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MA CHANSON DE ROLAND Ariane Dubillard Avec Ariane Dubillard / Sébastien Debard (Accordéon) Mise en scène : Michel Bruzat Costumes : Dolores Alvez Bruzat / Lumières : Franck Roncière Photo : Franck Roncière

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Page 1: MA CHANSON DE ROLAND - theatredelapasserelle.fr · 1993/94 Ubu de Jarry - Coup de Coeur Méridional et France Culture - Avignon Off. 1994/95 Les Caprices de Marianne de Musset - Coup

MA CHANSON DE ROLAND Ariane Dubillard

Avec Ariane Dubillard / Sébastien Debard (Accordéon)

Mise en scène : Michel Bruzat Costumes : Dolores Alvez Bruzat / Lumières : Franck Roncière

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Michel BRUZAT – Metteur en scène

« Le devoir de l’art est de fracasser les consciences » - Louis Calaferte

Ancien élève de Pierre Valde, au Théâtre de l’Atelier, Michel Bruzat s’installe en Limousin où il crée en 1987 le Théâtre de la Passerelle. Il y réalise des créations d'auteurs allant de Tchekhov, Ibsen, Voltaire, Molière, Diderot, Strindberg, Gogol, Rousseau, Musse , à Filippo, Camon, Cormann, Beckett, Cousse, Parmelin, Mac Coy, Pinter, Tournier, Copi, Jarry, Schisgal, Durif, Albee, Foucher, Deutsch, Dario Fo et Franca Rame, Calaferte, Patte, Vian, Garneau, Berkoff, Rimbaud, Tremblay, Bergman, Duras, Valletti, Colette, Siméon, Cohen, Kafka, Sophocle, Brassaï, Genet, Koltès, Dopagne, Mirbeau, La Boétie, Montaigne, Erasme, Dostoievski ….

Titulaire du CA et professeur d’art dramatique au Conservatoire National de Région, de 1993 à 2016.

"J'aimerais que le Théâtre soit une chose naturelle et jubilatoire ; toujours rebelle, insoumis, toujours continuer d'exiger la lune, continuer à mordre, envisager le théâtre comme un lieu de respiration. Que la parole prenne corps et que les corps prennent parole. Le théâtre dans un monde de machines, d'argent et de médias qui mettent à mal l'imaginaire, m'apparaît comme garant d'un moment vivant de parole.

Chaque création est l’occasion vitale pour moi d’explorer un monde de nouvelles voies au risque de me perdre. Théâtre de foire, de tréteaux, public voyeur, attentif, auteur décisif : qu’ensemble, nous soyons bouleversés et heureux. Au théâtre de la Passerelle, à Limoges, j’ai choisi le cercle pour la chaleur humaine, le partage de l’amitié, pour les imprévus, pour la sensualité du contact, pour la joie fraternelle. J’ai choisi l’arène pour s’apprivoiser, pour créer des liens. »

Quelques dates : 1991/92 Le Misanthrope de Molière - Tournée AFAA Allemagne. 1992/93 Le Frigo de Copi - Coup de Coeur France Culture - Avignon Off 1993/94 Ubu de Jarry - Coup de Coeur Méridional et France Culture - Avignon Off. 1994/95 Les Caprices de Marianne de Musset - Coup de Coeur du Provençal, Avignon Off. 1998/99 Alice au pays sans merveilles de Dario Fo et Franca Rame et Quatre à quatre de Michel Garneau - Avignon Off, tournée en France métropolitaine, Pologne, Madagascar, Ile de la Réunion, Ile Maurice. Juillet 1999 Quatre à quatr" - festival du Théâtre Européen - Grenoble Août/Sept1999 Un riche, trois pauvres de Louis Calaferte - Alice au pays sans merveilles et Quatre à quatre au Festival de Blaye 1999 Quatre à quatre - Un riche, trois pauvres - Avignon Off - Tournée en France, en Suisse, en Tunisie 2000 La pluie d’été de Marguerite Duras -Histoire du tigre de Dario Fo - Avignon Off - Tournée en France. Mai 2001 Histoire du tigre - Festival Rencontre Théâtrale Franco-Allemande de Sarrebrück - prix d’interprétation et prix du public. 2001 Hosanna de Michel Tremblay - Scènes de la vie conjugale de Ingmar Bergman - ’Avignon Off 2002 Le Misanthrope (nouvelle mise en scène et nouvelle distribution) / Création au Pôle de Lanaud (Limoges) - Avignon Off Les petites chemises de nuit… Une vie - Michel Bruzat - Avignon Off et Off Aurillac. 2003 Lettre au père de Franz Kafka - Avignon Off 2004 Antigone de Sophocle - Avignon Off 2005 Bernard Dimey Roi de rien - Avignon Off 2006 Les Bonnes - de Genet - Avignon Off 2007 Histoire de Marie de Brassaï - Avignon Off 2008 Une nuit d’amour plus qu’un jour de gloire - de Gaston Couté et L’Enseigneur de Dopagne - Avignon Off 2009 L’Enseigneur Festival de Blaye - Festival de Théâtre Seul(e) en Scène - Paris - Tournée France métropolitaine - Ile de la Réunion - Nouvelle Calédonie – Centre culturel d’Alger - Création Le journal d’une femme de chambre de Mirbeau 2010 Le cabaret de la vie de Jean-Pierre Siméon - Avignon Off 2011 Création Le discours de la servitude volontaire de La Boétie - Montaigne - Avignon Off 2012 Créations L’Eloge de la Folie de ’Erasme - Je suis le vent de Jon Fosse – Le Journal d’une femme de chambre – Avignon Off 2013 Créations Les carnets du sous-sol de Dostoïevski – La vie va où ? de Michèle Guigon - Big Bang de Philippe Avron 2014 Créations Stabat Mater Furiosa de J. Pierre Siméon L’Acteur Loup de André Bénédetto - Big bang et l’Acteur Loup - Avignon Off 2015 Création : Sol - Comment va le monde ? de Marc Favreau – Avignon Off - 150 dates de tournées - Montréal - Théâtre des Déchar-geurs à Paris 2016 Création : Grisélidis l’insoumise 2016 Création : Discours à la nation – Ascanio CELESTINI—Avignon Off 2016 Création : Histoires d’Hommes – Xavier Durringer 2016 Création : Saleté - Robert Schneider 2017 Création : Le Testament de Vanda - Siméon / 2017 Création : Comme disait mon père—Ma mère ne disait rien de Jean Lambert-wild 2017 Création : Ridiculum Vitae—Jean-Pierre Verhegeen, Jacques Bonnaffé/ Festival Avignon Off 2018 2018 Création : Les Soliloques du pauvre - Rictus, Ma chanson de Roland - Ariane Dubillard - Théâtre des Déchargeurs à Paris 2018 Création : Ce que j’appelle oubli - Mauvignier

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- Conservatoire National de Düsseldorf (Classe de chant) - Etudie le piano avec Alicia Alsina Atelier Elisabeth Depardieu ( art dramatique ) - A étudié le théâtre avec Mathew Jocelyn, Jean-Claude Fall, mais surtout Alain Knapp, (cours d’improvisation et de répertoire) et Hervé Langlois : Ateliers hebdomadaires de clown ( 2010-2012) Anglais, Allemand courants, Chinois (licence) - Prof de théâtre au collège du parc de Villeroy à

Mennecy ( 91)- 2009-2012 - Prof de chant au théâtre du Lucernaire 2016-2017 Comédienne et chanteuse au théâtre avec :

2018 : La vie trépidante de Brigitte Tornade, avec Eléonore Jonquez au ciné 13 et

Ma chanson de Roland, mes Michel Bruzat au Théâtre de la Passerelle, à Limoges, puis au Théâtre des Déchargeurs,

Paris

2016 : Les Zoizeaux Reprise avec Isabelle Serrand, théâtre de la Huchette, Avignon. 2015-16 en tournée avec le bal, adapté du roman d Irène Némirovsky et mis en scène par Virginie Lemoine ( rôle de Mademoiselle Isabelle) 2014-2015 création d’une écriture personnelle au théâtre du Crève-cœur, à Genève : Mon père et moi , mise en scène Anne Vaucher Gampert 2013 Dorothée Schepens : découverte d’une écriture contemporaine, Théâtre du Crève-cœur, Genève 2012 avec Michaël Lonsdale, Daniel Mesguich, Roland Dubillard, auteur, acteur, poète d’aujourd’hui, Paris, Théâtre du Rond Point 2010 L’aide-mémoire, de J-C Carrière, au théâtre du Crève-cœur à Genève, avec Jean Natto, mise en scène Jean Mars 2009-2010 Les Zoizeaux, avec Isabelle Serrand, montage autour de l’œuvre de Roland Dubillard, mis en musique par Isabelle Serrand à la Péniche –Opéra, ( juin 2009) au Théâtre 13, Paris ( décembre 2009) ainsi qu’au Théâtre Kléber – Méleau de Lausanne en Janvier 2010. 2008-09- 2010 La chance de ma vie, de Valérie Grail ( Avignon, tournée) 2008-09-2010 Les 3 jeanne, d’Eliane Boéri et Dominique Cozette, mise en scène Tilly (Gaîté Montparnasse, petit Montparnasse, Avignon 2008, tournée) 2006 Ivanov d’ Anton Tchekhov, mise en scène Franck Berthier. La Faïencerie Creil, Théâtre Sylvia Montfort, Paris ( rôle de Babakina 2005 Tchekhov intime d’après Tchekhov, mise en scène Franck Berthier La Faïencerie, Creil, tournée France, Italie ( rôles de Lioubov, Elena, Sacha) 2004 L’Opéra de quat’sous de Brecht et Weill , mise en scène Christian Schiaretti, direction musicale Jean-Claude Malgoire, (rôle de Lucy) TNP Villeurbanne, Théâtre National de Strasbourg, Théâtre de la Colline, Paris 2004 Comme un bouchon d’après Roland Dubillard, mise en scène Ariane Dubillard avec Isabelle Serrand (musique ) et Simon Bakhouche

Théâtres du Rond Point, Paris et du Chêne Noir, Avignon, reprise de mai à septembre 2006 au Théâtre du Lucernaire, Paris. 2003 Cabaret Brecht poèmes et chansons de B. Brecht, musique Kurt Weill et Hanns Eisler, avec Maria Machado et Jacques Chal-meau, TNP Villeurbanne. 2002 Providence de Marie N’Diaye, mise en scène Marc Liebens (rôle de Providence) Théâtre Kleber Méleau, Lausanne. 2001 Vive en Vian Cabaret d’après Boris Vian, Maison de la Poésie, Paris, mise en scène Renaud Maurin et Ariane Dubillard. 1999 Cabaret Dubillard d’après Roland Dubillard, mise en scène Michel Arbatz. Avec M. Arbatz et Roch Havet, Maison de la poésie, Paris. 1998 Le lézard de l’amour, textes et chansons de Prévert, Félix Leclerc, Louise Labé…Mise en scène Michel Arbatz, au piano Roch Havet. Théâtres les Déchargeurs et Maurice Ravel, Paris, Kléber Méleau et Esprit frappeur Lausanne, du Crève -cœur et du Grütli, Genève.(2002-2003), Avignon… A également chanté dans les festivals suivants :Chorus des hauts de Seine, Festival de Marne, Barjac, les Langagières, et en 1ère partie de Juliette Gréco, Anne Sylvestre (Partage des eaux, auditorium St Germain 2000), Juliette, Georges Moustaki, Marie-Paule

Belle, Gilbert Laffaille, Francesca Solleville…

En 1999 elle a reçu le prix de la Sacem pour Le Lézard de l’amour. Comédienne au cinéma : 2005 Lucifer et moi, film de Jacques Grandjouan, avec J-F Balmer (rôle de Rosalie), chanson du film et musique de Eric Demarsan 2014 Boomerang, film de François Favrat, (rôle de Françoise )

Comédienne à la radio (France culture, France musique) avec : Alain Trutat , Jean Couturier, Christine Berlamont, Laurent Valéro, Bruno Letort. A aussi travaillé avec : Alain Maratrat ( Les Z’acoustiques, de Phyllis Roome , Théâtre Jean Vilar Suresnes 1996 ) Barbara Hoffmann (Saisons de Nacre, spectacle bilingue, français allemand de R.G Mohnau 1993 ) Matthew Jocelyn ( La tragédie de l’Athée de Cyril Tourneur, Printemps des comédiens 1992) Régis Santon, Jean-Jacques Debout et Roger Dumas (Paul et Virginie Théâtre de Paris 1991), Nicolas Bataille ( Diablogues de

sourds, avec le compositeur Joël Cartigny, Théâtre de la Huchette 1990), Elisabeth Depardieu (Toute différente est la langouste, d’après Dubillard au Petit Théâtre de Paris en 1988).

Ariane Dubillard - comédienne, chanteuse

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Sébastien Debard - Musicien

Artistes Accompagnés sur scène et studio:

Enrico Macias, Charles Aznavour, Line Renaud, Pascal Danel, Laurent Voulzy, Alain Souchon, Julie Pietri, Nathalie Lermitte, Christina Rosmini, François Buffaud, Jean-Pierre Danel, Michael Jones, Corinne Hermes, Annick Cisaruk, Sophie Tellier, Vincent Heden, Marcel Azzola, Didier Lockwood, Marc Thomas, Marjolaine Paitel, Ema Rym, Philippe Lars, Ariane Pirie, Miguel-Ange Sarmiento, Dominique Desmons, Dominique Magloire, Jean-Luc Guizonne, Pablo Villa Franca, Canta u Populo Corsu...

Tournées live : Europe, Japon, Etats-Unis.

Théâtre et Comédies Musicales :

"La cage aux folles" (accordéon) comédie musicale de Broadway adaptation Française mise en scène Alain Marcel au théâtre Mogador.

"Camille C." (piano) Molière 2005 du spectacle inattendu mise en scène Jean-Luc Moreau au théâtre de l'Oeuvre puis en tournée.

"Bistro" (piano, accordéon) mise en scène Anne Bourgeois au théâtre de l'Oeuvre.

"Gospel sur la colline" (piano, orgue Hammond, direction d'orchestre) mise en scène Jean-Luc

Moreau aux Folies Bergère.

"Barber" (accordéon, bandonéon) production Franco-Japonnaise en tournée au Japon et en France depuis 2011, musique Patrice Peyrieras, mise en scène Francis Perrin.

"Piaf, Ombres et Lumière" (Arrangements, direction musicale, piano, accordéon, bandonéon) mise en scène Natha-lie Lermitte et Stéphane Vélard.

"Ténorissimo" (piano, accordéon) mise en scène Francis Perrin, orchestrations Patrice Peyrieras.

"Desmons / Morel" (arrangements, piano, accordéon) mise en scène Michel Bruzat.

"Ma chanson de Roland" (accordéon) création Ariane Dubillard, mise en scène Virginie Lemoine.

"Soliloques du pauvre (Rictus)" (accordéon, piano) mise en scène Michel Bruzat.

***

Quatuor de musique de chambre : « Accordion 3.0 »

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C’est mon père qui m’a nommée Ariane. Et de même qu’Ariane possède le fil de la vie et de la mort, je me suis toujours plus ou moins sentie gardienne de son exis-tence. Un instant j’avais quitté ma mère du regard et elle avait disparu pour tou-jours. Je me le tins pour dit et mis mon père à l’abri, en lieu sûr : dans mon cœur. J’ai été élevée, de façon très originale, par cet homme tendre et tourmenté, jusqu’à mes 6 ans, dans une clinique de fous, d’abord.

Quand il devint obligatoire que j’aille à l’école, il me mit en pension chez mes grands-mères. L’une était pauvre, athée, socialiste et très stricte, l’autre catholique, gaulliste, complètement foutraque et libertaire. Quel avantage considérable pour la suite de mon existence, pensais-je alors ! Comme j’ai de la chance ! Formule magi-que qui accompagna toute mon enfance, à la manière d’un mantra secret. Je me souviens surtout de nos rires. On riait non pour fuir la réalité, mais pour célé-brer le rire lui-même, la joie d’être ensemble.

Le reste de ma vie est à l’image de cette enfance, elle a la beauté d’un voyage. J’ai beaucoup voyagé, ne me suis installée nulle part, mon père redevenant peut-être, dans sa vieillesse immobile, le seul point fixe de ma vie, fixe comme le sont les étoi-les. Je l’ai longtemps joué et chanté, son œuvre poétique surtout, je me sentais son porte-parole, son porte-drapeau, son interprète privilégiée….. Je suis heureuse aujourd’hui de partager avec vous cette très belle histoire.

Ariane D.

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Notes pour « Chercher » un chemin avec Ariane Ariane, Tu as collé ton oreille à la bouche de ton père qui fut aussi ta mère… Sa présence est partout… partout on entend sa voix… Alors nous allons lui dire « je te quitte et je ne t’oublie pas » La vérité sans compromis a toujours des bords déchiquetés… Tu es incandescente, tu as l’intelligence de l’âme, Alors n’esquivons pas cette blessure. De guingois nous sommes comme est la vie, Analphabètes du sentiment, infirmes de l’amour. « La tragédie, c’est l’histoire des larmes » nous dit Vitez, On pense à Tchekhov… « Vivre, mourir, n’est pas un genre qu’on se donne, On ne fait pas le geste de tomber. N’augmente pas du choix des poses, le poids des choses » dit Roland Dubillard Ariane, tu joues comme tu écris : lumineuse, espiègle comme Claude Rich Tu passes en un instant du rire aux larmes Profonde et légère, pure, poétique. Ton texte parle en toi Sois physiquement vulnérable, n’interprète pas ton texte, invente le. La joie est liberté. Ariane, tu ne peux pas être une récitante, tu es ton propre créateur, Mettre en scène, tu parles ! C’est mettre ta vie debout dont il s’agit ! Une imagination nourrie par ta réalité, Déroulant une authentique histoire tragique dans un climat d’une troublante légèreté. Et tout à coup c’est le silence qu’on entend. Quel plaisir de jouer avec toi comme le font les enfants ! Ton humour libertaire ! N’oublie pas qu’enfant tu as inventé les pastilles qui déclenchaient l’hilarité ! « Mieux vaux parler comme on veut que comme il faut, ou alors je vais me taire, c’est à choisir » dit Roland Dubillard Les mots qui surgissent savent de nous ce que nous ignorions d’eux. Mis en jeu sur un plateau, que vont-ils faire de toi ? M. B. PS : J’ai choisi 4 textes à mes yeux essentiels pour découvrir « Ma chanson de Roland » 1) Quand ta mémoire ) [Je dirai que je suis tombé] 2) Des choses qui se cassent ) Roland Dubillard 3) Elégie à la Princesse Hortense pour la rendre Inconsolable d’avoir quitté L’EMPEREUR son père [Roland Dubillard - Revue D’esthétique-Jean Michel Place] 4) Regrets (chanson)

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« Je dirai que je suis tombé » Roland Dubillard

QUAND TA MEMOIRE Quand ta mémoire Me reviendra; Quand j’aurai reconnu mon armoire Vide des papillons que tu fis voler; Quand j’aurai téléphoné A quelques amis morts pour qu’ils puissent répondre Qu’ils sont bien là et qu’ils ont cessé d’être morts; Il sera temps pour moi de redescendre l’escalier, Mais lentement; et une fois, Je collerai mon oreille au sapin d’une marche, Cette marche que tu aimais ? Et j’entendrai ta voix. Ta voix ressemble au bruit d’un jeu de construction en bois. Quand notre mémoire nous sera revenue, Je me souviendrai de ton âge, De ta cigarette et d’un bonheur broyé Comme une grappe de groseilles… (mais pourquoi l’avoir écrasée Rouge comme la voilà; et pourquoi l’avoir seulement cueillie ?) Tu ne vois rien. Ni éclair. Ni ampoule. C’est moi qui les connais. Mais je reste aveugle pour t’accueillir. Je connais les lieus par mémoire. Et dans ces quatre pièces où je vis J’ai fait poser des microphones Pour me prévenir de ton arrivée si tu viens. Le moindre bruit venu de toi, Je l’entendrai de mon casque d’écoute. Pour tout le reste je suis sourd. J’entendrai seulement l’instant Où tu seras là malgré toi. Quand ta mémoire Sera vivante, Je me rappellerai tes yeux trop noirs et ta voix triste (je l’entends déjà souvent quand il fait nuit Qui parle toute seule dans mes murs) Mon fauteuil pour t’asseoir et mon divan pour t’y étendre Et mon plancher, tout ce qui peut craquer Craquera quand tu viendras, et me signalera ton approche…

Repose-toi Souris, malgré la nuit opaque Sans te voir, je te vois. Ta présence dans ma chambre Gomme la nuit pourtant profonde. Et tout le noir disparaîtra D’un seul coup de ta foudre, Toi, mon ampoule ! Et tu te mettras à chanter.

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DES CHOSES QUI SE CASSENT Choses qui se cassent : Les bâtons. Les roues. Les carottes; j’ai vu quelqu’un, très jeune il est vrai, si jeune que c’était déjà peut-être moi, pleurer parce qu’une carotte entre ses mains s’était cassée. Se cassent plus net les carreaux que les carottes. Jamais caresse ne se casse, mais souvent s’arrête, pareille à tout ce qui est tendre. Les choses qui se cassent, le sang de la tendresse ne coule pas dedans; mais un sang sec et dur. Regardez plutôt les étoiles; Quiconque voit une étoile se dit : quelque chose a dû se casser. Mais il ne peut imaginer ce que c’est qui s’est cassé, saignant ce sang brillant si différent du sang. Qu’importe. La cassure est une affaire non de physionomie, mais de caractère. On dit : les cascades. Mais l’eau est si malade que rien ne s’est vanté, pas même le vent, pas même l’immobilité, d’avoir pu lui faire du mal. L’abîmer semble un jeu d’enfant ; mais en vain des géants préméditent de la battre : c’est d’un bâton pourri d’avance. Pesante, son poids aux abîmes la prédispose. mais, si profonds qu’ils soient, l’eau s’y brise-t-elle ? L’abîme la suce avec ses langues d’air et la voilà fondue en l’air, qu’elle embarrasse : On voit des trous fumer vers le ciel, enivrés qu’ils sont d’eau insaisissable. Mais l’eau ne casse rien. Car qui casse, il sera cassé. Plutôt qu’avec les coups, l’eau s’entendrait avec la colle. Pierre, chose qu’on taille ! Reçois ce verre d’eau. Quoi, tu l’as mangé déjà, avec ton immense absence de soif et de faim, avec ta mâchoire compacte aux dures dents dormantes ; Tu l’as donc oublié déjà dans tes entrailles plates ? Pierre encore humide et qui brilles de ciel, Tu as mâché, brisé mon verre, mais l’eau est intacte.

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Choses qui se brisent. Choses qu’on taille. On taille une chemise et on la perd. Mais personne jamais n’a cassé sa chemise. Robe de bal taillée, robe de bal perdue, usée, effilochée, moisie ou mémorable… Jamais on n’entendit jeune fille parler de sa robe de bal cassée. Choses qu’on perd sont encore autres choses. Que savons-nous de plus ? Je sais que ce qu’on peut casser n’est jamais immense. Je sais que l’homme est double et qu’il y a en lui d’un côté ce qu’on peut casser, de l’autre ce qu’on peut couper. L’homme n’est pas immense. Il ne fond pas. L’immensité, quand il y entre, il y éclate. Dans son sang, quelque chose fait que son sang ne se mêle pas à la mer. J’ai vu dans une goutte d’eau éclater ses globules. Ce qui se casse, en l’homme, empêche qu’on le coupe. Choses cassées. Choses jetées. Choses recollées. Ô porcelaine ! Je ne me souviens pas de t’avoir connue plus douce qu’à cette fraction de seconde où ta fêlure se fit jour. Est-ce que tu souriais ? Au bout de mes doigts, sur le bord des lèvres de mes doigts, la commissure de tes lèvres… Cette légère foudre arrivait comme de très loin à travers ton frêle orage. Nul orage n’est éternel. Au marbre levé sur la pointe des pieds le ciel se marie. Comme j’ai vu le ciel à travers la Voie lactée se frayer à la nage un chemin respirable, j’ai vu le ciel cueillir la porcelaine; J’ai vu le ciel venir se reposer dans la toile fragile et secrète des faïences, puis s’en aller, laissant une lézarde en elles pareille à la frayeur des zèbres. Débris. Fragments. Esquilles et morceaux. Couper. Casser. Mais déchirer, c’est une autre aventure. Les cœurs brisés. Les cœurs fêlés. Mais les cœurs déchirés.

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Papier mural parfois survit à la muraille. La raillerie souvent survit à ce qu’on raille… Incisives. Canines, marteaux et vents d’est.. En sens contraire de la colle s’exerce la colère. Quelque chose de mou, dans les choses les moins molles appelle en secret la molaire. Délicates boiseries, fleurs de fleuve, fleurs de fer, fleuve et fleur, guitare et gorge, de haut en bas tout est broyable. Excepté l’eau. J’ai dit qu’elle était sans défaut. J’ai dit qu’elle était simple et parlait par grands lacs, malgré l’objection des monts. Mais voici que ce qui est broyé se mêle à elle et partage ses citernes, ses écumes. Je ne suis pas payé pour parler de la boue. Je ne suis pas si fou que d’y mêler mes larmes. J’apporte seulement, dans mes charrettes, tout ce qui, pierre ou crâne ou ressort de pendule, un jour fut expulsé de soi-même et jeté hors d’usage et sans nom parmi les pots cassés.

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Quand j’ suis née j’étais J’étais pareille à l’été

j’avais un soleil au-d’ssus d’ mes oreilles

et quand j’ souriais les fraises mûrissaient

tout’s rouges et quand j’ faisais ça

avec mes deux doigts tout’ la nature bougeait

Quand j’étais petite j’allais pas si vite

comme je vais maint’nant j’avais tout mon temps

c’qui va vite ça brûle sauf les libellules

moi j’traînais et ceux qui m’suivaient

sans s’presser m’app’laient la Reine

J’avais une maison sans terminaison j’avais un amour

qui trouvait l’ temps court j’avais des parents

qui s’bourraient d’argent les poches

j’avais des p’tits ailes comme z’ont les pucelles

sans r’proche

J’avais des sourires qui m’feraient mourir

si je les r’ voyais si je les r’ souriais

j’avais des grand’s fleurs pour mes grand’s frayeurs

qu’ n’avais-je ? Aujourd’hui j’ n’ai plus Rien, tout est fondu

comme neige comme neige

Regrets (Chanson)

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Elégie à la Princesse Hortense pour la rendre inconsolable d’avoir quitté L’EMPEREUR son père Ecrite à la terrasse de la Rhumerie martiniquaise

le 3 janvier vers minuit : Tes ailes allongées nord-sud, Ton corps de pierre poreuse descendant l’avalant les pentes du vent Tes yeux clairs en avant, qui vivaient de voir les après-midi suivre les lapins d’une ville aussi claire qu’une caisse de jouets trop joués, trop cassés d’avoir été entendus… Tes yeux s’embuent de l’éblouissement d’un soleil qui se couche mais pourquoi derrière toi ? Tes yeux lentement se ferment par instants; Plus lentement l’avion déployé en spirale t’entoure comme son moufflet D’un endormissement contrarieux qui t’éveille en te faisant tousser comme si tu sortais de la mer… Comme on est lourd, dans l’air et ces fauteuils t’alour-dissent de ces poils, de cette peau qui doit-être de la taupe. Mais tu dissous tes voisins, en riant De cet air de paquet qu’ils se savent et qu’ils savourent d’avoir… « Gédéon ! Gédéon ! » pour un peu tu dirais des mots qui n’ont pas de sens; Ou s’ils en ont un il a été sucé comme par les passants la groseille-besace; Tes gencives seraient des péniches de sable sans rien qui pousse dedans, dans la mins du vent, Si la sténotypie des passagers ne dispersait en te soufflant dans le vocabulaire toute cette masse de poux tous ces mots d’un coup disséminé —Toi, fameuse du blé au vent qui du vent a si bien pris sa part qu’elle se vaporise à la façon des pailles de l’avoine… Par tous les dos de ces obscurs parloirs quelque chose de toi s’éteint, se rallume, comme la seule bou-gie qui restait à cet arbre : Arbre d’intérieur, recourbé sur son souffle coupé par la fuite à l’envers du vent. Pour être un passager je me suis assis à la terrasse d’un café snob Je suis parmi des passagers pareils aux kems et si d’eux tous nous pouvions sourire en nous regardant nous serions ensemble. J’irais avec toi mais je n’irai pas. Ce n’est pas ma place.

La place d’un père est dans son œuf. Sa mère lui a donné un œuf, c’est pour y rester ! Oui nous savons qu’il a bonne nature même brouillé, Mais quoi que tente un œuf dans sa volonté d’aérody-namisme, Rien n’est plus digne d’un socle qu’un œuf. Tu reviendras survoler ici ce qu’il en reste, comme tu survoles en le rasant ce long sommeil au long duquel tu deviens longue comme un méridien. As-tu compté les méridiens, tu sais, ces fils qui empê-chent la terre de s’en aller de tous les côtés ? Ta grand-mère craint que tu n’en aies cassé trop, en passant, pour que les juifs ferment les yeux. Il y a des cendriers rouges sur ma terrasse, Volière de volailles et d’oiseaux peu connus. Mais ta vie est comme la couleur jaune tout entière, nulle part ailleurs il n’y a plus de jaune. Cela nous impressionne ici; et d’angoisse les cendriers gardent leur rouge pour eux, renonçant à rejoindre Ils font pitié dans leur gravité comme des rouge-gorge empaillés. Il y en a qui diraient : c’est la distance. Je dirais : c’est moi ; il y a moi et toi qu’il n’y a plus. J’ai quitté cette terrasse où je n’étais venu que parce que j’y venais dans ma jeunesse Comme si ma jeunesse ainsi pouvait toucher la tienne Nous étions nombreux, nous buvions du punch au rhum froid. Toujours ce que buvaient mes amis me donnaient de l’inquiétude. Nous buvions tous du punch au rhum blanc froid. Maintenant on dirait que c’est comme si tous les gens de la ville n’avaient plus dans leur horizon dans leur assiette que ce grand lac pâle, cette soupe sans sel

[signé :] Astoire Naturellement, cette lettre ne partira que demain, mercredi 16. je t’embrasse, nous t’embrassons etc. Rien de neuf. Tâche de t’habituer. Même si tu je reste que 8 jours, ce ne seront pas 8 jours perdus. Ton gamin, Roland.

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