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Ministry®, Revue internationalepour les pasteurs12501 Old Columbia Pike,Silver Spring,MD 20904-6600 [email protected]édacteur en chef : Pavel GoiaRédacteur adjoint : Jeffrey Brown

Rédacteur de l’édition en français :Bernard Sauvagnat

S O M M A I R E

2 Ministry® 1er trimestre 2019

Ministry®

3 Éditorial20 Livre25 Courrier du lecteur26 Réveil et Réforme31 Nouvelles

Animateurs : Anthony Kent Co-animateurs : Ivan Williamswww.MinistryinMotion.tv

Secrétaire de rédaction :Sheryl BeckResponsable financier et de fabrication : John Feezer IVConseillers internationaux :Elias Brasil de Souza, RonClouzet, Michael D. Collins,Daniel Devadhas, Carlos Hein,Patrick Johnson, Victor Kozakov,Geoffrey Mbwana, MusaMitekaro, Passmore Mulambo,Daniel Opoku-Boateng, HectorSanchez, Branimir Schubert,Houtman Sinaga, Ivan L.Williams, Ted N.C. Wilson.Publicité :[email protected] et changementsd’adresse :[email protected]; +1 301-680-6511;+1 301-680-6502 (fax)

Imprimé par la Pacific Press®Pub. Assn., 1350 N. Kings Road,

Nampa,ID 83687-3193.

Port payé à Nampa, Idaho(ISSN 1947-5829).

Membre d’Associated Church Press. Adventiste®, Adventiste du sep-tième jour®, et Ministry® sontdes marques déposées de Gene-ral Conference Corporation ofSeventh-day Adventists®.Volume 11 Numéro 1 © 2019 -

IMPRIMÉ AUX ÉTATS-UNIS.

Couverture : 316 Creative,Dominique GilsonMaquette & corrections :Dominique Gilson - FranceTarif : 4 numéros pour le mondeentier : 10 US$. Pour commander,envoyer nom, adresse et règle-ment à Ministry® Subscriptions,12501 Old Columbia Pike, SilverSpring, MD 20904-6600 U.S.A.Articles : Nous accueillons lesarticles non sollicités. Avant desoumettre un article, merci deconsulter les consignes de ré-daction surwww.ministrymagazine.org. Merci d’envoyer vos textes parcourrier électronique à :[email protected] ou à[email protected]

Ministry® est publié chaquemois depuis 1928 par l’Associa-tion pastorale de la Conférencegénérale des adventistes du sep-tième jour®

Secrétaire : Jerry N. PageAdjoints : Jonas Arrais, JeffreyBrown, Robert Costa, Pavel Goia,Anthony Kent, Janet Page.Centre de ressources pastorales Coordinatrice : www.ministerialassociation.org

REVUE INTERNATIONALEPOUR LES PASTEURS FRANCOPHONES

4 Sept styles de témoignage pour attirer les gens au ChristDavid HARTMAN

Compréhension et compassion : une recette pour la missionurbaine.Gary KRAUSE

Relations efficaces avec les postmodernesdans la mission urbaineBogdan PLATON

Les gens invisiblesTimothy P. NIXON

Le lieu de guérisonNigel G. DAVID Sr.

Mon seau se retrouve vide : stress accumuléau sein du ministèreClaudio et Pamela CONSUEGRA

Missionnel ou attractif ?Une polémique dont l’Églisene peut se payer le luxeJesse WILSON

Les articles de la revue Ministry® en françaissont maintenant disponibles surhttps://www.ministrymagazine.org/fr

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U n jour, j’ai demandé à mon pèrequelles méthodes je devrais uti-liser pour développer mon en-

treprise et réussir. Il m’a répondu : «Lesméthodes sont bonnes et nécessaires,mais sans Dieu, tout est comme la boueet n’a aucune valeur. Tu as besoin deprière solide pour chercher le plan deDieu, sa direction et sa présence et alors,tu auras du succès.»

Des années plus tard je lui ai demandéquels programmes et stratégies employerpour faire grandir une Église et être ensanté. Il m’a répondu: «Mon fils, les pro-grammes sont bons et nécessaires ; nousavons besoin d’être organisés. Mais ilssont tous nuls et sans valeur sans Dieu.Ce n'est ni par la puissance ni par la force,mais c'est par mon esprit, dit l'Éternel desarmées (Zacharie 4.6). Lorsque nous re-cevons cette promesse, nous recevons lebaptême du Saint-Esprit. Le Saint-Espritvient lorsque nous sommes engagésdans la prière. La prière c’est l’arbre devie». Alors, faut-il vraiment suivre des pro-grammes? Les programmes seront utiles,seulement si nous acceptons les plansde Dieu par la prière fervente et sommesprêts à les exécuter correctement.

L’apôtre Paul a regardé toutes leschoses du monde comme de la boue(Phil 3.8). Le mot grec est skubalon, quisignifie rejet, sans valeur, fatras, excré-ments d’animaux. Cependant, avec laprière de consécration, ils deviennent ducompost utile par la grâce de Dieu.

J’ai suivi les conseils de mon père, et,louez soit l’Éternel !, les résultats ont étémeilleurs que je ne pouvais l’imaginer. Ilest des moments dans l’histoire où laprière a changé d’immenses foules degens et a même influencé des nationsentières. La prière de Moïse a sauvé Israël(Exode 32). La prière de Josaphat adonné à Israël la victoire sur ses ennemis(2 Chronique 20). Une autre circonstanceoù la prière a fait un grand impact, c’estl’histoire de Jérémie Lanphier.

En 1857, Jérémie Lanphier a invité lesgens à prier. Tout au début, juste un petitnombre a répondu ; mais le nombre alentement augmenté. Lorsque la bourses’est effondrée, des dizaines de milliersont commencé à fréquenter les réunions.Lloyd Stilley raconte «qu’en 1858 cetteinitiative de prière s’est étendue à toutesles grandes villes de l’Amérique. Selonles estimations, environ un million d’Amé-ricains sur une population de trente mil-lions en ce temps-là, s’est convertie enmoins de deux ans. Et tout a commencéavec la prière» 1.

Dans le livre des Actes, les disciplesont suivi la recommandation que leur avaitfait Jésus de prier, attendre le Saint-Esprit,et puis aller et travailler (Luc 24.49; Actes1.8). Environ cent vingt disciples étaientdans la chambre haute priant sans cesse,avec consécration. La Bible dit : «Tous d'uncommun accord persévéraient dans laprière» (Actes 1.14). Il semble que la prièrea été le moyen dont Dieu s’est servi pourles transformer aussi bien que l’Église,pour amener l’unité, l’engagement au tra-vail du Maître et la puissance nécessairepour la mission que Jésus leur avaitconfiée tout en accomplissant des mer-veilles autrement impossible, au-delà deleur imagination.

La capacité, la sagesse et les méthodeshumaines à elles seules ne peuvent pasfaire l’œuvre de Dieu. Faire le travail deDieu réclame la puissance de Dieu; etcette puissance se manifeste à travers laprière sincère et la consécration. Ellen G.White souligne «qu’un réveil de la vraiepiété parmi nous est le plus grand et leplus urgent de tous nos besoins». Elleajoute : «On ne peut espérer un réveil quecomme une réponse à la prière».2

La plupart des Églises luttent souventpour la croissance en raison de pro-blèmes comme les tensions internes, lemanque d’engagement, les problèmesfinanciers, et l’absence de puissance etde joie. C’est une chose de croire en la

É D I T O R I A L | PAV E L G O I A

prière et de l’approuver, c’en est une au-tre, entièrement différente, d’être vraimentsérieux à son sujet – d’en faire à la foisle cœur de l’Église et de l’individu. «Nouspouvons être assurés de cela – le secretde tout échec c’est notre échec dans laprière secrète».3

Une croissance significative (spirituelleet numérique) peut-elle être réellementaccomplie? Si oui, comment? La plupartdes programmes, peu importe leur puis-sance, peuvent aider une Église ici et là ;mais la plupart du temps, ces pro-grammes ne font pas grande différence.Parfois, les membres d’Église se lassentdes programmes et ne croient plus quequoi que ce soit puisse changer ou chan-gera l’Église. Des programmes de supportfructueux fonctionnent seulement avec laprière fervente.

Alors que nous lisons chaque article, puis-sions-nous baigner dans la prière les mé-thodes que nous utilisons pour gagner deprécieuses âmes à Dieu. C’est seulementdans la prière humble et diligente que Dieupeut nous révéler la meilleure manière d’at-teindre le monde autour de nous.

1. Lloyd Stilley, “Sermon: The Priority of Praying Together—Acts 6,” LifeWay, Jan. 27, 2014, lifeway.com/Article/sermon-when-the-church-prays-the-priority-of-praying-together-acts-6-1-5.2. Ellen G. White, Messages choisis, vol. 1. Mountain View,CA : Éditions Inter-américaines, 1969, p.141.3. An Unknown Christian, The Kneeling Christian: A TimelessClassic on Prayer. New Kensington, PA: Whitaker House,2013, p.6.

Gens, programmes et prière

31er trimestre 2019 Ministry®

Pavel Goia, MDiv, est le rédacteur en chef de Ministry®.

M

Je suis heureuxd’avoir écouté

mon père qui estsur terre commemon Père qui est

dans les cieux.

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4 Ministry® 1er trimestre 2019

M a femme, Judi, et moi vivionsà Pace, en Floride, aux États-Unis, dans une maison louée

en attendant la construction de notrenouvelle maison de l'autre côté de larue. La semaine avant le grand démé-nagement, nous avons organisé unevente dans notre garage pour nous dé-brasser d’une partie de nos effets per-sonnels. Alors que j'étais assis sur unechaise de jardin dans l'allée et que jeregardais les gens s'approcher du trottoiret fouiller dans nos affaires, je me suisrendu compte que beaucoup de cesgens étaient nos propres voisins, maisje ne connaissais même pas leur nom.C'est alors que Dieu ma parla douce-ment : « David, tu vis dans ce quartierdepuis douze mois. Tu es passé devantces maisons des centaines de fois pouraller prêcher, pour participer à des co-mités, pour visiter des paroissiens etdonner des études bibliques à traversla ville, mais pas une seule fois tu n'astraversé la limite de la propriété pourfaire connaissance avec tes voisins ! » À ce moment-là, j'ai confessé : « MonDieu, tu as raison. Donne-moi une autrechance. Montre-moi comment être unmeilleur témoin de toi. »

La réticence des chrétiens à témoignerJuste avant de monter vers son Père,

Jésus a mis son Église au défi en lui di-sant : «Allez, faites … des disciples »(Mt 28.19). Conduire les autres à Jésusest la première priorité des disciples duChrist. Pourtant, soyons francs ; c'est unedes choses les plus difficiles que Dieunous ait jamais demandé de faire. Laplupart d'entre nous préfèrent courir unmarathon plutôt que de traverser la rue

pour saluer leur voisin. Nous sommesenvahis par des sentiments de peur etde carence. De plus, nous sommes tropoccupés. C’est vrai non seulement pourles membres de l'Église mais aussi pourles pasteurs. Selon une étude de ThomRainer, 53% des pasteurs n'ont fait au-cun effort d'évangélisation pour parta-ger l'évangile avec les non-croyants aucours des six derniers mois 1. Il est facilede se laisser distraire par la « tyranniede l'urgent » et d'ignorer le mandatévangélique du Christ. La réalité est queles pasteurs doivent d'abord modéliserla valeur évangélique que les personnesperdues comptent pour Dieu avant queleurs Églises ne s'en inspirent un jour 2.Comme le dit Alvin Reid : «Votre Église,collectivement, ne sera pas plus évan-gélisatrice que vous ne l'êtes person-nellement » 3.

Découvrir sept stylesde témoignage.Quand j'étais à Pensacola, en Floride,

j'avais l'habitude de me promener le longdu quai et de regarder les gens pêcher.Il était intéressant de noter qu'ils utili-saient différents types d'appâts pour at-traper différents types de poissons. Vousimpliquez plus de membres avec uneapproche d'évangélisation multidimen-sionnelle parce que chaque membre uti-lise une approche de témoignage diffé-rente. Et vous touchez plus de gens parceque des personnes différentes sontmieux attirées par des styles différents.Cette «boîte à outils» bien chargée créeune situation gagnant-gagnant. Elle im-plique plus de membres et «attire» plusde personnes à Jésus-Christ. Je n'ou-blierai jamais l'un des premiers travauxréalisé pendant mon doctorat. Notre pro-

fesseur, le Dr Joseph Kidder, nous a de-mandé de prendre nos Bibles, de par-courir le livre des Actes et de chercherles différentes méthodes d'évangélisationutilisées par l'Église chrétienne primitive.J'étais un adventiste du septième jourde troisième génération qui a grandicomme un enfant de pasteur. Je connais-sais ce message en long et en travers.Ma vision stéréotypée de l'évangélisationétait celle d'un évangéliste professionnelqui tenait des réunions publiques demoisson avec les quatre monstres deDaniel à l'écran. Mais nous avons dressénos listes individuelles dans la prière etensuite compilé notre liste collective surle tableau blanc, remplissant le tableauavec plus de 40 méthodes d'évangéli-sation différentes.

Ellen White a affirmé : « Il nous fautemployer des méthodes diversifiées sinous voulons toucher différentes caté-gories de personnes 4. » Cette affirmationm'a bien ouvert les yeux.

Par la suite, j'ai regroupé les méthodesen sept styles de témoignage 5 :

1. Prière - Intercession pour le salutdes amis, de la famille et des col-lègues de travail.

2. Amitié - Former des ponts relation-nels pour communiquer l'Évangiled'une manière discrète et noncontraignante.

3. Service - Démontrer l'amour deDieu en accomplissant des actespratiques de service sans condi-tion.

4. Témoignage - Relier à partir de sapropre expérience personnelle lesgrandes choses que Dieu a faites.

5. Invitation - Inviter la famille, lesamis et les connaissances à desévénements sociaux, des projets

Sept styles de témoignage pour attirer les gens au Christ

David HARTMAN, DMin, au moment d'écrire ces lignes, était responsablede l’association pastorale et de l’évangélisation pour la Fédération du Kentucky­Tennessee. Il est depuis peu professeur à la Faculté de théologie de SouthernAdventist University, Collegedale, Tennessee, États­Unis.

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51er trimestre 2019 Ministry®

de service, des séminaires cultu-rellement pertinents ou des évé-nements spirituels où Jésus, sonÉvangile et sa vérité sont présen-tés.

6. Conversation - Utiliser une conver-sation informelle pour présenter leChrist et sa vérité aux gens.

7. Proclamation - Proclamer les vé-rités absolues de la Parole de Dieud'une manière qui fait autorité,sans porter de jugement, par l'en-seignement ou la prédication.

Personnalisation des styles de témoignage. Tout comme chaque organe du corps

a une structure unique et une fonctionparticulière, il en va de même pourchaque membre du corps du Christ. Dieudistribue différents dons spirituels pourconstruire le corps du Christ (Rm 12.4-8; 1 Co 12.7-11 ; Ep 4.11-16). De même,il suscite divers styles de témoignagepour atteindre les gens pour le Christ.Ceci est illustré dans 1 Corinthiens 3.5-11 par l'utilisation de deux métaphores :la plantation et la construction. Dansl'agriculture, les divers employés ont desrôles différents pour cultiver — certainsplantent et d’autres arrosent. De même,dans la construction, certains sous-trai-tants coulent les fondations, tandis qued'autres montent les murs. Dans les deuxcas (plantation et construction), tous lesouvriers sont nécessaires, chacun avecson propre rôle spécialisé, afin de menerla tâche à bien. Il en va de même pourle travail de conquête des âmes. Certainssont plus aptes à cultiver le sol (par laprière, l'amitié ou le service) ; d'autressont plus aptes à semer des graines (enpartageant leur témoignage personnel,en invitant les gens à des séminaires or-ganisés par l’Église ou en engageantune conversation spirituelle). D'autresencore sont mieux équipés pour récolterla moisson (en partageant les vérités dela Parole de Dieu par l'enseignement oula prédication) 6. Tous les rôles dans leprocessus de conversion des âmes sont

essentiels pour amener les personnesperdues à Christ. Il faut noter que mêmesi Dieu permet à chacun de nous de pra-tiquer un style de témoignage préféré,nous ne devons pas limiter notre témoi-gnage à un seul style. Il y a des exemplesdans la Bible de personnes (comme

l'apôtre Paul) qui ont utilisé plusieursstyles de témoignage. La parabole destalents (Mt 25.14-30) révèle que les ta-lents utilisés sont des talents multipliés,et les talents gaspillés sont des talentsperdus. En pratiquant fidèlement lesstyles de témoignage que Dieu nous

Figure 1 : Corrélation entre les styles de témoignage et lecycle de récolte

Dans nos interactions quotidiennesavec les gens, nous devrions être prêtsà utiliser le style qui correspond le mieuxau cheminement de foi et au niveaude réceptivité de celui avec lequelnous partageons, sans tenir comptede nos préférences personnelles.

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6 Ministry® 1er trimestre 2019

David HARTMAN

confie, il ajoutera de nouveaux styles ànotre répertoire pour qu'avec le tempsnous devenions compétents dans l'utili-sation de styles multiples. Bien que nouschoisissions habituellement notre stylepréféré par défaut, le Saint-Esprit peut,parfois, nous donner le pouvoir d'utiliserdes styles qui sont en dehors de notrezone de confort pour le bien de celui au-près duquel nous témoignons. Dans nosinteractions quotidiennes avec les gens,nous devrions être prêts à utiliser le stylequi correspond le mieux au chemine-ment de foi et au niveau de réceptivitéde celui avec lequel nous partageons,sans tenir compte de nos préférencespersonnelles.

Des outils différents pour différentes personnesUne des erreurs courantes que nous

commettons en tant que témoins duChrist est de traiter tout le monde de lamême façon et d'utiliser la même ap-proche du témoignage pour tout lemonde. Dans la parabole du semeurdonnée par le Christ et rapportée enMarc 4.3-20, les quatre types de sol re-présentent quatre types d'auditeurs oudifférents niveaux de réceptivité à la Pa-role de Dieu. Cela montre que toutes lespersonnes en errance ne sont pas aumême stade de leur cheminement spiri-tuel ou à la même distance de Dieu. Les

gens varient dans leur compréhension,leur attitude et leur besoin de Dieu. Cer-tains sont fermés, d'autres sont réceptifs.Certains n'ont jamais entendu le nomde Jésus, tandis que d'autres ont uneconnaissance pratique des Écritures. No-tre rôle en tant que témoins du Christest de discerner le niveau de foi ou deréceptivité d'un individu, puis de témoi-gner en conséquence.

Ces étapes de la foi peuvent être tra-cées sur un graphique linéaire connusous le nom d'échelle d'Engel 7. Cetteéchelle représente le chemin spiritueld'un individu à partir de l'extrême gaucheavec un cheminement allant de l’anta-gonisme (-5), à la résistance (-4), l’indif-

Q ue se passe­t­il lorsqu'une Église passe à uneapproche multidimensionnelle en formant lesmembres à utiliser les différents styles de té­

moignage ? Quand j'ai terminé mon doctorat en ministèreà l'Université Andrews en 2007, ainsi qu'un projet sur lesstyles personnels d'évangélisation, Dieu m'a persuadéd'utiliser le cycle agricole pour illustrer les styles de té­moignage dans mon Église locale dénommée HighlandSeventh­day Adventiste Church à Portland, Tennessee,pour voir si cela pouvait affecter l'évangélisation de façonpositive. Par conséquent, nous avons planifié en automne2008, une série de conférences avec l'évangéliste JasonSliger, de Amazing Facts. Cependant, cette fois, nousnous sommes engagés dans une bonne préparation enmettant l'accent sur les styles de témoignage, en particulierles trois premiers qui « cultivent » le sol (prière, amitié etservice). Neuf mois avant le début des réunions, j'ai misl'accent chaque mois à la Highland Church, sur un stylede témoignage différent. En janvier, nous avons parlé dela prière d'intercession, en février, de la valeur de l'amitiéet, en mars, du besoin de service dans notre communautépar des actes concrets de bonté, etc. En plus de prêchersur les styles de témoignage, j'ai aussi montré de courtsclips vidéo démontrant le bon usage des styles. J'aiexhorté les membres à utiliser les styles de culture, ou« clés du cœur » dans leurs interactions quotidiennesavec les autres, et nous avons présenté des témoignages

Mise en œuvre des styles personnels : une étude de cas

de membres qui pratiquaient ces styles. L'Église a égale­ment accordé une attention particulière à la prière pendantce temps de préparation. À la suite de la série de moissons,20 personnes ont pris position pour Jésus et ont été bap­tisées. Seize d'entre elles sont le résultat direct de l'utili­sation des clés par les membres de l'Église. Seulement 4provenaient exclusivement des prospectus. En tant quefamille pastorale, ma femme et moi avons utilisé lesstyles d'amitié et d'invitation avec notre voisine, Susan.Un peu blasée par le christianisme, Susan a décliné lesinvitations initiales de Judi et moi à venir à l'église. Maiselle s’est volontiers jointe à nous pour le déjeuner dusabbat et pour une randonnée dans le parc national. Aufil du temps, elle a commenté : «Vous avez tellement depaix. Il y a quelque chose de différent en vous ». Elle finitpar demander : «Vous ne tondez jamais votre pelouse lejour du sabbat, pourquoi ? Parlez­moi de ce sabbat ». Lajoie et la reconnaissance qui remplissaient le cœur deJudi et le mien étaient indescriptibles. Nous pouvons at­tester que les styles de témoignage fonctionnent vraiment,surtout quand on combine les styles relationnels (1­6)avec la proclamation (7). C'est une combinaison gagnante.Après deux ans et demi d'affection et de prière, d'amitiéet d'actes de gentillesse, le cœur de Susan s'est progres­sivement ouvert à quelque chose de plus. Elle s'est aven­turée à l'Église adventiste du septième jour des Highlands.Elle a assisté aux réunions. Elle a intégré l'Église adventistedu septième jour.

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SEPT STYLES DE TÉMOIGNAGE POUR ATTIRER LES GENS AU CHRIST

férence (-3), la réceptivité (-2), la re-cherche (-1), et enfin, à la conversion(représenté par la croix). Une analogiequi aide à expliquer les différentes étapesde la foi est celle des portes ouvertes etfermées 8. Pour la personne qui est anta-goniste (-5), la porte est fermée et cade-nassée. La personne résistante (-4) aune porte fissurée. La personne indiffé-rente (-3) a une porte partiellement ou-verte. La personne réceptive (-2) a uneporte qui est le plus souvent ouverte. Unepersonne qui cherche (-1) a une portequi est grande ouverte et qui supplie :«S'il vous plaît, partagez Christ et sa véritéavec moi ! » Le point important à retenirest que plus quelqu'un est éloigné de lafoi en Christ, plus il est nécessaire d'uti-liser les anciens styles de témoignage(prière, amitié, et service). Au fur et à me-sure que le cœur d'un individu devientréceptif, nous pouvons utiliser des stylesde témoignage plus engagés (témoi-gnage, invitation, conversation, et pro-clamation). Encore une fois, nous devonscoopérer avec l'œuvre du Saint-Esprit endiscernant où une personne se trouvesur l'échelle de la foi et en lui donnantensuite le petit coup de pouce suivantqui l’amène au Christ par l'utilisation ap-propriée des styles de témoignage. Cegentil coup de pouce est comparable àun jeu de golf dont le but est d'amenerla balle du tee au trou par une série decoups avec divers clubs de golf, d'aborden la faisant descendre dans le parcours,puis sur le green, et finalement dans letrou 9. Cela ne veut pas dire qu'il faille« frapper» les gens pour les pousser sur

le chemin spirituel (c'est évidemment làque cesse la métaphore) ; il faut plutôtles pousser doucement sur leur chemin.Tout comme les golfeurs utilisent diffé-rents clubs (drivers, fers longs, fers courtset putters) pour différents coups, en fonc-tion de la distance de la balle par rapportau trou, de même les gagneurs d'âmedoivent utiliser différents styles de témoi-gnage pour différents individus, en fonc-tion de leur distance par rapport auChrist. En utilisant cette même analogiedu golf, nous ne considérons pas que leputter est plus important que le driverparce qu'il a fait tomber la balle dans letrou. Nous ne devrions pas non plusconsidérer le style de proclamationcomme plus précieux que le style del'amitié parce qu'il a poussé tel individudans le baptistère. Non, chaque club oustyle a son rôle essentiel, et par consé-quent, chacun a la même importance.Je suis reconnaissant que Dieu m'aitdonné beaucoup plus de chances departager son amour avec les autres de-puis cette révélation lors de ma vente dedéménagement il y a 26 ans. Dieu vousutilisera aussi, alors que vous employezles différents styles de témoignage et for-mez les autres à faire de même.

Pour davantage sur le sujet voir David L. Hartman, WinningWays to Witness: Seven Witnessing Styles That Attract Peopleto Christ, Collegedale, TN, College Press, 2018.1. Thom S. Rainer, «The Dying American Church, » The ChristianPost, 18 avril 2006, christianpost.com /news/the-dying-ameri-can-church-6685/.2. Lee Strobel, « Helping Churches Become Stronger Salt andBrighter Light, » présenté à la conference des pasteurs deSouthern Union le 10 janvier 2018, à Orlando, Floride, États-Unis.3. Alvin Reid, « Creating an Evangelistic Church, » Center for

Great Commission Studies, 15 septembre 2016,thecgcs.org/2016/09/creating-an-evangelistic -church/.4. Ellen G. White, Évangéliser, Dammarie-les-Lys, Vie et Santé,1986, p. 103.5. Je ne suis pas à l’origine de l’idée d’une variété de stylesde témoignage. En 1994, Mark Mittelberg et Bill Hybels ontproposé six styles d'évangélisation dans leur manuel de té-moignage : Becoming a Contagious Christian, Grand Rapids,MI, Zondervan, 1994, p. 119–132 ; voir aussi Mark Mittelberg,Lee Strobel, et Bill Hybels, Becoming a Contagious Christian :Leader’s Guide, éd. rév., Grand Rapids, MI, Zondervan, 2007, p.70–95. Leur liste de styles comprend l'approche directe, l'ap-proche intellectuelle, l'approche par le témoignage, l'approcheinterpersonnelle, l'approche invitation et l'approche service.Je n'étais pas au courant de l’existence de la ContagiousChristian resource au moment de ma découverte des stylesd'évangélisation à Denver et de ma décision subséquented'écrire ma thèse de doctorat sur les styles d'évangélisation,mais il est intéressant de voir comment Dieu a amenédifférents individus à découvrir les différentes approchesd'évangélisation à partir de la même source biblique originale.Pendant le processus de rédaction de ma thèse, j'ai prisconscience de l’existence de cette ressource et j'ai été gran-dement béni par son contenu. J'ai pris pour principe de baseque les croyants devraient se spécialiser dans le style d'évan-gélisation qui correspond le mieux à leur tempéramentparticulier et j'ai ensuite développé un système qui intègre lesstyles d'évangélisation et les étapes de conversion de la foi,pour optimiser l'opportunité évangélique.6. Pour davantage de resources sur la correlation entre lestypes de tempéraments et les styles de témoignage, voir MikeBechtle, Evangelism for the Rest of Us: Sharing Christ WithinYour Personality Style, Grand Rapids, MI, Baker, 2006; David A.Farmer, Power Witnessing : How to Witness to Different Perso-nalities, Hagerstown, MD, Review and Herald, 1999; et MelsCarbonell and Stanley R. Ponz, My Personal Mission Profile,Blue Ridge, GA : Uniquely You Resources, 2006, disponible surle site web uniquelyyou, uniquelyyou.org/content/personalizing-my-faith-my-personal-mission-profile. 7. Ce graphique a été développé à l'origine par le Dr JamesEngel, qui a été président dans les années 1970 du départementdes communications de la Wheaton Graduate School. Voirl’échelle originale d’Engel dans James F. Engel, ContemporaryChristian Communications, Nashville, TN, Thomas Nelson,1979, p. 83. L'échelle a été affinée par la suite par ThomRainer, président de LifeWay Christian Resources. Voir Thom S.Rainer, The Unchurched Next Door: Understanding Faith Stagesas Keys to Sharing Your Faith, Grand Rapids, MI, Zondervan,2003, p. 20, 21. 8. Rainer, The Unchurched, p. 21, 78, 102, 126, 150, 1172.9. Voir une explication détaillée de la métaphore du golf dansSteve Sjogren, David Ping, et Doug Pollock, Irresistible Evangelism:Natural Ways to Open Others to Jesus, Loveland, CO, Group,2004, p. 73–88.

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Figure 2 : Échelle de Engel avec les portes ouvertes et fermées

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zones urbaines peut donner la mêmeimpression que de jouer dans une stationde métro pour un public qui fait lasourde oreille. Il y a plusieurs siècles,les Juifs exilés à Babylone demandèrent :«Comment chanterions-nous le chantdu Seigneur sur une terre étrangère?»(Ps 137.4, NBS). Aujourd’hui, nous posonsla question : « Comment pouvons-nouschanter le chant du Seigneur dans lesvilles?» L’Église adventiste du septièmejour a une forte tradition rurale, et c’estdans les zones rurales qu’elle a souventconcentré ses efforts. De nombreuxmembres de l’Église se sentent plus àl’aise à la campagne. Les villes demeu-rent, à bien des égards, des terres étran-gères. Nous savons que la mélodie dela «merveilleuse histoire» est la musiquela plus magnifique et transformatricede l’univers. Cependant, comment de-vrions-nous la jouer de manière à créerun lien avec les citadins? Nous essayonsde jouer plus fort, plus doucement, avecdifférents instruments, avec davantagede virtuosité, mais malgré cela, la plupartdes citadins passent leur chemin avechâte, commandés par leurs agendas.

Regarder, écouter et apprendreAu début de l’année 2016, l’Église

Hillsong, une grande Église pentecôtistede la banlieue de Sydney, en Australie,qui compte différentes Églises sœurs

autour du monde, annonça le projetd’implanter une autre Église, cette foisà San Francisco, en Californie. Ben Hous-ton, le fils de Brian et Bobbie Houston,les fondateurs et pasteurs principauxde l’Église Hillsong, conduirait cette ini-tiative. Nate Lee, un blogueur de SanFrancisco, répondit en ligne par un articleintitulé «Église Hillsong : ne colonisezpas San Francisco». Dans sa réponse,Lee exprima son dégoût envers les pas-teurs qui viennent dans cette ville, publientdes images emblématiques, puis disentà quel point ils aiment la ville et préten-dent que «Dieu va faire des chosesmerveilleuses ici à San Francisco», sansprendre le temps de la comprendre. Ilsne prennent pas le temps d’essayer decomprendre la ville, avance Lee, et ilsarrivent avec leur agenda prédéterminé.

Lee souligne également les Églisesethniques qui existent à San Franciscodepuis des décennies, et il dit que lelangage utilisé par Hillsong, suggérantque le travail de Dieu va commenceravec leur arrivée, « indique non seulementune terrible théologie, mais aussi un ex-ceptionnalisme chrétien blanc, lacroyance oppressive que la bonne sortede salut et de guérison ne peut être fa-cilitée que par nous, selon nos conditionset par nos méthodes». Lee continue endisant que c’est ce genre d’attitude qui« détruit et défait le fidèle travail del’Évangile » qui se produit déjà dans laville. Il conclut en ces mots : «Réveille-

J oshua Bell, un violoniste clas-sique de renommée mondiale,était debout devant la station

de métro L’Enfant Plaza à WashingtonDC. Il tenait son Stradivarius d’une valeurde 3.5 millions de dollars. C’était l’heurede pointe en ce matin froid de 2007.Trois jours plus tôt, Bell avait fait sallecomble au Boston Symphony Hall, oùun assez bon siège coûtait 100 dollars.Ce matin-là, dans le métro de Wash-ington, Bell commença à jouer la Cha-conne de la Partita en Ré mineur de J. S. Bach, un morceau techniquementexigeant. Pendant les 43 minutes quisuivirent, il interpréta six œuvres clas-siques majestueuses. Durant tout cetemps, 7 personnes s’arrêtèrent pourécouter pendant une minute ou plus,alors que 1090 autres passèrent sanss’arrêter. Certains jetèrent de la petitemonnaie dans la boîte de son violon, et27 personnes donnèrent des billets,pour un total de 32,17 dollars, à ungénie musical qui peut gagner 1 000dollars à la minute. Plus tard, Bell plai-santa en disant que 40 dollars en uneheure n’était pas si mal.

«Je pourrai assez bien gagner mavie en faisant cela, dit-il en riant, et jen’aurais pas besoin de payer un agent.»Mais il avoua également : «Cela m’afait bizarre que les gens, en fait,... m’igno-raient 1 ».

Pour les adventistes du septième jour,jouer « l’ancienne mélodie» dans les

Gary KRAUSE, MA, est directeur du bureau de la Mission mondialeadventiste à Silver Spring, Maryland, aux États­Unis. Il prépare un doctoraten mission urbaine.

Compréhensionet compassion : une recette pour la mission urbaine

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toi, Ben Houston. Le plan a commencésans toi il y a longtemps. Alors devinequoi? Tu n’es pas meilleur que qui quece soit. La ville n’a pas besoin de toi 2 ».

Bien que Lee ait Hillsong dans saligne de mire, l’Église adventiste du sep-tième jour pourrait peut-être faire l’objetd’une critique similaire. Nous avons par-fois mis une telle emphase sur les pro-grammes d’évangélisation que nousn’avons pas pris le temps de comprendrele contexte dans lequel ils prenaientplace. Au lieu de cela, nous avons en-trepris de courtes sorties en ville pouressayer de persuader les gens de devenir

des adventistes du septième jour, etnous avons souvent négligé le soinsocial et l’histoire de l’agglomération.

Mais l’évangélisation ne se produitpas dans une bulle isolée; elle s’opèredans des contextes sociaux concrets etdes populations ayant leurs propreshistoires et cultures. Comme l’écrivitl’éducateur Paulo Freire il y a près de50 ans,: « J’imagine que l’un des prin-cipaux objectifs que nous, chrétiens,devrions avoir […] est de nous débar-

rasser de tout rêve illusoire d’essayerde changer l’homme [sic] sans toucherle monde dans lequel il vit » 3. Inviterles gens à suivre Jésus n’est qu’un élé-ment d’un ministère holistique qui com-prend également de nous mêler à eux,de leur témoigner de la sympathie, deles soulager et de gagner leur confiance4.Selon notre expérience avec les centresurbains d’influence et les projets d’im-plantation d’Églises urbaines organiséspar la Mission mondiale, nous avonsdécouvert que ce genre d’impact ne seproduit pas du jour au lendemain. Celaprend du temps. Cela demande un en-

Une attitude d’humilité nousamènera à prendre le temps

d’écouter la populationelle­même – les résidents,

les dirigeants et lesorganisations sociales.

gagement. Nous devons nous assurerque la mélodie de l’Évangile ne touchepas seulement les oreilles des gens,mais aussi leur vie.

Il se peut que Lee exagère un peuson point de vue, mais il soulève plusieurspréoccupations légitimes concernant lamission urbaine. Il est vital de consulter,d’écouter et d’apprendre de ceux quihabitent déjà dans la ville et y sont en-gagés par des organisations, religieusesou non. Une nouvelle mission chrétienne

authentique dans une ville ne peut pasêtre conçue à distance, planifiée dansune salle de comité d’une dénominationéloignée, ou votée par un comité d’Égliseisolé. Cette mission doit soit provenir dela communauté urbaine existante, soitêtre façonnée par elle. Elle doit êtreabordée avec un esprit d’humilité. Cetesprit d’humilité empêchera toute ten-tative d’apporter à la mission urbaineun produit extérieur préemballé. Une at-titude d’humilité nous amènera à prendrele temps d’écouter la population elle-même – les résidents, les dirigeants etles organisations sociales.

Lorsque l’apôtre Paul exerça son mi-nistère à Athènes, il commença par mar-cher dans la ville et visiter les sites, enparticulier les objets de culte des Athé-niens. En fait, on nous dit qu’il les «exa-mina» (Ac 17.23, SG21). À un certainniveau, comme n’importe quel touriste,il était probablement intéressé à voirl’essentiel de la culture grecque déployéeau centre de la civilisation grecque. Maisil cherchait surtout à mieux comprendrel’environnement. Un objet de culte, la

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Gary KRAUSE

statue au dieu inconnu, attira son atten-tion d’une manière particulière. Il l’utilisaensuite comme fondement de la pré-sentation qu’il fit plus tard à l’Aréopagesur la colline de Mars. Dans ce discours,la statue en l’honneur du dieu inconnudevint l’élément connecteur entre laculture grecque et le seul vrai Dieu.

Comme Paul, nous devons aussi pren-dre du temps dans nos villes pour ob-server, écouter et apprendre. Nous devonsmarcher dans les rues, côtoyer les gensdans les allées des supermarchés etparticiper aux événements locaux. Nousdevons étudier les journaux et sites In-ternet locaux, regarder les tableaux d’af-fichage, entamer des conversations auxarrêts de bus, découvrir à quoi les genspassent leur temps. Qu’est-ce qui pourraitcauser de l’angoisse et de la douleur ànos voisins des villes? Qu’est-ce quileur apporte de la joie ? Qu’est-ce qu’ils«adorent »? Ils ne sont peut-être pas of-ficiellement religieux, mais tout le mondeadore quelque chose.

Compassion dans la sociétéEn 2010, les dirigeants de l’Église

adventiste du septième jour du centrede Mexico, une des plus grandes villesdu monde, ont implanté une Église dansle centre historique de la ville. Ils ontloué un local pour l’utiliser comme lieude culte et comme centre d’aide maté-rielle et spirituelle pour les nécessiteux.Quelques années plus tard, ils ont étéinspirés à en faire davantage. Ils ontacheté le local et sont devenus plus in-tentionnels dans leurs efforts pour com-prendre leur communauté. Ils ont faitdes sondages dans le territoire environ-nant le centre, ils ont prié et étudié. Ilsvoulaient être sûrs que leur ministèreserait approprié et pertinent pour la po-pulation. Après avoir observé, écouté etappris, ils ont décidé de se concentrersur quatre groupes démographiques

près du centre : les travailleuses du sexe,les enfants sans abris, les criminels etles adultes indigents. Aujourd’hui, ce mi-nistère grandit, il est intégré dans la so-ciété et il répond à des besoins réels dela population 5.

Lorsque deux jeunes pionnières, Maeliet Shouling, sont parties dans une villeà l’Est de la Chine pour implanter unnouveau groupe de croyants, elles ontcommencé par visiter les foyers du voi-sinage. En allant de porte en porte,elles ont eu la surprise de découvrirque de nombreuses maisons étaienthabitées par des filles adolescentesseules. Elles faisaient partie des enfantsdits « abandonnés », laissés à la maisonpour se débrouiller tout seuls tandisque leurs parents partaient loin pourchercher du travail.

Naturellement, de tels arrangementsrendaient ces jeunes filles vulnérablesaux abus et à l’exploitation. En parlantavec ces adolescentes, Maeli et Shoulingont eu une vision plus nette, et l’objetde leur ministère est devenu clair. Ellesont commencé à prendre soin de cesjeunes filles d’une manière pratique enles aidant à faire la lessive ou la cuisine.Elles les ont invitées dans leur propredemeure où elles ont chanté et partagédes histoires de la Bible.

Par la suite, elles ont eu des momentsde prière lorsque les filles avaient finileurs devoirs. Elles ont établi égalementdes contacts avec leurs parents lorsqu’ilsvenaient en visite. Chaque semaine, cesdeux jeunes femmes donnaient enmoyenne 15 études bibliques. Si vousaviez demandé à Maeli et Shouling quelétait leur plan d’évangélisation pour cettenouvelle ville, elles vous auraient proba-blement répondu: «Nous visiterons lesfoyers et nous partagerons de la littéra-ture», ou quelque chose dans ce sens.Mais lorsqu’elles ont examiné et étudiéla situation, et qu’elles ont commencé àmieux comprendre la population, ellesont adapté leur ministère aux besoins 6.

Sans attenteLa compassion de Jésus était toujours

déployée sans rien attendre en retour.Il voyageait dans les villes et les villages,guérissait les malades et répandait labonne nouvelle, enseignant aux habitantscomment ils pouvaient faire partie deson royaume. Lorsque Matthieu écritque Jésus avait compassion des foules,il utilise le mot grec splagchnizomai,qui ne désigne ni un sentiment superfi-ciel, ni un clin d’œil métaphorique versla miséricorde (Mat 9.36). Il dénotepresque une réaction physique, un sen-timent profond dans le corps dequelqu’un. Amanda Miller dit que cemot grec veut littéralement dire : « émudans les entrailles »7 et Daniël Louw yfait référence comme étant « une théo-logie des intestins »8.

Le thème de la compassion dominel’histoire de Jonas, que Dieu appela àune mission urbaine à Ninive. Ironique-ment, les marins païens de l’histoiredémontrent davantage de compassionpour le prophète juif qu’il n’en montrelui-même pour les païens de Ninive(Jonas 1.12-14). Dans une tournureencore plus ironique, Jonas est davan-tage vexé par la mort d’une plante quil’abritait du soleil, que par la mort éven-tuelle de milliers de personnes dans laville (Jonas 4.7-10).

Le point culminant de l’histoire et sapartie la plus importante est le verset fi-nal du livre, où Dieu pose à Jonas unequestion rhétorique : «Et moi, je n’auraispas pitié de Ninive, la grande ville ? »(Jon 4.11, NSB). Le mot hébreu traduitici par « pitié », achus, veut aussi dire«compassion». Ce terme est utilisé avecune pleine ironie car, quelques versetsplus tôt, Jonas avait ressenti de l’achusenvers la plante desséchée. Alors ici, auverset 11, la traduction devrait proba-blement être : « Je n’aurais pas encoreplus pitié de Ninive, la grande ville?» Lacompassion de Dieu est si grande

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COMPRÉHENSION ET COMPASSION : UNE RECETTE POUR LA MISSION URBAINE

qu’elle déconcerte et menace l’un deses prophètes (Jonas 4.1-3).

La compassion était un attribut notabledans la vie des premiers chrétiens, dontla plupart vivaient en zones urbaines.Selon Susan Wessel, faire preuve decompassion, réellement ressentir la souf-france de quelqu’un d’autre, a ses ori-gines chez les premiers chrétiens 9. Lesociologue Rodney Stark décrit commentun ministère rempli de compassion aalimenté la croissance de l’Église pri-mitive : « Le christianisme a servi demouvement de revitalisation qui a surgien réponse à la misère, au chaos, à lacrainte et à la brutalité de la vie dans lamonde urbain gréco-romain»10. Il ajouteque les doctrines du christianisme «ontincité et soutenu des relations et orga-nisations sociales attrayantes, libératriceset efficaces»11.

Pendant les temps de peste et de ma-ladie, les prêtres païens fuyaient les villestandis que les chrétiens restaient pouraider les malades et les souffrants. Dansun passage souvent cité, Tertullien dit :«Ce sont les soins que nous apportonsà ceux qui sont sans défense et notrepratique d’une bonté aimante qui nousdistinguent aux yeux d’un bon nombrede nos adversaires. “Regardez seulement,disent-ils, regardez comme ils s’aimentles uns les autres !”(Apology 39, 1989ed 12.)» L’empereur Julien a écrit : «Lesimpies Galiléens soutiennent non-seu-lement leurs pauvres, mais les nôtreségalement. Tous peuvent voir que notrepeuple manque d’aide de notre part »13.

Un nouveau paradigmeLa compassion de Jésus doit être au

cœur de la mission urbaine si nousvoulons qu’elle ait un sens. Cela veut

dire que l’attention que nous portonsaux priorités devrait être recentrée etréalignée, non seulement en termesgéographiques, vers les villes, mais aussien termes de motivation. Historiquement,par exemple, le « succès » adventistedans les efforts missionnaires a largementété mesuré par le nombre de baptêmeset d’adhésion de nouveaux membres.Ces chiffres sont régulièrement célébrésdans les rapports officiels de l’Église eten première page de nos magazines.

Une mission poussée par la compas-sion mesurera également son succèsen termes de fidélité, d’intégrité et decompassion sans rien attendre en retour.Les villes ne devraient pas être vuescomme des projets missionnaires maiscomme des endroits remplis d’humainsà qui nous devrions exprimer notre com-passion comme Jésus le faisait. Commenous le rappelle l’histoire de Jonas, lespréoccupations de l’Église devraientaller au-delà de la communauté de foiet s’étendre à ceux qui sont différentspar leurs visions du monde, leurs cultures,leurs croyances et leurs lieux de rési-dence, y compris les villes.

Alors que l’Église adventiste avancedans le XXI e siècle, nous devons intégrerdans notre mission urbaine l’exemplede Jésus et de son ministère axé sur lacompassion. Son exemple démontreque le ministère urbain ne peut êtreexécuté ni à partir d’une enclave reli-gieuse séparée, ni à court terme en selimitant à un contact passager. Cettemission implique de côtoyer les gens,de toucher leurs mains et de les regarderdans les yeux avec compassion (Mt 9.36). Il ne suffit pas simplementde parler aux gens de la vérité de laParole de Dieu, mais de leur montrer lavérité de cette Parole.

Les parcs seront plus propres, les en-fants seront mieux éduqués, les affamésseront nourris, les pauvres seront moinsexploités, les personnes âgées serontmoins seules, et ceux qui sont en re-cherche spirituelle seront satisfaits carles chrétiens qui comprennent la villepartagent la compassion de Jésus dansla ville. C’est cette mélodie qui fera sonchemin au-delà des oreilles des citadins,jusque dans leur cœur.

1. Pour l’histoire complète, voir Gene Weingarten, “PearlsBefore Breakfast: Can One of the Nation’s Great MusiciansCut Through the Fog of a D.C. Rush Hour? Let’s Find Out,” inWashington Post Magazine, 8 avril 2007.2. «Tu vas venir t’asseoir aux pieds d’anciens noirs, sud-américains et asiatiques. Tu ne diras pas un mot. Tu resterascomme cela pendant des années, jusqu’à ce que cesanciens te disent que tu es prêt.» Nate Lee, “HillsongChurch: Do Not Colonize San Francisco,” natejlee.com(blog), 1er mars 2016, natejlee.com/hillsong-church-do-not-colonize-san-francisco.3. James D. Kirylo and Boyd Drick, Paulo Freire: His Faith,Spirituality, and Theology. Rotterdam, The Netherlands: SensePublishers, 2017, p. 83.4. Ellen G. White: Le Ministère de la guérison. MountainView, CA: Pacific Press, 1977, p. 118.5. Bettina Krause, ed.: It’s Time: Voices From the Front Linesof Urban Mission. Silver Spring, MD: General Conference ofSeventh-day Adventists, 2015, p. 90, 91.6. Krause: It’s Time, p. 87, 88.7. Amanda C. Miller, “Good Sinners and Exemplary Heretics:The Sociopolitical Implications of Love and Acceptance inthe Gospel of Luke,” in Review and Expositor 112–3 (2015),p. 465.8. Daniël Louw, “Compassion Fatigue: Spiritual Exhaustionand the Cost of Caring in the Pastoral Ministry. Towards a‘Pastoral Diagnosis’ in Caregiving,” HTS TeologieseStudies/Theological Studies 71–2 (2015), p. 8,doi.org/10.4102/hts.v71i2.3032.9. Susan Wessel: Passion and Compassion in Early Christianity.Cambridge, UK: Cambridge University Press, 2016, p. 1, 2,24.10. Rodney Stark: The Rise of Christianity: A Sociologist Re-considers History. Princeton, NJ: Princeton University Press,1996, p. 161.11. Idem, p. 211.12. Idem, p. 87.13. Idem, p.84.

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comprendre comment témoigner enmilieu urbain dans le contexte de l’espritpostmoderne.

Les valeurs divines au lieudu plaisir humain

La mission urbaine, en particulierparmi les citadins postmodernes non-religieux, présente un défi pour les chré-tiens à cause de nos visions différentesdu monde. Charles Taylor a écrit : «Notreépoque a vu plusieurs courants fortsque l’on pourrait appeler des antihu-manismes non-religieux, et qui portentdifférents noms aujourd’hui, comme“ la déconstruction ” et “ le post-structu-ralisme ”. Ces courants sont enracinésdans des écrits extrêmement influentsdu XIX e siècle, particulièrement ceuxde Nietzsche1 ».

Taylor souligne que même l’huma-nisme non-religieux est en train dechanger et dépasse le seul « épanouis-sement humain »2 dans son aspirationvers quelque chose de plus grand etde plus satisfaisant qu’un simple bon-heur dans cette vie. Selon la pensée deTaylor, au-delà de cet épanouissementse trouve la plénitude qui s’installequand une personne se tient dans laprésence de Dieu et fait l’expérienced’une conversion de valeurs 3. Serait-ilpossible que ce désir de vivre pour lagloire de Dieu, même dans cette vie,soit la tête de pont de la mission chré-tienne ?

L’authenticité au lieude la contingenceTémoigner auprès des postmodernes

implique d’abord une compréhensionde leur vision du monde. Si nous neprenons pas le temps de nous rappro-cher, et finalement de saisir commentils pensent, ce qu’ils croient et pourquoiils fonctionnent d’une telle manière, larelation pourrait échouer.

L’amour authentique, impliquant desrelations chaleureuses, sans rien attendreen retour, est une façon de surmonterce qui est considéré comme le «soupçonherméneutique » 4. J’ai vu des signesque mes amis postmodernes non-reli-gieux, bien que vivant leur vie encontraste avec les Écritures, cherchaientà s’orienter. Au bout d’un certain temps,ils m’ont trouvé crédible, non pas àcause de mon statut de pasteur, maisparce que, en tant que chrétien, je mesouciais d’eux. L’un d’eux a dit : «Vous,les chrétiens protestants, vous avezquelque chose de spécial, un genred’amour différent ». Pour eux, un vrairesponsable est quelqu’un qui fait dubien aux autres, même au prix d’un sa-crifice personnel.

Montrer au lieu de direDans la pensée postmoderne, la vérité

est relative. Zane Yi indique que « plutôtqu’un déni de la vérité, un postmoder-nisme bien compris nie la capacité hu-maine d’appréhender la vérité et de la

J ’ai rencontré un jeune hommeroumain, Cosmin, qui avait unbon emploi en tant qu’avocat

dans une belle ville. Bien que de familleorthodoxe, sa vision du monde était im-bibée de postmodernisme. Il nourrissaitson âme de la littérature de philosophestels qu’Emmanuel Kant, Georg WilhelmFriedrich Hegel, Platon, Arthur Schopen-hauer, Friedrich Nietzsche, et Søren Kier-kegaard. Alors que je partageais aveclui mon expérience de chrétien, il étaitévident qu’il avait soif de trouver unsens à sa propre vie. Cette soif l’a incitéà entreprendre une étude de la Bible.

Un jour, il m’a dit : «Vous savez quoi ?La nuit passée, je n’arrivais pas à dormir.À deux heures du matin, j’ai ouvert monordinateur et j’ai regardé un débat trèsintéressant sur votre chaîne de télévision,Hope Channel. C’était exceptionnel ».

Curieux, j’ai demandé le titre del’émission et j’ai réalisé que c’était undébat concernant le sujet de l’École dusabbat de cette semaine-là. J’étaissurpris de voir à quel point il était inté-ressé par les choses spirituelles. J’avaiscapté son intérêt avec de simples ex-périences de foi et des discussions surle sens de la vie.

En réfléchissant à cela, j’ai comprisque témoigner pour Christ auprès desgens implique de construire des pontsavec créativité selon leurs besoins etleur état d’esprit. Ma rencontre avecCosmin a suscité en moi le désir de

Relations efficacesavec les postmodernesdans la mission urbaine

Bogdan PLATON, MA, est actuellement doctorant en missiologie àl’université Andrews, Berrien Springs, Michigan, États­Unis.

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avec Dieu, et ils peuvent se sentir excluslorsqu’ils ne trouvent pas cela 9. La so-lution à ce besoin est une communautéchaleureuse qui n’est pas enferméedans des règles ou une hiérarchie inap-propriée, mais qui fonctionne de manièrenaturelle.

L’incarnation au lieude l’isolationJésus a clairement déclaré que l’Église

« ne peut être cachée » (Mt 5.14-16,NBS), elle doit répandre sa lumière.Même le monachisme chrétien, à sonorigine, a débuté comme un mouvementde service auprès des gens dans leurvie quotidienne. C’est l’exemple duChrist incarné : être parmi les gens, de-meurer avec eux et comprendre leursbesoins, non pas pour un court momentmais pendant toute sa vie sur la terre.Kleber Gonçalves déclare, en parlantde l’Église primitive, que son œuvreétait « contextuelle » 10, étant immergéedans la culture de son temps et déve-loppait une mission en fonction descirconstances présentes.

Dans le monde d’aujourd’hui, l’Églisedevrait comprendre les gens, les endroits,et les visions du monde qu’elle a l’in-tention de changer. Stanley Pattersonsuggère que «nous devons adopter uneapproche de l’incarnation qui recadrela Parole en un langage maximisant lapossibilité de créer un engagement et

un lien cohérents avec les plateformessur lesquelles la culture est établie. Ceque Jésus a fait pour nous, nous devonsle faire pour eux» 11. L’Église missionnaireest appelée à être là où sont les gens,à comprendre ce dont ils ont besoin, etrépondre à ces besoins.

En formant les dirigeants locaux autémoignage, nous pourrons développerun réseau social qui multipliera sesramifications. Ces dirigeants prendrontà leur tour la relève des responsabilités,créant ainsi des cellules missionnairesautonomes. Le développement d’untel réseau exige que l’Église se plongedans la culture et la vision du mondepostmoderne. Elle doit le faire enconservant l’aspect unique du messagede l’Évangile mais en le présentantd’une manière novatrice, créative etpertinente.

Des histoires au lieude déclarationsJohn Caputo écrit que « la décons-

truction du christianisme n’est pas uneattaque envers l’Église mais une critiquedes idoles auxquelles elle est vulnéra-ble » 12. Jean François Lyotard affirmeque « l’incrédulité envers les métaré-cits » 13 est, en général, l’essence dupostmodernisme, et que l’un des élé-ments placés sous la loupe du décons-tructivisme postmoderne est le métarécitchrétien. En tant que critiques, les pen-

contrôler parfaitement ou pleinement 5.»Ainsi, Gary Krause déclare : « Il ne suffitpas simplement de parler aux gens dela vérité de la Parole de Dieu, mais deleur montrer la vérité de cette Parole 6.»

Tout comme les êtres humains nepeuvent pas entièrement comprendrela vérité de Dieu, de même le mission-naire doit admettre qu’il ne peut passaisir entièrement tous les angles duplan divin. Un tel aveu peut devenir unmoyen d’engager l’esprit postmoderne,non pas avec autoritarisme, mais avecl’objectif de la communion fraternelletrouvée dans la recherche collective dela vérité, suivie par la joie de la décou-verte. Avec un tel échange, on passealors d’une approche intellectuelle àune approche expérimentale dans la-quelle l’expérience commune devientle point central d’une relation triangulaire:deux êtres humains, un Dieu.

La communauté au lieude la hiérarchieDans 1 Corinthiens 12.27, l’apôtre

Paul envisage un corps, une commu-nauté comme « le lieu de l’activité duChrist » 7 pas seulement celui de l’inter-action humaine. Skip Bell écrit : «puisqueDieu est un Dieu relationnel qui favorisela communauté, la présence de Dieuest destinée aux villes » 8. Les citadinssont attirés vers les endroits où des re-lations chaleureuses sont créées. Ils re-cherchent également des réseaux degens ayant des valeurs, des loisirs, desintérêts ou des croyances semblables.Créer un tel groupe, ou en pénétrer unqui existe déjà, peut ne pas être unetâche facile mais, après un certaintemps, une confiance commune s’établitet devient la plateforme de discussionset d’activités ouvertes.

Pour les postmodernes, il est importantde trouver un lieu où ils se sentent ac-ceptés, un deuxième foyer. Ils recherchentune proximité à la fois horizontale etverticale, avec d’autres personnes et

Pour les postmodernes,il est important de trouverun lieu où ils se sententacceptés, un deuxième foyer.

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Bogdan PLATON RELATIONS EFFICACES AVEC LES POSTMODERNES ...

qui échappe à la fois aux embuchesd’un discours méta-narratif et au piègerelativiste/subjectiviste de la narrationpostmoderne. En effet, le récit bibliques’inscrit davantage sous la rubrique dela narration que celle d’un métarécit » 17.Ceci présente une nouvelle perspective,étrange d’un point de vue moderne,mais pertinente. De nombreux passageslégaux, prophétiques et poétiques dela Bible sont liés à des histoires ou dé-veloppés dans un contexte narratif. Ri-chard Sessoms présente une stratégiede communication : « cet auditoire post-moderne réagit souvent de manière né-gative à des présentations logiques etabstraites. Les postmodernes ont ten-dance à se méfier de la « vérité » expri-mée de manière propositionnelle commedogmatique et conflictuelle […]. Ra-conter une histoire évitera souvent cettedifficulté, car lorsque la Vérité est intégréeà une histoire, les auditeurs ont tendanceà faire le lien avec leurs propres histoiresà la lumière de l’histoire divine »18. Leshistoires peuvent être utilisées dans lamotivation morale, la formation des di-rigeants, la formation au témoignage,et elles touchent toutes les catégoriesd’âge.

Les prétendues barrières à la missionchrétienne peuvent, si nous sommesouverts, apporter de nouvelles occasionsde témoigner auprès de nos contem-porains, tels que Cosmin, mon amicitadin postmoderne. Cependant, pourvoir ces défis comme des opportunités,il nous faut une vision et une motivationnouvelles pour sonder la Parole de Dieuafin de trouver les méthodes pour pré-senter l’Évangile par des relations effi-

caces adaptées au contexte du post-modernisme non-religieux qui est proéminant dans les milieux urbains.

1. Charles Taylor, A Secular Age. Cambridge, MA: BelknapPress, 2007, p. 19.2. Taylor, A Secular Age, p. 20.3. Stephen J. Costello, “Beyond Flourishing: ‘Fullness’ and‘Conversion’ in Taylor and Lonergan,” in The Taylor Effect:Responding to a Secular Age, ed. Ian Leask. Newcastleupon Tyne: Cambridge Scholars Publishing, 2010, p. 39–48.4. N. T. Wright, Creation, Power and Truth: The Gospel in aWorld of Cultural Confusion. London: SPCK, 2013, p. 68.5. Zane Yi, “Through a Glass Darkly: Speaking of Truth inPost-Modern Times,” in Narrative, Meaning, and Truth: Fulfillingthe Mission in Relativistic Contexts, ed. Kleber D. Gonçalvesand Bruce L. Bauer. Global Mission Centers, General Confe-rence of Seventh-day Adventists, 2017, p. 111.6. Gary Krause, “Seeking the Shalom: Wholistic AdventistUrban Mission and Centers of Influence,” in Journal ofAdventist Mission Studies 10–2 (2014) p. 50.7. James Emery White, Meet Generation Z: Understandingand Reaching the New Post-Christian World. Grand Rapids,MI: Baker Books, 2017, p. 72.8. Skip Bell, “Christ in the City: A Brief Theology,” in Journalof Adventist Mission Studies 10–2 (2014), p. 102.9. Kleber de Oliveira Gonçalves, “A Critique of the UrbanMission of the Church in the Light of an Emerging PostmodernCondition” (Thèse de doctorat, Andrews University, 2005), p.226.10. Kleber D. Gonçalves, “Missional Models of a Church forPostmoderns in Urban Contexts,” in Journal of AdventistMission Studies 10–2 (2014), p. 87.11. Stanley E. Patterson, “Framing the Gospel for theRelational Context of Postmodernism,” in Narrative, Meaning,and Truth, p. 43.12. John D. Caputo, What Would Jesus Deconstruct? TheGood News of Postmodernism for the Church. Grand Rapids,MI: Baker Academic, 2007, p. 137.13. Jean-François Lyotard, The Postmodern Condition: AReport on Knowledge. Minneapolis, MN: University ofMinnesota Press, 1984, p. xxiv.14. Millard J. Erickson, The Postmodern World: Discerningthe Times and the Spirit of Our Age. Wheaton, IL: CrosswayBooks, 2002, p. 103.15. Wright, Creation, Power and Truth, p. 66.16. Curtis Chang, Engaging Unbelief: A Captivating Strategyfrom Augustine and Aquinas. Downers Grove, IL: InterVarsity,2001, p. 26.17. Abigail Doukhan, “Christianity for Postmoderns: FromMetanarrative to Storytelling,” in Narrative, Meaning, andTruth, p. 37.18. Richard W. Sessoms, Leading With Story: CultivatingChrist-Centered Leaders in a Storycentric Generation. Pasa-dena, CA: William Carey Library, 2016, p. 43.

seurs chrétiens défendent (à juste titre)que le déconstructionnisme enseignépar Jacques Derrida et par le postmo-dernisme constitue lui-même un méta-récit 14. En tous les cas, le rôle de lamission chrétienne n’est pas tant d’ap-poser la bonne étiquette au postmo-dernisme, mais de trouver des façonsde transmettre le message de l’Évangiledans ce contexte.

De nombreux penseurs chrétiens pré-tendent qu’ « une fois que la vérité estdémantelée, il est impossible pour qui-conque de prêcher la vérité avec puis-sance » 15. En dépit de cela, la Biblenous dit ceci au sujet de Dieu : « Dansles générations passées, il a permis àtoutes les nations de suivre leurs propresvoies, quoiqu’il ne se soit pas laissésans témoignage » (Actes 14.16-17,NBS). En d’autres termes, ces versetsmontrent que les barrières du relativisme,du pluralisme et du déconstructivismene sont pas infranchissables.

En parlant du verset biblique qui ditque nous devons nous emparer « detoute pensée pour l’amener, captive, àl’obéissance du Christ » (2 Co 10.5,NBS), Curtis Chang défend qu’une bonnestratégie est de premièrement entrerdans l’histoire de l’autre; ensuite, de re-dire cette histoire; et finalement, de join-dre cette histoire à celle de Dieu 16.Chang souligne que le missionnairechrétien devrait concentrer ses effortssur la compréhension de l’histoire post-moderne avant de présenter son proprepoint de vue.

Abigail Doukhan considère le fait que« nous trouvons, dans le métarécit bi-blique, une clé vers un mode de narration

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Les gens invisibles

Timothy P. NIXON, DMin, est pasteur adventiste du septième jour, dansla Fédération de la Région des Lacs, Mokena, Illinois, États­Unis.

E n été 2013, j’ai mené une cam-pagne d’évangélisation dans lecadre du projet New York’ 13,

spécialement organisé pour la ville deNew York. Pour moi, il s’agissait d’un re-tour à la maison puisque je suis originairede New York. En voiture, j’ai pris letunnel Holland vers le sud de Manhattanet ensuite je suis passé sur le pont deManhattan pour atteindre le centre-villede Brooklyn. J’étais rempli d’excitationet d’anticipation. J’ai décidé de faireun tour pour me replonger dans maville natale. En parcourant les rues deWilliamsburg dans le centre-ville deBrooklyn, chaque pâté de maisons queje franchissais m’étonnait de plus enplus : les édifices avaient été amélioréset les habitants avaient déménagé.« Mais où pouvait bien avoir déménagétoute la population noire? Je me posaisla question. Étaient-ils encore présentsmais devenus invisibles ? »

Pas du tout. Ils n’étaient pas devenusinvisibles. Mais, d’une certaine manière,ils l’étaient probablement d’une manièremétaphorique. La raison de leur totaleabsence dans cette zone de Brooklynoù, auparavant ils étaient nombreux,était leur résidentialisation. « La rési-dentialisation est le processus de réno-vation et d’amélioration d’un bâtimentou d’un quartier afin qu’il correspondeau goût des gens de classe moyenne»1.Le centre-ville de Brooklyn avait effecti-vement été transformé. Les rues étaientpropres et avaient été dotées de pistescyclables. Il y avait des terrasses decafés. Les terrains de basket et dehockey avaient été déplacés du centre-ville, et plusieurs autres édifices avaientété rénovés et/ou complètement re-construits. La transformation était épous-touflante. Tout avait changé, y comprisles habitants.

Cela me semblait quelque peu im-moral que, après toutes ces années,

alors que la ville avait finalement décidéd’investir des milliards de dollars pourtransformer le centre-ville, ceux qui yavaient passé la majeure partie de leurvie ne pouvaient bénéficier de ces in-vestissements. Le même immeuble mi-toyen de grès rouge, auparavant déla-brée, était maintenant retapé pour denouveaux habitants. C’est comme s’ils’agissait d’une action de Robin desBois, mais à l’envers. Les pauvres sontdépossédés de leurs biens et déplacéspour que les riches en bénéficient. Et,une fois la zone abandonnée par sespremiers occupants, elle se trouve main-tenant très animée par les activités, lesdivertissements, les opportunités et l’ex-citation.2

Tandis que nous pensons à l’Égliseet à son ministère au sein des agglo-mérations urbaines du monde où la ré-sidentialisation est une stratégie éco-nomique en pleine croissance, quelleest notre réaction ? Peter Moskowitzsoutient que la résidentialisation apporte« des changements, des prestations deservices de base pour la ville, en parti-culier dans son système éducatif, etaux situations désavantageuses des fa-milles les plus modestes » 3. Dans lecas de la Nouvelle Orléans, après lesinondations dévastatrices de Katrina, laville « a démantelé le syndicat des en-seignants, qui avait aidé à constituerune partie de la classe moyenne de lapopulation noire de la NouvelleOrléans ».4 Est-ce que l’Église à la res-ponsabilité de parler pour ceux qui ontété délocalisés et négligés par leurpropre société ?

Dieu s’est toujours placé lui-mêmedu côté de ceux qui ont été rendus invi-sibles par les injustices des structuressociales. Le psalmiste écrit : « Je saisque le Seigneur rend justice aux pauvreset qu'il défend le droit des déshérités »(Ps 140.13, NBS). Ron Sider consacre

environ deux cents pages aux passagesbibliques qui expriment l’amour de Dieuainsi que son engagement pour lespauvres.5

Jésus a orienté son ministère versles personnes invisibles de la société.Lorsqu’il a expliqué son ministère à Na-zareth, il a affirmé son engagement en-vers les opprimés, annoncé par Dieu lePère (Luc 4.18, NSB). Il s’est concentrésur les opprimés et sur les oubliés dela société. Il s’est identifié aux souffrancesdes marginalisés et des privés de droit.En tant que disciples du Christ, les chré-tiens doivent se joindre à lui afin de re-présenter ceux qui ne peuvent pas s’ex-primer eux-mêmes. James Cone écrit,« Compte tenu de l’importance bibliquede l’émancipation, il ne semble passeulement approprié maisbien nécessaire dedéfinir la commu-nauté chrétiennecomme une com-munauté… c’est-à-dire, une commu-nauté qui se jointà Jésus-Christ danssa lutte pourl’émancipation del’humanité » 6.

Pour que la grainede l’Évangile

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faut-il l’arrivée de newyorkais blancs dans le Sud du Bronx,à Harlem, à Bed Stuy, à Crown Heights pour que les équipe-ments s’améliorent ? » dans Richard Florida, « The ComplicatedLink Between Gentrification and Displacement, » Citylab, 8sept. 2015, citylab.com/equity/ 2015/09/the-complicated-link-betweengentrification-and-displacement/404161/.3. Peter Moskowitz, How to Kill a City: Gentrification, Inequality,and the Fight for the Neighborhood. New York, NY: NationBooks, 2017.4. Gillian B. White, « The Steady Destruction of America’sCities, » The Atlantic, 9 mars2017, theatlantic.com/business/archive/2017/03/gentrificationmoskowitz/519057/.5. Ronald J. Sider, Cry Justice : The Bible Speaks on Hungerand Poverty. Downers Grove, IL: InterVarsity, 1980.6. James Cone, A Black Theology of Liberation. Maryknoll,NY: Orbis Books, 2010), p.3.

lades. Je ne suis pas venu appeler desjustes, mais des pécheurs (Marc 2.19,NSB). Le ministère en milieu urbainnous invite à faire face aux puissantesstructures de la société et à prendreposition pour ceux qui sont sans voix,avec ceux qui sont impuissants, les per-sonnes invisibles.

1. « Gentrification and It’s Effect in Housing, » NewsChannel5Network, le 29 mars 2018, www.newschannel5.com/plus/openline/gentrificationand-its-effect-on-housing.2. Spike Lee, a posé la question devenue célèbre : « Pourquoi

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éternel prenne racine dans les grandscentres urbains, l’Église ne peut pasfaire preuve de relâchement face auxproblèmes d’inégalités, de pauvreté,d’injustice, et d’oppressions écono-miques. Après tout, n’est-ce pas ce quele ministère de Jésus avait pour missionde faire? Lorsqu’on lui a demandé pour-quoi il passait tant de temps avec lesrejetés et les pauvres, Jésus a répondu :« Ce ne sont pas les biens portants quiont besoin de médecin, mais les ma-

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L a vie inflige constamment desblessures que l’esprit conserveau fil du temps. Bien que les

gens puissent accepter ou nier la réalitéde telles blessures, beaucoup choisissentcette dernière option, laissant rarementla lumière de l’honnêteté et de la trans-parence entrer dans leurs lieux sombreset morbides. Cependant, libérer les émo-tions qui nous ont détruits peut justementêtre ce qui nous guérira.

«J’ai cherché à commencer non paspar des formules toutes faites contenuesdans des livres, mais par des documentshumains vivants et les conditions socialesréelles dans toute leur complexité » 1.Un samedi soir, il y a environ un an, j'aireçu un appel m’informant qu’on avaitbesoin de moi pour une patiente en finde vie. Comme c'était ma première in-tervention en tant que nouvel aumô-nier-résident en clinique, j'étais pétrifié,confus, anxieux et, surtout, sans mots.En cet instant sacré et douloureux, quepouvais-je apporter à une famille quiétait en train de perdre une femme,une mère, une grand-mère et une «chefde famille »?

Savoir où être Tout ce que je pouvais faire, c’était

être là pour soutenir la famille – pastant par mes paroles, mais surtout parma présence. Lorsque la patiente est fi-nalement décédée, la famille a dit :« Merci beaucoup d’être là, tout simple-ment. Nous nous sommes sentis sereinset réconfortés parce que vous êtes restéavec nous jusqu'à sa mort ».

Ce jour-là, j'ai réalisé quelque chosequi me troublait depuis longtemps. J'aiobservé à maintes reprises, commechez cette patiente athée, un sentiment

de paix dans la conviction que ça y est,la vie est finie. Pourtant, souvent, despatients chrétiens ont lutté contre la finde vie, ne semblant pas être en paix, etm’amenant à les quitter en me sentantperturbé et attristé. J'ai finalement réaliséque c'est un choc de laisser cette vieen se demandant si les membres de lafamille, ou même eux-mêmes, sont vrai-ment sauvés, qui provoque un tel troubleintérieur.

C'est dans ces moments-là que l’au-mônier doit d'abord être convaincu deson propre système de croyances et nepas permettre au choc d’influencer l'ap-pel prophétique de sa vie. Et cela exige,la compréhension encore plus profondeque la vie du patient n'est pas entrenos mains, mais entre celles de Dieu.

« Si nous n’identifions pas et n’abor-dons pas le combat spirituel, la détressecausée par un aspect ou l’autre de noscroyances, de nos pratiques ou de notreexpériences, aura des effets néfastessur notre santé » 2. Ce dont les gens enfin de vie ont besoin, ce n’est pas ceque l’on imagine. Encore et encore, j'aiété tenté de chercher à savoir, d'unemanière ou d'une autre, si leur vie étaiten ordre sur le plan « spirituel » selonma perspective biblique. Il m’a fallu re-connaître que j'essayais de leur apporterce que je croyais bénéfique pour eux àce moment-là. En fait, d’une certainemanière, j’ai par erreur confondu lesalut de leur âme avec mon intervention.

Savoir qui êtreRécemment, j'ai pris conscience que

la plupart des personnes que j'ai ren-contrées à ce stade critique de leur vieont réellement un désir très profond dedécouvrir ce qui entraîne les rouages

internes de leur processus de penséeet de leurs actions. Je pense que RobertCharles Powell présente un argumenttrès valable en suggérant que « l’expé-rience religieuse se produit spontané-ment quand hommes et femmes sontforcés de penser et de ressentir de ma-nière intense ce qui compte le pluspour eux »3.

La révélation et l'expérience sontdonc fondamentales si l'on veut com-prendre son propre développement entant que processus en cours d’élabora-tion. Apprendre à se comprendre estessentiel à l’interprétation psychologiqueet théologique de sa propre histoire.Ceci devient alors le principal outil del’accompagnement pastoral et du sou-tien psychologique.

En fin de compte, ma question de-meure la suivante : comment Dieu semanifeste-t-il dans mon expérience hu-maine ? Comment traduire cela dansma tâche quotidienne d'aumônier enclinique de façon à aider les autres àtrouver le but et le sens de leur vie ?Comment utiliser les occasions d’écouter,de compatir, de m’associer, de partageret de poser des questions pour amenerles individus à vivre ce que l'on peutappeler « le lieu de la guérison » – etqu’on ne peut véritablement trouverque de l’intérieur ?

Pour être utiles à ceux auprès de quinous œuvrons, nous devons d’abordpratiquer les notions ou convictionsque nous promouvons. Comme le disaitma mère : « Mets en pratique ce que tuprêches ». Ainsi, en défendant ce quenous préconisons, nous sommes au-thentiques pour ceux avec qui nous in-teragissons.

Le lieu de guérison

Nigel G. DAVID Sr., MA, est aumônier dans une clinique du centre médicalKaiser Permanente à Vallejo en Californie, États­Unis.

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2. Ne pas juger, mais plutôt chercherà comprendre. Un jour, je passais devantune chambre. Sans avertissement nialerte, j’ai entendu quelque chose medire : « Nigel, va dans cette chambre, ilest en détresse ». Alors, sans planning,je me suis présenté. Le patient a prisma main et l’a serrée très fort. L’hommea alors commencé à me parler de sacrise avec sa femme, en me disant quesa seule joie était sa fille. Mais il voulaitaussi savoir s'il pouvait être incinéré entant que chrétien. Il a expliqué qu'il

avait déjà fait la paix avec Dieu et qu'ilétait prêt à mourir.

L'aumônerie en clinique m'a apprisles dangers de l’association et du contre-transfert. L’association a lieu lorsquenous avons quelque chose en communavec un patient. Nous venons donc enaide par ce lien supposé, à travers ceque nous avons en commun. Le transferta lieu lorsque le patient redirige lessentiments destinés aux autres vers lethérapeute ou l'aumônier, mais uncontre-transfert se produit lorsque leconseiller ou l'aumônier projette in-consciemment ses sentiments sur le

1. Être honnête à propos de quinous sommes. Si nous sommes deshommes ou des femmes de foi, nousdevrions permettre à notre foi de nousdiriger. Cela ne signifie pas que nousdevrions imposer nos convictions à l’au-tre, mais plutôt laisser la compréhensionde nos expériences et de ce que noussommes, être ce que Dieu utilise, le soiauthentique au travail, tout en ayantconfiance que Dieu sait ce que nousdevrions demander et dire, puis permettreque cela se produise. Bien que Dieun'ait pas besoin de nous, il choisit denous utiliser.

ment ? Parfois, nous passons à côtéd’une occasion parce que nous avonsécouté notre propre voix plutôt que lasienne, et nous finissons par tourner enrond et revenir au point de départ pournous rendre compte que c’était cettedirection qu’il voulait que nous prenionsinitialement.

En voyant comment les crises révèlentdes vérités cachées en moi, j'ai prisconscience que c'était peut-être aussice qui se passait avec beaucoup deceux avec qui j'interagissais. C’est pour-quoi j’ai cherché à commencer et àcontinuer d’écouter la voix de Dieu et à

lui faire confiance dans cette démarchepour être un instrument qui a une der-nière occasion de parler à quelqu’unqui est en fin de vie.

Savoir comment êtreQue devrions-nous faire, dire et être,

dans ces moments qui sont vraimenttotalement hors de notre contrôle,lorsqu’il y a une souffrance, une per-plexité et qui aboutit en fin de compteà une perte ? Trois choses viennent àl’esprit :

Notre insuffisance à cet égard, nonseulement nous prive de possibilitésplus vastes et plus profondes dans l’ac-compagnement pastoral à l'hôpital,mais a également affecté nos Églises.Il est vrai que Dieu utilise ceux qu’il ap-pelle malgré leurs défaillances. Dansnotre tâche de leaders spirituels, Dieupeut toujours nous utiliser, malgré nosdésobéissances. Concrètement, il travailleavec nous et malgré nous. Cependant,à quoi ressembleraient nos ministèressi nous nous soumettions à lui entière-

Nigel G. DAVID Sr.

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J'ai finalement réalisé que ce quiprovoque une telle

appréhension intérieure c'estl’angoisse de les voir quitter

cette vie en se demandant si lesmembres de la famille

ou eux­mêmes sont vraiment sauvés.

par une écoute personnelle, cherchantà avoir accès à l'âme » 4.

3. Chercher à découvrir le lieu deguérison. Dans le cadre du travail d'au-mônerie clinique, j'ai appris que ce queles gens semblent désirer le plus, c'estla guérison. Cela ne signifie pas néces-sairement que leur problème soit mira-culeusement supprimé, mais qu'ils soientguéris dans leur esprit, c’est-à-dire enpaix avec tout ce à quoi ils font face. Lelieu de guérison ne se trouve donc pasen dehors de nous-mêmes, mais au

Étant en crise spirituelle, cet hommeavait besoin de pouvoir se rendre comptede la situation où il se trouvait, et duvéritable sens à donner à ce momentde sa vie. C’est ici que la capacité, nonseulement de se voir soi-même, maisaussi d’explorer et d’être confronté aupoint de vue de l’autre, devient plusqu’une simple conversation. Cela im-plique une prise de conscience plusprofonde du patient et de ce qui est dit,compris et finalement évalué. Hilsmandéclare : « Il faudra peut-être beaucoupde pratique pour développer cette ha-bileté, remplaçant l'écoute diagnostique

patient. Les résultats de l’associationet du contre-transfert peuvent produireune confusion émotionnelle chez unpatient, dans laquelle l'aumônier com-mence à fonctionner comme quelqu'unqui s’est trouvé dans la même situationet a fait la même chose : « alors laissez-moi maintenant vous montrer commentest la vie dans ce contexte ». Cela peutdevenir une conversation fondée sur lejugement, qui n’est généralement pasproductive, car elle concerne davantagel’aumônier que le patient.

LE LIEU DE GUÉRISON

plus profond de notre être, et devientune réalité lorsque nous pouvons dire :« Malgré ce que la vie me réserve, monâme est en paix ».

Pour que nous puissions accéder àl’âme, ou devrais-je dire, aux élémentsles plus profonds de l’expérience d’unindividu, nous devons pouvoir établirun lien avec lui. Mais cela demande uninvestissement personnel en temps, enintérêt et en bienveillance et d’offrir, aumoins, un cœur qui sache consoler.Quand les gens sentent que nous noussoucions d’eux, il est étonnant de consta-ter à quel point ils sont prêts à partager.

De toute évidence, mon rôle en tantqu’aumônier en clinique ne consistepas à juger, à moraliser ou à prescriredes remèdes pastoraux, mais à êtreprésent et à donner à ceux auxquelsj’apporte un soutien cette occasion departager leur histoire. Alors que je suisà l’écoute, ils me donnent l’occasionunique d’être invité dans leur monde.C’est un acte de confiance sans retenue,impliquant, en quelque sorte, la per-ception que l’aumônier est relié àquelque chose de spirituel.

En retour, c’est l’occasion, parfoistoute petite, de permettre à Dieu dem’utiliser pour aider cet individu àtrouver un sens et un but à partir deson point de vue. Et, d’une manière oud’une autre, par le biais de notre inter-action, nous découvrons ce qui peutmanquer ou être nécessaire dans sasituation actuelle.

Savoir quand êtreAlors, en quoi Nigel David l'aumônier

diffère-t-il de Nigel David le pasteur ?Nigel David, le pasteur, considère queson rôle primordial est de rendre lesmembres capables d’agir de manièreoptimale, en fonction de leurs dons spi-rituels, pour l’édification du corps deChrist. Il dispose également d'un pro-gramme pour exercer son ministèrecomme berger du troupeau en prêchant,en enseignant et en offrant du soutienpastoral et des conseils

De son côté, Nigel David, l’aumônier,n’entre pas dans la sphère du patientavec une autorité pastorale pour lui an-noncer la bonne nouvelle de l’Évangilesans tenir compte de ses convictionsou de son accord. Au contraire, il écoute,réconforte et pose des questions quipeuvent ouvrir la voie à une quête d'ob-jectif et de signification au milieu de lasouffrance, de la perte, de la perplexitéet de la détresse. Nigel David, l’aumônier,partage également le pouvoir de laprière et la Parole de Dieu, mais seule-

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patient peut être porteur dans cettevie – ou même dans la vie à venir.Cette joie devient, pour le patient etl’aumônier, un lieu de guérison mu-tuelle.

1. Anton T. Boisen, The Exploration of the Inner World: AStudy of Mental Disorder and Religious Experience. Chicago,IL: Willett, Clark & Co., 1937, p. 185. 2. David A. Lichter, “Studies Show Spiritual Care Linked toBetter Health Outcomes,” Health Progress 94, no. 2, Mars-Avril 2013, p. 64. 3. Robert Charles Powell, “Religion in Crisis and Custom:Formation and Transformation—Discovery and Recovery—of Spirit and Soul”. Address, 8th Asia Pacific Congress onPastoral Care and Counseling, People’s Republic of China,Tsuen Wan, The New Territories, the Hong Kong Special Ad-ministrative Region, Août 2005, p. 2, metro.inter.edu/facultad/esthumanisticos/coleccion_anton_boisen/case_study/Religion%20in%20Crisis%20and%20 Custom.pdf. 4. Gordon J. Hilsman, Spiritual Care in Common Terms: HowChaplains Can Effectively Describe the Spiritual Needs ofPatients in Medical Records. London, UK: Jessica Kingsley,2017, p. 253.

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Nigel G. DAVID Sr.

ment sur invitation. Une fois, j’ai reçucette invitation.

Un patient afro-américain de 20 ansavait été victime d'un coup de feu. Bienqu'en soins intensifs, son pronostic vitaln’était pas engagé. Avant d’aller le voir,j'ai étudié son cas et réalisé qu'il avaitune sorte d'affiliation à un gang. Celam'a immédiatement rappelé mon proprepassé d'ancien membre d'un gang etles fois où j’avais frôlé la mort. En mêmetemps, je me souvenais aussi comment,à l'époque, je croyais tout savoir. Jepensais qu'une personne extérieure augang n'avait pas la moindre idée de ceà quoi cela ressemblait et je n’auraisjamais parler à une telle personne. Gar-dant cela à l’esprit, j’ai décidé de nepas intervenir avec des réponses, mais

LE LIEU DE GUÉRISON

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plutôt d’être disposé à écouter et à enapprendre davantage sur son histoireet sur ce que cela signifiait pour lui.

Je suis entré et j'ai vu le jeune homme.Sa mère était présente et m'a saluéchaleureusement. Le patient a souri eta demandé qui j'étais et ce que jefaisais. Après le lui avoir expliqué, voilàqu’environ cinq minutes plus tard, ilm’a demandé si j’avais une idée de lavie d'un gang. C'était une invitation.J'ai partagé mon histoire. Quand j'aieu fini, tout le monde dans la pièceétait en larmes. Le jeune homme a dé-claré : « Si Dieu peut faire cela pourvous, alors je sais qu'il y a de l’espoirpour moi ».

La joie de ce travail est de savoir quel’aumônier sème des graines dont le

Pablo SERVIGNE, Raphaël STEVENS, Gauthier CHAPELLEUNE AUTRE FIN DU MONDE EST POSSIBLE. Vivre l’effondrement (pas seulement y survivre).Paris : Seuil, 2018, 336 pages

C e livre est le dernier publié en français par cestrois scientifiques témoins de l’effondrement.On appelle « collapsologie » leur perception de

la situation de la planète Terre et de l’humanité qui y habite.Pour eux, la situation écologique, énergétique, économique,sociale et politique est telle qu’on y constate des effondre­ments et que d’autres vont suivre. La fin du monde, en toutcas tel qu’il fonctionne, est inéluctable. C’est ce qu’ilsavaient démontré dans un premier livre intitulé Commenttout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usagedes générations présentes. (Paris : Seuil, 2015). Ils rejoignentla pensée de Jean­Pierre Dupuy, ceprofesseur de sciences politiques àl’université Stanford, qui a écritPour un catastrophisme éclairé.Quand l’impossible est certain (Pa­ris : Seuil, 2004) pour qui seule laprise en compte de la réalité d’unecatastrophe permet de mettre enœuvre une prévention. Leur soucidans ce nouvel ouvrage c’est d’in­viter le lecteur à adopter une nou­velle vision du monde, une « collap­

sologie » qui permette de vivre faceaux effondrements présents et à ve­nir.

Le défi que lancent ce genre de li­vres à nous pasteurs adventistes,c’est de saisir l’occasion que nous of­fre ce courant de pensée pour mon­trer la réalité de la catastrophe quela Bible annonce, et, encore mieux,la réalité de la prévention que le Christ offre pour que s’ou­vre le temps nouveau de l’éternité que Dieu a promis.

Bernard Sauvagnat,après échanges et dialogues avec Pierre Péchoux,

pasteur adventiste à Marseille, France.

Livre

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Mon seau se retrouve vide : stress accumulé au sein du ministère

Claudio CONSUEGRA, DMin, et Pamela CONSUEGRA, PhD, sontdirecteurs des ministères de la famille pour la division nord­américaine desÉglises adventistes du septième jour à Columbia, Maryland, États­Unis.

N otre couple partage une tristedistinction : nos deux plusjeunes frères respectifs étaient

policiers et se sont suicidés. Les cir-constances étaient différentes, mais laréalité reste la même : ils ont chacunmis fin à leur propre vie. Le traumatismeassocié à ces tragédies nous a fait com-prendre pourquoi Job pouvait dire : «Pé-risse le jour où je suis né, et la nuit quidit : Un enfant mâle a été conçu ! » (Job3.3). Et la question est de savoir commentles aumôniers et les pasteurs affrontentla souffrance qui frappe autrui tout enfaisant face à la souffrance qui se pré-sente à leur propre porte.

Lorsqu’il était enfant, le frère de Pamelaa été agressé sexuellement par unhomme à l’église. L'abus traumatiquel'a amené à développer une personnalitéperfectionniste, presque maniaco-com-pulsive. S'habillant de façon impeccable,il nettoyait et lavait sa voiture de policetous les jours et gardait sa maison enparfait état. Un jour, alors qu'il en était àson deuxième mariage et menacé defaillite, des travaux routiers ont endom-magé sa maison. Elle était irréparable.Sans rien dire à quiconque dans lafamille et sans laisser de lettre, aprèsque sa femme et son fils aient quitté lamaison tôt le matin, il a retourné sonarme contre lui. Il avait 33 ans.

Quand le petit frère de Claudio avaitsept ans, leur père est décédé subitementd’une crise cardiaque. D’un jour à l’autre,leur monde entier a basculé. Leur mèrea plongé dans les profondeurs du deuil

et, cette année-là, d’un point de vuepratique, ils n’avaient pas de mère. Lefrère de Claudio a vécu la mort de leurpère, l'absence émotionnelle de leurmère et, plus tard, le déménagementaux États-Unis pour commencer unenouvelle vie dans un nouveau pays avecune nouvelle langue, une nouvelle cultureet une nouvelle foi religieuse.

Après le lycée, il s’est joint à l’arméede l’air, s’est marié et a passé 10 annéesmouvementées dans cette relation. Ilest ensuite devenu officier de police, adivorcé puis il a emménagé avec sadeuxième compagne qu’il a épouséeplus tard. Après 12 ans de défis, de dé-couragement et de stress dans le travailde la police, il est devenu recruteur deréservistes pour l’armée de l’air. Or, iln’a jamais été heureux, et après unebrève liaison, des conflits familiaux etune tentative de suicide, il a égalementutilisé une arme à feu pour mettre fin àses jours. Il avait 50 ans.

En regardant la vie de nos deux frères,nous réalisons qu’ils avaient tant dechoses en commun. Chacun s’étaitmarié deux fois, avait eu un divorce etdeux enfants; tous deux avaient dusuccès et étaient appréciés au sein deleurs emplois respectifs ; ils étaient tousles deux chargés de faire appliquer laloi; l’un et l’autre semblaient, dans l’en-semble et vu de l’extérieur, heureux. Enmême temps, ils ont été profondémenttraumatisés et ont souffert presque touteleur vie jusqu'à ce qu'ils prennent l’ultimedécision tragique de mettre fin à leurs

vies avec une arme à feu, une arme quileur était familière.

Ce n’est pas un événement qui les amenés au suicide, mais bien une séried’événements. La plupart d'entre nousseraient probablement en mesure degérer la perte d’un être cher, aussi tra-gique et douloureuse qu’elle soit. Cequi est presque insupportable pour cer-tains, c’est une série de telles pertes.Les Écritures nous donnent, dans la viede Job, l’un des meilleurs exemples destress cumulatif. Dans le premier chapitredu livre qui porte son nom, nous lisonsà propos de sa première grande perte :« Les bœufs labouraient et les ânessespaissaient à côté d'eux ; des Sabéensse sont jetés dessus, ils les ont pris et ilsont passé les serviteurs au fil de l'épée.Je me suis échappé, moi seul, pour tel'annoncer » (Job 1.14, 15).

Comme si cela ne suffisait pas, « ilparlait encore lorsqu'un autre arriva etdit : Le feu de Dieu est tombé du ciel, il abrûlé le petit bétail et les serviteurs etles a dévorés. Je me suis échappé, moiseul, pour te l'annoncer » (verset 16).Par un immense balayage, les Sabéensont détruit une grande partie des revenusde Job. La perte de revenus, d’investis-sements, de biens ou d’épargne a conduitde nombreuses personnes au désespoiret à une dépression profonde. Et si celan’était pas encore assez, Job a alorsappris la perte de ses employés, desêtres humains qui lui étaient bien pluschers que des animaux ou des biens :« Il parlait encore lorsqu'un autre arriva

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Claudio CONSUEGRA et Pamela CONSUEGRA

comme un poids accablant qu’il nepourrait pas soulever. Mais parce qu’ilavait une relation étroite avec Dieu (ver-sets 1, 4, 5), il se tourna vers lui et leloua (verset 20), afin que ces pertesdouloureuses ne l’écrasent pas, et dit :«Nu je suis sorti du ventre de ma mère,et nu j'y retournerai. Le Seigneur a donné,le Seigneur a ôté; que le nom du Seigneursoit béni ! » (verset 21).

Il restait un défi que Job devait relever :la perte de sa santé. «Alors l'Adversaire

parlait encore, lorsqu'un autre arriva etdit : Tes fils et tes filles mangeaient etbuvaient du vin chez leur frère, le pre-mier-né, quand un grand vent venud'au-delà du désert a frappé les quatrecoins de la maison ; elle s'est écrouléesur les jeunes gens, et ils sont morts.Je me suis échappé, moi seul, pour tel'annoncer (versets 18, 19).

Une chose ajoutée à une autre, et àune autre encore, dans la vie de Job,jusqu’à ce qu’elles soient ressenties

et dit : Des Chaldéens, formés en troisbandes, se sont précipités sur les cha-meaux, ils les ont pris et ils ont passéles serviteurs au fil de l'épée. Je mesuis échappé, moi seul, pour te l'an-noncer » (verset 17).

C'est une chose de perdre vos em-ployés, même s’ils vous tiennent àcœur. Mais c’en est une autre quandla mort touche les membres de votrefamille. À ce stade de son récit, Job areçu la pire nouvelle de toutes : « Il

Les membres d'église peuvent ne pas réaliserou être conscients de la façon dont ces facteurs

de stress affectent ceux qui apportent du soutienpastoral, mais nous les ressentons profondément.Le stress dans le ministère est sans fin, et il draine

et sape notre énergie au quotidien.

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MON SEAU SE RETROUVE VIDE : STRESS ACCUMULÉ AU SEIN DU MINISTÈRE

les aider à aller mieux, mais notre pré-sence, une oreille attentive et un cœurbienveillant peuvent être un baume apai-sant pour leurs âmes troublées.

Stress accumuléClaudio a été aumônier bénévole des

forces de l’ordre pendant presque 35ans au cours de son ministère. Il a étéavec des policiers et des adjoints dushérif sur le lieu d’un accident de voituremortel, lors d’une intervention d’urgencepour un enfant qui s’est noyé dans sabaignoire et au domicile d’une victimed’homicide. Il a passé deux semainesau Ground Zero, à New York, lieu de l’ef-fondrement du World Trade Center aprèsles attentats du 11 septembre 2001,travaillant avec le service de police del’autorité portuaire lorsqu’en quelquesminutes, ils ont perdu 27 membres deleur équipe, y compris le chef et leshauts gradés. Il a également participé à27 séances d'information pour le per-sonnel d'urgence, impliqué dans lesopérations de sauvetage après l'effon-drement du pont sur le Mississippi àMinneapolis, au Minnesota, le 1er août2007, faisant 13 morts et 145 blessés.Au cours de toutes ces années commeaumônier, il a vu des policiers, durs etassidus au combat, continuer à faireleur travail comme toujours, mais rongéspeu à peu par le stress.

Le sergent Robin Klein du départementde police de Long Beach, en Californie,a déclaré : «Ce ne sera probablementpas une balle qui frappera un agent,mais les effets du stress chronique».L'un des facteurs associés au stressparmi le personnel des forces de l'ordre,ce sont ces incidents en dehors de lapériode d'activités régulières. Ces évé-nements critiques peuvent inclure le faitd’assister à des catastrophes (attentatsà la bombe, accidents d'avion, fusilladesdans une école, carambolages, etc.), àla mort ou à la mutilation et s'occuperd'enfants victimes d’abus ou maltraités.En général, les agents de police ont

se retira de devant le Seigneur. Il frappaJob d'un ulcère malin, depuis les piedsjusqu'au crâne. Job prit un tesson pourse gratter et s'assit au milieu des cendres.»(Job 2. 7, 8). Au moment où il avait leplus besoin de soutien et d’encourage-ment, sa propre femme, qui était proba-blement aussi affligée que lui, ne l’aidaitguère, mais insistait en disant : «Maudisdonc Dieu et meurs !» (verset 9).

Rien ne peut être plus doux que lecadeau de l’amitié, en particulier lorsquenous traversons des circonstances ousituations douloureuses. Job avait toutperdu : ses biens, ses employés, ses en-fants et même le soutien et l’encoura-gement de sa propre femme. Il avait be-soin de quelqu'un pour l'aider à marcheravec lui dans cette sombre vallée dedouleur, de maladie et de désespoir.

Le livre de Job nous dit que « troisamis de Job apprirent tous les malheursqui lui étaient arrivés ; ils vinrent chacunde son pays : Eliphaz le Témanite, Bildadle Shouhite et Tsophar le Naamatite. Ilsse concertèrent pour aller le plaindre etle consoler. Ayant levé les yeux sur luide loin, ils ne le reconnurent pas et semirent à sangloter. Ils déchirèrent leursmanteaux et jetèrent de la poussièrevers le ciel, au-dessus de leur tête. Ilss'assirent avec lui par terre, pendantsept jours et sept nuits ; personne ne luidit un mot, car ils voyaient que sa douleurétait très grande» (versets 11-13).

Là se trouve un remède très importantpour un cœur chargé de traumatismes,de douleur et de chagrin : les amis deJob, entendant parler de sa détresse,sont venus pour être avec lui. Quand ilsl'ont vu, ils ont pleuré avec lui. Dansleur désir de l'aider, ils se sont assisavec lui sept jours et sept nuits. Sansrien dire, ils sont simplement restés assislà pendant une semaine, lui ont tenucompagnie et l’ont soutenu par leurprésence. Quelle leçon puissante pournous. Si seulement ils s'étaient tus ! Aucours de ces moments douloureux quepeuvent vivre des amis ou des êtreschers, nous ne pouvons rien dire pour

jugé ces événements très stressants, etpourtant, ils font partie de leur travail,parfois au quotidien. Si certains agentspeuvent être en mesure de gérer demanière appropriée un ou plusieurs in-cidents, l’accumulation de tels épisodesstressants, sans aucune intervention,peut entraîner un stress chronique grave,le TSPT (stress post traumatique) et,pour beaucoup, le suicide.

Stress accumulé dans le ministère En tant qu’aumônier de personnes

chargées de l’application de la loi,Claudio tente d’aider ses policiers enleur expliquant comment reconnaîtreles symptômes du stress policier et leurproposer des stratégies pour y faire face.Mais les policiers ne sont pas les seulsà être stressés. En travaillant pour l’Égliseau fil des années, nous avons également

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appris que le stress faisait partie de lavie de ceux qui œuvrent au sein du mi-nistère pastoral ou de celui de l’éducation.Les rencontres mensuelles du conseild’administration et les réunions annuellesdes commissions de nomination, la pré-paration de prédications, les réunionsd’évangélisation, le service funéraired’un membre très cher, les rassemble-ments, etc., finissent par nous user.

Claudio se souvient du jour où il arendu visite à un couple de l’Église et àson nouveau-né à l’hôpital de Milwaukee.Il a loué Dieu et s’est réjoui avec euxlorsqu’ils ont accueilli leur petit bout dechou au sein de leur famille. Après avoirquitté cet hôpital, il s’est rendu en voituredans un autre hôpital où le nouveau-néd’un autre couple a été déclaré en étatde mort cérébrale. Il était avec eux alorsqu'ils décidaient de déconnecter lesmachines qui maintenaient son corpsen vie et assistaient à son dernier soupir.Les membres d'Église peuvent ne pasréaliser ou être conscients de la façondont ces facteurs de stress affectentceux qui apportent un soutien pastoral,mais nous les ressentons profondément.

Le stress dans le ministère est sansfin, et il draine et sape notre énergie auquotidien. Imaginez votre vie commeun seau en train de se vider constam-ment. Il ne faudrait pas longtemps avantque ce seau soit complètement vide. Leproblème est que beaucoup d’entre

est de le remplir à nouveau, et ce, conti-nuellement, afin que nous ne soyonspas desséchés. Activer certaines stratégiesd’adaptation saines peut atténuer leseffets cumulatifs du stress. Voici certaineschoses que vous pouvez faire : Établissez une routine quotidienne,

en commençant par la prière, pouraider à retrouver un sentiment decontrôle. Bien que notre emploi dutemps soit souvent imprévisible etnotre travail acharné, organisez votrecalendrier de manière à ce quevous ayez le plus de régularité pos-sible.

Mangez des repas équilibrés etsains.

nous ne le reconnaissons pas ou vivonsdans le déni du fait que nous approchonsou avons déjà atteint le fond. Le tableauci-dessus montre certains signes dontvous devez prendre conscience. Si vous-même ou vos proches présentez certainsde ces signes, rappelez-vous qu’un chan-gement de comportement à la suited’une crise peut constituer une réactionnormale à une situation hors du commun.Lorsque vous vivez une perte grave, lavie ne revient pas simplement à la nor-male du jour au lendemain. Pour la plu-part des gens, les changements de com-portement après une crise sont généra-lement temporaires et chacun réagit àla crise de différentes manières et traversel’épreuve à son propre rythme. En mêmetemps, vous devez vous rappeler quevous n'êtes pas seul. Beaucoup d'autrespartageront des réactions et des senti-ments semblables. De nombreux pasteurset éducateurs éprouvent le même stressque le vôtre, voire pire. Mais rappelez-vous, cela indique une force, et non unefaiblesse, de demander de l'aide en casde besoin.

Qu’est­ce qui vous aide à gérer le stress avantqu’il ne s’accumule?Revenons à l’illustration du seau. Le

stress dans le ministère est une réalitéet vide notre seau au quotidien. La clé

Claudio CONSUEGRA et Pamela CONSUEGRA

Signesprécurseurs

• Ennui• Fatigue• Anxiété• Dépression• Difficulté de concentration

Signesmineurs

• Problèmes de mémoire• Problèmes de maladies

Signesprolongés

• Difficultés relationnelles• Consommation d’alcool ou de drogue• Changement au niveau du rendement• Peur de sortir de chez soi

Signesgraves

• Changements dans les relations• Changements au niveau de la santé• Changements de personnalité• Rester cloîtré chez soi

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deux réussi à faire face aux suicides denos frères. Cependant, nous n'accepte-rons jamais leur choix de mettre fin àleurs vies, et chaque fois que nous pen-sons à eux, nous ressentons une grandetristesse. Avant tout, nous devons ap-prendre à reconnaître les effets néfastesdu stress accumulé sur nous-mêmes etsur autrui, puis prendre des mesurespour le gérer avant qu'il n'affecte d’unefaçon négative nos vies, nos familles etnos ministères. En tant que pasteurs,aumôniers ou éducateurs, nous devonsvoir la réalité en face : ce qui arrive auxautres peut et risque de nous arriver.

1. À moins d’avis contraire, les citations bibliques sont tiréesde la Nouvelle Bible Segond. 2. Ronald J. Burke, ed., Stress in Policing: Sources, Conse-quences and Interventions. New York : Routledge, 2017, p. 3.

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M

Reposez-vous davantage afin depermettre à votre corps de se dé-tendre et de récupérer. Comme unegrande partie de votre travail a lieupendant le sabbat, vous devez créerun «espace et un temps de sabbat»ailleurs au courant de la semaine.

Faites de l’exercice. Une promenadequotidienne, une randonnée en fa-mille et une baignade dans unepiscine à proximité sont de bonnesactivités de détente.

Libérez-vous de la frustration et dela colère grâce à une activité phy-sique de niveau élevé et sans danger.Coupez du bois, soulevez des poids,courez sur une courte distance oumême un marathon, ou participezà une compétition difficile.

Demandez le soutien d'amis, decollègues et de proches, mais de-mandez également de l'aide enmatière de santé mentale lorsque

vous êtes préoccupé par vos réac-tions.

Évitez tout type de stimulant - alcool,drogues, caféine ou pornographie.

Essayez de ne pas passer trop detemps sur les médias; écouter ouregarder les nouvelles sans arrêtpeut être assez déprimant lorsquenous sommes déjà stressés.

Soyez conscient de l’impact de vospropres expériences passées survotre fonctionnement actuel. Parfoisun événement triste ou stressantdu passé, que nous n'avons pastraité à l'époque, peut revenir pournous hanter quand un incident sem-blable a lieu.

Contrairement à Job, nos frères cadetsont choisi de mettre fin à leurs vies aulieu de demander de l'aide aux autres.Et, à l’inverse de Job, ils ne pouvaientpas voir au-delà de leur douleur et deleurs problèmes. Nous avons tous les

MON SEAU SE RETROUVE VIDE : STRESS ACCUMULÉ AU SEIN DU MINISTÈRE

C O U R R I E R D U L E C T E U R

Vous réagissez aux articles de « Ministry® »

Merci pour l’article en deux parties de John McVay sur le code de Corneille. J’ai particulièrement appréciéson « postlude ». C’était très dynamique et stimulant pour la réflexion.

John Wagner, enseignant adventiste à la retraite, Silver Spring, Maryland, États­Unis.

Je ne me souviens pas avoir lu dans le Ministry® au cours de ces dernières années d’article aussi créatif etenrichissant que ceux de John McVay sur l’histoire de Corneille. La seule chose que je soulignerai à propos deces chefs­d’œuvre, c’est que le Saint Esprit a présenté à Pierre ces porcs, ces vieilles biques, ces serpents sifflantset ces oiseaux de proie. Pierre consacrait du temps à la prière, et le Saint Esprit l’a préparé à accueillir ces Gentilsconduits par l’Esprit. Je suis d’accord qu’il ne faut pas rester inactifs face à la nouvelle génération. Mais si nousdevons conduire au Christ ceux qui sont captifs de Satan par tout autre moyen que par le baptême du SaintEsprit nous risquons de repatir nus et blessés comme les sept fils de Sceva.

Jim Kilmer, retraité, ancien responsable de la croissance de l’églisepour la Fédération de la Haute Colombie, Spokane, Washington, États­Unis.

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revivalandreformation.org

J e me suis assis, seul, dans lasalle de réunion des pasteurs.Le sujet de notre réunion du

soir portait sur le thème de la prière. Ilne s’agissait pas d’une occasion ex-ceptionnelle dans nos rencontres pas-torales fédérales, mais cette fois,quelque chose m’avait ému. L’un demes collègues a partagé une expériencesur la manière dont il s’y est pris pourrassembler ses anciens très tôt le matinune fois par semaine pour intercéderen faveur d’une personne qui en avaitdésespérément besoin. La situationétait grave. À la suite de leur supplica-tion, Dieu est intervenu d’une manièremiraculeuse.

Tandis que j’écoutais son récit, j’aisenti l’appel de Dieu pour prendre desmesures.

Notre congrégation avait récemmentacheté un nouveau bâtiment. Le pre-mier édifice de l’église était situé dansune rue très fréquentée et adjacente àla caserne de pompiers de la ville. Lapittoresque église blanche était un mo-nument historique dans notre ville,mais les lieux étaient exigus, il manquaitde places de stationnement, et les hur-lements occasionnels de la sirène descamions de pompiers représentaientplus que des inconvénients occasion-nels.

L’édifice très spacieux de notre nou-velle église avait un intérieur très dé-modé et avait besoin d’un nombreconsidérable de rénovations. Mais ilétait situé sur deux hectares, avait unbel espace pour le stationnement etcomprenait un presbytère attenant.Trois ans auparavant, la valeur de cebien immobilier avait été estimée à785 000 dollars. Cependant, notrecongrégation a pu l’acquérir pour lasomme de 185 000 dollars. Une réduc-tion de 600 000 dollars ! Dieu a entendunos prières et a abondamment pourvuà nos besoins.

Notre premier sabbat dans les nou-veaux locaux correspondait au week-

end de la fête des mères. Quelquetemps plus tard, nous nous sommesrendu compte que nous avions un pro-blème. L’ancienne église n’était toujourspas vendue. Le coût des charges et destravaux d’entretien des deux bâtimentsainsi que le remboursement du prêtimmobilier commençaient à poser pro-blèmes à la trésorerie de notre Église.Avec la saison hivernale qui s’annonçait,nous savions qu’il nous faudrait desdons.

Après avoir entendu l’histoire demon collègue, et l’importance qu’il ac-cordait à l’unité et à la prière sacrificielle,j’ai envoyé des lettres à tous les mem-bres de ma congrégation afin de lesinviter à prendre part à quelque chosede radical. J’ai demandé à tous nosmembres de s’unir au moins deux foispar semaine, à cinq heure trente dumatin, afin de prier pendant environune heure et demie. Nous avons sim-plement suivi l’exemple de l’unité dansla prière que nous avions découverten participant à la première série deprières intitulée « dix jours de prières »pendant deux années consécutives.

Au début, 15 personnes y ont parti-cipé. Par la suite, ce nombre s’est réduità 10. Lorsque la neige a commencé àtomber, nous nous sommes retrouvésà 5. Mais, nous avons persévéré. Peude temps après l’aube du nouvel an,notre église a été vendue, exactementau prix que nous avons payé la nouvelle185 000 $. Bien évidemment, il y avaitdes frais sur l’acquisition de la nouvelleéglise et sur la vente de l’ancienne,mais le symbolisme était si clair qu’onne pouvait pas le manquer. Dieu a faitun échange d’églises pour nous et nousa placés dans un édifice qui nous per-met de mieux servir et d’œuvrer serei-nement dans nos ministères au seinde la population.

Je n’oublierai jamais notre dernièreréunion de travail dans ce vieux bâti-ment qui n’avait pas de chauffage. Unentrepreneur avait acheté l’édifice pour

etRÉFORME

VOUS, VOTRE FAMILLE, VOTRE ÉGLISE, VOTRE COMMUNAUTÉ

le transformer en une somptueuse mai-son individuelle. Il nous a gracieuse-ment permis de nous rencontrer dansnotre ancien édifice une dernière fois.Une petite foule s’est assemblée dansle froid pour évoquer des souvenirsconcernant les mariages, les cérémoniesfunéraires de leurs bien-aimés, et lesbaptêmes qui ont apporté de nouvellesvies à la congrégation. Nous avonschanté un chant et remercié Dieu dece qu’il a fait pour vendre l’ancienneéglise.

Mais ce n’est pas la fin de l’histoire.Tandis que nous étions encore en trainde prier, nous avons vu des personnesabandonner leur vie au Christ. Des per-sonnes qui, autrefois avaient menéune lutte acharnée pour prendre unedécision concernant leur vie avec leChrist. Et, dans l’Église partenaire dela congrégation, un petit grouped’hommes se rassemblait chaque jeudimatin afin de prier pour les ministèresde leur Église au sein de la population.L’année suivante, nos deux Églises ontété bénies et ont grandi spirituellementet numériquement.

À travers ces expériences, Dieu m’aenseigné beaucoup concernant l’unitédans la prière. Les chiffres ne repré-sentent pas grand-chose, mais la ré-gularité était au rendez-vous. Prier nesignifie pas convaincre Dieu de nousbénir puisqu’il est Dieu ; mais de nouspréparer à recevoir les bénédictionsqu’il a en réserve pour nous. Et lorsquele peuple de Dieu consacre un momentà la prière, spécialement quand il estaccompagné d’un sacrifice personnel,nous avons son attention, et il se sertde son propre nom pour se glorifierlui-même.

- Jarod Thomas a été pasteur dans le Michi-gan. Il travaille maintenant comme chargéde communication à l’association pastoralede la Conférence générale à Silver Spring,Maryland, États-Unis.

L’Église qui ne faisait pasde commerce

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pourcentage significatif de sa congré-gation n’avait eu aucune lien avecl’Église ni implication religieuse avantde se joindre à North Point. La congré-gation a adopté une approche agressiveet non conventionnelle qui attire lesjeunes adultes anglophones en nombre.Ce qui m’intéresse davantage, c’est laprétention sans complexe de Stanleyque son Église locale est attractive.1

La conférence Catalyst en est bien lapreuve. J’ai rencontré Reggie McNeal,Alan Roxburgh et les supporteurs en-thousiastes de l’Église missionnelled’un côté. De l’autre côté, Andy Stanleyet les éminents avocats de l’Église at-tractive. Comment concilier ces carac-téristiques, assertions, et modèles conflic-tuels pour l’Église ? La question est ex-trêmement importante. Si certaines ap-proches font légitimement avancer leRoyaume de Dieu, il est des argumentsque nous ne pouvons pas nous per-mettre. Gagner un débat par des argu-ments est beaucoup plus facile quede gagner des gens.

L’Église missionnelleL’Église missionnelle est une idée à

la mode. En réalité, c’est une approchede l’Église dont le temps n’est jamaispérimé. Bien que certains ne peuventse mettre d’accord sur la définition

réelle de l’Eglise missionnelle, un petitnombre insiste sur trois caractéristiquesmajeures de l’Église missionnellecomme le fait le réseau MissionalChurch Network.2

1. L’Église missionnelle s’appuiesur le statut missionnaire de Dieu etde Son Église. Si un seul mot peut ras-sembler les activités de Dieu sur laterre, c’est le verbe « envoyer ». L’unedes plus grandes contributions de l’ima-gination missionnel, c’est une clairecompréhension de la véritable naturede Dieu en rapport avec ses « objectifsévangéliques ». En réalité, l’Église mis-sionnelle ne concerne pas l’Église elle-même mais plutôt Dieu. Allan Roxburghet M. Scott Boren expriment cette pré-misse avec force dans leur livre Intro-ducing the Missional Church 3. L’Églisemissionnelle assure que Dieu est déjàactivement engagé dans le mondepour racheter et restaurer l’humanitédéchue. Le rôle de l‘Église est de dis-cerner comment s’intégrer dans le plandivin.

2. L’Église missionnelle a un mi-nistère incarné. Les Églises mission-nelles se voient comme reflétant le mi-nistère de Jésus en devenant partie in-tégrante de la vie et de la culture de la

D epuis des années, un conflitreligieux dont vous ne vousêtes probablement pas rendu

compte fait rage. Il s’agit d’une contro-verse autour de la méthode la plus ef-ficace pour étendre le Royaume deDieu. Deux scenarios nous aideront àsaisir les enjeux de la situation.

Scenario 1 : Je suis en train d’écouterReggie McNeal, fondateur d’Églises etauteur de Missional Renaissance etThe Present Future. Il est, d’une certainemanière, plutôt cru. Se moquant des li-mitations de l’Église traditionnelle, saprésentation électronique est ouverte-ment un assaut contre l’Église attractive.Il propose à la place l’Église mission-nelle. Aux yeux de ses brûlants adeptes,ses arguments sont indiscutables.

Un bond rapide de quelques moisnous amène au scenario 2 : Je suis auCentre de Gwinnett dans la banlieued’Atlanta, Georgia aux États-Unis. Treizemilles personnes se sont engouffréessur le campus pour la conférence Ca-talyst sous les auspices d’Andy Stanleyet de North Point Church. J’ai écoutéde puissants messages délivrés parFrancis Chan, Matt Chandler, ChristineCaine, et toute une armée d’autres. Lesremarques de Stanley et les citations eson dernier livre, Deep and Wide, m’ontparticulièrement intrigué. Il parait qu’un

Missionnel ou attractif ?Une polémique dont l’Églisene peut se payer le luxe

Jesse WILSON, DMin, enseigne à la faculté des Sciences religieuses àl’Université Oakwood, Huntsville, Alabama, États­Unis.

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société. De même que Jésus est venudans le monde comme faisant partiedu monde, l’Église missionnelle doitentrer dans la société et en être partieintégrante. L’idée, c’est d’engager lesincroyants d’une manière qui, tout étantauthentique, perçoit où Dieu est déjà àl’œuvre. Les supporters de l’imaginationde l’Église missionnelle envisagent ceconcept comme l’approche « allez etsoyez », à l’opposé de « venez et voyez »de ceux qui veulent construire leRoyaume.

3. L’Église missionnelle impliquela participation active dans la missioDei ou Mission de Dieu. La missionde Dieu sur la terre consiste à racheterl’humanité perdue pour Lui-même. Laresponsabilité de l’Église est de participerà cette mission, en tout premier lieu,en observant les actions de Dieu dansla société. Jésus a déclaré dans Jean6.44 : « Nul ne peut venir à moi, si lePère qui m'a envoyé ne l'attire ; et je leressusciterai au dernier jour ». Ce versetimplique que Dieu est à l’œuvre dansles vies des incroyants avant que nousles atteignions avec un imprimé ouune étude biblique. Cette idée de par-ticiper activement à la missio Dei illustrela différence entre une Église qui a unprogramme de missions et une Églisemissionnelle.

Telles sont les trois caractéristiquesdes Églises missionnelles. L’église at-tractive aussi a ses caractéristiques etses défenseurs.

L’Église attractive1. L’Église attractive a faim des

âmes perdues. Certains sont sceptiquesà l’égard de ce modèle d’Église orientévers la recherche des « perdus » etcroient que l’approche attractive accordetrop d’attention à ceux que l’on appelleles « perdus ». Peut-être nous faut-il être

heureux lorsqu’un groupe se focalisesur les incroyants que Dieu aime. Celapeut nous pousser à nous focaliserplus ouvertement. Chuck Lawless main-tient que trop d’Églises ne sont ni at-tractives, ni missionnelles parce quede toute manière, elles s’engagent peudans la recherche des « sans église ».Une Église attractive est au moins unpoint départ intentionnel 4.

2. Les Églises attractives croienten l’excellence dans l’adoration. Cer-tains peuvent être dérangés par cequ’ils considèrent comme une cosmé-tique extérieure, une esthétique deconcert de rock ; mais nul ne douteraqu’elles sont à la recherche de l’ex-cellence. Je pense que nous avonstous vu des services de culte animésà la dernière minute, sans préparationni qualité ni même de cohérence. Trèspeu croient que de tels services d’ado-ration peuvent plaire à Dieu. L’approcheattractive croit que Dieu agit à traversl’excellence, et que lorsque l’irréligieuxpénètre dans notre sanctuaire, aprèstant d’hésitation, et souvent avec tantd’appréhension, le message et la pro-clamation de l’Évangile doivent êtreprésentés dans les meilleures et lesplus claires manières possibles. Commea dit Len Wilson : « Un puissant serviced’adoration attractif sert à susciter desdisciples de Christ et renvoie en missionauprès des autres » 5.

3. Une Église attractive entraîneune communauté aimante. L’Église at-tractive met la priorité sur des relationschaleureuses et accueillantes. C’estvrai dans l’église mais aussi dans lehall et même sur le parking. C’est moinsune question de finance qu’une affaired’entente. Lawless déclare : « Il y aquelque chose de sérieusement attractif :des gens généreux de leur temps, de

leur énergie et leurs ressources, parti-culièrement pour celles et ceux quivont au-delà des arguments » 6.

Quel est le problème ?Il est absolument clair que l’imagi-

nation missionnelle se place sur unterrain théologique, biblique et métho-dologique solide. Quelle faiblesse peut-on pointer du doigt ? Selon mes ob-servations, les critiques du mouvementmissionnel ont avec consistance iden-tifié deux domaines problématiquespotentiels.

Problème potentiel numéro un : Lemanque de respect pour d’autres mo-dèles de mission. L’absence d’humilitéet d’objectivité affichée par un nombrede «missionnels» trouble certains. L’appelà un ministère missionnel est une som-mation fondamentale pour chaque dis-ciple du Christ, quels que soient songenre de ministère. Plusieurs espècesd’Églises et de ministères sont néces-saires pour atteindre toutes les personnes.Lorsque ceux qui prônent le mouvementmissionnel décrivent le défi d’exercerun ministère dans les Églises attractives,je sais ce qu’ils veulent dire. J’ai étépasteur de plusieurs Églises attractives,et plusieurs de mes amis en sont mem-bres. Mais les Églises attractives, dansce qu’elles ont de meilleur, ont des élé-ments missionnels dans leurs structures.Se regardant elles-mêmes comme desÉglises à la fois rassemblée et dispersée,elles se voient orientées comme «vienset vois », « viens et sois », « va et dis ».Ainsi donc, les Églises attractives peuventêtre aussi missionnelles.

Problème potentiel numéro deux :Le manque de fruit missionnaire dumodèle missionnel. L’Église missionnellecritique l’Église attractive parce qu’ellemesure le succès par des nombres

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comme celui des baptêmes ou desobjectifs. Mais l’Église missionnelle nesemble pas se permettre d’être évaluée.Comment doit-on évaluer le succèsd’une Église missionnelle ? Pourrait-ily avoir une quelconque dignité dans lemanque de fruit, alors que cela sembleêtre important pour Jésus et son Égliseinitiale ? Quel est le fruit de l’Églisemissionnelle ?

Dan Kimball est l’auteur de EmergingChurch: Vintage Christianity for NewGeneration, et de Off Road Disciplines:Spiritual Adventures of Missional Leaders,et nombre d’autres volumes populairesparmi la foule missionnelle. Il a suscitéune tempête de feu lorsqu’il a publiéun article dans Leadership Journal re-mettant en question les assertions dumouvement missionnel dont il est lechampion. Voici quelques-unes de sesobservations : Je suspecte que le mouvement

missionel n’a pas encore fait sespreuves au-delà de la théorie.

Plusieurs disent qu’améliorer laqualité des programmes, des pré-dications et des services de cultepour amener les gens à « venir ànous » ne fait pas de différence.Mais voici mon dilemme : Je nevois aucune preuve pour validercette assertion.

Vu l’absence de preuves dans leursarchives, ces Églises missionnellesdevraient être lentes à critiquer lesÉglises attractives dont l’impact estmesurable.7

Je prends ceci comme un bonconseil ; mais je suis surpris de ce qu’ilvienne d’un supporteur du mouvementmissionnel. La passion de l’Église mis-sionnelle orientée vers la missio Deiincarnée dans le contact missionnairese trouve aussi dans plusieurs Églisesattractives mais s’exprime différemment– moins parfaite, peut-être.

MISSIONNEL OU ATTRACTIF ?

Cela soulève un autre aspect impor-tant. C’est vrai que nous vivons dansune société de consommation, uneculture occidentale contrôlée par lesmédia, que nous pourrions dire « at-tractive ». Ne soyez pas étonné que lesapproches attractives sont jusqu’ici trèsefficaces pour atteindre des millions.Le modèle missionnel va-t-il à contre-courant tout simplement ? Ou bien,dans une culture attractive, l’Église at-tractive a-t-elle la capacité particulière

de conduire une génération stimuléeoutre mesure vers des réponses plussubstantielles et plus spirituelles ?

En quête d’un terraind’ententeLes Églises attractives et missionnelles

ont beaucoup en commun.8 Dans Co-

lossiens 4, l’apôtre Paul donne trois ca-ractéristiques que les deux illustrent bien.

Prier pour les incroyants. Paul aécrit dans Colossiens 4.2 que nosprières devraient être persistantes, vi-gilantes et reconnaissantes. Il demandealors de prier pour qu’une porte s’ouvreet lui permette de partager le Christ.Son statut de prisonnier, à ce moment-là, ne l’a pas dissuadé d’étendre leRoyaume de Dieu. Même dans les cir-

constances les plus éprouvantes, nouspouvons aller de l’avant par la puissancede la prière.

La prière doit être la pierre angulairede tout mouvement missionnel. Sinous voulons que ce que nous faisonsréussisse, nous devons faire de l’habi-tude de prier pour et avec les gens

« Nul ne peut venir à moi, si lePère qui m'a envoyé ne l'attire ;et je le ressusciterai au dernierjour » Jean 6.44

Ce verset implique que Dieu està l’œuvre dans les vies

des incroyants avant que nousles atteignions avec un imprimé

ou une étude biblique.

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une pratique. En plus de nous lier à lapuissance et à la sagesse divines, elleest l’une des façons les plus efficacespour engager les incroyants parce qu’ilssont ouverts à la prière. Plusieurs peuventrefuser une étude biblique, mais peud’entre eux refuseront une prière offerte.9

Vivre avec les incroyants. Paul aprié pour que les chrétiens se conduisentsagement envers les gens du dehorset utilisent au mieux chaque occasion(Col 4.5). Cela combine l’approche in-tégrative de l’Église missionnelle etl’urgence évangélique de l’Église at-tractive. J’aime cette combinaison !

L’apôtre a exhorté ses lecteurs à êtresages dans leur conduite et leur contactavec les incroyants. Nous avons la vo-cation d’être sel et lumière sans perdrenotre témoignage distinctif. Semer, c’estune « tâche intérieure » 10. La plupartdes héros bibliques que nous chantonset prêchons « semaient à l’intérieur ».Ils ont vécu et travaillé au sein d’uneculture particulière et ont fait une dif-férence énorme pour le Royaume. Autantqu’Esther et Daniel, Néhémie était unmissionnaire d’intérieur. La plupart denos membres d’Église sont des gensd’intérieur qui passent la majeure partiede leur journée dans quelque activitéprofessionnelle – aller au travail, travailler,rentrer du travail, planifier le travail, etla liste continue.

Nous avons besoin de devenir plusintentionnels pour former les membresà fonctionner dans le monde – là oùils travaillent – et pas seulement à

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MISSIONNEL OU ATTRACTIF ?

l’église ! Puisque le monde du travail,plus que celui de l’Église, prend la plusgrande part de leur temps, pourquoitant de formations proposées par l’Églisesont centrées sur leurs responsabilitésà l’église ? Plusieurs Églises formentleurs choristes une fois par semaine ;mais elles préparent les membres aumonde du travail peut-être une seulefois dans la vie.

Parlez aux incroyants. Dans Colos-siens 4.6, Paul écrit sur l’importancede nos paroles dans notre vie mission-naire. Les paroles peuvent induire enerreur, être insignifiantes, menaçantes,ou hors de propos.11 Ce que nousdisons est aussi important que la ma-nière de le dire. La puissance de nosdiscours personnels – nos expériences–pourrait être bénéfique aux incroyants.Quand nous marchons intentionnelle-ment au milieu des incroyants, rienn’est plus irrésistible que nos réflexionspersonnelles, nos témoignages ou nosexpériences dans le Royaume de Dieu.

Une meilleure causeLe débat missionnel-attractif est bé-

néfique dans la mesure où il nouspousse vers des approches plus effi-caces et des idées pour étendre leRoyaume de Dieu. Mais, pourquoi cher-cher à polémiquer alors que Dieu nousappelle à faire la différence ? Par exem-ple, si mon fils ou ma fille est « perdu »,cela ne m’intéresse pas que leur pointd’entrée dans le Royaume soit la portede devant d’une église attractive ou la

porte latérale d’un Starbucks®. Je veuxseulement que quelqu’un leur parlede Jésus !

Nous pouvons débattre de l’efficacitéde plusieurs approches attractives etmissionnelles, mais pas de leur ortho-doxie. Puisqu’il en est ainsi, les âmesperdues sont trop importantes pourque nous gaspillions du temps précieux.C’est un débat dont nous ne pouvonspas nous payer le luxe – et encoremoins, notre famille et nos amis « per-dus ».

1. Andy Stanley, Deep and Wide: Creating Churches Un-churched People Love to Attend. Grand Rapids, MI: Zondervan,2012), 16. 2. missionalchurchnetwork.com. 3. Alan J. Roxburgh and M. Scott Boren, Introducing the Mis-sional Church: What It Is, Why It Matters, How to BecomeOne. Grand Rapids, MI: Baker Books, 2009. 4; Chuck Lawless, “7 Things we can learn from attractionalchurches.” chucklawless.com/2017/01/7-things-we-can-learn-from-attractional-churches/ 5. Len Wilson, “The demise of the attractional church isgreatly exaggerated.” lenwilson.us/demise -attractional-church/ 6. Lawless. 7. Dan Kimball, “Missional Misgivings,” Leadership Journal,Fall 2008, consulté le 24 avril 2013 surchristianitytoday.com/le/2008/fall/14.112.html. 8. Voir par exemple Eddie Cole, “Missional or attractional?The value of embracing a both/and mentality.” ChristianityToday, August 2017. christianitytoday.com/edstetzer/2017/au-gust/missional-or-attractional-value-of-embracing -bothand-mental.html. 9. See Kevin G. Harney, Organic Outreach for OrdinaryPeople: Sharing the Good News Naturally. Grand Rapids,MI: Zondervan, 2009. 10. Tim Downs, Finding Common Ground: How to Commu-nicate With Those Outside the Christian Community—WhileWe Still Can. Chicago, IL: Moody Press, 1999, p. 82. 11. William Carr Peel and Walter L. Larimore, Going PublicWith Your Faith. Grand Rapids, MI: Zondervan, 2003, p. 100,101.

Pour mieux comprendre ce que veut dire l’adjectif missionnel, lire l’article très documenté et précis dudoyen de la Faculté adventiste de Théologie de Collonges­sous­Salève, France, Gabriel Monet, qui enseignela Théologie pratique Gabriel Monet, « Une Église "missionnelle" plutôt que missionnaire » in Elisabeth PARMENTIER, JérômeCOTTIN (éd.), Évangéliser. Approches œcuméniques et européennes, Munster, Lit Verlag (Théologie Pratique,Pédagogie, Spiritualité, vol. 9), 2015, p. 121­137.

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« Le pasteur Rex Bell a fait de la ville de Brighton un lieu plus agréable à vivre » a déclaré le GouverneurMike Coffman lors de la cérémonie qui s’est déroulée le 1 er mai 2018. Ce pasteur adventiste a été appréciépour le travail extraordinaire qu’il a accompli au cours de ses deux mandats au sein du conseil municipal de laville. À l’Hôtel de ville le pasteur Bell a reçu une plaque indiquant qu’il avait servi la ville en tant que pasteuradventiste du septième jour pendant 23 ans. En tant que membre du Conseil municipal il a contribué àl’amélioration de la qualité de la vie de chaque habitant de Brighton. «Je suis humblement reconnaissant etme sent un peu vide car cela représente une partie importante de ma vie », a répondu le pasteur Bell.

L’engagement de Rex Bell pour la ville a commencé par les liens d’amitié qu’il a forgés avec des employésmunicipaux qui lui ont un jour demandé de faire partie d’une commission d’urbanisme. Il a été ensuitecandidat aux élections municipales quand l’occasion s’est présenté, puis il a été réélu pour un second mandat.Dans chaque élément de son service public Rex Bell a toujours fait appel àsa foi. « Mon but n’était pas de mettre ma religion dans la ville, mais devivre la ville avec ma foi. Ce qui est vraiment différent. J’ai essayé demettre l’esprit du Christ au sein de la communauté. J’y ai mis tout moncœur et les choses ont avancé l’une après l’autre. »

Le temps et l’énergie que Rex Bell a consacrés au service de la populationa « permis à l’Église adventiste de Brighton d’être perçue comme uneprésence bienfaisante pour la population », a déclaré Eric Nelson, le vice­président de la Fédération adventiste des Montagnes rocheuses.

Nouvelles

Un pasteur adventiste reconnupour ses services rendus à sa ville

BRIGHTON, COLORADO

Ray Dabrowski, chargé des communications de la Fédérations des Rocheuses.

Le Canada a été récemment choqué et attristé par le massacre commis à l’arme à feu par Faisal Hussain (29ans) parmi les consommateurs des restaurants de l’avenue Danforth de Toronto. Parmi les victimes oncompte Julianna Kosis (10 ans), Reese Fallon (18 ans) toutes deux décédées et Danielle Kane (31 ans) qui pro­bablement ne remarchera plus jamais. Cette tragédie est survenue trois mois après qu’une camionnette aitdélibérément fauché et tué 10 personnes dans la rue Yonge de Toronto.

La pasteure adventiste Maria McLean, responsable du ministère de la prière de la Fédération de l’Ontario,a engagé des représentants de la Fédération adventiste à se joindre à des milliers de personnes venuesmanifester leur solidarité aux familles des victimes dans le parc Alexandre le Grand de l’avenue Danforth.

Pendant toute la semaine des aumôniers adventistes ont offert une écoute attentiveà tous les passants qui venaient se recueillir sur les lieux du drame. Ils étaient iden­tifiables grâce aux gilets qu’ils portaient.

Ils ont pu parler avec des familles et des amis de victimes, avec quelques victimeselles­mêmes et surtout avec beaucoup d’habitants de Toronto venus exprimer leurtristesse et leur solidarité. Ils ont aussi rencontré des touristes. Ils ont pu écouter,apporter un soutien émotionnel et spirituel à ces personnes. Plusieurs les ontremerciés de leur présence. Le pasteur Mansfield Edwards, président de la Fédérationde l’Ontario, qui était l’un de ces aumôniers, a déclaré : « L’Église doit poursuivrel’œuvre de compassion du Christ. Nous devons nous demander ce que Jésus auraitfait, où il aurait été. Le Nouveau Testament nous dit qu’il était toujours là où lebesoin était le plus fort. Nous devons être avec les gens.

Fédération de l’Ontario

Des aumôniers adventistes apportent du réconfort

TORONTO, CANADA

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