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Lille 2, université du droit et de la santé Ecole doctorale des sciences juridiques, politique et de gestion (n°74) Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales Le lien d’emploi et le tiers dans le cadre du prêt de main d’oeuvre. Mémoire présenté et soutenu en vue de l’obtention du Master Droit « recherche », mention « droit du travail » Droit privé par Céline REGULSKI Sous la direction de M. Pierre-Yves Verkindt Année universitaire 2005-2006

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Lille 2, université du droit et de la santé

Ecole doctorale des sciences juridiques, politique et de gestion (n°74)

Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales

Le lien d’emploi et le tiers dans le cadre du prêt de

main d’œuvre.

Mémoire présenté et soutenu en vue de l’obtention d u Master Droit

« recherche », mention « droit du travail »

Droit privé

par Céline REGULSKI

Sous la direction de M. Pierre-Yves Verkindt

Année universitaire 2005-2006

Sommaire

Sommaire..............................................................................................................2

Table des abréviations........................................................................................3

Introduction.........................................................................................................5

titre i – LA création du lien d’emploi et le tiers..............................................8

titre II – la vie du lien d’emploi et le tiers.......................................................46

Rappel et synthèse des conclusions intermédiaires : .....................................69

Bibliographie :...................................................................................................70

Table des matières.............................................................................................74

Ce mémoire a été publié le 28 novembre 2006 avec l’autorisation de l’auteur etl’approbation du jury de soutenance sur http://edoctorale74.univ-lille2.fr

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TABLE DES ABRÉVIATIONS

ANPE : Agence nationale pour l’emploi

Arr. : Arrêté

Art. : Article

C. civ. : Code civil

C. trav. : Code du travail

CA : Cour d’appel

Cass. : Cour de cassation

Cass. Soc : Cour de cassation, chambre sociale

CDD : Contrat de travail à durée déterminée

CDI : Contrat de travail à durée indéterminée

Cf. : confère

CJCE : Cour de justice des Communautés Européennes

Recueil Dalloz

Dir. : Sous la direction

DDOS : diverses dispositions d’ordre sociales

Dr. Soc. : Droit social.

Ed. : Édition

ETT : entreprise de travail temporaire

ETTP : entreprise de travail à temps partagé

JCP : Juris-classeur périodique

JCPE : Juris-classeur périodique, édition Entreprise

JO : Journal Officiel

n° : numéro

OIT : Organisation internationale du travail

Ord. : Ordonnance

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RDSS : Revue de droit sanitaire et social

Sem. Soc. Lamy : Semaine sociale Lamy

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Introduction

« Tout juriste est un conservateur »1, si tel est le cas le droit également est conservateur à

plusieurs titres. Exemple prégnant de cette affirmation : la forme des relations de travail en

droit du travail. Notre droit du travail s’est construit sur de nombreux principes. Il s’est

notamment construit sur un modèle de la relation de travail : la relation bilatérale. Ne dit-on

point que la relation de travail est un « rapport juridique qui lie l’employeur et le salarié et a

presque toujours source dans un contrat »2. Mais aujourd’hui se développe de plus en plus de

relations de travail tripartites, à titre d’exemple on peut citer l’innovation du travail à temps

partagé3.

Les développements qui suivent seront consacrés à l’étude de certaines de ces relations de

travail tripartites, appelées autrement prêt de main-d’œuvre. Le prêt de main-d’œuvre est « un

contrat par lequel un employeur met temporairement un de ses salarié à la disposition d’un

autre employeur »4, trois personnes existent à la relation de travail. Le droit du travail est

construit différemment, et aborde avec appréhension ce phénomène. Pourtant si le prêt de

main-d’œuvre se développe c’est qu’il doit y exister un certain intérêt.

Dans l’étude qui suit nous ne nous intéresserons qu’à certaines formes de prêt de main

d’œuvre. Ce que nous recherchons à étudier se sont les relations que nouent les trois

personnes à la relation de travail. La sous-traitance est exclue du champ d’étude à ce titre, car

en l’espèce se sont des relations d’entreprises à entreprises et non de personnes à personnes

1 RIPERT (G.), Les forces créatrices du droit, LGDJ, Paris, 2ème éd., 1955, n°3, p. 8.2 CORNU (G.), Association Henri Capitant, Vocabulaire juridique, 7ème éd revue et augmentée avec

locutions latines, Quadrige. Dicos poche, Paris : Presses universitaires de France, 2005, 970 p.3 Loi n°2005-882, 2 août 2005 art 22, JO 3 août 2005.4 CORNU (G.), préc.

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qui se nouent. De plus les associations intermédiaires1 qui ont pour finalité d’aider à

l’insertion des personnes en difficultés par l’intermédiaire du prêt de main-d’œuvre, ne seront

pas étudiées. Elles présentent un caractère d’aide à l’emploi par l’Etat, or nous étudions les

formes de prêt de main-d’œuvre réalisées dans un but non défini par des politiques

d’insertion.

Pour certains le prêt de main-d’œuvre facilite l’accès à l’emploi en général. La notion

d’emploi est utilisée en deux sens dans le vocabulaire juridique2. Au sens « macro-

économique », l’emploi signifie de façon générale la situation de l’emploi en France par

exemple. Cette acception ne correspond pas au sens de l’étude, même si elle restera en toile de

fond. Mais se sont les relations nouées entre des personnes qui sont l’objet de l’étude. En droit

privé l’emploi peut être considéré au sens « micro-économique » collectif, on parlera de l’état

de l’emploi dans l’entreprise par exemple. En un sens individuel, on parlera de la situation du

salarié, le « titulaire » de l’emploi. C’est en ce dernier sens que nous aborderons la notion,

l’emploi est le poste de travail occupé par le salarié. Pour embrasser les relations des

personnes, dont le titulaire de l’emploi, dans le cadre du prêt de main-d’œuvre nous ne nous

baserons pas au niveau des relations de travail. Cette notion n’est que trop emprunte du

caractère bilatéral, elle n’englobe que deux personnes. Les relations que nous voulons étudier

font entrer en jeux trois personnes au moins. Il sera fait appel à la notion de lien définie

comme telle : c’est un « rapport juridique unissant deux ou plusieurs personnes en vertu d’un

acte ou d’un fait juridique qui est à la fois effet de droit et situation juridique, source de droits

et d’obligation »3. Cette notion correspond mieux à la situation que nous cherchons à cerner,

mais pas totalement. La situation en question, comprend non seulement les relations du salarié

avec les employeurs en cause mais aussi ses relations avec le reste de la collectivité de

travail ; dans une entreprise le salarié n’entretien pas que des relations avec son employeur. La

vie du salarié dans l’entreprise est plus large. Le contrat de travail réunit un salarié et un

employeur, mais l’activité « travail », comprise dans sa durée, réunit le salarié à la

communauté de travail. La notion qui rend parfaitement compte de la situation est la notion de

lien d’emploi. En effet, le terme emploi désigne, notamment, « une dimension particulière du

contrat de travail, la relation de travail saisie dans la durée »4 ; le lien d’emploi est donc

1 Loi n° 98-657, 29 juill. 1998 relative à la lutte contre les exclusions.2 GAUDU (F.), La notion juridique d’emploi en droit privé, Dr. Soc., mai 1987.3 CORNU (G.), préc.4 GAUDU (F.), Les notions d’emploi en droit, Dr. Soc., juin 1996, p. 569.

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l’ensemble des rapports juridiques unissant le salarié aux employeurs et à la communauté de

travail à l’occasion de la relation de travail , relation saisie dans la durée.

Ce lien d’emploi est présent dans toute relation de travail, bilatérale ou tripartite. La relation

tripartite de travail est caractérisée par l’intervention d’un tiers à la relation de travail. Une

question vient à l’esprit, pourquoi faire intervenir un tiers. Pour certains l’intervention d’un

tiers est facteur de précarité (les syndicats par exemple), pour d’autres elle est facteur d’une

aide dans la recherche d’emploi, elle est bénéfique. Constat hétérogène qui pousse à se

demander si l’intervention d’un tiers à la relation de travail, prise en sa dimension

individuelle, est-elle facteur de renforcement ou de fragilité du lien d’emploi ?

La question est posée, il reste à savoir à quel type de prêt de main-d’œuvre il faut l’appliquer.

Le travail à temps partagé, nouvelle forme de mise à disposition des salariés est organisée telle

qui suit : une entreprise de travail à temps partagé, met à disposition d’entreprises clientes ses

salariés. La définition correspond tout à fait à la recherche. Le travail temporaire bénéficie de

la même définition, forme de travail apparue en premier lieu aux Etats-Unis, elle se développe

en Europe après la seconde guerre mondiale. Ses textes fondateurs sont, en droit du travail

français, la loi du 3 janvier 1972 inspirée par l’accord d’entreprise Manpower-CGT du 9

octobre 1969. Les groupements d’employeurs ont été institués par la loi du 25 juillet 1985.

Leur objet est de permettre aux entreprises membres du groupement de recourir à des salariés

mis à leur disposition par ce dernier ; autre forme et même principe. Enfin, une dernière forme

de prêt de main-d’œuvre sera étudiée : le portage salarial. Cette pratique, dans laquelle un

salarié est prêté par une société de portage à des entreprises clientes, ne fait cependant l’objet

d’aucun texte législatif. Mais elle correspond au champ d’étude. Quatre formes de prêt de

main-d’œuvre seront étudiées, elles sont les formes qui, en droit français, permettent à un

employeur de mettre à disposition ses salariés.

La finalité de cette étude est d’étudier et de comprendre l’impact de l’intervention d’un tiers à

la relation de travail sur le lien d’emploi. A cette fin, nous allons mettre en valeur l’impact du

tiers sur la création (Titre I.) puis sur la vie (Titre II.) du lien d’emploi. Le lien d’emploi se

décompose en effet en deux stades, le moment de sa création et celui de son accomplissement

ou de sa vie. En dressant le tableau de l’impact du tiers aux différents stades d’existence du

lien d’emploi nous pourrons déterminer, par synthèse, l’impact sur le lien d’emploi lui-même.

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TITRE I – LA CRÉATION DU LIEN

D’EMPLOI ET LE TIERS

Nous allons ici nous poser une première question : la présence d’un tiers à la relation de

travail a-t-elle un impact sur la création du lien d’emploi ? Autrement dit, dans le cadre du

champ d’étude précédemment délimité, l’existence d’un tiers facilite-t-elle ou rend-elle plus

difficile la création du lien d’emploi ? La création du lien d’emploi étant entendue comme les

différentes étapes qui existent entre le moment où le salarié est sans emploi et celui où il

travaille. Avant d’accéder à un emploi le salarié devra être embauché par un employeur qui

sera alors son « employeur de droit », l’employeur qui le prêtera, situation classique. Mais

dans le cadre du prêt de main-d’œuvre, il existe une étape entre la phase de recrutement et

celle de l’accès à l’emploi. En effet, le salarié est embauché par « l’employeur de droit » mais

il travaillera, et donc accédera à un emploi, dans l’entreprise d’un autre employeur : Il existe

ici deux temps lors de la création du lien d’emploi.

Le premier temps est donc le recrutement du salarié. Cette phase fait entrer en scène deux

personnes, le salarié et « l’employeur de droit ». Mais il existe un particularisme que l’on

connaît par avance, cette embauche aura pour finalité de recruter un salarié qui sera prêté et

non un salarié qui travaillera dans l’entreprise de « l’employeur de droit ». L’emprunte du tiers

à la relation de travail existe déjà. La question à laquelle il faudra répondre c’est quelle est la

force de cette emprunte sur l’embauche. Cette emprunte ou ce particularisme a-t-il un impact

sur l’activité de recrutement. Le tiers n’agit pas directement ici, mais il existe tout de même

dans ce que l’on peut appeler l’optique du recrutement : le salarié sera embauché dans

l’optique d’être prêté. Ce qu’il faut savoir, c’est si malgré son absence le tiers exerce tout de

même une influence dans la phase de recrutement. Si c’est le cas, cette influence renforce-t-

elle ou fragilise-t-elle la phase de recrutement, démembrement de la création du lien d’emploi

(Chapitre I).

Le second temps de la création du lien d’emploi dans le cadre du prêt de main-d’œuvre se

situe entre la phase de recrutement une fois terminée et le moment où le salarié travaillera

effectivement, l’accès à un emploi. On sait que le salarié une fois embauché devra être prêté

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pour accéder à un emploi, c’est la définition du prêt de main-d’œuvre. L’impact de l’existence

du tiers sur la création du lien d’emploi est ici flagrant puisqu’il existe une seconde étape à

cette création. Etape que l’on ne retrouve pas lors d’une embauche « classique ». Mais

l’existence d’une seconde étape ne signifie pas forcément que la création du lien d’emploi est

fragilisée. Cette étape supplémentaire peut être bénéfique ou néfaste à la création du lien

d’emploi, c’est ce que nous rechercherons (Chapitre II).

Chapitre I – L’activité de recrutement

Lors de cette phase, l’employeur qui utilisera la force de travail du salarié, « l’employeur de

fait », n’est pas présent en principe. Dans les quatre formes de prêt de main-d’œuvre étudiées

il est bien précisé que le salarié est embauché et conclu son contrat de travail avec

« l’employeur de droit ». Mais il est tout de même présent dans l’optique du recrutement. La

particularité de la situation tient au fait que l’employeur n’embauche pas pour faire travailler

dans son entreprise : le salarié ne servira pas la productivité « directe » mais la productivité

« indirecte » de l’entreprise. Cette particularité à toute son importance lors de la procédure

d’embauche, procédure que suivra « l’employeur de droit » afin de recruter son salarié. En

effet, embaucher un salarié qui sera prêté n’implique pas les mêmes choses que lorsque l’on

embauche un salarié pour sa propre entreprise. Il faut alors rechercher et comprendre les

conséquences d’une telle situation, ce qui permettra de mesurer les conséquences de la

présence d’un tiers à ce stade de la création du lien d’emploi (Section I).

Au-delà de son influence dans l’optique de l’embauche, le tiers exerce son influence à un

autre niveau à ce stade. Le droit du travail réglemente en effet le prêt de main-d’œuvre, cette

réglementation concerne notamment les possibilités d’utilisation de cette forme de travail. Le

prêt de main-d’œuvre n’est pas ouvert à tout employeur et il n’est possible que dans certaines

tâches à accomplir. Un élément extérieur, la législation, entraîne lui aussi des particularités à

la création du lien d’emploi. Mais c’est du fait de l’existence de trois parties à la relation de

travail qu’existe ce particularisme. Le droit s’est emparé du fait de l’existence d’un tiers et

réglemente différemment la relation de travail bilatérale de la relation de travail tripartite. Il

faudra alors évaluer l’impact de cette législation sur la création du lien d’emploi (Section II).

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Section I – La particularité de l’embauche

Afin de comprendre et d’analyser l’impact de la présence d’un tiers dans la création du lien

d’emploi au moment de la procédure d’embauche, il est pris à parti d’utiliser, comme base de

comparaison, le schéma classique de l’embauche dans le cadre d’une relation de travail

exclusivement bilatérale. La sélection du salarié (§1) puis la conclusion du contrat de travail

(§2) seront étudiés. On pourra objecter, que dans certaines formes de prêt de main-d’œuvre

étudiées la conclusion du contrat de travail n’est pas l’étape suivant directement la sélection. Il

est vrai que parfois le contrat de travail n’est signé que quelques mois après la sélection, au

moment de la mise à disposition effective. La chronologie devrait alors être : la procédure de

sélection, les actes concourant à la mise à disposition effective puis la signature du contrat de

travail. Mais dans un souci de synthèse et de lecture plus compréhensible le choix s’est porté

sur une analyse suivant la chronologie d’une embauche « classique » afin de mieux percevoir

l’impact de la présence d’un tiers sur ces différentes étapes par le biais de la comparaison.

§1 – La procédure de recrutementLorsque l’on étudie la procédure de recrutement les règles les plus souvent abordées sont le

principe du libre choix du salarié par l’employeur et ses limites1, ainsi que les formalités

administratives relatives à l’embauche2. Exception faite de la mention « travailleur

temporaire » ou « mis à disposition par un groupement d’employeurs » porté sur le registre

unique du personnel de l’entreprise utilisatrice3 ces points n’offrent pas de particularités dans

le cadre du prêt de main-d’œuvre. Cela se conçoit facilement :ce n’est pas parce que le salarié

ne sert pas la productivité directe de l’entreprise que l’on peut faire preuve de discrimination à

son égard lors de son embauche, par exemple. Nous laisserons donc de coté ces règles dans

l’étude qui suit. Mais des recherches approfondies font découvrir que la forme que prend le

recrutement est elle différente de la forme du recrutement classique4. La particularité de

1 Interdiction de la discrimination à l’embauche résultant de l’application des articles L. 122-25, L. 122-45,

L. 122-46, L. 122-49, L. 123-1 et L. 412-2 du Code du travail, travail des enfants, des femmes sur certains

postes, des étrangers et des travailleurs handicapés2 C. trav., art. L. 320 La déclaration unique à l’embauche et C. trav., art. L. 620-3 l’inscription sur le registre

unique du personnel3 C.trav., art. R. 620-3.4 Les recherches approfondies en question sont des entretiens ainsi que la lecture d’enquêtes de terrain, cf

notamment BICHE (B.), LE MONNIER (J.), Les métamorphoses de la subordination et les groupements

d’employeurs, in La subordination dans le travail, cahier travail et emploi ; DEL SOL (M.), MOYSAN-

LOUAZEL (A.), TURQUET (P.), L’intermédiation dans les relations d’emploi au travers des exemples du

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l’objet du contrat (le prêt de main-d’œuvre) entraîne la particularité de la forme du

recrutement. Deux logiques s’affrontent alors dans les faits, l’employeur procède à un

recrutement aux critères de sélection allégés voire inexistants (A.) ou au contraire il procèdera

à un recrutement aux critères de sélection renforcés (B.).Ces deux logiques correspondent à

l’impact de la présence d’un tiers. C’est en fonction de la présence, et de la forme de cette

présence que l’employeur fixe ses critères de sélection

A – Recrutement aux critères de sélection allégés

Cette forme de recrutement se retrouve dans deux cas : l’intérim de « masse » et le portage

salarial. Il existe aujourd’hui une dualité au sein de l’intérim, dualité qui ne concerne pas les

secteurs d’activité des entreprises mais les attentes des clients des entreprises de travail

temporaire ; intérim « noble » et intérim de « masse » s’opposent1. L’intérim de « masse » crée

sa valeur ajoutée sur les effets de quantité, il est aussi appelé intérim traditionnel car son

existence est antérieure à celle de l’intérim « noble ». L’intérim « noble » lui est un intérim sur

mesure, son marché est le secteur des salariés qualifiés ou hautement qualifiés, il joue sur la

qualité du service rendu. Dans le cadre de l’intérim de « masse » le client recherche avant tout

à combler un besoin de main-d’œuvre urgent pour une activité ponctuelle. Ce qu’il demande à

l’ETT c’est une quantité de travailleurs parfois assez importante, pour un travail de courte

durée et qui ne nécessite pas d’investissement personnel de la part du salarié dans l’entreprise.

Les critères de sélection du recrutement ainsi que la manière dont se déroule ce dernier son

fonction des attentes de l’entreprise cliente. Le salarié devra déposer son curriculum vitae à

l’ETT, il aura un entretien de très courte durée avec un personnel de l’ETT pour être inscrit

dans leur base de données des intérimaires, éventuellement il subira quelques tests concernant

son aptitude à utiliser certains outils notamment informatiques2. Il n’y a pas de sélection

proprement dite entre les intérimaires, il n y’a pas un seul poste a pourvoir et plusieurs

candidats donc l’intérimaire, si il correspond à ce que les clients recherchent, sera inscrit.

L’ETT doit avoir la capacité de détacher rapidement et en nombre ses intérimaires donc une

fois que le profil de l’intérimaire correspond ce dernier est inscrit. Mais à posteriori

l’intérimaire devra faire preuve de grande disponibilité et de mobilité si il espère cumuler les

missions. Les critères de sélection sont donc allégés dans l’hypothèse de l’intérim de

portage salarial et de l’intérim hautement qualifié, rapport DARES 1 Lefevre (G.), Michon (F.), Viprey (M.), Les stratégies des entreprises de travail temporaire, Convention

Dares, Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, avril 2002, p. 1162 Informations recueillies auprès d’ETT dans leurs formulaires d’inscription

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« masse », la phase de recrutement est ici différente de la phase de recrutement « classique ».

Il existe même des ETT dans lesquelles il est possible de s’inscrire sur leurs registres

d’intérimaires par internet. Un simple curriculum vitae et des renseignements d’état civil sont

demandés. Mais l’ETT est tout de même responsable dans le choix de l’intérimaire, elle a une

obligation générale de prudence et de diligence dans ce choix1. En ce qui concerne la

vérification des antécédents de l’intérimaire, l’ETT est susceptible d’engager sa responsabilité

en cas de dommage. Le niveau d’exigence requis pour les vérifications concernant les

antécédents sera fonction des responsabilités exercées par l’intérimaire. Ainsi il a pu être jugé,

que le fait pour l’ETT de ne pas avoir « vérifié les antécédents judiciaires d’un salarié

n’occupant pas un poste de confiance n’est pas constitutif d’une faute contractuelle de nature à

engager sa responsabilité »2. En l’espèce il s’agissait d’un magasinier qui s’était rendu

coupable d’un incendie volontaire. L’ETT a également l’obligation de vérifier la qualification

de l’intérimaire car elle a signé un contrat avec l’entreprise cliente. Dans deux cas la

vérification de la qualification de l’intérimaire est même imposée par les textes : lorsque

l’intérimaire exerce une profession médicale ou paramédicale réglementée3 et lorsqu’il exerce

une activité de surveillance, gardiennage ou transfert de fond4.

Le portage salarial est lui une situation originale, le salarié n’aura pas ou peu de procédure de

recrutement. Le salarié ou le porté prospecte lui-même les entreprises clientes chez qui il va

travailler. Une fois la durée et le montant de la mission négociée il signera un contrat de

travail avec la société de portage. En général il existe tout de même un contrat entre le porté et

la société de portage avant tout départ en mission, mais ce contrat n’est pas un contrat de

travail c’est une « convention d’adhésion » ou de « partenariat »5. Ce contrat est un accord

préalable entre les parties, il défini les modalités de leur collaboration future. On y trouve, en

général, les conditions de recherche du porté ainsi que les conditions d’exécution des

missions. Nous n’avons pu trouver plus de précisions que cela concernant la mise en relation

entre le porté et la société de portage, mais on sait que c’est au salarié de vanter ses mérites

auprès des entreprises clientes et de négocier ses missions. Le seul critère qui semble

important pour le recrutement est le fait de trouver une mission à effectuer pour le salarié.

1 Civ. 1re, 26 févr. 1991 : D. 1991. 605, note Lapoyade Deschamps2 CA Reims, 2 mars 19873 C. trav., art. L. 124-4.4 Décret n°86-1058, 26 sept. 1986, relatif à l’autorisation administrative et au recrutement des personnels des

entreprises de surveillance et de gardiennage, de transport de fonds et de protection des personnes, JORF 27

sept. 19865 CÔTE (N.), Le portage salarial : entre innovation et dérives, JCP E, n° 1599, 2002, p. 1760

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Dans ces deux cas donc la procédure de sélection à l’embauche est allégée, les employeurs

n’effectuent pas la même procédure d’embauche pour le salarié qui sera prêté que pour les

salariés servant à leur productivité directe. L’existence d’un tiers à la relation de travail

bouleverse ici le schéma classique de création du lien d’emploi, quelles en sont les

conséquences ? Le salarié se sent-il réellement lié à son employeur lorsque ce dernier fait

preuve d’un minimum de sélection à l’embauche ? Un entretien rapide ou inexistant, une

recherche des compétences réelles légère, le salarié se sent-il choisi par son employeur, des

liens sont-ils crées entre eux ? La création du lien d’emploi est différente ici, et on l’a vu, du

fait de la présence d’un tiers. Mais dans d’autres hypothèses les critères de sélection à

l’embauche sont renforcés, dans le cadre du prêt de main-d’œuvre. Cela a-t-il également un

impact sur la création du lien d’emploi ?

B – Recrutement aux critères de sélection renforcés

Nous allons voir ici que l’optique quant aux critères de sélection des salariés est à l’inverse de

celle dans le cadre de l’intérim dit de « masse » et du portage salarial. Ces critères sont

renforcés par rapport aux cas examinés ci avant, mais là encore ce n’est pas fonction de

l’intérêt personnel de « l’employeur de droit », l’existence de « l’employeur de fait »

conditionne les critères de sélection.

Les groupements d’employeurs sont le premier exemple à ce constat. Deux raisons à cela, en

premier lieu, les entreprises utilisatrices d’un GE réalisent «une réappropriation de la

responsabilité de la gestion de l’emploi »1. Contrairement aux entreprises clientes dans le

cadre de l’intérim, elles occupent une situation particulière en étant non seulement clientes du

GE mais également membres de ce dernier. En tant que membres elles « régulent et maîtrisent

son fonctionnement en définissant les orientations générales »2, elles ont un rôle « actif » et

non « passif » dans la gestion de l’emploi. Le GE sélectionnera les salariés en fonction des

critères des entreprises, critères qui seront à la hauteur de ceux d’une embauche « classique »

puisque directement dictés par les utilisateurs. Une seconde raison vient expliquer le

renforcement des critères de sélection à l’embauche, elle tient également à la nature des GE.

Un GE est une association dont les membres, les entreprises, s’associent afin de réaliser une

mutualisation de l’emploi. Autrement dit des besoins éparses d’une compétence précise

1 BICHE (B.), LE MONNIER (J.), Les métamorphoses de la subordination et les groupements d’employeurs,

In La subordination dans le travail, cahier travail et emploi, Paris : La Documentation française, 2003, p.

1202 BICHE (B.), LE MONNIER (J.) préc., p. 120

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peuvent former un besoin unique mais partagé entre différent lieux de travail. Le GE doit

d’abord déterminer les besoins des entreprises membres, puis en fonction de cela il

embauchera un ou plusieurs salariés. Le GE embauchera alors pour un poste et des fonctions

bien précises, il effectuera une sélection entre les candidats afin de pourvoir ce poste. La

situation est totalement différente dans le cadre de l’intérim, par exemple. L’agence d’intérim

sélectionnera un salarié puis elle essayera de le placer en mission parmi ses entreprises

clientes. Il n’existe pas qu’un seul poste à pouvoir, si deux salariés se présentent pour un

même type de travail l’agence d’intérim n’opèrera pas de sélection entre les deux, ils seront

inscrits tout deux dans le registre des intérimaires. Les critères de sélection de l’intérim sont

moindres dans certains cas.

Pour dresser un tableau plus complet il faut préciser que, dans d’autres cas, les critères de

sélection à l’embauche concernant un intérimaire sont eux aussi renforcés. Cette hypothèse

concerne l’intérim dit « qualifié » ou « noble ». Comme précédemment précisé cette forme

d’intérim concerne le secteur des salariés qualifiés ou hautement qualifiés. Afin de mieux

cerner cette situation des recherches ont été menées quant aux critères de sélections d’agences

d’intérim travaillant dans le secteur de l’intérim « qualifié », recherches complétées par un

entretien auprès d’un directeur d’agence1. L’agence Kelly Services de Lille sera citée à titre

d’exemple. Cette agence se dit « multi spécialiste » par opposition aux agences

« généralistes » qui agissent dans presque tous les secteurs d’activité, elle se concentre sur la

« haute gamme de l’intérim » et n’est pas un « distributeur »2. Kelly Services a pour

particularité, comme toute les agences d’intérim « qualifié », de créer sa valeur ajoutée sur la

compétence de ses salariés ce qui influence directement les méthodes et critères de sélection

des salariés. Le salarié passera, en premier lieu, une phase de pré recrutement qui contient un

entretien rapide concernant les grandes lignes de ses compétences et son état civil. Dans une

seconde phase de recrutement des tests à différents outils (informatiques, langues,

compétences personnelles approfondies,…), un test comportemental puis un grand entretien

sont réalisés. Les pièces demandées sont entre autres un curriculum vitae ainsi que les

diplômes. On remarque tout de suite que les critères de sélection sont poussés. C’est en raison

du type d’intérim que les critères de sélection sont poussés, le client ne recherche pas de la

main d’œuvre rapidement et en masse mais une personne d’une haute qualification répondant

à certains critères professionnels et personnels. La sélection aux critères renforcés sert

1 Entretien de Loïc CAVROIS, directeur d’agence chez KELLY Services, 12 boulevard Carnot 59800

LILLE, 5 juin 2006, anciennement en agence Adecco2 Entretien Loïc CAVROIS préc.

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également d’argument commercial auprès des entreprises clientes. Une fois encore la force

des critères de sélection est fonction du tiers à la relation de travail.

Dernière précision concernant le travail à temps partagé, réforme de la Loi du 2 août 2006 il

n’a pour l’instant pas bénéficié de décrets d’application et ne fait donc pas encore l’objet

d’application par des entreprises de travail à temps partagé. On ne peut donc traiter de ses

critères de sélection à l’embauche aujourd’hui, mais il est permis de penser que ces derniers se

rapprocheront de ceux de l’intérim « qualifié ». L’entreprise de travail à temps partagé met à

disposition « d’entreprises clientes du personnel qualifié »1. Même si, en l’espèce, la notion de

« personnel qualifié » n’est pas plus définie, il est permis de penser que les entreprises de

travail à temps partagé, tout comme les agences d’intérim « qualifié », devront prouver la

valeur de leurs salariés à leurs clients et donc suivront des critères de sélection à l’embauche

poussés.

Même sans être physiquement présent lors de la procédure d’embauche, le tiers à la relation

de travail influence cette dernière quant aux critères de sélection du salarié. Lorsque ces

critères sont allégés l’existence du tiers a pour effet logique de faciliter la création du lien

d’emploi, la sélection est moins importante, l’embauche est plus rapide et moins

contraignante. Au contraire dans les cas où les critères de sélection sont renforcés la procédure

de recrutement n’est en rien facilitée de par les exigences du tiers. Le constat est donc nuancé,

si parfois la présence du tiers rend plus rapide la création du lien d’emploi ce n’est pas vrai

dans tout les cas. Lors de l’embauche d’un salarié dans le cadre d’une relation bilatérale

l’étape qui suit la phase de recrutement est la conclusion d’un contrat de travail. Dans

l’hypothèse du prêt de main-d’œuvre, un contrat de travail est également conclu, on se

rapproche donc du schéma « classique », mais là encore l’existence d’un tiers à la relation de

travail crée des particularités.

§2 – La conclusion du contrat de travailUn contrat de travail est une « convention par laquelle une personne, le salarié, met son

activité professionnelle à la disposition d’une autre personne, l’employeur ou patron, qui lui

verse en contrepartie un salaire et a autorité sur elle »2. L’article L. 121-1 du code du travail

précise qu’il « est soumis aux règles du droit commun », et qu’il « peut être constaté dans les

formes qu’il convient aux parties contractantes d’adopter ». La première partie de cet article

est valable pour tout type de contrat de travail, les règles concernant la capacité des

1 C. trav., art. L. 124-242 GUILLIEN (R.), VINCENT (J.), Lexique des termes juridiques, 15° éd., Paris : Dalloz, 2005.

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contractants, les vices du consentement, l’objet et la cause du contrat sont applicables. Mais la

seconde partie concernant la forme du contrat de travail n’est valable que pour les contrats à

durée indéterminée, le principe étant que la forme écrite n’est pas nécessaire, le salarié devra

uniquement être renseigné, par écrit, de certain éléments essentiels du contrat. Cette obligation

écrite d’information communautaire1 étant remplie à l’occasion d’un bulletin de paye, d’une

lettre d’engagement ou d’un contrat de travail écrit. Le principe en droit français n’est pas

l’exigence d’un écrit au contrat de travail comme condition de validité, mais le prêt de main-

d’œuvre est une situation particulière et différente du contrat de travail à durée indéterminée.

Le législateur en a tiré des conséquences et a, pour ce qui est des formes de prêt de main-

d’œuvre légalement encadrés, prévu des solutions différentes du droit commun, nous sommes

face à un contrat de travail de type particulier (A.). Mais le portage salarial n’est pas, lui,

légalement encadré, c’est une situation de fait. Il est alors fait appel aux différentes solutions

qu’offre le code du travail, avec des applications plus ou moins d’heureuses (B.).

A – Un contrat de travail de type particulier

Le contrat de travail conclu entre l’employeur et le salarié qui sera prêté, dans le cadre de

l’intérim, du travail à temps partagé et des groupements d’employeurs est particulier. Il déroge

pour partie au droit commun du contrat de travail et ce sur deux points : sa forme et son

contenu.

Le contrat de travail à durée indéterminée n’a pas à être, en sa forme, écrit aux fins de

condition de validité. Les salariés embauchés par un groupement d’employeur ou une agence

d’intérim bénéficient, selon le code du travail en ses articles L. 127-2 et L. 124-4, d’un contrat

de travail écrit. Cette formalité doit être accomplie « au plus tard dans les deux jours

ouvrables suivant la mise à disposition » (art. L. 124-4) pour ce qui est de l’intérimaire. Il

n’est imposé aucun délai au groupement d’employeur sur ce point mais l’on peut penser

qu’elle doit avoir lieu avant toute mise à disposition car certaines modalités du placement sont

définies dans le contrat de travail. La sanction en cas d’absence d’écrit est la requalification en

contrat de travail de droit commun à durée indéterminée. Le but en est simple, le salarié doit

être informé de l’opération de prêt de main-d’œuvre et dans le cadre de l’intérim, ce dernier

étant dérogatoire du droit commun, l’écrit garanti que toutes les conditions nécessaires à ce

1 Directive 91/533/CEE du Conseil, 14 octobre 1991, relative à l’obligation de l’employeur d’informer le

travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail, JO L 288, 18 octobre 1991, pp.

32-35.

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que l’intérim ne tombe pas dans la prohibition du prêt de main-d’oeuvre soient remplies1.

L’article L. 124-27 du code du travail précise « qu’un contrat de travail est signé entre le

salarié et l’entreprise de travail à temps partagé », il n’est pas explicitement précisé qu’un écrit

est demandé mais l’insertion du verbe « signer » peut laisser présumer à l’établissement d’un

écrit. Les textes ne précisent pas non plus quelle sanction assortira l’absence d’écrit, mais une

convention de travail non écrite s’analysera en un contrat de travail de droit commun. Le

législateur impose l’écrit pour les contrats de travail à ces trois formes de prêt de main-

d’œuvre, le salarié est informé du type de contrat auquel il souscrit. Mais l’exigence d’un écrit

est complétée par une seconde exigence : un contenu précis au contrat.

La signature d’un contrat de travail dans l’optique d’un prêt de main-d’œuvre est une situation

particulière, un écrit est donc exigé, écrit au contenu particulier. Le législateur impose un

minimum de renseignements et mentions obligatoires dans ces contrats de travail, ces

mentions ont deux objectifs : vérifier que la législation a bien été respectée et informer le

salarié. L’intérimaire recevra un contrat de travail comportant la reproduction des mentions

obligatoires du contrat de mise à disposition2, l’indication de la qualification du salarié et des

modalités de sa rémunération indemnité de précarité de l’emploi comprise, inscription de la

période d’essai éventuelle, clause de rapatriement, le nom et l’adresse de la caisse de retraite

complémentaire et de l’organisme de prévoyance dont relève l’entre prise de travail

temporaire, enfin mention est faite de la faculté de l’embauche du salarié à l’issue de la

mission par l’utilisateur3. A cette énumération on comprend bien le but recherché par la

précision d’un contenu minimum obligatoire, le salarié ne passera que peut de temps dans

l’enceinte même de l’entre prise de son employeur donc l’information est placée dans un écrit,

le rappel des obligations légales rend ce contrat témoin du déroulement légal des choses. Le

contrat de travail conclu entre le salarié et un groupement d’employeurs a lui aussi un contenu

précis. « Les conditions d’emploi et de rémunération, la qualification du salarié, la liste des

utilisateurs potentiels et les lieux d’exécution du travail »4 sont indiquées. Ce contrat doit

servir à fixer certaines règles avant tout départ en mission, règles qui seront donc connues et

acceptées des deux parties. Si on ne peut pas fixer précisément l’activité qu’exécutera le

salarié, sur quel poste, à quels horaires et en quel lieu précis l’activité de prêt de main-

d’œuvre le rendant impossible, on doit, à tout le moins, fixer un cadre général. Le travail à

1 Cf. Soc. 7 mars 2000 : Bull. civ. V, n°90 ; RJS 2000.2 Art. L. 124-3 C. trav.3 Art. L. 124-4 C. trav.4 Art. L. 127-2 C. trav.

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temps partagé contient lui une autre particularité, le contenu obligatoire du contrat de travail

semble avoir été oublié lors du vote de la Loi. L’article L. 124-27 alinéa 3 précise que le

contrat de travail « inclut également une clause de rapatriement du salarié ». Le terme

« également » laisse supposer que d’autres mentions obligatoires existent, mais un examen

approfondi du texte nous apprend le contraire. Le législateur a-t-il volontairement gardé le

silence ou bien sommes nous face à un oubli ?

C’est en raison de la particularité de la situation que le droit commun de la formation du

contrat de travail est écarté pour le prêt de main-d’œuvre. Le législateur a pris acte de ces

relations de travail triangulaires et y applique une législation particulière. Une situation n’est

cependant pas encore prise en compte par le droit du travail en tant que telle, employeurs et

salariés utilisent les solutions juridiques déjà existantes pour le portage salarial.

B – Le portage salarial

Le porté et la société de portage vont donc conclure un contrat de travail afin que le porté

bénéficie du statut de salarié. Mais cette situation n’est pas encadrée légalement comme

peuvent l’être l’intérim, le travail à temps partagé et les groupements d’employeurs. Les

protagonistes doivent alors utiliser les solutions qu’offre le droit du travail. On remarque alors

que la solution employée n’est pas unique mais multiple, chaque société de portage fait un

choix qui en général ne satisfait pas totalement à la situation.

La majorité des sociétés de portage « semblent préférer proposer au consultant un contrat à

durée déterminée, dont la durée est calquée sur celle de la mission »1. La loi énumère

limitativement les cas de recours au contrat à durée indéterminée à l’article L. 122-1-1 du

code du travail, il s’agit du remplacement d’un salarié absent, de l’accroissement temporaire

de l’activité et des emplois à caractère saisonniers. Il faut également préciser que ces cas de

recours concernent non pas l’entreprise utilisatrice mais l’employeur du salarié, l’entreprise de

portage. Cette dernière ne pourra pas invoquer un surcroît d’activité chaque fois qu’elle

enverra un salarié en mission, cela relève de l’activité normale de l’entreprise. Le contrat de

travail à durée déterminée, bien qu’utilisé, ne semble pas correspondre à l’activité de portage,

son utilisation crée le risque de la requalification en contrat à durée indéterminée.

A l’utilisation, comme support juridique du contrat de travail à durée indéterminée se pose un

problème encore plus large, la validité du contrat de travail. Le contrat de travail est

caractérisé par le lien de subordination juridique entre salarié et employeur. Or, la société de

1 RIQUOIR (F.), Le portage salarial, Semaine sociale Lamy, novembre 2000, n°1004, p. 7.

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portage ne contrôle pas le déroulement de la prestation de travail, elle règle seulement les

aspects administratifs de l’activité, perçoit les honoraires et les restitue partiellement sous

forme de salaires. La chambre sociale exige qu’en pratique le salarié soit placé sous l’autorité

de la société pour caractériser la subordination juridique1. Si il existe un lien de subordination

juridique entre le porté et la société de portage alors le contrat de travail sera valide, à

l’inverse l’absence du lien de subordination rendra le contrat de travail invalide, la relation

sera requalifiée par le juge, ce dernier n’étant pas tenu par la qualification donnée par les

parties.

Il semble bien évident que l’utilisation du contrat de travail est hasardeuse pour le portage

salarial. Le législateur ne s’est pas (encore ?) emparé de la question du portage salarial,

situation de fait pourtant déjà largement pratiquée, de ce fait les portés et les sociétés de

portage se trouvent dans une situation difficile concernant le support juridique de leur relation.

Le tiers à la relation de travail, l’entreprise cliente, n’est pas encore physiquement présent lors

du recrutement du salarié et de la conclusion du contrat de travail. Pourtant les règles

habituelles ne sont pas suivies car le tiers est déjà présent dans l’optique de la relation de

travail. L’employeur prend en considération ce fait et réalise son premier contact avec le

salarié, le recrutement, en fonction de son client. Le législateur prend acte de ce fait et

organise la conclusion du contrat de travail en conséquence. Quant à l’impact sur la création

du lien d’emploi il n’est pas uniforme à ce stade. En fonction des attentes du client

l’employeur sélectionnera plus ou moins difficilement ses salariés, la création du lien

d’emploi en est donc plus ou moins rapide. Les contraintes légales à la conclusion du contrat

de travail existent, mais se sont là plus des contraintes à caractère informatif qui peuvent

même parfois être remplies après le départ en mission du salarié2. Cela crée-t-il une lenteur au

départ en mission ou cela renforce-t-il le lien entre le salarié et son employeur, l’obligation

d’un écrit rendant inévitable leur rencontre. Le constat ne peut être que mitigé à ce stade du

développement. Mais si la présence du tiers à la relation de travail interfère déjà dans la phase

de recrutement du salarié une seconde chose interfère également : la loi.

1 Cass. Soc. 15 janv. 1997, TPS 1997, comm. 72, 1ère esp., obs. P.Y. Verkindt2 Cf. art. L. 124-4 C. trav. Pour l’intérim.

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Section II – Les limites introduites par la loi

« Le droit du travail, branche du droit, recouvre l’ensemble des règles juridiques ayant pour

objet, dans le secteur privé, les relations de travail entre employeurs et salariés »1. Bien

qu’étant basé sur une relation commerciale entre l’employeur et son client, l’activité de prêt

de main-d’œuvre repose également sur une relation de travail entre le salarié et son employeur

et est donc objet des règles juridiques du droit du travail. Ces règles juridiques régissent « les

rapports d’emploi (l’accès à l’emploi, le contrat de travail, les licenciements,…) »2

notamment ; les rapports d’emploi dans le cadre du prêt de main-d’œuvre sont concernés. Le

droit du travail réglemente l’activité de prêt de main-d’œuvre notamment en ce qu’il prohibe

le prêt de main-d’œuvre à but lucratif3. Au moment du recrutement l’activité de prêt de main-

d’œuvre n’est pas totalement libre, cela a un impact considérable sur la création du lien

d’emploi. Quel impact a l’interdiction légale de principe sur la création du lien d’emploi dans

le cadre du prêt de main d’œuvre ? Cette interrogation soulève la nécessité d’étudier la

prohibition du prêt de main-d’œuvre à but lucratif (§1) et de remarquer que certaines formes

de prêt de main-d’œuvre étudiées sont à but lucratif sans être menacés de sanctions (§2).

§1 – Interdiction légale de principeLe prêt de main-d’œuvre à but lucratif est prohibé sous peine de sanctions, se sont les articles

L. 125-1 et L. 125-3 qui nous l’enseignent. Le terme « lucratif » précise que toute opération de

prêt de main-d’œuvre n’est pas interdite, les opérations ayant un but non lucratif ne sont pas

visées par ces textes. Cette interdiction doit tout de même avoir une influence sur les formes

de prêt de main-d’œuvre étudiées, certaines étant à but lucratif et d’autres non. Pour mesurer

l’influence et l’impact de cette interdiction sur les formes de prêt de main-d’œuvre étudiées

(A.) il faut tout d’abord en comprendre l’origine et l’étendue (B.).

A – Etendue de la prohibit ion

Deux infractions sont retenues au titre du prêt de main-d’œuvre : le délit de marchandage et le

délit de prêt de main-d’œuvre illicite respectivement aux articles L. 125-1 et L. 125-3 du code

du travail. Le délit de prêt de main-d’œuvre illicite est constitué dès lors que l’opération a un

but lucratif et que l’objet de cette opération est exclusivement le prêt de main-d’œuvre. Il

1 GUILLIEN (R.), VINCENT (J.), Lexique des termes juridiques, 15° éd., Paris : Dalloz, 2005.2 GUILLIEN (R.), VINCENT (J.), préc. 3 Art. L. 125-1, L. 125-3 C. trav.

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suffirait donc que l’objet de l’opération ne soit pas exclusivement le prêt de main-d’œuvre

pour échapper à la sanction, il est facile d’adjoindre une prestation de service au contrat.

Intervient alors le délit de marchandage, ce dernier ne nécessité pas de but exclusif. Pour être

constitué il nécessite un but lucratif ainsi que d’avoir pour effet « de causer un préjudice au

salarié » ou « d’éluder l’application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention

ou accord collectif de travail »1.

L’interdiction du marchandage remonte en 1848 en France, la République décrète alors

« l’exploitation des ouvriers par les sous-entrepreneurs, ou marchandage, est abolie »2, mais

les chambres Réunies décident ensuite que le délit de marchandage suppose une intention de

nuire3. La portée du texte en était d’autan plus réduite, comment prouver l’intention de nuire.

La loi du 3 juillet 19734 redéfini le délit de marchandage, l’intention de nuire n’est plus

demandée, c’est en fonction de ses effets que l’infraction est constituée.

Le champ d’application concerne les opérations dans lesquelles un salarié est prêté, à but

lucratif et selon l’article appliqué exclusivement ou causant un préjudice au salarié ou en

éludant l’application de textes protecteurs. Pour certains cette définition légale faisait preuve

d’insuffisances5, le juge a donc progressivement « défini les frontières du licite et de l’illicite »

par la méthode du faisceau d’indices. Pour caractériser l’exclusivité de l’objet de l’opération

du prêt de main-d’œuvre, dans le cadre de l’article L. 125-3, le juge s’appuie sur différents

indices tels que l’objet du contrat de mise à disposition, l’encadrement des salariés fournis, la

fourniture de matériel et le mode de rémunération6. Le caractère non exclusif signifie que

l’opération de prêt de main-d’œuvre est la conséquence nécessaire de la réalisation d’une

autre prestation. Le but lucratif des deux infractions est lui entendu largement, on vise le but

recherché et non le but atteint, « la loi n’exige pas que l’opération envisagée ait rapporté un

profit à l’entrepreneur mais énonce seulement que la fourniture de main-d’œuvre ait eu un but

lucratif »7. Dans le cadre du délit de marchandage, un préjudice financier, une perte

d’avantages ou encore le préjudice résultant de la méconnaissance de la législation relative au

travail temporaire sont admis par le juge au titre du préjudice causé au salarié constitutif de

cette infraction. Il est à remarquer que dans la lettre du texte le préjudice du salarié et la non

1 Art. L. 125-1 C. trav.2 Décret 2 mars 18483 Ch. Réunies, 31 janv. 1901, D. 1901, I, 169.4 L. 73-608, répression des trafics de main-d’œuvre, JOAN 7 juillet 1973, p. 73405 TEISSIER (A.), Prêt de main-d’œuvre, JurisClasseur, Travail Traité, Fasc. 3-20, mise à jour29 mars 20056 TEISSIER (A.), préc. pp. 6-10.7 CA Angers, 20 déc. 1979 : D. 1980, inf. rap. P. 72

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application de textes protecteurs sont des conditions alternatives (emploi du terme « ou »),

mais la jurisprudence les analyse souvent comme des conditions cumulatives. C’est que dans

les faits le préjudice du salarié découle généralement de la non application d’un texte.

La sanction en cas d’infraction à ces textes est énoncée à l’article L. 152-3 du code du travail.

Il s’agit de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 30000 € cumulativement ou

alternativement, le juge a la possibilité de prononcer l’interdiction d’exercer l’activité de sous-

entrepreneur de main-d’œuvre pendant deux à dix ans enfin le juge peut exiger la publicité du

jugement aux portes des établissements de l’entreprises et dans les journaux.

Le tableau de lecture final qu’il reste à dresser est simple : les formes de prêt de main-d’œuvre

à but non lucratif ne tombent pas sous la prohibition (en entendant bien sûr le but recherché et

non le but atteint ; les formes de prêt de main-d’œuvre à but lucratives sont prohibées si elles

ont un caractère exclusif, si elles causent préjudice au salarié ou si elles ont pour effet d’éluder

l’application de textes protecteurs. Le principe étant posé reste à vérifier ses conséquences sur

les formes de prêt de main-d’œuvre étudiées.

B – Impact de la prohibition

En droit français existe ce principe de non exploitation de la main-d’oeuvre, cette dernière

n’est pas une marchandise et ne peut faire l’objet de convention à but lucratif. La conséquence

de ce principe se lit dans chacune des formes de prêt de main-d’œuvre étudiée, mais

différemment.

Premier type de réaction : une réaction législative de respect du principe qui touche les

groupements d’employeurs. Lors de leur création par la loi du 25 juillet 19851, le législateur a

tenu à respecter les principes des articles L. 125-1 et l.125-3. Les groupements d’employeurs

seront encadrés législativement de telle sorte qu’ils respectent ces articles, ils feront alors

partie de la catégorie des prêts de main-d’œuvre à but non lucratif (non interdits). Pour

respecter la non « lucrativité » de l’opération le législateur a fait appel à un instrument du droit

civil : les associations. Les groupements d’employeurs se constituent nécessairement sous la

forme d’association, le texte le précise clairement : « Ces groupements ne peuvent effectuer

que des opérations à but non lucratif. Ils sont constitués sous la forme d’associations déclarées

de la loi du 1er juillet 1901 »2. Or une association déclarée est en elle-même une personnalité

ne pouvant mener son activité à but lucratif. Les deux phrases du texte forment une

1 Loi n° 85.772, JO. 26 juill. 19852 Art. L. 127-1 al. 2 C. trav.

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redondance, on ressent la volonté ferme du législateur. Le régime juridique des associations

doit être respecté, une déclaration doit être effectuée en préfecture ou sous-préfecture, dans le

ressort de laquelle le groupement a son siège social. Il bénéficie alors d’une personnalité

juridique mais restreinte car elle ne lui permet pas la réception de libéralités et l’acquisition

d’immeubles à titre onéreux en dehors de ceux strictement nécessaires à l’accomplissement de

l’objet social. La forme associative interdit bien tout enrichissement provenant de l’activité de

prêt de main-d’œuvre, si ce dernier n’est pas intégralement reversé dans l’accomplissement de

l’objet social. La réalisation de profits n’est pas interdite mais si des profits sont réalisés ils

devront être consacrés à l’objet social, par exemple à l’achat de matériel permettant l’activité

du groupement ou encore l’acquisition de nouveaux locaux. La sanction spécifique du non

respect de l’article L. 127-1 est prévue à l’article L. 152-5, si un groupement exerce un but

lucratif ou n’a pas la forme d’une association (ou ne respecte pas le régime juridique des

associations) une infraction passible de 3750 € sera caractérisée, « la récidive est punie d’une

amende de 7500 € et d’un emprisonnement de six mois ou de l’une de ces deux peines

seulement ». Le juge peut également ordonner la publicité du jugement à la porte du siège du

groupement, aux portes des entreprises utilisatrices et dans les journaux. La peine est moins

sévère qu’en cas d’infraction aux articles L. 125-1 et L. 125-3 du code du travail. Le droit du

travail est entièrement respecté dans le cadre des groupements d’employeurs, ils ne prohibent

pas l’interdiction du prêt de main-d’œuvre à but lucratif en leur texte.

Le portage salarial a lui une existence sans texte et utilise, pour mener son activité, les

solutions préexistantes du droit, mais en matière de prohibition du prêt de main d’œuvre à but

lucratif le portage salarial se retrouve à la limite de l’illégalité. Le second type de réaction

intervient alors mais cette fois de la part du juge : le respect de la légalité préservé par le juge.

« Le portage se présente comme un montage juridique permettant à un individu de travailler

en indépendant tout en relevant du statut de salarié »1. Mais le droit supporte mal ce montage

juridique. Le salarié est prêté par la société de portage et il l’est à but lucratif (la société de

portage perçoit en général une commission sur la transaction réalisée). De plus cette activité

n’est pas réalisée dans le cadre des textes réglementant l’intérim, il y’a marchandage. C’est à

ce niveau que le juge intervient. Si l’activité de portage se trouve déférée devant le juge, ce

dernier sanctionnera au titre du marchandage2. Ce n’est qu’au prix de montages

supplémentaires tels que le camouflage en contrat d’entreprise ou de prêt réalisé à titre gratuit

1 CÔTE (N.), Le portage salarial : entre innovation et dérives, JCP E, n° 1599, 2002, p. 1760.2 Cf. par exemple Tribunal correctionnel de Grenoble, 19 mars 2001, jugement n° 918 MP 34.

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que le portage échappera à la condamnation. Le droit ne peut accepter de prêt de main-

d’œuvre à but lucratif et le juge sanctionne tout fait relevant de cette infraction.

Cette dernière est en partie fausse car le législateur a autorisé certaines formes de prêt de

main-d’œuvre à but lucratif. Si jusqu’à présent nous avons remarqué que l’impact de la

prohibition donnait toute sa force au principe de non spéculation sur la main-d’œuvre, nous

allons voir maintenant que ce principe a été aménagé, aménagement encadré par la loi.

§2 – Légalisation encadréeAu risque de choquer, on peut affirmer que le prêt de main-d’œuvre à but lucratif est autorisé

en droit français, atténuation flagrante du principe, nous sommes face à une légalisation. Deux

textes organisent cette légalisation, ils concernent deux cas de légalisation différents. L’article

L. 125-3 énonce : « Toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-

d'oeuvre est interdite sous peine des sanctions prévues à l'article L. 152-3 dès lors qu'elle n'est

pas effectuée dans le cadre des dispositions du livre 1er, titre II, chapitre IV du présent code

relatives au travail temporaire ». Le travail temporaire, notre premier cas de légalisation, est

énoncé dans le texte même qui crée la prohibition. L’article L. 124-24 est le second texte, il

précise : « est, au sens du présent chapitre, une entreprise de travail à temps partagé toute

personne physique ou morale dont l’activité exclusive consiste, nonobstant les dispositions de

l’article L. 125-3, à mettre à disposition d’entreprises clientes du personnel qualifié qu’elles

ne peuvent recruter elles-mêmes à raison de leur taille ou de leurs moyens ». Il existe donc une

possibilité de spéculer sur la main-d’œuvre en droit français. Mais cette possibilité, ces deux

possibilités en fait, sont strictement encadrées par des textes spéciaux. La dérogation n’est pas

totalement libre, il suffit pour se convaincre de remarquer que « seules » deux dérogations

existent auxquelles il faut impérativement se conformer pour ne pas tomber dans l’illégalité.

Cet encadrement « numéraire » n’est pas l’unique encadrement législatif existant. Nous

l’avons dit des textes spéciaux encadrent le travail temporaire ainsi que le travail à temps

partagé. A l’étude de ces textes on découvre que non seulement l’activité d’intérim et de

travail à temps partagé n’est pas ouverte à tout employeur (A.), mais aussi qu’un salarié ne

peut être prêté, dans ce cadre, que dans certaines situations de travail : ces situations doivent

rester une exception (B.).

Ce mémoire a été publié le 28 novembre 2006 avec l’autorisation de l’auteur etl’approbation du jury de soutenance sur http://edoctorale74.univ-lille2.fr

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A – Contraintes sur l ’employeur

Les contraintes qui pèsent sur l’employeur voulant exercer une activité de travail temporaire

ou de travail à temps partagé sont multiples. La première tient en l’activité de l’employeur,

dans les deux cas des textes définissent cette dernière : les articles L. 124-24 et l.124-1 du

code du travail. « Est, au sens du présent chapitre, une entreprise de travail à temps partagé

toute personne physique ou morale dont l’activité exclusive consiste, nonobstant les

dispositions de l’article L. 125-3, à mettre à disposition d’entreprises clientes du personnel

qualifié qu’elles ne peuvent recruter elles-mêmes à raison de leur taille ou de leurs moyens »,

« Sans préjudice des dispositions de l'article L. 312-1, est au sens du présent chapitre un

entrepreneur de travail temporaire, toute personne physique ou morale dont l'activité exclusive

est de mettre à la disposition provisoire d'utilisateurs, des salariés qu'en fonction d'une

qualification convenue elle embauche et rémunère à cet effet ». L’objet de l’entreprise est

dans les deux cas la mise à disposition de personnel, cet objet est par ailleurs exclusif.

L’exclusivité supporte toutefois deux exceptions. La première ne concerne que les entreprises

de travail à temps partagé, elle « peut apporter à ses seules entreprises clientes des conseils en

matière de gestion des compétences et de la formation »1, conseils qui seront sûrement

facturés, et ses seules entreprises clientes faisant certainement référence aux entreprises

accueillant un salarié en leur sein. La seconde exception est elle plus large : une entreprise de

travail temporaire peut exercer l’activité de travail à temps partagé (et donc inversement)2.

Mais quelle est donc l’utilité d’une telle dérogation ? Les entreprises de travail à temps

partagé ont-elles besoin du savoir-faire et donc des compétences des entreprises de travail

temporaire ? Il semble plus simplement que ce texte ouvre un nouveau marché aux entreprises

de travail temporaire.

Une autre contrainte apparaît dans les textes définissant l’objet des entreprises, c’est celle du

type de salarié et d’entreprises clientes visés par le travail à temps partagé. Les salariés

concernés ne pourront être que du « personnel qualifié », sans aucune autre précision

concernant le public visé il est fort à parier qu’il sera difficile de déterminer quel salarié sera

qualifié et lequel ne le sera pas. L’emploi d’un terme trop vague et non défini renseigne peu.

Les entreprises clientes doivent rentrer dans une certaine catégorie, celles tellement

politiquement prisées qui « ne peuvent recruter elles-mêmes à raison de leur taille ou de leurs

moyens ». Si par malheur (ou fatalisme), le juge devait vérifier qu’une entreprise rentre dans

1 Art. L. 124-25 C. trav.2 Art. L. 124-31 C. trav.

Ce mémoire a été publié le 28 novembre 2006 avec l’autorisation de l’auteur etl’approbation du jury de soutenance sur http://edoctorale74.univ-lille2.fr

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cette catégorie il serait au mieux amusé voire bien embêté de cette définition créant une

nouvelle catégorie juridique. Alors son intervention, afin de préciser la définition, serait

inévitable. Si l’effort pour empêcher l’expansion de cette activité à tout secteur du marché est

bien réel, il reste cependant sans grand effet.

La seconde contrainte tient en la publicité : l’obligation de déclaration. L’article L. 124-10 du

code du travail oblige que toute création d’ETT, déplacement de son siège, création de

succursales, d’agences de bureaux annexes et lors de la cessation d’entreprise fasse l’objet

d’une déclaration à l’inspection du travail. Cette déclaration « doit mentionner les

caractéristiques juridiques de l’entreprise, le nom de ses dirigeants et le domaine

géographique et professionnel dans lequel l’entreprise entend mettre ses salariés à la

disposition d’utilisateurs ». L’administration doit être tenue au courant des différents stades

d’évolution des ETT, cela lui permettra de vérifier plus aisément si les prescriptions légales

ont été respectées. Curieusement cette obligation n’apparaît pas au titre des ETTP. Mais si

cette dernière est couplée avec une ETT elle devra respecter les obligations en cause.

La troisième et dernière contrainte concerne la garantie financière. Au terme des articles

L.124-8 et L.124-32, les ETT et les ETTP doivent « justifier d’une garantie financière »

assurant le paiement des salaires et accessoires, des charges sociales et pour l’intérim des

indemnités dues au titre de l’intérim. Le travail à temps partagé n’incluant pas d’indemnités il

est logique qu’il n’y soit pas fait allusion. Ce qui semble moins logique c’est l’absence

d’allusion aux conséquences d’absence ou d’insuffisance de garantie financière dans le cadre

du travail à temps partagé, contrairement à l’intérim.

Ces contraintes ne sont pas superficielles, elles ont une raison et un but. La raison est, nous le

rappelons, que nous sommes en présence de dérogations au droit commun du prêt de main-

d’œuvre. Toute dérogation ou exception en droit est strictement encadrée afin, est c’est là le

but, qu’elle ne devienne pas le principe. Pour que ce but soit entièrement rempli, quelque

chose fait encore défaut. Il ne sert à rien de créer des contraintes à l’expansion ainsi qu’à la

forme des utilisateurs si ces derniers peuvent ensuite agir en toute liberté.

B – Contraintes d’application

Le CDI est le contrat de travail de droit commun, pour que cette affirmation reste vraie le

législateur s’est employé à ce que toute forme de contrat de travail différente ne soit utilisée

que dans des cas exceptionnels. L’intérim et le travail à temps partagé n’y font pas défaut.

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Une nuance existe cependant entre les deux ; l’un bénéficie d’une délimitation large et l’autre

non.

L’intérim ne peut être utilisé que dans certains cas de recours, ces cas concernent non pas

l’employeur mais l’entreprise utilisatrice, le principe qui les rassemble tous est le suivant : le

recours à l’intérim concerne uniquement « l’exécution d’une tâche précise et temporaire » et

ne peut avoir en aucun cas « pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à

l’activité normale et permanente de l’entreprise »1. C’est l’article L. 124-2-1 qui énumère les

cas de recours : absence d’un travailleur permanent, suspension d’un contrat de travail d’un

travailleur permanent (femme en congé maternité), départ définitif d’un salarié précédant la

suppression de son poste de travail, attente de l’entrée en service effective d’un salarié recruté

par un CDI, accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, emplois à caractère

saisonniers et enfin secteurs ou il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI en raison de

la nature de l’activité exercée. La loi du 18 janvier 2005 a crée deux nouveaux cas de recours

codifiés à l’article L. 124-2-1-1 du code du travail : faciliter l’embauche de personnes sans

emploi et rencontrant des difficultés particulières, pour assurer un complément de formation

au salarié. Si il existe des cas de recours limitativement énumérés il existe également des cas

dans lesquels il est strictement interdit de faire appel à l’intérim. Le premier cas est le

remplacement d’un salarié dont le contrat est suspendu en raison de sa participation à un

mouvement de grève2. L’intérim ne peut en aucun cas contrevenir au droit de grève des

salariés. Le second cas concerne la réalisation de travaux particulièrement dangereux3 précisés

par arrêté4, pour remplacer un médecin du travail. Enfin le dernier cas concerne les

licenciements pour motif économiques, l’article L. 124-2-7 précise que dans un établissement,

pendant les six mois qui suivent la notification du licenciement, on ne peut faire appel à des

intérimaires pour cause d’accroissement temporaire de l’activité. Cette interdiction concerne

uniquement aux postes concernés par le licenciement, et qu’un seul cas de recours ; son

étendue est faible.

Si l’intérim est limité dans ses cas de recours assez strictement, ce n’est pas le cas du travail à

temps partagé. Il n’a aucune allusion aux cas de recours limitatifs dans le texte du travail à

temps partagé. Les seules limites visibles concernent l’objet de cette activité, son utilisation

par les entreprises clientes semble libre (tant qu’elles correspondent aux critères de taille et de

1 Art. L. 124-2 C. trav.2 Art. L. 124-2-3, 1° C. trav. 3 Art. L. 124-2-3, 2° C. trav.4 Arr. 21 juill. 1998, JO 4 août 1998

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moyens). Simple oubli du législateur ou intention délibérée ? Le texte actuel freine peu les

possibilités d’utilisation du travail à temps partagé, les décrets d’application le feront peut-

être. Sans quoi la volonté de limiter l’accès à l’exception sera fortement réduite.

Deux préoccupations sont apparues dans la réaction du législateur et de l’appareil judiciaire à

l’égard des formes de prêt de main-d’œuvre étudiées. La première, la plus simple, consiste en

l’application pure des règles de droit commun du prêt de main-d’œuvre. Certaines formes de

prêt de main-d’œuvre, notamment à but lucratif, sont interdites en conséquence les

groupements respectent les textes en leur encadrement législatif et chaque fois que le portage

salarial tombe dans l’infraction il est sanctionné par le juge. La légalisation de l’intérim et du

travail à temps partagé fait naître la seconde préoccupation, si on laisse exister de telles

formes de prêt de main-d’œuvre en contradiction avec le droit commun c’est à titre

d’exception. En conséquence leur encadrement est strict, avec un bémol tout de même pour le

travail à temps partagé. Mais sommes-nous en présence de légèreté ou de réelle intention de

liberté ? Le prêt de main-d’œuvre ne doit pas devenir le mode de travail classique en droit

français.

A ce stade du développement, il est difficile de tirer une conclusion homogène de l’influence

du tiers à la relation de travail sur la création du lien d’emploi. Il n’a pas encore fait son

« entrée en scène » que déjà il influence la période de l’embauche. Son influence est diverse et

passe par différents biais. L’employeur dans la phase de recrutement, le législateur dans

l’encadrement des textes et le juge dans l’application des textes en prennent déjà compte. Tant

de personnes pour se préoccuper, plus ou moins directement, de l’existence du tiers rendent la

phase de recrutement plus complexe. Mais cela fragilise-t-il la création du lien d’emploi ? Un

recrutement élaboré en vue du prêt de main-d’œuvre est-il un frein à l’activité de main-

d’œuvre, la prise en compte de la particularité de la situation également ? La création du lien

d’emploi est certes particulière et ne correspond pas aux attentes mais elle ne semble pas

fragilisée, si ce n’est peut-être pas le manque de relation que l’on sent déjà entre le salarié et

l’employeur. La phase de création du lien d’emploi n’est cependant pas finie, à ce stade. Le

salarié est certes recruté mais il n’exerce pas encore d’activité professionnelle.

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Chapitre II – L’embauche et l’accés à l’emploi

Une partie du tableau est dressée, le salarié est embauché, il a prit contact avec son employeur.

Mais l’embauche du salarié signifie-t-elle l’accès à l’emploi dans le cadre du prêt de main-

d’oeuvre ? Non, une étape reste à réaliser : la mise à disposition. Ce n’est que lorsque le

salarié est mis à disposition qu’il mettra en œuvre sa force de travail, son employeur ne

l’utilise par directement c’est l’entreprise cliente qui en bénéficiera. La présence physique du

tiers arrive à ce niveau de la création du lien d’emploi. Le constat est fait, il existe une étape

supplémentaire à la création du lien d’emploi contrairement à la situation d’une relation de

travail bilatérale. Cette étape existe reste à savoir si elle facilité ou rend plus difficile la

création du lien d’emploi. Penser que l’ajout d’une étape rend plus long et donc plus difficile

la création du lien d’emploi est une conclusion trop facile. C’est sur la difficulté de l’accès à

l’emploi qu’il faut se baser. Le salarié seul trouvera-t-il plus aisément un emploi que le salarié

placé par son employeur ? Seul l’examen de la période de mise à disposition permettra de

répondre à ces questions.

L’étude de la période de mise à disposition se fera en deux temps. Si cette période existe c’est

qu’elle doit avoir un intérêt, mais lequel ? A qui bénéficie la mise à disposition, à l’employeur

qui réalise son activité commerciale, à l’entreprise cliente, au salarié ou encore à la création

du lien d’emploi ? Il faut étudier la logique de cette activité pour en comprendre les bénéfices

(Section I.).

La logique ne suffit à conclure des effets de la mise à disposition. L’étude d’un principe n’est

complète qu’avec l’étude de son application. La concrétisation de la mise à disposition et le

complément nécessaire à étudier ensuite (Section II.).

Section I : la logique du « placement »

L’emploi du terme « placement » semblera impropre à l’activité de prêt de main-d’œuvre pour

certain. La CJCE, tout d’abord, considère que l’activité de mise en relation entre les personnes

à la recherche d’un emploi et des employeurs en quête de personnel correspond à une

médiation entre les offres et les demandes d’emploi, tandis que le prêt de main-d’œuvre

constitue une médiation dans les relations de travail 1. La loi française2 elle considère que1 CJCE, 11 déc. 1997, C-55/96 Job center coop.2 L. n° 2005-32, 18 janv. 2005

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« l’activité de placement consiste à fournir, à titre habituel, des services visant à rapprocher

offres et demandes d’emploi, sans que la personne physique ou morale assurant cette activité

ne devienne partie aux relations de travail susceptibles d’en découler »1. L’OIT, a une

conception différente, ne faisant pas de distinction entre les deux. Pour ma part, l’intitulé

« placement » englobe la mise à disposition dans le cadre du prêt de main-d’œuvre mais

également les faits préparatoires à la mise à disposition. L’utilisation abusive, au regard du

droit français, de ce terme ne l’est que dans le but d’embrasser tout l’ensemble d’actes

permettant l’accès à l’emploi du salarié suite à son embauche, et ne remet en rien en cause le

choix du législateur.

La logique du placement recouvre les considérations qui ont mené à créer cette activité, la

forme qu’entretien cette activité. Nous allons donc étudier le pourquoi (§1.) et le comment

(§2.) du placement.

§1 – Les raisons de cette activitéA l’origine de la création du prêt de main-d’œuvre et donc de l’activité de placement de ses

salariés existe des raisons. Ces nouvelles formes de gestion du personnel en totale

contradiction avec la forme traditionnelle bilatérale de travail ont un intérêt, sinon elles ne

seraient pas utilisées. Les raisons se trouvent facilement en étudiant les débats précédant la

mise en œuvre de chaque forme de prêt de main-d’œuvre. Bien que diverses elles ont des

points commun, après tout malgré leurs différences elles entrent toutes dans la catégorie du

prêt de main-d’œuvre et donc répondent à des attentes similaires. On peut séparer ses raisons

en deux catégories, si parfois le prêt de main-d’œuvre est la réponse à une situation de blocage

des entreprises clientes (A.) elle est aussi parfois l’occasion de considérer différemment

l’utilisation de la main-d’oeuvre dans ces dernières (B.)

A – Le prêt de main-d’œuvre comme solution

Chaque texte créant un type de prêt de main-d’œuvre a connu son propre débat quant à

l’opportunité de la création. Il est donc peu opportun de traiter ensembles les différentes

raisons qui concernent ces textes même si ils répondent tous à une envie de résoudre les

problèmes que peuvent rencontrer des entreprises. L’étude sera menée point par point.

Des entreprises de faible dimension hésitent parfois à embaucher un salarié « alors même

qu’elles en auraient un réel besoin, soit pour effectuer un travail ne nécessitant pas l’emploi

1 Art. L. 310-1 C. trav.

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d’un salarié à temps complet, soit pour permettre une véritable réduction de la durée du travail

de leurs salariés permanents sans pour autant compromettre le fonctionnement de l’entreprise

et notamment remettre en cause les heures d’ouverture au public »1. Pour pallier à ce constat,

le législateur a décidé de créer les groupements d’employeurs. Cet argument de mise en péril

de l’entreprise en cas d’embauche a également été invoqué pour l’intérim. Dans ce contexte

on comprend bien la raison, affichée, est de trouver des solutions pour les entreprises qui ne

peuvent respecter pleinement le droit du travail sans risques pour leur survie. Le partage du

temps du salarié entre plusieurs entreprises ou la possibilité de recours à une mission (en cas

d’accroissement temporaire d’activité par exemple) sont des solutions adaptées.

Second argument : les besoins occasionnels. Cela concerne toutes les formes de prêt de main-

d’œuvre étudiées. Pour le travail à temps partagé c’est le besoin épisodique de travailleurs

qualifiés (seul argument ou presque au débat d’ailleurs ce dernier étant été très restreint), pour

l’intérim et les groupements d’employeurs c’est le besoin épisodique cette fois de travailleurs.

La nuance dans le groupement d’employeurs c’est que l’argument concernait alors une

catégorie d’employeurs et de salariés précise : les agriculteurs et la main-d’œuvre saisonnière.

La solution touche alors les employeurs mais également les salariés. Les besoins occasionnels

sont satisfaits, le salarié lui bénéficie d’un statut moins précaire dans le cadre des groupements

d’employeurs ou d’une aide au retour à l’embauche par son employeur une fois la mission

finie.

Dernier cas d’utilisation du prêt de main-d’œuvre comme solution à un problème : le portage

salarial. Le portage salarial n’est pas encadré législativement, ce n’est donc pas dans les

débats d’adoption du texte qu’il faut rechercher les raisons de son existence mais dans des

études de terrain. Madame Côte rapporte2 que selon les résultats d’une étude3 certaines

sociétés de portage ont une « préoccupation d’insertion sociale et professionnelle », le portage

est alors « un outil parmi d’autres pour favoriser le retour à l’emploi ou la création

d’activité ». Le public visé étant les cadres en difficulté pour le retour vers l’emploi. Le prêt

de main-d’œuvre est alors une solution non pas pour le client ou l’employeur principalement

mais pour le salarié.

L’argument est là : si l’activité de placement est utilisé c’est pour donner une solution à la

difficulté de l’accès à l’emploi (retour à l’emploi difficile ou difficulté de création d’emploi

1 Projet de loi DDOS : Doc. AN 1984-1985, 2ème s°, n°2661, exposé des motifs, p. 12. Adde M.

DELEBARRE. 2 CÔTE (N.), Le portage salarial : entre innovation et dérives, JCP E, n° 1599, 2002, p. 1759.3 Le portage salarial, Etude réalisée pour le Ministère de l’emploi et de la Solidarité, GREP, janv. 2001.

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dans les entreprises). On peut discuter de la véracité de cet argument, mais ce n’est pas là

l’objet de notre propos. Voyons plutôt l’existence d’un autre type d’argument.

B – La main-d’œuvre comme variable

Raison souvent moins affichée, la possibilité d’utiliser la main-d’œuvre comme une variable

plus facilement dans son entreprise est néanmoins une réalité dans le cadre du prêt de main-

d’œuvre. Les salariés utilisent eux-mêmes ce constat.

Le phénomène d’extériorisation des tâches est l’une des causes de ce constat, faire appel à une

entreprise extérieure pour gérer telle ou telle tâche est devenu courant. Certains portés l’ont

compris, leur activité a donc essentiellement une finalité commerciale. Le portage a, dans ce

cas, pour « vocation de satisfaire de « nouveaux besoins socio-économiques » » décelés au

travers de « l’extériorisation juridique de l’emploi pratiquée par les entreprises »1 .

Un second groupe de portés ont eux la volonté « de prendre en charge leur propre emploi »2, il

ne souhaitent pas créer d’entreprise mais veulent travailler en toute indépendance. Ces salariés

font le choix d’être une variable pour les entreprises qui les utiliseront.

Dernier exemple, l’intérim. Pour certain l’intérim « joue un rôle important sur le marché de

l’emploi » en ce qu’elles « contribuent à assurer l’entrée en entreprise de travailleurs qui, pour

nombre d’entre eux, y seront embauchés, une fois parvenus au terme de leur mission

d’intérim » ; les ETT « concourent à la formation des personnes qu’elles recrutent afin de les

rendre aptes à exécuter les tâches proposées par leurs clients »3. Mais si l’intérim est sensé

servir aux entreprises qui ne peuvent malheureusement pas embaucher, comment font-elles

pour embaucher en fin de mission ? L’intérim est détourné de sa fonction première et sert de

test pour le salarié ainsi que de période de formation, on teste ces aptitudes.

Les raisons d’utilisation du prêt de main-d’œuvre sont plus ou moins louables mais là encore

ce n’est pas le sujet de notre propos. Notre propos concerne l’impact sur la création du lien

d’emploi de ces raisons. Le peut de volonté affichée de certains employeurs ou salariés à

nouer une relation durable de travail peut fragiliser le lien d’emploi. En effet le lien d’emploi

ne concerne pas que le salarié et son employeur mais aussi le salarié et l’entreprise cliente, car

le salarié va travailler dans les locaux de cette dernière. Il ne sera jamais le salarié du tiers

1 CÔTE (N.), préc. p. 1759.2 Rapp. GREP. Préc. 3 TEYSSIE (B.), Travail temporaire, JurisClasseur, Travail Traité, Fasc. 3-30, p. 3, mise à jour 3 novembre

2005

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mais il entretiendra des relations avec lui dans le cadre de l’exécution de son travail. On peut

entendre qu’un employeur ne puisse embaucher un salarié à temps plein par manque de

moyens, il fera appel au prêt de main-d’œuvre. Mais le lien d’emploi sera quand même

fragilisé du fait de la précarité de la situation, le salarié ne sera présent que le temps de

l’accomplissement de sa mission. La fragilité naissant des motifs, pour le tiers, de l’utilisation

du prêt de main-d’œuvre est-elle contrebalancée par l’utilisation concrète de la technique du

placement ?

§2 – La forme de cette activitéAprès avoir déterminé pourquoi les employeurs font appel au prêt de main d’œuvre nous

allons examiner comment est opéré le placement. Cette partie de l’étude pose quelques

difficultés, la première étant simple le travail à temps partagé n’a pas encore bénéficié de ses

décrets d’application il n’est donc pas encore appliqué. On ne peut donc pas savoir comment

les entreprises de travail à temps partagé assurent leur mission de placement des salariés, cette

forme de prêt de main-d’œuvre ne sera pas étudiée à ce titre.

De plus actions menées dans le but du placement des salariés ne sont que peu étudiées en

droit, c’est par des biais différents que l’on trouve des éléments de réponse. La partie qui suit

ne sera que partiellement complète, ne reflétant qu’une partie de la réalité, mais pour cerner

un maximum les méthodes employées au placement certains éléments peuvent êtres utilisés.

Quelques indicateurs textuels peuvent nous aider, les recherches réalisées par certains auteurs,

entretiens auprès de professionnels (ceux qui ont pu ou voulu répondre) et enfin la méthode de

la comparaison avec l’activité de placement de l’Anpe.

Par cette méthode on peut partiellement comprendre quelles relations entretiennent les

employeurs avec les utilisateurs aux fins de placement (A.), et déceler quelques outils à la

réalisation du placement (B.).

A – Les relations employeur util isateurs

Si l’employeur veut pouvoir placer ses salariés il doit convaincre les utilisateurs de la qualité

de ces derniers ou encore de l’apport de cette opération. Mais leurs rapports s’organisent

différemment selon la forme de prêt de main-d’œuvre concernée.

Le groupement d’employeurs déterminer les besoins de chaque membre du groupement et agir

en conséquence, il embauchera un salarié que si les membres du groupement en ont besoin.

Les relations qu’il entretien avec les utilisateurs ne se jouent pas sur la faculté d’accueillir tel

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salarié à tel poste. L’organisation du groupement étant fondée sur les besoins réels des

membres, le groupement n’a pas à convaincre de la nécessité du placement. Cette forme

originale de prêt de main-d’œuvre n’engendre pas de relations employeurs clients mais

association et membre de cette association.

Seconde forme de prêt de main-d’œuvre, seconde organisation des rapports totalement

contraire : le portage salarial et l’absence presque complète de relations. Dans cette situation

c’est le porté et non l’entreprise de portage qui négocie les missions, leur durée, leurs

conditions d’exécution. La société de portage n’a donc aucune relation avec les entreprises

clients au titre du placement pour la détermination des missions, la preuve de la qualité du

salarié ou encore la nécessité de l’opération. L’unique élément qu’apporte la société de

portage est son existence, le porté pourra plus facilement convaincre un employeur de lui

confier une mission si il sait qu’une société de portage existe. Il n’aura pas à embaucher le

salarié, même en CDD, le temps de l’accomplissement de la mission. Ici ce n’est pas

l’employeur qui exécute à proprement parler l’activité de placement.

Reste une dernière forme de relations : les relations commerciales, celles que lient l’entreprise

de travail temporaire et les utilisateurs potentiels. A ce stade nous allons utiliser la méthode de

la comparaison. Cela permettra de mesurer avec plus de précision l’impact de l’activité de

placement sur la création du lien d’emploi. L’Anpe met en relation des offres et demandes

d’emploi, les agences d’intérim elles mettent en relation des demandes et offres de contrat de

mission. L’objet n’est pas exactement le même mais la comparaison des techniques de mise

en relation permettra de les éclairer l’une et l’autre. Pour mener à bien cette comparaison des

entretiens basés sur le même type de questions ont été menés auprès d’un responsable

d’agence d’intérim et d’un responsable au sein de l’administration de l’Anpe1. L’agence Kelly

Services de Lille est une agence spécialisée dans l’intérim dit « qualifié », elle prospecte ses

éventuels clients en ventant cette caractéristique première. C’est une relation commerciale de

clientèle qui s’instaure, Kelly Services essaye d’instaurer une relation de confiance en gardant

une forte présence chez ses clients et en demandant à chaque fin de mission une évaluation

sur la qualité de la réalisation de la mission par l’intérimaire. La relation qui s’instaure permet

à l’ETT de tisser un carnet de clientèle et de placer plus facilement ses salariés. Pour l’Anpe,

le plan de cohésion sociale a supprimé l’obligation de dépôt des offres d’emploi à l’Anpe.

Mais à la différence des autres administrations du travail les entreprises sont considérées

1 Entretiens, Loïc CAVROIS, directeur d’agence chez Kelly Services, 12 boulevard Carnot Lille, 5 juin

2006 ; Bruno DROLEZ, directeur délégué à la direction départementale de l’Anpe, 12 rue Jemmapes Lille,

mardi 11 juillet.

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différemment à l’Anpe. L’Anpe doit prospecter les entreprises et savoir où il existe des

possibilités d’emploi. Une relation client, prestataire de services et non administration,

administrés est instaurée. Le terme « clients » est employé à l’égard des entreprises (ce qui a

d’ailleurs choqué M. Drolez a son arrivée dans le service, il était auparavant dans les services

de l’inspection du travail), une relation commerciale basée sur la confiance est instaurée. Sur

le bassin de Lille, toutes les entreprises ne sont pas visitées, elles sont trop nombreuses et le

personnel manque, on étudie alors leur taille et leur potentialité d’embauche pour sélectionner

les entreprises à visiter. Les relations tissées avec les entreprises semblent similaires,

cependant l’Anpe ne propose pas les mêmes choses qu’une agence d’intérim. Une relation

plus régulière s’instaure entre l’ETT et ses clients qui sont moins nombreux (donc l’ETT est

plus disponible pour eux), et feront appel plus régulièrement aux missions d’intérim pour une

tâche ponctuelle à accomplir qu’à un salarié pour l’employer.

Les types de relations avec les utilisateurs sont diverses, mais elles ont toutes le même

objectif : réussir à placer le salarié. La société de portage elle-même, par son existence, y

concoure. L’étude des relations entretenues avec les utilisateurs n’est que partielle, nous ne

savons pas précisément quelles relations tisse le porté avec les entreprises, et les constatations

faites au titre des groupements d’employeurs ne sont pas tirées d’une recherche de terrain.

Mais pour ce qui a pu être constaté, on sait que l’employeur aide au placement du salarié.

L’aide au placement renforce la création du lien d’emploi, le salarié accédera plus facilement

à l’emploi. Par la suite nous allons adopter une approche différente ; par la comparaison des

outils utilisés par l’ETT et l’Anpe au placement des salariés, nous essayerons de comprendre

si l’aide au placement proposée par l’ETT change la donne dans la création du lien d’emploi.

Autrement dit le salarié a-t-il les mêmes capacités à accéder à l’emploi par l’intermédiaire de

l’Anpe que par l’intermédiaire d’une ETT. La présence d’un intermédiaire (l’ETT dans

l’exemple présent) renforce-t-elle la création du lien d’emploi ?

B – Les outils au placement

L’Anpe est un établissement public institué par l’ordonnance du 13 juillet 1967, c’est un

service public centré sur une mission principale : la mise en relation d’offres et de demandes

d’emploi. Bénéficiaire, à ses débuts, du monopole du placement en France, elle a vu ce

dernier, au fil des années, s’étioler. L’ordonnance du 20 décembre 19861 vient en premier lieu

réorganiser le monopole public du placement, en adéquation avec les lois de décentralisation.

1 Ord. N° 86-1286, JO 21 déc. 1986

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La volonté politique affichée fut de multiplier le nombre d’intervenants sur le marché du

placement (les communes par exemple et autres collectivités territoriales), mais alors le

placement, au sens strict reste toujours du domaine du service public. La loi du 18 janvier

20051 franchit une étape supplémentaire en supprimant le monopole public de placement des

travailleurs et ouvre l’activité de placement, au sens strict, à des opérateurs privés.

L’ouverture de l’activité de placement à des opérateurs privés signifie-t-elle l’échec de

l’action de l’Anpe ? Il ne serait alors pas forcément nécessaire de comparer Anpe et agences

d’intérim, si la première est en échec et les seconde non (une activité commerciale qui échoue

est vouée à disparaître or ce n’est pas le cas) c’est sûrement que la première aide moins à la

création du lien d’emploi. Mais le constat d’échec n’est pas la raison de ce bouleversement

législatif, la libéralisation de « l’exercice de l’activité de placement par le recours à des

organismes privés ; le renforcement de la concurrence doit favoriser l’émergence des bonnes

pratiques et dynamiser le service public de l’emploi »2 ; la comparaison a encore toue sa place

et son opportunité.

La façon dont est menée l’activité de placement doit nous renseigner sur la qualité de celle-ci.

Chez Kelly Services chaque directeur d’agence défini sa politique commerciale avec le

directeur régional, nous n’avons pu savoir exactement en quoi consistait la politique

commerciale de l’agence Kelly Services de Lille. De plus il existe une feuille de route que

doivent suivre chaque directeur d’agence de cette entreprise, son contenu ne nous a pas été

révélé. Leur action est donc planifiée et encadrée par plusieurs documents. L’Anpe elle aussi a

une « feuille de route » lui dictant la démarche à suivre : les contrats de progrès Etat-Anpe

(CPEA ci après). Les CPEA définissent les orientations stratégiques de l’Anpe sur une

période donnée. Quatre de ces contrats ont été signés aujourd’hui, ils couvrent différentes

périodes. Le premier signé le 18 juillet 1990, pour la période 1990-1993, comportait deux

axes d’actions : renforcer la qualité des services fournis par l’Anpe et se doter d’instruments

pour lutter contre la sélectivité sur le marché de l’emploi. En 1993, un tournant s’opère dans

la philosophie d’action de l’Anpe avec l’arrivée à la direction de M. Bon. Le second CPEA est

conclu le 5 juillet 1994, pour la période 1994-1998, les deux axes sont : privilégier une

démarche plus commerciale et professionnelle vis-à-vis des entreprises et collecter le plus

d’offres possibles. Mais cette stratégie qui privilégie le chiffre a connu des dérives dans

certaines agences où le chiffre était préféré à la qualité du service. Le troisième CPEA fut

1 L. n° 2005-32, JO 19 janv. 20052 Introduction du rapport fait par L. SOUVET et V. LETARD au nom de la commission des Affaires sociales

du Sénat, Doc. Sénat, Rapp. N° 32, 2004-2005.

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signé le 28 janvier 1999 pour la période 1999-20031. Les axes sont alors plus nombreux, ils

couvrent : « l’insertion professionnelle des jeunes » comme priorité, « la lutte contre

l’exclusion », « la promotion de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes »,

continuer le renforcement de la qualité des services rendus aux entreprises et aux demandeurs

d’emploi, la prévention et la diminution du chômage de longue durée. Des populations cibles

sont déterminées et on rappelle que l’Anpe doit toujours augmenter la qualité de ses services.

Le quatrième CPEA a été signé le 23 juin 2006, pour la période 2006-2010. Il s’articule autour

de trois axes : « un service public centré sur sa mission de placement pour tous », « un service

plus personnalisé et plus efficace pour les demandeurs d’emploi et pour les entre prises » et

enfin « une organisation et des moyens au service de la mission de placement »2. M. Drolez

considère que les CPEA ont tout leur intérêt car c’est une feuille de route et à long terme ;

l’Etat donne une vision à cinq ans de ce qu’il attend et de ce qu’il donne pour cela (chaque

CPEA contient également les moyens donnés par l’Etat à l’action de l’Anpe). Ce document

contient les objectifs et les moyens, de plus il a une certaine durée (il ne change pas à chaque

changement de gouvernant), enfin ce document est un contrat : il est négocié et pas imposé.

Anpe et ETT disposent donc chacun d’une feuille de route les renseignant sur la démarche à

suivre, le renseignement des moyens disponibles, des attentes ou encore de certaines

conditions à remplir.

L’Anpe dispose d’un fichier contenant les demandeurs d’emploi, elle dispose d’un outil

considérable pour pouvoir puiser de la main-d’œuvre. Kelly Services dispose certes d’un

fichier d’intérimaires par agence mais également la possibilité d’aller puiser dans le fichier

d’autres agences. L’ETT disposera toujours de moins de salarié à placer, mais ce la peut être

un avantage à l’activité de placement : avec moins de salariés à placer on peut leur consacrer

plus de temps à les accueillir et à leur trouver un emploi. Le problème de la masse des

demandeurs d’emploi, l’Anpe essaye de le régler avec le système de personnalisation : « le

parcours autour de la problématique de la personne ». Le quatrième CPEA a même renforcé

cette logique, l’offre de service sera différente en fonction du demandeur et de ses besoins. Le

demandeur qui présente une large autonomie dans la recherche d’emploi sera reçu en entretien

tout les trois mois puis tout les mois en cas de non retour à l’emploi. Un demandeur plus en

difficulté sera lui invité à suivre des ateliers d’aide au retour à l’emploi ou des stages de

formation et de remise à niveau. La notion de parcours personnalisé est employée, le parcours

1 Liaisons Sociales, N) 7979, cahier joint au n° 12859, mars 1999 2 Communiqué de presse , Ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement et Anpe, 23 juin

2006.

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est déterminé après un premier entretien. De plus le demandeur sera suivit par un référent, il

sera toujours reçu par ce dernier. Le quatrième CPEA a généralisé et intensifié la démarche de

personnalisation. Mettre l’accent sur les besoins de chacun au retour à l’emploi et la suivit du

demandeur par la même personne pallient un minimum aux difficultés rencontrées par le

nombre de demandeurs.

Les ETT travaillent selon le principe de la sectorisation, chaque agence gère un secteur

d’activité. Chaque salarié d’agence sera dans une agence selon sa connaissance de tel ou tel

secteur d’activité, la connaissance de l’emploi ou type d’emploi rend l’activité de placement

plus facile, les ETT sont en terrain connu. L’Anpe ne fonctionne pas sur ce principe, enfin

presque. Sur le bassin de Lille il est fait appel à la technique de l’expertise sectorielle : des

équipes professionnelles de bassin, 18 sur Lille, sont responsables d’un secteur d’activité, il

y’a une spécialisation des agences du bassin d’emploi de Lille en fonction du secteur

d’activité des entreprises. L’agence rue Jemmapes est, par exemple, spécialisée dans le

placement des cadres et demandeurs diplômés dans les études supérieures. Cette technique

n’est cependant pas utilisée sur l’ensemble du territoire français. Le caractère généraliste de

l’Anpe peut freiner sa connaissance des emplois a pourvoir et donc freiner le placement à

l’inverse des ETT.

Un dernier outil est utilisé à l’amélioration de l’activité de placement : le contrôle de la qualité

des opérations de placement. L’Anpe comme Kelly Services connaissent ce procédé. A

l’Anpe on nomme cela le pilotage par performance, c’est un système d’objectifs fixés aux

agences par lequel on mesure ensuite l’efficacité et la productivité de l’Anpe, c’est innovant

dans l’administration. Une culture de performance est installée, mais afin d’éviter les dérives

passées de chiffre à tout prix ce sont la productivité mais aussi l’efficacité qui sont mesurés à

l’aide notamment du ratio « mer/ mer+ » ce qui signifie le nombre de mises en relation

effectuées sur le nombre de mises en relations qui aboutissent à une embauche. De plus un

audit est réalisé chaque année par un cabinet extérieur. Chez Kelly Services la démarche

qualité existe également et à plusieurs niveaux. Mensuellement chaque agence vérifie son taux

de placement et la satisfaction des clients, un état des lieux est dressé pour mettre en place des

solutions d’amélioration. Chaque année des agences prises au hasard font l’objet d’un audit,

suivant une démarche qualité écrite à suivre, enfin le directeur régional effectue lui aussi une

enquête qualitative et quantitative. La vérification de la qualité du placement permet de mieux

cerner la démarche à suivre pour renforcer ce dernier. On pointe les problèmes et on en

recherche les solutions. Si la démarche qualité prend une autre dimension à l’Anpe c’est parce

qu cette dernière doit gérer une masse plus large de demandes et d’offres d’emplois.

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Les outils utilisés dans le cadre de l’Anpe et des ETT sont les mêmes mais ils sont utilisés

différemment, L’Anpe est un service public ne l’oublions pas, même si elle tend à se

rapprocher de la technique de placement d’une ETT c’est une administration et non une

entreprise commerciale. Il reste que son efficacité reste inférieure à celle d’une ETT de par le

public plus nombreux qu’elle a à gérer, de plus l’Anpe « ne peut pas créer de l’emploi, se sont

les entreprises qui sont seules à le faire »1, l’accès à l’emploi est rendu difficile par manque

d’emplois disponibles.

A l’étude du principe du placement on peut conclure que l’intervention de l’employeur aide à

l’accès à l’emploi du salarié. Cette aide prend différentes formes, elle est menée à l’aide de

différents outils plus ou moins performants mais elle est bien réelle. Si l’existence de

l’employeur mène plus facilement le salarié en situation de travail c’est qu’en principe

l’existence d’un tiers à la relation de travail renforce la création du lien d’emploi au stade de

l’accès à l’emploi. La conclusion est à ce stade trop hâtive car il reste à vérifier qu’en pratique

le lien d’emploi est renforcé.

Section II – la concrétisation du placement

Les employeurs font, dans le cadre du prêt de main-d’œuvre, des efforts afin que le salarié soit

mis en situation de travail chez un tiers, c’est la logique du placement. Après avoir compris

pourquoi et comment l’employeur place ses salariés il faut étudier le résultat du placement.

Car si la logique du placement renforce la création du lien d’emploi, en causant un accès

facilité à l’emploi, cela ne signifie pas que la réalisation concrète du placement renforce

également la création du lien d’emploi. Dans quelle situation se trouve le salarié une fois

placé, sa situation est-elle marquée par la force du lien d’emploi ?

Nous allons alors poser deux hypothèses et étudier l’impact sur la création du lien d’emploi de

ces deux situations. Dans le premier cas l’opération de placement est menée à bien, le salarié

est envoyé en mission. Il le sera dans le cadre d’un contrat de mission, support juridique de

l’opération de mise à disposition (§1.). Dans la seconde hypothèse l’opération de placement

est un échec, le salarié n’accède pas à une situation de travail, quelle sera alors sa situation

(§2).

1 Entretien Bruno DROLEZ

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§1 – Le contrat de missionLe contrat de mission constitue l’accès réel à l’emploi, c’est à ce moment que le salarié

déploiera son activité professionnelle. Cependant le salarié n’est pas partie au contrat de

mission, l’employeur et l’utilisateur y sont parties. Le contrat de mission marque donc

l’accord qui existe entre ces deux personnes. Mais le contrat de mission a un second rôle, il

organise les modalités concrètes de la mission que va remplir le salarié. Le contrat de travail

signé précédemment ne peut pas à lui seul fixer les conditions d’emploi du salarié, car on ne

sait pas encore où, au bénéfice de qui, dans quelles conditions, et quelle tâche devra accomplir

le salarié.

Le contrat de mission est un élément essentiel à la création du lien d’emploi puisqu’il signifie

l’accès au travail, cependant la réaction du législateur n’est pas uniforme à son égard selon les

formes de prêt de main-d’œuvre. On remarque que dans certains cas le législateur accorde une

importance particulière au contrat de mission et encadre de conditions ce dernier (A.). A

l’inverse le législateur fait parfois preuve d’ignorance et laisse aux parties le soin de gérer

entièrement l’élaboration du contrat de mission (B.).

A – Encadrement du contrat de mission

Pour chaque mission d’intérim ou de travail à temps partagé l’employeur et l’utilisateur

doivent conclure un contrat de mission1. Ce dernier a un contenu précis et la mission est elle-

même encadrée par des règles. Voyons d’abord le contenu imposé par la loi.

Le contrat de mission doit, dans les deux cas être constaté par écrit, cette obligation est

contenue dans la lettre du texte de l’article L. 124-3 du code du travail, cette formalité dispose

d’un délai de deux jours ouvrables suivant la mise à disposition. La sanction en cas de

méconnaissance de la règle est la nullité absolue de l’accord2, l’utilisateur devra tout de même

acquitter le prix correspondant à la prestation qui lui a été fournie3. L’article L. 124-26 lui

précise que le contrat doit être signé, cela doit sûrement vouloir dire que l’écrit est exigé. Le

contrat de mission contient ensuite des mentions obligatoires. Point commun aux deux formes

de prêt de main-d’œuvre, « toute clause tendant à interdire l’embauchage par l’utilisateur du

salarié temporaire à l’issue de sa mission est réputée non écrite »4 ; le texte du travail à temps

1 Art. L. 124-3 C. trav. pour l’intérim, art. L. 124-26 C. trav. Pour le TTP 2 Soc. 17 avr. 1980. Juri-soc. 1980, F 64.3 Soc. 7 nov. 1995 : Dr. Trav. 1995.4 Art. l. 124-3 C. trav.

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partagé étant une adaptation de ce texte à la situation. Ce point est important, « l’employeur de

fait » pourra, si il est satisfait du salarié, l’embaucher au terme de la mission et ainsi lui

procurer un statut moins précaire. Viennent ensuite les clauses qui doivent figurer

obligatoirement dans le contrat. Le contrat de mission d’intérim comportera : le motif pour

lequel il est fait appel au salarié temporaire et sa justification, le terme de la mission ou la

possibilité de modification du terme, les caractéristiques particulières du poste de travail à

pourvoir, le lieu et l’horaire de la mission, la qualification exigée, la nature des équipements

de protection individuelle que le salarié devra utiliser et si ils sont fournis par l’employeur ou

l’utilisateur, enfin le montant de la rémunération et ses différents composantes. Le contrat de

mission de travail à temps partagé lui « précise le contenu et la durée estimée de la mission, la

qualification professionnelle, les caractéristiques particulières du poste de travail ou des

fonctions occupées, le montant de la rémunération et ses différentes composantes »1.

L’insertion du montant de la rémunération, des caractéristiques du poste de travail et de la

qualification du salarié est la preuve que le contrat de travail ne pouvait contenir ses

informations et est donc insuffisant au départ en mission. La non observation de ces règles de

forme entraîne l’annulation du contrat de mise à disposition et la requalification de l’opération

en prêt de main-d’œuvre à but lucratif prohibé. Si le législateur impose un certain contenu à

une convention, ce n’est que par la force des sanctions qui entourent son inexécution que l’on

peut mesurer la force de l’obligation. En l’espèce, la sanction est de taille.

Les règles qui encadrent la mission sont simples et relèvent de la nature particulière de

l’opération. L’intérim ne peut avoir pour objet de pouvoir « durablement un emploi lié à

l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice », la mission ne peut donc pas

prendre la forme d’un CDI, des règles encadrant la durée de la mission ont été prises à cet

effet. Le principe est simple, la mission doit, toute les fois où c’est possible, comporter un

terme précis et ne pas dépasser une certaine durée2. Il n’est fait aucune allusion aux règles

concernant le terme de la mission dans le cadre du travail à temps partagé. Le législateur

semble penser, et on ne sait pourquoi, que le travail à temps partagé mérite d’être moins

encadré textuellement que l’intérim. Mais il existe des cas où le législateur encadre encore

moins la convention qui uni employeur et utilisateur.

1 Art. L. 124-26 C. trav.2 Art. L. 124-2-2, L. 124-2-4, L. 124-2-5, L. 124-2-6 C. trav.

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B – Liberté dans le contrat de mission

Le salarié est embauché par le groupement d’employeurs certes, mais c’est auprès des

membres du groupement qu’il sera appelé à exercer son activité professionnelle. Les

conditions dans lesquelles le salarié sera accueilli par les entreprises utilisatrices ont été

prévues par le législateur. Cependant le texte ne mentionne pas l’existence même d’un support

juridique à l’envoi en mission. Le lien entre le groupement et les entreprises clients existent

déjà, il y’a une association et ses adhérents. De plus, pour certains, le législateur a entendu là

renvoyer implicitement à l’application du droit commun des obligations1. Nous n’avons

malheureusement pas pu vérifier ces considérations par une analyse de terrain, nos

constatations sur ce point s’arrêteront donc ici.

Le portage salarial ne fait l’objet d’aucun texte en droit, le législateur n’a donc logiquement

pas pu encadre la mise en œuvre du contrat de mission. De plus cette pratique évolue sans

encadrement juridique, elle prend donc des formes diverses. Mais il semble que le plus

souvent il est fait appel au contrat d’entreprise comme support juridique, il permet ainsi

d’éviter de tomber dans l’illégalité2. Le contrat d’entreprise est régi par les articles 1787 à

1799 du Code civil, c’est un contrat « par lequel une personne se charge de faire un ouvrage

pour autrui, moyennant une rémunération, en conservant son indépendance dans l’exécution

du travail »3. Les protagonistes devront alors vérifier que l’exécution de la tâche nécessite

forcément la présence d’un personnel extérieur au client et que l’exécution se fait en totale

indépendance, au risque de tomber dans l’illégalité.

L’hypothèse selon laquelle le placement porte ses fruits nous démontre que le contrat de

travail seul ne peut réaliser la mise à disposition, un second support juridique est nécessaire.

Le contrat de mission selon les cas complète le contrat de travail, consolide la légalité de

l’opération, ou encore précise les relations employeur utilisateur. Mais il est à chaque fois

marqué de caractère temporaire, le salarié n’est pas détaché en mission pour une longue durée.

Le contrat de mission n’est pas un contrat pérenne. De par cette caractéristique, le contrat de

mission fragilise, en lui-même, la création du lien d’emploi, l’accès à l’emploi ne sera que

pour un temps. Le caractère temporaire de ce type de contrat fragilise la force du lien d’emploi

et donc la création de celui-ci. Si le placement échoue le salarié sera-t-il en lien avec son

employeur comme lors d’une relation de travail bilatérale ?

1 XX, Les groupements d’employeurs, JurisClassuer, Trvail Traité, Fasc. 3-40, p. 8.2 CÔTE (N.), Le portage salarial : entre innovation et dérives, JCP E, n° 1599, 2002, p. 1760.3 GUILLIEN (R.), VINCENT (J.), préc.

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§2 – L’échec du placementL’étude de la concrétisation du placement du salarié doit également envisager l’hypothèse de

l’échec de cette dernière. Si l’employeur ne peut placer son salarié, ou si il existe un laps de

temps entre le moment de la mise en relation entre l’employeur et le salarié et la mise à

disposition réelle, quelle sera la situation du salarié ? Est-il déjà considéré comme un salarié,

il ne fournit pas de prestation de travail mais ce n’est pas de son propre chef. Nous sommes en

situation d’absence de mission à réaliser (A.). Autre cas, la situation du salarié entre deux

placements, est-il encore rémunéré, a-t-il encore le statut de salarié ? Il est en situation

d’attente d’une nouvelle mission, reste à en déterminer les conséquences (B.).

A – L’absence de mission

Il faut tout d’abord préciser que cette situation ne peut arriver dans le cadre d’un groupement

d’employeurs, en effet les recrutements sont fonction des besoins des membres. Le salarié

aura forcément une mission à accomplir après avoir été embauché.

Le porté lui bénéficie d’une convention différente du contrat de travail, ce dernier étant signé

que lorsqu’une mission est à accomplir. Une « convention d’adhésion » ou encore de

« partenariat » est généralement signée entre le porté et la société de portage, elle organise

leurs relations. Il y’est fait référence aux conditions de recherche et de l’exécution des

missions. Le porté n’est donc pas encore le salarié de la société de portage il ne peut donc rien

demander à cette dernière, le lien d’emploi n’est pas encore tissé.

Pour ce qui est des entreprises de travail temporaire, certaines s’engagent à tout faire pour

vous trouver une mission à exécuter lorsque vous vous mettez en relation avec elles. Mais ce

n’est qu’un engagement à caractère publicitaire, pour que vous les choisissiez eux et pas les

autres. Le salarié ne pourra rien demander en cas d’échec du placement, aucun contrat n’est

signé. Le contrat de travail lui-même ne l’est pas, pas avant tout départ en mission.

Le travail à temps partagé ne faisant pas encore l’objet d’application, nous ne pouvons faire

que des suppositions à son sujet. L’article L. 124-27 du code du travail précise qu’un « contrat

est signé » et qu’il « est réputé être à durée indéterminée ». Le salarié pourrait-il à ce titre

demander le versement de son salaire en cas d’échec de la procédure de placement, son

employeur ne lui fournissant pas de travail à accomplir ? Cette situation ne risque pas de se

produire car il n’est pas précisé à quel moment le contrat de travail doit être signé, le

demandeur d’emploi ne bénéficiera donc pas du statut de salarié tant que le contrat de travail

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ne sera pas signé. Les entreprises de travail temporaire n’effectueront cette obligation qu’après

avoir trouvé une mission à faire exécuter au salarié.

La réalité de la création du lien d’emploi aura lieu uniquement si et quand l’employeur pourra

placer son salarié. Avant cette étape l’employeur évité de créer tout lien fort avec le

« salarié ». Mais une fois le lien crée et la première mission effectuée dans quelle situation se

trouvent employeurs et salariés.

B – L’entre deux missions

Peut d’information peuvent être récoltées concernant la situation du salarié entre deux

missions. La loi sur le travail à temps partagé ne fait aucune allusion a cette situation, mais le

salarié a signé un contrat de travail « réputé être à durée indéterminée ». Le salarié se trouve-t-

il en situation de chômage partiel, les décrets d’application organiseront-ils cette période de

façon dérogatoire au droit commun. Seul l’avenir et la pratique nous l’enseigneront.

Aucune information n’existe concernant le portage salarial, fruit de la pratique le portage reste

parfois un mystère. Le porté se trouve sûrement en période de recherche et prospection de

nouveaux utilisateurs sans réelle relation avec son « employeur ».

Le législateur a fait le constat du caractère intermittent de l’intérim et il s’en est emparé en

créant un droit à l’indemnité du travailleur temporaire en fin de mission1. Afin de compenser

la précarité de la situation, l’ETT doit, à l’expiration de chaque mission effectivement

accomplie, verser une indemnité au salarié intérimaire. Elle est considérée comme un

complément de salaire. Tout principe connaissant des exceptions et pour éviter tout abus de la

part de salariés malveillants, l’indemnité n’est cependant pas versée dans certains cas. Elle a

pour but de compenser la précarité de la situation, elle n’est donc logiquement pas versée

lorsque le salarié « bénéficie immédiatement d’un contrat de travail à durée indéterminée avec

l’utilisateur ». Elle n’est pas non plus due si un accord collectif le prévoit à l’occasion du

recours au travail temporaire en vue d’un emploi à caractère saisonnier ou relevant d’un

secteur où il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée. Les

salariés intérimaires ont la possibilité de faire des stages de formation, ils bénéficient des actes

de formation continue de droit commun2. Les périodes passées à la formation sont assimilées

à des missions, mais le salarié ne se verra pas verser l’indemnité de fin de mission à l’issue.

Enfin si la mission prend fin à l’initiative du salarié ou pour faute grave du salarié ou encore

1 Art. L. 124-4-4 C. trav.2 Art. L. 124-21 C. trav.

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cas de force majeure l’indemnité ne sera pas versée. Cela permet d’éviter qu’un salarié

malveillant enchaîne les missions en ne restant que quelques heures dans l’entreprise

utilisatrice afin de toucher l’indemnité, cela incite également les salariés de mener à terme leur

mission. Au caractère temporaire de la situation de mise à disposition, le législateur a choisi la

méthode de compensation par indemnité ; le caractère dérogatoire du travail temporaire ne

permet pas de présumer que le lien d’emploi perdure entre le salarié et son employeur en tout

cas aussi fortement qu’en temps de mission.

Le salarié d’un groupement d’employeurs perçoit un salaire au titre des périodes pendant

lesquelles il est mis à disposition. En dehors de ces périodes le groupement n’est pas obligé de

lui verser un salaire, sauf si il en est stipulé différemment dans le contrat de travail par

exemple. Si il ne perçoit aucun salaire en période d’inoccupation, le salarié « peut prétendre

au versement d’allocations de chômage partiel, dès lors que les conditions en sont réunies »1.

Ici encore la situation réglée est la situation financière.

Les liens existants entre le salarié et l’employeur sont faibles ici, au mieux le salarié a droit a

une indemnité en cas d’inactivité en attendant d’être placé ou « replacé ». Le législateur avoue

lui-même la situation de précarité dans laquelle se trouve le salarié intérimaire. En cas

d’échec du placement le lien d’emploi est fortement fragilisé, nous sommes faces à une

relation en pointillés qui lie le salarié à son employeur.

La présence d’un tiers à la relation de travail rend particulière la création du lien d’emploi,

mais cela la renforce-t-elle ou la fragilise-t-elle ? La conclusion ne peut être tranchée, des

éléments vont dans les deux sens. La présence du tiers assure une aide à l’accès à l’emploi. En

effet par le placement le salarié accède à un emploi avec l’aide de son employeur. De plus la

forme de l’embauche qui reste large permet à un salarié embauché pour un type de fonction

d’accéder à plusieurs missions et donc potentiellement à plusieurs emploi.

Mais la présence du tiers rend également la situation précaire. Les missions, par nature, ne

sont que pour un temps très court. Le lien qui existe entre l’employeur et le salarié est plus ou

moins fort selon que l’on se trouve en période de mise à disposition ou non. C’est une relation

en pointillés qui s’instaure alors. On peut presque dire que le revers de la médaille de l’aide à

l’accès à l’emploi est une situation de précarité ou le salarié ne sait pas si il travaillera demain.

La première partie du tableau étant dressée passons à la seconde. Après avoir été embauché et

placé le salarié travaille, mais dans l’entreprise d’un autre. Quelle sera alors la situation

concrète du salarié et du lien d’emploi.

1 XX, Les groupements d’employeurs, JurisClasseur, Travail Traité, Fasc. 3-40, p. 4.

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TITRE II – LA VIE DU LIEN D’EMPLOI ET LE

TIERS

Lors de toute cette partie le salarié sera considéré comme étant mis à disposition, il travaillera

dans l’enceinte de l’entreprise de l’utilisateur mais reste le salarié du prêteur.

Nous l’avons déjà précisé, le terme « emploi » est entendu dans cette étude en son acception

individuelle, c’est le lien personnel qui unit le salarié à l’employeur. Le lien d’emploi est

quant à lui une notion plus large. C’est l’ensemble des liens qui unissent le salarié aux

différents acteurs qui entrent en scène à l’occasion de la situation de travail salarié. Le stade

de la création recouvre les étapes allant de la situation de non emploi à celle de travail. Une

fois que le salarié travaille le lien d’emploi existe toujours, au arrive au stade de la réalisation

du lien d’emploi en ce qu’il s’exécute, s’accompli, prend vie. Le terme de vie du lien d’emploi

recouvre alors l’ensemble des liens qui unissent le salarié aux différents acteurs intervenant en

période d’exécution du travail. Ces acteurs sont nombreux, on trouve aussi bien l’employeur,

la collectivité des salariés, l’administration du travail, les représentants des salariés…. Le

salarié entretiendra des rapports avec ces personnes pendant la phase de mise à disposition.

L’étude de ces rapports nous renseignera sur la teneur des liens entre le salarié et les autres

acteurs, cela nous permettra donc de vérifier si la présence d’un tiers renforce ou fragilise la

période de vie du lien d’emploi.

Nous l’avons remarqué, le salarié entretiendra des rapports avec de nombreuses personnes, ces

derniers peuvent être rangés en deux catégories. Les rapports individuels de travail sont ceux

qui se nouent entre le salarié et l’employeur (Chapitre I.). Mais il existe également des

rapports qui concernent la collectivité de travail de l’entreprise, les syndicats de salariés et

d’employeurs, les représentants du personnel ; se sont les rapports collectifs de travail

(Chapitre II.).

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Chapitre I – Rapports individuels de travail

Dans cette partie nous allons étudier les rapports entre salarié et employeur dans le cadre du

prêt de main-d’œuvre. Quelle forme prennent ces rapports, sont-ils révélateurs de force ou de

fragilité du lien d’emploi.

Dans le cadre du prêt de main-d’œuvre un employeur met temporairement un de ses salariés à

la disposition d’un autre employeur, on compte alors deux employeurs. Le premier employeur

a signé un contrat de travail avec le salarié, il l’a embauché. Juridiquement parlant il est

l’unique employeur du salarié, c’est « l’employeur de droit ». Le second employeur lui ne

signe aucun contrat avec le salarié, mais il utilise la force de travail de ce dernier. Des

relations seront forcément nouées entre cet « employeur de fait » et le salarié. Le salarié

exécute sa prestation de travail auprès de l’employeur de fait (Section I.), mais il reste le

salarié de l’employeur de droit (Section II.).

Section I – Exécution de la prestation de travail

Le salarié exercera son activité professionnelle dans les locaux de l’entreprise de l’employeur

de fait. Les relations entretenues ici ne sont pas à proprement parler des relations de travail

toutefois elles s’en rapprochent en ce que l’employeur de droit donne et contrôle le travail.

Aucune convention n’existe entre le salarié et l’utilisateur, il n’y a pas de support juridique à

leur relation. Pourtant il existe un lien juridique entre ces personnes, elles sont détentrices de

droits et d’obligations l’une envers l’autre (§1.). L’accueil du salarié dans l’entreprise doit

respecter certaines règles, il est une pièce rapportée au sein de l’entreprise utilisatrice mais il

doit tout de même être pris en considération. Des règles et principes prévoient la forme que

prendra la présence du salarié, elles ont toutes le même but : assurer le principe d’égalité (§2.).

Il faut préciser qu’aucune information n’a pu être relevé concernant les rapports qui unissent

le salarié porté à l’entreprise utilisatrice. L’étude de cette situation de fait n’offre aucune

réponse dans cette partie.

§1 – Le lien juridique particulierAucun contrat n’est signé entre le salarié et l’entreprise utilisatrice, si tel était le cas la

convention pourrait s’analyser en contrat de travail de droit commun. Cependant des rapports

existent entre eux, le salarié exécute sa prestation de travail dans l’enceinte de l’entreprise de

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l’employeur de fait. On remarque alors que des droits et obligations existent entre l’entreprise

utilisatrice et le salarié. L’employeur de fait bénéficie d’une certaine autorité à l’égard du

salarié (A.), mais il est responsable des conditions d’exécution du travail (B.).

A – Autorité sur le salarié

Le salarié entre, dans une certaine mesure, dans l’entreprise de l’employeur de fait. Les salarié

intérimaires et les salarié d’un groupement d’employeurs doivent être inscrits sur le registre

du personnel ouvert dans l’entre prise utilisatrice. Mention est faite de leur situation

particulière ainsi que le nom ou la dénomination et l’adresse de leur employeur de droit1.

Cette formalité est relative au contrôle de l’emploi, de plus la présence du salarié est

dorénavant inscrite sur un document.

Il existe un second signe de l’entrée du salarié dans l’entreprise, le décompte des effectifs.

Depuis l’ordonnance datant du 24 juin 20042, les règles concernant les groupements

d’employeurs et l’intérim ont été harmonisées. Désormais, l’article L. 620-10 du code du

travail prévoit que les salariés sont pris en compte dans l’effectif de l’entreprise utilisatrice au

prorata de leur temps de présence au cours des douze mois précédents. Toutefois, le salarié

intérimaire, envoyé en mission dans le but de remplacer un salarié absent ou dont le contrat de

travail est suspendu, est exclu du décompte des effectifs.

L’entreprise utilisatrice a un pouvoir d’autorité sur le salarié en raison de la mise à

disposition, le salarié est pour partie membre de son entreprise. Elle peut donc lui donner des

instructions concernant le déroulement de la mission, elle procure le travail. On reconnaît de

façon générale que l’entreprise utilisatrice a une autorité sur le salarié et ce pour assurer

l’exécution correcte de sa tâche par le salarié. Marque de cette autorité, les salariés

intérimaires sont soumis au règlement intérieur de l’entreprise utilisatrice pour partie. Ils

doivent respecter les règles d’hygiène et de sécurité et les règles relatives à la discipline.

Cependant, l’employeur ne peut user de son pouvoir disciplinaire qu’à l’égard de ses salariés ;

les dispositions du règlement intérieur relatives à la nature et à l’échelle des sanctions ainsi

qu’à la procédure disciplinaire ne s’appliquent pas aux intérimaires3.

1 Art. R. 620-3, al. 2, 5° et 6°2 Ord. n° 2004-602 relative à la simplification du droit dans les domaines du travail, de l'emploi et de la

formation professionnelle, JO n° 147 26 juin 20043 Circ. DRT n° 92-14, 29 août 1992, n° 70.

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Sans pour autant être juridiquement l’employeur, l’entreprise utilisatrice bénéficie d’une

certaine autorité sur le salarié. En contrepartie de ces droits, l’entreprise utilisatrice est

responsable des conditions d’exécution du travail

B – Conditions d’exécution du travail

Le salarié effectue sa prestation de travail auprès de l’employeur de fait, le législateur a pris

acte de cette situation, le salarié étant souvent plus intégré chez l’employeur de fait ce dernier

est responsable des conditions d’exécution du travail.

Pendant toute la durée de la mission, et donc la présence du salarié, l’employeur de fait est

garant des conditions d’exécution du travail. On imagine mal en effet que cette tâche incombe

à l’employeur de fait puisqu’on ne se trouve pas dans les locaux de son entreprise. Ces

conditions d’exécution du travail devront correspondre à celles déterminées par les mesures

«législatives, réglementaires et conventionnelles qui sont applicables au lieu de travail » ;

l’employeur de fait ne doit pas agir différemment selon qu’il s’agisse de ses propres salariés

ou des salariés prêtées1.

Mais le terme « conditions de travail » est large, un nombre précis de situations a été

déterminé dans le cadre de l’intérim et du groupement d’employeurs. Aucune énumération

n’est faite au titre du travail à temps partagé. L’article L. 124-30 du code du travail ressemble,

à s’y méprendre, à la lettre du texte concernant l’intérim, mais il est moins complet, il ne

précise pas quelles conditions de travail sont concernées. Faut-il comprendre que toute

« condition d’exécution du contrat de travail » est à la charge de l’employeur de fait ; ou

encore que les précisions du texte concernant l’intérim s’appliquent automatiquement au

travail à temps partagé ?

Une liste limitative précise les conditions d’exécution du travail concernées dans le cadre de

l’intérim et des groupements d’employeurs. Elle contient : « ce qui a trait à la durée du travail,

au travail de nuit, au repos hebdomadaire et des jours fériés, à l’hygiène et à la sécurité, au

travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs »2. Ce que cette énumération nous

enseigne c’est qu’on ne peut utiliser un salarié prêté sans respecter les règles applicables au

personnel de l’entreprise. On ne peut déroger à ces règles primordiales par l’intermédiaire du

prêt de main-d’œuvre.

1 Art. L. 124-4-6 pour l’intérim, L. 127-3 pour les groupements d’employeurs, L. 124-30 C. trav. pour le

travail à temps partagé2 Art. L. 124-4-6 et L. 127-3 C. trav.

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L’employeur de fait a droit à une certaine autorité sur le salarié prêté de par son intégration

partielle à l’entreprise et en vue de la bonne réalisation de la mission. En contrepartie,

l’employeur de fait doit appliquer des règles identiques à son personnel qu’aux salariés prêtés

concernant certaines conditions de travail, à cette fin il est le garant des conditions

d’exécution du travail. Au-delà du lien juridique particulier qui s’instaure entre le salarié et

l’employeur de fait, à l’entrée dans l’entreprise, le salarié bénéficie de l’application du

principe d’égalité.

§2 – Le principe d’égalitéLe principe d’égalité ne signifie pas que toute personne sera traitée de la même façon, mais

que deux personnes placées dans une situation semblable le seront. Les salariés de

l’employeur de fait et les salariés prêtés travaillent dans la même entreprise, il existe une unité

de lieu de travail et de personne bénéficiant de la force de travail. Certains salariés prêtés

occuperont même des postes similaires à ceux occupés par les salariés permanents, il existe

alors une similitude dans l’activité exercée. En raison des ces similitudes, l’application du

principe d’égalité est possible. Le législateur recherche, en effet, une assimilation poussée

entre travailleurs prêtés et travailleurs permanents. Le régime social du travailleur prêté est

régi par le principe d’égalité de traitement, lors de l’accomplissement de la mission. Nous

l’avons remarqué, les conditions d’exécution du travail sont les mêmes pour les permanents et

les prêtés. Le principe d’égalité joue également au niveau du bénéfice des équipements

collectifs de l’entreprise (A.), ainsi qu’au niveau de la rémunération du salarié (B.)

A – Equipements collectifs

Les salariés prêtés doivent avoir accès aux installations collectives de l’entreprise d’accueil,

ce qui facilite leur intégration à cette dernière. Ce droit est marqué du principe d’égalité car

c’est « dans les mêmes conditions »1 que les salariés permanents qu’ils ont accès. Les

installations collectives comprennent notamment, les moyens de transport collectifs,

installations collectives de restauration, installations sportives, vestiaires crèche

bibliothèque,…. Se sont celles qui ont vocation à faciliter l’exercice de leur activité

professionnelle. Toute personne, responsable de la gestion des installations ou des moyens de

transport collectif, qui empêchera la jouissance des installations collectives, dans les mêmes

conditions que les salariés permanents, à un salarié prêté sera punie des peines applicables aux

1 Art. L. 124-4-7 pour le travail temporaire, L. 127-4 pour les groupements d’employeurs, L. 124-29 C. trav.

Pour le travail à temps partagé.

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contraventions de la 5e classe1. Le législateur veut que le salarié prêté bénéficie d’une

meilleure intégration dans l’entreprise d’accueil et qu’il soit considéré comme l’équivalent des

salariés permanents.

Dans le cadre du travail temporaire et du travail à temps partagé, si le droit d’accès aux

installations collectives des salariés prêtés occasionne une dépense supplémentaire pour le

comité d’entreprise, elle doit lui être remboursée2. Les modalités de ce remboursement sont

alors prévues dans le contrat de mission. Les parties au contrat de mission sont l’employeur de

fait et l’employeur de droit ; selon les cas l’employeur de droit supportera entièrement la

charge du remboursement ou les parties feront appel à une formule de répartition plus ou

moins égalitaire entre elles.

Pourquoi donner l’accès aux installations collectives aux salariés prêtés, et le prévoir dans un

texte ? Le salarié déploie son activité dans l’entreprise utilisatrice, son accueil passe par la

possibilité d’avoir les mêmes droits qu’un salarié permanent ; cette affirmation peut signifier

plusieurs choses. En l’absence de l’intervention du législateur le salarié prêté ne serait pas

accueilli dans les mêmes conditions qu’un permanent ? Le salarié temporaire, en plus de sa

situation de précarité n’a pas le droit au mêmes égard qu’un permanent ? L’intervention du

législateur, même si elle est louable, fait planer le doute d’une mauvaise intégration du salarié

prêté. L’application forcée du principe d’égalité fait parfois présumer à une situation de fait

d’inégalité. Second pendant du principe d’égalité : l’égalité de rémunération.

B – Rémunération

Le montant de la rémunération versée au salarié intérimaire ou de travail à temps partagé est

fixé en fonction d’une référence minimale. Application du principe d’égalité, le salaire ne peut

être inférieur à celui d’un salarié permanent de qualification équivalente occupant le même

poste de travail, après la période d’essai3. Le salarié temporaire bénéficie également du

paiement des jours féries lorsque les salariés de l’utilisateur en bénéficient. Le respect du

principe d’égalité ne sera pas facilement vérifiable si aucun salarié permanent n’exerce le

même travail que le salarié prêté. La référence du montant du salaire est la pratique de

l’entreprise utilisatrice, cependant ce n’est pas l’utilisateur qui rémunèrera le salarié mais son

employeur : l’employeur de droit. En cas de non respect du principe d’égalité, l’entreprise

1 Art. R. 152-5, R. 152-9 C. trav.2 Art L. 124-4-7, L. 124-29 C. trav. 3 Art. L. 124-28, L. 124-3, 6°, L. 124-4-2 C. trav.

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utilisatrice ne sera pas concernée par la condamnation ; ce n’est pas elle qui est chargée de

verser le montant du salaire elle est encore moins chargée du respect du montant par

référence1. Le principe est simple, l’employeur de fait sert de référence au montant du salaire,

l’employeur de droit est en charge de le verser correctement. En cas de non respect du

principe d’égalité, le salarié doit diriger sa demande en versement de rappel de salaire à

l’employeur de droit. De plus l’employeur de droit encoure les sanctions prévues à l’article L.

152-2 du Code du travail. Cependant, l’employeur sera appelé à verser le salaire au salarié

dans un cas. Lorsque la violation du principe d’égalité résulte d’un fait ou d’une omission de

l’employeur de fait, l’employeur de droit peut se retourner contre elle lors de la demande de

rappel des salaires. L’employeur de droit doit alors établir une faute à la charge de l’entreprise

utilisatrice, et de justifier qu’il n’a pu faire différemment (démonter par exemple qu’il l’avait

mise en demeure de fournir des informations)2. Les textes concernant le groupement

d’employeur ne précisent rien quant au principe d’égalité appliqué à la rémunération du

salarié. Le salaire est fixé librement sans aucune référence de montant.

Les relations entre le salarié et l’utilisateur donnent naissance à des droits et obligations, sans

pour autant qu’elles fassent l’objet d’une convention ; le risque de requalification en contrat

de travail de droit commun est trop grand. L’employeur de fait à besoin de la force de travail

du salarié, il ne veut cependant pas se lier à lui par un contrat de travail. Le travailleur se sent-

il à l’aise avec un employeur qui se sert de lui, sans que ce service soit assez important pour

devenir son salarié. Le prêt de main-d’œuvre répond à des besoins temporaires ou partiels de

l’employeur de fait, les relations tissées entre utilisateur et salarié sont totalement imprégnées

de cela : elles ont un caractère temporaire et partiel.

De plus le législateur s’est senti obligé de faire une application forcée du principe d’égalité

entre prêtés et permanents. L’application contrainte de ce principe révèle, en général, que

l’égalité n’est pas appliquée dans les faits. Le salarié temporaire ne serait donc pas traité avec

les mêmes égards que les autres, son appartenance à la communauté de travail doit être faible.

L’étude des rapports entretenus entre le salarié et l’employeur de fait laisse apparaître la

fragilité de l’accomplissement ou la vie du lien d’emploi ; ces relations sont marquées de

caractère temporaire et partiel, pour qu’il soit considéré comme un salarié « lambda » le

salarié prêté doit être protégé par la loi. Le salarié a cependant un second employeur,

l’employeur de droit. Les rapports qu’il entretien avec ce dernier renforcent-ils le lien

1 Cass. Soc., 22 mai 1991, n° 88-40.497 : Bull. civ. V, n°254.2 Cass. Soc., 4 déc. 1996, n° 94-18.701 : Bull. civ. V, n° 422.

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d’emploi ? Le constat d’échec précité est-il contrebalancé par des rapports renforçant la vie du

lien d’emploi ?

Section II – Survivance du lien salarial

Le salarié met sa force de travail au service de l’employeur de fait mais il reste le salarié de

l’employeur de droit, c’est l’unique personne liée avec lui par un contrat de travail. Le contrat

de travail existe durant la mise à disposition du salarié, il existe donc des relations entre le

salarié et l’employeur lors de cette période. La vie du lien d’emploi est l’ensemble des

relations qu’entretient le salarié durant l’exécution du travail avec les acteurs présents, les

relations employeur salarié en sont une partie. L’étude des relations entre l’employeur et le

salarié permettra, en partie, de vérifier si l’existence d’un tiers à la relation de travail renforce

ou fragilise la vie du lien d’emploi. L’employeur a, en croit du travail des obligations envers

son salarié. Il est tout d’abord débiteur de la fourniture de travail, l’employeur de droit rempli

cette obligation en mettant à disposition le salarié au service d’un autre. Mais il est également

débiteur d’autres obligations à l’égard du salarié (§1.).

Autre lien entre l’employeur et le salarié : la subordination juridique. Le salarié sous place

sous l’autorité de l’employeur, de ce fait les règles de responsabilité civile sont particulières.

En cas de faute du salarié l’employeur peut être considéré comme responsable (§2.).

§1 – Obligations de l’employeurLe salarié et l’employeur sont liés juridiquement, le support juridique de ce lient est le contrat

de travail. Le contrat de travail est un contrat synallagmatique, les parties ont des droits et des

obligations réciproques. La partie qui suit sera consacrée à certaines obligations de

l’employeur dans le cadre du prêt de main-d’œuvre. Malgré une situation particulière, dans

laquelle le salarié met sa force de travail au service d’un autre, le salarié et l’employeur restent

juridiquement liés. L’employeur reste l’unique débiteur de la rémunération (A.), il doit

également remplir des obligations auprès de la médecine du travail.

A – La rémunération

L’employeur de fait devra rétribuer la prestation qu’il aura reçue. Mais cette rétribution ne se

fera pas sous la forme d’un salaire, au risque que la situation ne soit requalifiée en contrat de

travail de droit commun, mais sous la forme du paiement de la prestation à l’employeur de

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droit. Par la suite, l’employeur de droit versera un salaire, à son salarié au titre de la prestation

de travail effectuée. L’obligation de rémunération incombe bien à l’employeur de droit.

Afin d’assurer le paiement du salaire, certains employeurs de droit sont obligés par la loi de

souscrire une garantie financière à cet effet. Les articles L. 124-8 et L. 124-32 obligent,

respectivement, les ETT et les ETTP à souscrire une garantie financière « assurant, en cas de

défaillance », « le paiement : des salaires et de leurs accessoires, des cotisations obligatoires

dues aux organismes de sécurité sociale et aux institutions sociales ». Le texte concernant le

travail à temps partagé ne précise rien de plus. Cette garantie, imposée depuis 1979 aux ETT,

ne peut être obtenue que par voie d’engagement « de caution pris par une société de caution

mutuelle, un organisme de garantie collective, une compagnie d’assurance, une banque ou un

établissement financier habilité à donner caution »1. En cas de défaillance de l’employeur, le

salarié fera appel à la caution pour assurer le paiement de son salaire. L’employeur est tenu du

paiement des salaires mais il est également tenu de garantir le paiement de ces derniers.

Le salaire est conçu comme un élément très important dans le cadre du prêt de main-d’œuvre.

Le salarié a moins de contacts qu’un salarié lambda avec son employeur, ce n’est pas pour

autant qu’il ne doit pas recevoir de salaire. Certains textes prévoient même l’intervention

forcée du tiers en cas de défaillance de l’employeur. Si l’ETT est défaillante et que la caution

souscrite se révèle insuffisante, l’utilisateur « est substitué à l’entrepreneur de travail

temporaire pour le paiement des sommes qui restent dues aux salariés et aux organismes de

sécurité sociale ou aux institutions sociales dont relèvent ces salariés, pour la durée de la

mission accomplie dans son entreprise », et cela même si il avait payé l’ETT de tous ce qu’il

devait. Il sera ensuite subrogé dans les droits des créanciers qu’il a payés. Dans le cadre des

groupements d’employeurs, « les membres du groupement sont solidairements responsables

de ses dettes à l’égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires »2.

Le principe de responsabilité solidaire apporte des garanties importantes au salarié, ils sont

assurés de percevoir leur rémunération. En cas de défaillance du groupement au titre du

paiement des salaires, le salarié peut se retourner contre n’importe lequel des membres, pas

forcément celui auprès duquel il a exécuté sa prestation de travail. Il n’assignera qu’un seul

des membres en paiement des salaires du fait de la responsabilité solidaire. Ce principe est,

cependant, l’un des freins principaux à la création des groupements. Les entreprises hésitent a

s’engager dans une association où une erreur de gestion de cette dernière les rend

responsables, quelles soient ou non utilisatrices des salariés en question.

1 Art. L. 124-8-1 C. trav.2 Art. L. 127-1, al. 8.

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Alors que l’obligation de verser le salaire est l’obligation principale de l’employeur, il est fait

appel à l’utilisateur en cas de défaillance. Ce principe garanti aux salariés le paiement de son

salaire, mais on ressent un certain partage des responsabilités entre employeur et utilisateur.

L’utilisateur a bénéficié de la prestation de travail, il est donc parfois mis en cause au titre de

l’obligation du paiement des salaires. Seconde obligation de l’employeur : les relations avec la

médecine du travail.

B – La médecine du travail

Tout employeur entretien des relations avec la médecine du travail, les employeurs de droit

n’y font pas exception. Les travailleurs prêtés sont soumis à la surveillance médicale

applicable réglementairement à tout salarié en matière de visite d’embauche, visite périodique

et visite de reprise après arrêt de travail. Lors de ces visites le médecin déterminera l’aptitude

du salarié. A cette fin, le médecin du travail examine la situation du salarié et procède à des

examens médicaux.

Rien de particulier à cela, on respecte ici le droit commun. Ce que l’on peut discuter c’est

l’opportunité de l’exécution des obligations relatives à la médecine du travail dans l’entre

prise de l’employeur de droit. Le médecin du travail doit déterminer l’aptitude du salarié à son

poste de travail, or son poste de travail se situe dans l’entreprise de l’utilisateur. De plus la

médecine du travail est en principe une médecine de proximité, exercée auprès de l’entreprise

pour détecter et prévenir d’éventuels risques ou problèmes. Le médecin du travail ne pourra

pas tenir compte des réelles conditions dans lesquelles le salarié exécute se prestation de

travail.

Dans certains cas exceptionnel, l’employeur de fait a la charge des obligations afférentes à la

médecine du travail. Lorsque l’activité exercée par le salarié nécessite une surveillance

médicale spéciale au sens de la réglementation relative à la médecine du travail, l’employeur

de fait, d’un salarié intérimaire ou d’un salarié d’un groupement d’employeurs, a la charge de

ces obligations1. L’arrêté du 11 juillet 1977 fixe la liste des travaux nécessitant une

surveillance médicale spéciale, on y trouve les métiers où certains produits chimiques sont

manipulés, des travaux exposés à un niveau de bruit supérieur à 85 décibels, travaux en

alternance de nuit,….L’employeur de fait, et lui seul, développe l’exercice de ses travaux. Il

est donc mieux placé pour en expliquer la teneur au médecin du travail, de plus ces travaux

1 Art. L. 127-3, al. 3 ; L. 124-4-6, al. 4 C. trav.

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engendrent une charge supplémentaire concernant la médecine du travail. Cette charge n’est ni

due ni voulue par l’employeur de droit, elle incombe donc à l’employeur de fait.

Concernant les obligations de l’employeur envers son salarié, le principe reste le suivant :

l’employeur de droit en à la charge. Mais à chaque situation l’employeur de fait peut être mis

en cause, il doit alors remplir ces obligations. L’employeur de droit et l’employeur de fait son

alternativement appelés à remplir les obligations d’un employeur vis à vis du salarié. Il existe

un certain partage des responsabilités. L’employeur n’est pas seulement débiteur d’obligations

à l’égard du salarié, il est également responsable, dans une certaine mesure, des agissements

de ce dernier.

§2 – Responsabilité de l’employeur.Le salarié est en situation de subordination juridique par rapport à son employeur, en

conséquence les règles de responsabilité son aménagées. C’est au droit civil que l’on fait ici

appel. Sur la base de l’article 1384 du Code civil la responsabilité de l’employeur peut être

mise en cause à l’égard des tiers. Cet article précise, en son alinéa 3, « les maîtres et les

commettants, » sont responsables « du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans

les fonctions auxquelles ils les ont employés ». Deux conditions sont nécessaires pour que la

responsabilité de l’employeur puisse être mise en cause : il doit bien exister une relation de

subordination et le dommage doit être causé par le salarié dans l’exercice de ses fonctions.

Les personnes pouvant être responsables sont soit le « maître » (B.) , autrement dit

l’employeur, soit le commettant (A.).

A – La responsabilité du commettant

Au sens de l’article 1384 du code civil, le commettant est une personne morale ou physique

qui exerce l’autorité sur le salarié et au service de l’exploitation de l’entreprise duquel le

salarié apporte son concours1. La qualité de commettant n’est pas forcément liée à l’existence

d’un contrat de travail. Dans le cadre d’une mise à disposition, l’utilisateur correspond à cette

définition. Il suffit d’établir l’existence d’un lien de préposition entre le salarié et l’utilisateur.

Ce qui caractérise ce lien c’est le pouvoir de direction, de surveillance et de contrôle

appartenant au commettant sur le salarié.

Aucun contrat de travail ne lie le salarié à l’utilisateur, cependant au cours de la mission

l’utilisateur à autorité sur le salarié. Le salarié doit respecter certaines prérogatives du

1 GAUDU (F.), La responsabilité civile du prêteur de main-d’œuvre : D. 1988, chron. P. 235

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règlement intérieur et l’utilisateur lui fourni le travail et détermine comment il doit être

exécuté. Le juge pourra considérer, en cas de faute du salarié à l’occasion de l’exécution de la

mission, que la responsabilité de l’utilisateur est engagée en tant que commettant. C’est le cas

par exemple lorsque l’intérimaire cause un préjudice au cours de sa mission et que le contrat

de mission précise que l’utilisateur est le commettant du salarié1. Si les conditions sont

réunies, l’utilisateur verra sa responsabilité engagée. Les finalités de ce texte sont à la fois

indemnitaires et préventives. La victime du dommage trouvera, en la personne du commettant,

une personne solvable ; ce qui n’est pas souvent le cas du salarié. Le fait que le commettant

sache que sa responsabilité peut être mise en œuvre le conduira à plus de prudence. Il ne peut

se contenter d’une attitude laxiste en raison de l’absence de lien juridique basé sur un contrat

de travail ; il fera attention à éviter les fautes du salarié.

A l’inverse, si les conditions ne sont pas réunies et que l’utilisateur ne peut être considéré

comme un commettant, c’est le « maître » donc l’employeur de droit qui sera responsable.

L’adjonction du terme « commettant » à l’article 1384, permet de mettre en jeu la

responsabilité de celui qui détient l’autorité réelle sur le salarié. Le commettant évité

cependant parfois que sa responsabilité ne soit engagée, dans le cadre du prêt de main-

d’œuvre. La responsabilité de l’employeur de droit est engagée sur la base d’un autre

fondement du droit civil.

B - La responsabilité de l’employeur

Nous resterons ici dans l’hypothèse de la faute du salarié aux temps et lieu d’exécution de la

mission. L’employeur de fait exerce une certaine autorité sur le salarié, preuve est apportée de

l’existence d’un lien de préposition, la responsabilité de l’utilisateur alors devenu commettant

peut être engagée.

L’employeur de droit et l’employeur de fait ont comme support juridique de leur relation le

contrat de mission, c’est une convention. L’article 1147 du Code civil précise, au titre des

dommages et intérêts résultants de l’inexécution d’une obligation, « le débiteur est condamné,

s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation,

soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution

provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune

mauvaise foi de sa part ». Le lien d’obligation requis par le texte existe, c’est le contrat de

1 Cass. Crim., 15 janv. 1985, n°82-92.628

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mission. Si l’utilisateur obtenir réparation du dommage causé par le salarié, il doit prouver

que la situation correspond au texte.

L’utilisateur doit prouver que le dommage causé par le salarié est causé à une mauvaise

exécution du contrat de mission. Dans le cadre de l’intérim, l’employeur de droit a une

obligation générale de prudence et de vérification des antécédents du salarié lors du

recrutement, envers l’employeur de droit. Cette obligation est renforcée à l’égard des salariés

appelés à exercer des fonctions de confiance ou de particulières responsabilités (gardiennage,

sécurité,…). L’article L.124-4 du code du travail fait même obligation à l’ETT de vérifier que

les salariés, recrutés en vue d’exercer des professions médicales ou paramédicale

réglementées, sont régulièrement autorisés à exercer la profession en question. Le niveau

d’exigence des vérifications concernant l’intérimaire sera fonction du niveau de responsabilité

confié à l’intérimaire. En cas de faute concernant cette obligation générale de prudence,

l’utilisateur pourra engager la responsabilité de l’employeur de droit au titre de l’article 1147

du Code civil.

Plus généralement si la faute commise dans l’exécution du contrat de mission est en rapport

direct avec le dommage causé par le salarié aux temps et lieu de la mission, c’est la

responsabilité de l’employeur de droit qui sera engagée.

Nous assistons ici à un véritable partage des responsabilités entre l’employeur de droit et

l’employeur de fait. La personne qui agit en responsabilité est un tiers à la relation de travail,

mais ce partage traduit bien la relation de travail triangulaire de travail. Le salarié est partagé

entre deux employeurs, même si un seul des deux est juridiquement son employeur. Des liens

se tissent entre le salarié et l’employeur à l’occasion de l’exécution de la mission. Le salarié

n’a pas d’interlocuteur unique lors de l’exécution de sa prestation de travail. Il ne sera en

relation avec l’employeur de fait que pour le temps de la mission ; ce dernier à un pouvoir

d’autorité sur le salarié mais il n’est pas son employeur. L’employeur de droit est lui subrogé

dans la plupart de ses droits et obligations au stade de l’exécution de la mission. L’employeur

de fait ressemble alors à un donneur d’ordre à caractère temporaire, l’employeur de droit est

lui un administrateur payeur.

Les rapports qui unissent le salarié à l’employeur de droit et à l’employeur de fait ne

ressemblent en rien à ceux qui unissent un salarié à son employeur unique. Ces rapports sont

discontinus, partiels : à quelle personne le salarié s’attachera comme à un employeur ? Cette

situation non clairement établie fragilise la vie du lien d’emploi. La dernière partie du tableau

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reste a dresser : les relations qu’entretien le salarié avec les syndicats ou encore les

représentants de salariés

Chapitre II – Rapports collectifs de travail

Tout salarié entretien des rapports avec son employeur mais également avec d’autres

personnes lors de l’exécution de son contrat de travail. Ces seconds rapports ne s’organisent

pas autour du lien de subordination et du contrat de travail. Les relations professionnelles,

opposées aux rapports de travail proprement dits, sont des relations de confrontation,

négociation, contrôle ou coopération, établies à la périphérie et pour le gouvernement des

rapports d’emploi1. Malgré la particularité des rapports de travail dans le cadre du prêt de

main-d’œuvre, salariés et employeurs n’échappent pas à la réalité des relations

professionnelles. Des acteurs autres que le salarié et les employeurs interviennent lors de

l’exécution de la prestation de travail, le salarié nouera des relations avec eux. Les rapports

entretenus avec ces acteurs sont une partie des rapports entretenu et correspondant à la vie du

lien d’emploi. Ils seront à l’étude afin de déterminer si leur forme renforce ou fragilise la vie

du lien d’emploi.

Nous allons, a nouveau, utiliser comme outil la comparaison. Tout salarié entretiens les

rapports définis ci avant ; comparons le statut du salarié de droit commun à celui du salarié

prêté pour déterminer les forces et les faiblesses du second. Il faut remarquer que l’activité de

portage et celle de travail à temps partagé offrent peut de réponses au niveau des rapports

collectifs de travail. Dans le cadre du portage ils doivent exister, mais mis à part l’existence de

syndicats recherchant la légalisation de l’activité ou son application en respect du droit du

travail, nous n’avons pu rassembler aucune information. Dans le cadre du travail à temps

partagé, aucune mesure spécifique n’a été prévue en matière de rapports collectif de travail.

Le gouvernement des rapports d’emploi contient deux dimensions. La première dimension est

la représentation du personnel (Section I.). La représentation est, en droit civil, « le procédé

juridique par lequel une personne, appelée représentant, agit au nom et pour le compte d’une

autre personne, appelée représenté »2. En droit du travail, le salarié bénéficie d’une

représentation à plusieurs niveaux et dans différentes fins. Mais la force de cette

1 JEAMMAUD (A.), LE FRIANT (M.), LYON-CAEN (A.), L’ordonnancement des relations de travail : D.

1998, chron. 359.2 GUILLIEN (R.), VINCENT (J.), préc.

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représentation est-elle la même en droit commun que dans le cadre du prêt de main-d’œuvre,

ou alors la particularité de l’activité de prêt de main-d’œuvre entraîne des particularités au

niveau de la représentation des salariés renforçant ou fragilisant cette dernière ?

Seconde dimension du gouvernement des rapports d’emploi : la négociation collective

(Section II.). La négociation collective permet aux destinataires du droit du travail d’élaborer,

pour partie, ce dernier ; ils sont acteur de la création des modes de régulation de l’activité

« travail ». La négociation collective rassemble « l’ensemble des discussions » et des accords

conclus en conséquence, « entre les représentants des employeurs ou des organisations

professionnelles d’une part, et des syndicats de salariés d’autre part »1. La négociation

collective joue à plusieurs niveau (national, de branche, entreprise établissement,…) et la

négociation est en elle-même soumise à un certain formalisme. Nous rechercherons la réalité

de la négociation collective dans le cadre du prêt de main d’œuvre.

Section I – La représentation des salariés

Les salariés prêtés bénéficient d’une représentation par différents acteurs et à des fins

différentes selon les acteurs. Le législateur cherche à assurer la représentation de ces salariés,

malgré leur situation particulière de partage de temps entre deux entreprises. Le cadre

(employeur de fait ou de droit) n’est pas toujours adéquat à la représentation du salarié.

Pourtant cette représentation est l’un des éléments nécessaire à la régulation des rapports

professionnels en droit du travail français. Nous allons rechercher si, malgré l’absence d’unité

de lieu de travail, le salarié prêté bénéficie d’une représentation à la hauteur des attentes.

Deux types d’acteurs concourent à la représentation du personnel. Les institutions

représentatives du personnel (ci après IRP), exercent leurs fonctions au niveau de l’entre prise

(§1.). Les syndicats eux, exercent leurs fonctions au niveau de l’entreprise également mais pas

uniquement (§2.)

§1 – Les institutions représentatives du personnelLes institutions représentatives du personnel sont limitativement énumérées par le droit du

travail. Les délégués du personnel (ci après DP), sont des représentants élus du personnel, ils

exercent leurs fonctions dans le cadre de l’entreprise ou de l’établissement. Ils sont chargés de

faire observer les conditions de travail et transmettre les réclamations du personnel à

l’employeur. Ils bénéficient d’un statut particulier et d’heures de délégations pour remplir1 GUILLIEN (R.), VINCENT (J.), préc.

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leurs fonctions. Le comité d’entreprise (ci après CE), est composé du chef d’entreprise et de

représentants élus du personnel. Il a pour but d’associer les représentant élus à la marche de

l’entreprise. Enfin, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail réunit

travailleurs élus, employeur et membres de l’administration du travail (ci après CHSCT). Il est

chargé de prévenir les accidents du travail, de veiller à l’application des règles de sécurité et

de contribuer à l’amélioration des conditions de travail.

Les employeurs dans le cadre du prêt de main-d’œuvre, n’échappent pas aux obligations

afférentes aux IRP. Cependant le salarié à une situation particulière, de partage de son temps

entre deux employeurs. Des règles particulières d’accès aux IRP existent pour ces salariés

(A.). De plus les IRP doivent mener des actions particulières envers les salariés prêtés (B.).

A – Conditions particulières d’accès

L’employeur de droit ainsi que l’employeur de fait sont soumis aux règles des IRP. Ils sont

donc tenus de mettre en place les DP, CE et CHSCT dès lors que sont atteints les seuils de

onze et cinquante salariés, rien de particulier a cela. C’est au stade de la prise en compte du

salarié prêté dans le décompte des effectifs qu’existe la particularité. Le législateur a pris en

compte la situation particulière du salarié et en a tiré des règles spécifiques. L’ordonnance du

24 juin 2004, réformé la mise en œuvre des dispositions du Code du travail faisant référence à

une condition d’effectif, les modalités de calcul des seuils sont harmonisées pour l’intérim et

les groupements d’employeurs. L’article L. 620-10 du Code du travail prévoit que les

travailleurs temporaires et de groupements d’employeurs sont pris en compte dans l’effectif de

l’entreprise utilisatrice « au prorata de leur temps de présence au cours des douze mois

précédents ».l’article L. 620-11 du Code du travail précise que les travailleurs intérimaires

sont pris en compte dans le décompte des effectifs de l’ETT dès lors qu’ils ont été liés « par

des contrats de travail temporaires pendant une durée totale d’au moins trois mois au cours de

la dernière année civile. Les salariés prêtés sont pris en compte, pour le décompte des

effectifs, au sein de l’entreprise utilisatrice et de l’entreprise de l’employeur de droit.

Des conditions particulières existent également quant à l’électorat et à l’éligibilité. L’intérim

et les groupements d’employeurs suivent des règles analogues. N’étant pas membres de

l’entreprise utilisatrice ils ne peuvent accéder aux élections en tant qu’électeurs ou éligible au

sein de l’entreprise utilisatrice. Ils sont, par contre, liés à l’employeur de droit par un contrat

de travail, ils peuvent être électeurs et éligibles à ce titre. Mais ils doivent alors respecter

quelques conditions d’ancienneté. Ils peuvent participer à l’élection des DP et du CE ; trois

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mois d’ancienneté au cours des douze mois précédents leur confèrent l’électorat, six mois

d’ancienneté au cours des 18 mois précédant la confection des listes leur confèrent

l’éligibilité 1. L’ancienneté est appréciée en totalisant les périodes au cours desquelles les

intéressés ont été liés à l’entreprise par un contrat de travail au cours de la période considérée.

La période est réduite six mois en cas de création d’entreprise ou d’ouverture d’établissement.

Les salariés prêtés sont pris en compte pour l’accès aux IRP, cependant ils doivent faire

preuve d’un certain attachement à la communauté de travail, traduit par leur temps de

présence dans l’entreprise.

B – Actions particulières des IRP

Les IRP ont des actions précises à remplir en présence de salariés prêtés.

Le CE de l’entreprise utilisatrice exerce un certain contrôle sur l’utilisation des travailleurs

temporaires. Il doit être consulté préalablement en cas de recours à l’intérim pour certains

motifs. Ces motifs sont le départ définitif d’un salarié sous CDI dont le poste sera supprimé.

La consultation porte alors sur la suppression du poste et sur l’utilisation en conséquence de

l’intérim. Le CE est consulté, ensuite, en cas de commande exceptionnelle à l’exportation ou

d’accroissement temporaire d’activité ou de tâche occasionnelle non durable. Le CE est ici

l’un des garant de la bonne utilisation de l’intérim.

Chaque trimestre dans les entreprises d’au moins 300 salariés et chaque semestre dans les

autres entreprises le CE est informé sur la situation de l’emploi. A ce titre l’employeur lui

indique le nombre de salariés temporaires dans l’entreprise et le nombre de jours effectués par

les salariés intérimaires pendant la période considérée2.

Le CE peut réagir en cas de nombre important de salariés intérimaire et il a un droit de

consultation sur la formation renforcée à la sécurité des intérimaires. Par ces possibilités

d’action, le CE de l’entreprise utilisatrice prend part à la gestion de l’utilisation de l’intérim.

Le CHSCT est lui consulté sur certains points : les demandes de dérogation à l’exécution de

travaux dangereux, l’établissement de la liste des postes présentant des risques particuliers et

les modalités d’accueil et de formation renforcée à la sécurité des titulaires de ces postes. Il

veille donc à la sécurité, à l’hygiène et à la bonne exécution des conditions de travail du

salarié prêté.

1 Art. L. 423-9, L. 433-6 C. trav.2 Art. L. 432-4-1 C. trav.

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Le DP peut transmettre les réclamations des salariés intérimaires non seulement au sein de

l’entreprise de l’employeur de droit mais également auprès de l’employeur de fait. Ces

revendications, individuelles ou collectives, doivent porter sur les problèmes de rémunération

et de conditions de travail, les moyens de transport collectifs et le bénéfice des installations

collectives1. Ceci est du à la similitude des situations du salarié au sein de l’entreprise

utilisatrice et de celle de son employeur.

Le législateur a pris connaissance de la particularité de la situation du salarié prêté, il en a tiré

des conséquences portant sur l’accès aux IRP et les fonctions particulières de ces derniers. Les

fonctions particulières des IRP eu égard aux salariés prêtés ont en général pour fonction de

prendre en compte ce salarié et d’améliorer son intégration au sein de l’entreprise. Cependant

l’accès des salariés aux IRP est limité par les textes. Il est déjà difficile de faire connaître

l’existence et le rôle des IRP aux salariés éclatés sur différents lieux de travail, à cela s’ajoute

des difficultés légales. Enfin il n’est pas aisé pour les IRP d’appréhender la situation de

salariés étalés en des lieux différents. Le syndicat rencontre-t-il les mêmes difficultés ?

§2 – Les syndicatsLe délégué syndical représente, dans l’entreprise, les intérêts du syndicat. A ce titre, il est

considéré par certain comme ne faisant pas partie des représentants du personnel. Mais on

peut opposer que se sont les salariés de l’entreprise, et eux seuls, qui deviennent délégués

syndicaux (ci après DS). Question intéressante : le salarié prêté peut-il devenir DS ? (A.). De

plus les syndicat ont un lien avec les salariés en cas d’action en justice (B.).

A – La fonction de délégué syndical

Un DS peut être désigné par tout syndicat représentatif dans une entreprise, dès lors que cette

dernière emploie au moins cinquante salariés, conformément à l’article L. 412-11 du Code du

travail. La loi ne défini pas précisément les compétences du DS, ils ont une fonction de

représentation et de défense des salariés syndiqués ou non, ils assurent la défense des intérêts

collectifs des salariés au sein de l’entreprise et peuvent donc présenter toute réclamation ou

revendication.

La prise en compte des salariés prêté dans le décompte des effectifs de l’entreprise au titre de

la mise en place des DS, suit les mêmes règles énoncées dans le paragraphe précédent. Les

salariés d’un groupement d’employeur et les salariés intérimaires sont pris en compte pour la

1 Art. L. 422-1, al. 2

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mise en place et donc l’accès aux DS, mais peuvent-ils devenir eux-mêmes titulaires des

fonctions de DS ?

Seuls les textes relatifs au travail temporaire précisent la possibilité, pour un salarié prêté, de

devenir DS au sein de l’entreprise de son employeur. Peut-être existe-t-il la possibilité pour

les autres salariés prêtés de devenir DS par analogie aux textes concernant l’intérim. L’article

L. 412-14 du Code du travail prévoit cette faculté, en son alinéa 2. Le salarié peut devenir DS

au sein de l’entreprise de son employeur si il rempli certaines conditions d’ancienneté,

condition de la preuve d’un certain attachement à l’entreprise. Il doit avoir rempli une

condition d’ancienneté de six mois. Hors le salarié intérimaire travaille rarement six mois

d’affilé pour l’ETT, l’ancienneté du salarié est appréciée en totalisant les périodes de mise à

disposition effective. La relation de travail de l’intérimaire n’est pas linéaire, elle est en

pointillés ; en conséquence, et pour prouver le lien d’attachement certain du salarié à

l’entreprise, les six mois d’ancienneté doivent être acquis au cours des dix-huit mois

précédant la désignation du DS. Le législateur a même démontré sa volonté d’une

représentation plus rapide d’un DS en cas de création d’entreprise ou d’ouverture

d’établissement ; le délai est alors réduit à six mois (précédant la désignation du DS).

Le salarié prêté est pris en compte au titre de la mise en place du DS et il peut même parfois

devenir lui-même DS. On cherche à créer des liens forts entre le DS et les salariés prêtés,

après tout le DS et le défenseur des intérêts collectifs des salariés. Mais le DS peut-il

facilement accéder aux informations concernant les salariés prêtés, sachant qu’ils ne sont sous

contrat de travail qu’au temps de l’exécution de la mission qui s’effectue dans les locaux

d’une autre entreprise. De même, le salarié a-t-il facilement accès au DS, connaît-il seulement

son existence, quelles informations a-t-il ? Afin de pallier à ces difficultés dues à

l’éloignement, l’article L. 412-8, alinéa 6, oblige l’employeur à remettre aux salariés prêtés les

communications syndicales, si besoin est par voie postale. Cette opération est aux frais de

l’employeur et doit être respectée au moins une fois par mois.

Le salarié peut devenir DS dans l’entreprise de son employeur, mais si il ne l’est pas il doit

être informé par l’employeur des communications syndicales. Le salarié intérimaire peut

prendre conscience plus facilement d’appartenir à la collectivité des salariés. Autre présence

du syndicat auprès des salariés : l’action en justice.

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B – L’action en justice

Le syndicat peut agir en justice, tout d’abord pour défendre ses intérêts propres, pour défendre

les intérêts du salarié et enfin pour défendre les intérêts collectifs de la profession. Le premier

et le troisième type d’action, n’offrent pas de particularité dans le cadre du prêt de main-

d’œuvre. En revanche l’action exercée au nom du salarié est plus intéressante, en ce qu’elle

concerne la faculté directe de défense des intérêts personnels du salarié par le syndicat. Par

souci d’assurer l’exercice réel des droits et actions des salariés, le syndicat est autorisé à

mener ce type d’action en justice contrairement aux principes de droit français1. Le syndicat,

si il est représentatif, peut agir au nom du salarié, même si ce dernier n’appartient pas au

syndicat concerné, dans certains cas.

Les articles L. 124-20 et L. 127-6 du Code du travail offrent la possibilité pour le syndicat

d’agir en justice au nom du salarié intérimaire ou du salarié d’un groupement d’employeurs.

Le syndicat pourra agir afin de faire respecter la réglementation relative au travail temporaire

et aux groupements d’employeurs. Le syndicat n’aura pas à justifier d’un mandat exprès du

salarié, cependant il doit en avertir le salarié et ce dernier ne doit pas s’y être opposé. Le

syndicat doit apporter la preuve de l’absence de refus du salarié, si dans les quinze jours

suivant l’information au salarié, ce dernier n’a pas exprimé de refus il sera considéré comme

ne s’y opposant pas. Le salarié peut toujours intervenir à l’instance.

Il faut ajouter que non seulement le syndicat se trouvant au sein de l’entreprise de l’employeur

peut agir mais également celui de l’entreprise utilisatrice. Le syndicat né chez l’utilisateur a

une meilleure connaissance du lieu d’exécution du travail, de l’employeur de fait et de la

situation de l’intérimaire. Sa capacité d’agir en justice est donc importante. Le souci de

protéger le salarié prêté sur son lieu d’exécution du travail est en partie assuré.

Sur le plan de la représentation du salarié, le prêt de main-d’œuvre fait preuve de

particularisme. Le souci constant est d’assurer une meilleure représentation malgré la situation

d’éloignement. Mais parfois ce souci conduit à distribuer les compétences des représentants

entre l’entreprise utilisatrice et l’entreprise de l’employeur. Le salarié est déjà en situation

d’éloignement de son employeur, la complexité de la situation ne l’incitera pas plus à se

rapprocher de ses représentants. Les rapports entre salarié et représentants ne sont pas facilités

par l’organisation de l’activité du salarié. La présence du tiers ne renforce pas ces rapports, au

contraire elle les fragilise ; c’est encore ici un exemple de fragilité causé au lien d’emploi par

1 « Nul en France ne plaide par procureur. »

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la présence du tiers. Etudions maintenant le second pan des rapports collectifs de travail : la

négociation collective.

Section II – La négociation collective

La négociation collective est, en un sens strict, l’ensemble des discussions menées par les

représentants des employeurs et ceux des salariés, en vue de conclure une convention

collective. Les parties à cette convention sont d’une part les représentants des employeurs ou

des organisations professionnelles, et d’autre part les syndicats représentatifs de salariés. La

convention collective, résultat de ces discussions, présente une nature hybride. Elle a tout

d’abord la nature contractuelle de toute convention, mais elle a ensuite vocation à s’appliquer

à des personnes qui ne sont pas parties au contrat : c’est sa nature normative. La convention

collective peut concerner différents niveaux de négociation, sont concernés les niveaux

interprofessionnels, de branche au plan national, régional ou local, l’entreprise,

l’établissement et parfois le groupe. La diversité de ces niveaux fait de la convention

collective un instrument plus ou moins adaptable aux situations concrètes. De plus les

destinataires de ces règles peuvent être les acteurs principaux de leur élaboration. La présence

de négociation peut être le symbole de comportement actif des acteurs du monde du travail.

En ce cas les acteurs témoignent de leur intérêt à discuter ensemble et à négocier : la vie du

lien d’emploi prend une dimension différente et plus large de mise en relations des acteur du

monde du travail.

Ce qui était recherché dans cette partie, c’était les signes d’une telle implication des acteurs du

prêt de main-d’œuvre dans l’organisation de ce dernier. Malheureusement, cette partie ne fera

l’objet que de courts développements. La négociation collective intéresse peu les acteurs du

prêt de main-d’œuvre, l’essentiel de cette activité est réglementé par les textes réglementaires

et législatifs. Nous n’avons pu trouver que peu d’éléments d’information au titre de la

négociation collective. Le travail à temps partagé n’est même pas encore appliqué, il peut

difficilement faire l’objet de négociations. Le portage salarial, au niveau de la négociation

collective, reste un grand mystère, nous n’avons récolté aucune information à ce sujet. Aux

vues du nombre d’informations collectées la présente partie ne fera l’objet que de deux points.

Si la plupart des acteurs du prêt de main-d’œuvre ne font pas preuve d’intérêt à l’égard de la

négociation collective, le travail temporaire fait lui l’objet de négociations (§1.). Les

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groupements d’employeurs ont, eux certaines obligations à remplir en terme de convention

collective (§2.).

§1 – Travail temporaire et négociation collectiveLe travail temporaire est l’objet de nombreuses conventions collectives, elles concernent des

thèmes variés et ont des buts différents.

Le premier but que l’on peut citer est l’organisation générale du travail temporaire, le

législateur ne peut tout réglementer l’intervention des partenaires sociaux est alors

structurante. A titre d’exemple on peut citer l’accord national sur le droit syndical dans le

travail temporaire, en date du 15 août 1985. Ce type d’accord à vocation à être étendu par

arrêté, afin de constituer des règles générales relatives à l’organisation du travail temporaire.

L’accord précédemment cité a, par exemple, été étendu par arrêté du 6 août 19851.

Second type de conventions collectives sont relatives à la protection du salarié du fait de sa

situation précaire, notamment : la formation professionnelle, la formation des intérimaires au

regard des risques professionnels, la médecine du travail, …

Les syndicats représentatifs de salariés, après avoir eu une attitude de méfiance et de rejet à

l’égard de l’intérim, se sont emparés du sujet dans le but d’assurer une meilleure protection et

de meilleures conditions de travail aux salariés. Coté employeur, l’organisation s’est faite

autour d’un syndicat principalement : le syndicat des entreprises de travail temporaire. Les

acteurs du prêt de main-d’œuvre sont en relation constante, ils négocient et donc s’emparent

de leur propre législation. Du coté salarié on note que le but essentiel et la protection du

salarié précaire. Coté patronal il est difficile de déterminer les raisons qui poussent à la

négociation.

Seul est unique exemple d’utilisation de la négociation collective, le travail temporaire devrait

peut-être servir de modèle aux autres formes de prêt de main-d’œuvre.

§ 2 – Groupements d’employeur et négociation

collectiveL’article L. 127-1 précise que tous les membres d’un groupement d’employeurs doivent entrer

dans le champ d’application d’une même convention collective. Mais le principe supporte une

exception, des entreprises n’entrant pas dans le champ d’une même convention collective

peuvent constituer un groupement d’employeurs à condition qu’elles déterminent la

1 JORF, 15 août 1985.

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convention collective applicable au groupement1. Il existe donc un principe d’unité

conventionnelle, les salariés du groupement bénéficieront de la convention collective

déterminée. De plus, cette obligation attache des garanties au statut des salariés, ils

bénéficieront tous de dispositions contractuelles améliorant et précisant le régime légal des

groupements d’employeurs.

Mais cette obligation est un frein à la création des groupements plurisectoriels, en ce qu’elle

crée des difficultés pour eux. Le choix de la convention collective est laissé libre, à condition

qu’elle soit adaptée aux classifications et niveaux d’emploi des salariés ainsi qu’à l’activité

des différents membres du groupement. Ce choix risque d’être compliqué. De plus, si un

nouvel adhérent souhaite se joindre au groupement, il serait préférable qu’il corresponde au

choix de la convention collective.

Le choix de la convention collective peut en lui-même être une difficulté. Le choix d’une

convention collective trop contraignante dissuadera certains employeurs d’adhérer, une

convention moins contraignante n’en sera que peut protectrice pour les salariés.

Dès lors on peut se poser la question d’une convention collective générale aux GE. Mais la

diversité des secteurs d’activité des GE est un frein certain. Comment dresser un cadre assez

souple pour embrasser toutes les situations et en même temps assurer un minimum de

protection aux salariés ? Nous avons eu connaissance d’une expérience de convention

collective inter groupement dans le Pas-de-Calais mais les résultats en sont introuvables.

Si la situation de la négociation collective est au point zéro, dans le cadre du prêt de main-

d’œuvre c’est aussi en raison de la multiplicité des situations qu’il recouvre. Quelques soient

les raisons, l’étude de la négociation collective dans le cadre du prêt de main-d’œuvre laisse

supposer, par manque d’informations, que la collectivité de travail en cette situation ne

recherche pas, ou peu à s’organiser, fragilisant ainsi pour partie la vie du lien d’emploi.

1 Art. L. 127-7 C. trav.

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RAPPEL ET SYNTHÈSE DES

CONCLUSIONS INTERMÉDIAIRES :

La présence du tiers à la relation de travail, tour à tour, renforce et fragilise le lien d’emploi.

Si le salarié est aidé dans la recherche d’un emploi, il se verra cependant attribuer un emploi

précaire. De cet emploi précaire naît une relation de travail en pointillés avec l’employeur de

droit. Quant à la présence de deux employeurs, elle ne donne pour conséquence qu’un partage

des obligations, droits et responsabilités. Le salarié n’a pas d’interlocuteur unique. Enfin ces

relations collectives de travail sont entachées du caractère de la mise à disposition. Le salarié

est peu ou mal intégré à la communauté de travail. Les acteurs du prêt de main-d’œuvre

songent même peu à s’impliquer dans l’élaboration des règles les gouvernant. Mais ces formes

de prêt de main-d’œuvre sont relativement récentes, les acteurs s’empareront peut-être, à

l’image de l’intérim, de l’occasion de la négociation collective.

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Table des matières

Table des abréviations........................................................................................3

Introduction.........................................................................................................5

titre i – LA création du lien d’emploi et le tiers..............................................8CHAPITRE I – L’ACTIVITÉ DE RECRUTEMENT.................................................................................................................9

Section I – La particularité de l’embauche..................................................................................................10§1 – La procédure de recrutement............................................................................................................................10

A – Recrutement aux critères de sélection allégés ..............................................................................................11B – Recrutement aux critères de sélection renforcés...........................................................................................13

§2 – La conclusion du contrat de travail...................................................................................................................15A – Un contrat de travail de type particulier.......................................................................................................16B – Le portage salarial........................................................................................................................................18

Section II – Les limites introduites par la loi................................................................................................20§1 – Interdiction légale de principe..........................................................................................................................20

A – Etendue de la prohibition.............................................................................................................................20B – Impact de la prohibition...............................................................................................................................22

§2 – Légalisation encadrée.......................................................................................................................................24A – Contraintes sur l’employeur.........................................................................................................................25B – Contraintes d’application.............................................................................................................................26

CHAPITRE II – L’ EMBAUCHE ET L’ACCÉS À L’EMPLOI...................................................................................................29Section I : la logique du « placement »........................................................................................................29

§1 – Les raisons de cette activité..............................................................................................................................30A – Le prêt de main-d’œuvre comme solution....................................................................................................30B – La main-d’œuvre comme variable................................................................................................................32

§2 – La forme de cette activité.................................................................................................................................33A – Les relations employeur utilisateurs.............................................................................................................33B – Les outils au placement................................................................................................................................35

Section II – la concrétisation du placement..................................................................................................39§1 – Le contrat de mission.......................................................................................................................................40

A – Encadrement du contrat de mission..............................................................................................................40B – Liberté dans le contrat de mission................................................................................................................42

§2 – L’échec du placement.......................................................................................................................................43A – L’absence de mission...................................................................................................................................43B – L’entre deux missions...................................................................................................................................44

titre II – la vie du lien d’emploi et le tiers.......................................................46CHAPITRE I – RAPPORTS INDIVIDUELS DE TRAVAIL .......................................................................................................47

Section I – Exécution de la prestation de travail..........................................................................................47§1 – Le lien juridique particulier..............................................................................................................................47

A – Autorité sur le salarié...................................................................................................................................48B – Conditions d’exécution du travail.................................................................................................................49

§2 – Le principe d’égalité.........................................................................................................................................50A – Equipements collectifs.................................................................................................................................50B – Rémunération...............................................................................................................................................51

Section II – Survivance du lien salarial........................................................................................................53§1 – Obligations de l’employeur..............................................................................................................................53

A – La rémunération...........................................................................................................................................53B – La médecine du travail.................................................................................................................................55

§2 – Responsabilité de l’employeur.........................................................................................................................56A – La responsabilité du commettant..................................................................................................................56B - La responsabilité de l’employeur..................................................................................................................57

CHAPITRE II – RAPPORTS COLLECTIFS DE TRAVAIL .......................................................................................................59Section I – La représentation des salariés....................................................................................................60

§1 – Les institutions représentatives du personnel...................................................................................................60

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A – Conditions particulières d’accès...................................................................................................................61B – Actions particulières des IRP.......................................................................................................................62

§2 – Les syndicats....................................................................................................................................................63A – La fonction de délégué syndical...................................................................................................................63B – L’action en justice........................................................................................................................................65

Section II – La négociation collective...........................................................................................................66§1 – Travail temporaire et négociation collective.....................................................................................................67§ 2 – Groupements d’employeur et négociation collective.......................................................................................67

Rappel et synthèse des conclusions intermédiaires : .....................................69

Bibliographie :...................................................................................................70OUVRAGES GÉNÉRAUX.............................................................................................................................................70OUVRAGES SPÉCIAUX, THÈSES, MONOGRAPHIES :..........................................................................................................70DICTIONNAIRE, ENCYCLOPÉDIE :................................................................................................................................71ARTICLES, CHRONIQUES, ÉTUDES DOCTRINALES............................................................................................................71RAPPORTS, AVIS......................................................................................................................................................72

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