maîtrise du risque infectieux lié à l’environnement : air et surfaces docteur fabien squinazi...
TRANSCRIPT
Maîtrise du risque infectieux lié à l’environnement :
air et surfacesDocteur Fabien Squinazi
Laboratoire d’hygiène
de la ville de Paris
Milieux de l’environnement
• air ambiant
• eaux– non traitées (eau du réseau)– traitées (soins spécifiques)
• liquides
• supports inertes (surfaces, équipements, textiles,…)
Biocontamination
• contamination d’une matière, d’un appareil, d’un individu, d’une surface, d’un liquide, d’un gaz ou de l’air par des particules viables.
• particule viable : particule qui se compose d’un ou de plusieurs micro-organismes vivants, ou qui leur sert de support.
Les réservoirs vivants
Cuir chevelu 106 bactéries/cm2
Front 104 - 105 bactéries/cm2
Sécrétion nasale 107 bactéries/g
Salive 108 bactéries/g
Aisselle 106 - 107 bactéries/cm2
Main 100 à 1000 bactéries
Matières fécales > 108 bactéries/g
Micro-organismes de l’environnement
• origine humaine• Staphylococcus• entérobactéries• entérocoques• virus (rotavirus, VRS)• cryptosporidies• amibes• Giardia
• origine environnementale
• BGN aérobies• Legionella• mycobactéries
atypiques• champignons
filamenteux (Aspergillus)
Survie de bactéries dans différents milieux
Mycobacterium tuberculosis
poussière : 90 – 120 jours ; tapis : 70 jours
expectoration : 6 – 8 mois (lieu frais et obscur)
Staphylococcus aureus
verre : 46 heures ; produits carnés : 60 jours
pièce de monnaie : 7 jours ; peau : 30 mn – 38 jours
Escherichia coli entérotoxinogène
poussière : 4 – 27 jours ; matières fécales : 84 jours
doigt : 45 mn ; sol : 84 jours
Shigella spp. eau : 2 – 3 jours ; mouches : 12 jours
chemise malade : 8 jours ; matières fécales : 11 jours
Enterobacter spp. beurre : 10 jours ; fromage : 7 – 21 jours ; réservoirs d’eau des oxygénateurs, nébuliseurs, incubateurs
Klebsiella spp. verre : 4 heures, crème pour les mains (lanoline), solution de bronchodilatateur, poussière : plusieurs jours
N. meningitidis faible survie dans l’environnement
L. monocytogenes survie facile dans sol, eau, aliments, matières fécales
Niches écologiques
• travaux extérieurs (Aspergillus sp.)
• humidificateurs et nébuliseurs (Legionella, Pseudomonas, Acinetobacter)
• dispositifs médicaux (Mycobacterium xenopi, Pseudomonas, VHC)
• antiseptiques (Pseudomonas)
• air (Staphylococcus)
Voies de transmission
• par voie aérienne contamination - amplification - diffusion– infections documentées : légionellose,
aspergillose, infections du site opératoire– contamination des supports inertes
• par contact manuportage, matériels, textiles, liquides– contamination des supports inertes
Vecteurs microbiens
• source humaine– gouttelettes microbiennes (Pflügge)– noyaux de condensation (Droplet nuclei)– squames cutanées
• sources inertes– poussières– supports– réseaux d’eau et d’air
Bioaérosol
• en suspension dans un milieu gazeux :
• particules viables
• allergènes
• toxines
• composés d’origine microbienne
Emissions de particules Par minute : D > 0,3 µm Activité d’une personne
100 000 sans activité
500 000 debout ou assis, mouvements légers de la tête ou des mains
1 000 000 debout ou assis, mouvements importants des bras, de la tête ou du corps
2 500 000 s’asseoir sur une chaise
5 000 000 marcher à 3,5 km/heure
7 500 000 marcher à 6 km/heure
10 000 000 marcher à 9 km/heure, monter un escalier
15 – 30 000 000 exercices physiques
Gouttelettes de Pflügge
Particules D ≥ 0,5 µm Activité
700 000 toux
1 400 000 éternuement
100 parole : lettre « p »
180 parole : syllable « pré »
15 – 20 000 conversation : 1 minute
Processus infectieux
• site anatomique : contamination multiplication colonisation infection– inoculum infectieux– virulence du micro-organisme– mode de contamination (aérienne, hydrique,…)– rupture des barrières cutanéo-muqueuses– réceptivité du patient (âge, tares viscérales,
immunodépression,…)
Conséquences de l’aéro-contamination bactérienne
• chirurgie orthopédique Lidwell O.M. and al. Airborne contamination of wounds in joint replacement operations. The relationship to sepsis rates. J. Hosp. Infec. 1983; 2 : 111-131
• corrélation entre le taux d’infection post-opératoire et la quantité de bactéries présentes dans l’air au moment de l’intervention
• germes responsables : Staphylococcus sp.
Conséquences de l’aéro- contamination fongique
• inhalation de spores d’Aspergillus (2-3µm) : Aspergillose invasive (filaments mycéliens) – colonisation de l’arbre trachéo-bronchique– destruction de l’épithélium bronchique– envahissement du parenchyme pulmonaire– pneumopathie nécrosante avec alvéolite fibrineuse– dissémination vasculaire et autres localisations
(cerveau, endocarde, rein, foie, peau)
Aspergillose invasive : patients à risque
• terrain fragilisé par une pathologie lourde
• immunodépression sévère (aplasie médullaire prolongée)– greffe de moelle allogénique– autres greffes– transplantations (cœur, rein, foie)– chimiothérapies aplasiantes (leucémies,…)– SIDA évolué
Analyse du risque infectieux lié à l’environnement
• identification des dangers microbiologiques (facteurs produisant un effet indésirable)
• relation dose-réponse (?)
• caractérisation de l’exposition (?)
• estimation du risque : probabilité de survenue d’une infection (facteurs de risque infectieux)
Maîtrise de la biocontamination
• deux principes (norme ISO CEN 14698-1, mars 2004) : – évaluer et – maîtriser en permanence
– les facteurs susceptibles de produire une
contamination microbiologique d’un individu, d’un procédé ou d’un produit (incidence sur la qualité microbiologique)
Analyse des risques microbiologiques
• identifier les dangers potentiels associés (facteurs de contamination)
• évaluer la probabilité que les dangers se produisent (fragilité et dangerosité)
• identifier les mesures destinées à les prévenir ou à les maîtriser
système de maîtrise
Facteurs de risque
• Fragilité du patient
• âge• maladies sous-jacentes• immunodépression• brûlures
• Nature et durée des soins
• manœuvres invasives• intervention
chirurgicale• thérapeutiques
Définition des zones à risque
• selon les patients et/ou les activités, on définit des zones à :– risque faible ou négligeable (zone 1)– risque modéré (zone 2)– haut risque (zone 3) – très haut risque (zone 4)
zones à environnement maîtrisé
Moyens de prévention
• agir sur les sources de biocontamination– assurer les mesures d’hygiène des surfaces – isoler les travaux– limiter le développement microbien dans les
installations à risque
• protéger les patients à risque– traiter l’air des zones à risque – sécuriser les points d’usage d’eau
Plan de surveillance et d’observation
• déterminer les « points » à maîtriser afin d’éliminer les dangers ou de réduire leur probabilité de survenue
• établir des limites assurant la maîtrise
• établir des actions correctives à entreprendre quand la surveillance indique qu’un « point » n ’est plus maîtrisé
Fonctionnement du système
• établir des procédures pour vérifier que le système fonctionne correctement (prélèvements microbiologiques)
• établir des procédures de formation du personnel
• établir et tenir une documentation appropriée
Prélèvements d’environnement
• à visée préventive– plan de maintenance d’une installation– système de management de la qualité (contrôle
de points critiques)– travaux générant un risque de contamination – à titre pédagogique
• à visée curative– recherche d’une source de contamination
Limites aux prélèvements microbiologiques
• limites scientifiques– seuils de contamination et risque infectieux
• limites méthodologiques– écosystèmes complexes– récupération des micro-organismes– adaptation des milieux de culture
• limites structurelles– personnel - matériel
Démarche qualité du laboratoire
• procédures : plan d’analyse défini– indications et méthodologie des prélèvements– délais et conditions de transport– description des techniques d’analyse, des
appareillages, des milieux de culture– utilisation de méthodes standardisées ou
référencées - traçabilité des réactifs– critères d’interprétation utilisés– délai et conditions de conservation des souches
Démarche qualité du laboratoire
• participation à des contrôles de qualité
• compte-rendu des résultats– identification du préleveur– indication de l’analyse– date, heure, nature et lieu du prélèvement– technique de prélèvement et d’analyse– résultats et interprétation– identification du biologiste
Formation du personnel
• opérateur technique compétent en hygiène et microbiologie de l’environnement
• biologiste compétent en hygiène et microbiologie de l’environnement, épidémiologie des infections nosocomiales et typage moléculaire
• agrément du laboratoire : eau destinée à la consommation humaine
La salle propre
• maîtriser la concentration des particules en suspension dans l’air
• minimiser l’introduction, la production et la rétention des particules (construction et utilisation)
• maîtriser d’autres paramètres pertinents (température, humidité, pression)
Cohérence des moyens
• air
• surfaces
• matériels
• fluides (eaux, gaz)
• textiles
• organisation du travail
• formation du personnel
Classes types de propreté particulaire de l’air
• Conc. Max. Admissible (particules/m3) : taille 0,5 µm
• ISO 1
• ISO 2 4
• ISO 3 35
• ISO 4 352
• ISO 5 3 520
• ISO 6 35 200
• ISO 7 352 000
• ISO 8 3 520 000
• ISO 9 35 200 000
Moyens de maîtrise de la qualité de l’air
• filtration de l’air– F6 : 60 ≤ Em ≤ 80 %– F7 : 80 ≤ Em ≤ 90 %– (H14 : 99,995 %)
• taux de renouvellement de l’air
• hiérarchie des pressions
• mode de diffusion de l’air
Classes de propreté particulaire de l’air (Ø 0,5 µm)
• zone 4 : ISO 5 < 3500 /m3 d’air flux unidirectionnel, > 50 volumes /heure
• zone 3 : ISO 7 < 350 000 /m3 d’air flux unidirectionnel ou non, 25 à 30 volumes/heure
• zone 2 : ISO 8 < 3 500 000 /m3 d’air flux non unidirectionnel 15 à 20 volumes /heure
Classes bactériologiques de l’air (NF S 90 - 351)
• zone 4 : 10 UFC /m3 d’air CB 90% : 10 mn
• zone 3 : 10 UFC /m3 d’air CB 90 % : 20 mn
• zone 2 : 100 UFC /m3 d’air CB 90 % : 20 mn
• Aspergillus sp. ou autre champignon filamenteux : < 1 UFC /m3 d’air
Stratégie d’échantillonnage
• Pourquoi ?• Qui ?• Où ?• Quand ?• Combien ?• A quelle fréquence ?• Comment ?• Interprétation ?
Indicateurs microbiens (1/2)
• Flore bactérienne revivifiable (DTB)– reflet du taux d’occupation, de l’activité, de la
propreté des locaux et des installations de traitement d’air
• Flore mycélienne revivifiable (DTM)– efficacité de la filtration d’air, humidité à
l’intérieur des locaux, présence de plantes
Indicateurs microbiens (2/2)
• staphylocoques (origine humaine)– évaluation du renouvellement d’air
• bacilles à Gram négatif d’origine environnementale (entérobactéries, pseudomonas,…)– humidité au niveau de la prise d’air neuf, des
installations de traitement d’air ou dans les locaux
La feuille de route des prélèvements
• nom de l’opérateur
• date et heure du prélèvement
• référence des appareils utilisés
• référence de l’échantillon
• volumes et milieux de prélèvements
• conditions environnementales
• éventuel problème rencontré
Prélèvements pour le contrôle de l’aérobiocontamination
• les points critiques– au plus près du site d’activité– indicateurs de défaillance du traitement d’air
• selon l’activité– avant toute activité : situation de base– en activité: situation à risque– après activité : cinétique de biodécontamination
Prélèvements pour le contrôlede l’aérobiocontamination
• le biocollecteur : filtration d’air ou impaction sur gélose– qualités ergonomiques (poids, maniabilité)– possibilité de désinfection-stérilisation– prélèvement à distance– certificat d’étalonnage– débit suffisant : prélèvement d’1 m3 d ’air pour
les zones à faible contamination
Prélèvements pour le contrôlede l’aérobiocontamination
• le biocollecteur– efficacité : granulométrie des particules
récupérables– efficacité biologique : possibilité de récupérer
d’une manière fiable des bactéries Gram (+) et (-), des spores bactériennes, voire la flore fongique
– vitesse modérée d’impact de l’air sur le milieu solide (< 20 m/s)
Prélèvements pour le contrôlede l’aérobiocontamination
• la filtration : – air aspiré au travers d’une membrane
microporeuse (0,8 µm) – débit régulé : 40 à 130 l/mn– pas de coupure granulométrique– manipulation délicate des membranes– atmosphère humide incompatible– courte durée de prélèvement
Prélèvements pour le contrôlede l’aérobiocontamination
• l’impacteur centrifuge (ex RCS) :– particules projetées par la force centrifuge d’une hélice
sur le milieu nutritif
– débit : 40 à 80 l/mn
– maniable, autonome, tête autoclavable, limite les colonies envahissantes
– mauvaise collecte des particules < 3,8 µm
– recyclage de l’air prélevé
– courte durée de prélèvement
Prélèvements pour le contrôlede l’aérobiocontamination
• l’impacteur à crible(s)– air prélevé accéléré à travers les orifices d’un
crible ; particules impactées sur une ou plusieurs géloses
– débit 28,3 l/mn (ex. Andersen) à 100 l/mn– collection selon la granulométrie des particules– courte durée de prélèvement– table de correction
Biocontamination des surfaces
Nettoyage
• Ensemble des opérations permettant d’assurer un niveau de propreté, d’aspect, de confort et d’hygiène et faisant appel, dans des proportions variables, aux facteurs combinés suivants : action chimique, action mécanique, température, temps d’action. (norme NF X 50-790)
La qualité du nettoyage
• 1. aspect, netteté et propreté visuelles
• 2. confort et bien être odeurs, toucher, bruit, glissance
• 3. propreté : absence de salissures
• 4. hygiène : pollution et contamination à un niveau non dangereux
Bionettoyage
• Ensemble des opérations visant à réduire ou éliminer les micro-organismes sur les surfaces de manière à les ramener au niveau cible requis. (norme NF X 50-790)– opération de nettoyage,– rinçage et récupération des salissures– application d’un désinfectant
Procédures du bionettoyage
• élimination des déchets• souillures libres : dépoussièrage humide• souillures adhérentes : lavage – récupération• souillures incrustées• récupération ou rinçage – récupération• Application de désinfectant : solution
aqueuse ou solution alcoolique à pulvériser
Niveaux de biocontamination des surfaces des zones à risque
• flore bactérienne 20 UFC /100 cm2 de surface et absence de germes indésirables
• Aspergillus sp. ou autre champignon filamenteux : < 1 UFC /100 cm2 de surface
Contrôle de la biocontamination des surfaces
• les points critiques– au plus près du site d’activité– indicateurs de défaillance du bionettoyage
• selon l’activité– après bionettoyage : témoin d’application et
d’efficacité– en activité: contamination (situation à risque)– avant l’activité : autres mesures de prévention
Prélèvements de surfaces
• le matériel : – boîte gélosée contact pour les surfaces planes :
pression de 25 g/cm2 (500 ± 50 g) sur une surface de 25 cm2 pendant 10 secondes
– écouvillon stérile humidifié ou autre support gélosé flexible pour les surfaces non planes, petites et difficiles d’accès. L’écouvillon est roulé sur une surface de 100 cm2.
– neutralisant incorporé pour les désinfectants
Principaux milieux de culture
• flore bactérienne (air - surfaces) : TCS– incubation 30°C pendant 72 heures
• flore mycélienne (air - surfaces) : malt agar– incubation 25°C pendant 5 jours
• Staphylocoques : Baird Parker– incubation 37°C pendant 48 heures
• Pseudomonas : gélose au cétrimide– incubation 30°C pendant 48 heures
Fréquence des prélèvements d ’environnement
• contrôles inopinés : démarche qualité– air et surfaces : mensuelle– eau pour soins standards : trimestrielle– eau bactériologiquement maîtrisée : mensuelle
• augmentation des contrôles : – travaux– type d’activité ou modification de procédure– accidents infectieux
Les actions curatives
• en cas de dépassement,– d’une puissance de 10 pour la flore bactérienne– du niveau cible pour les indicateurs spécifiques
(coliformes totaux, Pseudomonas aeruginosa, Aspergillus sp. ou autre champignon filamenteux)
• en cas de présence,– de germes indésirables
Les contrôles d’environnement
• les contrôles d’environnement sont :– des indicateurs de maîtrise de la qualité de la
zone à environnement maîtrisé et de la maintenance des installations techniques
• les contrôles d’environnement ne sont pas : – des prévisions du risque infectieux– des certificats de conformité, de bonne ou
mauvaise conduite ou de bonne conscience
En conclusion
• une flore microbienne environnementale diversifiée qui évolue dans le temps et dans l’espace
• des risques infectieux non négligables • des moyens de maîtrise adaptés et cohérents• des niveaux de qualité microbiologique
recommandés pour chaque milieu de l’environnement