l’ostéopathie, la structure - amigues structure et...
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L’ostéopathie, la structure Notre structure, c’est toute la mécanique humaine. La peau, les muscles, les fascias, les
articulations, les viscères, le système nerveux central. Comme ostéopathe, j’ai travaillé à
comprendre comment pouvait fonctionner cette belle machine. C’est une merveilleuse
mécanique. Elle est sous la dépendance d’un énorme « computeur » le cerveau.
A la suite de longues recherches, je suis arrivé à penser que le fonctionnement de notre
système nerveux, de notre masse cérébrale, était bien plus complexe que de simples
échanges ioniques entre les neurones. Dans son ouvrage, Le cerveau intime, Marc
Jeannerod1, nous propose d’entrer dans notre propre cerveau pour le découvrir de
l’intérieur. Tel un guide, il nous fait visiter cet immense labyrinthe. Il se pose des
questions comme : « Existe-t-il une autre réalité derrière la réalité biologique ? » Les
réponses que nous donne ce professeur d’université s’arrêtent à l’interprétation physico-
chimique de la structure du cerveau.
Deepak Chopra2 dans Le corps quantique, avance : « Penser, c’est réaliser une chimie
cérébrale qui engendre une cascade de réactions dans tout l’organisme ». Pour lui, c’est
l’entrée en scène des neurotransmetteurs qui favorisent l’interaction entre pensée et
matière. C’est encore de la chimie !
Un neuropeptide naît au contact d’une pensée, mais, la pensée d’où surgit-elle ?
On peut aussi se demander : qu’existe-t-il avant la pensée ?
La philosophie nous ouvre une voie de la compréhension. L'un des premiers traités sur
les émotions est dû au philosophe René Descartes. Dans son traité Les passions de
l'âme, Descartes identifie six émotions primaires : l'admiration, l’amour, la haine, le
désir, la joie, la tristesse (quelques 3000 ans avant les chinois avaient observé les
1 Marc Jeannerod, Le cerveau intime, édition Odile Jacob.
2 Deepak Chopra, né en 1976 à New Delhi, médecin, écrivain sur les thèmes de la spiritualité et sur les médecines non conventionnelles.
2
mêmes émotions primaires). A cette même époque un autre philosophe, Spinoza3, dans
son ouvrage L’éthique écrit lui aussi sur les sentiments, les émotions. Mais sa pensée
fut très mal accueillie.
Si Spinoza comme Descartes analyse l’âme humaine, ses passions, ses affections, il
est un des premiers à disserter sur les « états de conscience ». Il faut attendre le XXe
siècle, et l’excellente étude d’Antonio Damasio, pour prouver que Spinoza avait raison.
Ce professeur de neurosciences fait la différence entre émotion, programme que nous
ne contrôlons pas, et sentiment émotionnel : « Les émotions sont des programmes
complexes et en grande partie automatisés d’actions qui sont menées à bien par notre
corps, de l’expression du visage et des postures, aux changements dans les viscères et
le milieu intérieur. Les sentiments émotionnels, eux sont des perceptions de ce qui se
passe dans notre corps et dans notre esprit quand nous éprouvons des émotions.4 »
Nous ne contrôlons pas ces programmes complexes, nous ne savons pas encore ce
que peut provoquer un « surstress ». (Sur le surstress, Certaines hypothèses ont été
émises en particulier par le dr. Hamer.)
Fritjof Capra5 nous apporte un début d’explication : « Dans nombre d’anciennes
traditions philosophiques et religieuses, la signification originelle de l’esprit, tant
occidental qu’oriental, est celle du souffle de la vie. » Il nous fait entrer dans un autre
monde, celui de l’énergie, des états vibratoires, du corps causal.
A la suite de nombreuses expériences et grâce à l’imagerie médicale, les chercheurs
commencent à connaître le fonctionnement du cerveau. Ils peuvent, à travers ces
3 Baruch Spinoza, né en 1632 à Amsterdam, mort en 1677. Sa pensée eut une influence considérable sur ses contemporains et nombre de penseurs postérieurs. Spinoza fut un héritier critique du cartésianisme. Après sa mort, le spinozisme, condamné en tant que doctrine athée, eut une influence durable.
4 In Sciences et Avenir – avril 2011 : A. Damasio, Il existe trois niveaux de conscience.
5 Fritjof Capra, docteur en physique, dirige le Center for Ecoliteracy de Berkeley en Californie. Il est l’auteur du Tao de la physique. Il s’est toujours intéressé aux frontières de la science et de la spiritualité.
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examens, visualiser sur certaines zones du cerveau les effets de l’observation d’une
image, de l’écoute d’un son, d’une émotion. A l’heure actuelle, à ma connaissance, peu
de recherches ont été faites sur la relation
entre « émotions et maladies ».
Nous venons d’évoquer le cerveau, dans ses
capacités à intégrer et à répondre à une
émotion. Ce « computeur » est aussi un chef
d’orchestre6 !
En créant un enfant, l’homme et la femme
ont donnés vie à plus de 54 milliards de
cellules. Ces cellules ce sont organisées en
différents organes, structures. Ils sont tous
sous la dépendance du système nerveux
central. (Le cerveau)
Nous allons approcher l’homme comme l’a abordé le fondateur de l’ostéopathie Andrew
T. Still. Nous allons l’examiner à travers ses éléments non visibles comme son
ossature, ses organes. Puis nous irons vérifier la machinerie qui les met en
mouvement : les muscles. Enfin, nous parviendrons au cerveau qui commande cet
ensemble grâce aux systèmes complexes que sont les nerfs et les neuromédiateurs7.
Ceux-ci traduisent les informations des capteurs disséminés à travers tout l’organisme
(il y en a dans la peau, dans les articulations, dans les enveloppes des organes, dans
les organes eux-mêmes) pour les transformer en commandes volontaires ou
6 Bruce Lipton – La biologie des croyances – Editions Ariane
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Un neuromédiateur est une substance chimique (appelée également neurotransmetteur), fabriquée par l’organisme et permettant aux cellules nerveuses de transmettre l’influx nerveux (entre elles ou entre un neurone et une autre variété de cellules de l’organisme (muscles, glandes). Une vingtaine de médiateurs chimiques ont été identifiés à ce jour.
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involontaires. Nous verrons que l’ensemble de cette structure assume aussi des
fonctions psychiques et spirituelles.
La structure d’un individu est composée d’une armature osseuse que l’on appelle le
squelette. Ces os sont le support de mouvements, d’efforts conscients et inconscients.
La musculature permet à cet ensemble d’effectuer une multitude de mouvements. Nous
avons près de 400 muscles différents. Imaginez une machine, un robot qui aurait en son
sein 400 moteurs différents pour le faire fonctionner !
L’ossature a pour rôle de protéger les viscères indispensables à la vie. Le cerveau est
protégé par la boîte crânienne. Le cœur, les poumons sont à l’abri dans la cage
thoracique, le foie, la rate, l’estomac, les reins sont bien protégés par les côtes, etc.
Cette ossature participe à notre possibilité de pouvoir être en position érigée
La position debout est la posture humaine de référence.
Elle est organisée pour répondre aux contraintes de la
gravité. Ces 9,81 newtons avec lesquels il ne nous est
pas possible de transiger. Pour rester en position
verticale dans une zone stable, la structure doit pouvoir
se déformer de façon à demeurer dans une position
d’équilibre, sinon c’est la chute. Il faut pour cela que le
centre de gravité se projette et reste dans le polygone
de sustentation surface se situant entre les deux pieds
quand l’individu est debout.
Avez-vous remarqué combien vous êtes fatigué quand
vous êtes obligé de rester debout immobile ? Ceux qui
ont fait leur service militaire connaissent bien les effets d’un garde-à-vous prolongé. Car,
même quand il semble que l’on soit immobile, la structure grâce à la contraction des
différents muscles du corps, ne cesse de corriger l’adaptation à cette pesanteur.
5
Pour en savoir plus
De la même façon, le corps tout en restant immobile peut se déformer et modifier ses
axes articulaires. Même déformée, la structure8 doit rester cohérente, ce sera le rôle des
muscles. L’ensemble des muscles
plus la totalité des os forment un
assemblage que l’on peut comparer
à ce qu’a inventé l’architecte
américain Buckminster Fuller c’est-
à-dire un ensemble de structure
rigide qui tient en équilibre grâce à
l’association de structure souple qui
travaille et se stabilisent
mécaniquement par le jeu de forces
de tension et de compression qui
s’y répartissent et qui s’y équilibre.
C’est le phénomène de la
tenségrité. Ces muscles s'adapteront au prix de contractions plus ou moins fortes.
(Faites l’expérience de rester quelques minutes en déséquilibre ; par exemple, penchez-
vous en avant en prenant appui sur un seul pied, vous allez vite prendre conscience du
travail qu’exercent vos muscles.) Si les choses restent en l'état, les contractions
musculaires finiront par devenir des contractures. Les contractures sont le résultat d’un
état permanent de contraction musculaire. A la longue, cela engendre un déficit de la
vascularisation du muscle et favorise l’installation d’une fibrose entraînant des douleurs,
des gênes, un manque de souplesse, etc.)
8 Jean-François Megret. (2004) La tenségrité-modèle biomécanique pour l'ostéopathie. Apostill pp. 4-16.
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Si la structure reste dans une situation de déformation permanente, les muscles
contracturés ne rempliront plus leur rôle d’information neurosensorielle et, au bout d’un
certain temps, la déformation sera fixée.
D’après les travaux d'Antonio Damasio,9 nous savons que le cerveau est dans
l’obligation d'écouter le corps10. Le cerveau est le chef d’orchestre de cet ensemble. Il
doit tenir compte des renseignements que lui donne l’ensemble des éléments qui
composent le corps.
Prenons un exemple, vous êtes debout, immobile. Vos yeux, votre regard permettent
de vous situer dans l’espace sans rien penser, c'est-à-dire de façon involontaire, votre
corps va garder un bon équilibre. Vous fermez les yeux, vous supprimez le capteur
visuel, mais vous ne tomberez pas, car d’autres capteurs, en particulier ceux de la
plante des pieds et des muscles de la jambe, vont entrer en jeu et compenser le
manque d’information visuelle.
Pour rester dans cet état d’équilibre, vos muscles compensent les déséquilibres
engendrés par cette posture debout immobile. L’exemple le plus simple est celui d’un
bateau qui doit absolument rester stationnaire à la surface de l’eau par rapport à un
point fixe. Il est en relation avec un satellite (on peut assimiler celui-ci aux yeux du 9 Antonio R. Damasio est professeur de neurologie, neurosciences et psychologie. Il est le directeur de l'Institut pour l'étude neurologique de l'émotion et de la créativité de l'Université de la Californie méridionale (University of Southern California) depuis 2005, après avoir été le directeur du département de neurologie de l’Université de l'Iowa pendant 18 ans. Il est également professeur adjoint au Salk Institute d'études de La Jolla et écrivain. Neuroscientifique de renom, ses travaux portent sur l'étude des bases neuronales de la cognition et du comportement. Parmi ses principales découvertes, on notera :
• la mise en évidence des activations des trajets corticaux et sous-corticaux dans la reconnaissance des visages et des objets;
• l'identification de sites neuronaux impliqués dans le processus des émotions; • la démonstration que les émotions sont impliquées dans la prise de décision; • l'identification de régions limbiques et du tronc cérébral suspectés de jouer un rôle dans la
maladie d'Alzheimer. Il a participé aux conférences du Mind and Life Institute, qui a pour but de promouvoir un dialogue entre la science et le bouddhisme.
10 Antonio Damasio, L'erreur de Descartes, éditions Odile Jacob.
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bateau) qui donne à l’ordinateur de bord (le cerveau du bateau) sa position exacte. Le
navire comporte différents moteurs (les muscles) qui lui permettent de rectifier sa
position et d’être dans une relative immobilité.
Chez l’homme, la plupart des fonctions biologiques répondent à des contraintes
complexes. Grâce aux différents capteurs situés dans le corps, elles sont automatisées.
Quand tout va bien, le cerveau est ainsi libéré pour d’autres tâches. Par exemple, vous
marchez en terrain connu, vous pouvez
réfléchir, vous pouvez poser votre regard
sur le paysage. Vous n’avez pas besoin
de surveiller vos pieds. Par contre, si vous
êtes en terrain accidenté ou glissant, vous
serez concentré sur vos pas pour ne pas
tomber, vous ne pourrez pas penser à
autre chose.
Il en est de même pour vos viscères, par
exemple votre ventre, théoriquement il n’y
a aucune raison pour que vous pensiez à
lui. Tous le processus de la digestion est automatique. Mais si vous avez fait un repas
trop lourd, votre ventre va se rappeler à vous, vous serez obligé de penser à lui !
Autrement dit, quand tout fonctionne bien, la régulation de l'activité des boucles
neuronales11 qui lient les récepteurs sensoriels aux effecteurs musculaires
périphériques se fait en mode non conscient.
Nous prenons conscience de tout ce travail lorsqu’il y a un problème. A ce moment-là,
les muscles, les articulations, les viscères deviennent douloureux.
Le cerveau qui a une capacité extraordinaire à localiser les différentes parties du corps
les unes par rapport aux autres peut adapter le corps de façon passagère au monde qui
l’entoure. Mais si cette accommodation doit perdurer, les lampes rouges du tableau de
bord s’allument : douleurs, fatigue, changement du comportement. Nous retrouvons tous
11 Boucle neuronale : c’est une unité fonctionnelle dont l’exemple le plus simple est la présence d’un réflexe. Si on stimule le tendon rotulien, la jambe se met en extension.
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ces signes dans certaines pathologies dues par exemple à des mouvements répétitifs
au cours d’un travail comme le syndrome du canal carpien. (Le syndrome du canal
carpien est un ensemble de signes fonctionnels et physiques liés à la souffrance, par la
compression d’un nerf situé au niveau du poignet, le nerf médian.)
Les travaux de J. P. Roll12 ont démontré qu’un muscle ne pouvait répondre qu’à
l’étirement. Un muscle contracté est un muscle muet. Par exemple, si la structure est
déséquilibrée par rapport à la troisième vertèbre lombaire, centre de gravité du corps,
cela engendre des étirements musculaires d’adaptation, entraînant fatalement des contractures dues à ces tensions permanentes. Le muscle ne pourra plus répondre aux
sollicitations reçues. La lésion ostéopathique s’installe. Nous retrouvons ici la relation
d’Andrew. T. Still entre structure et fonction
12 J.P. Roll chercheur au CNRS dans le département de "Neurobiologie Intégrative et Adaptative"
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Allons maintenant visiter cette structure
La colonne vertébrale n’est pas qu’un assemblage d’os, c’est une organisation qui est déjà un tout.
En haut, elle est liée aux perceptions sensorielles de la tête.
Au milieu, elle est en relation avec la respiration, avec nos émotions.
En bas, elle est reliée à la terre. Sa capacité à vaincre la pesanteur, sa capacité
d’érection traduit la valorisation.
Au contraire, une colonne enroulée vers l’avant peut traduire un état de dévalorisation.
La colonne vertébrale est porteuse d’un symbolisme
plurimillénaire. Les croyances les plus anciennes
accordent des vertus surnaturelles aux os qui la
composent et une signification transcendante à sa verticalité. La tradition judéo-
chrétienne insiste sur sa valeur d’« axis mundi », de catalyseur des énergies. La colonne
est un support, elle représente l’axe de la construction. Elle symbolise la solidité, elle est
l’arbre de vie.
Chez les Celtes, elle est symbolise l’axe du monde, le lien entre le ciel est la terre. Elle
est l’axe du sacré. Dans la Bible et la Kabbale, elle est identifiée à l'échelle de Jacob,
avec ses degrés de la terre au ciel, et sur laquelle montent et descendent les anges,
c'est-à-dire les différentes énergies. L’arbre de vie est l’un des symboles les plus connus
de la géométrie sacrée. La structure de l’arbre de vie est liée aux enseignements de la
Kabbale juive, mais on la retrouve dans l’ancienne Egypte, 3000 ans plus tôt. La
colonne vertébrale permet à l'homme de se sentir en relation avec le cosmos. En Inde
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on la nomme merudanda, le "bâton Meru", Meru étant la montagne cosmique. En Chine,
elle est appelée le "pilier céleste".
Toutes ces interprétations symboliques montrent l’importance de cette structure dans
les différentes civilisations.
L’érection de la colonne vertébrale est le symbole de l’affirmation de soi. Nombreux sont
les hommes qui se sentent consciemment ou inconsciemment dévalorisés. Ils se
tiennent voûtés.
Etudions maintenant les différentes régions de la colonne vertébrale. Dans son entier
la colonne vertébrale comporte une structure « dure » de vingt-neuf os, les vertèbres, et
une structure « souple », les disques placés entre les vertèbres. Grâce à ces disques,
elle est capable d’une certaine souplesse.
Les sept vertèbres cervicales forment une courbure vers l’avant, la lordose cervicale.
Ces vertèbres cervicales, en particulier les deux premières, permettent une importante
rotation de la tête. Grâce à elles, nous pouvons porter le regard ou tendre l’oreille ! La
colonne cervicale est le support du cou par où passent tous les vaisseaux et nerfs qui
entrent ou sortent du crâne. Par ses insertions
musculaires ou aponévrotiques, elle est en
relation avec la langue, avec le pharynx donc
avec la voix. Ce segment de la colonne se trouve
sous le signe d’un chakra, vishuddha : cette zone
ouvre l’accès au Verbe créateur, le "verbe qui
s'est fait chair" et sans lequel il n'y a pas de
compréhension possible de l'incarnation. Sa posture aura une incidence sur la fonction
respiratoire. Les sept cervicales sont les sept cieux (le septième ciel), les sept dvipa ou
étages de la création, "enfilés" sur l'axe du mont Meru au-delà desquels se situe le
monde des dieux.
En ostéopathie, la colonne cervicale est l’objet de toute notre attention. Nous
intervenons de façon spécifique sur les deux premières vertèbres, l’atlas et l’axis. Par
les muscles qui s’insèrent sur elle, elle est en relation avec les mouvements des yeux
(l’oculomotricité) d’une certaine façon avec l’articulation de la mandibule (la mâchoire),
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les autres vertèbres sont plus adaptatives, elles ne se traitent pas par des techniques
manipulatoires. (Attention aux manipulations violentes. Elles sont anti physiologiques et
peuvent avoir un effet délétère à long terme.)
Prenons l’exemple du torticolis. Vous vous réveillez un matin et vous ne pouvez plus
bouger la tête. Le moindre mouvement vous fait hurler de douleur ! Vous pensez que
vous vous êtes déplacé une vertèbre en dormant ! Vous n’avez rien déplacé du tout, vos
muscles du cou ont eu froid et se sont contracturés. L’ostéopathe que vous allez voir en
urgence traite simplement la contracture musculaire. Par contre, il proposera de vérifier
la position de votre langue, car si ces torticolis sont récurrents, il est fort possible qu’en
particulier la nuit, vous respiriez par la bouche. Cela entraîne un problème dans la
thermorégulation du cerveau. Le cerveau est exogène au moment du sommeil
paradoxal (moment du rêve) et il faut le refroidir. C’est le rôle de la respiration nasale.
Quand on inhale de l’air par le nez, il se comprime au passage des narines pour se
décomprimer dans les fosses nasales (il se passe la même chose dans votre frigo). Cet
air se réchauffe au contact du sang artériel qui vascularise les cornets du nez, les
poumons absorbent un air réchauffé. Le sang veineux, lui, est refroidi, il quitte le nez par
une veine qui se jette dans un sinus du crâne ; là, ce sang veineux refroidi va être au
contact d’une artère importante, la carotide. Il se passe un échange thermique entre
sang veineux et sang artériel, le sang artériel participe à la régulation thermique du
cerveau.
Quand on respire par la bouche, ce système ne fonctionne pas. Heureusement, il reste
encore deux possibilités, soit on transpire de la tête et l’évaporation va refroidir des
veines qui se jettent elles aussi dans ce même sinus, si ce système n’est pas encore
suffisant, le cou se met à transpirer, cela refroidit une autre artère qui vascularise une
partie du cerveau et donc contribue à sa thermorégulation. Le seul inconvénient est que
cette transpiration, en s’évaporant, refroidit les muscles du cou qui, eux, ont horreur du
froid, donc se contractent… d’où le torticolis du matin !
Une manipulation cervicale peut changer beaucoup de choses. Mélodie, onze ans, est
venue consulter pour un problème de lenteur. C’est l’institutrice qui a conseillé à la
maman de consulter un ostéopathe. Sa mère me dit : « C'est une enfant bloquée ».
L'anamnèse m'apprend que Mélodie est enfant unique. Pour éviter tout risque de fausse
12
couche, sa maman est restée allongée presque toute la durée de la grossesse. La
naissance s'est passée sous péridurale. Au cours de l’expulsion, Mélodie a absorbé du
liquide amniotique, elle est restée hospitalisée en réanimation durant quinze jours.
L'examen montre quelques faiblesses au niveau respiratoire, le diaphragme semble ne
pas fonctionner à son optimum, la marche a tendance à s'effectuer avec un appui
antérieur (c'est-à-dire qu'elle n'attaque pas le sol avec les talons).
Le premier traitement restera dans une approche structurelle en particulier dans le cadre
d'une ostéopathie crânienne et d'une reprogrammation neuro-fonctionnelle au niveau de
l'appui plantaire et au niveau respiratoire.
A la deuxième consultation, Mélodie marche mieux et respire mieux. Par contre, en
l’examinant, je trouve une lésion ostéopathique de la première cervicale que je traite par
une technique ostéopathique.
A la troisième consultation, sa maman me dit que l'amélioration est notable. La
maîtresse a remarqué une très grande évolution dans le comportement de Mélodie.
Elle-même ne semble plus bloquée et ne présente plus de lenteur.
Je pense que le traitement structurel sur la première cervicale a été le facteur
déclenchant de l’amélioration. Il est certain qu’après cette manipulation, la
vascularisation, en particulier du tronc cérébral, s’est améliorée. Une lésion
ostéopathique de la première vertèbre cervicale, en comprimant l’artère vertébrale, peut
engendrer ce genre de symptôme.
La partie médiane ou colonne dorsale est formée de douze vertèbres auxquelles
s’articulent douze paires de côtes. Elles forment une courbure vers l’arrière, la cyphose
dorsale. La colonne dorsale présente une certaine rigidité qui lui permet de participer à
la protection du cœur et des poumons.
Du point de vue symbolique, la colonne dorsale représente la grande triade des centres
subtils, les chakras : manipura, anâhata, vishuddha13. D'autres équivalences
13 Vishuddha, le cinquième chakra, est situé à la limite entre la colonne dorsale et la colonne cervicale. En ostéopathie c’est une région extrêmement importante.
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traditionnelles la proposent comme les douze mois de l'année, les douze signes du
zodiaque, les douze travaux d'Hercule.
Le chiffre douze indique une totalité, une perfection ; avec lui, donc, un cycle se clôt et
un autre niveau d'être se dévoile comme lieu d'un nouveau travail intérieur.
Certaines vertèbres sont importantes pour l’ostéopathe, il a une action spécifique sur les
première et deuxième vertèbres dorsales, parfois la sixième et très souvent la
neuvième, mais il ne peut dissocier les vertèbres des côtes et c’est justement au niveau
des côtes, à leur partie postérieure que se situe la chaîne ganglionnaire sympathique14.
Le fondateur de l’ostéopathie Andrew T. Still accordait une grande importance à la
mobilité des côtes. Grâce à elles, nous agissons sur le système ortho-sympathique. Il
est intéressant de remarquer que les méridiens d’acupuncture, comme celui de
l’estomac (méridien des émotions) comportent des points sur la face antérieure du
thorax, et que la partie psychique du méridien de la vessie a tous ses points au niveau
des angles costaux. La connaissance de la médecine chinoise est un grand apport dans
la pratique ostéopathique.
Les cinq vertèbres suivantes forment la colonne lombaire qui, elle aussi, présente
une courbure vers l’avant, la lordose lombaire. Ensuite vient le sacrum sur lequel
s’articule le bassin.
Le sacrum est formé de cinq vertèbres qui se soudent les unes aux autres entre l’âge de
quinze et vingt-cinq ans. C’est un os auquel nous portons une grande attention. Il fait
partie du système crânio-sacré. La dure-mère, membrane protectrice de la moelle
épinière, s’insère sur le sacrum et sur l’occiput, une lésion ostéopathique du sacrum a
toujours un effet sur l’équilibre de l’occiput.
Quand vous avez eu un accident de type coup du lapin et que vous souffrez des
14 La chaîne ganglionnaire sympathique, support du système nerveux autonome appelé système ortho-sympathique, constitue le système de l’urgence.
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cervicales, ne soyez pas étonné que votre ostéopathe examine et traite en premier votre
sacrum. En effet, lors de l’accident, la tête a subi un fort ballant, elle est allée
violemment d’arrière en avant, et à travers la dure-mère, qui est une membrane peu
extensible, cela a provoqué une lésion ostéopathique du sacrum. Lésion qu’il faudra
traiter avant de toucher la colonne cervicale.
Enfin, le coccyx est formé de trois à cinq petits os. Ils sont là, pour nous rappeler que
nous sommes issus de l’animal. Ce petit appendice nous pose souvent des problèmes,
en particulier après un traumatisme comme une chute sur les fesses ou après un
accouchement. Nous avons souvent observé des fixations du coccyx dans certains états
dépressifs. Divers traitements, diverses manipulations peuvent être proposées, du
traitement à travers un toucher rectal à des manipulations par voie externe. Il est
impératif de traiter ces douleurs coccygiennes.
Le cas de Blandine peut vous permettre de comprendre qu’il faut sortir du symptôme
pour aller vers la cause. Blandine a 40 ans, elle est secrétaire. Elle est venue consulter
pour une lombalgie récurrente, traitée jusqu’ici par des anti-inflammatoires et des
séances de kinésithérapie.
L’anamnèse m’apprend que, vers l’âge de douze ans, elle a été traitée par la
kinésithérapie pour une attitude scoliotique. Elle n’a pas eu de maladie importante au
cours de l'enfance ni subi de traitement orthodontique. Ses douleurs débutent après la
naissance de son enfant (l’accouchement met en jeu toutes les structures du bassin,
certaines articulations, en particulier les articulations entre le sacrum et les ailes
iliaques, peuvent ne pas retrouver leurs fonctions normales). Elle présente, en plus, une
douleur et une gêne dans l’épaule droite. Elle m’apprend qu’elle ne peut rester debout
immobile trop longtemps, car cette attitude déclenche les douleurs dans la région
lombaire, elle a peur du vide, elle n’aime pas lire, car elle fatigue à la lecture.
Je l’examine : Blandine est en postériorité, elle présente de grosses tensions dans la
région lombaire. J’observe des perturbations des muscles oculomoteurs, la poursuite
d’une cible se fait par saccades, elle a de la difficulté à faire converger ses yeux.
Il n’y a pas de problème dentaire, l’occlusion est correcte.
La prise de pouls me conduit à examiner la région dorsale haute. La première vertèbre
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dorsale est fixée (ce qui explique sa difficulté à rester debout immobile), Blandine
présente une forte tension des muscles postérieurs du cou et une douleur de
l’hypochondre droit (cause de ses problèmes à l’épaule droite).
Le traitement est resté dans l’approche structurelle. J’ai d'abord libéré la zone dorsale
haute, puis je me suis intéressé à son problème d’épaule et, comme un bon rebouteux,
j’ai travaillé sur le nerf qui innerve le diaphragme, le nerf phrénique.
Après ce premier traitement, elle s’est redressée, les yeux sont plus mobiles.
Je l’ai revue un mois plus tard, les pouls sont maintenant corrects, les signes cliniques
ont tous disparu, seule subsiste une légère fatigue à la lecture. J’ai juste normalisé la
région sous-occipitale. Maintenant tout va bien.
La création des courbures Ces courbures nous différencient de l’animal. Comme le singe, le bébé ne présente
qu’une seule courbure à sa naissance.
Au début de son existence, le bébé est
couché sur le dos, puis il commence par
rouler d’un côté et de l’autre. Les jours
passant, il arrive à se mettre à plat ventre et
relève la tête pour observer son
environnement. C’est ainsi que se crée la
lordose cervicale. Enfin, au bout de
quelques mois, le bébé se redresse, on
parle d’hominisation et c’est à cette étape
que les courbures se mettent en place. Au
début il ne peut rester bien longtemps dans
cette position, progressivement et surtout s’il trouve de l’intérêt dans ce qu’il observe, il va bouger et par là même
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commencer à créer une bonne musculature.
La courbure cervicale et sa grande mobilité ne peuvent s’aborder qu’à travers la mobilité
de la tête. Le haut de la colonne vertébrale comporte deux vertèbres atypiques. Ce sont
l’atlas et l’axis. Sur l’atlas, la première vertèbre, le crâne peut se mouvoir de bas en
haut. Sur l’axis, il peut effectuer une rotation de droite à gauche et vice-versa. Grâce à
cette mobilité, on peut porter le regard vers le haut, le bas ou sur les côtés. Porter le
regard, c’est aller vers l’extérieur, c’est sortir de soi.
La courbure lombaire arrive plus tard, lorsque le bébé commence à se hisser sur ses
jambes. Quand il est assis, les fémurs sont tournés vers l’avant et pour se dresser, il doit
amener ses jambes sous le tronc. Cette rotation entraîne une bascule du bassin. La
lordose lombaire se forme grâce à cette rotation. La musculature suit ce développement,
ce qui permet à l’enfant de se tenir droit.
La stabilité de l’assemblage est assurée par des ligaments et des muscles. Cet
empilement d’os garde souplesse et élasticité pour pouvoir réagir à une charge.
La colonne vertébrale fait le lien entre les jambes qui soutiennent le bassin et la tête
avec entre les deux le tronc et, suspendue au haut de la cage thoracique, la ceinture
scapulaire (les épaules) et les bras.
Observez une colonne vertébrale et vous remarquerez que les vertèbres du haut ont un
corps assez fin alors qu’en bas leur corps est nettement plus gros. Cela est dû aux
pressions que subissent ces différents os.
Quand vous vous levez le matin, la colonne commence à supporter, sous l’effet de la
pesanteur, le poids de la tête, des bras et du tronc. Dans la journée, vous êtes
constamment confrontés de façon dynamique à la pesanteur. Ces 9,81 newtons ne vont
pas cesser de peser sur votre colonne vertébrale, ni la musculature de contrebalancer
cette force, vous allez dépenser de l’énergie, cela se traduit par une fatigue. Les
disques intervertébraux auront perdu un peu de hauteur en fin de journée et quand vous
vous coucherez votre taille par rapport au matin aura légèrement diminué.
La pesanteur, nous ne pouvons pas l’éviter.
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Nos émotions, nos sentiments La colonne subit la pesanteur… mais que penser des soucis, du stress qui nous font
dire : « Je n’en peux plus, j’en ai plein le dos ! Je n’en peux plus de supporter tout
cela ! »
Le stress nous pourrions peut-être l’éviter.
Respiration et émotion
La respiration a une influence sur l’état de la colonne vertébrale. A chaque expiration on
s’affaisse, à chaque inspiration on se redresse. Quand les poumons se remplissent
d’air, les côtes ouvrent le gril costal, le diaphragme écarte la base du gril costal, la
cyphose dorsale se redresse. Vous avez remarqué que vos émotions peuvent changer
le rythme, la fréquence et l’amplitude de votre respiration. Vous respirez différemment
selon que vous éprouvez un sentiment de joie ou au contraire que vous êtes dans la
peine ou en situation de stress.
Un sentiment de joie vous valorise. Votre respiration devient plus ample (je respire la
joie), vous vous redressez. Quand vous subissez une situation ou quand vous avez de
la peine, vous vous enroulez vers l’avant, comme si vous n’existiez plus, comme si vous
ne valiez plus rien. Vous en avez plein le dos ! Vous manquez d’air ! Tu me pompes
l’air ! Les expressions populaires sont toujours très significatives.
Avez-vous pensé à retrouver le calme ?
En examinant nos patients, nous remarquons que certaines zones de la colonne
vertébrale ont perdu leur mobilité ou sont en restriction de mobilité. Nous allons trouver
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la région sous-occipitale, la jonction entre le cou et le thorax et la jonction entre le dos et
la région lombaire.
Si quelqu'un se plaint de cervicalgie et en particulier de la région sous-occipitale, nous
allons vérifier plusieurs fonctions qui peuvent causer ce genre de douleur.
Nous demandons si la personne n’a pas subi un whyplash (un coup du lapin).
Dans un accident de transport, lorsqu’il y a un violent choc, avant, arrière ou sur le côté
la tête subit un fort ballant qui se transmet jusqu’au sacrum. Nous pouvons trouver ce
genre de lésion après une chute sur les fesses. Cela aura pour conséquence une
fixation ou un manque de mobilité entre l’occiput, l’atlas et l’axis.
Nous vérifions l’oculomotricité (la fonction des muscles des yeux) lorsque nos patients
se plaignent de fatigue oculaire. S'ils ne prennent plus de plaisir à lire, s'ils n’aiment plus
conduire la nuit, sont gênés par les phares, quelques tests simples confirment le
problème. Face à un tel dysfonctionnement, nous allons systématiquement vérifier
l’occlusion dentaire. En effet, nous avons remarqué qu’il y avait une corrélation entre
l’occlusion et l’oculomotricité.
Nous vérifions l’occlusion dentaire. Quand nous examinons la bouche de nos patients,
combien voyons-nous d’édentation, de dents mal soignées. Très souvent nous
observons la présence de différents métaux utilisés pour une obturation ou pour la
fabrication d’une couronne, la coexistence de ces différents métaux peut induire un effet
de pile électrique avec pour résultat les conséquences d’une électrolyse. Souvent, nous
observons des malocclusions dont l’origine est diverse. Certaines sont apparues de
longues années après un traitement orthodontique, en particulier quand il y a eu des
extractions dentaires en raison d'un soi-disant manque de place15. Ces malocclusions
peuvent s’installer après un traumatisme en particulier après un whiplash ou encore
après un déséquilibre des chaînes musculaires.
Pour en savoir plus
15 Le manque de place est dû dans la plupart des cas à une langue basse qui ne remplit pas son rôle dans l’élargissement transversal de l’os maxillaire.
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Sans entrer dans les détails, il faut savoir que les muscles ne sont ni isolés ni
indépendants. Ils sont les chaînons d’un ensemble complexe nommé chaînes
musculaires. Vous entendrez votre ostéopathe vous parler de chaîne antérieure,
postérieure, chaînes croisées, etc. L’état de ces chaînes musculaires est très important
dans l’équilibre occlusal et ne soyez pas étonné que votre praticien examine vos pieds,
votre bassin dans le cas de douleurs dues à une malocclusion.
Notre consœur Godelieve Denys-Struyf à particulièrement bien étudiée l’ensemble de
ces chaînes musculaires, elle a su ajouter au côté mécanique de ces muscles une
approche émotionnelle.
Nous vérifions la posture. La
région sous-occipitale est le lieu
d’insertion des muscles nucaux,
muscles qui font partie des
référentiels posturaux (ces
petits muscles sont très riches
en propriocepteurs et sont très
sensibles aux perturbations de
la posture).
Quand un patient se plaint de douleurs dorsales hautes, il dit avoir du mal à tenir sa tête
ou encore être toujours fatigué, déprimé.
Charles, quinze ans
Sa maman le conduit à ma consultation, car Charles se plaint souvent du dos, il est
toujours fatigué. L’anamnèse m’apprend que sa mère a eu une grossesse difficile.
L’accouchement fut laborieux. Il a fallu utiliser une ventouse pour aider Charles à sortir.
Il n’y a rien à signaler au cours de l’enfance.
L’examen montre un léger déséquilibre du rachis. L’atlas (première vertèbre cervicale)
est fixé du côté droit. La chaîne musculaire postéro-latérale droite est en contraction. Il
existe une douleur sur l’articulation temporo-mandibulaire droite. Les muscles antérieurs
du cou sont contracturés. Charles a de la difficulté à contracter sa langue vers la droite.
Le traitement de Charles a été simple. J’ai soigné toutes les contractures de la chaîne
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musculaire en cause, j’ai utilisé quelques techniques sur la langue, une technique
manipulative sur la première cervicale.
La mise en place des symptômes dont se plaignait Charles pouvait être due à sa
naissance. Le crâne ne présentait ni déformation ni perturbation du MRP (mouvement
rythmique primaire du crâne). Je pense, et les résultats cliniques l’ont prouvé, que cet
accouchement difficile a perturbé l’équilibre des chaînes musculaires d’où ce traitement.
Pour le lecteur curieux
La mécanique de la colonne vertébrale
Notre structure s’inscrit dans l’espace suivant les coordonnées X, Y, Z. L’ostéopathe
John Wernham16 décrit une première ligne qui part de la partie
antérieure du foramen magnum (le trou occipital où s’articule
la colonne vertébrale avec le crâne) pour se terminer à la
pointe du coccyx. C’est la ligne gravitaire qui passe par L3,
troisième vertèbre lombaire, le centre de gravité du corps.
C’est l’axe Z. C’est autour de cette ligne et de part et d’autre
de L3 que le corps va s’adapter. La structure rachidienne
pourra tourner autour de cet axe Z, fléchir en avant sur l’axe X
ou sur le côté sur l’axe Y.
La structure doit s’adapter à la position de L3. Si l’adaptation
n’est pas possible, il se créera une courbure de compensation.
L’adaptation est due aux réponses musculaires. 16 John Wernham, ostéopathe anglais de la première heure et professeur à l’Europeen School of Osteopathy, notes sur les principes de l’ostéopathie dans les différents Years books.
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La région définie par les vertèbres lombaires L1, L2, L3, supporte les insertions du
diaphragme. Nous verrons que cette région peut être très sollicitée au moment de la
naissance lors du premier inspir. Cette zone est
extrêmement importante, car c’est là que se termine
la moelle épinière, c’est aussi le territoire de jonction
entre deux systèmes neurovégétatifs, le système
ortho-sympathique et le système para-sympathique.
John Wernham décrit aussi des lignes qui forment
deux pyramides inversées. Une pyramide supérieure
dont la base est le foramen magnum. Le sommet de
cette pyramide se situe en avant de D4, la quatrième
dorsale. Une pyramide inférieure, dont la base, se
situe au niveau du bassin, cette surface comprend les
deux acétabulums (les deux surfaces articulaires où
viennent s’emboîter les têtes du fémur) et le coccyx.
Le sommet se situe au niveau de D4.
Ces deux pyramides répartissent les forces
action/réaction. Action : force descendante, réaction :
force montante équilibrant la première.
On voit comment un simple déséquilibre du bassin a
une influence sur l’équilibre de la tête, d’où des
tensions musculaires, des céphalées. Ce déséquilibre
peut retentir sur la mandibule, donc sur l’occlusion.
L’interprétation de ce schéma permet de visualiser les effets d’un déséquilibre du rachis
sur les muscles nucaux, entraînant une perturbation dans le fonctionnement des
muscles de l’œil, des fatigues visuelles, des céphalées, des vertiges.
Un autre exemple. Pour une cause indéterminée, un patient a fixé une articulation
sacro-iliaque (articulation du bas de la colonne vertébrale). Les muscles péri-articulaires
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vont se contracter, ils perdent leur capacité neuro-sensorielle17. La structure va
s'adapter autour de ce point fixe. Nous observons un retentissement à la fois sur les
membres inférieurs puis sur l'équilibre de la colonne cervicale. Quelque temps plus tard,
cela peut prendre des années, nous aurons une réponse sur la région du crâne. Nous
pourrons alors observer des vertiges, des acouphènes, des troubles visuels et des
perturbations du système occlusal.
Le bassin A travers le bassin, les membres inférieurs sont suspendus à la colonne vertébrale.
Le bassin fait la transition entre la colonne et les jambes. On peut dire qu’il est la voûte
qui relie les jambes entre elles. Le sacrum étant la clé de voûte.
Cette structure solide, massive, supporte les divers organes vitaux du bas-ventre.
Une première relation entre l’intérieur et l’extérieur se traduit par les émonctoires de nos
fonctions internes. Les selles et les urines quittent notre intérieur par le colon ou gros
intestin et la vessie. Ces deux organes ont chez les animaux la fonction de marquer le
territoire. Les mammifères urinent ou posent leurs fèces aux limites de leur territoire. Il
ne faut pas oublier que – même supérieurs - nous sommes des mammifères !
Inconsciemment, nous marquons aussi notre territoire. On connaît les conflits
engendrés par des pertes de territoire, le stress, la dépression, etc.
Le bassin est aussi le lieu qui abrite les organes génitaux surtout pour la femme ; et
c’est par là que l’enfant quitte le monde intérieur de la mère pour aller dans le monde
extérieur. Passage délicat qui peut s’effectuer dans des souffrances, des émotions imprimées pour la vie.
17 Fonction neuro-sensorielle : la sensorialité naît de l'ensemble des informations afférentes qui, issues des récepteurs sensoriels (rétine, vestibule, cochlée, récepteurs olfactifs et gustatifs), donnent lieu à une sensation extra-corporelle consciente de l’environnement individuel.
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Le bassin est le point d’insertion d’une grande partie des muscles du dos, du ventre et
des jambes. Le grand fessier est un des muscles les plus puissants du corps. Associé à
d’autres muscles, il permet de lever et de maintenir le tronc vertical.
En position debout, le tronc est en équilibre sur le bassin, en équilibre sur les deux
hanches. Nous pourrions imaginer une balance dont le tronc serait le fléau. Les muscles
qui s’insèrent sur le bassin et sur les jambes permettent un réglage très fin de cet
ensemble. Du reste, de nombreuses chaînes musculaires se croisent à ce niveau.
Vous avez pu remarquer que certaines personnes ont des
fessiers très développés et que d'autres n’ont pas de fesse du
tout. Eh bien, cela est dû à la pesanteur !
Ceux qui ont des fessiers, des cuisses bien développées, sont
des pousseurs, ils marchent en poussant avec les fesses. Au
cours de leurs déplacements, la ligne gravitaire du corps
passe en arrière des têtes de fémur. Ces personnes se
tiennent très droites.
Chez les autres, la ligne gravitaire
passe en avant des têtes fémorales.
Le tronc est légèrement penché en
avant, ils n’ont pas besoin de pousser.
Ils ont des fesses plates, les muscles
des jambes sont graciles. C’est le déséquilibre avant qui fait
avancer la jambe.
Les jambes La jambe est formée de trois os : le fémur qui s’attache au
bassin, le tibia et le péroné qui se posent sur le pied à travers un
os, l’astragale.
Si, grâce à la musculature, la colonne vertébrale se redresse en un processus continuel,
il en va autrement des membres inférieurs. En effet, quand il se met debout, l’homme
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prend complètement appui dans sa structure osseuse. Ce sont les ligaments qui
verrouillent le genou sur le fémur et le fémur sur le bassin.
Lorsqu’on tend la jambe, les ligaments du genou se tendent fortement. Le fémur et le
tibia sont en position de rigidification. Il en est de même pour la jonction entre le fémur et
le bassin. Les ligaments de la tête du fémur font comme un effet de vis qui solidarise
très fortement la tête du fémur dans la cavité glénoïde du bassin.
Cet ensemble jambe-bassin-pied est à la fois une structure extrêmement solide et rigide
quand on se tient debout immobile ou quand le tronc prend appui sur les jambes pour
exécuter certains mouvements comme soulever une charge. C’est aussi une structure
très souple, adaptée à la marche, à la course, au saut, grâce aux différentes
articulations, en particulier celle du genou.
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Le genou L'articulation du genou supporte le poids du corps, elle se situe entre l'extrémité
inférieure du fémur et l'extrémité supérieure du tibia. Entre ces deux extrémités,
condyles fémoraux et plateaux tibiaux recouverts de cartilage, s'interposent deux
ménisques interne et externe.
Les ligaments maintiennent en contact le fémur et le tibia : en périphérie ce sont les
ligaments latéraux, ligament latéral interne et ligament latéral externe. Au centre du
genou sont situés les ligaments croisés : ligament croisé postérieur et ligament croisé
antérieur.
Le fonctionnement du genou est complexe. Cette articulation doit en effet être mobile
tout en restant stable. Les mouvements du genou sont essentiellement des
mouvements de flexion (le genou plie) et des mouvements d'extension (le genou se
redresse). S'y associe un mouvement de rotation. Les ménisques et les ligaments
permettent de conserver la stabilité sans entraver la mobilité.
Hormis le traumatisme direct, les pathologies du genou vont dépendre de l’équilibre
du bassin ou du pied.
Le genou a aussi une connotation d’ordre métaphorique que l’on entend dans les
expressions mettre quelqu’un à genoux ou être sur les genoux. Nous verrons ces
connotations dans le chapitre sur le décodage.
Le pied est extrêmement riche en capteurs sensoriels
Par ses pieds, l’homme entre directement en contact avec la terre. Le pied présente tout
un système fonctionnel d’os, de tendons, de muscles, où chaque partie est dépendante
de l’autre. C’est une architecture complexe qui est là pour amortir le poids du corps au
cours de la marche, mais aussi informer le cerveau sur la qualité du sol, les obstacles
qu’il peut rencontrer. Réalisez que vous pouvez marcher, courir en tout terrain sans
presque regarder où vous posez les pieds. Les contacts au sol peuvent se traduire par
trois grands points d’appui, le calcanéum, la tête du premier métatarsien et la tête du
cinquième métatarsien.
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Si on compare le pied de l’homme à celui des animaux, même à ceux de nos cousins
les singes, on observe que chez l’homme l’astragale est au-dessus du calcanéum, ce
qui permet d’avoir un appui postérieur, alors que chez les animaux, astragale et
calcanéum sont côte à côte. Ce qui donne des pieds plats. Il est vrai que même les
grands singes ne sont pas souvent en posture érigée.
Ces trois points d’appui forment trois arches. Une arche antérieure entre le pouce et le
petit orteil, une arche interne entre le pouce et le calcanéum, une arche externe moins
visible entre le cinquième orteil et le calcanéum en passant par l’os cuboïde. Ces trois
arches présentent une certaine souplesse. Le pied joue bien le rôle d’amortisseur. Très
souvent, lors de certaines pathologies, douleurs du rachis, c’est la perte d’élasticité du
pied qui est en cause.
La confrontation de la pesanteur sur la structure est à son maximum au niveau du pied.
Quand l’arche est écrasée, c’est le pied plat. Ce qui peut aussi se traduire par l’homme
vaincu par la pesanteur !
Si vous regardez les pieds d'un bébé, il a des pieds potelés, les arches ne sont pas
visibles et c’est uniquement lors de l’apprentissage de la marche que les voûtes se
forment. Il faudra attendre l’âge de six ans pour que les voûtes apparaissent.
Les pieds sont le point de départ de chaînes musculaires. Je pense à ce patient, Frantz,
vingt-quatre ans. Il est venu consulter, car il est irritable, il se sent bloqué.
L’anamnèse nous apprend que, bébé, il a fait une chute de la table à langer. En
primaire, à l’âge de 6 ans, il a subi un gros traumatisme sur le pied, il est hospitalisé et
le chirurgien l'ampute du gros orteil droit.
Le premier traitement fut essentiellement axé sur le rééquilibre de sa structure. En effet,
l’amputation du gros orteil (le gros orteil est le gouvernail du pied, le muscle fléchisseur
de cet orteil est le dernier muscle anti-gravitaire, pendant la marche, c’est lui qui, en
dernier lieu, propulse le corps en haut et en avant) a provoqué une perturbation de
l’équilibre des chaînes musculaires (les chaînes musculaires sont un ensemble de
muscles qui vont, par exemple, des muscles du pied aux muscles s’insérant sur le
crâne). Chez Frantz, j’ai noté une grosse perturbation de la chaîne musculaire depuis le
gros orteil droit jusqu'au muscle temporal gauche. Au cours de cet examen, j’ai
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remarqué aussi un rythme crânien (MRP) très lent. J’ai pensé à cette chute, le whiplash
subi à cette occasion était présent. Le traitement structurel a suffi à le rééquilibrer.
Le membre supérieur
Les bras et les mains
La première observation est que les membres supérieurs ont été libérés grâce à la
station debout. C’est par eux que l’homme peut exprimer son moi intérieur, c’est au
moyen de ces deux appendices qu’il peut aborder le monde en conquérant et qu’il
communique.
La ceinture scapulaire avec l’omoplate et la clavicule repose sur le thorax à sa partie
antérieure et postérieure. La clavicule s’articule, notamment, avec le sternum par une
articulation en forme de selle, qui permet des mouvements dans les trois plans de
l’espace. De fait, l’articulation sterno-claviculaire est le seul point de contact des bras
avec le reste du squelette. Les bras se meuvent autour de ce point fixe.
Ils se rattachent à l’omoplate par l’articulation gléno-humérale. Autant l’articulation entre
le bassin et le fémur a la possibilité de se verrouiller, autant l’articulation entre l’humérus
et l’omoplate reste dans une grande liberté, car la cavité glénoïde de l’omoplate est
plane. Cette articulation sera très sensible à l’équilibre des chaînes musculaires qui
l’entourent.
La mobilité est encore accrue avec l’articulation de l’humérus et les deux os de l’avant-
bras. En effet, c’est grâce à cette articulation que la main peut exécuter une rotation de
l’intérieur vers l’extérieur appelée pronosupination. Quand la main regarde vers
l’intérieur, les deux os de l’avant-bras sont croisés. Quand elle regarde vers l’extérieur,
les deux os sont parallèles.
Dans l’architecture des bras, tout est fait pour interpréter les sentiments. Grâce à eux
nous pouvons traduire ce que nous vivons intérieurement, les bras grands ouverts
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manifestent la joie, le don de soi, le refuge, la force. Les bras fermés sur la poitrine sont
le signe d’un repli sur soi. Au cours de l’anamnèse, le praticien ne se contente pas d’être
à l’écoute, mais il observe les attitudes de son patient. La parole est la traduction du
cerveau gauche, alors que la gestuelle est l’expression du cerveau droit, l’émotionnel.