupiter et Saturne ont des couches gazeuses. On ne sait pas s'ils possdent des noyaux solides. Ce n'est pas une rgle absolue qu'une plante ait une atmosphre ou de l'eau. Le volume de Mars est 0,I5 fois celui de la terre. La plante voisine, Jupiter, est environ 8750 fois plus grande que Mars. Il n'y a aucune constante, et aucun rapport entre la dimension des plantes et leur position dans le systme. On aperoit sur Mars des canaux et des calottes polaires; sur la lune il y a des cratres et sur la terre des ocans. Vnus a des nuages brillants. Jupiter prsente des bandes et une tache rouge; Saturne des anneaux. L'harmonie cleste est compose de corps diffrents par leurs dimensions, diffrents par leurs formes, par leur vitesse de rotation, avec des axes de rotation orients diffremment, avec des sens de rotation diffrents, avec des atmosphres de nature diffrente, ou sans atmosphre; avec un nombre variable de satellites, ou sans satellites, et avec des satellites qui gravitent dans les deux sens. C'est donc l'effet du hasard, semble-t-il, que la terre possde un satellite, un jour et une nuit, et que la somme de leur dure soit gale 24 heures; que nous ayons une succession de saisons, des ocans, de l'eau, une atmosphre et de l'oxygne; et probablement aussi que notre plante soit place entre Vnus notre gauche, et Mars notre droite.

L'origine du systme plantaireToutes les thories sur l'origine du systme plantaire et sur la force qui maintient ses lments en mouvement remontent la thorie de la gravitation et la Mcanique Cleste de Newton. Le soleil attire les plantes et, sans l'influence d'une seconde force, elles se prcipiteraient vers lui. Mais chaque plante est contrainte en raison de sa vitesse acquise de s'carter du soleil, et en consquence une orbite se forme. De mme, un satellite ou une lune est soumis une force centrifuge qui l'loigne de sa plante, mais l'attraction de cette plante courbe la trajectoire qu'aurait suivie le satellite sans cette force d'attraction; sous l'effet de ces deux forces se trouve dessine une orbite de satellite. L'inertie ou la persistance de mouvement, proprit intime des plantes et des satellites, a t postule par Newton, mais il n'a pas expliqu comment, ni quand, l'attraction ou la rpulsion initiales se sont produites 1. La thorie sur l'origine du systme plantaire qui domina tout le XIXe sicle a t mise par Swedenborg le thologien, et par le philosophe Kant ; Laplace 2 l'a traduite en termes scientifiques, mais sans en faire une exploration quantitative. Elle peut se rsumer ainsi : Il y a des centaines de millions d'annes le soleil tait une immense masse gazeuse, de forme sensiblement discodale. Ce disque tait d'une dimension gale l'orbite de la plante la plus loigne. Il tournait autour de son centre. Par suite de la contraction sous l'effet de la gravitation, un soleil sphrique se forma au centre du disque. Le mouvement de rotation de toute la nbuleuse mit en action une force centrifuge ; des parties de matire places la priphrie rsistrent au mouvement de contraction dirig vers le centre et clatrent en anneaux qui prirent la forme de globes. C'taient les plantes en formation. En d'autres termes,

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par suite de la contraction du soleil au cours de sa rotation, de la matire se dtacha, et des parties de cette matire solaire formrent les plantes. Le plan dans lequel se dplacent les plantes est le plan quatorial du soleil. Cette thorie aujourd'hui ne saurait nous satisfaire : on lui fait trois objections principales. La premire, c'est que la vitesse de la rotation axiale du soleil au moment o s'est form le systme plantaire n'a pu tre suffisante pour que les anneaux de matire se dtachent. Mme en l'admettant, ils ne se seraient pas arrondis en globes. D'autre part la thorie de Laplace n'explique pas pourquoi les plantes ont une vitesse angulaire de rotation quotidienne, et de rvolution annuelle, suprieure celle que le soleil aurait pu leur imprimer. Enfin, pourquoi certains des satellites ont-ils une rotation rtrograde ou tournent-ils dans une direction oppose celle de la plupart des lments du systme solaire ? Il apparat clairement tabli, quelle que soit la structure que nous attribuons un soleil primitif, qu'un systme plantaire ne peut se crer par le seul effet de la rotation du soleil. Si un soleil, tournant seul dans l'espace, n'est pas capable de donner naissance sa famille de plantes et de satellites, il devient ncessaire de faire appel la prsence et l'influence d'un second corps. Ceci nous conduit directement la thorie des mares 3 La thorie des mares, qui, son premier stade, a t appele thorie plantsimale 4, suppose qu'une toile passa trs prs du soleil. Une immense mare de matire solaire fut souleve vers l'toile qui passait, arrache au corps du soleil, mais demeura dans son domaine; et c'est de cette matire que furent formes les plantes. D'aprs la thorie plantsimale, la masse ainsi arrache se brisa en petits fragments, qui se condensrent dans l'espace. Quelques-uns furent jects du systme solaire, d'autres retombrent sur le soleil, et le reste tourna autour de lui en vertu de la force de gravitation. Dans leur rvolution sur des orbites trs allonges, ils s'agglomrrent, arrondirent leurs orbites la suite de collisions, et la fin formrent les plantes avec leurs satellites. Selon la thorie des mares 5 il est impossible que la matire arrache au soleil se disperse d'abord, puis se runisse par la suite. La mare se brisa en quelques fragments qui, assez rapidement, passrent de l'tat gazeux l'tat liquide, puis l'tat solide. A l'appui de cette thorie on a soutenu que lors de la fragmentation de cette mare en un certain nombre de gouttes, les plus grosses de ces gouttes provenaient probablement de la partie centrale, et les plus petites soit du point d'origine de la mare (prs du soleil), soit de son point extrme d'loignement. En fait, Mercure, la plante la plus proche du soleil, est petite. Vnus est plus grande. La terre est un peu plus grande que Vnus. Jupiter est trois cent vingt fois plus grande que la terre (en masse). Saturne est un peu plus petit que Jupiter. Uranus et Neptune, grandes plantes encore, n'ont pas la taille de Jupiter et de Saturne. Pluton est aussi petit que Mercure. La difficult de la thorie des mares provient de ce point mme qui prtend l'tayer : la masse des plantes. Entre la terre et Jupiter tourne une petite plante, Mars, dont la masse est gale au dixime de celle de la terre, alors que, selon les donnes de la thorie, on devrait dcouvrir l une plante de dix cinquante fois plus grande que la terre. D'autre part, Neptune est plus grand, et non plus petit qu'Uranus. Une autre difficult vient de l'improbabilit, au reste admise, d'une rencontre entre deux toiles. Un des auteurs de la thorie des mares a estim cette probabilit dans les termes suivants : En gros, nous pouvons estimer qu'une toile a une chance de former un systme plantaire en 5.000.000.000.000.000.000 d'annes. Mais tant donn que la vie d'une toile est trs infrieure ce chiffre, une seule toile sur 100.000 a pu former un systme plantaire dans toute son existence . Dans la Voie Lacte qui comprend cent millions d'toiles, les systmes plantaires se forment au rythme d'environ un par cinq billions d'annes... Notre systme,

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avec son ge de l'ordre de deux billions d'annes, est probablement le plus jeune de toute la galaxie . La thorie nbulaire et la thorie des mares considrent l'une et l'autre les plantes comme provenant du soleil, et les satellites comme ns des plantes. Le problme de l'origine de la lune est, semble-t-il, fort gnant pour la thorie des mares. Plus petite que la terre, la lune a achev plus tt son refroidissement et sa condensation, et les volcans lunaires ne sont plus en activit. On calcule que la lune possde un poids spcifique plus lger que la terre; on en conclut que la lune a t constitue par couches superficielles de la matire terrestre, qui sont riches en silice lgre, alors que le noyau de la terre se compose de mtaux lourds, en particulier de fer. Mais cette hypothse postule que la formation de la lune et celle de la terre n'ont pas t simultanes. La terre, constitue par une masse jecte du soleil, a d subir un processus de nivellement qui a plac les mtaux lourds au centre et la silice la priphrie, avant que la lune n'ait t arrache la terre par une nouvelle mare . Ce qui impliquerait des dformations provoques par deux mares conscutives dans un systme o l'ventualit d'une seule mare est considre comme dj fort improbable. Si le passage d'une toile auprs d'une autre a lieu, parmi cent millions d'toiles, une seule fois en cinq billions d'annes, deux vnements de ce genre pour la mme toile semblent infiniment douteux. Par consquent, et faute de mieux, on suppose que les satellites ont t arrachs aux plantes par l'attraction du soleil, lors de leur premier passage leur prihlie, alors que, poursuivant leur course sur leurs orbites allonges, les plantes s'approchaient du soleil. D'autre part le mouvement des satellites autour des plantes suscite de nouvelles difficults aux thories cosmologiques actuelles. Laplace a fond sa thorie de l'origine du systme solaire sur le postulat que toutes les plantes et tous les satellites tournent dans le mme sens. Il a crit que la rotation axiale du soleil, les rvolutions orbitales et les rotations axiales des six plantes, de la lune, des satellites et des anneaux de Saturne prsentent 43 mouvements, tous dans le mme sens. On trouve par l'analyse des probabilits qu'il y a plus de quatre milliards parier contre un que cette disposition n'est pas l'effet du hasard, ce qui forme une probabilit suprieure celle des vnements historiques sur lesquels on ne se permet aucun doute 7. Il en dduisit qu'une cause commune premire dirigeait les mouvements des plantes et des satellites. Depuis Laplace, de nouveaux lments du systme solaire ont t dcouverts. Nous savons maintenant que, bien que la majorit des satellites circulent dans le mme sens que celui des rvolutions des plantes et de la rotation du soleil, les satellites d'Uranus tournent dans un plan presque perpendiculaire au plan orbital de leur plante et que trois des onze satellites de Jupiter, un des neuf de Saturne, et l'unique satellite de Neptune tournent en sens inverse. Ces faits contre-disent l'argument principal de la thorie de Laplace : une nbuleuse doue de rotation ne pourrait produire des satellites ayant des rvolutions de sens contraires. Dans la thorie des mares ' c'est le passage de l'toile qui a dtermin la direction des mouvements des plantes. Elle a travers le plan selon lequel tournent maintenant les plantes, suivant une direction qui: a orient leurs rvolutions d'ouest en est. Mais pourquoi les satellites d'Uranus tournent-ils perpendiculairement ce plan, et quelques satellites de Jupiter et de Saturne en sens inverse? 'Voil ce que ne saurait expliquer la thorie des mares. Toutes les thories existantes admettent que la vitesse angulaire de rvolution d'un satellite doit tre infrieure la vitesse de rotation de sa plante sur elle-mme. Mais le satellite le plus proche de Mars accomplit sa rvolution plus rapidement que Mars sa rotation. Quelques-unes des difficults auxquelles se heurtent la thorie de la nbuleuse et celle des mares subsistent dans une autre thorie, rcemment propose 8. Selon celle-ci, le soleil aurait appartenu un systme d'toiles doubles. Le passage d'une toile aurait bris le compagnon du

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soleil, et de ses dbris se seraient formes les plantes. Cette hypothse admise, on explique que les grandes plantes furent constitues par des dbris, et que les petites, les plantes dites terrestres , naquirent des grandes par un processus de scission. Cette hypothse sur la naissance des petites plantes solides partir des grandes plantes gazeuses a pour objet d'expliquer la diffrence du rapport poids-volume entre les grandes et les petites plantes. Mais cette thorie ne parvient pas expliquer la diffrence des poids spcifiques entre les petites plantes et leurs satellites. Par un processus de scission, la lune naquit de la terre. Mais le poids spcifique de la lune est suprieur celui des grandes plantes et infrieur celui de la terre : la thorie selon laquelle c'est la terre qui naquit de la lune, malgr les petites dimensions de celle-ci, paratrait ainsi plus vraisemblable. Ceci jette bas l'argument. Le problme de l'origine des plantes et de leurs satellites reste donc sans solution. Les thories non seulement se contre-disent, mais chacune d'elles porte en soi ses propres contradictions. Si le soleil n'avait pas t accompagn de plantes, son origine et son volution n'auraient prsent aucune difficult 9.

L'origine des comtesLa thorie de la nbuleuse et celle des mares s'efforcent d'expliquer l'origine du systme solaire, mais elles laissent de ct les comtes. Les comtes sont plus nombreuses que les plantes. On connat plus de soixante comtes qui font dfinitivement partie du systme solaire. Ce sont les comtes de courte priode (moins de quatre-vingts ans). Elles dcrivent des ellipses trs allonges et, part une, elles ne dpassent pas la ligne que trace l'orbite de Neptune. On estime que, outre les comtes de courte priode, plusieurs centaines de milliers de comtes visitent le systme solaire. Cependant, on ne sait avec certitude si elles y reviennent priodiquement. Actuellement on en observe un nombre approximatif de cinq cents par sicle, et l'on pense qu'elles ont une dure moyenne de plusieurs dizaines de milliers d'annes. Des thories essaient de rendre compte de l'origine des comtes; mais part une tentative d'explication selon laquelle elles seraient de minuscules plantes 1 qui n'auraient pas subi une attraction latrale suffisante pour dessiner des orbites circulaires, aucun systme n'a t propos, qui expliqut l'origine du systme solaire dans sa totalit, avec ses plantes et ses comtes. Pourtant aucune thorie cosmique n'est valable si elle se limite au problme des plantes, ou celui des comtes exclusivement. Une thorie considre les comtes comme des corps cosmiques errants, arrivant de l'espace interstellaire. Aprs s'tre approches du soleil, elles s'en cartent en formant une vaste orbite parabolique. Mais si elles passent proximit d'une des grandes plantes, elles peuvent tre forces de transformer leur orbite parabolique en ellipse, et de devenir des comtes de courte priode 2. Selon cette thorie lesdites comtes sont captes : les comtes de longue priode, ou sans priode, sont dloges de leur trajectoire et transformes en comtes de courte priode. L'origine des comtes de longue priode est une question qui demeure sans rponse. Les comtes de courte priode semblent avoir quelque relation avec les grandes plantes. Une cinquantaine de comtes se dplacent entre le soleil et l'orbite de Jupiter. Leurs priodes sont infrieures neuf ans. Quatre comtes vont jusqu' l'orbite de Saturne. Deux tournent l'intrieur du cercle dcrit par Uranus, et neuf comtes d'une priode moyenne de soixante et onze ans se dplacent l'intrieur de l'orbite de Neptune. Celles-ci composent le systme des comtes de courte priode tel qu'il est prsentement connu. Au dernier groupe appartient la comte de Halley, qui, parmi les comtes de courte priode, a la plus longue priode de rvolution (environ soixante-seize ans). Ensuite, il y a un grand vide, au del duquel se trouvent les comtes auxquelles il faut des milliers d'annes pour revenir au soleil, si elles y reviennent jamais.

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La disposition des comtes de courte priode a suggr l'ide qu'elles taient captes par les grandes plantes. Cette thorie se fonde sur un fait d'observation directe : les trajectoires des comtes sont dformes par l'action des plantes. Une autre thorie sur les comtes suppose qu'elles ont une origine solaire, mais non point la manire qu'imagine la thorie des mares pour expliquer l'origine des plantes. De puissants tourbillons la surface du soleil balayent les gaz incandescents et les entassent en grosses protubrances. On observe ces protubrances quotidiennement. La matire est arrache au soleil et retourne au soleil. On calcule que si la vitesse d'jection dpassait 618 kilomtresseconde, vitesse du mouvement sur une parabole, la matire ne retournerait pas au soleil, mais deviendrait une comte de longue priode. Alors la trajectoire de la masse jecte pourrait tre perturbe par son passage proximit d'une des grandes plantes, et la comte deviendrait une comte de courte priode. Semblable naissance de comtes n'a jamais t observe, et l'hypothse que la matire en explosant puisse atteindre une vitesse de 618 kilomtres-seconde est extrmement douteuse. On a donc suppos qu'il y a des millions d'annes, alors que l'activit de leurs masses gazeuses tait plus puissante, les grandes plantes ont expuls les comtes de leur propre corps. La vitesse ncessaire pour que, la masse jecte chappe la force d'attraction du corps jectant est moindre dans le cas des plantes que dans le cas du soleil, cause de leur force d'attraction moindre. On calcule qu'une masse jecte de Jupiter la vitesse d'environ 62 kilomtresseconde, ou un peu plus du tiers de cette vitesse dans le cas de Neptune, se trouverait libre. Cette variante de la thorie nglige la question de l'origine des comtes de longue priode. Cependant une explication a t propose : les grandes plantes transformeraient les orbites courtes des comtes qui passent leur proximit en orbites allonges, ou mme elles expulseraient ces comtes du systme solaire. Quand elles passent prs du soleil, les comtes mettent des queues. On suppose que la matire de la queue ne retourne pas la tte de la comte, mais se disperse dans l'espace. En consquence, les comtes, en tant que corps lumineux, doivent avoir une existence limite. Si la comte de Halley suit son orbite actuelle depuis l're pr-cambrienne, elle a d former et perdre huit millions de queues, ce qui semble improbable 3 . Si les comtes disparaissent, leur nombre dans le systme solaire doit diminuer constamment, et aucune comte de courte priode n'aurait pu garder sa queue depuis l're gologique. Mais comme il y a beaucoup de comtes lumineuses de courte priode, elles ont d se constituer, spontanment ou non, une poque o les autres lments du systme, plantes et satellites, occupaient dj leur place. On a propos une thorie suivant laquelle le systme solaire aurait travers une nbuleuse, et y aurait acquis ses comtes. le soleil a-t-il form ses plantes par contraction ou par mare, et ses comtes par explosion ? Les comtes sont-elles venues des espaces interstellaires, et sont-elles restes dans le systme solaire aprs avoir t captes par les grandes plantes ? Les grandes plantes ont-elles produit les petites par scission, ou bien ont-elles expuls les comtes courte priode de leur propre corps? Il est admis que nous ne pouvons connatre la vrit sur l'origine du systme plantaire et comtaire, qui remonte des billions d'annes. Le point faible, dans ce problme de l'origine et du dveloppement du systme solaire, c'est qu'il demeure spculatif . C'est une opinion courante que faute d'avoir t prsents la formation du systme, nous ne pouvons lgitimement avoir la moindre ide de cette formation 4 . Tout ce que nous pouvons faire, pense-t-on, c'est d'explorer une seule plante, celle qui nous porte, afin d'apprendre son histoire, puis par dduction tenter d'appliquer les rsultats ainsi recueillis d'autres membres de la famille solaire.

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Chapitre 2

La plante TerreLa terre a une enveloppe rocheuse la lithosphre; elle comprend des roches ignes, comme le granit et le basalte, recouvertes de roches sdimentaires. Les roches ignes forment la crote originelle de la terre, les roches sdimentaires ont t dposes par les eaux. La composition de l'intrieur de la terre est inconnue. La propagation des ondes sismiques confirmerait l'hypothse que l'corce de la terre a plus de 3000 kilomtres d'paisseur; tant donn la pesanteur des masses montagneuses (thorie isostatique), on estime que l'corce n'a qu'une centaine de kilomtres d'paisseur. La prsence de fer dans l'corce, ou la migration de mtaux lourds du noyau jusqu' l'corce a t insuffisamment explique ; car pour que ces mtaux aient quitt le noyau il faut qu'ils en aient t jects par explosion, et pour qu'ils soient demeurs rpandus dans l'corce, il faut que ces explosions aient t suivies d'un. refroidissement immdiat. Si, l'origine, la plante tait un conglomrat incandescent de divers lments, comme le prtendent les thories de la nbuleuse et la thorie des mares, le fer du globe aurait alors d s'oxyder et se combiner avec tout l'oxygne disponible. Mais pour une raison inconnue le phnomne ne s'est pas produit. Ainsi la prsence d'oxygne dans l'atmosphre terrestre demeure inexplique. L'eau des ocans contient une grande quantit de chlorure de sodium soluble (sel marin) : le sodium aurait pu provenir des roches qui avaient subi l'rosion des eaux de pluie. Mais les roches sont pauvres en chlore, et tant donn la proportion de chlore et de sodium dans l'eau de mer, les roches ignes devraient contenir cinquante fois plus de chlore qu'elles n'en contiennent en fait. Les couches profondes de roches ignes n'offrent aucune trace de fossiles. Dans les roches sdimentaires sont incrusts des squelettes d'animaux marins et terrestres, et frquemment dans plusieurs couches superposes. Il n'est pas rare que les roches ignes pntrent les roches sdimentaires, ou mme les recouvrent sur de vastes superficies; ce qui suppose des ruptions successives de roches ignes qui entrrent en fusion alors que la vie existait dj sur la terre. Au-dessus des couches qui ne prsentent aucune trace de fossiles, se trouvent des couches qui renferment des coquillages; et parfois ils sont si nombreux qu'ils constituent la masse entire des roches. On les dcouvre souvent dans les roches trs dures. Les couches suprieures contiennent des squelettes d'animaux terrestres, souvent d'espces disparues; et il n'est pas rare qu'au-dessus des couches qui renferment les restes d'animaux terrestres, d'autres couches rvlent une faune marine. Les espces animales, sinon leurs genres, varient avec les couches. Les couches sont souvent obliques, et quelquefois presque verticales. Assez frquemment elles prsentent des failles et un aspect trs tourment. Cuvier (1769-1832), le fondateur de la palontologie des vertbrs, ou science des squelettes ptrifis d'animaux vertbrs, depuis le poisson jusqu' 1'homme, fut trs impressionn par l'image que prsente la disposition des couches terrestres 1. Lorsque le voyageur parcourt ces plaines fcondes o des eaux tranquilles entretiennent par leur cours rgulier une vgtation abondante, et dont le sol, foul par un peuple nombreux, orn de villages florissants, de riches cits, de monuments superbes, n'est jamais troubl que par les ravages de la guerre ou par l'oppression des hommes en pouvoir, il n'est pas tent de 13

croire que la nature ait eu aussi ses guerres intestines, et que la surface du globe ait t bouleverse par des rvolutions et des catastrophes; mais ses ides changent ds qu'il cherche a creuser ce sol, aujourd'hui si paisible. Cuvier pensait que la terre avait subi de grands cataclysmes, transformant plusieurs reprises les fonds marins en continents, et rciproquement. Il soutenait que les genres et les espces taient immuables depuis la cration. Mais, aprs avoir observ des fossiles d'animaux trs dissemblables, diffrents niveaux de la terre, il en conclut que des cataclysmes avaient d anantir la vie sur de grandes tendues, abandonnant la terre d'autres formes de vie. Quelle fut leur provenance ? Ou bien elles furent cres postrieurement, ou bien plus vraisemblablement elles arrivrent d'autres parties de la terre qu'avaient pargnes les cataclysmes. Cuvier ne put dcouvrir la cause de ces cataclysmes. Il voyait l le problme gologique le plus important rsoudre , mais il se rendait compte que pour le rsoudre en entier, il faudrait dcouvrir la cause de ces vnements, entreprise d'une tout autre difficult . Il savait seulement qu'on avait fait de nombreuses tentatives , et ne s'estimait pas capable de proposer une solution. Ces ides m'ont poursuivi, je dirais presque tourment, pendant que j'ai fait les recherches sur les os fossiles 2. La thorie de Cuvier sur les formes stabilises de la vie, et sur les cataclysmes et leurs gigantesques destructions, fut supplante par une thorie de l'volution en gologie (Lyell) et en biologie (Darwin). Les montagnes ne sont que les restes de plateaux rods par la trs lente action du vent et de l'eau. Les roches sdimentaires sont les rsidus de roches ignes rodes par la pluie, puis transportes jusqu' la mer, o ils se dposrent lentement. On suppose que les squelettes d'oiseaux et d'animaux terrestres trouvs dans ces roches sont ceux d'animaux qui longeaient le bord de la mer dans des eaux peu profondes; ils y moururent, et furent recouverts de sdiments avant que les poissons n'eussent dtruit leurs cadavres, et l'eau dsagrg leurs squelettes. Aucun cataclysme ne vint interrompre le lent et constant processus. La thorie de l'volution, qu'on peut faire remonter Aristote, et qui fut enseigne par Lamarck l'poque de Cuvier et par Darwin aprs lui, a t gnralement considre comme exacte par les naturalistes, et cela depuis prs d'un sicle. Des roches sdimentaires recouvrent les hautes montagnes, et les plus hautes de toutes, l'Himalaya. On y trouve des coquillages et des squelettes de poissons. Cela signifie qu' une poque lointaine des poissons nageaient sur ces montagnes. Quelle cause provoqua le surgissement de ces montagnes ? Il a fallu une violente pousse de l'intrieur, ou une traction de l'extrieur, ou des mouvements de torsion sur les flancs pour faire surgir les montagnes, soulever les continents hors des fosses marines, et submerger d'autres masses terrestres. Si nous ne savons pas quelles sont ces forces, il nous est impossible de rpondre au problme de l'origine des montagnes et des continents en quelque endroit du globe qu'il se pose. Examinons le cas de la cte orientale de l'Amrique du Nord. Il n'y a pas bien longtemps, gologiquement parlant, la basse plaine qui s'tend de NewJersey la Nouvelle Floride tait submerge. A cette poque-l, les vagues de l'Ocan se brisaient directement sur les vieux monts Appalaches. Auparavant, la partie Sud-Est de la chane s'tait enfonce sous la mer, avait t recouverte d'une couche de sable et de boue, qui s'paississait vers le large. Cette sorte de promontoire que formait la masse des sdiments marins fut alors souleve, entaille de rivires et elle donna la plaine ctire atlantique des tats-Unis. Mais pourquoi fut-elle souleve? A l'Ouest sont les Appalaches. Le gologue nous parle de l'poque tourmente o une ceinture de roches allant de l'Alabama Terre-Neuve fut comprime, bouscule, pour former ce systme montagneux. Pourquoi ? Comment ? Autrefois

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la mer envahit la rgion des grandes plaines du Mexique l'Alaska, puis se retira. Comment expliquer le phnomne 3 Et la naissance de la Cordillre? C'est toujours le mystre de la formation des montagnes qui rclame un claircissement. Il en est de mme sur toute la surface du globe. L'Himalaya tait sous la mer. Maintenant l'Eurasie est 5 kilomtres. ou plus, au-dessus du fond du Pacifique. Pourquoi donc ? Le problme de la formation des montagnes est un problme irritant. Beaucoup d'entre elles sont composes de roches qui ont subi une pression tangentielle et qui se sont plisses, ce qui implique un rtrcissement de la crote terrestre sur des centaines de kilomtres. Le rtrcissement radial est lamentablement insuffisant pour provoquer la force de pression horizontale constate. C'est l que rside la droutante difficult du problme de la formation des montagnes. Les gologues n'ont pas encore trouv une issue satisfaisante ce dilemme 4. Mme les auteurs de manuels avouent leur ignorance Pourquoi les fonds marins des poques anciennes sont-ils devenus les hauts-plateaux d'aujourd'hui ? Qu'est-ce qui engendre les normes forces qui courbent, brisent, crasent les roches des rgions montagneuses ? Ces questions attendent toujours des rponses satisfaisantes 5. On suppose que le surgissement des montagnes s'est opr par un processus lent et graduel. D'autre part, il est vident que les roches ignes, dj dures, ont d devenir fluides pour pntrer les roches sdimentaires, ou les recouvrir. On ignore les causes du phnomne, mais on. affirme qu'il a d se produire bien avant que l'homme n'appart sur la terre. Ainsi, de dlicats problmes se posent quand on retrouve des crnes d'hommes prhistoriques dans des couches rcentes, ou des crnes d'hommes modernes, mls des os d'animaux disparus, dans des couches anciennes. Quelquefois aussi, en creusant des mines, on dcouvre un crne humain au cur d'une montagne, sous une paisse couche de basalte ou de granit, tel le crne de Calaveras en Californie. Des restes humains et des os travaills par l'homme, des pierres polies, ou des poteries, ont t trouvs sous de grands dpts d'argile et de gravier, parfois plus de 30 mtres de profondeur. L'origine de l'argile, du sable et du gravier sur des roches ignes ou sdimentaires, pose un dlicat problme. La thorie des poques glaciaires (propose en 1840) tente d'clairer ce problme et certains autres phnomnes nigmatiques. En une rgion aussi septentrionale que le Spitzberg, l'intrieur du cercle polaire, se sont forms, dans le pass, des rcifs de corail, qui ne se trouvent que dans les rgions tropicales. Des palmiers y poussrent aussi bien. Le continent de l'Antarctide, qui aujourd'hui ne possde pas un seul arbre. a d, une poque donne, tre recouvert de forts, puisqu'il contient des dpts de charbon. Comme nous le voyons, la plante Terre est riche en secrets. Nous n'avons pas fait un pas de plus vers la solution du problme de l'origine du systme solaire, en explorant notre plante. Au contraire nous avons soulev maints nouveaux problmes rests sans solution, tels ceux de la lithosphre, de l'hydrosphre, et de l'atmosphre de la terre. Serons-nous plus heureux, si nous tentons de comprendre les transformations qui ont affect la surface du globe l'poque gologique la plus rcente, celle de la dernire priode glaciaire, trs proche des temps qu'on appelle historiques ?

Les poques glaciairesIl n'y a gure que quelques milliers d'annes, nous enseigne-t-on, de vastes surfaces de l'Europe et de l'Amrique du Nord taient couvertes de glaciers. Les glaces ternelles s'tendaient non seulement sur les flancs des montagnes, mais encore s'entassaient en lourdes masses sur les continents, mme sous des latitudes tempres. L o coulent aujourd'hui l'Hudson, l'Elbe, et le Dniepr suprieur, se dployaient alors des dserts de glace. Ils taient 15

pareils l'immense glacier du Gronland qui recouvre cette le. Des indices subsistent qui suggrent que le recul des glaciers fut interrompu par une nouvelle accumulation des glaces, et que les fronts en varirent plusieurs reprises. Les gologues sont capables de dterminer les fronts glaciaires. La glace se dpose avec une grande lenteur poussant des pierres devant elle, et les accumulations de pierres ou de moraines restent sur place quand le glacier fond et se retire. On a trouv les traces de cinq ou six dplacements conscutifs des glaciers au cours de l'poque glaciaire, ou de cinq ou six priodes glaciaires. Une certaine force, plusieurs reprises, a pouss la couche de glace vers les latitudes modres. Ni la cause des poques glacires, ni celle de ce recul du dsert de glace ne nous sont connues. L'poque de ces reculs est galement matire conjecture. Beaucoup d'hypothses ont t hasardes, pour expliquer comment les poques glaciaires ont dbut, et pourquoi elles ont pris fin. Les uns ont suppos que le soleil a pu mettre plus ou moins de chaleur, ce qui amne des alternances de chaleur et de froid sur la terre. Mais aucune preuve de pareille versatilit du soleil n'a t apporte l'appui de cette hypothse. D'autres ont suppos que l'espace cosmique comporte des surfaces chaudes et froides, et que, quand notre systme solaire traverse les surfaces froides, les glaces descendent des latitudes plus proches des tropiques. Mais on n'a trouv aucun agent physique qui justifit ces hypothtiques tendues chaudes ou froides de l'espace. D'autres se sont demand si la prcession des quinoxes, ou le lent dplacement de direction de l'axe terrestre, pouvait causer des variations de climat priodiques. Mais il a t dmontr que la diffrence d'insolation n'aurait pu tre suffisante pour provoquer les poques glaciaires. D'autres encore ont cru trouver la rponse dans les variations priodiques de l'excentricit de l'cliptique (orbite terrestre), avec glaciation l'excentricit maximum. Quelques-uns ont suppos que l'hiver l'aphlie, le point le plus loign de l'cliptique, provoquait la glaciation, et d'autres ont pens que l't l'aphlie entranait ce mme rsultat. Certains savants ont fait appel aux altrations de position de l'axe terrestre. Si la plante Terre est rigide, comme on le croit (L. Kelvin), l'axe n'aurait pu se dplacer de plus de trois degrs au cours des ges gologiques (George Darwin); si elle tait lastique, il aurait pu se dplacer jusqu' dix ou quinze degrs par un processus d'une extrme lenteur. L'origine des poques glaciaires a t attribue par quelques savants la diminution de la chaleur premire de la terre. Les priodes chaudes entre les poques glaciaires seraient dues la chaleur libre par une dcomposition hypothtique d'organismes dans les couches proches de la surface du sol. L'augmentation et la diminution de l'action des sources chaudes a t galement envisage. D'autres ont suppos que de la poussire d'origine volcanique emplissait l'atmosphre terrestre, et contrariait l'insolation, ou, l'inverse, qu'une augmentation d'anhydride carbonique dans l'atmosphre empchait la rflexion des rayons calorifiques la surface de la plante. Une diminution d'anhydride carbonique dans l'atmosphre amnerait une chute de temprature (Arrhenius); mais on a dmontr par le calcul que telle ne pouvait tre la cause vritable des poques glaciaires (Angstrm). On a jet dans le dbat les dviations des courants chauds de l'ocan Atlantique, et par imagination l'on a supprim l'isthme de Panama pour permettre au Gulf-Stream de pntrer dans le Pacifique, comme il et pu le faire pendant les poques glaciaires. Mais il a t prouv que les deux ocans taient dj spars l'poque glaciaire. De plus, une partie du GulfStream serait de toute manire reste dans l'Atlantique. Les reculs priodiques des glaces entre les diffrentes res glaciaires postuleraient une disparition et une rapparition priodiques de l'isthme de Panama.

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D'autres thories de caractre galement hypothtique ont t avances. Mais on n'a prouv ni l'existence des phnomnes l'origine de ces changements, ni qu'ils aient t capables de produire semblable effet. Toutes les thories et hypothses cites ci-dessus sont voues l'chec, si elles ne peuvent satisfaire une condition primordiale : pour que des masses de glace aient pu se former, il a fallu que se produise une augmentation des prcipitations. Celle-ci implique ncessairement une augmentation de vapeur d'eau dans l'atmosphre, qui est la consquence d'une vaporation accrue la surface des ocans. Mais une telle vaporation n'a pu tre provoque que par la chaleur. Plusieurs savants ont attir l'attention sur ce fait, et ont mme calcul que, pour former une nappe de glace aussi vaste que celle de l'poque glaciaire, la surface de tous les ocans a d s'vaporer jusqu' une assez grande profondeur. Cette vaporation des ocans, suivie d'un rapide processus de conglation jusque sous les latitudes modres, aurait produit l'poque glaciaire. Le problme est le suivant : quels phnomnes auraient pu provoquer cette vaporation, et la conglation qui la suivit immdiatement ? Comme la raison d'une alternance si rapide de rchauffement et de refroidissement sur de vastes tendues du globe nous chappe, on admet qu'actuellement, la cause de l'norme formation de glaces sur la terre reste un mystre dconcertant, une question capitale pour ceux qui dans l'avenir dchiffreront les nigmes de la terre 1 . Non seulement les causes de l'apparition et de la disparition ultrieure de la couche glaciaire sont inconnues, mais encore la forme gographique des surfaces recouvertes de glace pose un nouveau problme. Pourquoi cette couche de glace, dans l'hmisphre austral, s'est-elle dplace des rgions tropicales de l'Afrique vers le ple Sud, et non dans la direction oppose ? De mme pourquoi, dans l'hmisphre boral, aux Indes, la glace s'est-elle dplace de l'quateur vers les monts de l'Himalaya, et vers des latitudes plus leves ? Pourquoi les glaciers de l'poque glaciaire ont-ils recouvert la plus grande partie de l'Europe et de l'Amrique du Nord, tandis que le Nord de l'Asie tait pargn ? En Amrique le plateau de glace s'tendait jusqu' la latitude 40 et dpassait mme cette limite. En Europe, il atteignait la latitude 50; tandis que le Nord-Est de la Sibrie par del le cercle polaire, et par del mme la latitude 75, n'tait point recouvert par ces glaces ternelles. Toutes les hypothses sur l'augmentation ou la diminution d'insolation dues aux variations solaires, ou aux changements de temprature de l'espace cosmique, et toutes autres hypothses de cet ordre, se heurtent inluctablement ce problme. Les glaciers se forment dans les rgions des neiges ternelles. C'est pour cette raison qu'ils restent sur les flancs des hautes montagnes. Le Nord de la Sibrie est l'endroit le plus froid du monde. Pourquoi l're glaciaire a-t-elle laiss cette rgion intacte, alors qu'elle visitait le bassin du Mississipi et l'Afrique entire au Sud de l'quateur ? Nulle rponse satisfaisante n'a jusquel t propose.

Les mammouthsLe Nord-Est de la Sibrie qui fut pargn par les glaces l'poque glaciaire recle une autre nigme. Le climat semble y avoir chang radicalement depuis la fin de l're glaciaire; la temprature moyenne annuelle y a fait apparemment une chute considrable. Des animaux vivaient autrefois dans cette rgion, qui en ont disparu, et des plantes y poussaient qui ne le peuvent aujourd'hui. Le changement a d s'oprer trs brusquement. La cause de ce climat reste inexplique. Ce bouleversement climatrique dans des circonstances mystrieuses a provoqu la disparition de tous les mammouths de Sibrie. Le mammouth appartenait la famille des lphants. Ses dfenses avaient jusqu' 3 mtres de long. Ses dents taient parvenues un degr lev de dveloppement et leur densit tait suprieure celle des dents de l'lphant n'importe quel stade de son volution. Il ne semble 17

pas avoir succomb dans la lutte pour la vie, comme l'et pu faire un produit de l'volution improprement adapt. On pense que l'extinction des mammouths a concid avec la fin de la dernire priode glaciaire. On a dcouvert un grand nombre de dfenses de manunouths dans le Nord-Est de la Sibrie. Cet ivoire bien conserv n'a cess d'tre un objet d'exportation vers la Chine et l'Europe depuis la conqute de la Sibrie par les Russes, et il tait dj exploit en des temps plus reculs. A l'poque moderne, la principale source d'approvisionnement du march mondial de l'ivoire tait les toundras du Nord-Est de la Sibrie. En 1799, des corps de mammouths gels ont t dcouverts dans ces toundras. Ces corps taient parfaitement conservs, et les chiens des traneaux en mangrent la chair sans inconvnients. La chair est fibreuse, et rnarbre de graisse; elle parat aussi frache que du boeuf bien congel 1. Par quoi fut provoque leur mort et l'extinction de leur race ? Cuvier a crit, ce propos 2 : Ces irruptions, ces retraites rptes (de la mer) n'ont point toutes t lentes, ne se sont point toutes faites par degrs, au contraire, la plupart des catastrophes qui les ont amenes ont t subites; et cela est surtout facile prouver pour la dernire de ces catastrophes; pour celle qui, par un double mouvement, a inond et ensuite remis sec nos continents actuels, ou du moins une grande partie du sol qui les forme aujourd'hui. Elle a laiss encore dans les pays du Nord des cadavres de grands quadrupdes que la glace a saisis, et qui se sont conservs jusqu' nos jours, avec leur peau, leur poil et leur chair. S'ils n'eussent t gels aussitt que tus, la putrfaction les aurait dcomposs. Et d'un autre ct, cette gele ternelle n'occupait pas auparavant les lieux o ils ont t saisis, car ils n'auraient pas pu vivre sous une pareille temprature. C'est donc le mme instant qui a fait prir les animaux, et qui a rendu glacial le pays qu'ils habitaient. Cet vnement a t subit, instantan, sans aucune gradation, et ce qui est si clairement dmontr pour cette dernire catastrophe ne l'est pas moins pour celles qui l'ont prcde. La thorie propose par Deluc 3 et rpandue par Cuvier, qui envisage une srie de cataclysmes anantissant la vie sur cette plante, et des recrations, ou des retours successifs de la vie, n'a pas convaincu le monde scientifique. Comme Lamarck avant Cuvier, Darwin, aprs lui, a pens que la rgle de la reproduction est un processus d'volution extrmement lent, et qu'aucune catastrophe n'est venue interrompre ce processus par changements infinitsimaux. Selon la thorie de l'volution, ces infimes changements se sont produits par suite de l'adaptation aux conditions de l'existence dans la lutte des espces pour survivre. Comme les thories de Lamarck et de Darwin, qui postulent que le rgne animal subit une lente transformation et que des dizaines de milliers d'annes sont ncessaires pour avancer d'un pas infime dans l'volution, les thories gologiques du XIXe, aussi bien que du XXe sicle, considrent que les processus gologiques sont d'une extrme lenteur, et sont l'effet de l'rosion par la pluie, le vent et les mares. Darwin a reconnu qu'il ne pouvait expliquer l'extinction du mammouth, mieux volu que l'lphant qui pourtant lui survcut 4. Mais, en accord avec la thorie de l'volution, ses disciples ont suppos qu'un tassement progressif du terrain avait contraint les mammouths refluer sur les montagnes, o ils s'taient trouvs isols par des marcages. Mais puisque les processus gologiques sont lents, les mammouths n'auraient pu se laisser prendre au pige sur des montagnes isoles. De plus, cette thorie ne peut tre exacte, car les mammouths ne sont pas morts de faim. Dans leur estomac et entre leurs dents on a dcouvert de l'herbe et des feuilles non encore digres. Preuve nouvelle de leur mort brutale. Des recherches ultrieures ont dmontr que les brindilles et les feuilles trouves dans leur estomac n'appartiennent pas des plantes qui poussent dans les rgions o moururent les animaux, mais beaucoup plus au sud, plus de 1500 kilomtres de l. Il semble vident que le climat a subi une altration

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radicale depuis la mort des mammouths, et comme les corps des animaux n'ont pas t trouvs dcomposs, mais intacts dans des blocs de glace, il a fallu que le changement de temprature ait presque immdiatement suivi leur mort, moins qu'il ne l'ait mme provoque. Il reste ajouter qu'aprs les temptes de l'ocan Arctique, des dfenses de mammouth ont t entranes sur les plages des les arctiques. Ce qui prouve qu'une partie du pays o les mammouths vcurent et se noyrent est recouverte par l'ocan Arctique.

L'poque glaciaire et l'ge de l'hommeLe mammouth vivait l'poque de l'homme. L'homme le reprsenta sur les murs des cavernes; des ossements humains, plusieurs reprises, ont t dcouverts en Europe Centrale mls des ossements de mammouths ; parfois on trouve les abris de l'homme nolithique d'Europe jonchs d'os de mammouths 1. L'homme se dplaa vers le Sud quand les glaces s'tendirent sur l'Europe, et il retourna vers le Nord lorsque la glace se retira. L'homme historique fut tmoin de grandes variations climatiques. On suppose que les mammouths de Sibrie, dont la viande est encore frache, furent dtruits la fin de la dernire poque glaciaire, en mme temps que les mammouths d'Europe et de l'Alaska. S'il en est ainsi, les mammouths sibriens furent eux aussi les contemporains d'un homme relativement moderne. A une poque o, en Europe, au bord du grand glacier, l'homme en tait encore aux ultimes stades de la culture nolithique, dans le Proche et le Moyen-Orient (rgion des grandes cultures antiques), il tait peut-tre dj trs avanc dans l'ge des mtaux. Il n'existe aucune table chronologique de la culture nolithique, parce que l'criture fut invente approximativement au dbut de la priode du cuivre, premire priode de l'ge du bronze. On suppose que l'homme nolithique d'Europe laissa quelques dessins, mais aucune inscription et par consquent il n'existe aucun moyen de dterminer la fin de l'poque glaciaire en termes de chronologie. Les gologues ont essay d'assigner une date la fin de la dernire poque glaciaire, en mesurant les alluvions arraches aux glaciers et entranes par les rivires, et les dpts d'alluvions glaciaires dans les lacs. On calcula la quantit charrie par le Rhne depuis les glaciers des Alpes, et la quantit totale qui recouvre le fond du lac Leman, que traverse le Rhne ; d'aprs les chiffres obtenus, on valua la dure et la vitesse de recul des glaciers de la dernire poque glaciaire. Selon le savant suisse Franois Forel, 12000 ans se sont couls depuis l'poque o la nappe de glace de la dernire priode glaciaire se mit fondre; chiffre tonnamment bas, alors qu'on pensait que l're glaciaire avait pris fin il y a quelque 30 ou 50.000 ans. Ces calculs ont le dfaut de n'tre que des estimations indirectes ; puisque la vitesse laquelle la boue glaciaire se dpose dans les lacs ne fut pas constante, et que la quantit mme en fut variable, elle dut s'accumuler au fond des lacs plus rapidement au dbut, alors que les glaciers taient plus vastes. Si l'poque glaciaire eut une fin brusque, les dpts d'alluvions glaciaires durent tre beaucoup plus considrables au dbut ils n'auraient donc qu'une analogie lointaine avec l'accumulation des alluvions produites par la fonte annuelle des neiges sur les Alpes. Par consquent, le temps qui s'est coul depuis la fin de la dernire priode glaciaire doit tre encore plus bref que le chiffre propos. Les gologues estiment que les grands lacs amricains se sont forms la fin de l'poque glaciaire, lorsque le glacier continental se retira, et que les dpressions qu'il laissa derrire lui se transformrent en lacs. Au cours des deux derniers sicles, les chutes du Niagara ont recul du lac Ontario vers lac Eri, la vitesse de 1 m.50 par an, entranant les rochers du lit des chutes 2. Si ce processus se poursuit la mme cadence depuis la fin de la dernire priode glaciaire, il a fallu environ 7.000 ans pour que les chutes du Niagara, depuis leur point de dpart, l'embouchure des gorges ( Queenston), pussent atteindre leur emplacement actuel. Ce

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calcul repose sur l'hypothse que la quantit d'eau qui traverse les gorges est demeure constante depuis la fin de l'poque glaciaire, et, en consquence, on a conclu que ces 7.000 ans peuvent constituer le temps maximum qui s'est coul depuis la formation des Chutes 3 . Au dbut, quand d'immenses masses d'eau furent libres par la retraite du glacier continental, la vitesse de dplacement des chutes du Niagara dut tre trs suprieure; la dure approximative peut subir une diminution importante et on la rduit parfois 5.000 ans 4. L'rosion et la sdimentation sur les rives et au fond du lac Michigan suggrent galement un laps de temps qui se pourrait valuer par milliers, et non plus par dizaines de milliers d'annes. En outre, le rsultat des recherches palontologiques en Amrique apporte une preuve qui constitue une garantie qu'avant la dernire priode de glaciation, l'homme moderne, reprsent par la race trs dveloppe des Indiens d'Amrique, vivait sur la cte orientale de l'Amrique du Nord 5 (A. Keith). On prsume qu' l'avnement de la dernire priode glaciaire, les Indiens se retirrent vers le Sud, puis remontrent vers le Nord quand la glace dcouvrit le sol; c'est aux environs de cette priode que les Grands Lacs mergrent, que le bassin du Saint-Laurent se forma, et que les chutes du Niagara se mirent reculer en direction du lac Eri. Si la fin de la dernire priode glaciaire ne remonte pas plus de quelques milliers d'annes, soit dans les temps prhistoriques, soit en une poque o l'criture tait peut-tre dj employe dans les grands centres de la civilisation antique, les indices que la Nature grava dans les rochers et ceux qu'y inscrivit l'homme doivent composer une image cohrente. Explorons donc les traditions et les trsors littraires de l'homme ancien, et confrontons-les avec ceux que la Nature nous a lgus.

Les ges du mondeL'ide que les diffrents ges ont t interrompus par de grands bouleversements naturels est rpandue travers le monde entier. Le nombre de ces ges varie avec les peuples et avec les traditions. Les variations proviennent du nombre de catastrophes que chaque peuple particulier se remmorait, ou de la faon dont il calculait la fin d'une priode. Ainsi les annales de l'antique Etrurie, d'aprs Varron, font mention de sept grands ges couls. Censorinus, auteur du IIIe sicle de notre re et compilateur de Varron, a crit : Les hommes croyaient l'apparition de diffrents prodiges, par lesquels les dieux leur faisaient connatre la fin de chaque ge. Les Etrusques taient verss dans la science des toiles, et aprs avoir observ les prodiges avec attention, ils consignaient leurs observations dans leurs livres 1 L'histoire de la Grce rvle de semblables traditions. Censorinus a crit : Il y a une priode, qu'Aristote appelait la suprme anne, la fin de laquelle le soleil, la lune et toutes les plantes reprennent leur position primitive. Cette suprme anne a un grand hiver, appel par les Grecs kataklysmos, ce qui signifie dluge, et un grand t appel ekpyrosis, ou combustion du monde. Ce monde, en vrit, semble tre successivement inond et brl au cours de ces deux poques. Anaximne et Anaximandre, au VIe sicle avant J.-C., et Diogne d'Apollonia, au Ve sicle, imaginaient la destruction du monde que suivait une nouvelle cration. Hraclite (540-475 av. J.-C.) enseignait que le monde est dtruit par le feu au bout de chaque priode de 10.800 ans. Aristarque de Samos, au IIIe sicle avant notre re, enseignait qu'en une priode de 2484 annes, la terre subit deux destructions, l'une par la chaleur, l'autre par le dluge. Les stociens croyaient communment que des embrasements priodiques consumaient le monde, qui retrouvait ensuite une forme nouvelle. Ceci est d aux forces d'un feu ternellement actif qui existe dans les choses, et qui au bout de longs cycles rduit tout sa forme primitive, et d'o

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prend naissance un monde neuf. Ainsi Philon prsentait-il l'ide des stociens d'une sorte de refonte du monde grce des embrasements priodiques 2. Dans un de ces cataclysmes le monde trouvera sa destruction finale; en se heurtant un autre monde, il s'parpillera en atomes, d'o sera cre, la suite d'un long processus, une nouvelle terre, quelque part dans l'univers. Dmocrite et Epicure, expliquait Philon, postulent qu'il existe beaucoup de mondes, dont ils attribuent l'origine des collisions mutuelles et des agglomrations d'atomes; quant leur destruction elle serait l'effet du contre-coup et des collisions des mondes ainsi forms. Dans sa marche vers sa destruction finale, notre terre subit des cataclysmes cosmiques priodiques, et elle se recre, avec tout ce qui vit sur elle. Hsiode, un des premiers auteurs grecs, a parl de quatre ges, et de quatre gnrations d'hommes, qui furent dtruits par le courroux des dieux plantaires. Le troisime ge fut l'ge du bronze. Quand il fut dtruit par Zeus, une nouvelle gnration d'hommes repeupla la terre. Ils employrent le bronze pour fabriquer des armes et des instruments, et de plus commencrent d'utiliser le fer. Les hros de la guerre de Troie appartenaient la quatrime gnration. Alors une nouvelle destruction fut dcrte, et aprs cela vint une autre gnration, la cinquime, celle des hommes qui habitent cette terre gnreuse , la gnration de l'ge du fer 3. Dans un autre ouvrage, Hsiode dcrit la fin d'un ge : La terres gnratrice de vie tait embrase et craquait de toutes parts, le sol bouillonnait, et les flots de l'ocan... On et dit en vrit que la terre et le vaste ciel au-dessus d'elle se heurtaient, car pareils craquements gigantesques auraient retenti si la terre s'tait rue sa destruction, et si le ciel d'en haut l'avait prcipite dans l'abme 4. Cette tradition de quatre ges achevs se retrouve sur les bords de la mer du Bengale, et sur les plateaux du Thibet, l'ge actuel tant le cinquime 5. Le livre sacr hindou Bhagavata Pourana nous parle de quatre poques, et de pralayas, ou cataclysmes dans lesquels, diffrentes poques, l'humanit a t presque entirement dtruite; le cinquime ge est l'ge actuel. Les ges du monde sont appels Kalpas ou Yugas. Chaque ge a t dtruit par le feu, l'inondation ou le cyclone. L'Ezour Vedam et le Bhaga Vedam,.livres sacrs hindous, conservent cette notion de quatre ges achevs, l'unique diffrence tant le nombre d'annes attribu chacun d'eux 6. Au chapitre Cycles du monde , du Visuddhi-Magga, il est dit qu'il y a trois destructions : la destruction par l'eau; la destruction par le feu, la destruction par le vent ; mais qu'il y a sept ges, chacun d'eux tant spar du prcdent par un cataclysme universel 7. Des allusions aux ges et aux cataclysmes se retrouvent dans l'Avesta (Zend-Avesta), les crits sacrs du mazdasme, religion primitive des Perses8. Bahman Yast , l'un des livres de l'Avesta, compte sept ges du monde ou millnaires9. Zarathoustra (Zoroastre), prophte du mazdasme, parle des Signes, merveilles et confusions qui se manifestent dans le monde la fin de chaque millnaire 11 Les Chinois appellent les ges rvolus kis, et comptent 10 kis du commencement du monde Confucius11. Dans l'antique encyclopdie chinoise, Sing-li-ta-tsiuena-chou, on discute de convulsions gnrales de la terre. Par suite de la priodicit de ces convulsions, la priode comprise entre deux catastrophes est considre comme une grande anne . De la mme faon qu'au cours d'une anne, le mcanisme cosmique se remonte au cours d'un ge du monde, et dans une convulsion gnrale de la nature, la mer est arrache son lit, les montagnes surgissent du sol, les rivires changent leur cours, les tres humains et toutes les choses sont dtruits, et les anciens vestiges effacs 12 . Une vieille et trs persistante tradition, qui a trait aux ges du monde prcipits dans des catastrophes cosmiques a t retrouve dans les deux Amriques, parmi les Incas 13, les

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Aztques et les Mayas 14. Une grande partie des inscriptions de pierre dcouvertes chez les Yucatques voquent de pareils cataclysmes. Les plus anciens de ces fragments (Katuns, ou calendriers sur pierre du Yucatan) font de frquentes allusions de grands cataclysmes qui, plusieurs reprises, bouleversrent le continent amricain, et dont tous les peuples de ce continent ont gard un souvenir plus ou moins distinct 15. Les codici mexicains et les auteurs indiens qui composrent les annales de ces peuples accordent une place prpondrante cette tradition des cataclysmes qui dcimrent l'humanit et changrent la face du monde. Dans les chroniques du royaume mexicain il est dit : les anciens savaient que, avant que le ciel et la terre actuels fussent forms, l'homme tait dj cr, et la vie s'tait manifeste quatre fois 16 . La tradition de crations et de cataclysmes successifs se retrouve dans le Pacifique, Hawa 17 et dans les les de Polynsie : il y avait neuf ges, et chaque ge un ciel diffrent tait audessus de la terre 18. Les Islandais aussi croyaient que neuf mondes furent engloutis au cours d'ges successifs, tradition qui est contenue dans l'Edda 19. La conception rabbinique des ges se cristallisa au cours de la priode postrieure l'Exil. Avant mme la naissance de notre terre, des mondes avaient t crs seule fin d'tre ultrieurement anantis. Il fit plusieurs mondes avant le ntre, mais Il les dtruisit tous. Cette terre, de mme, ne fut pas cre au commencement pour s'intgrer harmonieusement dans le Plan Divin. Elle fut refaite six reprises conscutives. Des conditions nouvelles apparurent aprs chacun de ces cataclysmes. Sur la quatrime terre vcut la gnration de la Tour de Babel; nous appartenons au septime ge. Chacun des ges, ou chacune des terres porte un nom. Sept cieux et sept terres furent crs. Le plus loign, le septime, Eretz ; le sixime, Adamah ; le cinquime, Arka ; le quatrime, Harabah ; le troisime, Yabbashah ; le deuxime, Tevel, enfin notre terre nous appele Heled ; comme les autres, elle est spare de la prcdente par des abmes, le chaos et l'eau 20 . De grands cataclysmes changrent la face de la terre; quelques-uns prirent par le dluge, d'autres furent consums par le feu , crit le philosophe juif Philon 21. Selon le rabbin Rashi, l'ancienne tradition signale des effondrements priodiques du firmament; l'un d'eux eut lieu aux jours du Dluge, et ils se rptrent des intervalles de 1656 annes 22. La dure des ges du monde est diffrente selon les traditions armniennes et les traditions arabes 23.

Les ges du soleilUn vnement maintes fois cit dans les traditions des ges du monde est l'apparition d'un nouveau soleil dans le ciel au commencement de chaque ge. Le mot soleil est substitu au mot ge dans les traditions cosmogoniques de nombreux peuples, dans toutes les rgions du globe. Les Mayas comptaient les ges d'aprs le nom attribu leurs soleils conscutifs. Ceux-ci s'appelaient : Soleil de l'Eau, Soleil du Tremblement de terre, Soleil du Cyclone, Soleil du Feu. Ces Soleils marquent les poques auxquelles on place les diffrentes catastrophes que le monde a subies 1. Ixtlilxochitl (environ 1568-1648), l'rudit indien, a dcrit dans ses annales des rois de Tezcuco les ges du monde, d'aprs les noms des Soleils 2 . Le Soleil de l'Eau (ou Soleil des Eaux) fut le premier ge, termin par un dluge qui fit prir presque toutes les cratures. Le Soleil, ou ge, du Tremblement de terre fut ananti par un sisme terrifiant qui fendit la terre en maints endroits et renversa les montagnes; l'ge du Soleil du Cyclone fut dtruit par un cyclone cosmique. Le Soleil du Feu fut l'ge qui disparut sous une pluie de feu 3.

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Humboldt, citant Gmara, crivain espagnol du XVIe sicle, crivait : Les nations de Culhua ou du Mexique croient, d'aprs leurs peintures hiroglyphiques qu'avant le soleil qui les claire maintenant il y en a dj eu quatre qui se sont teints les uns aprs les autres. Ces quatre soleils sont autant d'ges dans lesquels notre espce a t anantie par des inondations des tremblements de terre, par un embrasement gnral et par l'effet des ouragans 4. Les quatre lments jourent un rle dans chaque cataclysme; si le dluge, le cyclone, le tremblement de terre et le feu donnrent leur nom un cataclysme diffrent, ce fut cause de la prdominance de l'un d'eux dans ces bouleversements. Les symboles des soleils successifs sont visibles sur les documents littraires prcolombiens du Mexique 5. Cinco soles que son edas, ou cinq soleils qui sont des poques , a crit Gmara dans sa description de la conqute du Mexique 6. Une phrase analogue se trouve chez Lucius Ampelius, auteur romain, qui, dans son Liber Memorialis, a crit 7 : Soles fuere quinque (il y eut cinq soleils). C'est cette mme croyance que Gmara dcouvrit dans le Nouveau Monde. Au Mexique les Annales de Cuauhtitlan, crites en langue nahuatl (vers 1570), et bases sur de vieilles sources, contiennent la tradition de sept poques solaires. Chicon-Tonatiuh ou les sept soleils , dsigne les cycles du monde, ou actes du drame cosmique 8. Le livre sacr bouddhique Visuddhi-Magga consacre un chapitre aux cycles du monde 9 . Il y a trois destructions : la destruction par l'eau, la destruction par le feu, la destruction par le vent. Aprs le cataclysme du dluge lorsqu'une longue priode se fut coule aprs la cessation des pluies un deuxime soleil apparut . Dans l'intervalle le monde fut envelopp de tnbres. Quand ce deuxime soleil apparat, il n'y a pas de distinction entre le jour et la nuit , mais une chaleur incessante accable le monde . Quand le cinquime soleil apparut,. l'ocan peu peu se desscha ; quand le sixime soleil apparut, le monde entier s'emplit de fume . Aprs une autre longue priode, un septime soleil apparat, et le monde entier s'embrase. Ce livre bouddhique fait galement allusion un antrieur Discours sur les sept soleils 10 . Les Brahmanes appelaient les poques sparant deux destruction : les grands jours 11 . Les livres de la Sibylle numrent les ges au cours desquels le monde subit la destruction, puis la recration. La Sibylle a parl comme suit : les neuf soleils sont neuf ges... Ce soleil est le septime . La Sibylle a voqu dans sa prophtie deux autres ges futurs : ceux du huitime et du neuvime soleil 12. Les indignes du Nord de Borno dclarent aujourd'hui encore qu' l'origine le ciel pesait sur la terre, que six soleils prirent et qu' prsent le monde est clair par le septime 13. Les manuscrits mayas, les livres sacrs bouddhiques, livres de la Sibylle font allusion sept ges solaires. Dans toutes les sources cites, les soleils sont considrs (par les sources elles-mmes) comme tant des poques conscutives dont chacune fut anantie dans une grande destruction gnrale. Cette substitution du mot soleil au mot ge par les peuples des deux hmisphres s'explique-t-elle par le changement d'aspect de l'astre lui-mme et par le changement de sa trajectoire dans le ciel, chacun des ges du monde ?

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Premire partie

Vnus

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Dans toute l'histoire de l'humanit, aucun livre n'a t lu plus attentivement, n'a circul plus largement, ou n'a t explor avec plus de soin que l'Ancien Testament. R. H. PFEIFFER Introduction l'Ancien Testament

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Chapitre 1

La plus incroyable des histoiresLa plus incroyable histoire de miracles est raconte propos de Josu, fils de Noun, qui, poursuivant les rois de Chanaan Bethoron, supplia le soleil et la lune de s'immobiliser. Il dit, en prsence des Isralites Soleil, arrte-toi sur Gabaon, Et toi, lune, sur le val d'Ajalon. Et le soleil s'arrta et la lune se tint immobile, jusqu' ce que le peuple se ft veng de ses ennemis. Cela est crit dans le livre du juste. Le soleil s'arrta au milieu du ciel et ne se hta pas de se coucher pendant presque un jour entier. (Josu 10-12, 13.) Cette histoire parat incroyable, mme aux personnes les plus pieuses ou les plus imaginatives. On pourrait admettre qu'une mer dchane ait ananti une arme, et en ait pargn une autre; que la terre-se soit ouverte, engloutissant des tres humains; que le cours du Jourdain se soit trouv bloqu par l'effondrement d'une partie de sa rive; que les murs de Jricho aient t abattus, non par la clameur des trompettes, mais par un tremblement de terre. Mais que le soleil et la lune aient interrompu leur course travers le firmament, voil qui est pur produit de la fantaisie, image potique, mtaphore 2, monstrueuse invraisemblance, qui dfie le sens commun 3, invention mprisable qui peut-tre mme trahit une sorte d'irrespect l'gard du Crateur. Pour la science de notre temps, et non pour celle de l'poque o furent crits le livre de Josu et le livre du juste, pareil vnement impliquerait que la terre cesst, un certain temps, de tourner, sur sa route assigne. Une telle perturbation est-elle concevable ? On ne dcouvre point le moindre indice de dsordre dans les annales actuelles de la terre. Chaque anne comprend 365 jours 5 heures et 49 minutes. I,'abandon par la terre de sa rotation rgulire est impensable, sauf dans le cas trs improbable o notre plante rencontrerait un autre corps cleste d'une masse suffisante pour interrompre la trajectoire ternelle de notre monde. Il est bien vrai que des arolithes ou mtorites tombent continuellement sur notre terre, quelquefois par milliers et dizaines de milliers. Mais on n'a jamais peru le moindre dsordre dans la rotation de la plante elle-mme. Cette considration ne postule pas qu'un corps plus grand, ou un plus grand nombre de corps, n'aient pu heurter la sphre terrestre. Le grand nombre d'astrodes qu'on distingue entre les orbites de Mars et de Jupiter suggre qu' une poque indtermine une autre plante y tait prsente. Maintenant ces mtorites suivent approximativement la trajectoire que suivait la plante dtruite dans sa rvolution autour du soleil. Il est possible qu'une comte soit entre en collision avec elle et l'ait fracasse. Il n'est gure probable qu'une comte puisse entrer en collision avec notre plante; cependant l'ide n'est pas absurde. Le mcanisme cleste fonctionne avec une prcision presque absolue. Mais dans le ciel errent par milliers, par millions, des comtes qui ont perdu leurs trajectoires, et leur interfrence peut perturber l'harmonie cleste. Quelques-unes de ces comtes appartiennent notre systme. Priodiquement elles reviennent, mais des intervalles assez irrguliers, cause de l'attraction des grandes plantes, au moment o elles s'en 27

approchent trop. Mais d'autres comtes, innombrables, et dcelables au seul tlescope, arrivent trs grande vitesse des espaces incommensurables de l'Univers, et disparaissent, peut-tre jamais. Certaines comtes ne sont visibles que quelques heures, d'autres des jours, des semaines ou mme des mois. Se pourrait-il que la terre, notre terre, se rue, au risque d'une collision pleine de prils, vers une norme masse de mtorites, une trane de pierres tournant une vitesse vertigineuse travers notre systme solaire ? Cette hypothse a t analyse avec passion au cours du sicle dernier. Depuis l'poque o Aristote avait affirm qu'un mtorite, tomb Aegospotamos alors qu'une comte brillait au ciel, avait t soulev de terre par le vent, emport dans les airs, et s'tait abattu cet endroit, jusqu'en 1803 (26 avril), o de nombreux mtorites tombrent Laigle en France et furent examins par Biot, reprsentant l'Acadmie des Sciences, tout le monde savant, les Copernic, Galile, Kpler, Newton, et Huygens, jugeait absolument Impossible qu'un seul bloc pt s'abattre sur la terre, et cela malgr les cas nombreux o des pierres tombrent sous les yeux mmes de la foule; ainsi un mtorite s'abattit en prsence de l'empereur Maximilien et de sa cour Ensisheim, en Alsace, le 7 novembre 14924. juste avant 1803 l'Acadmie des Sciences de Paris refusait encore d'ajouter foi un phnomne similaire. La chute de mtorites, le 24 juillet 1790, dans le Sud-Ouest de la France, fut dclare un phnomne physiquement impossible 5 . Depuis 1803, cependant, les savants admettent que des pierres tombent du ciel. Si une ou plusieurs pierres peuvent entrer en collision avec la terre, une comte entire pourrait-elle faire de mme ? On a calcul que cette possibilit existe, mais qu'elle est trs improbable 6. Si la tte d'une comte passait suffisamment prs de notre trajectoire pour dvier la course de la terre, un autre phnomne, outre la perturbation de la trajectoire terrestre, se produirait sans doute : une pluie trs dense de mtorites frapperait la terre; des blocs incandescents, aprs avoir travers l'atmosphre, frapperaient leur but en pleine violence. Dans le livre de Josu, deux versets avant le passage o il voque l'arrt du soleil pendant plusieurs heures, nous trouvons ces mots : comme ils (les rois de Chanaan) fuyaient devant Isral, la descente de Bthoron, le Seigneur lana sur eux du ciel une averse de grosses pierres jusqu' Azca; et ceux qui moururent sous cette averse de grle (pierres de barad) furent plus nombreux que ceux que les Isralites firent prir par l'pe . (Josu 10-11.) L'auteur du livre de Josu ignorait certainement la relation entre les deux phnomnes. On ne peut prtendre qu'il ait possd la moindre connaissance de la nature des arolithes, des forces d'attraction entre les corps clestes et autres lois semblables. tant donn qu'il relate ces phnomnes comme simultans, il est improbable qu'ils aient t invents. Les mtorites tombrent sur la terre en torrents. Ils durent tomber en trs grand nombre, car ils frapprent plus de guerriers que les pes des adversaires. Pour tuer des guerriers par centaines ou par milliers sur le champ de bataille, il fallut que s'abatte une vraie cataracte de pierres. Pareille averse de grosses pierres suggre qu'une trane de mtorites, ou une comte, venait de frapper notre plante. La citation de la Bible tire du livre du juste est laconique, et peut donner l'impression que le phnomne de l'immobilisation du soleil et de la lune fut local, visible seulement en Palestine, entre la valle d'Ajalon et de Gadaon. Mais le caractre cosmique du prodige apparat dans une prire d'action de grces attribue Josu : Le soleil et la lune s'arrtrent dans les cieux Et, dans ta rage, Tu te dressas contre les oppresseurs; Tous les princes de la terre se soulevrent. Les rois des nations s'taient tous rassembls.

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Et tu les dtruisis en Ton ire, Et tu les anantis en Ta rage. Les nations tremblaient de peur cause de Ta fureur Et les Royaumes chancelaient sous Ton courroux. Tu dversas sur eux Ta colre Et Tu les terrifias par Ta rage... La terre trembla, fut secoue du bruit de Tes tonnerres Et Tu les poursuivis en Ton orage Et Tu les consumas en Ton grand tourbillon... Leurs carcasses gisaient comme des tas d'ordures 8. C'est une vaste tendue que balaya la colre de Dieu la prire y insiste : Tous les royaumes chancelrent... Un torrent de grosses pierres qui s'abat du ciel, un tremblement de terre un tourbillon, une perturbation du mouvement de la terre : ces quatre phnomnes vont de pair. Il semble qu'une volumineuse comte ait d passer trs prs de notre plante et entraver brutalement son mouvement. Une partie des pierres disperses dans la queue de la comte frappa la surface de notre terre et la fit voler en clats. Sommes-nous fonds, sur la foi du livre de Josu, certifier qu' une certaine date au milieu du deuxime millnaire avant notre re, la rotation rgulire de la terre fut interrompue par une comte ? Pareille affirmation est charge de tant d'implications qu'elle ne doit pas tre faite la lgre. A ceci, je rponds que bien que les implications en soient extrmement importantes et nombreuses, les recherches auxquelles je me suis livr, considres dans leur ensemble, prsentent un enchanement de documents et d'autres tmoignages qui concourent tayer l'affirmation ci-dessus, et toutes les autres qu'on trouvera dans ce livre. Le problme qui nous est pos est un problme de mcanique. Les points situs sur les couches extrieures du globe en rotation (surtout