moi, mg, j’ai testé les consultations en musique

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Moi, MG, j'ai testé les consultations en musique § La généraliste Alice Redsparrow a annoncé, la semaine dernière sur Twitter, son intention de mettre de la musique lors de ses consultations. Une initiative novatrice qui a fait débat sur le réseau social « Cela faisait plusieurs années que cela me travaillait. Je viens enn de sauter le pas » cone le docteur Alice Redsparrow. Depuis environ une sem- aine la praticienne de 33 ans exerce en musique. Une manière de détendre les patients mais aussi la généraliste elle- même. "Il y a un effet de neuro-miroir. Le fait que je sois détendue agit sur les patients'' analyse-t-elle. Elle a donc opté pour "une playlist de musique classique, celtique ou de relaxation, à un niveau très bas''. Un bon choix, selon la spécialiste Anna- Maria Nédéva, membre de la société française de psychanalyse intégrative, compositeur, psychanalyste et musico- thérapeute. "La musique, lors d'une consultation est un accompagnement. Elle peut relaxer le patient mais aussi l'irriter. Il ne faut pas faire cela au hasard et bien choisir la musique'' explique-t- elle. La spécialiste recommande donc une musique d'ambiance relaxante mais pas non plus trop lente, ce qui pourrait agacer. En revanche, elle déconseille les musiques stimulantes comme le rock, la techno ou le rap qui "peuvent accélérer le rythme cardiaque des malades''. « Je ne fais pas cela pour mes patients » Le rock, c'est pourtant ce qu'écoute le docteur Garrigues, dermatologue, pen- dant ses consultations. "Je ne fais pas cela pour mes patients. Radiohead, Massive Attack... J'écoute de la musi- que tout le temps y compris pendant mes consultations. C'est très égoïste de ma part'' dévoile le praticien qui con- cède que certains patients sont "sur- pris'', voire "irrités''. "Une fois un patient un peu sourd m'a demandé s'il y avait des travaux au-dessus'' s'amuse- t-il. Si la musique peut aussi être utilisée en guise de thérapie, la volonté du docteur Redsparrow est simplement "d'aider les patients à se sentir en conance et de dénouer les résistances''. Une idée qui a fait débat entre médecins et patients sur le réseau social Twitter. "Une fois je suis allée chez un kiné qui m'a fait écouter du classique, ben en fait ça détend pas du tout'' a commenté le Docteur Tiben. "Surtout pas des bruits de nature, je trouve ça un peu stressant et un peu trop écolo bobo bio'' s'est amusée Anne Laure. Au contraire. Le docteur Shadok a été intriguée "Ça m'intéresse, tu mets quoi comme musique? J'hésite si musique pas adaptée...'' a-t-elle coné. De son côté, le Docteur Kalee a avoué ne "jamais y avoir pensé''. Après une semaine de consultations en musique, la généraliste s'est dite "éton- née'' de ne pas avoir eu de commen- taires de la part des patients. "Un seul m'a demandé ce que j'écoutais'' a cons- taté la praticienne qui a cependant remarqué que certains semblent écou- ter lorsque qu'elle rédige l'ordonnance. "Beaucoup entendent mais n'écoutent pas. Ils sont concentrés sur l'objet de leur venue'' analyse Alice Redsparrow. « Atténuer la distance » Un avis partagé par Anna-Maria Nédéva : "La musique est l'expression d'une émotion. Beaucoup de personnes n'entendent pas, ils sont focalisés sur leurs problèmes'' estime la musicothér- apeute, bien que persuadée que "la musique peut être un outil super dans le cadre d'une consultation''. D'autant que les praticiens n'ont rien à verser à la Société des Auteurs- Compositeurs et Editeurs de musique (Sacem), une salle de soin étant considérée comme un lieu privé, à la différence de la salle d'attente. Au-delà de la musique, le docteur Alice Redsparrow est très intéressée par toutes les formes de communication entre médecin et patient. "Je me demande toujours comment travailler cette relation'' cone-t-elle. Ses mots ou ses postures lors des consultations ne sont jamais anodines. "Par exemple, je répète ce que disent les patients pour leur montrer que j'ai saisi ce qu'ils me disent'', cite la praticienne passionnée. "L'idée est d'atténuer la distance, se mettre au même niveau'' souligne-t-elle. D'ailleurs, Alice Redsparrow regrette que des cours de communication ne soient pas intégrés au cursus de méde- cine. "J'ai découvert cela avec les entre- tiens motivationnels''. Ainsi, elle aimerait à terme "accueillir de futurs médecins en stage pour leur montrer qu'un travail sur la communication peut complètement modier une consultation''. § Article initialement paru le 28-02-2014 sur www. egora.fr . Sandy Berrebi-Bonin RFO 157 No. of Pages 1 Revue francophone d'orthoptie 2014;xx:1 Actualités RFO 157 No. of Pages 1 http://dx.doi.org/10.1016/j.rfo.2014.03.008 1

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RFO 157 No. of Pages 1

Revue francophone d'orthoptie 2014;xx:1 Actualités

http://dx.doi.org/10.1016/j.rfo.2014.03.008

Moi, MG, j'ai testé les consultationsen musique§

La généraliste Alice Redsparrowa annoncé, la semaine dernièresur Twitter, son intention demettre de la musique lors deses consultations. Une initiativenovatrice qui a fait débat sur leréseau social

« Cela faisait plusieurs années quecela me travaillait. Je viens enfin desauter le pas » confie le docteur AliceRedsparrow. Depuis environ une sem-aine la praticienne de 33 ans exerce enmusique. Une manière de détendre lespatients mais aussi la généraliste elle-même. "Il y a un effet de neuro-miroir. Lefait que je sois détendue agit sur lespatients'' analyse-t-elle. Elle a donc optépour "une playlist de musique classique,celtique ou de relaxation, à un niveautrès bas''.Un bon choix, selon la spécialiste Anna-Maria Nédéva, membre de la sociétéfrançaise de psychanalyse intégrative,compositeur, psychanalyste et musico-thérapeute. "La musique, lors d'uneconsultation est un accompagnement.Elle peut relaxer le patient mais aussil'irriter. Il ne faut pas faire cela au hasardet bien choisir la musique'' explique-t-elle. La spécialiste recommande doncunemusique d'ambiance relaxante maispas non plus trop lente, ce qui pourraitagacer. En revanche, elle déconseille

les musiques stimulantes comme lerock, la techno ou le rap qui "peuventaccélérer le rythme cardiaque desmalades''.

« Je ne fais pas cela pour mespatients »Le rock, c'est pourtant ce qu'écoute ledocteur Garrigues, dermatologue, pen-dant ses consultations. "Je ne fais pascela pour mes patients. Radiohead,Massive Attack. . . J'écoute de la musi-que tout le temps y compris pendantmes consultations. C'est très égoïstede ma part'' dévoile le praticien qui con-cède que certains patients sont "sur-pris'', voire "irrités''. "Une fois unpatient un peu sourd m'a demandé s'ily avait des travaux au-dessus'' s'amuse-t-il.Si la musique peut aussi être utilisée enguise de thérapie, la volonté du docteurRedsparrow est simplement "d'aider lespatients à se sentir en confiance et dedénouer les résistances''. Une idée qui afait débat entre médecins et patients surle réseau social Twitter. "Une fois je suisallée chez un kiné qui m'a fait écouter duclassique, ben en fait ça détend pas dutout'' a commenté le Docteur Tiben."Surtout pas des bruits de nature, jetrouve ça un peu stressant et un peutrop écolo bobo bio'' s'est amusée AnneLaure. Au contraire.Le docteur Shadok a été intriguée "Çam'intéresse, tu mets quoi commemusique? J'hésite si musique pasadaptée...'' a-t-elle confié. De son côté,le Docteur Kalee a avoué ne "jamais yavoir pensé''.Après une semaine de consultations enmusique, la généraliste s'est dite "éton-née'' de ne pas avoir eu de commen-taires de la part des patients. "Un seulm'a demandé ce que j'écoutais'' a cons-taté la praticienne qui a cependantremarqué que certains semblent écou-ter lorsque qu'elle rédige l'ordonnance.

"Beaucoup entendent mais n'écoutentpas. Ils sont concentrés sur l'objet deleur venue'' analyse Alice Redsparrow.

« Atténuer la distance »Un avis partagé par Anna-MariaNédéva : "La musique est l'expressiond'une émotion. Beaucoup de personnesn'entendent pas, ils sont focalisés surleurs problèmes'' estime la musicothér-apeute, bien que persuadée que "lamusique peut être un outil super dansle cadre d'une consultation''. D'autantque les praticiens n'ont rien à verser àla Société des Auteurs- Compositeurs etEditeurs de musique (Sacem), une sallede soin étant considérée comme un lieuprivé, à la différence de la salle d'attente.Au-delà de la musique, le docteur AliceRedsparrow est très intéressée partoutes les formes de communicationentre médecin et patient. "Je medemande toujours comment travaillercette relation'' confie-t-elle. Ses motsou ses postures lors des consultationsne sont jamais anodines. "Par exemple,je répète ce que disent les patients pourleur montrer que j'ai saisi ce qu'ils medisent'', cite la praticienne passionnée."L'idée est d'atténuer la distance, semettre au même niveau'' souligne-t-elle.D'ailleurs, Alice Redsparrow regretteque des cours de communication nesoient pas intégrés au cursus de méde-cine. "J'ai découvert cela avec les entre-tiens motivationnels''. Ainsi, elle aimeraità terme "accueillir de futurs médecins enstage pour leur montrer qu'un travail surla communication peut complètementmodifier une consultation''.

§Article initialement paru le 28-02-2014 sur www.egora.fr.

Sandy Berrebi-Bonin

RFO 157 No. of Pages 1

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