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Bahout Marie et Chauvin Pierre 07/11/2011 Biochimie, UE Cardio-Vasculaire, Marqueurs biochimiques d'urgence en cardiologie, Pr Bendavid Nombreux renvois au cours Electrolytes et ionogrammes. Le poly est (finalement) disponible sur le réseau pédagogique. MARQUEURS BIOCHIMIQUES D'URGENCE EN CARDIOLOGIE Introduction « Cours très centré sur la pathologie d'urgence cardiaque. » 2 approches sont importantes aux urgences : Approche clinique Examens complémentaires : ECG / Bilan biochimique et recherche de marqueurs (le patient a été piqué) Dans le cas d'un patient suspecté de troubles cardiaques, il est nécessaire de croiser les données pour faire un diagnostic : → comment les marqueurs biochimiques confirment/infirment-ils les informations données par l'ECG et inversement ? Urgences cardiaques ciblées (toutes ces notions vont être développées) : Troubles du rythme : K + /Ca 2+ /hormones thyroïdiennes (paramètres importants) IDM et Angor (ou angine de poitrine) : ischémie du muscle cardiaque qui souffre par manque d'oxygène. Les cellules relarguent alors des composants : Enzymes : ASAT, CPK, CPK MB (sous fraction des CPK), LDH, αHBDH Protéines : troponines (IDM), myoglobine, copeptine (moindre importance) IC : BNP (Brain Natriuretic Peptide) et NTproBNP (fraction du BNP) Intoxications : digitaliques (la digitale, par son effet cardiotonique, peut provoquer l'arrêt cardiaque) Certains médicaments sont parfois surdosés, du fait de mauvaises prescriptions et/ou observance du traitement. I. Troubles du rythme L'ECG est témoin d'anomalies d'origine électrolytique (Na + /K + ), métabolique (hormones thyroïdiennes), médicamenteuse ou d'autre nature. Ces troubles se traduisent sur l'ECG d'autant plus vite qu'ils sont rapidement apparus ou que le cœur est malade. Autrement dit l'effet nocif d'une hyperkaliémie (par exemple) sera renforcé chez un patient présentant une pathologie cardiaque : les effets se conjuguent pour produire des anomalies encore plus complexes. 1/18

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Bahout Marie et Chauvin Pierre07/11/2011Biochimie, UE Cardio-Vasculaire, Marqueurs biochimiques d'urgence en cardiologie, Pr BendavidNombreux renvois au cours Electrolytes et ionogrammes.Le poly est (finalement) disponible sur le réseau pédagogique.

MARQUEURS BIOCHIMIQUES D'URGENCE EN CARDIOLOGIE

Introduction « Cours très centré sur la pathologie d'urgence cardiaque. »

2 approches sont importantes aux urgences :

– Approche clinique– Examens complémentaires : ECG / Bilan biochimique et recherche de marqueurs (le patient

a été piqué)

Dans le cas d'un patient suspecté de troubles cardiaques, il est nécessaire de croiser les données pour faire un diagnostic :

→ comment les marqueurs biochimiques confirment/infirment-ils les informations données par l'ECG et inversement ?

Urgences cardiaques ciblées (toutes ces notions vont être développées) :

– Troubles du rythme : K+/Ca2+/hormones thyroïdiennes (paramètres importants)– IDM et Angor (ou angine de poitrine) : ischémie du muscle cardiaque qui souffre par

manque d'oxygène. Les cellules relarguent alors des composants :• Enzymes : ASAT, CPK, CPKMB (sous fraction des CPK), LDH, αHBDH• Protéines : troponines (IDM), myoglobine, copeptine (moindre importance)

– IC : BNP (Brain Natriuretic Peptide) et NTproBNP (fraction du BNP)– Intoxications : digitaliques (la digitale, par son effet cardiotonique, peut provoquer l'arrêt

cardiaque) Certains médicaments sont parfois surdosés, du fait de mauvaises prescriptions et/ou observance du traitement.

I. Troubles du rythmeL'ECG est témoin d'anomalies d'origine électrolytique (Na+/K+), métabolique (hormones thyroïdiennes), médicamenteuse ou d'autre nature.

Ces troubles se traduisent sur l'ECG d'autant plus vite qu'ils sont rapidement apparus ou que le cœur est malade. Autrement dit l'effet nocif d'une hyperkaliémie (par exemple) sera renforcé chez un patient présentant une pathologie cardiaque : les effets se conjuguent pour produire des anomalies encore plus complexes.

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Attention : faire varier trop rapidement un état chronique peut entraîner encore plus de dégâts que l'état chronique lui-même ! Un état chronique se corrige donc doucement.

2 points à retenir :

Plus l'état chronique varie rapidement plus la toxicité est grande.Plus le cœur est malade plus la toxicité de l'état chronique est grande.

Rappels physio :

Le potentiel d'action des myocytes est déterminé par des flux ioniques transmembranaires. Il fonctionne uniquement à des concentrations données de Na+/K+/Ca2+.

Les déséquilibres électrolytiques, principalement de K+ et Ca2+ peuvent gêner d'apparition du potentiel d'action et produire des altérations spécifiques de l'ECG.

Attention : si la biologie est anormale et que l'ECG est normal une mise en doute des résultats est nécessaire ! Pas de diagnostic possible sur un seul aspect.

Le PA se propage à la surface de la cellule, ce qui entraîne une entrée de Ca2+ (via des canaux voltage-dépendants) puis une libération de Ca2+ par le reticulum endoplasmique. Il y a alors contraction de la cellule. Le Ca2+ diffuse à la cellule suivante par des jonctions GAP et propage la contraction à la cellule suivante.

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A) HyperkaliémieDef : cf cours électrolytes et ionogrammes.

1. Corrélation ECG – dosage[K+] du plasma = [K+] du milieu interstitiel = [K+] du liquide extracellulaire.

Des variations de la kaliémie entraînent directement des modifications de l'environnement ionique des myocytes et donc des modifications de l'ECG. Les évènements observés sont d'autant plus graves que la kaliémie est haute : il y a une bonne corrélation ECG – dosage, c'est à dire entre la valeur de la kaliémie et ses manifestations sur l'ECG. (Il est intéressant en plus de comparer les résultats à la clinique.)

Notion importante : l'Hémolyse

Au cours de la centrifugation du prélèvement les cellules sont soumises à de fortes contraintes mécaniques qui peuvent entraîner une hémolyse. Il y a libération des composants cellulaires, ce qui augmente fortement la kaliémie : on parle alors de « fausse hyperkaliémie ». Il y dans ce cas une incohérence entre le dosage et l'ECG. D'où la présence sur la feuille de prélèvement de la mention « Absence d'hémolyse », qui permet de parler d'un « vrai 7,5 » par exemple (attention !) ou au contraire de mettre l'hyperkaliémie sous réserve.

2. Visualisation des anomaliesLes modifications électrocardiographiques sont les suivantes et apparaissent successivement au fur et à mesure que la kaliémie augmente :

– ondes T amples, positives, pointues, à base étroite (« acuminées »)– troubles de conduction intraventriculaires avec QRS augmenté ( > 0,12s)– habituellement, déviation axiale gauche– diminution puis disparition de l'onde P sinusale– modifications du segment ST : « pseudo-lésion » (pas dit à l'oral)– arythmies et troubles de conduction atrio-ventriculaire pouvant aller jusqu'à l'arrêt cardiaque

[K+] > 5,5 mEq/L

– Ondes T amples, positives et plutôt asymétrique– Raccourcissement de la zone intermédiaire– Onde Q très ample

[K+] > 8,5 mEq/L : aspect de pré-arythmie ventriculaire.

Il est urgent de médicaliser le patient, de le monitorer (surveillance) et d’éliminer l'hyperkaliémie (purge). (« Il va mourir ! ») Le suivi cinétique des concentrations se fait via des ionogrammes.

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3. Causes d'hyperkaliémies cf cours électrolytes et ionogrammes... mais retenir les facteurs de lyse cellulaire massive et de rétention du K+ (→ modification de la kaliémie)

B) HypokaliémieC'est une situation moins critique que l'hyperkaliémie, du moins le risque vital est moins engagé pour la patient, mais les altérations électrocardographiques sont également bien discernables.

1. Corrélation ECG - dosageLa corrélation entre l'hypokaliémie et la gravité des troubles est un peu plus basse que pour les cas d'hyperkaliémie.

2. Visualisation des anomaliesTroubles observés successivement :

– Anomalies de la repolarisation : léger sous-décalage du segment ST, ondes T aplaties avec apparition d'ondes U

– Allongement de P et PR (léger)– Élargissement QRS (peu fréquent)– Arythmies ventriculaires (pour les plus fortes hypokaliémies) et blocs atrio-ventriculaires

3,5 < [K+] < 4,5 mEq/L : norme

2,7 < [K+] < 3 mEq/L : assez toléré mais attention le passage hyperkaliémie → hypokaliémie trop rapide (ex : passage de 6 à 3 mEq/L) peut causer des arythmies. Les ajustements de doivent pas être trop rapides !

[K+] < 2,7 mEq/L : troubles type arythmie

C) HypercalcémieModification principale : raccourcissement de l'intervalle QT aux dépens du segment ST tandis que la durée de l'onde T ne se modifie pas. Cela peut aller jusqu'à l'incorporation totale du segment ST à l'onde T, ce qui ressemble fortement à un profil d'hyperkaliémie. La biologie permet alors de les différencier.

Une augmentation élevée du Ca2+ ne se traduit pas proportionnellement sur la clinique : cela dépend beaucoup de l'état du patient (ex : digitaliques).

Au delà de 4 micromol/L (plutôt mmol/L?), risques très importants de troubles de plus en plus graves : arrêt sinusal, bloc sino-atrial, extrasystoles, tachycardies et fibrillation ventriculaire. Ces arythmies diverses peuvent se produire mais sont peu fréquentes excepté chez les patients digitalisés particulièrement sensibles à l'hypercalcémie : les digitaliques potentialisent les effets de l'hypercalcémie.

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Des arrêts cardiaques se sont produits chez des patients digitalisés recevant une injection IV de calcium.

Causes : cf cours sur le métabolisme phospho-calciqueRetenir tout ce qui joue sur la résorption osseuse : tumeurs (grignote l'os), troubles hormonaux... qui entraînent un relargage de Ca2+ et des troubles.

D) HypocalcémieElle produit la manifestation électrocardiographique inverse : un allongement de l'intervalle QT aux dépens de ST (qui devient particulièrement long tandis que la durée de l'onde T n'est pas modifiée).

Faire l'adéquation anomalie ECG / Biochimie par dosage de [Ca2+] sur ionogramme.

E) Autres électrolytesMg : quelques effets modérés sur le rythme cardiaque (nettement inférieurs au K+ ou Ca2+)

Na+: fortement impliqué dans les potentiels membranaires mais peu d'effets de l'hyper/hyponatrémie sur le rythme cardiaque.

F) Hormones thyroïdiennesThyroïde : glande en avant de la trachée qui libère des hormones importantes pour le métabolisme de base.

• Hypothyroïdie : synthèse d'hormones diminuée → métabolisme diminué Ralentissement du rythme cardiaque (= bradychardie sinusale) avec léger allongement de QT

• Hyperthyroïdie : synthèse d'hormones augmenté → métabolisme augmentéTachycardie sinusale : risque de fibrillation auriculairePrésentation clinique particulière : chaleur, hyperactivité, énervement du patient

Ce n'est pas un paramètre à doser en urgence, mais il est utile pour confirmer un diagnostic.

G) Médicamentscf cours de pharmaco

Peuvent donner des troubles du rythme :

• Digitale et intoxication aux digitaliques - Effet à posologies variables : aryhtmies- La clinique et l'ECG priment par rapport au dosage du médicament.

• Anti-arythmiques (quinidine...)

Domaine toxico-médico-légal : tentatives d'empoisonnement (héritage...)Erreurs de prescription ou de prise médicamenteuse (personnes âgées)

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II. IDM et AngorA) Souffrance cellulaire, libération et diffusion

La cellule (généralités, cellule cardiaque comprise) contient de nombreux éléments : noyau, mitochondries, lysosomes... et des protéines, dont des enzymes.

Enzymes membranaires (de surface) : PAL (Phosphatase Alcaline), 5'NU (Nucléotidase), gammaGT par exemple sont importantes au niveau du foie. (cf cours du 2e semestre)

Enzymes cytosoliques : ALAT, ASAT (transaminases), LDH (Lactico DésHydrogénase),CK = CPK (Créatine Phospho Kinase). Une lésion de la membrane entraîne une sortie de ces éléments à l'extérieur de la cellule.

La cellule en souffrance relargue ces éléments, jusqu'à une nécrose plus ou moins complète. On les retrouvera donc dans la circulation sanguine. On retrouve des enzymes mitochondriales (grosses molécules) si la cellule est poreuse et que les mitochondries sont lésées.

Premiers marqueurs cardiaques : transaminases, LDH, CPKIls sont retrouvés partout : foie, muscles squelettique...Donc une concentration élevée n'est pas toujours d'origine cardiaque !Attention : problème de spécificité et non de sensibilité

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1. Cellule normale avec tous ses élément et potentiels de surface permettant la dépolarisation.

2. Souffrance cellulaire : la perméabilité de la membrane augment entraînant une entrée/sortie d'ions et donc une perte de gradient, accompagnée d'une sortie d'éléments macromoléculaires (enzymes, protéines...).

3. Mort cellulaire : relargage complet du contenu intracellulaire.

Le degré de libération augmente en fonction du degré de souffrance cellulaire !

Il y a alors diffusion de ces molécules vers le sang veineux à travers le milieu interstitiel. Par prélèvement sanguin on peut donc retrouver la trace de la mort cellulaire = principe des dosages.

B) Cinétique des diffusionsDiffusion progressive des molécules suivant leur taille :

• Petites molécules : ions du métabolisme libérés très rapidement.• Métabolites (de la taille d'un sucre ou d'un nucléotide)• Macromolécules (si lésions très importantes ou nécrose totale) : enzymes, protéines de

structure telles que la myoglobine ou les troponines.

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Ces petites molécules et métabolites sont déjà très présents dans le sérum donc n'entraîneront pas de grande variations des concentrations. Il faut un territoire de nécrose très important pour observer une différence significative → marqueurs peu sensibles.

A l'inverse, les macromolécules ont un intérêt du fait de leur taux de base faible dans le sang (= taux de renouvellement cellulaire). Ainsi lors d'une nécrose, leur concentration augmente de façon significative → marqueurs sensibles. Cependant le délai d'apparition du pic de présence dans le plasma est beaucoup plus élevé (plusieurs h).

Donc 2 façons de faire le diagnostic :

– Recherche par dosage de macromolécules qui sortent précocement.– Détection sensible des petites molécules.

C) Macromolécules d'intérêtPendant des années, la recherche s'est d'abord portée sur des macromolécules précoces. En cardiologie (IDM) : utilisation d'enzymes (LDH) et de protéines (myoglobine).

Problème : la LDH est retrouvée dans tous les tissus y compris dans les GR et la myoglobine est retrouvée dans les muscles striés squelettiques → très peu spécifiques !

Myoglobine (Mb) : pic atteint rapidement (en ½ journée) puis redescend rapidement (bon outil pour juger de l'efficacité d'un traitement).

Les autres molécules (LDH, LDH1 = αHBDH, ASAT = TGO) ont une ½ vie plus importante.

Les CPK et plus particulièrement leur fraction CPK-MB sont retrouvées dans le cœur. Elles sont cependant moins spécifiques que les troponines.

→ Ces molécules étaient utilisées il y a 8/10 ans. Depuis, utilisation des troponines.

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D) Les troponines

1. Marqueur de choix : les troponines cardiaquesLa troponine est une protéine qui participe à la structure fibrillaire cardiaque : elle se situe entre l'actine et la tropomyosine (formation de complexes).

Il en existe 3 types : I, T et C

Les 2 marqueurs cardiaques sont la I et T car les seules cardiospécifiques.

Les troponines cardiaques associent extrême cardiospécificité (elles ne sont pas retrouvées dans les autres fibres musculaires, striées squelettiques ou lisses) et élévation relativement précoce. C'est donc un marqueur « idéal » : spécifique et sensible.

Leur délai d’apparition est un peu plus long que celui de la myoglobine mais meilleur que CPK-MB.Le problème (aux débuts de leur utilisation) a été de les rendre plus précoces que la myoglobine. Grâce à une amélioration des dosages, il est désormais possible de réaliser un diagnostic avant la 3e heure, soit la même efficacité qu'avec la myoglobine (spécificité comprise).

2. Souffrance cellulaire Il existe 2 pools de troponines dans la cellule :

– pool cytosolique : troponine pas organisée en myofibrilles, mais libre dans le cytoplasme (pas de rôle dans la contraction)

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– pool myofibrillaire : troponine dans les fibrilles contractiles

À la surface d'une cellule soumise à une anoxie (manque d'O2) et donc en souffrance, il se forme des petites bulles (les « blebs ») ou des micropores qui permettent la sortie de composants intracellulaires.

Plusieurs cas de figure :– Souffrance ponctuelle : le cœur souffre à bas bruit. Il envoie en permanence des petits pics

chroniques de troponine dans la circulation via les « blebs ». Le pool cytosolique (libre) est mis en jeu.→ Pic momentané du marqueur cardiaque

– Nécrose : quand la lésion persiste, il y a dégradation du pool myofibrillaire. La cellule devient poreuse et se vide de son contenu (infarctus massif).→ Élévation importante puis décroissance très lente des marqueurs

Ces stades sont successifs : on peut donc voir l’IDM, mais aussi une souffrance à bas bruit si on a un dosage assez sensible. La troponine est un marqueur très réactif grâce à la présence des deux pools (si pool 100% fibrillaire, il faudrait attendre la dégradation du tissu et des myofibrilles). L'intérêt est essentiellement diagnostique dans un contexte d'urgence !

3. Caractéristiques des troponinesDosage des troponines :

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a) Troponine « classique » (il y a 2/3 ans)

Concentration considérée comme nulle chez un sujet normal car on ne pouvait pas différencier une très faible concentration de 0 (0 correspond à la limite de détection de la méthode de dosage).

99% de la population est en dessous du 99e percentile : on ne connait pas la « valeur basse », on sait seulement qu'au delà du 99e percentile, la probabilité d'IDM est très forte = zone grise.→ CV (= coefficient de variation) largeAprès cette zone grise, la valeur est suffisamment élevée et le risque est certain.

b) Nouvelle troponine « hypersensible » (aujourd'hui)La qualité du dosage a augmenté, on peut différencier une concentration nulle d’une très faible.

La population normale n’a jamais une concentration en troponine nulle (car renouvellement cellulaire permanent !) : il est aujourd'hui possible de la quantifier.

Courbe gaussienne : ses propriétés rendent aisé le calcul du CV(qui est moins large) au delà du 99e

percentile. De plus, la symétrie augmente la précision dans les valeurs basses (moins d'imprécision dans les mesures) ce qui permet de différencier 3 zones : zone normale, zone grise, zone « sûre ».

4. Les troponines hypersensibles : TnT HS

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a) Profil évolutif

Ces nouveaux marqueurs sont-ils spécifiques de l’IDM ?

Dès l’admission du patient aux urgences (1-2h se sont écoulées depuis le début des douleurs thoraciques), on dose la troponine T hypersensible (Tn T HS) : la concentration sera élevée pour l’IDM mais < 50 ng/L pour les autres causes.

3h (= H3) après l’arrivée du patient, on refait un dosage si les douleurs thoraciques (caractéristiques) persistent. En effet il est possible que le 1er dosage de la troponine soit normal : la cinétique est lente donc il faut attendre et surtout ne pas renvoyer le patient !

À H3 :Pour l'IDM, le taux a énormément augmenté (pour l'angor instable le taux augmente peu). Les nouveaux marqueurs permettent ainsi un diagnostique plus rapide. On a maintenant confirmation du diagnostique à la 3e heure (avant c’était à la 6e). On peut donc plus rapidement administrer un traitement pour déboucher l’artère et sauver le myocarde (Rappel : les cellules myocardiques se nécrosent, mais ne se refabriquent pas → fibrose, pas de régénération).

b) Opportunités offertes

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Schéma qui reprend les idées du 3a)b)

A droite : troponines classiques (cTnT)- [cTnT] < 10 ng/L : pas de diagnostic (limite de détection : on ne différencie pas de 0)- [cTnT] > 35 ng/L : présence d'une pathologie = zone grise (CV de 10%) - [cTnT] > 100 ng/L(=0,10µg/L) : zone sûre = on est certain de l'IDM

A gauche : troponines hypersensibles (Hs-cTnT) → on a affiné les zones de valeurs basses - [Hs-cTnT] < 14 ng/L: normal, pas d’IDM, mais refaire le dosage à H3- Entre 0,014 et 0,56 ng/L : refaire le dosage à H3 et si augmentation d’au moins 7 ng/L (= augmentation relative) on a une forte probabilité d’IDM. Sinon, on élimine cette hypothèse.- [Hs-cTnT] > 56 ng/L : IDM certain, pas besoin de refaire un dosage et d'attendre d’augmentation de 7 ng/L → passer directement au traitement !

Augmentation de la sensibilité :

Elle est montrée par l'utilisation d'une courbe ROC (Receiver Operating Characteristic, voir plus loin pour un autre exemple). Plus la courbe ROC est proche du coin supérieur gauche d'un graphique plus le marqueur étudié sera bon. L'aire sous la courbe (AUC) doit alors être proche de 1.

→ Plus l'AUC est proche de 1 plus le marqueur est sensible et spécifique.

Comparaison des AUC :

Les nouvelles troponines ont une aire sous la courbe à 0,95 très tôt après l'apparition des symptômes, tandis que l'ancienne est mauvaise au départ puis les rattrape après ½ journée. Ceci n'est jamais suffisant car seule une intervention précoce permet d'éviter la fibrose et une cicatrisation irréversibles.

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c) Synthèse et Points clés HS-cTn

A Rennes, on utilise maintenant la troponine hypersensible T (avant c'était la I).

- La sensibilité et spécificité sont très bonnes pour les patients suspects d'IDM et de souffrance chronique (SCA).

-C'est un bon marqueur quantitatif (on peut aller très bas pour différencier 0 d'une concentration très faible) et non pas qualitatif.

- Le 99ème percentile à 14 ng/Ldoit être le seuil d’alerte de probabilité d’IDM en cas de douleurs thoraciques : il différencie le patient normal ([C]<14ng/L) de malade.

-IDM est certain au delà de 56 ng/L.

-La répétition des mesures améliore le rapport sensibilité/spécificité en cas de premier résultat entre 14 et 56 ng/L. Un délai de 3-h après le 1er dosage est suffisant. (Un délai plus court est probablement suffisant.)

- Ce marqueur est très spécifique dans la limite de la population testée, or la population sélectionnée pour les tests est standard. Donc pour les personnes âgées, les patients avec IR… il faut être plus large dans les seuils car leur comportement diffère du standard.

-Un angor (SCA) est une ischémie, mais ce n'est pas encore une nécrose, c’est donc réversible. On a une petite augmentation de la troponine entre 0,014 et 0,05 µg/L.Sur une Courbe de survie dans le temps : On observe que ces patients qui font de l'angor ont une survie diminuée par rapport à la population normale. Donc 2ème intérêt des nouvelles troponines => marqueur pronostiqueDonc ces patient avec une troponine au dessus du seuil de façon chronique ne sont pas une urgence mais doivent rentrer prochainement (dans le mois) dans un circuit cardiologique pour faire le point.

Questions non résolues (Poly mais non dit):• Interprétation chez patients âgés?• Que faire en cas d’élévation hs-cTnT en dehors d’un épisode de douleur thoracique?

E) Autres marqueurs de cytolyse non spécifiques1. Transaminases

Les transaminases sont des enzymes qui échangent des groupements NH2 d'un acide aminé à un autre. Leur concentration, en particulier celle d'ASAT, augmentent en cas d'hépatite mais aussi d'IDM. Si le dosage des troponines a été « oublié », le retour d'un bilan hépatique peut donc être un signe d'alerte.

cf cours sur le foie (2e semestre...)

2. LDH et LDH1 (αHBDH)

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LDH1 = αHBDH : sous fraction de LDH, qui n'est plus (ou plutôt ne devrait plus être) utilisée.Augmentation importante en cas de nécrose cellulaire (mais on ne sait pas de quel tissu !)

3. CPK et CPK MBRetrouvées dans tous les tissus musculaires et le cerveau.

Plusieurs isoformes :– CPK-MM : muscles striés– CPK-BB : cerveau (« brain »)– CPK-MB : relativement cardiospécifique

Avant : dosage des CPK totales (sensible, facile) ou des CPK-MB (spécifique) par immuno-inhibition des autres formes.

III. Marqueurs d'IC aiguë: peptides natriurétiques

A) Oedème pulmonaireLe cœur gauche ne travaille pas assez bien : il ne peut pas expulser tout le sang qui revient des poumon, donc celui-ci s’accumule à leur niveau.→ Pression hydrostatique (augmentée) > Pression oncotique→ Oedème pulmonaire (sortie d'eau dans le milieu interstitiel)

Le sang reflue en amont ce qui créé une pression anormale au niveau du cœur : il y a surpression et l'étirement est important même en diastole. En réponse il y a alors sécrétion de molécules comme les peptide natriurétiques.

Objectif : stimuler la diurèse pour diminuer le volume plasmatique et donc la charge sur le cœur.

B) Synthèse des peptides natriurétiques1. Deux types

– ANP : atrial natriuretic peptide– BNP : brain natriuretic peptide

On s'intérresse plus particulièrement au NT pro-BNP (fragment N terminal du précurseur du BNP)

Remarque : le terme B (pour brain) rappelle le fait que l'ARN messager de cette protéine a été identifié pour la première fois dans le cerveau. Il est bien relargué par les myocytes.

2. EtapesIl y a tout d'abord synthèse du Pré-pro-BNP, qui se segmente en Pro-BNP et peptide signal.

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Puis le Pro-BNP se divise de façon équimolaire en :– BNP : ½ vie courte (quelques min), avec activité biologique– NT-pro-BNP : ½ vie longue, pas d’activité biologique mais c'est cette fraction que l'on va

doser car elle est beaucoup plus stable dans l'échantillon. Du fait de la division équimolaire, on la trouve en quantité équivalente au BNP.

C) Utilisation

1. Plusieurs étapes1. Un patient avec un œdème des membres inférieurs → suspicion d'IC2. Diagnostic de 1ère ligne = diagnostic d'exclusion à forte sensibilité.

On réalise des explorations multiples (radio / ECG) et on dose les peptides natriurétiques. Si tout est normal : tout va bien jusqu'à preuve du contraire → reconsidérer le diagnostic.

3. Sinon : diagnostic de 2ème ligne avec évaluation de la fonction cardiaque (echo/imagerie) = plus spécifique.

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4. Caractérisation de l'IC et sévérité.

2. Spécificité et sensibilité

A gauche : Courbe ROCLes peptides natriurétiques sont des marqueurs très sensibles et assez spécifiques pour l’IC.Courbe ROC → AUC proche de 1 (cf cours de stats)

En haut à droite :

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Le risque de décompensation cardiaque(cf.schéma) est fonction de la variation de la molécule : très prédictif.

– si le traitement améliore (=diminution de la concentration de la molécule) : survie bonne– si traitement améliore un peu : pronostic moyen– si traitement n’améliore pas : pronostic mauvais

En bas à droite : mesure dans différents groupes des valeurs de NtproBNPRisque d'évènement cardiaque faible et survie du patient très bonne (toutes pathologies confondues) pour une concentration BNP <64 ng/L.

Les NT-ProBNP sont donc des marqueurs sensibles et assez spécifiques de l’insuffisance cardiaque :

– En phase aiguë (intérêt diagnostic et pronostic immédiat)– En phase de traitement (pronostic en fonction de la réponse au traitement – efficacité du

traitement)– En dehors d’un épisode aigu (aspect pronostic – répartition en groupe de risque de

mortalité)

Conclusion

– IDMOn avait un facteur diagnostique pour l'IDM (phase aiguë) qui était la troponine. C'estmaintenant devenu un facteur prédictif : un taux de base supérieur au 10e percentile veutdire qu'il y a souffrance et destruction de myocytes (à bas bruit) et donc qu'il y a un risque de complications rapides.

– Insuffisance CardiaqueDiagnostic au niveau de la phase aiguë : on regarde si le taux de BNP diminue avec letraitement pour évaluer les chances de sauver le malade.Mesure du taux de base de BNP chez un patient en dehors de toute pathologie aiguë : plus ce taux est haut plus le risque de complications cardiovasculaires rapides est important. Donc double utilité : diagnostique au moment de la phase aiguë (infarctus et décompensation cardiaque) pronostique (risque de faire un infarctus ou décompensation cardiaque).

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